[ Page principale | Nouveautés | La Bible | la Foi | Plan des sujets | Études AT | Études NT | Index auteurs + ouvrages + sujets ]
Méditations sur la Parole de Dieu
Louis Chaudier
Table des matières :
1 Deux paradis — Genèse 3:22-24 ; 4:8-22 ; Apocalypse 22:14-15 ; Jean 14:6 ; Matthieu 7:13-14
3 L’épreuve — Exode 15:20-27, 10, 12 ; 17:8, 15-16 ; 2 Corinthiens 12
5 Avec Dieu dans le désert — Exode 15:22-27 ; 16:25-31 ; 17
6 Mara — Exode 15:22-27 ; 16:1-6, 9-18, 20, 23-36 ; 17
7 Le lépreux — Lévitique 13:1-20, 24, 29, 45-59 ; 14:1-20
8 Le Nazaréat — Nombres 6 ; Juges 13:4-5 ; 16:13-31
9 La traversée du désert — Nombres 10:33-36 ; 11:1-9
11 L’école de Dieu — Nombres 13:18 à la fin ; 14 ; Josué 14:6-15
12 Balaam — Nombres 22:1 à 25:4 ; 31:1-4, 7-8, 16
14 Étapes du voyage, exercices du pèlerinage — Nombres 33
16 Pâque, mer Rouge, Jourdain, Guigal — Josué 1:1-9 ; 4 ; 5:9-15
18 Guilgal, Bokim — Josué 5 ; Juges 2:1-5
19 Le peuple dans le pays promis — Josué 5:1, 2, 9-15 ; 6:1-3, 6-27
20 Le péché qui entraine la défaite — Josué 7
21 Gédéon — Juges 6:1-35 ; 7:1-25 ; 8:33-35
22 Éli et ses enfants — 1 Samuel 2:12 ; 3 ; 4
23 La vie de David — 1 Samuel 7:6… ; 2 Samuel 2:2-7, 47-50, 51 ; 3:2-7
24 David et Goliath — 1 Samuel 17
25 Les péchés de Jéroboam — 1 Rois 12:25 à la fin ; 13 ; 2 Rois 23:15-18
27 La vie avec Dieu — Psaumes 27:4-5
29 Pauvre en esprit — Psaumes 51:17 ; 139:23-24 ; Ésaïe 66:2 ; Matthieu 5:3
30 L’habitation de Dieu avec les hommes — Psaume 84
31 Malheur à moi ! — Ésaïe 6:1-8 ; Romains 12:1-2
32 L’espérance de la gloire — Ésaïe 11:1-10 ; 32:1-4, 14-18 ; 60 ; Apocalypse 21
33 L’Assemblée et la séparation — Jérémie 15:16-21 ; Matthieu 18:1-4, 18-20 ; 20:25-28
38 Le brigand sur la croix — Matthieu 11:25-30 ; Luc 23:39-46
39 Avoir affaire avec Dieu — Matthieu 11:29-30 ; Colossiens 1:9-11 ; Galates 5:16-26 ; 2:19
40 Préparé par Dieu, séparé pour Dieu — Matthieu 12:22-50 ; 13:1-9, 18-23, 47-50
41 Le travail du Seigneur Jésus — Matthieu 13:1-9, 18-52
43 Se renoncer soi-même — Matthieu 16:21-27 ; Exode 15:22-27
45 L’amour — Matthieu 22:34-40 ; Lévitique 19:14-18
46 Suivre Jésus ici-bas — Marc 9:42-51 ; 10:13-40, 46-52
47 Les rencontres du Seigneur avec une âme — Luc 5:1-11 ; 7:36-50 ; 18:39-43
48 Pécheur et adorateur — Luc 7:35-50
49 Marthe et Marie — Luc 10:38-42 ; Jean 11:1-2, 17, 20-26, 28-29, 32-35, 39-44 ; 12:1-3, 7-8
50 Défaillances — Luc 22:31-34, 54-62 ; Jean 21:15-19 ; Galates 2:6-14 ; 2 Pierre 1:13-14
52 Demeure avec nous ! — Luc 24:29-35
53 Connaître Christ — Jean 1 et 2
55 Affranchissement — Jean 2:19 ; Romains 6:4
56 Face à face avec Jésus — À propos de Jean 3 ; 4 ; 11 ; Luc 10:38-42
57 Manifestations du Saint Esprit dans l’âme — Jean 3
58 Un sens à la vie — Jean 4:1-34
60 Gloire des hommes et gloire de Dieu — Jean 5:44
61 Mort pour le monde et vivant pour Dieu — Jean 6 ; 7:34-37
62 Salut et communion — Jean 6
63 La guérison de l’aveugle-né — Jean 9
64 Le lavage des pieds — Jean 13:1-30
67 Je m’en vais au Père — Jean 14:16 ; 16:7, 28
68 L’envoi du Saint Esprit — Jean 16
69 Le chrétien et le monde — Jean 17:14 ; 1 Jean 2:15
70 Ce qui vient de Dieu — Jean 20:11-16
71 La manifestation de l’Esprit sur la terre — Divers passages des Actes
72 Méditation sur l’Assemblée — Actes 2:42 ; 9:31 ; Éphésiens 4:8, 11-16 ; 1 Timothée 3:1-15
73 Nos intérêts et ceux du Seigneur — Actes 4:32-37 ; 5:1-11 ; 20:24-38 ; 1 Cor. 5
74 L’évangile de Dieu — Romains 1:16-19 ; 3:9-26 ; 5:1-7, 10-11 ; 6:1-4, 6-7, 10-14, 22-23 ; 8:12-17
77 La justification et la mise à mort du vieil homme — Romains 6:4-14, 20-23 ; 8:1-12 ; 12:1
78 La mort, force du croyant — Romains 6:4, 6, 11, 12, 14 ; 8:12-14 ; Éphésiens 6:10-20
80 Dans la chair ou dans l’Esprit — Romains 7:7-25 ; 8
81 Faire mourir la chair — Romains 8:12-14 ; Éphésiens 6:10-18 ; 1 Jean 2:12-17
82 L’activité de l’Esprit — 1 Corinthiens 2:10-16 ; 12:1-13, 26, 27, 31 ; 14:3, 15, 32, 40
83 La présence du Saint Esprit dans le croyant — 1 Corinthiens 6:19-20 ; 2:10-16 ; Jean 16:13-15
84 La cellule familiale — 1 Corinthiens 11:1-19 ; Éphésiens 5:22 à 6:4
86 Le travail de l’Esprit dans l’Assemblée — 1 Corinthiens 12
87 Les dons de grâce, les dons spirituels — 1 Corinthiens 12:28-31 ; Éphésiens 4:11
88 Manifester la vie de Dieu — 2 Corinthiens 1:3-5, 8-10 ; 2:12-17 ; 3:1-6, 18 ; 4
89 Un trésor dans des vases de terre — 2 Corinthiens 4 ; 5 ; 6:2-11
90 Tristesse et joie — 2 Corinthiens 6:9-10 ; 7:9-12 ; Galates 5:22 ; Éphésiens 4:30 ; Hébreux 12:11
92 Marcher droit — Épître aux Galates
95 La croix pour le chrétien — Galates 2:20
96 Servir selon Dieu — Galates 4:16 ; 5:1, 11-14, 16-26 ; 6:1-18
97 Le mal dans le vieil homme — Galates 5:11, 16-26 ; 6:7-8, 14 ; Romains 6:4-7, 11-12, 14, 18, 22
98 Bénédictions divines et célestes — Divers passages de l’épître aux Éphésiens
99 Les rapports du chrétien avec Christ — Éphésiens 1 ; 3 ; 4
100 Intégrité morale — Éphésiens 1:3, 22 ; 2:18-22 ; 4:1-3, 11, 25 ; 6:10-18
101 L’ordre divin dans l’assemblée — Éphésiens 1:19-23 ; 2:19-22 ; 3:9-10 ; 4:10-12 ; 6:12-13
104 Les principes du rassemblement des chrétiens — Éphésiens 2:1-7 ; 4:1-4, 8 ; 6:10-18
105 Un christianisme vivant — Éphésiens 2:4-7 ; 4:20-31 ; 5:18-19
107 Le chrétien séparé — Éphésiens 4:1-4
108 L’état d’homme fait — Éphésiens 4:11-16, 20-24 ; 5:1-21 ; 6:10-18
109 Marcher selon la vérité — Éphésiens 4:20-32 ; 5:1-23, 25, 33 ; 6:1-9 ; 1 Timothée 3:1-15
110 Le mariage chrétien — Réunion de mariage : Éphésiens 5:22-33 ; 1 Pierre 3:1-7
111 Christ et l’Assemblée — Éphésiens 5, du milieu du verset 25-27, 28-30, 32
112 Combats — Éphésiens 6:10-24 ; Galates 5:16-18 ; Jude 3-4 ; Colossiens 4:12-13
113 Vivre dans les lieux célestes — Éphésiens 6:10-20, 23-24
114 Le combat chrétien — Éphésiens 6:10-18
115 L’expérience de Paul — Quelques versets de l’épître aux Philippiens
116 Rechercher la communion avec le Seigneur — Philippiens 1
118 Le christianisme pratique — Philippiens 1:9-11, 20-24 ; 2:12-15 ; 3:1-8 ; 4:4-14, 23
119 Vivre pour Christ seul — Philippiens 1:20-23 ; 2:5-11, 12, 21 ; 3:7-8 ; 4:6, 12-14
120 Le vouloir et le faire — Philippiens 2:13
121 J’ai appris — Philippiens 4:4-14
122 La marche selon Dieu — Colossiens 1:9-10 ; 2:20 ; 3:1-4, 17 ; 4:2, 5-6, 12
123 Les tribulations et le témoignage — 1 Thessaloniciens 1:6-10 ; 2:17-20 ; 3:11-13 ; 4:13-18 ; 5
124 Coeur pur et bonne conscience — Réunion d’étude sur 1 Timothée 1:5-15
127 Les ressources du chrétien — Quelques pensées sur la deuxième épître à Timothée
130 Esprit de puissance, et d’amour et de conseil — 2 Timothée 1:7,14 ; 3:1-5
131 Le bon dépôt — 2 Timothée 1:14-15 ; 2:19-22 ; 4:3-8
132 Communion et séparation — 2 Timothée 2:19-24
133 Rejetant tout fardeau — Hébreux 4:12-16 ; 12:1-2 ; 1 Jean 2:1-3
134 Les sacrifices de la foi — Hébreux 10:32-39 ; 11:1-10, 16-19, 24-40, 12:1-3 ; 13:12-14
135 Les expériences de la foi — Hébreux 11 ; 12:1-17
136 La foi — Hébreux 11 ; 12:1-3
137 La marche de la foi — Hébreux 11:1-4, 7-8, 16, 23-25, 28-30, 32-37 ; 12:1-2
138 L’épreuve de la foi et l’exemple de Jésus — Hébreux 11:32-40 ; 12:1-17
139 Jésus modèle parfait de la foi — Hébreux 12:1-3
141 Nos conducteurs — Hébreux 13:7-8, 17
142 Une morale de tous les temps — Jacques 1 ; 2:1-14 ; 3:13-18 ; 4:1-6, 13-15 ; 5:7-8, 10-20
143 La loi du chrétien — Jacques 1 et 2
144 La foi pratique — Jacques 1 et 5
146 Les oeuvres de la foi — Jacques 1:2-8, 12-18 ; 2:14-26
148 La conduite — 1 et 2 Pierre
149 Élus, rachetés, achetés — 1 Pierre 1
150 Le contrôle de la chair dans le service chrétien — 1 Pierre 4:7-11, 17, 19 ; 5:1-11
151 Dieu, source de l’amour — 1 Jean 2:5 ; 4:7-21 ; 5:1-3
152 L’encouragement de la foi au milieu de la ruine — Jude 17-25
153 Éphèse, Smyrne, Pergame — Réunion d’étude sur Apocalypse 2:1-17
154 Déclin — Apocalypse 2:18-29 ; 3
155 Thyatire, Sardes, Philidelphie et Laodicée — Apocalypse 2:18-29 ; 3
156 Thyatire, Sardes, Laodicée — Apocalypse 2:18-29 ; 3:1-22
157 Les caractères de l’Église responsable jusqu’à Laodicée — Apocalypse 3
158 Le Seigneur suit ses assemblées — Apocalypse 3:1-22
160 Philadelphie et le Réveil — Apocalypse 3:7-12
162 Le jugement de la prostituée et les noces de l’Agneau — Apocalypse 17 ; 19 ; 21:1-8 ; 22:14-21
163 Babylone et l’Assemblée, Épouse de Christ — Apocalypse 17 ; 18:2-4, 20 ; 19:19 ; 20:6 ; 22:11-21
166 Séparation, unité, ruine de l’Église
167 Les dons de grâce de l’Esprit
170 Délivrance, et action de l’Esprit
171 Action de l’Esprit dans le croyant
172 Communiquer des choses spirituelles par des moyens spirituels — 1 Cor. 2:13
Le texte de ces méditations a été révisé par Bibliquest dans sa forme, par rapport à diverses éditions papiers précédentes. Les révisions ont été limitées à ce qui était nécessaire à une expression et une compréhension correctes. Le texte reste marqué par son caractère oral, non révisé par l’auteur. Dans certains cas d’expressions au sens discutable, l’imperfection de celles-ci a été laissée de peur d’en perdre une certaine vigueur.
Certains textes ont été repris de l’ouvrage «Méditations sur la vie chrétienne» édité en 1995 par F.R., et sont notés comme tels. Ces textes ont fait l’objet (par F.R.) d’une révision un peu plus poussée.
[LC n° 1]
26 avril 1964
Méditations sur la vie chrétienne, édition FR 1995, p. 9
Les premiers chapitres de la Genèse sont d’un extrême intérêt. Les hommes sont bien embarrassés avec des passages comme ceux-là. Il n’y a pas eu de témoin. Il y en a eu pour ce qui concerne la vie de Jésus, par exemple, quoique, en dehors d’une explication et d’une compréhension spirituelles des choses, il ne faille pas nous attendre à un témoignage profitable. Mais pour la création, il n’y a pas de témoin parce qu’il ne pouvait pas y en avoir. Le seul témoin est Celui qui parle. Il laisse tomber ses paroles comme des oracles avec une simplicité qui ne fait que confirmer leur autorité absolue. Il connaît tout à fond parce qu’il a lui-même tout créé. L’Écriture donne au chrétien des réponses sûres aux besoins de son esprit, de son coeur et de sa conscience ; seul il connaît l’explication véritable de cette énigme que constitue le monde dans son état actuel.
L’homme est un être étrange : il a des besoins très élevés, il connaît le bien et le mal et il ne peut pas éliminer de son esprit cette connaissance mystérieuse. C’est sa caractéristique essentielle, bien plus noble que son aptitude à penser ; en cela, il ressemble à Dieu. Il connaît le bien et le mal d’une façon intrinsèque, sans qu’une loi lui impose la distinction entre ce qui est bien et ce qui est mal, même si parfois sa conscience est oblitérée. Il est impossible à l’homme de chasser de son esprit la voix de sa conscience. Cette faculté témoigne qu’il est différent d’une bête. Un enfant très jeune a déjà des réactions qui trahissent l’activité de sa conscience. La lumière entre dans l’homme par la conscience, non par la pensée ou par un effort mental : c’est l’erreur des rationalistes, qui tous aboutissent à une impasse. On ne découvre pas Dieu par la pensée, mais par la conscience. Dieu nous parle d’une façon suffisante, mais très sommaire, des profonds secrets de sa création. En revanche, la Bible toute entière abonde et surabonde en considérations et instructions relatives au bien et au mal. La Parole de Dieu, c’est cela ; c’est ce qui la distingue de tous les livres humains, c’est ce qui la dresse contre tous les livres humains. Si vous parlez à des gens instruits de telle question relative à la création, leurs oreilles s’ouvrent ; ils sont flattés de se considérer comme des dieux capables d’expliquer certains phénomènes de la sphère dans laquelle ils se meuvent et qu’ils estiment être leur propriété. Mais dès que vous touchez la question du péché, vous ne trouvez plus d’oreille pour vous écouter. Or l’Écriture ne parle, au fond, que de cela. On n’aurait pas besoin de la grâce s’il n’y avait pas de péché. La grâce entre en scène parce que le péché l’a précédée. Dieu est trop bon pour nous amuser avec des questions secondaires, comme la création d’un monde qu’il détruira un jour, ou la création de l’homme qu’il détruira aussi dans sa forme actuelle.
La Parole de Dieu est entièrement consacrée aux activités divines à l’égard de la misère qui a fondu sur l’humanité, un des tout premiers jours de la création, en raison d’un péché jugé aujourd’hui dérisoire. Ce n’est pas par convention que les frères le disent, probablement plus et mieux que la plupart des vrais chrétiens d’ailleurs ; s’ils sont vrais devant Dieu, ils le disent par une profonde conviction intérieure : l’homme est un être perdu, et Dieu nous a raconté l’histoire tragique de cette chute. Les moralistes sentent bien qu’il faut regarder cette misère en face, le mensonge, la souffrance, la maladie, la mort. Toutes les couches sociales sont touchées, de l’homme le plus frustre à l’homme le plus raffiné. L’Écriture est claire, il n’y a pas de différence. Le reste est un vernis dont on revêt un matériau perdu. Les frères et les soeurs âgés ont pu l’apprendre en apprenant à se connaître eux-mêmes ; mais je dis cela aux jeunes pour que le monde ne les détourne pas ; ils ont à portée de mains le seul foyer de lumière qui existe dans ce monde couvert de ténèbres.
L’homme est tombé ; Ève a désobéi, Adam l’a suivie. C’est la fin de l’accès à ce paradis d’innocence. Même un enfant n’est pas innocent, dans le sens essentiel du mot ; un enfant ou un homme est innocent à l’égard d’un acte auquel il n’a pas participé. Mais devant Dieu il n’y a pas d’innocence, c’est fini depuis longtemps. Notre conscience nous fait honte du mal que nous ne pouvons pas ne pas faire, même si les hommes se jettent dans les plaisirs ou dans les affaires pour se fuir eux-mêmes.
Le premier couple est chassé hors du paradis. Ce qui est arrivé après cette aube tragique n’est pas moins solennel ; un frère tue son frère. Et pourquoi donc ? «Parce que ses oeuvres étaient mauvaises et que celles de son frère étaient justes» (1 Jean 3:12). Le premier crime a été commis par haine religieuse. Nous sommes descendants d’Adam et Ève ; nous sommes dans le même état moral que Caïn qui a rougi ses mains du sang de son frère. Après la première faute, une seconde : la violence ! Toutes les vagues du mal qui ont suivi celle-là en portent l’image. La jeunesse chrétienne doit veiller à éviter tout contact avec le mal, bien qu’il soit plus difficilement évitable aujourd’hui qu’autrefois.
Caïn est ainsi emporté dans le chemin de la malédiction ; c’est l’histoire du monde. Qu’est-ce que cela peut nous faire qu’il y ait eu, dans l’Égypte ancienne, telle ou telle dynastie, même si certains sont obligés de s’instruire pour faire face à leurs charges professionnelles ? Mais que nos premiers parents soient responsables du meurtre commis par un de leurs enfants, c’est une leçon morale de la plus haute valeur, permanente, universelle et définitive pour l’humanité. Si nous maintenons ce fait biblique que l’humanité ne peut pas être améliorée, ne nous attendons pas à pouvoir partager cette conviction avec tout le monde, même pas avec les personnes convenables et de qualité, même pas avec toutes les personnes véritablement chrétiennes. Certaines d’entre elles n’ont pas abandonné l’espoir d’effacer les traces des crimes de l’homme écrites sur le frontispice de l’humanité par le doigt de Dieu. Le chrétien apprend, dans l’expérience de sa vie, l’exactitude de l’affirmation de Paul, homme de haute valeur morale avant sa conversion et croyant d’élite après sa conversion : «Je sais qu’en moi, c’est-à-dire en ma chair, il n’habite point de bien» (Rom. 7:18). Il n’est pas nécessaire de marcher sur les traces de Caïn pour arriver à cette conviction. Nous pouvons apprendre cette leçon avec Dieu, et la leçon est encore plus profonde ; nous n’avons pas besoin de l’apprendre avec Satan. À l’école de Dieu, nous apprenons à nous mettre d’accord avec lui. Les frères, avec toute la lumière qu’ils ont reçue sur ces sujets fondamentaux, devraient être les plus humbles de tous les hommes et glorifier Dieu plus que tous les hommes, étant d’accord avec Dieu contre eux-mêmes. Toute prétention est une offense à Dieu parce qu’elle dément les déclarations divines, comme si l’homme avait le droit de lever la tête après tout ce qu’il a fait.
L’origine de la création intéresse les savants ; laissons-leur cela, il faut bien qu’ils fassent quelque chose. Il faut bien qu’un homme ait un objet ; pour l’un, les affaires ; pour l’autre, les arts ; pour l’autre encore, les sciences, ou la philosophie. Le travail en soi est une chose excellente et la paresse est condamnable. Mais la soif inextinguible de l’homme est la démonstration publique et permanente qu’il a perdu Dieu. S’il avait Dieu, il serait tranquille. Au jardin d’Éden, il n’y a pas eu de savants, ni d’artistes, ni de philosophes. Un frère disait : «La perfection pour une créature, c’est de jouir de son Créateur». Au ciel, nous ne ferons pas autre chose, nous n’aurons pas d’autres désirs. Nous serons plongés dans l’amour de Dieu comme dans un océan sans fond ni rivage. Un vase, même fêlé, plongé dans l’océan, reste toujours plein.
L’histoire morale de l’homme, avec toutes ses misères et ses aspirations, avec ses besoins et ses capacités, nous montre qu’il a été fait à l’image et à la ressemblance de Dieu. Si nous frappons un homme, nous commettons un crime de lèse-déité. Après le déluge, le gouvernement de la terre est donné à Noé : le sang de l’homme doit être vengé ; une bête qui avait tué un homme devait être mise à mort. Nous n’avons pas à abaisser l’homme ni à l’élever.
L’homme a, pour ainsi dire, été chassé deux fois : Adam et Ève du jardin d’Éden d’abord, puis Caïn devenu vagabond loin de la présence de Dieu. Nous voyons, dans la descendance de Caïn, la naissance de diverses activités de notre monde. Apparaissent ceux qui habitent sous des tentes, les nomades qui gardent leur bétail ; ceux qui manient la harpe et la flûte, qui s’expriment par les arts ; ceux qui forgent l’airain et le fer, adonnés à la science et à la technique. Ces activités, qui se sont développées au cours des siècles d’une façon si remarquable, prouvent que l’homme, ayant perdu Dieu deux fois, s’est dépensé fébrilement à satisfaire ses aspirations sans Dieu. Ces activités, auxquelles d’ailleurs nous participons nécessairement à notre époque où l’homme fait tant de prouesses, qui ne dépassent pourtant guère celles de cette époque primitive où il y avait si peu de ressources, démontrent les aptitudes intellectuelles de cette créature qui a perdu Dieu et qui, d’une génération à l’autre, erre à droite et à gauche sans trouver un lieu de repos. Des hommes très brillants auront peiné toute leur vie en laissant espérer l’aurore d’un jour meilleur. Or tout cela est condamné : nous ne pouvons pas faire Dieu menteur. Toute page de l’Écriture est signée de Celui qui ne peut mentir ou se démentir, l’alpha et l’oméga, qui était avant quoi que ce soit fût et qui sera quand tout aura disparu sous sa forme actuelle. Que Dieu nous élève à ses propres hauteurs !
Un paradis s’est fermé à jamais, celui des deux arbres. Un autre paradis s’est ouvert, celui d’un seul arbre. «Bienheureux ceux qui lavent leurs robes, afin qu’ils aient droit à l’arbre de vie» (Apoc. 22:14), qui est dans le paradis de Dieu. La fin de l’Écriture fait contraste avec le commencement. Le désastre du commencement fait place à la grâce souveraine et victorieuse. Il n’y a plus l’arbre de la connaissance du bien et du mal, celui de l’homme responsable. Adam, mis à l’épreuve, est tombé, et le chemin de l’arbre de vie est devenu inaccessible. Alors Dieu est intervenu en grâce souveraine, sans nous demander notre avis. Il y a désormais deux domaines, celui de la gloire de Dieu, de la bénédiction absolue dans la présence de Dieu, et celui des ténèbres du dehors. L’oeuvre de Christ ouvre un autre monde défini par le paradis de Dieu où il n’y a plus que l’arbre de vie, et l’arbre de vie, c’est Christ. La question de la responsabilité de l’homme a été résolue par Christ à la croix. Dieu, ayant été glorifié par le sacrifice de Christ, peut, en justice et en grâce, ouvrir toutes grandes les portes d’un monde nouveau ; quiconque peut y entrer en lavant sa robe. Chacun est individuellement responsable devant Dieu : ajouter foi à ce que Dieu lui offre, ou demeurer sous sa propre responsabilité. Il y a la porte étroite et la porte large. Peu nombreux sont ceux qui suivent le chemin resserré, nombreux sont ceux qui suivent le chemin spacieux. Mépriser la grâce, c’est outrager Dieu. «Moi, je suis le chemin, et la vérité, et la vie ; nul ne vient au Père que par moi» (Jean 14:6), dit Jésus. Ce n’est pas en pensant qu’on trouve Dieu, ni en faisant de bonnes oeuvres, ni en étant un honnête homme. Le seul chemin pour accéder à la connaissance de Dieu, c’est celui de la foi en Christ qui est le chemin du paradis de Dieu, et ce chemin passe par la croix.
[LC n° 2]
8 février 1948
Le premier passage que nous avons lu concerne la nuit de la pâque : c’est la première rencontre avec Dieu du peuple qui est encore en Égypte ; c’est le premier contact, pour ainsi dire, avec Dieu.
Si Dieu doit arracher son peuple à l’Égypte, c’est-à-dire au monde, et si Dieu doit juger le monde, il ne peut pas ignorer le péché de son propre peuple. Les Israélites qui étaient en Égypte n’étaient pas en meilleur état que les Égyptiens. Si Dieu sortait de sa demeure pour rencontrer le péché, il le voyait tout d’abord dans son propre peuple. Dieu ne peut pas attirer à lui un peuple couvert de péchés. Et c’est pourquoi, avant de le libérer, avant de l’arracher au monde, il règle le sort de ce peuple devant lui ; et, avant d’intervenir pour faire sortir son peuple, il règle la question plus importante des rapports du peuple avec lui, question plus importante que la délivrance vis-à-vis du monde, qui n’est pas la première chose. La première chose, c’est de régler ses rapports avec Dieu. Il est très fréquent qu’on voie l’ordre des choses renversé, même dans l’enseignement, et souvent, on oublie que le premier de nos devoirs, c’est celui qui consiste à avoir affaire à Dieu. C’est avec Dieu que notre situation doit être, avant tout et en tout premier lieu, réglée.
Un homme du monde se soucie peu de Dieu ; un chrétien mondain, pas beaucoup. Plus un chrétien craint Dieu, plus il fait intervenir Dieu en tout premier lieu, les frères après ; le monde après.
Puisque Dieu doit prendre le peuple à lui, il faut qu’il abrite son peuple. Si Dieu est un juge, il commence par l’être pour son propre peuple, si le peuple n’est pas couvert ; c’est pourquoi Dieu lui-même donne l’abri à son peuple en instituant la Pâque.
Il a fallu beaucoup de foi, pour faire la Pâque : Hébreux 11 souligne la foi de Moïse. Comment le sang d’un agneau égorgé, le sang placé sur les poteaux et le linteau de la porte, peut-il arrêter le jugement de Dieu ? «Par la foi, il a fait la pâque» (v. 28).
Est-ce que tout le monde ici est à l’abri du sang de Christ ? Le sang de Christ n’est pas une religion. Le sang de Christ représente le sacrifice expiatoire de Christ, le fait que Christ a porté nos péchés en son corps sur le bois — les péchés de ceux qui croient. La Pâque nous présente donc le fait que Dieu sort de sa demeure pour juger, et il frappe le monde en frappant les premiers-nés du pays d’Égypte. C’est pourquoi le premier-né des fils d’Israël appartenait à Dieu, et les lévites ont remplacé les premiers-nés d’Israël.
La seconde scène qui nous parle de la croix de Christ, c’est celle où nous voyons que la puissance du Pharaon est brisée. Le chef de ce monde poursuit le peuple de Dieu avec toute sa force ; et c’est la traversée de la mer Rouge qui, d’un côté, est la délivrance à travers la mer pour le peuple de Dieu et, de l’autre, est la condamnation pour le monde et pour son chef.
À la croix de Jésus, la puissance du monde et du chef de ce monde a été brisée. Le monde, le chef de ce monde, qui est Satan, ne peuvent plus rien contre le peuple de Dieu. Quelqu’un qui a cru, quelqu’un qui est à Christ, le monde ne peut pas lui ôter ce que Dieu lui a donné. Dieu compte cet homme parmi son peuple. Il y aurait évidemment beaucoup de choses à dire sur toutes ces vérités.
Les eaux ont été un mur à leur droite et à leur gauche, image de la mort qui condamne et qui engloutit sans rémission ce qui est dans le monde. Le monde et les choses qui y sont, les sages, les philosophes, les moralistes, les hommes religieux, tous ceux-là avec leurs chars et leurs cavaliers, sont engloutis par la mer. Il n’y a pas un philosophe, pas un de ceux qui se prétendent immortels, qui ne soit comme ces chars, ces cavaliers de l’armée du Pharaon : mis à l’épreuve par la mort dans la mer, ils sont engloutis, et rien ne reste d’eux.
J’espère qu’il n’y a pas un chrétien ici qui se laisse éblouir par la gloire que le monde rejette sur ses grands hommes. Ce n’est pas si sûr ! Eh bien, les grands hommes de l’Égypte, avec leurs chars et leurs cavaliers, où faut-il les voir ? «Étends ta main», dit l’Éternel à Moïse ; et il a étendu sa main, et les eaux sont repassées ; elles ont englouti l’armée du Pharaon.
Y a-t-il ici un chrétien, chers amis, donc quelqu’un qui a traversé la mer Rouge à sec, avec les eaux de la mer à sa droite et à sa gauche comme un mur, assez infidèle à celui qui l’a délivré de la mort pour se prosterner devant les chars et les cavaliers du Pharaon ?
Le peuple de Dieu est composé, très souvent, par des gens qui n’ont pas beaucoup d’éclat quant aux choses de ce monde. Tant mieux ; et, même s’ils ont de l’éclat quant aux choses de ce monde, Dieu leur apprend à se dépouiller de cet éclat et à se souvenir que la gloire qu’il répand sur eux, c’est la gloire de Dieu lui-même, du Dieu rédempteur, du Dieu plus puissant que la mort. Un chrétien, quel qu’il soit, même un petit enfant converti, c’est quelqu’un qui peut dire : j’ai traversé à sec les eaux de la mer Rouge ; je ne peux pas l’expliquer ; je ne suis pas un savant, je ne suis pas un philosophe, je ne suis pas un moraliste, mon nom ne sera pas sous les coupoles où on honore les grands hommes de ce monde, mais mon nom est écrit dans le livre de vie. Est-ce que cette gloire nous suffit, chers amis, ou non ? Elle suffit à Dieu. Dieu n’en a pas d’autres à nous donner, et cette gloire efface toute autre gloire. Ah, le peuple de Dieu a besoin, chers amis, de revenir, de se remettre en contact avec les vérités de Dieu et la mort, la croix de notre Seigneur Jésus Christ.
Nous voyons là les deux choses en contraste. Le peuple fourmille de femmes, d’enfants, et compte six cent mille hommes de pied. Des petits, il y en avait ; ceux qui avaient été épargnés la nuit de la Pâque, ils étaient là ! Ce n’était pas une armée, c’était un troupeau, le troupeau du berger d’Israël. Ils n’avaient aucune puissance. Ils avaient les Égyptiens derrière, le Pharaon avec toute sa force, et la mer Rouge, devant eux : «Étends ta main».
Chers amis, on sent le besoin de revenir à ce que Dieu nous a donné. Le christianisme, aujourd’hui, de plus en plus, même parmi nous, tend à obscurcir les gloires dont Dieu a couvert son peuple par de fausses gloires de ce monde. Nous trouvons cela partout ; c’est de l’apostasie. Quel est notre titre de gloire ? Nous nous glorifions «dans la croix de notre seigneur Jésus Christ, par laquelle le monde m’est crucifié, et moi au monde» (Gal. 6:14). Voilà ce que dit Paul, et puissions-nous le dire en vérité avec lui.
«Un peuple merveilleux…» (Ésaïe 18:2). Pourquoi ? Était-il plus sympathique qu’un autre ? Les chrétiens authentiques ne sont pas plus sympathiques que d’autres. Qu’est-ce qui fait leur grandeur ? Ce que Dieu leur a donné, et non pas ce qu’ils avaient. «Étends ta main» : quelle parole !
Tous ces petits enfants et ces femmes, tous ces êtres faibles, ont pu voir ce que Dieu a fait. Il a enlevé les roues des chars, et toute l’armée du Pharaon a été engloutie ; c’est fini.
Moralement, c’est ce fait même, la croix de Jésus, qui nous sépare du monde, de l’Égypte. Est-ce que nous sommes contents de cela ? Ou bien est-ce que, dans notre coeur, nous disons : Ah, en Égypte, il y avait des oignons, des concombres, on était mieux que dans le désert ? Le peuple le dira, plus tard. Quand nous sommes mécontents, c’est de Dieu que nous sommes mécontents.
Et puis il y a un troisième fait qui marque l’histoire, le chemin de ce peuple. Après le désert, le peuple n’a pas été fidèle, nous le savons. Et alors, Dieu lui a dit : Tu vas rester quarante ans dans le désert, jusqu’à ce que tous les vaillants hommes, tous ceux qui disent : «Nous allons tous mourir, jamais nous ne pourrons entrer dans le pays ; il y a des géants, dans ce pays ; jamais nous ne pourrons entrer…», tous ceux qui ont eu peur ainsi, tombent ; et vos petits enfants, eux, entreront dans le pays. Josué et Caleb, qui ont eu la foi, ont été tenus de suivre les pérégrinations du peuple infidèle.
Et il en est ainsi aujourd’hui. L’Église a murmuré, comme Israël l’a fait, et tous ceux qui ont de la foi et de la piété sont obligés de suivre le détour très long que Dieu fait prendre à son peuple pour qu’il apprenne à se juger au long du désert.
Au terme du désert, nous voyons le Jourdain ; et, dans le Jourdain, nous voyons le peuple racheté qui entre, cette fois, à la suite de l’arche, l’arche portée par les sacrificateurs. Ils mettent le pied dans le Jourdain, les eaux reculent.
Le Jourdain sépare le désert du pays de la promesse. Le Jourdain, c’est la mort. Immédiatement après le Jourdain, c’est Canaan. Pour nous, il n’y a pas d’intervalle entre la mer Rouge et le Jourdain ; nous sommes à la fois dans le désert et dans le pays de la promesse. Voilà la différence entre Israël et nous. Nous connaissons les difficultés et les peines du désert pour la foi, et, en même temps, nous sommes appelés à vivre dans le pays de la promesse, à nous nourrir d’un Christ céleste. Notre place est en Canaan ; notre pays, c’est le ciel ; notre nourriture, c’est Christ. Et pourquoi nous faut-il rester dans le désert ? Pour que nous apprenions à Le connaître et à nous connaître. Si un chrétien a vécu cinquante ans sur la terre et qu’il n’a rien appris, chers amis, il a perdu cinquante ans. Est-ce que cela arrive ? Dieu le sait, mais c’est triste, parce que c’est une occasion unique. C’est triste, si un chrétien a fourni cinquante ans de traversée dans le désert sans rien apprendre.
Mais c’est surtout la fin que je voudrais marquer. Dans le Jourdain, tout le peuple passe à la suite de l’arche, pendant que l’arche se tient là. C’est-à-dire que, pour le chrétien, non seulement Christ est mort pour lui (la Pâque), non seulement la puissance de Satan contre lui est détruite (la mer Rouge), mais le chrétien est mort avec Christ (le Jourdain). Il faut le reconnaître, c’est le point sur lequel nous nous arrêtons le moins volontiers. C’est un fait comme les deux autres : le chrétien est mort avec Christ. Dieu a tué l’homme à la croix ; il a tué le vieil homme du chrétien à la croix. Lorsque nous nous vantons — et cela nous arrive — lorsque le vieil homme se vante (ce n’est jamais le nouvel homme qui se vante), nous faisons parler un homme que Dieu a tué, nous ressuscitons un homme que Dieu a tué à la croix.
Le Jourdain, c’est le fait que le peuple de Dieu, les chrétiens, sont morts avec Christ et ressuscités avec lui. Ils passent de l’autre côté, en Canaan, image des lieux célestes. Ceci a son parallèle dans toute l’épître aux Éphésiens, et le chapitre 6 en particulier.
À un inconverti, il faut parler de la Pâque ; on ne lui parle pas du Jourdain. Il faut lui dire : Vous avez des comptes à rendre à Dieu, et des comptes terribles ; tout ce que vous avez fait, tout ce que vous avez dit et pensé, est en permanence devant Dieu.
— Oh, je suis quelqu’un de très bien ; je suis très bien élevé, je me conduis très bien.
— Quand vous vous verrez devant Dieu, vous verrez si vous penserez ainsi !
C’est à un chrétien qu’on parle du Jourdain ; c’est aux frères, c’est aux soeurs Il faut leur dire : Vous êtes morts avec Christ. C’est ce que nous trouvons dans le Nouveau Testament : nous sommes morts avec Christ.
Les chrétiens, pour le monde, sont des morts ; est-ce qu’on le voit ? Est-ce qu’on voit que nous sommes des morts pour le monde, ou est-ce que nous sommes bien vivants, pour le monde ?
Alors, voilà le peuple qui passe, qui traverse le Jourdain ; et sort un peuple ressuscité, un peuple qui vit dans le pays de la promesse, qui mangera les fruits du pays, mais qui, d’abord, a à vaincre les ennemis qui s’y trouvent. Comme nous le disons souvent (et il faut le redire ; on dit quelquefois que nous le disons trop, mais il suffit de voir les défaites que nous enregistrons pour réaliser que nous ne le disons pas assez), un chrétien qui lutte, ce n’est pas celui qui reste en Égypte. Celui qui reste en Égypte ne lutte pas. On voit des chrétiens, leur vie s’écoule sans lutte… ; mais un chrétien qui veut jouir de Christ dans la gloire se rend compte que l’ennemi, par tous les moyens, se met en travers tous les jours, pour le solliciter et l’arracher aux choses célestes. C’est l’expérience chrétienne de tous les temps.
De l’autre côté du Jourdain — c’est ce qui m’a frappé souvent, que Dieu ne se contente jamais d’un développement théorique des vérités, jamais — à Guilgal, il y a là une marque, une application pratique de ce que Dieu a enseigné précédemment, à savoir une marque de la mort. Guilgal est le lieu dans lequel le signe de la mort a été marqué sur le peuple. Souvenons-nous toute notre vie que Guilgal veut dire roulement. Dieu a roulé de dessus le peuple l’opprobre de l’Égypte. Quand nous redevenons mondain, nous ramenons sur nous et sur le peuple de Dieu l’opprobre de l’Égypte ; nous effaçons ce que Guilgal a établi.
Quand nous lisons Josué, nous voyons plusieurs fois cette phrase : «et tout le peuple retourna avec Josué à Guilgal» (10:15, 43). Nous avons remporté des victoires, accompli un service, passé une bonne journée, dans la communion avec le Seigneur. Eh bien, si nous ne revenons pas à Guilgal, nous en serons fiers, nous nous en vanterons à nous-mêmes.
Comme disait un serviteur de Dieu qui avait fait une heureuse visite, et à qui on dit : «Oh, quelle bonne visite vous avez faite»: Satan me l’a déjà dit à l’oreille.
Il nous faut revenir à Guilgal, tous les jours ; et c’est ce que j’avais essentiellement à coeur de rappeler. La force du peuple de Dieu, c’est le maintien de la puissance de la mort sur lui. Il est certain que l’application de la mort ne peut se faire que dans la puissance de la vie — nous sommes bien d’accord — dans la puissance du Saint Esprit — le Nouveau Testament nous l’apprend. Mais on ne saurait trop attirer l’attention des saints aujourd’hui sur le fait que l’absence de puissance parmi le peuple de Dieu vient du fait qu’on ne revient pas à Guilgal. Nous en faisons l’expérience ; chacun de nous en fait l’expérience. Si nous nous laissons griser par quelque chose, même un succès, même un succès spirituel, nous apprenons que Dieu se retire de nous ; c’est immanquable. Il faut revenir à Guilgal. Les fils d’Israël ont abattu Jéricho; ils ont toute une peine à avoir Aï. Pourquoi ? C’était une ville de rien ! À la suite de Jéricho, ils avaient oublié de se juger, et le mal était là. C’est ce que je désirais laisser devant nous.
Je le sens — j’espère continuellement — pour mon compte, que la puissance de Dieu est arrêtée dès que nous ne revenons pas à Guilgal, dès que nous tolérons la chair, quelle qu’elle soit, quelque soit son caractère. Dès que nous nous nourrissons de nous-mêmes, dès que nous oublions d’appliquer la mort de Christ, la puissance de Dieu se retire d’avec nous. Quand on voit, chers amis, la puissance que le monde a sur les chrétiens, des chrétiens qui ont vingt, trente, quarante ans de vie chrétienne, on comprend quelle puissance il faut pour tirer une âme du monde, qui n’a que le monde, qui n’aime que le monde.
Vous ne pouvez pas dire à un inconverti d’aimer autre chose que le monde. Vous n’aimez peut-être pas les choses grossières ; mais un ruban suffit à conduire une âme en enfer !
Israël revient à Guilgal. Et nous ?
Eh bien (nous le sentons parce que, dans la pratique et de bien des manières, de beaucoup de manières, nous avons fait la même expérience), nous allons en face de Aï comme en face de Jéricho, et nous sommes battus. L’ennemi a de la puissance. Au lieu de faire la volonté de Dieu, nous faisons la nôtre ; au lieu de nous séparer du monde, nous succombons à ses tentations. Personne ne le sait, que Dieu et nous. Mais toutes les défaites ne sont pas spectaculaires et visibles ; elles sont dans notre coeur, dans notre esprit, avant d’être montrées en fruit dans notre vie, chers amis. Et jamais une déchéance publique n’a commencé d’un seul coup.
Le livre de Josué est marqué par des victoires, parce que le peuple revient à Guilgal. Voulons-nous avoir de la joie parmi nous, chers amis, dans nos réunions, au culte ? Jugeons-nous de très près, les frères et les soeurs ! Que chacun se juge de très près, se dépouille de ce dont il doit se dépouiller.
Nous ne forçons pas Dieu à être parmi nous ; nous ne le forcerons jamais. Israël a eu beau faire devant Aï comme il faisait d’habitude — et Josué était là, c’était quelqu’un, ce n’était pas le premier venu — c’est la défaite. Josué déchire ses vêtements.
Notre position est telle que, si Dieu n’est pas avec nous, nous sommes les plus misérables de tous les hommes. Si Dieu n’est pas avec nous, c’est le monde qui nous attend ; c’est la ruine totale qui nous attend. Il faut nous juger de très près, dans toutes nos voies. C’est ce qui fait que la vie chrétienne est une peine continuelle.
Alors, dans Josué, ce sont des victoires. Mais ils n’ont pas remporté toutes les victoires ; ils n’ont pas chassé les ennemis partout et, dans les Juges, nous en voyons les résultats. Les Juges, c’est un livre où, au lieu de chanter les cris de victoires, on entend plutôt des complaintes. C’est vrai d’une vie chrétienne ; cela arrive d’une vie chrétienne où on a manqué de vigilance. Les beaux chants du commencement font place à des lamentations, à des complaintes. C’est vrai du peuple de Dieu, d’une assemblée locale, du peuple de Dieu dans son ensemble. Et qu’est-ce que nous trouvons dans les Juges, au moins deux fois ? Chacun faisait ce qui était bon à ses yeux (17:6 ; 21:25) : moi, je pense ainsi ; moi, je pense autrement.
Le gouvernement de Dieu était là qui laissait les choses ainsi ; car il faut compter avec le gouvernement de Dieu : «engraisse le coeur de ce peuple» (És. 6:10) !
Que trouvons-nous, dans Juges 2 ? L’ange de l’Éternel qui monte de Guilgal à Bokim. Le peuple sent qu’il y a une perte irréparable. Il sent qu’il déchoit ; il sent qu’il descend. L’ange monte de Guilgal à Bokim. On n’a pas voulu de la mort ; on n’a pas voulu porter la mort de Jésus. Eh bien, Dieu se retire. «Je me suis retiré d’eux» ; c’est une expression qu’on trouve deux ou trois fois, dans l’Ancien Testament. C’est terrible, quand Dieu se retire de quelqu’un. Cela arrive chez un individu, et aussi dans un corps de chrétiens : «je me suis retiré d’eux…» Vous ne voulez pas Guilgal, pour connaître la puissance liée à la réalisation de la mort de votre volonté propre ? Eh bien, vous aurez Bokim ; vous pleurerez parce que Dieu ne sera pas là. Et il rappelle les raisons pour lesquelles il s’en va : «Vous avez fait alliance avec les dieux». Moi, j’avais fait alliance avec vous ; vous avez fait alliance avec les dieux. Ces deux alliances ne peuvent pas subsister ensemble. Vous avez voulu faire alliance avec les dieux ; au lieu de rejeter tout cela, vous m’avez rejeté en acceptant les dieux étrangers. Est-ce une histoire théorique ? Pas du tout, c’est l’histoire de tous les chrétiens ; c’est notre histoire !
Que le Seigneur nous donne de prendre garde, dans notre vie chrétienne, au moindre détail, à tout ce qui nous sépare pratiquement de Christ. Quand on nous dit quelque chose qui nous exalte : Oh, comme il réussit bien, quel succès, comme il a des qualités, comme il réussit brillamment ! Est-ce que cela nous rapproche de Christ, chers amis ? Eh bien, il faudra, une fois ou l’autre, juger cela. Vous n’emporterez pas cela comme une richesse pour Christ. Cela va très loin, je le sais. Mais nous jouons une partie, le peuple de Dieu joue une partie, qui est une partie à mort. Celui avec lequel nous jouons cette partie ne nous épargnera jamais ; il ne laissera passer aucune occasion, on le voit bien. C’est pourquoi la vigilance continuelle est, pratiquement, indispensable. Et tout ce qui, au milieu de nous et dans notre vie chrétienne, contribue à affaiblir la conscience des droits de Dieu, est une infidélité, non seulement vis-à-vis de Dieu, mais vis-à-vis des hommes.
Que le Seigneur nous donne de ne pas savoir ce que c’est que le christianisme sans le vivre. Que le Seigneur nous donne de ne pas savoir ce que c’est que la croix de notre Seigneur Jésus Christ sans pouvoir dire : ta croix, Jésus, est ma gloire, elle est ma mort et ma vie. Que le Seigneur nous donne de le réaliser.
[LC n° 3]
11 février 1968
Quand notre christianisme est dans notre tête, cela fait de perpétuels mécontents. Il est rare que nous soyons tout à fait contents. Assurément, nous ne sommes heureux que lorsque nous sommes heureux en Dieu.
Le bonheur qu’on a avec Christ est un bonheur éternel. C’est un bonheur intouchable, permanent. Si nous regardons à la vie extérieure de Paul, personne ne l’envierait. Mais si nous voyions le bonheur dont son coeur était rempli, nous dirions : Voilà une vraie vie !
On aime bien chanter des cantiques, et chanter bien, et chanter fort. Tandis que le vrai chant est celui qui est produit par la harpe de nos coeurs mus par le Saint Esprit. Le peuple chante, car Dieu l’a délivré d’une façon extraordinaire. Mais comment se fait-il que, peu après, le peuple murmure ? Parce qu’il a plus pensé à sa délivrance qu’à Dieu. Lorsque nous nous attachons aux circonstances, le bonheur est très vite parti. Nous sommes des êtres continuellement dépendants, plus dépendants qu’un enfant dans les langes ne l’est envers sa mère, pour toutes choses. Nous ne le croyons pas, cela. Nous nous croyons très forts. Mais rien de tout cela. La qualité de la vie divine, c’est la dépendance. La vie de Christ était complètement dépendante.
Voilà que les eaux ne sont pas bonnes. Et cela fait de suite le découragement. On condamne Dieu. Voilà ainsi comment se passent nos vies, bien souvent. Comment se passe notre semaine, l’histoire de nos âmes, de nos consciences, vis-à-vis de Dieu ? C’est cela qui compte, n’est-ce pas ? Le reste, non. C’est l’histoire de l’âme qui a de la valeur.
En Égypte, on ne chante pas de cantiques. L’Égypte, c’est le monde. Dans le monde, on ne chante pas. Ah, on a des chansons ; mais ce sont les chansons des esclaves. Tandis que Dieu nous apprend le chant de la délivrance.
Quelqu’un qui n’est pas un chrétien n’a rien du christianisme. Il n’a que la couleur d’une âme convertie. Si vous êtes converti, vous ne tremblez pas. Quand nous aimons Dieu, nous aimons les contours très nets. Ce ne sont pas les apparences qu’il faut, mais un changement fondamental de base. Y aura-t-il eu des professants qui n’auront pas la vie ? Sûrement !
Ce qui est toujours à l’origine des murmures, c’est une volonté non brisée. Un croyant peut passer par une épreuve très difficile. S’il passe ces moments-là avec le Seigneur, il a le Seigneur avec lui. Et ainsi, il peut avoir ses heures réjouies en lui. Un croyant qui aurait le Seigneur avec lui, d’une façon complète, pourrait passer sa vie dans l’épreuve, et être heureux quand même. Si le Seigneur n’est pas capable de venir au secours d’un des siens, il n’est pas plus fort que les circonstances — et c’est un blasphème, de le penser. La volonté, dans l’homme, est une grande monstruosité. Les anges mêmes sont étonnés de voir cette volonté dans l’homme.
Il y a des jeunes — et même fort jeunes — auxquels Dieu peut donner un coup très dur, au départ. C’est souvent lorsque le Seigneur veut se servir d’un ouvrier. Pour d’autres, c’est plus tard. Il peut se servir de toutes sortes de choses, pour cela. En trois jours, Paul a été transformé. C’est la discipline du Père. Nous ne devons pas fuir la discipline. Mais il mesure à chacun la discipline, suivant le moment de sa vie, suivant ce qu’il aura compris. Souvent, on constate qu’il ne fait pas passer des jeunes croyants par une dure épreuve, ceux qui n’auraient pas suffisamment de foi pour la supporter, et ainsi risqueraient de tomber.
Il arrive que des jeunes croyants soient éprouvés durement, au départ. Mais Dieu veut visiter notre volonté propre. Pour arriver à ce but, l’amour de Dieu peut même se servir d’une humiliation cuisante, et même d’une faute humiliante. L’Écriture est là pour confirmer ce que nous venons de dire. Voyez Pierre. Son reniement est nommé pour toute l’histoire du christianisme. Il faut qu’il soit visité ; il faut qu’il soit brisé, pour qu’il soit un vase à la gloire du Seigneur. Pour un frère, c’est plus sérieux. Car il peut être appelé à un service public, donc plus dangereux ; car on risquerait de faire passer le service avant le Seigneur, et quantité de choses avant lui. C’est trop pénible. Lorsque nous constatons, chez un jeune, que sa volonté est brisée, il n’est plus le même qu’auparavant. Il a changé. C’est un véritable ornement. C’est une parure morale, qui est un reflet de la vie de Christ dans le croyant. Alors qu’un ornement du monde est une honte, pour un croyant.
Ex. 15:25 : «L’Éternel lui enseigna un bois». Ce bois jeté nous montre la destruction de la volonté propre. De volontaire qu’il est, il devient plus dépendant. Ne nous y trompons pas. S’il y avait ici l’apôtre Paul, il ne lui faudrait pas longtemps pour discerner la vie intérieure de chacun de nous. Et quand un frère est spirituel, il saura bien le discerner.
La vie intérieure de chacun est de toute importance, pour chacun. Le Seigneur détruit la volonté. Ce n’est jamais agréable. Jamais vous ne changerez le visage de la mort. La mort est toujours la mort. Elle n’est jamais attrayante. Jamais vous ne verrez quelqu’un mourir quant à lui-même avec le sourire. Vous n’échapperez pas à la main du Seigneur ; heureusement pour nous.
Le christianisme est incomparable. Si on voulait définir un croyant, la vie divine en lui, c’est Dieu vivant dans cet homme. Le reste, l’ancien Adam, avec sa culture, le vieil homme, c’est fini. On n’a pas de temps à perdre. On y pense, non pas pour s’en nourrir, mais pour s’en débarrasser. La jeunesse chrétienne a cela à apprendre. Elle a besoin d’être visitée (l’amour du monde, hélas, et Satan, ont de la prise sur la chair), afin que tout cela soit appelé à disparaître. Si ce n’est pas fait, un jour ou l’autre, vous aurez à l’apprendre. Le Saint Esprit ne se sert jamais de la chair. Alors que Satan, lui, se sert de la chair qui est en nous.
En avançant, on est frappé de la réalité de ces choses divines. Il n’y a rien de théorique. Tout est vrai.
«Et les eaux devinrent douces» (v. 25). Vous voyez quelqu’un content de lui-même. Cette âme-là, une fois visitée par le Seigneur, vous la voyez, et vous dites : Mais ce chrétien fait des progrès ! Lorsque la jeunesse est exempte de toute épreuve, ce n’est pas une bonne chose, bien qu’on puisse apprendre avec le Seigneur. Mais la chair est indomptable. Et la discipline est là aussi pour limiter les dégâts. Toutes les disciplines auxquelles est soumise la jeunesse sont de toute valeur, que ce soit dans un milieu familial pieux ou dans l’assemblée. Cela est de toute importance et de toute valeur. Celui qui veut éviter la discipline, attention qu’il ne soit pas trouvé devant des circonstances autrement éprouvantes. On ne se moque pas de Dieu. Personne ne peut remplacer le Seigneur. C’est admirable et inexprimable. Paul était beaucoup moins sensible, quant à l’opinion des autres ; Pierre davantage ; Paul non. L’apôtre Paul était un homme supérieur, d’une formation supérieure. Où voyez-vous que quelqu’un ait pu faire dévier le Seigneur de ses voies ? Personne ne l’a pu. Il était débonnaire et doux.
Le point le plus saillant de la vie de l’apôtre n’est pas ce que nous pourrions lui envier. Il a été vu en flagrant délit de faire la guerre à Dieu. Ensuite, ce fut oublié. Il a été pardonné. Cette faute ne pesait plus sur lui. Et puis, cela s’est passé avant sa conversion. Cela nous montre ce qu’un homme peut faire, tout en ayant bonne conscience, quant à la loi. C’était un vase qui devait être préparé.
Que le Seigneur nous accorde de marcher humblement avec lui, ne pensant pas à nous, ni en bien, ni en mal (c’est la véritable humilité), en étant remplis du Seigneur. Et cela se fait sans effort. Le Seigneur se manifestera en nous tout naturellement. Avec Dieu, il n’y a pas de difficultés, nulle part. Si nous avions le Seigneur avec nous et en nous, nous ne craindrions rien ni personne.
Chère jeunesse chrétienne, ces choses vous sont offertes. Le Seigneur vous les offre. Nous avons déjà pensé qu’il serait peut-être bon que cette chère jeunesse chrétienne, comblée comme elle l’est de tant de faveurs et de richesses spirituelles, entourée par ceux qui lui enseignent, afin d’éviter les erreurs, aille faire un stage dans des milieux moins favorisés qu’elle, et où l’erreur, bien souvent, s’y trouve mêlée. Vous pourrez puiser dans les écrits de nos devanciers. Alors, rien ne sera perdu. Que le Seigneur nous accorde de les lire, de les sonder, de les étudier. C’est la vraie gloire, la vraie grandeur. Nous avons des secrets avec le Seigneur. Plusieurs d’entre ces croyants, beaucoup moins favorisés, sont souvent plus fidèles que nous. Et ils nous feront honte, quand tout sera révélé. Nous nous réjouissons à la pensée que le Seigneur mettra un jour, sur leurs fronts, la marque de son approbation. L’écharde est envoyée à Paul, afin qu’il ne s’enorgueillisse pas. C’est quand il redescend qu’il est en danger. C’est une écharde de Satan. Le Seigneur se sert de Satan contre la chair qui est en nous. Paul avait besoin de cette écharde.
La Parole n’est pas un livre d’histoire et de géographie, bien qu’elle contienne ces éléments. Mais ce n’est pas de ces choses qu’elle veut nous entretenir. Et pourtant, c’est ainsi que les hommes s’en servent, afin qu’on ne reçoive pas le coeur de la vérité, la vérité qui sauve.
«Paul, tu as ton écharde. Eh bien, garde-la ! Je t’aiderai avec ton écharde». La puissance de Dieu est pour celui qui est jeté par terre. «Ma grâce te suffit». La puissance de Dieu est pour lui. Un homme détruit, un homme brisé, c’est un homme que Dieu a formé pour recevoir tous les secours divins.
Quand nous voyons un chrétien allant vers le succès, partout où il va, que tout va bien pour lui : mais vous ne trouvez jamais cela, dans l’Écriture ! Le ciel, avec les avantages terrestres, cela a l’air attrayant. Et on trompe la jeunesse avec cela.
L’apôtre dit : «J’ai supplié trois fois le Seigneur». L’infirmité n’est pas le péché. C’est ce par quoi Dieu brise un homme. Bon, bien ; j’ai l’écharde. Eh bien, j’aurai l’écharde ! Si cette écharde me fait connaître ta personne de jour en jour davantage, je me réjouis. Et je prendrais plaisir plutôt dans les infirmités. v. 10 : Le Seigneur nous réjouit dans le brisement qu’il opère en nous. Le Seigneur ne se met jamais à la disposition de la chair. Nous bénirons le Seigneur beaucoup plus pour nos épreuves que pour nos joies. «Je puis toute chose en celui qui me fortifie» (Phil. 4:13). Ceci est écrit dans la Parole, afin que ce soit utile pour tous les temps. Paul avait les mêmes passions que nous. Eh bien, que le Seigneur nous accorde d’être plus heureux en lui ! Quand nous serons à la fin de notre vie, que restera-t-il ? Ce que nous aurons fait par lui, pour lui, avec lui. Le reste sera soufflé, perdu. Ce qu’il recherche, c’est le coeur des siens. Eh bien, qu’il ait le nôtre davantage, à mesure que notre chemin se fait.
[LC n° 4]
31 mai 1970
Le désert ne fait pas partie des conseils de Dieu. Les conseils de Dieu sont ses voies pour faire passer nos âmes d’un état de misère à un état de bonheur.
Personne ne pourra arrêter Dieu dans ses conseils. Les conseils de Dieu, ce sont ses voies, par lesquelles il veut faire passer les siens. En général, Dieu a ses voies à l’égard de ceux qui sont à lui. Il a un travail à faire en eux.
Ce cantique place devant nous les ressources du chrétien : «Contre moi dans ce monde…». Quand Dieu a pris à lui une âme, son éducation dure toute la vie. Il veut nous rendre intelligent quant à ses pensées. Dieu nous suit et nous tient. Personne n’échappe à sa main. Un peu plus tôt, un peu plus tard, Dieu fait à notre égard ce qu’il veut faire. Ce travail est double : un travail de dépouillement, et un travail d’enrichissement.
Quand on est un jeune chrétien, on est tout feu, tout flamme. Puis il arrive, très souvent, que le premier amour baisse, que le coeur soit encombré de toutes sortes d’objets. Ce que Dieu veut, ce n’est pas un extérieur de dévouement. Non ; ce qu’il veut, c’est notre coeur. Ce qu’il veut, ce n’est pas notre porte-monnaie, mais notre coeur. S’il a notre coeur, il aura le reste. Lequel d’entre nous ne mérite pas ce reproche : «Tu as abandonné ton premier amour» (Apoc. 2:4) ? Les relations naturelles peuvent aider, et elles peuvent gêner. Avec Dieu, son regard nous suit où que nous soyons. Il fait notre éducation à tous. Est-ce qu’il y a quelqu’un, ici, qui regrette d’avoir passé à cette école ? Est-ce qu’il y a des regrets à y rester ? Souvent pas !
Dans Exode, il y a un chant de cantique. C’est la position de quelqu’un qui est converti. Il est à l’abri de la puissance du Pharaon. Au beau cantique succède une manifestation entièrement contraire. C’est Mara, les eaux amères. Et, au lieu d’un cantique de délivrance, c’est le murmure. Lequel d’entre nous n’a-t-il pas murmuré, dans sa vie ? Et peut-être après avoir passé toute une après-midi à chanter des cantiques !
Mais Dieu n’est jamais dépassé. Il enseigne un bois. Et ce bois, jeté dans cette eau, la rend douce.
Pourquoi murmurons-nous ? Qu’est-ce qui produit cela ? Quelqu’un qui murmure n’est pas heureux. «Priez sans cesse. En toutes choses rendez grâces» (1 Thess. 5:17-18).
Dieu nous serre de très près. Il ne veut pas que ses enfants fassent leurs quatre volontés. Et pourquoi ? Pour notre bonheur, mais aussi pour sa propre gloire.
La bénédiction durable du chrétien contient ce qui brise sa volonté. Voilà le christianisme ! Il n’y en a pas deux. Le christianisme, c’est la manifestation de Christ dans un homme.
Notre volonté nous suit jusqu’au dernier souffle. Un ancien frère disait ce qu’une femme, très célèbre au dix-neuvième siècle, avait déclaré : «Savez-vous ce qui meurt chez nous en dernier lieu ? C’est l’amour-propre » ; et c’est une femme mondaine qui parlait ainsi. Prenons-en pour nous, n’est-ce pas !
Voilà le christianisme. Les apparences, c’est quelque chose que le vent emporte, s’il n’y a que cela.
Moïse prend un bois. Ce qui nous fait murmurer, c’est quelque chose qui contrarie nos plans. À la lumière de Dieu, on se voit, et on se voit soi-même.
Les eaux deviennent douces. Ce bois est la mise à mort de la chair en nous, de notre volonté propre. La valeur de la croix n’est pas seulement pour être sauvés. Mais elle nous libère de nous-même.
On peut dire à une âme : «Du moment que vous croyez, vous êtes sauvée». Elle pourrait répondre : «Oui, mais j’aime les choses que j’aimais avant…». Et pourtant, ce peut être un authentique chrétien.
Le Seigneur n’a laissé aucun de nous ici, chers amis, pour qu’il dirige la barque à son gré. Nous avons en nous ce qui est ennemi de Dieu. La libération est dans la croix. Tout le vernis du monde ne va pas avec la croix. Voilà ce que les gens sérieux n’aiment pas.
Quelqu’un disait : «C’est étonnant, ce qu’une âme peut faire de progrès, lorsqu’elle sort d’une épreuve !». Vous ne pouvez pas avoir le ciel et la terre. Nous bénirons beaucoup plus le Seigneur pour nos épreuves que pour nos joies. Lorsqu’on est jeune, on ne pense pas cela.
On nous a appris, à l’école du dimanche : «On n’est à lui, ni trop tôt, ni trop longtemps». Retenons ces cantiques si simples : «Jésus est le meilleur Maître».
Et puis viennent les expériences. Dieu nous brise : «Les sacrifices de Dieu sont un esprit brisé et humilié» (Ps. 51:17). Retenons cela, chère jeunesse ! Alors, si le Seigneur touche l’emboîture de la hanche, s’il brise le ressort de la volonté propre, c’est une bénédiction.
Psaume 30:5 : «Le soir, les pleurs viennent loger avec nous, et le matin il y a un chant de joie». Deutéronome 8:16 : «… afin de t’humilier et afin de t’éprouver, pour te faire du bien à la fin». Dieu ne panse pas les plaies à la légère. Quand Dieu apporte la paix, on le sent bien. Les leçons du désert sont irremplaçables.
Le résultat de la course chrétienne est très important. Nous le verrons au tribunal. Nous verrons tout ce que notre chair nous aura fait faire, et nous aura fait perdre comme bénédiction. Tout homme rendra compte devant Dieu. Tout passera devant nous. On n’échappera pas toujours. On ne se cachera pas toujours.
Ce cher apôtre Paul a fait une course dans le désert. Mais ce n’est pas sa qualité d’apôtre qui le soutenait. Il était un chrétien qui avait appris, un chrétien qui apprenait. Il a fallu qu’à la fin de sa course, il fut abandonné. Mais il dit : «Mais le Seigneur s’est tenu près de moi et m’a fortifié» (2 Tim. 4:17).
Comme il aimait Christ de tout son coeur ! «Oui, ma coupe est comble» (Ps. 23:5). Il chantait en prison, dans la honte, et déshonoré devant tout le monde.
Comme disait un frère : Dans le ciel, il y aura une riche entrée et une chiche entrée ; une riche entrée, pour ceux qui auront vécu pour lui, et une chiche entrée, pour ceux qui auront laissé le Seigneur à la porte.
Il y aura un moment où tout sera déclaré sous son vrai jour. «Oui, le souverain bien-être, le vrai bonheur ici-bas, c’est d’avoir Jésus pour Maître, de le suivre pas à pas». Voilà le secret du bonheur, pour les petits, pour les isolés, pour ceux qui n’ont pas de secours.
Nous avons déjà rappelé cette image. C’est comme un enfant, jouant avec ses jouets préférés. Présentez-lui un autre jouet beaucoup plus beau ; il lâchera tout pour le prendre. Que le Seigneur nous donne de trouver tellement notre joie en lui, que nous ne souhaitions rien d’autre, mais que nous fassions envie aux autres. Donnons-nous quelque peu ce spectacle, autour de nous ? C’est cela, le témoignage.
Le monde promet, et il ne tient pas. Le Seigneur promet, et il tient ce qu’il a promis. Que le Seigneur nous donne son aide, pour bien commencer, pour bien continuer, et pour bien finir ; pour vivre de lui, afin de vivre dans la mesure où il le demande, de vivre de lui.
[LC n° 5]
23 juin 1946
Méditations sur la vie chrétienne, édition FR 1995, p. 26
Les chapitres 15 à 18 de l’Exode nous présentent les interventions de Dieu à l’égard du peuple d’Israël avant que la loi ne lui fût donnée. Après, les relations de Dieu avec son peuple seront tout autres. Une même faute commise par le peuple avant la loi est sanctionnée d’une manière moins sévère qu’après la loi. Dès que le peuple a accepté le joug de la loi, Dieu l’a pris au mot et son gouvernement fut beaucoup plus sévère.
Chose étonnante, la loi n’a jamais été donnée au peuple dans toute sa rigueur. Elle a été annulée avant même que le peuple en prît connaissance. Lorsque Moïse descendit de la montagne, le veau d’or était dans le camp. La loi disait au peuple : «Tu n’auras point d’autres dieux devant ma face» (Ex. 20:3). Il fallait donc que la loi ne fût pas présentée ou que le peuple fût détruit, consumé. Moïse eut la pensée de Dieu : il brisa les tables.
L’histoire du peuple sous la loi est pareille à l’histoire de l’homme : très tôt, il a gâté ce que Dieu lui a confié. Adam est tombé en Éden très tôt ; Noé, après le déluge, de même (il n’est plus parlé de lui, après sa chute, bien qu’il ait vécu encore trois cent cinquante ans) ; la sacrificature, les juges, la royauté aussi, et, enfin, l’Église, dont la pureté du témoignage n’a pas duré plus de trente ans. Sous tous les régimes, les faits présentés par la Parole annulent l’homme. C’est solennel !
Mais, avant que la loi n’intervînt dans les relations entre Dieu et son peuple, la grâce de Dieu a brillé. C’est la grâce de Dieu qui a tiré le peuple d’Égypte ; c’est la grâce de Dieu qui lui a fait passer la nuit de la Pâque et traverser la mer Rouge ; c’est la grâce qui l’a conduit jusqu’au Sinaï.
Le peuple a franchi la mer Rouge et a chanté un cantique. Marie a chanté, tout le peuple a chanté. Ainsi en est-il du peuple de Dieu aujourd’hui, comme aussi de l’individu arraché au pouvoir de Satan, quand il a senti que Dieu a brisé ses chaînes et l’a délivré du pouvoir du monde. Le pouvoir du monde, de Satan, ce n’est pas une illusion, mais une réalité terrible. Voilà un homme qui sait que la main de Dieu s’est avancée, a brisé ses chaînes, et cet homme, esclave autrefois du Pharaon, du monde, est maintenant libre pour Dieu. Si quelqu’un n’a pas passé par là, il a tout à apprendre : la base de la vie chrétienne est là ; on était du monde, on n’est plus du monde ; même si on a tendance à aimer encore le monde, on a changé de maître. Il faut insister sur la réalité de ce fait, initial, essentiel, sans lequel il n’y a point de christianisme. Tout le reste, ce sont des mots, s’il n’y a pas cela. La conversion peut revêtir divers aspects, varier suivant les individus, mais elle aboutit toujours à cette certitude divine qu’on connaît Dieu en Christ et par Christ, par la croix. La croix reste, et la nuit de la Pâque, c’est la croix.
C’est pourquoi les philosophes ne connaissent pas Dieu. Ils se forgent un dieu. Mais le Dieu qui s’est révélé à la croix met de côté l’homme avec toutes ses prétentions naturelles. L’homme est pécheur ; il aime et fait le péché, il y trouve ses délices : «les délices du péché» (Héb. 11:25). Beaucoup de gens ne sont pas malheureux dans le monde, ils n’y font que leur volonté. Or, faire sa propre volonté, c’est l’un des délices de l’homme. C’est la chose la plus difficile à l’homme : faire la volonté d’un autre. Un petit enfant a infiniment de peine à faire la volonté de ses parents. Le germe de la propre volonté se manifeste très tôt. Le caractère essentiel de la vie de Christ, c’est l’obéissance ; lui qui était Dieu est venu faire la volonté de Dieu. Le chrétien est sur la terre pour faire la volonté d’un autre ; nous n’avons pas un autre chemin que celui de Christ, même si nous y marchons mal, hélas !
La connaissance de ces faits est souvent marquée par un chant de délivrance : «Je suis sauvé, converti, je connais Dieu, j’ai trouvé Christ». Ce sont des faits, mais il arrive que nous en parlions comme si c’étaient des mots. L’âme qui a passé par là sait qu’elle aimerait mieux perdre tout plutôt que cela, elle ne met rien en balance. Avoir trouvé Dieu, l’avoir rencontré face à face ! Que la conversion s’étale sur des mois ou des années, il faut en arriver là. Elle peut être brutale, fruit peut-être d’un travail intérieur préalable dont on a plus ou moins conscience ; mais il faut arriver à ce résultat précis : on connaît Dieu, on a trouvé Christ, on est heureux de cela ; on a tout à coup l’intelligence de ce qu’est Dieu et le monde. Une lumière est projetée sur toutes choses, dont on n’avait même pas l’idée autrefois.
Les enfants de chrétiens ne doivent pas s’imaginer qu’il leur suffit d’une certaine confession orthodoxe pour être sauvés ; pour connaître Dieu, il faut un travail dans le fond du coeur et de la conscience. C’est un sujet de prières pour les parents, que l’enfant connaisse Dieu ; qu’il soit pauvre toute sa vie, qu’importe ! Mais qu’il ne quitte pas la terre sans avoir rencontré Dieu. Est-ce que la connaissance de Dieu prime pour nous sur toutes choses ? Dieu sait si véritablement cette connaissance est la chose que nous estimons plus que tout au monde. Que Dieu fasse qu’il en soit ainsi, et chez les enfants, et chez les parents !
Voilà donc ce peuple ; il a chanté, et puis il pleure, il murmure. Après la mer Rouge, c’est Mara : le désert, pas d’eau, puis des eaux amères. Lorsqu’une âme est convertie, elle a appris à connaître Dieu, mais il faut qu’elle apprenne à se connaître elle-même, et c’est l’affaire de Dieu. Cela commence à Mara et dure toute la vie. On part plein d’enthousiasme, il y a une petite part de foi et une grande part d’enthousiasme charnel. Or les sentiments de la chair ne nous mènent pas bien loin, l’énergie de la chair, les bons désirs de la chair ne nous font pas franchir une seule étape du désert. Il faut autre chose que des sentiments naturels ; il faut Dieu, l’amour de Dieu. Et cet amour, c’est l’Esprit qui le verse dans nos coeurs et nous en fait jouir. La présence de Dieu exclut l’homme, la chair, même dans ce qu’elle a de bon, car elle nous gêne autant que dans ce qu’elle a de mauvais. Nous sommes tous d’accord pour dire que les mauvaises qualités de la chair sont une entrave pour le chrétien ; nous serions moins d’accord pour dire que les bonnes qualités sont une entrave ; il en est pourtant ainsi : «la chair ne profite de rien : les paroles que moi je vous ai dites sont esprit et sont vie» (Jean 6:63). Et quand le Seigneur parle ainsi, c’est de toute la chair, dans ce qu’elle a d’aimable comme dans ce qu’elle a de mauvais. C’est ce que nous avons à apprendre. La chair sérieuse, même religieuse, que de mal elle nous fait ! Mais Dieu nous aime trop pour nous laisser ainsi, il ne nous fera pas entrer dans le ciel avec la chair et il veut nous faire sentir la puissance de la mort sur la chair.
Il n’y a pas d’eau ; il faut crier à Dieu : un chrétien n’a pas de ressources, ne peut pas se désaltérer lui-même, ne peut pas assurer son bonheur spirituel une heure seulement. Si nous voulons être heureux en Dieu, il faut nous mettre à genoux, crier à Dieu pour qu’il nous donne la joie de sa communion. Nous pouvons aller avec une certaine énergie naturelle, laisser croire que nous sommes heureux. Mais cela ne va pas loin. Non seulement Dieu nous prive d’eau, mais il nous envoie les eaux amères : c’est la mort, les eaux de la mort ; on arrive à des eaux et c’est la mort. Dieu permet des difficultés, des épreuves, rien ne va comme on voudrait, tout est à l’encontre de nos désirs, de notre volonté. J’étais chrétien, tout est contre moi. Comment se fait-il que Dieu m’ait appelé pour se mettre en travers de mon chemin ? Dieu veut que nous fassions l’expérience de la puissance de la mort sur la chair, que nous appliquions la mort à la chair ; c’est l’expérience de toute la vie chrétienne. Nous voudrions aller avec notre chair non matée, non jugée, avec notre chair que le monde respecte et même cultive dans ce qu’elle a de bon. Non, Dieu nous aime trop et sait trop ce qui s’est passé à la croix, où il a condamné le péché dans la chair. La chair est en nous, mais nous ne sommes plus dans la chair. Dieu fait boire les eaux de la mort. Le chrétien ne sort pas de cette épreuve comme il y est entré ; il est un peu plus mort, un peu moins vivant dans sa chair, les ressorts cachés de son être ont été touchés par la main sûre de Dieu qui ne se trompe pas. Cela peut se passer dans la communion avec Dieu (nous ne parlons pas de nos infidélités : nous souffrons alors par notre péché, c’est autre chose). Dieu peut faire mûrir notre foi par des épreuves et nous pouvons les traverser en communion avec lui ; et si nous y sommes avec lui, nous disons : «C’est vrai, tu as raison, j’avais besoin d’être maté». On est en communion avec Dieu dans le jugement de soi-même. Quel heureux état lorsque nous sommes du côté de Dieu contre nous-mêmes ! Nous devons désirer cela. Il ne faut pas que nous soyons du côté de notre chair contre Dieu.
Une eau de Mara ! Nous ne voulons pas la mort, nous nous contentons de pouvoir dire : «Je suis sauvé par la grâce». Dieu le sait, il veut nous apprendre que Christ est mort pour nous, mais il dit aussi : «Tu es mort avec Christ, je vais te faire goûter la mort». La chair n’entrera pas au ciel. Nous voudrions la croix pour la dernière étape de notre course, et c’est dès la première que Dieu nous la donne. Cela change toute la vie chrétienne. Paul n’a pas pensé à la croix à la fin de sa vie, certains de nos devanciers non plus : ils l’ont prise au commencement. Le Seigneur nous dit : «Si quelqu’un veut venir après moi,… qu’il prenne sa croix» (Luc 9:23), c’est le secret du bonheur. Vous n’avez pas Dieu avec vous si votre chair agit, ce n’est pas possible.
Dieu nous envoie les eaux de Mara ; il a toutes sortes de moyens à sa disposition. Nous pleurons, nous gémissons, mais avec Dieu. Si Dieu châtie, c’est une chose excellente. Il est bon que toute ma vie, comme disait l’apôtre, je porte tous les jours la mort de Jésus (2 Cor. 4:10), que je ne tienne pas ma vie pour précieuse (Act. 20:24). Nous faisons tout ce que nous pouvons pour montrer que nous tenons notre vie pour très précieuse et nous y perdons. Nous y gagnons quant à la vie présente, mais nous y perdons quant à Dieu. Avoir Dieu avec soi fait oublier tout le reste.
Les eaux de Mara sont amères au commencement, et Dieu enseigne un bois : elles deviennent douces. Dieu envoie une épreuve, elle nous brise, nous transperce de toute part. Au commencement, on dit : «Dieu se trompe». Puis on a les yeux ouverts et on dit : «Il a raison, il ne se trompe pas et il nous envoie la douceur de la communion des souffrances de Christ». Nous oublions que le Seigneur a été l’homme de douleurs ; il a souffert tout en ayant une joie accomplie, mais la joie du ciel. Dieu voudrait que nous ayons communion avec son Fils quant à ses souffrances et que nous portions la mort de Jésus sur notre volonté propre. C’est cela qui nous fait mal. Dieu nous brise et nous amène, par les eaux de Mara, à la communion avec le Seigneur. Un de nos frères disait : «En toutes choses, la mort est le chemin de la liberté». La vraie liberté chrétienne, le vrai affranchissement chrétien n’a pas d’autre source que la croix de Christ. Nous sommes chrétiens, montrons-le ! Et pour montrer Christ, il faut la mort ; elle se manifeste dans la mesure où on l’applique à soi-même. Cela fait peur à tout le monde, de parler de la croix. On voudrait bien un évangile qui tolère, supporte, cultive la chair. C’est impossible. Dieu nous éprouve et veut nous briser, nous dépouiller, que nous n’ayons pas de pensées propres, de volonté propre. Il peut arriver aussi que Dieu veuille manifester et juger l’état général d’une assemblée. «Je suis l’Éternel qui te guérit» (Ex. 15:26) ; quelle douceur ! Il permet une plaie, une blessure, une épreuve, il nous guérit. Il le fait à un croyant individuellement comme aussi à une assemblée.
Il faut beaucoup prier pour que le Seigneur prenne soin de son Assemblée. Il faut espérer qu’il n’y ait pas un frère, pas une soeur, qui ne cesse de prier pour l’Assemblée. Si une soeur ne le fait pas — je dis une soeur, parce qu’on pourrait penser que ce n’est pas son service — elle n’est pas fidèle au Seigneur. Plus il y a de difficultés, plus il faut prier pour que les frères soient gardés de leur volonté propre. Plus il y a hésitation, plus il faut prier, sans relâche, afin que frères et soeurs soient gardés de leurs pensées personnelles, de tout parti pris et de toute influence qui ne serait pas celle du Seigneur lui-même. Personne n’a le droit devant Dieu d’influencer qui que ce soit. Toutes les fois qu’un élément étranger se glisse, il faudra qu’il soit jugé. Quel bonheur lorsque nous sommes dans la lumière de Dieu ! «Je suis l’Éternel qui te guérit». Il nous faut, dans tout ce qui concerne le peuple de Dieu, faire abstraction des personnes et penser à la vérité, à tout ce qui touche à Christ. Quel bonheur, quelle délivrance, lorsqu’on voit les principes de la vérité en Christ ! Alors, nous ne laissons pas se mêler les sentiments personnels en quoi que ce soit. Cela demande de l’exercice ; on a besoin de boire beaucoup les eaux de Mara pour cela, de les boire continuellement. On s’aperçoit, à l’expérience, qu’au fond on les redoutait, mais alors on les redoute moins. Paul pouvait dire : «Je prends plaisir dans les infirmités, dans les outrages, dans les nécessités, dans les persécutions, dans les détresses pour Christ : car quand je suis faible, alors je suis fort» (2 Cor. 12:10).
Après Mara, les soixante-dix palmiers d’Élim. Dieu prend soin de son peuple, il lui donne à boire. Que de fois il nous arrive d’être dans des situations où nous ne pouvons pas tenir ; on est altéré ; les difficultés de la vie, les charges, les soucis oppressent le coeur. On crie au Seigneur, le Seigneur rafraîchit : douze fontaines d’eau, soixante-dix palmiers ; ils boivent auprès des eaux. Soixante-dix, dans le Nouveau Testament, correspond au nombre des disciples : c’est le service confié par le Seigneur à l’homme pour le rafraîchissement et le bien de son propre troupeau. Est-ce que nous pensons aux réunions pour que le Seigneur nous mène aux eaux paisibles et aux verts pâturages, qu’on soit nourri, qu’on oublie ses peines, ses idées préconçues ? On se croit souvent très fort pour juger, apprécier et surtout déprécier. Il n’y a qu’un remède : que Christ vienne et soit là, Christ aliment et breuvage de son cher troupeau ; c’est Christ qui fait taire les murmures : on a murmuré contre Moïse !
Au chapitre 16, c’est le sabbat, le repos dans le voyage : Dieu a pensé à ce repos. Nous connaissons du repos dans le travail, dans la peine. Nous le trouvons dans la soumission à Christ. «Prenez mon joug sur vous, et apprenez de moi» (Mat. 11:29). Nous sommes agités, inquiets, et nous manquons de repos : nous avons fait notre propre volonté ; notre volonté n’est pas brisée, il ne faut pas aller chercher plus loin. «Prenez mon joug sur vous… et vous trouverez le repos de vos âmes». Ce n’est pas le travail qu’on effectue avec Christ qui nous fatigue, mais plutôt un repos sans Christ. Paul pouvait dire : «Plût à Dieu que… vous devinssiez de toutes manières tels que je suis, hormis ces liens» (Act. 26:29). Paul jouit du repos malgré toutes ses peines, ses épreuves, ses souffrances ; il se réjouissait dans le Seigneur. Il faut nous y appliquer. Il faut beaucoup prier. Dans la prière, on se dépouille, on trouve Dieu, on voit clair. Il faudra peut-être des heures pour arriver à dire : «Je me trompais, je me croyais dans la vérité, j’étais dans l’erreur». Un chrétien sans Dieu, c’est une anomalie. Nous parlons du vrai chrétien, car le professant n’est pas un chrétien.
Christ, notre manne, vrai pain du ciel, divine nourriture. Est-ce que nous nous nourrissons de Christ, est-ce que c’est lui qu’il faut à notre âme, hier, aujourd’hui, demain s’il y en a un, et à toutes les heures de tous les jours ? «Seigneur, donne-nous toujours ce pain-là» (Jean 6:34). Si nous avons mangé de ce pain, il ne nous en faut point d’autre. Nous ne pouvons pas être heureux sans Christ, nous devrions y penser dans notre vie privée et dans les réunions pour que véritablement Christ soit la nourriture de tous. On désire le ciel, parce qu’on ne se nourrira que de lui.
La manne a cessé quand ils sont entrés au pays, au commencement de Josué ; ils gardaient le souvenir de la manne dans une cruche d’or. «À celui qui vaincra, je lui donnerai de la manne cachée» (Apoc. 2:17), c’est la communion avec Christ. Est-ce que nous cultivons cette communion ? Est-ce que nous trouvons notre bonheur à être avec Christ et Christ seul, avec Dieu et Dieu seul ? Est-ce le secret de notre vie ? On est bien plus heureux avec lui dans une prison que sans lui au milieu des honneurs de ce monde.
Au chapitre 17, le peuple murmure, il n’y a pas d’eau. Moïse crie à Dieu. Dieu lui dit : «Prends dans ta main ta verge avec laquelle tu as frappé le fleuve, et va… Tu frapperas le rocher, et il en sortira des eaux, et le peuple boira» (Ex. 17:5-6). Il a fallu beaucoup de foi à Moïse, une foi à laquelle personne ne peut prétendre. Avoir la responsabilité de millions d’êtres et croire Dieu sur parole quand il dit : «Je passerai par-dessus vous» (Ex. 12:13) ; il n’est pas dit que Moïse n’ait pas tremblé toute la nuit ; «par la foi, il a fait la pâque» (Héb. 11:28). Il lui a aussi fallu de la foi pour franchir la mer Rouge, le puissant Pharaon avec toute son armée derrière lui, conducteur d’un peuple sans défense avec femmes et enfants. On ne trouverait pas dans toute la Parole d’exemples d’hommes de foi qui n’aient pas connu la souffrance. Plus il y a de foi, plus il y a de souffrances, plus il y a d’exercices. Volontiers nous nous créerions une vie de foi facile, aisée, honorée.
On crie à Moïse, Moïse crie à Dieu, c’est sa ressource, son refuge ; il frappe le rocher, l’eau coule, c’est la croix. «Ils buvaient d’un rocher spirituel qui les suivait : et le rocher était le Christ» (l Cor. 10:4). Ce verset montre l’unité de la pensée de Dieu par l’Esprit : «Le rocher était le Christ». Nous buvons de l’eau du rocher frappé à la croix tout le long du chemin, une étape après l’autre ; nous buvons du fleuve de la grâce qui coule de la croix, le fleuve de l’amour de Dieu. Plus tard, Moïse a frappé une deuxième fois le rocher, il lui en a coûté l’entrée du pays de la promesse : Christ n’a été frappé qu’une fois. Moïse aurait voulu entrer dans le pays, mais Dieu lui dit : «C’est assez, ne me parle plus de cette affaire» (Deut. 3:26). Le coeur de Dieu en a certainement souffert aussi.
On peut ne pas s’attacher au monde, mais lui s’attache à nous, comme la boue à la semelle de nos chaussures. Alors nous avons soif : buvons à la source de la grâce, elle est toujours fraîche. Il faut prier pour que pratiquement cette source jaillisse dans le rassemblement des saints, que tous viennent s’abreuver. À la fin de l’Apocalypse, l’Assemblée remplace le Seigneur pour dire : «Que celui qui a soif vienne» (Apoc. 22:17) ; c’est le langage du Seigneur en Jean 7:37 : «Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi». Aujourd’hui encore, une assemblée locale devrait être dans un état tel qu’elle proclame aux hommes : «Venez, buvez». Un homme inconverti, dans la détresse, qui a soif, devrait trouver la source dans le rassemblement des saints. Ce devrait être notre constant exercice. De même un frère ou une soeur altéré devrait boire dans le rassemblement des saints, sinon nous perdons notre temps.
Puis, c’est le combat. Amalek, image de la puissance de Satan, se met au travers du chemin. Dieu le laisse : «Vous aurez la guerre…» ; Amalek a été une épreuve pour Saül qui l’a épargné ; mais Samuel s’avance et sait employer l’épée. C’est un ennemi avec lequel nous n’avons pas à transiger ; c’est l’image de Satan sous toutes ses formes. Dieu permet que, tout le long du voyage, le peuple ait affaire à cet ennemi ; il brisera bientôt Satan sous nos pieds, mais le peuple céleste de Dieu sera harcelé par Satan jusqu’à ce jour. Nous ne pouvons ni nous nourrir, ni nous défendre. C’est une leçon difficile. On se croit très fort, surtout quand on est jeune ; puis on sent qu’on n’est pas fort et que l’ennemi, lui, est très fort ; cela fait une double différence. Quand les mains de Moïse se lèvent, le peuple a le dessus ; quand elles baissent, Amalek a le dessus. Aaron et Hur interviennent : Aaron, le sacrificateur ; Hur, image de la sainteté ; il faut de la sainteté pour que Dieu intervienne. La sainteté pratique assure la faveur de Dieu et la victoire pour son peuple. Mais il n’est pas dit que le peuple ait toujours le dessus ; c’est solennel ! «Jéhovah-Nissi» : après la délivrance Moïse bâtit un autel. Lorsque Dieu nous délivre, nous devrions toujours rendre grâces à Dieu, dans notre vie individuelle et dans notre vie collective, où l’ennemi intervient de bien des manières.
Que le Seigneur nous accorde d’unir une sainte confiance à un saint tremblement. Si nous étions absolument dépendants de lui, l’ennemi n’aurait pas de prise. Le bonheur et le repos, c’est l’obéissance.
[LC n° 6]
12 février 1950
Méditations sur la vie chrétienne, édition FR 1995, p. 17
Le peuple d’Israël a été délivré de l’Égypte et il chemine dans le désert. Il a faim, il a soif. Il réclame, il conteste, il murmure. De la même manière, aujourd’hui, des chrétiens se plaignent que le chemin est difficile, étroit, qu’ils étaient bien mieux dans le monde, lorsqu’ils étaient inconvertis, parce qu’ils faisaient ce qu’ils voulaient. Ils oublient que sous cette apparence de liberté, dans laquelle se trouve l’homme inconverti, il y a en réalité un esclavage de fer. L’expression «fournaise de fer» (Deut. 4:20) définit la position d’Israël en Égypte. Il nous arrive à tous de nous plaindre, et quand un chrétien se plaint, il se plaint de Dieu, il outrage Dieu ; c’est comme s’il disait à Dieu : «Qu’est-ce que tu as fait, ne pouvais-tu pas me laisser où j’étais ?». Un chrétien ne peut jamais retourner à l’état où il était ; il peut retourner dans le monde, mais non pas redevenir un inconverti. Dans le ciel on ne se plaindra pas de Dieu ; tout le monde chantera la gloire de Dieu. C’est sur la terre, dans le désert, qu’on se plaint de Dieu. On lui dit : «Tu t’es trompé ; je ne trouve pas mon compte dans ce que tu as fait pour moi». Toutes les fois que Dieu nous serre un peu de près et que nous nous plaignons, nous oublions qu’il veut notre bien, ou nous disons même qu’il veut notre mal. C’est l’histoire de tous les chrétiens, en particulier des chrétiens mondains.
La Pâque n’a pas eu lieu dans le désert, mais en Égypte. S’il n’y avait pas eu la Pâque en Égypte, le peuple n’aurait pas pu en sortir ; car Dieu n’aurait pas pu frapper les premiers-nés des Égyptiens sans frapper aussi ceux d’Israël. Il ne pouvait pas dire : «Israël est un peuple saint», puisqu’il était un peuple pécheur ; les Israélites n’étaient pas en meilleur état que les Égyptiens, sauf quelques-uns : Moïse par exemple. Si Dieu «sort de son lieu» (És. 26:21 ; Mich. 1:3) pour frapper, il doit frapper le mal partout où il le trouve. Il devait frapper les Israélites aussi bien que les autres ; c’est pourquoi la Pâque devait avoir lieu en Égypte, en deçà de la mer Rouge. Pour que le peuple puisse traverser la mer Rouge, il fallait qu’il soit déjà libre quant à Dieu, que ses comptes avec lui soient réglés. Avant d’avoir affaire au Pharaon, à la mer Rouge, à tous les ennemis qu’on peut rencontrer, il faut d’abord avoir affaire avec Dieu. La première de toutes les questions, pour qui que ce soit, c’est de se mettre d’accord avec Dieu. Israël n’échappe pas à ce principe, qui est lié à la nature même de Dieu. Dieu est le maître de tout ; tout le monde lui appartient et tout le monde aura affaire à lui.
La Pâque abrite le peuple. Le mot «pâque» dérive d’un mot qui veut dire : passer par-dessus ; le jugement de Dieu est passé par-dessus le peuple, de même qu’il est passé par-dessus tout croyant : «Je verrai le sang, et je passerai par-dessus vous» (Ex. 12:13). Le vrai peuple de Dieu est celui sur lequel le sang de Jésus a été mis et qui se trouve ainsi à l’abri du jugement. Aujourd’hui, il s’agit d’individus ; pour les Israélites, il s’agissait d’un salut collectif : tous ceux qui en bénéficiaient n’étaient pas nécessairement de vrais croyants. Aujourd’hui, tout vrai croyant est à l’abri du sang de Jésus, de sorte que le jugement de Dieu ne viendra pas sur lui ; il peut avoir des relations avec Dieu. Dieu, à proprement parler, n’instruit pas, n’enseigne pas un inconverti ; il s’occupe d’abord de le sauver. Tant qu’un homme n’a pas le sang de Christ sur lui, il n’a aucune relation vitale avec Dieu. Il n’est pas du peuple de Dieu. Dieu ne l’enseigne pas ; cela ne veut pas dire qu’il ne s’occupe pas d’un inconverti ; il peut le bénir lorsqu’il lit la Parole et cherche à l’appliquer. Dans tous les milieux, d’ailleurs, la Parole lue, même sans être crue, a fait du bien ; elle a une puissance intrinsèque pour rejeter le mal et apporter du bien. Tous les pays où la Parole a été lue ont eu une supériorité morale sur les autres. Dans ces mêmes pays, où elle n’est plus lue, on observe une régression : la conscience devient plus lâche, la crainte de Dieu s’en va. C’est un phénomène caractéristique de notre temps, inverse de celui qui a marqué l’heureux effet de la Parole de Dieu quand elle était lue.
Le peuple d’Israël a sur lui le signe du sang de l’agneau ! Tel est le chrétien dans ce monde ; il a sur lui le sang de l’Agneau. On n’est pas chrétien sans cela. Ce n’est pas parce que les parents ont cru que les enfants croient ; ce n’est pas parce que les parents sont engagés dans le chemin du ciel que les enfants le sont ; il faut, chacun pour son compte, comme si on était tout seul, croire en Jésus.
Une fois que Dieu a mis le peuple à part pour lui, il s’en occupe pour l’enseigner. Il l’arrache d’abord à son propre jugement : c’est la Pâque ; puis la puissance du Pharaon est détruite : c’est la traversée de la mer Rouge. Ensuite il lui fait traverser le désert. Le chapitre 18 de l’Exode est une figure du millénium ; Israël, un jour, connaîtra le millénium, non pas sous le régime de la loi (elle n’est donnée qu’à partir du chapitre 19), mais de la seule grâce de Dieu. Cette succession de faits illustre le conseil de Dieu à l’égard de son peuple céleste.
Au chapitre 15, Israël a chanté son premier cantique ; il est très beau. Tout le monde est content, tout le monde a traversé la mer Rouge. L’horizon pourtant n’est pas agréable, guère plus que l’Égypte : si la mer Rouge est derrière, le désert est devant. Mais le Pharaon est abattu, et tout le monde a chanté dans le désert, comme on chante au départ de la vie chrétienne. La joie était totale. Il n’y avait pas de note discordante ; on ne pensait qu’à Dieu, à la délivrance de Dieu, à la gloire de Dieu : Dieu s’occupait de son peuple pour le bénir. Immédiatement après commence la marche dans le désert : trois jours… et on ne trouve point d’eau. À Mara, les eaux sont amères.
Quand quelqu’un est converti, il chante (nous avons tous connu cette joie de la conversion) ; Dieu remplit son âme, il ne voit rien d’autre, c’est très beau. Puis Dieu le conduit dans le désert, et, après trois jours d’épreuve, cette âme murmure. Elle a chanté et maintenant elle murmure. Pourquoi ? Parce que, dans le désert, elle a trouvé une source qui s’appelle Mara : amertume. On trouve ce mot dans Ruth : «Appelez-moi Mara ; car le Tout-Puissant m’a remplie d’amertume… Le Tout-Puissant m’a affligée» (Ruth 1:20-21). Dieu nous appelle, il nous convertit, puis il nous fait marcher. Il veut que nous apprenions à le connaître expérimentalement et il veut que nous apprenions à nous connaître expérimentalement.
Un jeune homme est converti, c’est le doigt de Dieu. Mais que de choses à apprendre, que d’expériences à faire ! Sa joie, plus tard, sera plus grave, plus intérieure, plus égale, plus sérieuse. Il aura puisé l’eau qui rafraîchit son âme à une profondeur plus grande. La joie du départ n’est pas le signe supérieur du travail de Dieu dans une âme.
Mara : les eaux amères, une eau qui ne désaltère pas, une eau qui donne l’amertume. C’est une expérience qui apporte la souffrance dans notre âme, au lieu de la paix ; une circonstance que Dieu permet, une écharde qu’il nous envoie, une discipline. Et nous disons : «Seigneur, pourquoi Mara ?» et nous murmurons. Il nous faut en connaître, des Mara, au long d’une vie ! Un chrétien qui a fait trois jours, et trois jours, et encore trois jours, et qui, chaque fois, a rencontré Mara, connaît Dieu d’une manière bien supérieure à celui qui n’est encore qu’au bord de la mer Rouge, où il a vu la main de Dieu abattre son adversaire. On ne traverse pas ce désert sans pleurer, personne n’a traversé ce monde sans pleurer (et je ne parle pas ici des larmes qu’un chrétien verse parce qu’il a manqué) ; Dieu le permet à cause de ce que nous sommes, de notre nature indomptable, de notre volonté intraitable, contre laquelle personne n’a rien pu faire ; Dieu s’en occupe. Il s’occupe de nous de très près, pour nous briser, pour que nous ne comptions que sur lui. À la mer Rouge, le peuple apprend à connaître Dieu, mais il ne se connaît pas lui-même, pas du tout.
Dieu envoie, à chacun de nous, une discipline appropriée. Dieu ne se trompe pas ; son doigt touche juste. Le chrétien ne reçoit pas de Dieu tout ce qu’il voudrait, heureusement. Ceux qui ont suivi le Seigneur de plus près sont ceux que le Seigneur a le plus éprouvés. L’apôtre Paul a eu une écharde ; elle le gênait. Trois fois il dit : Seigneur, je te supplie de me retirer cette écharde. — Non, ma grâce te suffit (2 Cor. 12:8-9). Elle était, chez Paul, préventive. Pour nous tous, il y a des disciplines préventives ; d’autres sont destinées à nous ramener après un écart. Dieu nous bride, sa main est forte, il n’y a pas à regimber, il n’y a rien à faire. Et Dieu est plein de grâce.
Dieu a appelé un homme, il l’a converti, il s’en occupe ; peut-être que cet homme converti est vite retourné dans le monde, trouvant que, étant sauvé pour le ciel, il peut s’amuser sur la terre. Dieu ne le perd pas de vue et le trouvera à son moment. Nous voulons faire ce que nous voulons, mais Dieu fait ce qu’il veut. Nous ne nous appartenons plus à nous-mêmes. Si Dieu ne nous tenait pas par l’épreuve, nous serions capables de tout ; nous en faisons déjà bien assez ! Quand nous ne marchons pas d’une façon obéissante et intelligente, Dieu nous envoie la bride et le mors.
Voilà donc Mara, une terrible épreuve, une situation sans issue ; des centaines de milliers d’hommes, de femmes, d’enfants, tous ont soif ; situation terrible pour Moïse, mais pas pour Dieu. Retourner en Égypte ? Dieu n’a pas dit qu’il ouvrirait de nouveau la mer Rouge ! Il l’a ouverte pour faire avancer le peuple, et non pour le faire reculer. Il n’y a rien à faire ; tout est contre le peuple de Dieu : le désert et une source amère. On comprend le peuple : «Nous étions mieux en Égypte ; on vivait au jour le jour, mais on vivait». On a oublié les briques, mais on se souvient du poisson et des poireaux (Nomb. 11:5). Voilà ce que fait le chrétien mondain ; il dit : «Mieux vaudrait ne pas être chrétien !». Est-ce cela que Dieu veut ?
Une détresse extrême est une opportunité pour Dieu. Quand tout se ligue contre quelqu’un, Dieu dit : «C’est très bien, personne ne peut rien pour toi ; toi, tu ne peux rien non plus ; je vais entrer en scène». Il est toujours le Dieu qui a dit : «Quelque chose est-il trop difficile pour moi ?» (Jér. 32:27). Nous ne savons pas utiliser les ressources que nous avons en Dieu.
L’Éternel enseigne un bois à Moïse, Moïse le jette dans les eaux, et les eaux deviennent douces. Dieu ne fait pas jaillir une autre eau. C’est l’eau de Mara qui est transformée en une eau douce, qui apaise la soif du peuple. Le Seigneur lui-même jette, pour ainsi dire, la vertu de sa mort dans notre âme volontaire, car le bois nous parle de sa croix ; il fait alors connaître la paix à notre esprit brisé. Ce sont les mêmes eaux, les mêmes circonstances, mais le Seigneur m’apprend à les traverser avec lui ; il a brisé ma volonté, et il me reste la douceur et la paix : l’épreuve devient une source de rafraîchissement pour mon âme. Ce n’est pas facile, cela, c’est même impossible, mais c’est le travail de Dieu en nous et pour chacun. Il n’y a pas de chrétien qui ne connaisse des circonstances extraordinaires. Dieu veut que nous nous appuyions sur lui. Si nous n’avions pas un atome de volonté propre, nous serions toujours en paix, même affligés ; nous ne compterions que sur Dieu, toujours. Ce qui nous trouble, à notre insu, c’est notre volonté propre. Il y en a beaucoup plus que nous ne le pensons dans tout ce que nous faisons !
Un bois est jeté : un bois, la croix, la mort ; le Seigneur nous met de côté, met de côté notre volonté. Non seulement Jésus est mort pour le chrétien (c’est ce qu’on apprend avec la Pâque), mais le chrétien est mort avec Christ. La réalisation pratique de cela rend le chrétien libre, heureux et affranchi. L’apôtre l’a réalisé ; il a connu la souffrance, mais on ne pouvait pas lui enlever sa joie, sa paix. Nous perdons facilement la joie et la paix, parce que nous avons dans notre coeur toutes sortes d’objets que nous aimons ; quand Dieu nous en enlève un, nous sommes irrités contre lui. Si nous pensions à sa gloire, nous serions d’accord avec lui.
Mara ne nous parle pas des conséquences amères de nos infidélités. Plus un chrétien est fidèle, plus il connaîtra Mara, les eaux amères ; en un sens, toute notre vie dans ce monde est un Mara, mais elle est transformée si nous jetons le bois dans les eaux amères : elles deviennent douces. Être à Mara avec Jésus vaut mieux que d’être en Égypte sans lui. On ne vit pas de vérités, de principes ; il nous faut la présence de Christ là où on est. Il met quelquefois très longtemps pour changer nos circonstances et nous disons : «Ne peux-tu pas aller plus vite ?». Mais, avant de les changer, il vient avec nous et nous donne la patience, la paix et le repos.
Mara n’est pas un incident dans la vie du chrétien ; c’est toute sa vie. Si un chrétien ne rencontre pas Mara dans sa vie, cela prouve que, de coeur, il est retourné en Égypte. Ce qu’il nous faut, c’est connaître Christ dans nos circonstances, le connaître personnellement. Si un chrétien ne jouit pas du Seigneur, il va boire à toutes sortes de sources dans le monde. Le Seigneur Jésus veut être avec nous tous les jours : «Voici, je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la consommation du siècle» ; c’est le dernier verset de l’évangile de Matthieu.
Que le Seigneur nous donne de nous tenir tous, et toujours, près de lui ; qu’il nous fasse faire l’expérience que, s’il n’enlève pas Mara, il change les eaux de Mara. Être avec le Seigneur en tout temps, en tout lieu, que ce soit notre affaire !
[LC n° 7]
Dimanche après-midi 5 mars 1950
Je ne pourrai pas entrer dans le détail de ces deux chapitres tout à fait remarquables qui viennent après la mise en fonction des sacrificateurs.
Dieu avait son camp, il avait ses serviteurs. Mais les sacrificateurs seuls avaient un accès dans sa présence, un accès relatif jusqu’à Dieu. C’est toujours vrai ; il n’y a que les sacrificateurs qui ont accès en la présence de Dieu. Qui est sacrificateur aujourd’hui ? Tout vrai croyant. Un enfant de dix ans converti n’est pas un lévite, c’est-à-dire qu’il n’a pas un ministère, pas plus qu’une soeur n’a de ministère proprement dit. Mais une soeur, aussi bien qu’un enfant vrai chrétien, sont des sacrificateurs : ils sont approchés de Dieu. Un enfant de dix ans converti est aussi près de Dieu, en fait, que l’apôtre Paul l’était ; il n’y a pas de différence, à cet égard. Mais quelqu’un qui n’est pas converti peut avoir soixante ans de vie dite chrétienne derrière lui, il n’est pas plus près de Dieu que le premier des blasphémateurs, que le plus endurci des incrédules.
Ce qui approche de Dieu, c’est le sang de Christ. La seule puissance qui puisse répondre aux exigences de Dieu vis-à-vis d’un homme, quel qu’il soit, c’est le sang de Jésus mis sur le croyant. Dieu voit le sang et reçoit l’homme. Dieu ne met jamais dehors quelqu’un qui vient à lui avec le sang de Jésus sur lui ; il ne le peut pas. La valeur du chrétien est dans le fait que ce chrétien a reçu l’aspersion du sang de Jésus. C’est l’exclusive valeur du chrétien au point de vue de son accès dans la présence de Dieu. Tout homme qui n’a pas reçu pour son compte, comme s’il était tout seul, l’aspersion du sang de Jésus Christ, n’est pas près de Dieu. Il peut dire qu’il est près de Dieu ; il peut répondre : «Je connais Dieu aussi bien que vous ; je suis chrétien aussi bien que vous», c’est un menteur. Et si le chrétien peut proclamer qu’il est approché de Dieu, il ne dit pas : «J’étais meilleur que mon voisin, c’est pourquoi Dieu a été obligé de me recevoir». Quelquefois, on se croit meilleur que son voisin, et on croit qu’on a forcé Dieu à nous recevoir. Avoir par soi-même un droit à la présence de Dieu, quelle aberration !
Quand nous verrons ce que c’est que la présence de Dieu, nous comprendrons qu’il n’y en a pas un qui ait atteint à la gloire de Dieu !
On peut atteindre aux gloires des hommes, et plusieurs auront vendu leur âme pour atteindre aux gloires de l’homme (l’auront vendue au diable, chef de ce monde). Mais seul le sang de Jésus Christ nous ouvre les lieux très saints, c’est-à-dire ouvre, à quelque homme que ce soit, l’accès à la présence de Dieu lui-même. C’est la gloire suprême, la perfection éternelle et suprême, qui rassasiera l’âme du croyant : contempler aux siècles des siècles ce qu’est Dieu dans sa gloire !
Notre âme ne peut pas se nourrir de la gloire du monde et de la gloire de Dieu. Si quelqu’un veut le faire, il aura la gloire du monde, mais pas celle de Dieu. Si son âme aime ce pain mensonger que le monde donne, Dieu ne lui donnera pas de se nourrir de sa gloire ; Dieu est fidèle. Et cela est vrai, dans les petits, tout petits détails de notre vie chrétienne : il suffit d’une petite gloire du monde pour nous cacher la gloire de Christ. Chacun voit cela, dans sa vie, ou quelquefois dans la vie des autres. Combien facilement un voile est jeté sur le regard d’un chrétien, un voile mondain — peut-être un voile religieux — qui empêche ce chrétien de voir la gloire de Dieu ! Tout ce qui n’est pas de Dieu est contre Dieu, et est mauvais pour le chrétien.
Ce qui est extrêmement frappant, dans ces chapitres, ce sont les exigences de la présence de Dieu. On se demande souvent : Mais comment un Israélite pouvait-il arriver à se tenir devant Dieu ? Cela devait être impossible ; et, pratiquement, c’était impossible. Il était impossible qu’un Israélite fût toujours dans un état qui satisfasse Dieu. Dieu faisait un essai ; avec les meilleurs conditions possibles, il a fait un essai, et cet essai est fini. Il y en a qui le recommencent, comme s’ils étaient plus sages que Dieu. Il y a peut-être quelqu’un ici qui veut forcer Dieu à dire : voilà quand même quelqu’un qui est bien, un juste. Dieu a déjà dit d’avance : Il n’y a pas un juste, pas même un seul (Rom. 3:10). Est-ce que Dieu, quand il fait écrire quelque chose, est obligé de le corriger ? Impossible ! Nous, nous corrigeons ce que nous avons écrit, mais Dieu ne se corrige jamais. Ce qu’Il a écrit est bien écrit. Ainsi, il n’y a pas un juste, pas même un seul. Il y a eu un juste, Jésus, dont le sang a coulé sur la croix. C’est le sang de ce seul juste qui lave le péché du croyant qui, d’injuste qu’il est par nature, devient juste aux yeux de Dieu ; le sang de Jésus ! Qu’il soit donné à quiconque, ici, qui parle de Dieu et des choses de Dieu, de ne jamais perdre de vue le sang de Jésus, la croix de Jésus ! Toute la lumière rayonne de la croix ; elle éclaire tout. La lumière part de la croix ; les rayons de la lumière divine partent de la croix. Sans la croix, le monde est une énigme impossible à résoudre.
C’est pourquoi l’ennemi, qui a été battu complètement à la croix, s’efforce de cacher la croix, même parmi nous. On ne veut pas du scandale de la croix de notre Seigneur Jésus Christ, des infinies conséquences de la croix de notre Seigneur Jésus Christ ; on ne veut pas de cela ! Qu’il nous soit donné de ne jamais faire ou dire quelque chose qui affaiblisse, sur le coeur et la conscience de quelque homme que ce soit, le sens de la croix de notre Seigneur Jésus Christ.
Un christianisme sans la croix, c’est chose courante. C’est très bien ; on attire avec lui beaucoup de monde. Mais un christianisme avec la croix fait un triage serré. On n’entrera pas au ciel, sans la croix. «Le royaume de Dieu est pris par violence et les violents le ravissent» (Matt. 11:12).
Nous trouvons donc, dans ces chapitres, quelque chose de relatif à la lèpre. Toute la Parole de Dieu parle de la lèpre. Dans toute la Parole de Dieu, on voit des maux, des misères ; on voit ce qu’est l’homme. Dieu nous dit ce qu’est l’homme, toutes ses misères, ses péchés, ses choses honteuses. Tout ce que l’homme fait, pense, dit, on le trouve dans la Parole de Dieu. Quel livre que la Parole de Dieu !
Ah, des gens «très bien pensant» auraient voulu que Dieu ne mette que de très belles choses sur l’homme ! Mais Dieu a voulu faire un portrait parfait, vrai, ressemblant, et gravé. Votre péché est écrit avec un style de fer, dit le prophète (Jér. 17:1). Voilà comment Dieu nous voit et nous dépeint.
Dans ce monde, lorsqu’un artiste fait un portrait, il embellit le sujet tant qu’il peut, cache les taches et met en valeur ce qui peut être avantageux ; sinon, personne ne voudrait plus le faire travailler. Mais Dieu ne fait pas du tout ainsi. Et Dieu fait un portrait très général, mais qui a cette force particulière que, quand le croyant le lit, il dit : c’est mon portrait ; c’est tout à fait juste, ce que Dieu dit ; c’est pour moi qu’il a parlé. On trouve en Dieu quelqu’un qui dit les choses comme elles sont. Heureusement, nous avons un livre qui nous dit ce que Dieu voit, ce que Dieu pense. C’est le seul livre qui le fait ; c’est ce qui fait la valeur de la Parole de Dieu, pour la foi. C’est comme un projecteur qui fouille la conscience de l’homme, les replis de son âme, et qui force à dire : Voilà ce qu’est l’homme.
Les chapitres 13 et 14 sont relatifs à la restauration du croyant qui a péché, plutôt qu’au salut du pécheur. Ils présentent certainement de précieuses instructions pour tous ; mais ils sont relatifs à la restauration du croyant qui s’est écarté, plus qu’au salut d’un homme qui n’est pas encore converti — qui s’estime peut-être le meilleur chrétien du monde, mais qui est perdu et marche vers l’enfer, s’il n’est pas placé sous l’efficace du sang de Jésus.
Au sujet du lépreux, nous trouvons, dans les Évangiles (les enfants s’en souviennent, et cela est gravé dans l’esprit de ceux qui sont allés, il y a trente, quarante, cinquante, soixante ans, à l’école du dimanche), ces récits de Jésus allant, venant, rencontrant partout des misères, et en particulier des lépreux. Il ne rencontrait que cela ; tout ce mal couvert sortait au passage de Jésus. Et, chose très remarquable, le Seigneur, à quelque mal qu’il ait à faire, au mal en apparence le plus extérieur ou le plus physique, le rattache toujours à une question morale. L’origine du mal, quel qu’il soit, c’est le péché. S’il n’y avait pas de péché, il n’y aurait pas de malade, il n’y aurait aucune maladie du corps ou de l’esprit. Le péché est entré dans le monde, et avec le péché, la maladie, la mort, et tout le cortège des maux qui rongent l’homme tout entier. C’est pourquoi le mal, quel qu’il soit, a, pour la Parole de Dieu et pour la foi, une signification morale.
Quant un homme touchait un lépreux, il y avait deux lépreux au lieu d’un. Mais, quand le Seigneur touchait un lépreux, celui-ci était guéri. Voilà ce qu’était Jésus. Il a pris contact avec notre misère. La lèpre, c’est le péché dans son caractère de souillure.
Le péché a deux caractères. L’un, c’est la souillure. Le péché est laid ; il abaisse, il avilit ; il est honteux. L’autre caractère, c’est celui de culpabilité. On est souillé et on est coupable. Le péché souille, et le péché donne une mauvaise conscience. Quelqu’un qui a commis un péché n’ose plus aller dans la lumière. Il cherche l’ombre, le noir, parce que la lumière fait voir une tache. La souillure est une chose qu’on ne peut pas supporter. Il y a un second trait du péché, la culpabilité. Dieu a des droits, et le péché offense Dieu. C’est du désordre, et Dieu est un Dieu d’ordre ; et Il veut que sa maison soit en ordre, et son ciel. Les nouveaux cieux et la nouvelle terre sont des lieux où l’ordre habite, un ordre parfait, inattaquable et inaltérable.
La lèpre, c’est le péché dans son caractère de souillure. L’homme n’est pas brillant. Il cherche bien à se vêtir proprement, à paraître, moralement et de toutes façons, très brillant aux yeux des hommes ; mais l’homme est un être souillé, entièrement souillé. On peut lui faire la morale, on peut faire des livres sur la morale, pour tâcher d’arranger l’homme. Il est comme cet homme dont parle l’Évangile, qu’on ne pouvait pas dompter : il brisait toutes les chaînes. De même, aujourd’hui, l’homme brise toutes les chaînes : l’éducation, les dogmes, toutes les règles auxquelles on veut l’astreindre ; il brise tout, il est déchaîné. Impossible de dompter l’homme !
Alors c’est un immense progrès, lorsque l’âme d’un croyant avance dans cette conscience de ce qu’il est par nature, de cet état affreux, objet d’horreur. Comment ? Je suis cela ? Oui, c’est cela que je suis ! Et c’est un des signes de la conversion. Un converti, qui avait jusque-là une très bonne opinion de lui, Dieu le fait se jeter dans la honte, devant Dieu. Qu’il nous soit donné d’en avoir fini avec l’homme. Et on voit des chrétiens s’enthousiasmer pour des personnes de renom ! Comment ? Des chrétiens peuvent avoir oublié ce portrait que Dieu a tracé de tout homme, pour s’enthousiasmer pour ce qui est faux et péché !
Ce sentiment de ce qu’on est par nature croît dans un chrétien, s’il vit un peu avec Dieu. Et ce chrétien comprend de plus en plus que Jésus n’est pas mort pour rien !
Peut-être que quelqu’un pense que Jésus est mort pour rien, c’est-à-dire qu’il n’était pas nécessaire qu’il versât son sang, qu’il eût suffi que Jésus parlât. Quelqu’un ose-t-il penser que Jésus n’est simplement qu’un modèle ? Mais le croyant, enseigné de Dieu, dit : «Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ de ce qu’il m’a donné un Sauveur, quelqu’un qui s’est chargé de mes péchés, de mon péché». «À celui qui nous aime et nous a lavés de nos péchés dans son sang, à lui soit la gloire, la reconnaissance aux siècles des siècles» (Apoc. 1:5-6).
Je ferai tout d’abord la remarque que c’est le sacrificateur qui examine le cas présumé de lèpre ; ce n’est pas le lépreux. Il n’est pas dit ici : Le malade regardera sa propre plaie. Il est dit : Le sacrificateur regardera. Combien de fois il est dit : Le sacrificateur regardera, verra, etc. !
Dans toute cette activité, le lépreux, ou plutôt celui dont on peut craindre qu’il soit lépreux, ne dit rien. C’est au sacrificateur, exclusivement, qu’incombe la charge d’examiner. Il est dit : le sacrificateur ou l’un de ses fils. Quel est l’enseignement lié à cette remarque ? C’est que, pour juger d’un cas moral, d’un cas possible de lèpre, de péché, eh bien, on ne peut le faire que par la qualité de sacrificateur. C’est un service qui échoit au sacrificateur. Un chrétien n’est pas que sacrificateur. Celui qui prêche l’évangile n’accomplit pas en cela un service sacerdotal, mais celui d’un lévite. Mais quelqu’un qui prie, qui adore, est un sacrificateur. Le sacrificateur se tient dans la présence de Dieu, dans le lieu très-saint, où il acquiert, progressivement, et de plus en plus, l’intelligence de ce qui convient à la présence de Dieu. Ce service est ouvert à tous les chrétiens, et tous sont invités à le remplir.
Un enfant, s’il jouit de Dieu, de sa présence par la foi, aura un jugement plus sûr sur le mal qu’il voit autour de lui qu’un chrétien plus âgé mais mondain, parce que son jugement sera lié à Dieu lui-même. C’est le sacrificateur qui juge les choses, c’est-à-dire celui qui a le privilège de se tenir dans la présence de Dieu. Les frères et les soeurs n’ont pas à agir toujours en qualité de sacrificateur. C’est le service le plus élevé, et qui suppose le plus de discernement spirituel, le plus de proximité avec Dieu. Il y a des activités, dans notre vie chrétienne, qui ne sont pas sacerdotales. Mais, lorsqu’il s’agit de juger, d’apprécier le mal, nous le faisons en qualité de sacrificateur. C’est un point fort important. C’est pourquoi, lorsque nous sommes légers, lorsque nous fuyons la présence de Dieu, ou si nous sommes mondains ou peu exercés devant Dieu, nous ne sommes pas capables d’apprécier le mal. Quand ce sera une apparence de lèpre, nous dirons : Voilà une lèpre ; et quand ce sera une vraie lèpre, nous dirons : C’est quelque chose d’insignifiant. Nous nous tromperons.
Je ne puis que résumer ces deux chapitres et les recommander à la lecture de chacun. Il y a deux sortes de lèpre, dans ces deux chapitres (au chap. 14:33-53, il y en a une troisième) : une lèpre liée à l’individu, et une lèpre liée au vêtement. Le vêtement, ce sont les circonstances, tandis qu’une lèpre dans la personne est liée à l’individu. Dans les deux cas, c’est le sacrificateur qui regarde. Nous pouvons noter cette insistance avec laquelle la Parole dit qu’il examine avec soin. Il est supposé avoir la pensée de Dieu, et il projette la lumière de Dieu sur ce mal qui peut être une lèpre, et peut n’en pas être une. Si on voit une plaie enfoncée, c’est plus qu’un mal en intention, c’est un mal profond, c’est une lèpre ; le sacrificateur peut trancher tout de suite : l’homme est impur. Dans l’autre cas, lorsqu’il n’y a pas un mal profond en apparence, le sacrificateur ne tranche pas tout de suite. Il y a doute, pas de mal profond en apparence. On enferme le supposé lépreux pendant sept jours, expression d’une patience complète ; et puis le sacrificateur regarde à nouveau. Et encore deux cas peuvent se présenter : ou bien le mal a augmenté, l’homme est impur ; ou bien on peut encore douter : il faut attendre encore sept jours. Voilà le processus que la Parole indique, et nous voyons avec quelle patience le sacrificateur pouvait avoir à examiner un cas avant de trancher.
Je ferai une autre remarque relativement aux causes qui ont pu produire la lèpre : un ulcère, une brûlure de feu, etc. Ce qui, peut-être, en apparence, au commencement, n’est pas une lèpre, peut devenir la cause d’une lèpre. Ce qui peut ne pas être un péché profond, mais quelque chose d’apparence insignifiante, peut devenir un péché profond qui sera qualifié de lèpre et fera que l’individu sera impur et que sa place sera hors du camp. Nous devons prêter attention à ce qui n’a que l’apparence d’une brûlure de feu ou d’un ulcère, c’est-à-dire d’un mal qui n’a rien à voir avec la lèpre, c’est-à-dire d’un vrai péché lié à la personne. C’est très sérieux.
En premier lieu, nous avons les caractères de la lèpre. En second lieu, nous avons les causes possibles : ulcère, brûlure de feu. En troisième lieu, nous avons les places possibles de sa manifestation. Un homme peut pécher aussi bien par son esprit que par son corps, ou de toutes manières ; et cet homme est déclaré impur, quand c’est une lèpre.
J’insiste encore sur le fait que c’est le sacrificateur, c’est-à-dire que c’est au fond Dieu lui-même, qui apprécie les choses Elles sont liées à l’appréciation du sanctuaire.
Dans le cas du vêtement, le sacrificateur regarde une première fois. Dans un cas il peut dire : C’est une plaie de lèpre ; puis, dans l’autre, il ne peut pas se prononcer, et il attend sept jours. On lave le vêtement, c’est-à-dire qu’on applique la Parole de Dieu à toutes les circonstances. On applique la Parole de Dieu pour qu’elle lave ; on applique la Parole aux circonstances du chrétien. C’est le sacrificateur qui le fait ou le fait faire, et il voit l’effet produit. Un premier effet peut être que la plaie du vêtement est partie sous l’effet du lavage. Dans un second cas, le mal est toujours là ; le vêtement est impur, et on doit déchirer la partie qui est contaminée, c’est-à-dire qu’un chrétien doit condamner telle partie de sa vie qui est lépreuse. La lèpre dans les circonstances est un mal vite établi, hélas ! Nous devons veiller à la lèpre dans l’individu et dans les circonstances. La Parole nous montre que c’est le sacrificateur qui examine les choses, et que ce n’est pas le lépreux qui le fait.
Dans la lèpre quant aux circonstances, on peut être appelé à déchirer une partie du vêtement ou à le brûler tout entier, c’est-à-dire à se séparer radicalement de telle circonstance dont on sent qu’elle peut devenir cause de lèpre ouverte et du rejet de la présence de Dieu, du camp de Dieu.
Que faisait l’impur ? C’est la seule fois qu’on l’entend parler. Il a pris une position hors du camp, c’est-à-dire qu’il est excommunié. Il se couvre la barbe, signe d’humiliation, et il crie : impur, impur. «Hors du camp, dans un lieu à part, les vêtements déchirés, la tête découverte», trois signes d’humiliation, signes au sujet desquels le sacrificateur se distinguait en sens opposé, car il ne devait pas faire ces choses-là, même dans le cas de la mort de quelqu’un des siens.
Encore un mot sur un cas de la lèpre, celui de la chair vive. Chacun pourra relire le chapitre 13, versets 10 à 14, versets très importants. La chair vive correspond à la chair qui agit dans le chrétien : il est lépreux, il est impur. La chair n’est pas jugée, elle agit : il est impur. Nous trouvons une chose très remarquable au verset 13 : «voici, la lèpre a couvert toute sa chair ; alors le sacrificateur le déclarera pur». Quand le lépreux avait sa chair entièrement blanche de lèpre, la chair n’agissait pas, mais il était lépreux. Le sacrificateur ne voit que de la lèpre dans cet homme, alors il dit : cet homme est pur. Pourquoi cela ? Parce que le péché qui est dans cet homme est tout en évidence, il est vu. C’est le cas de quelqu’un qui a péché et qui confesse entièrement son péché : moralement, il est pur. Quand un homme qui a péché dépose devant Dieu tout ce qu’il a fait, il est pur, parce que, moralement, il est droit. Il est dans un état où Dieu peut lui parler et le bénir. Mais de celui qui se cache, qui s’excuse partiellement, la Parole nous dit : il n’est pas pur. Et il n’y a peut-être rien de si difficile que cette ouverture totale du coeur et de la conscience qui fait que le pécheur dit : Voilà, je découvre tout ce que j’ai fait ! C’est ce qui a sauvé David. Sans cela, certainement, David aurait eu le même sort qu’Acan. Le prophète vient à lui avec une parabole ; David déclare que l’homme de cette parabole mérite la mort. Tu es cet homme, dit le prophète. Immédiatement, David reconnaît son péché ; c’est certainement ce qui a sauvé sa vie. Tandis qu’Acan, ayant vu tout le trouble qui était dans le camp, tout cet émoi de Josué et de tous les autres, n’a rien dit. Il a fallu qu’on le force à parler. Un homme qui dévoile son péché, qu’il s’agisse d’un inconverti amené devant Dieu ou d’un chrétien dans un état de péché, lorsqu’il dévoile son état de péché devant Dieu, est pur moralement. Il est droit devant Dieu, et Dieu peut avoir affaire à lui.
Voilà quelques enseignements de ces chapitres remarquables, et Dieu n’a pas changé. Ces choses sont pour nous. Il ne s’agit pas de savoir ce que nous pensons, ce que nous nous aimerions faire, comment nous, nous voulons guérir, comment nous, nous voulons nous occuper de ces choses. Il s’agit de savoir comment Dieu s’en occupe.
Un homme lépreux qui a confessé sa lèpre est droit devant Dieu, est pur devant Dieu, moralement. Mais, avant qu’il rentre dans le camp, dans la communion avec Dieu et les siens, deux choses sont demandées, qui font l’objet de deux paragraphes du chapitre 14, et sont en rapport avec le sacrifice de notre Seigneur Jésus Christ. Il n’y a aucune restauration, pas plus qu’il n’y a aucun lavage initial des péchés, sans le sang du Christ.
Le premier paragraphe est relatif à un travail extérieur nécessaire pour que l’homme rentre dans le camp, à une manifestation extérieure des droits de Dieu vis-à-vis de cet homme, en rapport avec le sacrifice de Christ.
Nous y trouvons deux oiseaux. L’un s’envole après avoir été plongé dans le sang de l’autre — image du sang de Christ. Nous trouvons que, dans ce sang, on met l’hysope, l’écarlate et le cèdre. Tout ce qui peut avoir quelque valeur, aux yeux des hommes, est enseveli dans la mort de Christ. On peut penser que, si le lépreux était devenu tel, c’était parce qu’un de ces points, représentatifs de tout ce qui est de l’homme, avait causé sa chute. Peut-être l’écarlate, quelque chose de brillant selon l’homme, la gloire humaine ; c’est peut-être par là que la lèpre avait fini par toucher l’âme… Tout ce qui est de la nature est enseveli dans la mort de Christ. La lèpre ne touche jamais le nouvel homme, elle ne touche que le vieil homme. Et c’est pourquoi il est montré ici comme enseveli dans la mort de Christ. Dieu le rappelle au croyant pécheur. Dieu nous rappelle que le remède à ce mal puissant qui est en nous, c’est la mort.
Le second paragraphe (chap. 14 versets 10 à 20) se rapporte davantage à la valeur du sacrifice de Christ dans la conscience du croyant. Dans le premier paragraphe, il s’agit davantage de ses relations extérieures avec Dieu et avec le camp de Dieu, tandis que, dans le second paragraphe, c’est beaucoup plus le poids et toute la valeur du sacrifice de Christ qui sont rappelés au coeur et à la conscience du croyant : les sacrifices pour le délit, l’holocauste, la sang mis sur le côté de l’oreille droite, le pouce et l’orteil du pied droit, l’huile relative au Saint Esprit. Il fallait qu’il ait, dans son coeur, réalisé la vertu du sacrifice de Christ.
Un travail au dehors, un travail au dedans : le travail de Dieu pour la restauration est complet. Alors l’homme peut entrer dans le camp, après avoir attendu sept jours dehors. On ne se presse pas, avec Dieu, pour le retour. Il y a un examen patient, et il y a une opération patiente et divine pour la restauration du lépreux ; il n’y a pas de précipitation.
Que Dieu nous donne d’avoir à coeur sa gloire, de jouir de sa communion, de rester dans le lieu saint et de retenir sa pensée, pour l’honorer et le servir en toutes choses.
[LC n° 8]
20 novembre 1949
Cette position du nazaréen n’était pas, en Israël, celle de tout le monde ; le premier verset de notre chapitre le montre. Mais pour l’Église, elle est la position de tous ceux qui en font partie. L’Église, c’est-à-dire les chrétiens, les vrais chrétiens, a, de la part de Dieu, une position de séparation. C’est ce que veut dire le nazaréat : la séparation. Un chrétien qui n’est pas séparé n’est pas un témoin de la force de Dieu ; il est un témoin de la force de l’ennemi, comme Samson à la fin.
On a posé quelquefois la question : Est-ce que le nazaréat est le lot de quelques croyants chrétiens, ou le lot de tous ? C’est la position pour tous.
Le parfait nazaréen fut Jésus. Il a été mis à part pour Dieu avant sa naissance, toute sa vie ; et on peut dire qu’il est un nazaréen depuis sa mort, car il dit, dans Jean 17:19 : «Je me sépare — ou je me sanctifie — moi-même pour eux». Le Seigneur s’est séparé du monde. Il est à la droite de Dieu et s’est séparé pour les chrétiens. Il veut que nous ayons des relations avec lui séparé du monde. Nos relations ne sont pas avec le monde, mais avec Jésus qui est séparé du monde, hors du monde. On demande : Est-ce qu’un chrétien doit avoir des relations ? Bien sûr, tout homme doit avoir des relations. Il n’y a pas une vie qui ne se manifeste par des relations. Une vie n’est pas un principe mort, mais se manifeste dans des relations. Mais avec qui sont les relations du chrétien ? Avec Christ à la droite de Dieu. Cela surprend un peu. On trouve plusieurs fois, dans l’Écriture : «ce sont des choses étranges», «j’ai écrit les grandes choses de la loi pour mon peuple, et elles sont estimées comme des choses étranges» (Os. 8:12). C’est triste, quand les choses de Dieu sont étranges pour les enfants de Dieu. C’est triste, quand un père parle à son enfant, et qu’il ne comprend pas. C’est une anomalie, une chose anormale. Il y a beaucoup de choses que Dieu nous dit et nous montre, que nous ne comprenons pas. C’est certainement parce que nos relations avec Dieu sont anormales, incorrectes, intermittentes, ou qu’elles ont été interrompues.
Un chrétien a des relations, et il faut qu’il en ait. Mais avec qui ? Voilà la question ! Un chrétien est un nazaréen. L’Église a ce caractère du nazaréen. Qu’elle le veuille ou non, Dieu le lui avait donné. Et ce n’est pas ce que nous pensons sur les choses de Dieu qui est la vérité, mais ce que Dieu a établi au commencement.
Le Seigneur pourrait dire à Sardes (qui est, comme nous le savons, l’assemblée qui représente ce qui est issu de la Réformation) comme il dit à Éphèse : «Souviens-toi d’où tu es déchue» (Apoc. 2:5). Le Seigneur ne jugera pas Sardes d’après l’état de Sardes au moment où il en parle, mais en comparant cet état à ce qu’il lui avait donné au commencement. Le Seigneur ne jugera pas les frères d’aujourd’hui simplement d’après leur état d’aujourd’hui, mais en comparant leur état d’aujourd’hui avec ce qu’il leur a donné il y a un siècle. C’est un principe immuable dans les voies de Dieu. De même Éphèse, qui avait abandonné son premier amour, est jugée, c’est-à-dire appréciée, de la part de Dieu, d’après sa position d’origine, d’après ce que Dieu avait déposé en elle au commencement. Et cela peut entraîner un jugement gouvernemental. C’est vrai de tout le monde, d’un chrétien, d’un frère. Chacun sera jugé, apprécié, d’après ce que le Seigneur a mis dans sa vie au commencement. Dieu ne se trompe pas ; il n’est pas injuste. On comprend bien qu’un pauvre païen qui se meurt quelque part au bout du monde, Dieu ne lui demandera pas ce qu’il demandera à un chrétien ou à un frère en contact avec la Parole tous les jours ou tous les dimanches. Dieu jugera chacun d’après ce qu’il a mis dans la main de chacun. Nous trouvons ce principe continuellement.
Donc, l’Église a une position de nazaréat. L’Église était pour Dieu ; elle remplace Jésus. Tant que nous ne comprenons pas qu’elle remplace Jésus dans ce monde, nous ne comprenons pas sa position. Qu’est-ce qu’on a fait de l’Église ? Un corps qui rivalise avec les grands pouvoirs mondains, et non seulement rivalise, mais les soumet. Nombre de fois, dans l’histoire, l’Église a été un corps qui a imposé sa puissance aux grands pouvoirs mondains. Elle a commis fornication avec les rois de la terre, et cela, en employant les mêmes procédés qu’eux. Ct c’est ce que la Parole appelle «le mystère d’iniquité» (2 Thess. 2:7). C’est une abomination, qui déjà étonne lorsqu’elle se lit dans l’histoire des hommes incrédules ! Eh bien, ce même mal, on l’a vu prendre son développement dans ce qu’on a appelé l’Église.
C’est triste que quelqu’un, frère ou soeur, ou un autre chrétien aussi, ne veuille pas s’engager dans le témoignage du Seigneur, et refuse de prendre le titre de nazaréen. Pour quelle raison refuse-t-il ? Le Seigneur le sait. Pour être plus libre, peut-être, pour être moins serré de près ; mais par quoi ? Y a-t-il une loi qui commande aux frères de ne pas faire ceci ou cela ? Y a-t-il des règlements qui commandent de ne pas faire ceci ou cela ? Dans nombre de cas, pas du tout. Mais quelle est la force impérative qui commande aux frères et soeurs qui aiment le Seigneur tel ou tel chemin ? L’amour pour Christ. La position des chrétiens est une position de nazaréat, de séparation ; on ne saurait trop le dire. Non pas une séparation pharisaïque, mais la séparation par Dieu et pour Dieu, la séparation qui provient du fait que Dieu agit dans quelqu’un. «Mettez-moi maintenant à part Barnabas et Paul», trouvons-nous dans les Actes (13:2). C’était à l’égard de serviteurs que le Saint Esprit disait cela. Mais, de la même façon, le Seigneur dit, appelant quelqu’un, un inconverti : «Cet homme est à moi, maintenant ; je l’arrache à ce monde, je le mets à part». Un chrétien est un homme qui est mis à part.
Le nazaréat qui consiste simplement à être baptisé n’a aucune valeur. On a attribué au baptême une puissance de séparation véritable, autrement dit une puissance qui donne la vie. C’est encore un péché dont il faudra rendre compte à Dieu. La séparation du monde, c’est d’abord la conversion. Mais il y a des gens convertis qui ne veulent pas suivre le Seigneur dans le chemin complet de séparation. Les frères et soeurs ont pris une position de séparation parmi d’autres chrétiens — parmi beaucoup de vrais chrétiens. Eh bien, ils doivent savoir pourquoi ils sont séparés, pourquoi ils sont des nazaréens. Si nous n’en avons pas la conscience intérieure, nous sommes des nazaréens sans fruit, et alors nous serons quelquefois hypocrites. Cela arrive. Nous prenons extérieurement une position qui ne correspond pas à notre état intérieur. Cela peut être de l’inconscience, de l’ignorance, mais aussi de l’hypocrisie.
La séparation pour Dieu peut aller très loin, puisque nous sommes appelés, en principe, à consacrer au Seigneur nos jours, nos biens, nos corps, nos vies. Il est arrivé nombre de fois que le Seigneur a dit à tel chrétien : c’est le moment de laisser ta vie pour moi. Et on a vu que cet homme-là était séparé pour Dieu, non seulement extérieurement, mais aussi intérieurement.
Nous ne pouvons pas tenir de la main droite la bannière de Christ, et de l’autre celle du diable ou du monde ; ce n’est pas possible. Cela ne se voit même pas dans le monde. Vous ne trouvez pas un homme qui aurait une bannière dans la main droite, et invoquerait un chef opposé de l’autre. Cela ne se trouve pas, dans le monde ; mais, hélas, cela se trouve, dans le royaume de Dieu.
Quels étaient ces caractères du nazaréen ? Quels sont les caractères de l’Église et du chrétien ? Il y en a trois.
Le premier caractère, c’est qu’il ne devait pas manger de raisin, de fruit de la vigne, ni les pépins, ni même la peau. C’est très précis.
Ce qui nous fait comprendre la valeur de cette exhortation, c’est la fin du chapitre : «Après cela, le nazaréen boira du vin» (v. 20). Il y a un moment où nous boirons du vin, chers amis, où nous boirons le vin de Dieu. Mais aujourd’hui, ce n’est pas le moment. Pour le moment, nous ne devons pas boire de vin, c’est-à-dire que nous ne devons pas nous mêler à la joie des hommes. Nous ne pouvons pas nous asseoir au banquet des hommes. Nous ne pouvons pas avoir part aux joies et aux fêtes des hommes. Voilà ce que veut dire : «Tu ne boiras pas de vin ni de boisson forte, ni rien qui vienne du raisin».
Voilà pourquoi les chrétiens qui écoutent le Seigneur sont toujours des gens séparés, hier et aujourd’hui. Est-ce agréable ? Non, c’est pénible. Toujours séparés, avec toujours cette lutte constante contre les appels du monde qui nous presse, qui nous tente, qui nous invite ! Nous aussi, nous aimerions pouvoir laisser flotter nos vêtements ! Nous aussi, nous aimerions pouvoir boire à toutes les coupes du monde, goûter la communion avec tous les hommes. C’est une joie réelle que la communion. Pour le moment, notre communion est avec un homme que le monde a rejeté. Voilà la part du chrétien : ni raisin, ni boisson forte.
Si nous sommes exercés sur ce point, nous avons certainement fait l’expérience qu’il nous suffit d’un contact avec les joies du monde pour nous faire perdre la joie de Dieu. Une circonstance que nous aurions pu éviter avec un peu de vertu, au sens de 2 Pierre 1, que nous aurions pu éviter et que nous n’avons pas évitée, nous a fait goûter aux joies, à la communion du monde, et nous a fait perdre la communion avec le Seigneur : nous avons bu des boissons fortes, mangé des pépins de raisin.
Nous pouvons être sûrs que bien des ruines de vies chrétiennes sont arrivées parce que, peu à peu, on a pris l’habitude de garder un contact avec le monde, de boire aux mêmes sources que le monde, de s’asseoir aux banquets du monde ; en petit d’abord, avec crainte pour commencer, et puis avec de plus en plus de facilité. Un chrétien qui est à l’aise dans le monde, chers amis, c’est un chrétien qui est enivré ; il n’a plus son sens. Qu’on ne lui demande pas — il en parlera, mais il n’a pas de qualité pour le faire — de dire ce que sont les choses de Dieu. Il n’est pas en état de parler des choses de Dieu, de donner le sens, la valeur, des instructions divines. Il ne peut pas parler de Jésus. On ne peut avoir communion avec le monde d’un côté, et avec Dieu de l’autre.
C’est de notre vie courante qu’il s’agit, chers amis ! Eh bien, à chacun de nous de voir ce en quoi il a à veiller, dans sa vie, pour être nazaréen : «ni raisin, ni boisson forte».
Plus tard, dans le Cantique des Cantiques, on trouve : «Mangez, amis ; buvez abondamment, bien-aimés» (5:1). Il y aura un moment où les chrétiens, à leur tour, seront à leur aise. Ils ne connaîtront plus cette souffrance et cette peine de lutter pour eux — et pour d’autres — afin que le monde n’entame pas, ne vienne pas entamer, leur nazaréat. À ce moment-là, dans la gloire de Dieu, nous laisserons flotter nos vêtements, nous boirons sans réserve, nous jouirons sans réserve et sans crainte du bonheur que Dieu nous a préparé et que nous connaissons déjà, dans la mesure où nous sommes de vrais nazaréens.
Des chrétiens exercés sur ce point comprendront cela tout de suite. Pour eux, des questions seront résolues tout de suite, des questions qui se soulèvent dans les milieux chrétiens mondains, où on a voulu associer le monde et Christ, ce qui est une abomination aux yeux de Dieu. Un chrétien exercé sent tout de suite : «je perds Christ si je vais là ; si je bois à cette source, je perds Christ. Plutôt la mort que perdre Christ».
Une première pensée, c’est celle-là, et nous voyons que même la mère de Samson ne devait pas prendre de vin et de boisson forte. Attention, parents chrétiens ! Si les parents, père et mère, sont des nazaréens, leurs enfants, selon la fidélité de Dieu, le seront aussi. Mais que de fois, lorsque les enfants ne sont pas des nazaréens et vont boire aux sources du monde, si on y regarde d’un peu près, qu’est-ce qu’on trouve ? Que les pères et les mères avaient eux-mêmes mangé des raisins.
Je ne sais pas s’il y a, dans la vie chrétienne, une plus grande offense pour Dieu que l’amour du monde, que la communion avec le monde. Qu’on ne dise pas que ce n’est pas un sujet de souffrance de fuir cette communion avec le monde. Qu’on ne nous dise pas que la vie du chrétien est une promenade où nous pouvons nous laisser aller ! Nous ne pouvons pas nous laisser aller.
On a entendu quelquefois assimiler la position chrétienne aux joies du règne millénaire où, en chantant et en dansant avec des instruments de musique et un débordement extérieur de joie, le peuple de Dieu manifestera son bonheur. Ce sera juste à ce moment ; ils jouiront des choses de la terre et de la vie, sans réserve. Ils pourront boire du vin au sens propre. Dieu prendra soin des siens, et leur joie sera saine. Mais la joie du chrétien n’est pas celle-là. Elle n’est pas une joie débordante ; elle est intérieure, dans la séparation par Dieu et pour Dieu. C’est pourquoi la joie de Dieu est liée à cette souffrance, qui vient de ce qu’il faut toujours refuser, toujours rester séparés ; et cela même n’est pas une joie.
Voilà donc le premier point. Je pense que chacun de nous prolongera cette méditation sur ce point. Le Seigneur a été le vrai nazaréen. Jean le Baptiseur a été nazaréen, et, à ce sujet, nous voyons que les instructions données ici ont été appliquées.
Un deuxième point : le rasoir ne passera pas sur sa tête.
Pauvre Samson ! Le rasoir ne passera pas sur sa tête, c’est-à-dire que le soin de soi-même ne caractérise pas le nazaréen. Un nazaréen ne prend pas soin de lui. Tous les hommes prennent soin d’eux, pensent à eux, vivent pour eux. Eh bien, le rasoir ne passe pas sur la tête du nazaréen. Il garde ses cheveux longs. Un chrétien, du fait qu’il ne pense pas à lui, est consacré à Dieu. Et, dans ce signe extérieur qui paraissait insignifiant, en réalité, résidait la force de Samson. Delila, à force de tromperie, a arraché le secret de Samson : «Le rasoir n’a pas passé sur ma tête». Samson n’était pas à sa place. Il n’aurait jamais dû aller où il était ; et, parce qu’il y était allé, il était battu d’avance. Il était dans une fausse position. Il était impossible que ce qui lui est arrivé ne lui arrivât pas. Il livre son secret.
Un chrétien a un secret avec Dieu. Il a ce secret du souci de plaire à Dieu, d’une consécration à Dieu. Il y a des degrés en cela, mais c’est un caractère du chrétien, la consécration à Dieu. Le secret de la force du chrétien, c’est cette consécration intérieure et soutenue pour Dieu. Delila a très bien senti quand Samson a eu vidé son coeur. Elle l’a senti ; elle a appelé les Philistins : «Cette fois, nous le tenons». Un chrétien ne doit jamais livrer ses secrets au monde. Un chrétien est une énigme pour le monde, mais ne doit pas expliquer cette énigme. L’Église de Dieu est une énigme pour le monde ; elle ne doit pas livrer son secret. L’Église professante l’a fait et est devenue comme Samson, aveugle. Et le monde s’amuse de l’Église, comme les Philistins se sont amusés de Samson. Le monde rit de l’histoire de l’Église, qui est une histoire terrible, à la suite de la perte de toute vue spirituelle. Le monde en rit ; le monde en parle ; le monde en écrit, se moque de l’Église.
Il arrive que des chrétiens, individuellement, tout à coup, tombent dans le monde et, eux aussi, tournent la meule dans la maison des prisonniers. Ils ont des chaînes d’airain. Samson est aveugle et a des chaînes d’airain. Cet homme, qui a accompli des exploits, qui a emporté les portes d’Hébron sur la montagne quand on avait voulu l’enfermer dans cette ville, les chaînes d’une prison moins forte le retiennent, et il est maintenant prisonnier.
Que de fois le monde n’enchaîne-t-il pas les chrétiens, chers amis ! Est-ce que nous sommes enchaînés ? Est-ce que quelqu’un de nous a une chaîne ? Lourde ou fine, mais forte, une chaîne forgée par l’ennemi, un lien tissé par l’ennemi ? Vous pouvez lire cela, chers amis. Une passion, une relation, n’importe quoi qui n’est pas jugé, c’est une chaîne qui fait que le chrétien est esclave du monde.
Voilà donc un second point qui caractérisait le nazaréat.
Un troisième point : il ne se rendait impur pour aucune personne morte. Toucher un mort, dans l’Ancien Testament, c’était se souiller. C’était très difficile d’être un bon Israélite, ou probablement impossible : on touchait un ossement dans les champs, qui datait de longtemps, et on était impur. Où faudrait-il aller, aujourd’hui, chers amis, dans tout ce vaste cimetière qu’est cette terre, où tant de sang versé crie de la terre à Dieu ? Impossible d’aller nulle part. On touchait un ossement d’homme, on était impur. Pourquoi ? Parce qu’un ossement parlait d’un mort, et la mort parle toujours du péché. S’il y a des morts dans le monde, c’est que le péché est entré. Ce n’est pas normal qu’on meure ! Le diable dit le contraire, le monde aussi ; il le fait proclamer. Tous nos bons philosophes du monde nous disent qu’on ne peut pas faire autrement que de mourir. Et, souvent, nombre d’entre eux sont deux fois morts, comme dit Jude : par nature d’abord, et par apostasie ensuite. Ils se donnent ce titre d’immortels, et ces immortels sont souvent des deux fois morts ; et, si nous pensons au jugement final, des trois fois morts.
Il n’est pas normal que la mort soit dans le monde. C’est pourquoi, quand nous touchons à la mort, nous touchons au péché. Quand il touchait un mort, même quelqu’un des siens — son père, sa mère, sa soeur ou son frère — le nazaréen était impur. Qu’est-ce que cela nous dit ? Que le Seigneur doit avoir sur notre coeur à nous, croyants, les premiers droits. Que de fois nous faisons passer père, mère, frère, ami, avant le Seigneur. Nous nous souillons par infidélité vis-à-vis du Seigneur. Comme celui qui voulait suivre Jésus :
— «Suis-moi».
— «Laisse-moi premièrement ensevelir mon père».
— «Laisse les morts ensevelir leurs morts, mais toi, suis-moi» (Matt. 8:21-22).
Il y a un appel du Seigneur, qu’il fait impérativement. Est-ce que cela veut dire qu’on doive oublier les devoirs envers son père, sa mère, etc. ? Pas du tout. Mais que de chrétiens fidèles, de vrais nazaréens, à de certains moments, ont été mis à l’épreuve, parce que Dieu voulait montrer qu’ils préféraient le Seigneur à un père, une mère, etc. Tandis qu’aujourd’hui, chers amis, regardons un peu cela de près, chacun pour son compte. Regardons cela : les liens de famille, d’amitié, les relations diverses, et puis après, le Seigneur. Cela va très loin. Nous avant le Seigneur, pour faire plaisir à tel ou à tel : c’est là se souiller au contact d’un mort, et perdre son nazaréat !
Donc, quelqu’un qui touchait un mort, même un des siens, était impur. Son nazaréat était fini, et tous les jours qui précédaient étaient comptés pour rien. De même, un chrétien qui était resté séparé et qui se laisse aller à une des choses énumérées dans ce chapitre, n’est plus un nazaréen, et tout ce qui est passé est perdu. C’est très sérieux. On peut avoir été exercé, séparé pendant un an, deux ans, vingt ans ; et, si on se laisse aller à être mondain ou à préférer quelqu’un au Seigneur, ou soi-même, en prenant soin, pour ainsi dire, de sa chevelure, le nazaréat antérieur est compté pour rien. Il s’agit de repartir, de prendre un nouveau départ. C’est pourquoi la vie chrétienne est un exercice continuel.
Ce chapitre 6 des Nombres ne nous donne pas les conséquences de la perte du nazaréat, mais le livre des Juges nous les montre.
Quand on perd son nazaréat, il n’est pas toujours donné de recommencer. Samson n’a jamais recommencé. Sa carrière était finie.
Nous lisons, verset 12 : «les jours de son nazaréat…». Quand on a rendu impur son nazaréat, quand un chrétien a perdu son nazaréat, qu’il a mondanisé ou fait une des choses interdites par le nazaréat, il faut qu’il vienne au Seigneur en confessant ce qu’il a fait ; et, au nom du sacrifice de Christ, du sang de Christ, il peut être rétabli dans son nazaréat. Mais il n’y est pas toujours rétabli ; Samson ne l’a pas été.
Je termine en disant un mot de la fin du nazaréat. C’est le paragraphe des versets 13 à 20, que chacun pourra relire. Il nous parle de la fin du nazaréat.
Chez l’Israélite qui s’était consacré au nazaréat, ce nazaréat prenait fin un certain jour, ou avec sa vie. À ce moment, nous voyons qu’il offre tous les sacrifices : holocauste, sacrifice pour le délit, pour le péché, et sacrifice de prospérité. Il coupe sa chevelure et la met sur le feu. Il offre sa chevelure sur le sacrifice de prospérité et, à partir de ce moment-là, il peut boire du vin. Son nazaréat est fini. Qu’est-ce que cela nous enseigne ? Quand nous aurons fini notre vie terrestre (car notre nazaréat ne finit pas avant notre vie terrestre, à moins qu’il ne cesse par chute ou par péché), notre course, notre service dans ce monde, pour le Seigneur, alors s’ouvrira, pour les siens, le moment du repos dans la gloire, le moment de la communion sans réserve, sans retenue, sans qu’on ait besoin de regarder où on pose son pied. Ici, il faut toujours faire attention où on pose son pied, à une relation qui se prépare, à une connaissance, ou à quelque acte que nous faisons. Il faut toujours que nous considérions devant Dieu ce qui peut s’ensuivre. Quand nous serons dans le ciel en vertu de tout le sacrifice de Christ, sacrifice pour le péché, pour l’holocauste, de prospérité (qui est le signe de la communion), à ce moment-là, nous couperons notre chevelure. Elle sera coupée, et nous la mettrons par-dessus ces sacrifices. C’est-à-dire que notre consécration à Jésus, qui est une consécration éternelle — ce n’est pas seulement pour le temps que nous sommes à Christ, mais pour toujours — sera absorbée dans la communion avec lui. Cette consécration, qui commence ici-bas dans la peine, le labeur, la diligence, la séparation, se poursuivra en gloire dans la communion. Voilà ce que veut dire le fait que la chevelure est coupée et brûlée sur les sacrifices : notre séparation pour Christ finit dans la communion éternelle en gloire. À ce moment-là, le nazaréen boira du vin. «Chantez, amis ; buvez abondamment, bien-aimés» : voilà le jour de notre joie, l’heure de notre joie ! En un sens, le Seigneur pensait à cela, lorsqu’à la Pâque il dit : «Je ne boirai plus du fruit de la vigne, jusqu’à ce que je le boive nouveau dans le royaume de Dieu» (Marc 14:25).
Il y a une joie pour la terre, celle, proprement, du Cantique des Cantiques. Mais il y aura une joie pour le ciel, et le nazaréat sera absorbé dans une communion éternelle avec le Seigneur. Alors nous serons tout à fait chez nous. Nous ne sommes pas chez nous, ici-bas. Celui qui vit comme chez lui dans ce monde est quelqu’un qui se souille et perd son nazaréat très vite. Ici, il n’y a qu’un chemin très étroit où il faut marcher. Certains disent : ces chrétiens sont trop étroits. Christ a été plus étroit que tout le monde, et il a plus aimé que tout le monde.
Que le Seigneur nous donne de réaliser que nous sommes des nazaréens. Que le Seigneur nous garde de perdre notre nazaréat, comme Samson, et de devenir un jouet pour le monde. On entend des hommes qui s’amusent et qui disent : Voyez ce chrétien ! C’était un chrétien ; vous voyez où il en est ! Les gens du monde le disent partout ; ils se moquent de tous les Samson d’hier et d’aujourd’hui.
Que le Seigneur nous garde près de son coeur pour lui. Qu’il nous donne de réaliser que nous ne buvons pas à la joie des hommes, que nous sommes consacrés à Dieu en ne prenant pas soin de nous satisfaire nous-mêmes, et que nous faisons passer le Seigneur avant qui que ce soit. Que le Seigneur nous accorde cette grâce, chers amis. Mais ne pensons pas qu’à nous ; que le Seigneur nous accorde de lui accorder cette joie, à Lui.
[LC n° 9]
20 décembre 1948
Méditations sur la vie chrétienne, édition FR 1995, p. 39
Ce qui faisait la valeur du peuple, ce n’était pas le nombre des fils d’Israël, ni leur qualité, mais la présence de Dieu avec eux. L’arche était là ; elle allait devant eux : «Et l’arche de l’alliance de l’Éternel alla devant eux, le chemin de trois jours, pour leur chercher un lieu de repos» (Nomb. 10:33). Au milieu d’un «désert grand et terrible» (Deut. 8:15), «dans la désolation des hurlements d’une solitude» (Deut. 32:10), l’arche traçait le chemin qui devait les conduire en Canaan. Ils étaient en voyage, partis d’Égypte pour aller en Canaan, sans provisions, et Dieu prenait soin d’eux. Les chrétiens, eux aussi, sont en voyage, ou, tout au moins, font profession d’accomplir ce voyage ; mais les vrais chrétiens seuls ont le coeur tourné vers Canaan ; ils marchent tous dans la même direction, vers la Canaan céleste. Dieu les connaît ; pas un ne lui échappe, bien qu’extérieurement l’unité du peuple chrétien soit rompue.
L’arche traçait son chemin au peuple, comme le Seigneur le fait aujourd’hui pour les siens. «Lève-toi, Éternel ! et que tes ennemis soient dispersés, et que ceux qui te haïssent s’enfuient devant toi» (Nomb. 10:35). Dieu a des ennemis, et ceux qui le haïssent sont ceux qui haïssent son peuple. Alors Moïse disait : «Reviens, Éternel, aux dix mille milliers d’Israël» (10:36). Et nous, nous disons : «Demeure avec nous, car le soir approche et le jour a baissé» (Luc 24:29).
«Le ramassis de peuple qui était au milieu d’eux s’éprit de convoitise» (Nomb. 11:4). Il était sorti d’Égypte avec le peuple d’Israël et il le fait pécher. Le péché règne par la convoitise. «La corruption qui est dans le monde par la convoitise…» (2 Pierre 1:4). «La convoitise, ayant conçu, enfante le péché ; et le péché, étant consommé, produit la mort» (Jacq. 1:15). Ce ramassis faisait retourner le coeur du peuple en Égypte. Encore aujourd’hui, si on veut nous faire retourner dans le monde et nous faire adopter ses façons de faire et de penser, plût à Dieu que d’aucuns se lèvent pour rappeler que «l’Éternel vous a dit : Vous ne retournerez plus jamais par ce chemin-là» (Deut. 17:16). Que notre coeur soit tourné vers Canaan ; nous y sommes «appelés par la gloire et par la vertu» (2 Pierre 1:3).
[LC n° 10]
5 janvier 1958
Méditations sur la vie chrétienne, édition FR 1995, p. 41
L’histoire du peuple d’Israël a une place dans les annales de l’humanité. On lui fait bien sa place dans les documents de l’histoire humaine : on est bien forcé de le faire. Mais Dieu ne veut pas que nous nous occupions de l’histoire de son peuple à la manière des hommes ; il nous dit, à nous chrétiens, que «ces choses leur arrivèrent comme types» de ce qui nous concerne et «pour nous servir d’avertissement» (1 Cor. 10:11). Elles sont pleines d’instructions.
Deux faits de toute importance ont marqué l’existence et l’histoire de ce peuple : le premier, c’est la nuit de la Pâque, où Dieu lui-même, au lieu de frapper les Israélites, a passé par-dessus eux, parce que le sang était sur les poteaux et le linteau des portes — image de la rédemption, de la délivrance des croyants du jugement de Dieu. Il ne faut pas, quand nous prêchons l’évangile, prêcher un évangile qui chercherait à se faire valoir auprès des hommes. L’évangile de Dieu parle de façon terrible aux hommes ; il leur dit : Ce qui est devant vous, si vous ne vous repentez pas, c’est le jugement de Dieu, et non pas seulement le gouvernement de Dieu en jugement dans ce monde, mais une condamnation éternelle, l’étang de feu et de soufre. L’enfer existe, c’est une réalité. Il ne s’agit pas de prêcher une sorte d’évangile souriant, qui attire le coeur naturel des hommes. Jésus n’a pas fait cela. Sans doute, il ne faut pas présenter un évangile qui repousse, mais un évangile qui unit de façon inséparable la grâce et la vérité.
Le peuple, à la nuit de la Pâque, est une figure du peuple racheté de Dieu, de ceux qui ont cru au sang de Jésus. Puis, c’est le second fait, ce peuple a connu la traversée de la mer Rouge : c’est la destruction du Pharaon, c’est-à-dire du pouvoir de Satan. Mais Satan est encore maître et prince de ce monde, il est encore l’usurpateur. Voilà une chose qui ne sera jamais bien reçue par tous les mondains de la terre. Pour eux, ce monde est le monde de Dieu, celui qu’il a formé, bien que la souffrance, la maladie, la mort, restent une énigme. Non, le monde d’aujourd’hui est le monde du diable. Satan gouverne par les mille tentations qu’il offre tous les jours aux pécheurs, pour les distraire de Dieu et satisfaire leurs convoitises et leurs passions. Voilà la vérité permanente, la vérité éternelle ! Le diable règne en donnant force dans le coeur des hommes à ses innombrables idoles. Et le flot de l’humanité suit son cours pour se jeter dans le malheur éternel. Il n’y aura pas que des grands criminels en enfer ; la grande masse sera constituée par ceux qui auront été entraînés par leurs idoles, en apparence imperceptibles : un peu de mondanité, un peu de plaisir, un peu d’honneur — pas beaucoup, ce n’est pas nécessaire — un peu d’amour-propre, un peu d’amour de l’argent ; un peu tous les jours, quelque chose d’un peu meilleur aujourd’hui qu’hier, demain qu’aujourd’hui (És. 56:12) et, un pas après l’autre, l’âme est emportée à jamais loin de Dieu. Ce sera l’histoire du plus grand nombre des hommes qui seront dans les ténèbres de dehors ; ils n’auront ni tué, ni volé ; toutefois ils porteront sur leurs mains le sang de Jésus, auquel ils n’auront pas voulu croire.
Satan avait le pouvoir de la mort : Dieu le lui avait donné comme châtiment gouvernemental sur l’homme, en conséquence du péché. Mais ce pouvoir lui a été ravi par Celui qui l’a vaincu (Héb. 2:14) ; il est détruit pour les chrétiens. Les chrétiens sont un peuple qui est déjà, moralement, hors de la mort : c’est une merveille ! Les vrais chrétiens, où qu’ils soient, partout dans le monde, sont le peuple de Dieu ; ils ont été délivrés du jugement de Dieu et ils ont été arrachés à la puissance de Satan. Ils sont un peuple en marche pour le ciel, liés à Jésus dans le ciel. Encore sur la terre, dans le désert, ils trouvent leurs joies dans la communion avec leur Sauveur, qui est Jésus dans le ciel. On peut jouir du Seigneur aujourd’hui, comme on a pu en jouir hier, si on cultive la communion avec lui par la prière et la méditation de la Parole. La communion avec le Père et avec son fils Jésus Christ donne des joies qui remplissent l’âme par le Saint Esprit : c’est une réalité incomparable. Qu’est-ce que la joie d’un homme qui a fait fortune, qui a trouvé de l’or, si son or le mène en enfer ?
Les choses que nous n’avons pas vues ont pour notre âme une réalité supérieure à toutes les réalités de ce monde ; nous goûtons les choses qui ne se voient pas, nous allons en jouir pleinement quand nous partirons avec le Seigneur dans des corps glorieux, semblables au sien. Nous serons dans notre vrai domaine, la Canaan des chrétiens. Le pays de la promesse, notre vraie patrie, ce sont les lieux célestes où Christ se trouve. Un chrétien, sur la terre, est un apatride ; il n’a pas un endroit dont il puisse dire : «J’ai trouvé le lieu où je vais m’étendre à l’aise, finir mes jours dans le repos» ; cela n’existe pas. La patrie du chrétien, le lieu de son repos, la source de ses joies, de ses consolations et de ses forces, est en haut, en Christ, qui est assis à la droite de Dieu. Mais en même temps, le chrétien est un pèlerin qui traverse le monde, possèdent la vie divine, nourrie par la Parole et l’Esprit ; il ne trouve pas de joie à porter ses lèvres aux coupes que le monde offre. Pourquoi le chrétien ne va-t-il pas s’amuser avec les gens du monde ? Parce qu’il ne trouve pas là son compte ; ce n’est pas parce qu’on le lui a imposé. Cette attitude vient des exigences de la nature qui est en lui, aussi opposée à la nature du monde que le Père et le monde sont opposés l’un à l’autre. Si nous perdons de vue cela, nous faussons la vérité et nous perdons la force des exhortations que Dieu nous donne. Nous sommes dans le désert ; le monde, c’est le désert ; on souffre, il n’y a pas d’eau, rien pour l’âme du chrétien ; quand il est obligé d’avoir certains contacts, son âme est desséchée. Plus un chrétien a de l’âge, plus il fuit les occasions où il pourrait renouveler cette expérience.
Dans le désert, il y avait, avec Israël, un ramassis de peuple, qui suivait les Israélites sans en faire partie ; il entraîne au murmure les Israélites, dont seul un petit nombre était croyant ; la grande masse n’était que professante. Le peuple, fatigué, dit : «Moi, je n’en peux plus, il n’y a que la manne à manger ; j’en ai assez, il me faut autre chose que la manne. En Égypte, on était beaucoup mieux». On a oublié l’esclavage, les cris jour et nuit, les briques qu’il fallait faire avec rien, la dureté du Pharaon ; on se souvient des poireaux, des concombres, des melons.
Quand nous nous plaignons de l’aridité du désert, de la nourriture spirituelle que Dieu nous donne par son Esprit, nous prenons le caractère du ramassis et d’Israël en chute : «La Parole ne suffit pas, il me faut un peu d’autre chose ; j’étais bien mieux avant, je lisais tout ce que je voulais, je me cultivais, je me plongeais dans toutes les études que je voulais, personne ne me le reprochait ; ah, quel bon temps ! Tandis que maintenant, toujours cette Parole de Dieu, toujours cette Bible ! Il n’y a plus que cela ; vraiment, j’en suis fatigué». Dans le ciel, vous n’aurez pas d’autres choses que celles dont le chrétien jouit maintenant par la foi, et si vous vous ennuyez dans le ciel, cela veut dire que vous n’y entrerez jamais. Nous savons bien qu’il nous faut lire autre chose que la Parole, mais nous parlons ici de la nourriture de notre âme, nourriture spirituelle et morale. Que Dieu nous donne d’y penser !
Lorsque notre coeur est porté à se nourrir des aliments de l’Égypte, c’est-à-dire du monde, il est en mauvais état. Nous avons à veiller avec soin, dans l’accomplissement de nos devoirs professionnels inévitables et impérieux, à toujours retrouver la communion avec le Seigneur et à goûter la Parole de Dieu. Cela ne va pas sans exercice, les chrétiens âgés le savent plus que les jeunes ; ne faisons aucune règle, aucune loi, mais souvenons-nous des besoins permanents de la vie divine qui est en nous ! Uns seule chose les satisfait, la Parole de Dieu qui apporte Christ. Avec le Seigneur, on est toujours heureux ; on pourrait être heureux tout seul avec lui, heureux en prison, heureux sur un lit, heureux dans n’importe quelle circonstance ; l’apôtre Paul était un homme qu’on n’a pas pu rendre malheureux. Il n’y a pas de témoignage équivalent à celui-là. Mais voilà un serviteur du Seigneur très zélé, un évangéliste plein de feu ; Dieu permet que son service cesse ; si cet homme n’a plus sa flamme, sa joie, son service passait avant Christ. Que de choses nous faisons passer avant le Seigneur ! Le Seigneur Jésus, lui, n’a rien fait passer avant Dieu.
Si nous arrivons à quarante, soixante ou quatre-vingts ans en gardant les mêmes erreurs de jugement que lorsque nous en avions quinze, c’est un déshonneur pour Dieu. Rien ne remplace l’expérience et la maturité de l’âme, bien que cette maturité ne soit pas toujours liée à l’âge. Il y a des personnes âgées qui n’ont pas fait de riches expériences, des vieillards qu’on voit mourir comme de petits enfants ; c’est plus fréquent qu’on ne le pense. L’âge n’est pas une garantie ; on peut perdre de bien des manières les années que Dieu nous a données.
Dans les chapitres 13 et 14, douze espions sont envoyés pour reconnaître le pays. Ils reviennent avec une grappe excessivement lourde ; on l’apporte au désert ; on apporte, pour ainsi dire, une garantie de la valeur du pays ruisselant de lait et de miel. Cela est une image des joies, des ressources, que le Saint Esprit prend dans le ciel, où Christ est, pour les communiquer aux croyants dans le désert ; à chacun individuellement, à une famille, à une assemblée, le Saint Esprit communique ses joies, ses consolations ; il fait jouir les croyants du ciel et de Christ qu’ils n’ont pas vu : «Lequel, quoique vous ne l’ayez pas vu, vous aimez ; et, croyant en lui, quoique maintenant vous ne le voyiez pas, vous vous réjouissez d’une joie ineffable et glorieuse» (1 Pierre 1:8). Voilà ce que le Saint Esprit fait ; la grappe d’Eshcol, ce sont les joies du ciel que le Saint Esprit produit dans ce désert. Dix espions sur douze sont rebelles : «Nous ne pourrons jamais y entrer, il y a les géants !». Deux ont le souci de la gloire de Dieu et disent : «C’est un très bon pays, les ennemis mêmes seront notre pain, c’est un pays ruisselant de lait et de miel ; montons hardiment !». Voilà l’image des chrétiens qui désirent jouir des choses qu’ils ne voient pas, avant même d’être entrés au ciel ; voilà l’image de tout vrai témoignage selon le Seigneur. D’autres disent : «Laissez-nous tranquilles avec ces choses que nous n’avons jamais vues ! Je sais que je suis sauvé ; je fais ma vie dans ce monde comme je peux, en évitant de faire du mal». Mais le Saint Esprit peut remplir notre coeur des choses qui sont à nous, que nous possédons déjà et dont il veut nous faire jouir. Le témoignage du Seigneur est un témoignage céleste.
Nous savons ce qui est arrivé : les dix rebelles ont été tués sur le champ. Puis Dieu a dit au peuple : «Vous avez peur pour vos enfants ? C’est vous qui allez mourir, et ce sont vos enfants qui entreront dans le pays». Dieu prend toujours le contre-pied de l’incrédulité. Tout le peuple est mort dans le désert et les petits enfants, qu’on avait condamnés à mort, sont entrés dans le pays.
Dans Josué 14, le Jourdain franchi, Josué et Caleb sont là, les deux seuls adultes rescapés du désert. Caleb qui, espion, avait quarante ans, en a maintenant quatre-vingt-cinq ; il parle le langage de la foi : à quatre-vingt-cinq ans, je suis aussi fort qu’à quarante (Jos. 14:11). La foi est forte, parce que, par elle, on réalise qu’on n’est rien et qu’on tire sa force de Dieu, instant après instant, jour après jour ; quand on a Dieu avec soi, la nuit devient resplendissante comme le jour en plein midi ; la tristesse, le découragement disparaissent ; la grâce apporte de la force, de l’énergie spirituelle.
Qu’il nous soit donné de traverser le désert humblement, jour après jour, comme Josué et Caleb. Ils ont été les deux seuls adultes à pouvoir le faire durant quarante ans ! Maintenant, dans le pays de la promesse, l’un et l’autre sont recouverts des caractères que Dieu donne à ceux qui se sont attendus à lui, un jour après l’autre, pendant les années d’épreuves ! Le Seigneur n’a pas mis à part pour nous le premier jour de la semaine seulement. Il a mis à part tous nos jours. Le dimanche est un jour distingué entre les autres ; mais ne donnons pas un jour seulement au Seigneur pour prendre les six autres pour nous ! Que le Seigneur remplisse tout notre coeur de lui-même tous les jours, l’un après l’autre !
[LC n° 11]
6 octobre 1952
Ce livre des Nombres présente d’abord le peuple de Dieu compté par Lui. C’est le dénombrement. Le peuple est mis en ordre par Lui, la présence de Dieu étant au milieu de lui. Ensuite, le livre des Nombres nous présente plusieurs épisodes relatifs à la traversée que ce peuple a faite du désert. La lecture de ce livre est riche d’instructions, pour le peuple de Dieu, qui est aujourd’hui dans une position moralement semblable — de fait très différente, mais spirituellement et moralement semblable. Ce livre est très instructif pour le peuple de Dieu dont nous faisons partie, et qui continue son pèlerinage, la traversée du désert, d’un désert qui est plus réellement désert que le désert de sable à travers lequel Israël faisait son chemin. Le désert moral qui nous environne est absolument, pour la foi, un désert, et il n’est que cela. Plus nous avançons dans ce chemin-là et dans cette vie chrétienne, plus nous sentons que Dieu a raison. Il ne peut pas ne pas avoir raison, mais Il nous met d’accord avec lui. Et c’est un immense progrès lorsque, sur quelque point que ce soit, nous tombons d’accord avec Dieu. Non seulement Il ne peut pas mentir et Il ne peut pas errer, mais le progrès des saints, c’est d’être d’accord avec Dieu, et d’abord, et en particulier, sur le jugement que Dieu porte sur chacun de nous. C’est un immense progrès.
Nous faisons cette traversée. Que nous le voulions ou non, nous, croyants, sommes de ce peuple, qui fournit ce voyage à travers le désert terrible, comme il est qualifié. Et c’est pourquoi les circonstances que le peuple a traversées et connues nous sont utiles. Elles nous servent de type, à nous que les fins des siècles ont atteints (1 Cor. 10:11). Il y a une instruction inépuisable pour nous dans les récits que Dieu nous donne à cet égard.
Nous sommes ici en présence de la situation suivante : le peuple est dans le désert, non pas à la fin des quarante ans, mais au commencement. Il y a déjà eu, avant ces récits, d’autres scènes qui sont loin d’être belles ou à la louange du peuple de Dieu. Ce n’est pas, en soi, un peuple intéressant. Aujourd’hui non plus. Ne pensons pas un instant que ce sont nos qualités, nos vertus morales ou autres, qui ont fait que Dieu a fixé son choix sur nous. C’est sa propre grâce qui a dicté à Dieu ce qu’Il avait à faire. Les qualités morales, ou de quelque ordre que ce soit, de ce qui, aujourd’hui, est le peuple de Dieu, ne le désignent en rien comme peuple qui devait être d’avance élu par Dieu. Dieu le dit à son propre peuple.
Dieu, qui s’occupe de son peuple, le met à l’école. C’est une école — nous aussi, nous sommes à l’école — et Il le fait passer par des circonstances difficiles — ce que nous n’aimons pas, nous n’aimons jamais cela. Il le fait passer par des circonstances très difficiles — c’est l’école de Dieu — pour que le peuple apprenne ce que Dieu est et ce que lui, le peuple de Dieu, est. La gloire de Dieu brille dans ces situations, de deux façons au moins. La première, c’est dans son jugement. Dieu est glorifié quand Il juge, incontestablement. Et l’enfer glorifiera Dieu, parce qu’il mesurera, d’une façon définitive et éternelle, qu’il y a entre le pécheur et Dieu un abîme infranchissable. Le jugement de Dieu est une ressource, pour la gloire de Dieu — ce n’est pas la plus glorieuse, pour Dieu. Un jugement judiciaire, un jugement final, aussi bien que les jugements temporaires, gouvernementaux, sont des moyens par lesquels Dieu déploie sa gloire — d’une façon inférieure, mais réelle. Et c’est vrai de tout être moral. Un père qui juge son enfant a le souci de sa propre gloire, quand il juge son enfant, même si ce n’est pas le moyen le plus élevé pour ce faire. C’est une ressource que Dieu a aujourd’hui. Il a et il aura toujours celle-là, à l’égard de tout homme. La gloire de Dieu sera toujours revendiquée, d’une façon ou d’une autre, à l’égard de l’homme. Si ce n’est pas par la grâce de Dieu reçue à salut ou à instruction, ce sera lorsque Dieu le fera comparaître devant Lui et prononcera son jugement sans appel, qui consacrera à jamais la gloire de Dieu et manifestera que le péché est d’un côté, et Dieu de l’autre. Car notre infidélité revient toujours à ceci, c’est que nous jetons l’équivoque, par notre façon de faire, de vivre, de nous conduire (les chrétiens professants le font de façon complète), sur ce fait absolu, qu’il n’y a pas de communion entre ténèbres et lumière, entre Dieu et le péché. À voir comment les chrétiens vivent, on pourrait se méprendre. Une équivoque pourrait régner sur ce fait, que le mal est toujours séparé de Dieu. Dieu ne peut être associé au mal. Quand nous péchons, d’une façon ou d’une autre, et sous le couvert du nom du Seigneur, en tant que chrétiens, nous jetons l’équivoque sur ce principe absolu, que Dieu est tout entier d’un côté, et le péché tout entier de l’autre. Dieu revendiquera toujours, à l’égard du péché, sa propre gloire. Il n’aura rien laissé passer de tout ce qui se sera fait sous le soleil, de tous les outrages à sa gloire. Il y a un moment où Dieu revendiquera sa gloire d’une façon absolue ; si ce n’est en grâce, ce sera en jugement. Il est bon que nos coeurs soient pénétrés de cette pensée. Toutes les fois que nos coeurs cherchent la gloire de Dieu, ils trouvent la bénédiction ; c’est un des effets de la piété et de la foi.
C’est pourquoi, dans un passage de l’Écriture que nous connaissons bien, il est dit à un homme qui avait péché : «Mon fils, donne gloire à Dieu» (Jos. 7:19). Confesse ton péché, c’est-à-dire, déclare, établis d’une façon publique, que le péché que tu as commis vient de toi, et non de Dieu.
Eh bien, nous trouvons ici cet épisode de la vie du peuple de Dieu, au commencement des quarante ans : il murmure. Ce n’est pas la première fois. Il montre un manque de foi en ce qu’il demande des espions. Il demande qu’on aille explorer le pays. C’est le peuple qui a demandé cela (Deut. 1). Il manque de foi ; il ne prend pas Dieu au mot. Quand nous nous plaignons, d’une façon ou d’une autre, ayons affaire à Dieu, et nous verrons très souvent que nous nous plaignons de Dieu ; au fond, parce que nous sommes en mauvais état. Nous ne sommes pas contents de nous-mêmes ; notre coeur n’est pas heureux : nous nous plaignons. Nous voyons, dans ce chapitre, que le peuple «murmure» et «méprise» ; ces mots se retrouvent plusieurs fois. Et quand nous ne sommes pas contents (que chacun de nous ait affaire au Seigneur, car c’est personnel), très souvent, dans le fond — pour ne pas dire toujours — nous ne sommes pas contents de Dieu, nous nous plaignons de Dieu. Si nous étions heureux avec le Seigneur, nous pourrions souffrir, mais nous ne murmurerions pas. Un chrétien souffre de beaucoup de manières. Plus il est fidèle, à bien des égards, plus il souffre. Mais la communion avec Dieu, le bonheur de la présence de Dieu, la force que Dieu donne, font taire les murmures.
Le peuple a demandé des espions. Il dit : Envoie des espions ; nous voudrions bien avoir des renseignements sur le pays. C’était là une grande offense vis-à-vis de Dieu. Dieu avait dit : Je vous conduirai dans un pays ruisselant de lait et de miel. Mais le peuple dit : Nous voudrions voir le pays. Cela nous arrive ! Nous ne sommes pas toujours contents que Dieu nous dise : Je vous ai préparé un lieu de bonheur. Le ciel est loin de satisfaire toujours notre coeur ! Dieu nous a promis le ciel, la maison du Père, le paradis (ce sont des termes différents : le mot «paradis» est beaucoup plus général, mais Dieu nous a promis le ciel). Et que de fois nous faisons comme le peuple ici, nous ne prenons pas Dieu au mot. Nous ne croyons pas assez que ce que Dieu nous a promis est aussi précieux et heureux qu’Il le dit.
Dans sa condescendance, Dieu permet que des espions soient envoyés. Ces hommes montent : douze, un par tribu. Ils représentent le peuple. C’est pourquoi, ensuite, le châtiment va s’abattre sur tout le peuple. Moïse envoie douze espions. Ils montent, et ils reviennent avec un témoignage évident que le pays est un très bon pays — c’était au temps des premiers raisins. Et la preuve tangible, palpable, c’est cette grappe qu’ils rapportent, et qui est telle, qu’il a fallu deux hommes pour la porter. Ils l’apportent au milieu du peuple, qui a pu se rendre compte de la vérité de ce que Dieu lui-même avait dit à l’égard du pays promis.
La première faute que le peuple a commise, manifestation de ce qui était dans son coeur, c’était l’incrédulité. C’est une très grande faute que cette incrédulité : mettre en doute les déclarations de Dieu. Et cela nous visite ; car, plus d’une fois, et dans bien des domaines, nous sommes incrédules. Sans doute, nous croyons pour le salut. Mais combien de fois sommes-nous incrédules pour ce que Dieu dit. «Si nous sommes incrédules, Lui demeure fidèle, car Il ne peut se renier lui-même» (2 Tim. 2:13).
Les témoins reviennent chargés. Alors nous voyons que le coeur de chacun s’ouvre. Sur douze personnes, dix montrent un certain état, et deux seulement un autre état. Voilà une mise à l’épreuve de l’état du peuple. Cela arrive bien plus souvent que nous ne le pensons. Quand Dieu permet une telle circonstance, dans notre vie de famille ou d’assemblée, souvent le coeur de chacun s’ouvre. On n’avait pas pu lire jusque-là ce qui se passait ; on le lit alors. Ce qu’il y a dans le coeur, on le voit, cela s’exprime. Ils étaient douze, en apparence très intéressés à ce qui touchait au peuple de Dieu, à connaître ce pays de la promesse. Mais, sauf Dieu (et Moïse, peut-être), personne n’aurait su qu’il y avait, dans le coeur de dix d’entre eux, un germe actif d’incrédulité ; on les aurait associés tous les douze. Eh bien, à la suite de la mise à l’épreuve, une profonde différence s’est manifestée, qui a eu de graves conséquences. Il en est ainsi pour chacun de nous, chers amis. Dieu nous fait passer souvent tous par les mêmes expériences, les mêmes épreuves. Et ce qui est l’occasion, pour les uns, d’une victoire, est l’occasion, pour les autres, dans les mêmes circonstances, de manifester — comme il est écrit dans l’épître — un méchant coeur d’incrédulité (Héb. 3:12 — c’est une expression scripturaire).
Nous nous plaignons des mises à l’épreuve ! Mais, par ces faits éprouvants, Dieu met à découvert l’état de chacun. On dira : Mais Dieu n’a pas besoin de cela pour le savoir. Sans aucun doute ; mais cela est manifesté. Dieu a, pour ainsi dire, justifié d’avance la mesure qu’il va prendre, et qu’il annonce en faisant tomber tous les adultes dans le désert pendant quarante ans.
Oh, la vie chrétienne n’est pas une vie à la légère, faite de principes abstraits. C’est une vie de réalités quotidiennes. Eh bien, chers amis, que le Seigneur nous donne d’avoir affaire à Lui, lorsqu’Il nous place dans telle circonstance éprouvante, pour que nous disions : «Seigneur, donne-moi d’être vainqueur par la foi, de montrer la foi, de surmonter l’obstacle par la foi, et de ne pas connaître une humiliante et grave défaite de la chair». Car la chair est toujours battue. La chair s’engage dans le chemin de la foi et est toujours battue. Ces dix-là, c’est la chair qui les gouvernait. Ils étaient, en apparence, comme les autres ; mais la chair les conduisait. On le sait, la chair imite la foi, une fois, peut-être deux ; mais, à un moment donné, la discrimination est faite par la main de Dieu. La discrimination se fera d’ailleurs, un jour, absolue, pour toute la profession chrétienne. La chair imprégnée de christianisme sera démasquée. Si nous voulons aller avec elle, il nous faut aller dans toutes les églises du monde ; il y a de la place ! Il y aura le nombre, mais il n’y aura pas la force de Dieu. Et la discrimination entre toute cette chair chrétienne et ce qui est de Dieu sera inévitablement faite, une fois ou l’autre. En attendant, Dieu nous met à l’épreuve. C’est pourquoi, chez deux chrétiens dans les mêmes circonstances, quelquefois mari et femme — même famille, mêmes circonstances — la foi de la femme brille, celle du mari pas ; ou la chair se montre chez la femme, dans les mêmes circonstances. L’un murmure, et l’autre glorifie le Seigneur. L’un fléchit, l’autre est à la gloire de Dieu, alors que les circonstances sont identiques. Il n’est pas dit que Josué et Caleb ont eu une position plus facile, qu’ils sont tombés sur un endroit plus agréable, plus facile, où il y avait moins de dangers. Ils étaient tous dans une même situation. Mais les uns avaient la foi, les uns allaient avec Dieu. Dieu était avec eux, derrière eux, autour d’eux, et ils voyaient le Seigneur. Et, quand Dieu est là, il peut y avoir tous les fils d’Anak du monde, tout cela est nul. Le monde entier serait-il contre un chrétien qui aurait Dieu avec lui, le monde ne compterait pas. Ils ont glorifié Dieu, Dieu les a honorés. «Ceux qui m’honorent, je les honorerai ; ceux qui me méprisent (mot caractéristique du chapitre) seront en petite estime» (1 Sam. 2:30).
Et quel châtiment atteint l’incrédulité ! Un châtiment tel que, après quarante siècles, nous lisons les noms des dix qui sont là, dans le livre de Dieu ! Et nous voyons tous les adultes qui sont tombés parce qu’ils avaient le même esprit ! Dieu ne s’est pas trompé.
Est-ce que nous cherchons la présence de Dieu en toutes choses, ou bien est-ce que nous comptons les difficultés qui viennent des circonstances, des hommes ou de notre coeur ? Ce ne sont pas les moins subtiles, les moins dangereuses, mais bien les plus perverses, les plus perfides.
Eh bien, Dieu fait face à tout. Dieu est pour les siens, et le reste ne compte pas ! La gloire de Dieu brille pour la foi. Voilà ce qu’ils disent, ces deux hommes, Caleb et Josué. Mais tout le monde a été gagné par le murmure des dix, toute l’assemblée…
Que font Moïse, Aaron, Josué, Caleb ? Ils déchirent leurs vêtements et disent : le pays est un très bon pays (comme nous lisons dans la note) ; et quant aux ennemis, ils seront notre pain. Là où nous vivons avec Dieu, les difficultés mêmes deviennent une sorte d’aliment pour notre âme. Pourquoi ? Parce que nous nous y nourrissons de Christ Lui-même, nous mangeons le pain de Dieu. Dans les exercices liés aux difficultés que nous traversons, si nous les traversons par la foi, nous avons Dieu avec nous. Dieu nous nourrit de Christ, de Lui-même. Il se sert des difficultés pour nous bénir. Est-ce que chacun de nous ici a avancé un peu dans la vie chrétienne ? Nous le pensons. Un peu appris ? Pas beaucoup, sans doute. Peut-être quelqu’un a beaucoup appris ; que Dieu continue à lui apprendre toujours davantage. La connaissance de Dieu est la somme de toutes ces expériences : la connaissance de Dieu en Christ, la connaissance de ce qu’est Jésus, Jésus dans les difficultés, dans l’opposition. Deux seulement des espions montrent la foi. Leurs frères, les dix, entraînent toute l’assemblée, qui est gagnée par cette rébellion ; elle a gagné toute l’assemblée. Quel support que le support de Dieu ! Quand nous murmurons, que nous ne sommes pas contents de quelque chose, interrogeons un peu, dans le secret, le Seigneur. Peut-être qu’Il mettra son doigt sur une corde de notre coeur, et qu’Il nous dira : Voilà pourquoi tu n’es pas content. Il nous le dit parce qu’Il nous aime, parce qu’Il ne veut pas que nous fassions comme les dix et comme tous ces adultes qui sont tombés. C’est facile, de murmurer ! Chers amis, quel triste état. Et cela était dans le désert ! Ils avaient le désert devant eux ! Quand à Josué, Caleb, leur foi ne fléchit pas. Pourquoi ? Est-ce qu’ils valaient mieux que les autres ? Pas du tout. En quoi gît la différence ? En ceci : c’est que, dans le coeur de Josué, de Caleb, Dieu agissait. Ils avaient Dieu devant eux. C’est tout ce qui fait la différence, pratiquement, entre deux chrétiens. Si nous prenons un ensemble de chrétiens, par exemple dans nos assemblées, chacun sait les mêmes choses à peu près au même âge, au point de vue des vérités générales. On ne trouve pas d’hérésies (grâce à Dieu, on ne les supporterait pas encore). Et même, cette connaissance moyenne des vérités générales est peut-être aussi élevée que ce qu’elle était il y a un certain nombre d’années, cinquante ans peut-être ; admettons-le. Mais la différence, où est-elle ? La position moyenne des douze était identique aussi, leur position extérieure, les dangers, ce qu’ils avaient à faire ! Mais la différence entre les deux et les dix, où est-elle ? Dieu est là ou Dieu n’est pas là.
Le secret, pour nous — car tout cela est d’une importance infinie, infiniment profonde pour nous — c’est de chercher le Seigneur. Les difficultés sont très grandes, amères, douloureuses ? Cherchons le Seigneur. Cherchons la face de Dieu. Ne perdons pas notre temps à compter les ennemis (nous pouvons y passer toute notre vie…) ; mais cherchons Dieu, et demandons qu’Il se place entre notre coeur et toutes choses.
Nous sommes souvent bien au-dessous de ces croyants de l’Ancien Testament, des Caleb, des Josué et d’autres, des David, des fils de Coré (dont le nom est assombri par une très triste affaire, par une rébellion terrible). Il y a des fils de Coré, de cette descendance, dont la foi brille, parce qu’ils ont, quand même, trouvé Dieu, et qu’ils ont, quand même, gardé Dieu.
Est-ce que nous cherchons Dieu tout le temps ? Que Dieu nous y aide. Que Dieu soutienne notre foi dans les combats !
Dieu dit : Je vais détruire cette assemblée. Il avait dit auparavant, dans une autre scène : Retirez-vous de là, je vais détruire. Il y a eu des situations où Dieu a failli anéantir son peuple, plusieurs fois. Il veut l’anéantir. Et qu’est-ce que cela fait briller (je le dis en passant) ? Cela fait briller, dans cet exemple comme dans d’autres, la valeur de l’intercession. Moïse, ici, est un intercesseur. Comme il est écrit quelque part : s’il y a un prophète au milieu d’eux, qu’il intercède (Jér. 27:18). Et c’est le même principe que ce qui est dit dans le Nouveau Testament, lorsque nous sommes exhortés à prier les uns pour les autres, et en particulier pour un frère qui n’a pas péché à la mort ; c’est exactement le même principe. «Pour un frère qui a péché à la mort, je ne dis pas qu’il demande» (1 Jean 5:16). Mais autrement, lorsqu’un danger est là, lorsqu’une attaque est là, lorsque le peuple de Dieu vacille dans sa position, nous voyons que la grâce de Dieu — ou alors Dieu jugerait et anéantirait — suscite un Moïse qui intercède, et Dieu épargne son peuple. Sans quoi, il l’anéantirait. Cette intercession de Moïse n’a de valeur et d’efficacité que parce que c’est Dieu qui en est la source. Mais elle nous donne un principe tout à fait universel au long de tous les âges. D’ailleurs, nous trouvons déjà cela en Abraham. L’intercession de Moïse fait que Dieu retient sa main. Il retient sa main, mais frappe quand même ; et Il dit : «Aussi vrai que je suis vivant, dit l’Éternel, si je ne vous fais comme vous avez parlé à mes oreilles» (Nomb. 14:28). Et Dieu s’est glorifié aussi en faisant tomber ces dix : ils moururent de plaie. Quant aux autres, ils mourront pendant les quarante ans. Et ils sont morts, tous ces adultes, des centaines de milliers, qui ont su d’avance qu’ils mourraient dans le désert. Cela a justifié Dieu et la parole de Dieu. Et tous ces petits enfants, dont ils avaient dit : nos petits enfants, qu’est-ce qu’ils deviendront ? Ils entreront dans le pays, mais vous n’entrerez pas avec, vous. Tout l’ordre naturel des choses est renversé, et il est bon qu’il en soit ainsi La gloire de Dieu brille en ce qu’Il fait ce qu’Il veut. Tout Lui appartient, comme dit le Psaume 119 : «Toutes choses te servent». Que nous soyons avec ces «toutes choses» pour servir Dieu. Quel bonheur que d’avoir affaire à Dieu, chers amis. Quand on a affaire à Dieu, on ne voit plus le sable du désert, on ne sent plus qu’il est brûlant. Mais, comme disait quelqu’un : J’ai la source en moi, et un sanctuaire autour de moi. Que ce soit notre heureuse et continuelle force.
Le jugement a passé, à la gloire de Dieu.
Nous avons un enseignement, en ce que Caleb et Josué ont eu à subir, pendant quarante ans, les conséquences de l’infidélité et de l’incrédulité du peuple ; de même que, dans tous les temps, les vrais chrétiens ont eu à subir ce qu’entraîne, pour tous, l’incrédulité de l’Église professante qui est devenue mondaine — nous le savons bien, et nous faisons souvent comme elle. Nous subissons les répercussions de cette infidélité générale de l’Église, et nous n’avons pas à nous en plaindre. Josué, Caleb, ne se plaignent pas. Et nous les retrouvons tous les deux pour terminer, le désert passé, les quarante ans terminés, le Jourdain franchi, dans le pays de la promesse, et tous les deux comme des vainqueurs. Josué a une place à part. Il est un type de Christ, qui ouvre le pays de la promesse au peuple. Mais, comme homme, il a la récompense de sa foi. Et il termine (dernier chapitre de Josué) en disant encore (sa foi n’a pas baissé ; il a vu beaucoup de choses, il a vu les hommes de près, et il a vu et appris qu’on ne peut compter sur personne que sur Dieu ; il l’a appris au départ, dans la suite, et il le sait à l’arrivée ; et sa foi brille ) : Faites ce que vous voudrez, choisissez vos propres dieux, servez-les de tout votre coeur, si vous voulez ; «mais moi et ma maison, nous servirons l’Éternel» (Jos. 24:15). Voilà les dernières paroles, ou à peu près, de cet homme de Dieu. Il n’y a pas d’équivoque. Le désert n’a pas usé son coeur, n’a pas desséché son coeur, n’a pas affaibli sa foi. Au contraire, il compte sur Dieu. Il a compté sur Dieu. Il sait que Dieu seul compte, est précieux, qu’il faut chercher Dieu. Et il nous laisse cela, quand il a fini sa carrière. Il a fini son travail, et le pays s’est reposé de la guerre ; et il dit : «Mais moi et ma maison, nous servirons l’Éternel».
Caleb arrive dans le pays de la promesse, et il parle. On aurait pu croire qu’il n’en pouvait plus. Il s’avance vers Josué et parle, et dit : Il y a quarante-cinq ans que Moïse a parlé de telle et telle manière ; je viens te rappeler ce que Moïse a dit : que tout lieu que foulerait la plante de mon pied est à moi ; je viens aujourd’hui demander la réalisation des promesses que Moïse, c’est-à-dire Dieu, m’a faites. Il en a vu, pendant ces quarante-cinq ans, des hommes et des choses, mais ce n’est pas ce qui a compté pour lui. Au-dessus de tout cela et à travers tout cela, il a vu les gloires de Dieu, Dieu lui-même, ses délivrances. Qu’est-ce qu’il y avait, à Hébron ? Des enfants d’Anak, des géants. Il y avait des géants au départ du chemin de Caleb ; les géants du départ ne l’ont pas arrêté. Il y a des géants à l’arrivée du chemin de Caleb ; ils ne l’arrêtent pas non plus. Pourquoi ? Parce que Dieu était, dans l’un et l’autre cas, dans le coeur de Caleb.
Les géants figurent les ennemis qui veulent nous empêcher de jouir de Dieu, du ciel, et veulent nous faire gémir sur la terre, nous faire nous traîner sur la terre, comme un peuple qui ne serait pas lié à Celui qui peut dire : «Je suis vivant aux siècles des siècles».
Que le Seigneur nourrisse notre foi, la développe pour sa propre gloire, pour Lui qui est le chef et le consommateur de la foi, dans tous ses principes, dans tout ce qu’elle est. Qu’Il la développe et nous fasse connaître une joie profonde au milieu des difficultés, des exercices, des souffrances, qui n’ont pas été épargnés à Josué ni à Caleb. Et que notre joie soit celle de ceux qui se glorifient dans le Seigneur.
[LC n° 12]
Méditations sur la vie chrétienne, édition FR 1995, p. 49
Balaam était un homme pervers : «Ton chemin est pervers devant moi» (Nomb. 22:32). Il voulait paraître désintéressé ; il avait l’air de refuser honneurs et argent, mais l’un et l’autre gouvernaient son coeur. D’ailleurs, Balak connaissait bien son homme, pour l’appeler à son service pour maudire le peuple d’Israël.
Le peuple était dans une position propice à la malédiction de Balaam. Il n’était pas dans un brillant état ; il était très fatigué. Ce n’était pas l’état qu’on trouve en Exode 15, où tout le monde chantait et où «grande fut la foule des femmes qui répandirent la bonne nouvelle» (Ps. 68:11). Marie la prophétesse, et d’autres, unissaient leur voix pour chanter un cantique à la gloire de Dieu. Tel est le commencement : un départ en triomphe après le passage de la mer Rouge. Mais quarante ans de désert ont fatigué le peuple. Dieu a éliminé tous les hommes de guerre ; tous ceux qui étaient forts sont tombés sous le gouvernement de Dieu. Ceux qui, au départ, étaient de petits enfants sont devenus des hommes ; ils sont là, au bord des rives du Jourdain ; le pays promis est de l’autre côté.
L’histoire de ce peuple a été marquée par les interventions merveilleuses de Dieu, mais aussi par de tristes infidélités. Nous sommes les derniers à pouvoir jeter la pierre à ce peuple ; nous aussi, nous terminons la traversée du désert ; derrière nous aussi le sable brûlant, les hurlements d’une solitude. Depuis vingt siècles, l’Église a marqué les étapes de ses défaillances. Combien de manquements individuels, combien de manquements collectifs, sont enregistrés dans le livre de Dieu ! Nous le sentons : nous sommes fatigués, nous ne pouvons prétendre à aucune force. Le déploiement de la puissance de Dieu est beaucoup moins marqué que du temps des apôtres, où des miracles s’accomplissaient. Le peuple était heureux, glorieux, et au milieu de lui, Dieu se plaisait à démontrer sa présence. Aujourd’hui, ces signes ne sont plus ; ceux qui prétendent les retrouver n’ont pas arrêté leurs regards sur ce que l’Église a fait pendant vingt siècles ; ils n’ont pas lu, dans l’Écriture, la façon dont Dieu agit, plein de grâce toujours, de support, de patience, mais aussi de fidélité envers lui-même. Dieu ne peut pas, Dieu se doit à lui-même de ne pas pouvoir se manifester aujourd’hui, comme il l’a fait dans les Actes, à son peuple qui a montré tant d’infidélités envers lui. Nous n’en sommes pas étonnés : c’est la façon de faire de Dieu. Et c’est contre ce peuple d’Israël harassé, à bout de force humainement parlant, quand toutes les conditions sont contre lui, que nous voyons surgir Balak et Balaam.
Le peuple ignorait ce qui se passait à son sujet. Balak représente l’ennemi du peuple, le diable. Il était roi de Moab, et Moab n’était pas un descendant de païen ! Nous trouvons plus d’une fois cela, dans l’histoire du peuple d’Israël, que ses ennemis les plus ardents ont un lien de parenté avec lui. Balak, son ennemi, saisit le meilleur moment : quand le peuple est fatigué, quand il a montré son infidélité, quand il est sur le point d’arriver ; il est sur les rives du Jourdain. L’ennemi surgit et dit : «Le peuple n’entrera pas». L’ennemi se met en travers. On a vu cela à la fin de vrais chrétiens ; l’ennemi s’acharne et dit : «Cet homme n’entrera pas ; je suis là pour le condamner, il n’entrera pas !». Mais qui donc, en définitive, va régler la question ? Le peuple n’ouvre pas la bouche ; on ne l’entend pas. Des hommes de disputaient peut-être sous leurs tentes à ce moment. Mais l’entrée du peuple, sa malédiction ou sa bénédiction, sont réglées entre Dieu et l’ennemi. Et Dieu ne fait pas parler un ange : il force à bénir celui qui veut maudire.
Ces quatre prophéties (c’est sans doute le seul cas dans les Écritures) ne sont pas adressées directement au peuple. Dieu fait parler Balaam sans que le peuple, au moment même, le sache. Et «Dieu n’est pas un homme, pour mentir» (Nomb. 23:19) ; quand il a dit : «J’ai aimé ce peuple et je le bénirai», ce n’était pas un mensonge ! Il n’est pas «un fils d’homme, pour se repentir» (Nomb. 23:19) : s’il a appelé son peuple, il ne change pas. L’Écriture dit plusieurs fois que Dieu s’est repenti, c’est-à-dire qu’il a changé sa façon de faire, dans les détails, quand son peuple se montrait infidèle ; mais il ne se repent pas quant à son dessein final. Nul ne fera changer Dieu de pensée, quand bien même, au cours de l’histoire d’Israël, il a souvent été contraint de changer sa manière d’agir en châtiant son peuple au lieu de le bénir. Israël est resté son peuple, le seul qu’il ait choisi d’entre toutes les familles de la terre. On peut s’acharner contre Israël, mais en vain. Balaam était un homme pervers : il affectait d’être pour Dieu et son coeur était avec le diable. Il n’était pas devant Dieu. Il dit : «Je le verrai, mais pas maintenant ; je le regarderai, mais pas de près» (Nomb. 24:17). Ils ont été légion, les Balaam, les faux prophètes, au milieu du peuple de Dieu, soit du peuple d’Israël soit du peuple chrétien. Beaucoup de personnes ont affecté d’être pour Dieu et de servir son peuple ; au fond, elles étaient ennemies de Dieu, gouvernées par l’amour des honneurs et de l’argent. L’erreur de Balaam est un des trois maux signalés et dépeints dans le livre de l’apostasie, l’épître de Jude (v. 11), avec le chemin de Caïn et la contradiction de Coré.
«J’ai péché, car je ne savais pas que tu te fusses placé à ma rencontre dans le chemin» (Nomb. 22:34). L’effet de cette confession est nul, sans bénédiction. David a dit : «J’ai péché» et le prophète lui dit : «Aussi l’Eternel a fait passer ton péché» (2 Sam. 12:13). Le «j’ai péché» de David était l’effet du travail de Dieu dans le coeur et la conscience. L’âme est devant Dieu et confesse : c’est une bénédiction, c’est ce qu’on trouve dans le Psaume 32. Saül représente la chair religieuse établie dans une position de responsabilité, la chair assise sur un trône. Il dit aussi : «J’ai péché» (1 Sam. 15:24), et il est mort dans son péché. Judas a dit : «J’ai péché en livrant le sang innocent» (Matt. 27:4), et il reste le type même de celui qui est maudit pour l’éternité. Le Pharaon a dit aussi : «Priez pour moi» (Ex. 8:28), «j’ai péché» (Ex. 9:27). Ce sont des exemples de confessions charnelles. Il n’est pas vrai que tous ceux qui ont dit : «J’ai péché» ont trouvé le pardon. Il y a le «j’ai péché» de Balaam et celui de David. David a eu une défaillance ; mais tout au long des livres des Rois et des Chroniques, Dieu dit : «à cause de David mon serviteur, qui a été fidèle en toutes choses». Et les Psaumes de David nous font honte à nous, chrétiens. Que Dieu nous garde de la confession des lèvres qui ne révèle que la crainte du châtiment ! Et qu’il nous accorde de lui ouvrir notre coeur dans une confession que lui-même produit !
«Que mon âme meure de la mort des hommes droits, et que ma fin soit comme la leur» (Nomb. 23:10). Balaam a beau exprimer ce souhait, son âme ne mourra pas de la mort des hommes droits et sa fin ne sera pas comme la leur. Nous avons en Balaam l’exemple de quelqu’un dont Dieu peut se servir, comme de son ânesse, pour exprimer ses propres paroles, mais la puissance et la vie divine sont deux choses distinctes. Il peut y avoir puissance sans vie, comme chez Balaam et son ânesse. La vraie preuve de la vie, la preuve divine, nous est données dans l’Écriture : c’est le fruit, et non pas la puissance.
Ces quatre prophéties de Balaam sont d’une remarquable beauté ; elles nous présentent quatre caractères du peuple de Dieu, et du chrétien en particulier.
«Car du sommet des rochers je le vois, et des hauteurs je le contemple. Voici, c’est un peuple qui habitera seul, et il ne sera pas compté parmi les nations. Qui est-ce qui comptera la poussière de Jacob, et le nombre de la quatrième partie d’Israël ?» (23:9-10) ; il y avait quatre parties dans le camp d’Israël. Le premier caractère que l’Esprit de Dieu développe à propos de son peuple, c’est qu’il habitera seul, et qu’il ne sera pas compté parmi les nations. C’était un peuple tout seul au désert ; il y était plus en sécurité que dans le pays de la promesse. Si nous réalisions le désert, nous serions un peuple seul ; et Dieu dit cela au moment où il va entrer au pays de la promesse. Dès qu’on veut mêler le peuple de Dieu aux peuples du monde, ce peuple est perdu. Les peuples du monde n’y gagnent rien, le peuple de Dieu y perd tout. Dieu le dit, l’expérience le montre toujours. Il en est de même pour un individu : lorsqu’un chrétien se mêle au monde, c’est le monde qui le corrompt, et lui, il perd son témoignage vis-à-vis du monde : c’est un faux témoin. On dit : «Voilà un homme en qui le monde a été plus fort que Dieu».
Il demeure seul ; c’est un peuple séparé. La séparation est un des caractères du peuple de Dieu. C’est plus vrai que jamais, pour chacun de nous. Dans notre vie, nous sommes bien obligés d’avoir affaire à des gens du monde, mais notre coeur n’est pas là. Nous devons être auprès des gens du monde pour les servir, être comme des luminaires pour leur montrer le chemin du salut. Mais nous ne mangeons pas de leurs délices (Ps. 141:4). Le peuple de Dieu est toujours un peuple séparé et s’il se mêle au monde, il est perdu, il est corrompu, lui le premier. Mais si ce peuple réalise qu’il est seul, alors le cri jaillira du coeur même des gens du monde : «Que ma fin soit comme la leur» (Nomb. 23:10) ! Que la fin des siens dans ce monde fasse envie à ceux qui en sont les témoins ! Mais si nous faisons comme les gens du monde, si nous buvons aux mêmes sources qu’eux, si nous mangeons le même pain qu’eux, le témoignage est perdu.
«Il n’a pas aperçu d’iniquité en Jacob, ni n’a vu d’injustice en Israël ; l’Éternel, son Dieu, est avec lui, et un chant de triomphe royal est au milieu de lui» (23:21). Le deuxième caractère du chrétien et du peuple de Dieu, c’est la justice, la justification : c’est un peuple justifié, c’est un peuple racheté. Ainsi, nous sommes un peuple qui est à Dieu et Dieu ne voit aucune iniquité en lui ; mais nous, nous en voyons beaucoup en nous-mêmes, beaucoup de manquements dans le peuple, dans l’Assemblée, beaucoup d’infidélités ; mais Dieu dit à l’ennemi : «C’est un peuple juste, parce que je l’ai rendu tel». Nous savons que nous sommes justifiés et que l’oeil de Dieu se repose avec joie sur les siens et sur son peuple ; et notre justice, c’est Christ. Comme Christ est, tels nous sommes ; si la Parole ne le disait, nous n’oserions pas le dire.
«Que tes tentes sont belles, ô Jacob ! et tes demeures, ô Israël !» (24:5). Le troisième caractère, c’est la beauté du peuple. Nous chantons quelquefois dans un cantique : «Que l’unité de ton Église est belle !». C’est toujours vrai, et pourtant, il y a dans l’Église bien des divisions ; et plus nous sommes engagés dans les intérêts de l’Église du Seigneur, plus nous le savons. Pourtant le fait est là :
«Que l’unité de ton Église est belle !
Seigneur Jésus, qu’elle plaît à tes yeux !
Dans ton amour tu t’es livré pour elle :
Tu veux l’avoir près de toi dans les cieux.»
Et enfin le quatrième caractère : «Je le verrai, mais pas maintenant ; je le regarderai, mais pas de près. Une étoile surgira de Jacob, et un sceptre s’élèvera d’Israël» (24:17). Cette étoile, elle a surgi ; elle avait été annoncée ; elle est apparue : Jésus est venu et une étoile a changé sa trajectoire habituelle pour tracer, à ceux qui étaient attentifs, le chemin vers Bethléhem. Cette étoile reparaîtra plus tard en puissance ; et c’est de puissance qu’il s’agit ici. La quatrième prophétie va jusqu’à la fin, annonçant Dieu au milieu du peuple qui est un peuple séparé (Dieu le voit tel), racheté, justifié, beau aux yeux de Dieu ; au milieu de lui la gloire de Dieu resplendira.
Ces quatre caractères sont vrais à plus forte raison pour le peuple céleste de Dieu. Que Dieu nous donne de glorifier son saint Fils pendant que nous l’entourons, pendant qu’il n’a aucun éclat apparent ! Que nous réalisions que nous sommes un peuple séparé de toutes les autres nations par la croix du Seigneur Jésus ! Que Dieu nous donne de nous réjouir par un chant de triomphe royal à la pensée que, ce soir peut-être, nous entrerons avec le Seigneur dans cette gloire contemplée maintenant par la foi.
[LC n° 13]
25 avril 1971
L’histoire du peuple d’Israël est une triste histoire, pas bien brillante. La question essentielle, dans tout cela, c’est l’intention de Dieu, sa pensée. C’est la seule différence qui est faite entre l’histoire d’Israël et celle des nations.
Partout où le premier Adam a la liberté d’agir, il fait le mal ; et toujours. Cela était excusable chez Israël, et chez les païens. Mais chez les chrétiens, ils ont des ressources que Moïse n’avait pas.
Dans cette traversée du désert, nous y voyons un grand nombre de contestations. Plus un chrétien est fidèle, moins sa vie est remplie de faits. L’histoire d’un chrétien fidèle est dépouillée de faits. L’histoire de Jacob est remplie de faits, plus ou moins graves. L’histoire d’un croyant fidèle est pauvre en faits. Une marche fidèle se fait sans éclat. Il est bon de le redire. Est-ce que nous ne sommes pas de coeur roide, nous ? Alors, si nous ne le reconnaissons pas, c’est que nous le sommes beaucoup plus que nous ne le pensons.
Ce pauvre Moïse en a vu de rudes ! Un fait douloureux, c’est que Moïse n’est pas entré dans le pays de la promesse. Et pourquoi ? Parce que, à un moment donné, il a perdu patience envers le peuple. Il a perdu le contrôle de lui-même. Eh bien, Dieu a dit : Tu as fait cela ? Tu n’entreras pas dans le pays de la promesse.
Il y a eu bien des faits attristants, dans la vie du peuple d’Israël. Il y a eu la contradiction de Coré. Et tout cela a été sanctionné, d’une manière ou d’une autre ; et parfois, d’une façon très dure. Si Dieu n’avait pas eu de support, personne ne serait entré dans le pays de la promesse. Il y a, d’une part, le gouvernement de Dieu, et, d’autre part, l’accomplissement des desseins de Dieu.
S’il y a, dans nos coeurs ou dans nos affections, des choses qui ne vont pas, le Seigneur visitera cela. Nous n’y échapperons pas. Dieu a châtié Moïse d’une façon très solennelle. «Votre péché vous trouvera» (Nomb. 32:23). La grande question, avec Dieu, est toujours dans la mesure du bien et du mal. Il sonde vos reins et vos coeurs, pour voir si vos motifs sont bons. Ce sont les motifs qui comptent.
Nous sommes exercés, et toujours exercés, parce que nous oublions Dieu. Avec Dieu, notre force serait toujours renouvelée, et chaque matin. Caleb arrive à la fin de sa carrière en très bonne forme. Dieu a dû, si on peut parler ainsi, se contenir plus d’une fois, pour supporter son peuple. Pour Dieu, énoncer une parole et l’accomplir, c’est la même chose.
Dieu est toujours tenu d’agir en rapport avec sa gloire. Dans notre lecture, nous y voyons un personnage mauvais ; et c’est Satan. De même, Dieu peut permettre que les chrétiens soient assaillis par Satan. Dieu emploie aussi Satan. Nous perdons de vue que Satan a des droits ; et Dieu ne peut pas les lui retirer. C’est très solennel. Le monde ne peut pas être compris, si on oublie que Satan est son prince.
À la croix, tout a fléchi. Toute la puissance de Satan a été abolie, devant le Seigneur. Dieu ne peut pas contester, quand Satan accuse. Quand Satan accuse, Dieu ne peut pas dire que ce n’est pas vrai. Et quand Satan accuse qu’un chrétien est en mauvais état, Dieu ne peut pas dire : Ce n’est pas vrai ! Dieu dit : C’est vrai. Dieu emploie Satan, soit pour nous châtier, soit pour autre chose. L’apôtre avait le pouvoir de livrer un homme à Satan (1 Tim. 1:20). Dieu peut permettre qu’un homme soit livré à Satan. Satan cherche à affaiblir une assemblée en introduisant des éléments étrangers. Nous avons donc à prendre garde à l’activité de Satan. Il rôde, cherchant qui il pourra dévorer (1 Pier. 5:8). Et il peut y avoir des conséquences, même jusqu’à des divisions. C’est pourquoi encourageons les jeunes frères et les jeunes soeurs à vivre dans la crainte de Dieu. Ne passons pas à la légère sur ce qui n’est pas droit, au milieu de nous, et rectifions nos voies. Il peut arriver qu’à la fin de la carrière d’un chrétien, Satan le visite. Qui aurait su ce qui se passait chez Ananias et Saphira ? Tout mensonge est un péché, vis-à-vis de Dieu. Si vous cherchez vos intérêts, c’est un très grand péché. Il faut dire au Seigneur : Tu vois Seigneur, cette chose me ferait bien plaisir ; mais si ce n’est pas ta volonté, que ta volonté soit faite. Nous n’avons pas le droit d’avoir une volonté. Notre désir devrait être : «Seigneur, que ta volonté soit faite, même si cela ne me fait pas plaisir !». Et non pas : Je veux faire ma volonté, et ensuite, demander au Seigneur de me bénir.
Avant, dans un temps pas très éloigné, le Seigneur demandait aux siens d’être fidèles jusqu’à la mort. Et nous, à qui le Seigneur nous demande si peu, nous lui refusons ce qui lui ferait plaisir.
Dieu peut se servir de Satan, à la fin de la vie d’un homme. Nous devons demander au Seigneur de ne pas laisser passer quelque chose entre nous et lui. Demandons au Seigneur que nous nous tenions près de lui, aujourd’hui. L’avenir ne nous appartient pas. C’est le présent. «À chaque jour suffit sa peine» (Matt. 6:34).
Le Seigneur a fortement châtié son Église. Mais il la bénira, à la fin. Toutefois, il y aura, pour chacun de nous, un gain ou une perte éternel.
Son peuple doit être un peuple séparé. Il y a peut-être des frères et des soeurs qui trouvent qu’on est trop étroit. Ah, vous trouvez qu’on est plus à l’aise avec le monde ? Les inconvertis viendraient à connaître notre bonheur, ils vous diraient : Vous êtes des insensés ; c’est de la folie, que de venir vers nous chercher du plaisir. Encore une fois, nous récoltons ce que nous semons.
Un chrétien est vu sur deux points : premièrement, il n’y a pas en lui d’iniquité, quand il est vu en Christ ; d’autre part, tout est contrôlé par Dieu. Nous sommes responsables de nos actes. Notre marche est sous son contrôle. Dieu dit : Ce croyant m’appartient ; il a été payé du sang de mon Fils. Le Seigneur dit : Ce croyant est à moi ; je l’ai payé de mon sang. Et ils sont en Christ.
La beauté d’un chrétien, c’est le caractère de Christ en lui : la sainteté, l’humilité, la vérité. La vérité : on parle beaucoup de l’amour, mais de la vérité ? On ne voudra pas dire la vérité à son frère ou à sa soeur, pour ne pas lui faire de la peine. Ce n’est pas l’amour, cela. L’amour, c’est à revoir, chers amis. La flatterie, est-ce qu’elle est bannie de nos coeurs ?
Notre bon Dieu et Père nous a dit la vérité. Si le Seigneur venait maintenant, est-ce que tout le monde partirait ? C’est cela, la grande question. Êtes-vous à Christ, ou non ? Oh, je suis d’une descendance de frères fidèles ; je vais régulièrement aux réunions. Un christianisme d’éducation est un leurre, et un grand danger.
La beauté de l’Église, elle sera belle.
Dans l’Église, nous devrions montrer que la règle, c’est la volonté du Seigneur. Pour l’Église, il n’y a pas d’intervalle de temps. C’est une question d’état du coeur.
Si l’assemblée était restée dans son état normal, tel frère qui est tombé ne serait jamais tombé. Que le Seigneur nous garde des apparences !
Que le Seigneur nous donne de l’avoir, lui, dans notre coeur, comme un fruit mûr que la grâce produit.
[LC n° 14]
17 novembre 1946
Le voyage des Israélites illustre tous les exercices actuels du peuple de Dieu sur la terre. Il faut nous arrêter, et ne pas faire de l’histoire, quand nous lisons l’Ancien Testament. Les rationalistes font de l’histoire. Le chrétien trouve Dieu parlant, lorsqu’il nous présente ces récits ; et il est saisi de la crainte de Dieu pour mettre sa confiance en Lui.
Songeons à ces centaines de milliers d’hommes qui ont passé la mer Rouge ! Après un danger, un autre, non moins profond, non moins pressant ! Après la mer Rouge, quarante ans dans le désert, résultat de la désobéissance et de l’incrédulité du peuple. Mais il a fallu que Dieu porte son peuple quarante ans ! Du sable partout ! Dieu ne nous a pas tout raconté, il s’en faut bien, pas plus qu’il n’a raconté dans le Nouveau Testament tout ce qui concerne les saints.
Dans ce chapitre 33, nous avons le résumé d’une traite des fils d’Israël. Dieu a tenu à jour le livre de marche de son peuple — soyons sûrs qu’il continue à le faire. Il n’est pas une traite, pas une étape, qui ne soit consignée dans le livre de marche du peuple de Dieu ; et il n’y a pas un combat qui ne soit consigné dans le livre des guerres de l’Éternel. C’est le peuple de Dieu ; il s’y intéresse. La gloire de Dieu est engagée à cette traversée. Dieu l’a appelé, Dieu s’en est chargé. Et, quelque rigoureux que doive être son gouvernement, ce peuple arrivera au port. Le gouvernement de Dieu doit attirer notre attention. Tous ces hommes adultes, de fiers guerriers, étaient sortis comme les protecteurs du peuple, en apparence. On aurait dit : Six cent mille hommes peuvent le protéger ! Dieu dit : ces hommes, parce qu’ils ont été incrédules et m’ont méprisé, je vais les jeter par terre dans le désert. Qu’est-ce qui restera, Seigneur, si tu ôtes cette protection de ton peuple ? Je resterai, dit le Seigneur. Ce ne sont pas les six cent mille hommes qui feront traverser le désert. Voilà le gouvernement de Dieu. Dieu dépouille son peuple de son ornement et de sa force. La gloire de Dieu le veut, et Dieu dit : On va voir que la faiblesse de Dieu est plus forte que les hommes. On l’a vu. Vos petits enfants, tous ceux-là qui tètent encore, vous avez dit qu’ils seraient une proie ? Eh bien, vous n’entrerez pas dans le pays, et eux entreront dans le pays de la promesse ! Pourquoi ce gouvernement et ce châtiment solennels, qui sont rapportés de mille manières dans l’histoire du peuple, et rappelés encore aujourd’hui ? Parce que ces hommes, ces guerriers, n’ont pas cru que Dieu était assez fort pour porter ce peuple jusqu’en Canaan. Ne pas croire Dieu, c’est lui faire offense.
Lorsqu’on nous dit aujourd’hui : Le christianisme ne peut pas être réalisé, au vingtième siècle, le christianisme de Paul, c’est s’exprimer exactement comme les hommes du chapitre 13 du livre des Nombres : «il y a les géants, les fils d’Anak ; nous sommes comme des sauterelles à nos propres yeux, et nous sommes comme des sauterelles à leurs yeux à eux aussi» (v. 34). Encore aujourd’hui, on veut revêtir l’Église du Seigneur de la force de l’Égypte. On voudrait lui donner les caractères de la puissance de l’homme et du monde. C’est de l’incrédulité toute pure. Dieu ne fait jamais de la chair son bras. La force, le bras du peuple de Dieu, n’est pas un bras de chair. Appliquons cela, chacun de nous, chers amis, au peuple de Dieu ; et apprenons cette leçon que, si nous nous appuyons sur tout ce qui est de l’homme, son savoir, ses vertus, sa volonté, son énergie, sa puissance, ce sont ces choses qui nous feront tomber dans le désert. Les petits enfants qui tètent, portés par les bras de Dieu, sont plus forts que tous les guerriers. Chers amis, faisons l’application aujourd’hui au peuple de Dieu, à nous-mêmes, de ces leçons profondes, cachées sous ce fait historique. Et que la grâce nous accorde de nous dépouiller de tout ce qui est avantage humain, de tout ce qui est force humaine, de nous en dépouiller dans le secret de nos coeurs, et de dire, comme David lorsqu’on a voulu le revêtir de l’armure de Saül : «Je ne puis marcher avec cela, car je ne l’ai jamais essayé» (1 Sam. 17:39). Ce qu’il nous faut, c’est la puissance de l’Esprit de Dieu. Il la faut aux jeunes croyants ; il la faut aux vieillards ; il la faut au chrétien ignorant ; il la faut au chrétien instruit. Il n’y a que cette puissance qui nous fera entrer dans le pays de la promesse. Ne nous séduisons pas nous-mêmes, et ne nous séduisons pas les uns les autres.
Qu’est-ce que c’est que tomber dans le désert, aujourd’hui ? Cela peut s’appliquer à plusieurs choses. Mais, dans le premier sens, et le plus absolu, c’est la chute de celui qui a la profession chrétienne sans la vie. Le nom du Seigneur est invoqué sur tel ou tel, sur des masses et sur des peuples. On parle de nations christianisées ! Nous ne verrons pas de nations, dans le ciel. Parmi ceux qui les constituent, ceux-là seuls entreront qui avaient dans leur coeur cette foi vivante qui les avait mis en rapport avec Dieu par notre Seigneur Jésus Christ. Les milliers qui tombèrent dans le désert et, depuis vingt siècles bientôt, ceux qui tombent, ils étaient partis ; ils avaient tous leur bannière. Nous avons tous la croix comme bannière. Les Israélites avaient tous été baptisés pour Moïse dans la nuée et dans la mer. Mais celui qui croit au Seigneur Jésus, celui-là seul entrera dans le pays de la promesse. C’est très solennel !
Ce malheureux peuple d’Israël, au cours de ses étapes, en est venu à dire ceci à Moïse : «Nous ne voulons plus de ta manne ; c’est un pain misérable, notre âme en est dégoûtée» (Nomb. 21:5). Chers amis, combien de fois, dans la semaine qui a passé, avons-nous été dégoûtés de la manne que Dieu nous a donnée ? Toutes les fois que Christ perd sa saveur pour notre coeur, nous parlons comme les Israélites. Notre âme est dégoûtée de la manne ; et nous faisons un pas de plus. Il faut au coeur un objet. Si Christ n’est pas cet objet, il faudra autre chose, à savoir ce que le monde nous donnera. Si ce que le ciel nous donne ne rassasie pas notre coeur, nous irons manger ce que l’Égypte ou Babylone nous présente.
Nous avons à nous nourrir d’un Christ mort : «Celui qui mange ma chair et qui boit mon sang a la vie éternelle» (Jean 6:54). «À moins que le grain de blé, tombant en terre, ne meure, il demeure seul» (Jean 12:24), et: «Si je suis élevé de la terre, j’attirerai tous les hommes à moi-même» (Jean 12:32). Sur le plan humain, Dieu ne connaît pas l’homme. Il n’y a pas de relation possible, sur le plan naturel, entre Dieu et l’homme. Pour que la relation soit établie, il faut la croix. C’est pourquoi, pour avoir Dieu et pour avoir Christ, il faut manger la chair de Christ et boire son sang, c’est-à-dire qu’il faut connaître Jésus mort sur la croix pour nos fautes et ressuscité pour notre justification.
Nous nous nourrissons d’un Christ mort. La manne, c’est un Christ vivant sur la terre. Il fait partie de la nourriture du peuple de Dieu. Mais il faut connaître un Christ mort. Et les soi-disant chrétiens, qui ne veulent pas connaître Christ mort, n’ont ni le Fils ni le Père.
Voilà donc ce peuple qui dit : «Notre âme est dégoûtée de ce pain misérable». Un chrétien qui se jette dans le monde, on peut être sûr que Christ a perdu sa saveur pour lui. On descend facilement cette pente ; on la remonte difficilement. On perd facilement la communion avec Dieu ; on la retrouve difficilement. Il faut un travail profond de coeur et de conscience. Le problème quotidien, pour le chrétien, c’est de garder la communion avec le Père et avec son Fils Jésus Christ. Tout se ramène à cela. Ce qui me fait perdre la saveur de Christ mort et ressuscité est une chose mauvaise. Tout ce qui m’ôte la joie de Christ est mauvais. Les hommes diront peut-être : Si vous faites cela, vous serez quelqu’un d’étrange. Le Seigneur dit : Si tu fais cela, tu es fidèle. Entre ces deux déclarations, je n’ai pas à hésiter. Jouir de Christ au long des étapes de chaque jour, manger Christ, il n’y a rien d’autre pour le désert. Il n’y a pas d’autre nourriture, pour le désert. N’écoutons pas qui veut nous faire croire qu’il y a un autre viatique pour traverser le désert ; il n’y a rien pour nous, dans le monde. Les tout jeunes croyants, il faut que le Seigneur le leur fasse sentir. À quelle source ont-ils bu ? «Je n’ai pas été désaltéré, la source était amère ou crevassée». Ce sont les expériences du désert. Nous sommes dans le désert pour apprendre cela. Il nous faut apprendre la saveur de la croix dans un monde où tout est souillé.
Y a-t-il quelqu’un qui pense que ce monde est un monde intéressant ? Peut-être y a-t-il quelqu’un de tel ici. Eh bien, qu’il emporte cette parole : «mon âme est dégoûtée de ce pain misérable». Il ne le dira peut-être pas des lèvres, mais son coeur pense exactement de la même manière. Que le Seigneur nous en garde !
Qu’est-ce qui a fait du mal à ce peuple ? C’est le «ramassis». Ce sont des Égyptiens qui sont sortis avec le peuple. Nous les trouvons deux fois mentionnés, dans le Pentateuque : d’abord à la sortie d’Égypte, puis dans les Nombres. Ce ramassis se plaignait. Pourquoi se plaignait-il ? Parce que c’étaient des Égyptiens. Ils aimaient l’Égypte. Leur coeur y était resté, et ils disaient à Israël : «Tu as fait fausse route ; là-bas, au moins, on mangeait ; tu as fait erreur. Qu’as-tu fait d’écouter ce Moïse ?». C’est la même chose aujourd’hui. On nous dit : «Qu’est-ce que vous faites ? Vous vous engagez dans cette voie chrétienne ; jamais vous ne tiendrez». Eh bien, c’est Dieu qui nous a appelés, nous ne pouvons pas dire autrement. Vous voulez du monde dans votre christianisme ? Soyez certains que le monde vous engloutira.
Il nous faut veiller à toutes nos voies avec le plus grand soin. Nous avons dit très souvent que le christianisme est une affaire de détails. C’est vrai. Un homme trouvera dans son champ ce qu’il y a semé l’année précédente. Un grain infime donne un fruit visible et mauvais. Un homme trouve dans sa vie ce qu’il y a semé dix ou vingt ans avant. Il ne l’a pas jugé ; cela a porté son fruit. N’ayons pas peur de prendre Dieu au mot. Entre les déclarations d’hommes du monde et celles de Dieu, il n’y a pas d’hésitations à avoir. C’est Dieu qui m’aime. Il ouvre devant mes pas un chemin qui n’est pas agréable. Mais il vaut mieux être dans ce chemin avec Dieu que dans les avenues du monde sans Dieu.
Que Dieu nous donne d’avoir des oreilles ouvertes pour les leçons que ces passages nous donnent. L’Église achève sa course. Ce sont les dernières étapes les plus difficiles. On est fatigué, depuis si longtemps qu’on est en marche et qu’on combat ! Il y a encore des ennemis. Il n’y a pas que les difficultés naturelles ; il y a Amalek et toutes sortes d’ennemis depuis que nous combattons ! Le Seigneur peut nous dire : Je t’ai aidé hier, je t’aiderai encore aujourd’hui. Il ne nous donne pas la force pour cent jours à venir, mais pour aujourd’hui. Je t’aiderai aujourd’hui ; tous les Amalek ne m’empêcheront pas de t’aider ; je t’aiderai, je te porterai. Voilà la foi. C’est exerçant, mais il vaut la peine d’être exercés. Et quand nous arriverons, et que nous poserons le pied de l’autre côté du rivage, quand nous arriverons en ce lieu que nous avons tant de fois désiré, certainement nous aurons des regrets de n’avoir pas été plus fidèles, d’avoir eu peur de souffrir, d’avoir préféré nos aises et notre chair à l’opprobre du Christ. Moïse a préféré l’opprobre du Christ ; c’est extraordinaire ! L’opprobre de la foi ! Christ a préféré cet opprobre d’une façon parfaite, parce qu’il est le chef et le consommateur de la foi. Mais la foi fait ce que personne ne fait ! Elle est parfois toute seule à le faire. Mais Israël, pauvre peuple insensé de prendre une route pareille en regrettant l’Égypte (Ex. 16:3 ; 17:3 et autres) ! Moïse a préféré avoir l’opprobre du Christ aux honneurs de l’Égypte. Il est allé à la tête du peuple.
Dans le détail, faisons comme Moïse ; renonçons à telle et telle chose sans le dire à personne — «Seigneur ton approbation plutôt que tout ce que le monde présente». Cela, en vérité, c’est s’engager par la foi dans le chemin du Seigneur C’est solennel, mais c’est de toute beauté. La grandeur de la vie chrétienne est là, dans le fait que la foi connaît un chemin qui est tout à fait à l’inverse du chemin du monde. Nous ne consultons pas la majorité, pour savoir comment il faut marcher où Christ a passé. Qu’est-ce que Jésus a fait, où est le sentier de Jésus dans telle circonstance ? Mon Sauveur, qu’est-ce qu’il me montrera ? Comment marcherait-il ? Pour le savoir, il faut regarder ce qu’il a fait, dans la Parole de Dieu, avoir affaire à Jésus. Que les chrétiens eux-mêmes ne nous cachent pas Jésus. Que nous soyons animés des sentiments qui faisaient dire à Marie : «Je cherche mon Seigneur» ; mais que nous sachions où on l’a mis (Jean 20:13) !
Le peuple était dégoûté de ce pain misérable. Encourageons-nous à chercher Christ Prions individuellement dans nos maisons Ne nous contentons pas de marcher, d’emboîter le pas chaque dimanche, de dire : «Après tout, les frères ont raison de nous dire cela, de nous parler du ciel ; il y a six jours que nous n’en avions pas entendu parler». Suivons Christ, et que Jésus soit notre objet, notre joie secrète, notre force. Il en vaut la peine. C’est la seule valeur de la vie — «saisis ce qui est vraiment la vie» (1 Tim. 6:19) ; nous n’avons pas d’autre chose à dire.
Si le chemin paraît un peu étroit, difficile pour certains, qu’ils aient affaire au Seigneur et lui demandent de voir plus clair, d’avoir plus de force, d’être plus dépouillés. Et, ce qu’ils ne pouvaient pas faire hier, le Seigneur leur donnera de le faire aujourd’hui. C’est le progrès et la sanctification : un peu plus de Christ aujourd’hui qu’hier. Est-ce vrai ? Ou bien un peu plus de moi, un peu plus du monde ? Serons-nous couverts aujourd’hui un peu plus par des choses du monde qu’hier, et par ce qui est apprécié par le monde ? C’est de la folie, pour Dieu.
Encore un point ou deux sur le caractère et les avantages de ce peuple. La demande de l’exploration du pays, il semblerait qu’elle vienne de Dieu. Si nous lisons le commencement du Deutéronome, nous voyons qu’elle vient du peuple et est, au fond, la preuve de l’incrédulité. Dieu permet cela, mais cela tourne mal. Quelle est la portée de ce fait, pour nous ? Cela signifie que le Saint Esprit lui-même est venu du ciel et nous apporte les joies du ciel, le bonheur, la gloire du ciel. C’est le Saint Esprit qui nous fait jouir des choses de Dieu. La foi dit : «Ce terrain est bon». Le chrétien professant dit : «Le pays est mauvais». Un chrétien est un homme scellé du Saint Esprit. Il n’y a pas de position chrétienne sans cela. Le Saint Esprit rend témoignage dans ce croyant, qui est enfant de Dieu, que le ciel est à lui, et que le pays est à lui : «Christ est ma joie, ma nourriture, ma force, ma vie». Le chrétien professant qui n’a pas la vie dit : Il n’a pas de saveur ; je me soumets seulement à toutes les habitudes extérieures. Mais ce n’est pas cela qui donnera à un homme appelé chrétien la saveur du ciel et la saveur de Christ ; c’est le Saint Esprit.
Nous avons insisté là-dessus bien des fois. Nous n’insisterons jamais trop sur ceci, que le Saint Esprit est la puissance qui nous fait jouir de Christ. Sinon, il n’y a point de vie, de saveur, de force. Nous lisons la Parole chez nous et, si nous n’avons pas l’Esprit, nous l’étudions comme un livre quelconque. Et si l’Esprit est contristé, ce livre est fermé. Nous avons des mots, des lettres, mais pas la pensée de Dieu. Le ciel n’est pas à nous. Nous sommes dans le désert, et n’entrons pas dans le pays de la promesse.
Celui qui a le Saint Esprit jouit de la Parole de Dieu. On mange dans la Parole de Dieu. C’est un mystère, si vous voulez ; mais il y a beaucoup de choses inexplicables. La vie de Dieu, dans le croyant, est alimentée, développée par la Parole de Dieu appliquée par le Saint Esprit. C’est par le Saint Esprit que Dieu habite en nous, que nous jouissons du ciel. Un fils de chrétien qui n’a pas le Saint Esprit ne peut jouir du ciel. Les parents doivent demander que leurs enfants soient convertis et scellés du Saint Esprit. Il peut y avoir une différence entre les deux choses. Les chrétiens professants n’arrivent pas à comprendre. Caleb et Josué, deux seulement, disent: «Le pays est très bon ; Dieu nous le donnera» ; les dix autres n’y comprennent rien, et c’est toujours la même chose. Les millions de chrétiens qui n’ont pas l’Esprit — chrétiens parce qu’ils ont été baptisés — ne comprendront jamais qu’un homme puisse passer sa vie en ne lisant que sa Bible, ou des choses qui aident à comprendre la Bible. Nous comprenons qu’ils ne comprennent pas. Mais le fait est là. Tandis que le croyant, lui, dit : Voilà mes délices ; c’est la Parole de mon Dieu, ma nourriture, ma force, ma lumière, ma vie. Tout est dans la Parole. Alors, quel bonheur que d’avoir le ciel ouvert, le coeur de Dieu ouvert !
Si un homme ne jouit pas de la Parole de Dieu, il peut se poser deux questions. D’abord, est-ce que j’ai reçu le Saint Esprit ? Puis, est-ce que je n’ai pas contristé le Saint Esprit ? C’est bien plus fréquent qu’on ne le pense. On est très affairé dans la vie. On n’apprécie que ce qu’on voit, que ce qu’on touche, que ce qu’on entend. Le monde visible seul compte, et le monde invisible disparaît. Tandis que, par le Saint Esprit, on traverse toutes choses comme des circonstances. Voilà une circonstance aujourd’hui, une autre demain ; mais je passe, je suis étranger. Le cadre varie, mais je vais mon chemin, je ne varie pas. Je ne suis pas d’ici, ma patrie est ailleurs. L’ancre, je l’ai jetée ailleurs. Voilà la vie du chrétien, et tous les jours. Que ce soit facile, nous ne le disons pas, et d’autant plus difficile qu’on est plus isolé. Des chrétiens pieux sont une force mutuelle, pour réaliser cette vie. Mais il nous faut savoir, dans cette vie, partir seul, marcher tout seul, faire une étape tout seul, n’ayant de secours que dans Christ. Quelquefois, on trouve bien des sujets de découragement. On dit : Est-ce que je ne me trompe pas ? Et le Saint Esprit vient me dire : Le pays dans lequel tu vas entrer est un très bon pays ; incontestablement, tu es sur la bonne voie. La voix de ce témoin divin dans notre âme fait taire toutes les autres voix, annule toutes les autres puissances. Le Saint Esprit rend témoignage à mon esprit ; tout va bien. Je continue mon étape, je marche, je la fournis, et Dieu m’a délivré encore une fois. Si vous comptez sur tous les frères, ce n’est pas la foi qui honore Dieu. Mais Dieu n’honorera pas cette foi-là. Quand vous êtes tout seul, comptez sur Dieu. Dieu dit: Tout va bien ; que Lui dise ceci, voilà qui compte. Même je te ferai voir ma gloire dans le désert ! Josué et Caleb disent : «C’est un très bon pays. Dieu détruira bien toutes les puissances qui y sont», car c’est Satan qui est dans les lieux célestes. Il veut nous barrer le chemin de la joie, des choses d’en-haut. Il veut nous ôter notre joie, parce qu’il sait que, si nous sommes heureux, nous sommes forts. Heureux parce que nos affaires vont bien ? Non, parce que nous avons de la joie dans le Seigneur, et parce que Dieu est avec nous.
Josué et Caleb sont entrés tout seuls. Josué, une fois, n’est pas cité, parce qu’il représente Christ qui fait entrer le peuple à travers le Jourdain. Il nous amènera dans le pays de la promesse. Mais Caleb, on le retrouve, à quatre-vingts ans, dans le pays de la promesse. Il dit : «J’ai marché quarante ans, mais je ne suis pas fatigué». Il dit à Josué : «Tu peux me donner une ville difficile à prendre». Et les géants, qui ne lui avaient pas fait peur à quarante ans, ne lui ont pas davantage fait peur à quatre-vingts. Caleb, sa foi brille jusqu’au bout ! Puissions-nous imiter sa foi. Il n’avait pas le Saint Esprit ; et nous, nous avons le Saint Esprit.
Paul termine sa vie. Devenu un vieillard, est-ce que Paul a fléchi ? Pas le moins du monde. Il dit : «Tous m’ont abandonné… Mais le Seigneur s’est tenu près de moi et m’a fortifié» (2 Tim. 4:16-17). Paul vieillard était plus fort que Paul nouveau converti, parce qu’il pouvait dire «Mon Dieu». Voilà la foi. Elle échappe à toute imitation, à toute analyse, à toute copie. On peut imiter la foi, on ne la copie pas. On ne copie pas les actes de la foi. À certains moments, elle a l’air sage, fait comme tout le monde ; à d’autres, elle a l’air insensée, et fait comme personne. La foi, c’est l’action de l’Esprit dans notre coeur. Elle nous donne la pensée de Dieu.
Que Dieu veuille nous accorder de marcher par la foi. Nous sommes sauvés par la foi. Maintenant, marchons par la foi. Le salut de la course, c’est-à-dire l’entrée dans le pays de la promesse, nous ne le réaliserons que par la foi.
Dans Nombres 9, le peuple d’Israël n’avait pas eu à se soucier de ses étapes. Elles lui étaient tracées d’avance par la gloire de Dieu : la nuée le jour, la colonne de feu la nuit. Elle allait devant lui et lui traçait son étape. La nuée se levait ; le peuple partait. La nuée ne bougeait-elle pas ? Le peuple restait sur place. Il aurait pu y avoir beaucoup de raisons pour partir. Mais la nuée ne bougeait pas ; le peuple ne partait pas. Cela nous parle de la dépendance, l’une des vertus maîtresses de la vie chrétienne : dépendre de Dieu, de Christ.
Je voudrais, Seigneur, faire ce pas. Est-ce que tu es devant moi, au moment où tu vas le faire ? Dans le détail, chaque jour, nous pourrions voir la nuée, si nous avions plus de foi. Et, dans les circonstances importantes de notre vie, combien il est capital d’attendre que la nuée se lève.
Si le peuple partait sans que la nuée se lève, il allait devant des ennuis de toutes sortes. Comment pouvait-il tenir tout seul sans Dieu ? La dépendance est une vertu rare ! C’est l’obéissance, c’est dire : «Seigneur, je ne veux pas faire cela. Que je fasse cela en te suivant et parce que tu me le dis ; je préfère ne pas le faire si tu ne me dis pas de le faire». La dépendance est l’une des conditions de notre force, de notre sécurité. La dépendance est plus rare qu’autrefois, j’en suis persuadé. Dans la vie de chacun de nous, on décide et, après avoir décidé, on dit : Seigneur, bénis-moi ! Mais Dieu ne bénit pas la chair. Il corrige la chair, et il bénit la foi. Il pourra s’y prendre de bien des manières, pour ramener l’âme à son point de départ. Mais partons de ceci, du principe absolu, que Dieu ne bénit pas la chair. Il la corrige, il la mate. La chair n’est jamais un don de Dieu. Eh bien, dépendre de Dieu dans tel ou tel choix, dépendre de Dieu, avoir Dieu avec soi, ne pas bouger, c’est beaucoup mieux que de faire beaucoup de choses sans Dieu !
Que Dieu nous accorde de penser beaucoup à ces choses et, d’une façon croissante, de les vivre.
[LC n° 15]
Josué, après avoir pris la succession de Moïse, à qui Dieu a, on peut dire, interdit d’entrer dans le pays qu’il a salué de loin, a été appelé par Dieu à remplacer Moïse. Et ce qui caractérise le service de Josué, c’est qu’il a fait entrer le peuple dans le pays de la promesse. Il est en cela un type du Seigneur qui a fait entrer son peuple dans le ciel. Les saints, les croyants, les chrétiens, sont déjà dans le ciel. La plupart ne connaissent pas cette vérité. Ils peuvent jouir des conséquences de cette vérité sans la connaître. Le Saint Esprit peut leur faire goûter les choses du ciel ; mais toutefois, il est bien préférable que les chrétiens connaissent leur vraie position présente devant Dieu. La Parole ne nous a pas été donnée pour rien. Il y a, dans tous les passages de l’Écriture, des instructions qui sont utiles à des degrés divers, et il n’y a pas de passages inutiles, pas un verset inutile. Josué a donc fait entrer le peuple dans le pays. Le Jourdain a été traversé. Trois faits ont marqué le peuple d’Israël, ce peuple qui reste un peuple merveilleux dès ce temps et au-delà, un peuple qui n’a pas eu son pareil sur la terre, qui a été honoré par Dieu comme nul autre ne l’a été. Et il le savait bien ; c’est ce qui l’a rendu tellement hostile au Messie, qui s’est présenté sous une forme qu’il n’attendait pas. Et cette hostilité demeure et demeurera, en tout cas pour le grand nombre.
Josué a donc traversé le Jourdain. À la Pâque, le jugement de Dieu, dans son caractère absolu quant à ses droits, a été mis en évidence. Le peuple a été racheté, car le sang de la victime avait coulé. Et, s’il n’y avait pas eu cela, Dieu, sortant pour juger les Égyptiens, aurait dû juger en même temps son peuple, car il ne valait pas mieux. À la mer Rouge, c’est la destruction de la puissance de la mort vis-à-vis du peuple de Dieu. Le Seigneur a vaincu la mort. Il a ôté à Satan la puissance que celui-ci détenait. Cela paraît étrange, et on comprend que de jeunes chrétiens aient de la peine, quelquefois, à comprendre de telles paroles. Mais, par la suite, Satan s’est acquis sur l’homme des droits, et des droits que Dieu Lui-même ne peut pas discuter. Jusque-là, les hommes se livraient à Satan. Eh bien, Dieu reconnaît à Satan ce droit-là, dans la mesure où il le contrôlera par la suite. Mais le jugement de Dieu sur l’homme est tombé. Il comprend plusieurs parties, en particulier le fait qu’il était sous le pouvoir de Satan, puisqu’il avait choisi de se mettre là. C’est pourquoi aussi, quand le Seigneur est venu, homme fidèle, entreprenant de reprendre entre ses mains la cause de l’homme tombé, il ne pouvait pas ne pas se placer sous toutes les conséquences résultant de la désobéissance du premier Adam. Et il commence par être, au désert, en face de Satan, devant qui Adam et Ève s’étaient trouvés. Le Seigneur devait refaire cette histoire de l’homme, Lui, le dernier Adam, le second homme. Et il a été mis à l’épreuve, au désert. Il a triomphé par l’obéissance, de sorte qu’il a remporté une première victoire sur Satan, qui ne pouvait plus rien sur lui. À cet égard, Dieu ne pouvait rien permettre à Satan à l’égard de cet homme qui venait, dans l’obéissance, de sortir vainqueur de l’épreuve. C’est pourquoi, à partir de ce moment-là, le Seigneur ayant lié l’homme fort, a pillé ses biens. Il aurait pu, à ce moment, si on avait voulu le recevoir, établir la paix sur la terre. Nous savons ce qui est arrivé. Mais pour entreprendre le salut de l’homme, le Seigneur devait défaire Satan, qui détenait le pouvoir de la mort de la part de Dieu, qui lui avait donné cette autorité pour effrayer l’homme. Et la mort était ainsi, non seulement un jugement de la part de Dieu, mais une manifestation de la puissance que Satan s’était acquise sur l’homme en le portant à la désobéissance.
Le Seigneur Jésus, avant son oeuvre de la croix, a d’abord, à Gethsémané, rencontré Satan. Et nous trouvons là une leçon pour nous tous. Satan met à l’épreuve les saints, dans l’ensemble, de deux manières : d’une part, en les tentant par les choses agréables, comme il a fait pour le Seigneur en lui offrant les gloires du monde ; et, d’autre part, en les effrayant, comme il l’a fait au jardin de Gethsémané en faisant peser sur l’âme de Christ les terreurs qui l’attendaient, lorsqu’il s’agissait d’être abandonné de Dieu. Il a fait tout son effort pour que le Seigneur ne s’avance pas devant ce qui était l’épreuve décisive, aussi bien pour Satan que pour la gloire de Dieu. Et c’est pourquoi le Seigneur a connu là une épreuve et une douleur incomparables. Il en est sorti triomphant par la soumission. Il a dit : Père, puisque vraiment c’est ta sainte volonté que je prenne la coupe et que je la boive, que ta volonté soit faite. Mais trois fois, pour ainsi dire, le Seigneur, dans l’effroi de son âme, par avance, a sondé cela jusqu’au fond, pour être bien sûr que c’était la volonté du Père, qu’il prit la coupe pour la vider sur la croix. Ce fut un moment d’une insondable profondeur. Satan n’avait plus rien en Lui, désormais. Le Seigneur s’est avancé à la croix et là, il n’avait plus à faire avec Satan à cet égard, sauf que Satan a ligué les hommes contre lui. Mais le Seigneur s’est offert sur la croix dans l’obéissance, et, pendant les trois heures, il a connu, à l’écart de tous les regards, la rencontre avec Dieu, cette rencontre qui ne pouvait pas se répéter. Pendant ces trois heures éternelles, il a éprouvé ce que c’était que de subir le jugement de Dieu à l’égard du péché.
Il entre dans la mort volontairement. Satan n’avait rien en Lui. Dieu ne pouvait pas permettre que Satan exerçât à son égard quelque pouvoir que ce fût, comme il peut permettre que Satan trouble des âmes, voire des chrétiens, au moment de la mort. C’est un pouvoir que Satan s’est acquis, et Dieu ne peut pas le discuter. C’est un fait extrêmement solennel que cette chute d’Adam et Ève, sous le regard de Dieu. Le jugement est terrible, et Dieu Lui-même ne pouvait pas revenir sur sa parole qu’il avait dite à Adam et Ève : «Tu mourras certainement» (Gen. 2:17) !
Le peuple a donc connu la Pâque, la traversée de la mer Rouge où le pouvoir de Satan a été détruit, et le Jourdain, où c’est le peuple qui a passé au fond des eaux du fleuve. Les eaux sont arrêtées et, l’arche étant là, le peuple est identifié, pour ainsi dire, avec l’arche qui se tenait au fond des eaux de la mort Et cela, c’est l’image du fait que les chrétiens sont morts en Christ. La mort de Christ est la leur, elle est à eux : «Toutes choses sont à vous… soit vie, soit mort» (1 Cor. 3:21-22). La mort de Christ appartient au chrétien. C’est-à-dire que le chrétien peut être troublé, s’il marche mal ; mais autrement, le chrétien, en pensant à la mort, ne la considère pas comme un jugement de Dieu. Il n’y a plus du tout cela ; c’est une chose passée. Il est mort dans la mort de Christ, ressuscité avec Christ et en Christ. Les deux expressions sont dans le Nouveau Testament. C’est très important à retenir, cela, pour le christianisme pratique, pour les conséquences dans le christianisme pratique. Nous savons très bien que, même parmi nous, il y a des évangélistes, peut-être, qui s’en tiennent à la croix et s’arrêtent, et laissent le pécheur, quand il a cru, à la croix. Dieu ne laisse aucun croyant à la croix. Il l’emmène au-delà de la croix, jusqu’au ciel ; pas quand le croyant ira au ciel, mais dès maintenant. Et c’est la pensée essentielle dont je désirais dire quelque chose ce soir : le fait que nous sommes déjà du ciel, dans le ciel. Le peuple, une fois arrivé de l’autre côté du Jourdain, est dans le pays de la promesse. Là, la circoncision est opérée ; et, en réalité, des chrétiens peuvent réaliser cette circoncision, c’est-à-dire la mise de côté du vieil homme, justement parce qu’ils sont dans le ciel en Christ. C’est dans la mesure où nous réalisons notre position en Christ, que nous avons la force pour mettre en pratique cette circoncision, c’est-à-dire mettre de côté le moi, la volonté. Ils n’ont pas fait cela dans le désert. La carrière du chrétien est double, à cet égard : nous sommes à la fois dans le désert et dans les lieux célestes. Le désert, c’est un sujet plus ordinaire, plus courant, et que nous comprenons facilement. Mais la partie céleste de la vie chrétienne est un sujet plus difficile à saisir, et non moins important.
Voilà donc le peuple qui est dans le pays de la promesse, et nous voyons que sa nourriture change. Il n’a plus la manne. La manne, c’est pour le désert. Nous l’avons encore, la manne ; c’est Christ dans sa vie. Un chrétien se nourrit des perfections de Christ homme, et, en s’occupant de Christ parfait, comme on le trouve dans les évangiles, le chrétien est modelé à l’image de son Maître. Car la vie de Christ homme est le modèle de la vie des saints. Il nous a laissé un modèle afin que nous suivions ses traces (1 Pier. 2:21). Le chrétien seul peut marcher sur de telles traces et, en particulier, le chrétien dans la mesure où il connaît les ressources célestes de la vie du croyant. Nous voyons un autre fait, c’est le vieux blé du pays. C’est la nourriture céleste du pays dans lequel ils sont entrés. Le vieux blé du pays représente Christ ressuscité. Et le chrétien, dans sa vie de tous les jours, peut jouir de Christ, en communion avec Lui dans le ciel – donc Christ ressuscité. Ne cherchons pas Christ à Jérusalem. Nous comprenons que même des frères puissent aller y trouver des émotions plus fortes et légitimes pour prendre connaissance des lieux où se déroula la vie de notre cher Sauveur, mais il n’est pas du tout nécessaire de nous livrer à cela. Nous savons que notre Seigneur est dans le ciel, et nous pouvons avoir avec Lui des rapports beaucoup plus réels et beaucoup plus efficaces, que d’aller chercher le souvenir de son passage dans les lieux mêmes où il a marché et souffert. D’ailleurs, soit dit en passant, dans ce lieu-là, où le sang de Christ a été versé, ce n’est pas, pour l’essentiel, le sang qui parle mieux qu’Abel, comme dit l’épître aux Hébreux (10 :24), mais c’est un sang qui crie (Gen. 4:10 ; Nombres 35:31-34). Il n’a pas encore eu de satisfaction. Il n’y a pas eu d’apaisement, quant à la voix de ce sang qui crie, pour le peuple Juif (pas pour les dix tribus : elles n’étaient pas là, il n’y avait que les deux tribus de Juda et Benjamin). Le peuple Juif, et puis le pouvoir civil, le pouvoir Romain en particulier, l’empire romain — on peut dire l’ensemble du monde — étaient représentés à la croix. Mais particulièrement les Juifs et l’empire Romain sont là sous le coup de la culpabilité de ce crime accompli. Ce n’est pas une voix, un sang qui parle mieux qu’Abel, qu’on trouvera là-bas. Ce n’est pas le chemin qu’il faut prendre pour trouver cette voix qui parle mieux qu’Abel, la voix qui est là, prête d’ailleurs à se faire entendre et à manifester ses effets par des circonstances dont ce peuple ne se doute pas. Cette voix, c’est encore celle qui crie : vengeance ! Le Seigneur n’a pas encore eu de satisfaction, à cet égard, et Dieu non plus.
Le peuple est donc là dans le pays de la promesse. Et nous voyons apparaître un personnage un peu mystérieux, qui est le chef de l’armée de l’Éternel. C’est donc un combat. C’est une chose qui mérite notre attention que, dès le début du livre, Dieu dit à Josué : «Tout lieu que foulera la plante de votre pied, je vous l’ai donné» (Jos. 1:3). Cela, c’est aussi pour nous, chers frères et soeurs : tout lieu que notre pied foulera dans les lieux célestes sera à nous. Et il faut conquérir ce que Dieu donne, le pays que Dieu donne. Et nous avons, au cours de notre carrière ici-bas, à conquérir, pour ainsi dire, le ciel que Dieu nous a ouvert. Nous y entrons pour rendre culte. C’est là que nous rendons culte, en vérité. Mais nous y entrons aussi pour autre chose. La vie d’un chrétien a ses sources, en réalité, dans les lieux célestes. Et quand nous jouissons fortement de la communion avec le Seigneur, nous comprenons ce que cela veut dire. Nous savons très bien que le ciel remplit notre coeur, ce ciel que nous ne nous représentons pas effectivement. Mais nous comprenons qu’il soit dit : «Fixant les yeux sur les choses qui ne se voient pas» (2 Cor. 4:18), ou encore : «Contemplant à face découverte la gloire du Seigneur, nous sommes transformés en la même image, de gloire en gloire, comme par le Seigneur en Esprit» (2 Cor. 3:18). Comment ces passages étranges se réalisent-ils ? Par le Saint Esprit, prenant nos coeurs et les tenant en communion avec le Seigneur que nous n’avons jamais vu. Nous ne l’avons jamais vu et nous ne le verrons jamais. Notre carrière sera achevée, d’une manière ou d’une autre, quand nous le verrons. Le Saint Esprit nous lie donc à Celui que nous n’avons pas vu, et en qui nous nous glorifions. Et nos affections sont dans le ciel. Un chrétien céleste, son coeur est au ciel, parce que son trésor est là. Au fond, c’est vrai pour tout chrétien. Seulement, nos coeurs, pratiquement, se promènent aussi bien facilement sur la terre, et cela est justement un fait qui cause beaucoup de dommages à la vie des chrétiens, et aussi à la vie de l’Église.
Nous voyons le chef de l’armée de l’Éternel : «Es-tu pour nous, ou pour nos ennemis ? Et il dit : Non, car c’est comme chef de l’armée de l’Éternel que je suis venu» (Jos. 5:13-14). Lorsqu’il s’agit du christianisme ordinaire, du christianisme réalisé par les chrétiens vus comme pèlerins ici-bas, il y a des éléments qui interviennent (les relations humaines, les valeurs humaines) et qui ont leur place. Mais lorsqu’il s’agit des relations purement spirituelles, des joies proprement spirituelles, les valeurs humaines, même légitimes, disparaissent Et c’est tellement vrai, que nous trouvons dans le Nouveau Testament, dans l’épître aux Galates en particulier, qu’il n’y a ni homme, ni femme. Il n’y a pas de différence de personne. Quand la communion est dans l’assemblée, quand la communion des saints est puissante par le Saint Esprit, nous nous oublions mutuellement, et nous sommes perdus ensemble, les uns et les autres, dans cette communion avec le Seigneur. Il y a là un caractère, dans notre vie chrétienne, qui est tout à fait particulier, et qui devrait la marquer plus fréquemment. Des qualités, qui peuvent être très utiles dans la vie chrétienne ordinaire, dans la vie du pèlerin dans le désert, n’ont plus de place lorsqu’il s’agit des choses d’ailleurs, lorsqu’on parle d’un christianisme céleste. Combien nous avons à reconnaître que nous reculons souvent, et que nous ne savons pas abandonner telle ou telle chose à quoi nous tenons, et qui nous empêche d’avoir une joie plus grande en Christ et dans les choses qui ne se voient pas. Ce n’est pas nécessairement une idole, mais cela peut être les affaires de la vie. Des chrétiens — nous pouvons dire, sans nul doute, Paul et d’autres aussi — ont réalisé, d’une façon intense, cette vie céleste. Paul pouvait dire : «Nous ne connaissons personne selon la chair» (2 Cor. 5:16). Pourtant, dans la pratique, il s’occupait de ses frères et de ses soeurs. Mais son coeur restait lié à Christ dans la gloire et trouvait sa force et sa joie dans cette communion avec Lui, qui lui permettait de surmonter tous les déboires — et il n’en a pas manqué.
Ce qui est arrivé, c’est que le peuple a remporté des victoires, nous le savons. Le livre de Josué est, au fond, dans l’ensemble, un livre qui nous parle de victoires. Je n’entre pas dans les détails des fautes qu’il y a eu, et même des fautes graves, qui auraient pu mettre en danger la vie du peuple. Quand nous passons au livre des Juges, nous trouvons un accent différent. En général, dans le livre de Josué, ce sont ces victoires, et le ton est beau. Mais, dans les Juges, nous trouvons un accent différent, et il est bon que nous méditions cela. Le peuple n’a pas su conquérir ce qui lui avait été assigné, de même que nous, nous sommes bien loin d’être entrés dans la connaissance des choses que nous avons en Christ dans le ciel : la communion avec Lui, la dépendance de Lui, l’amour qu’il donne, le secret de la communion avec Lui, le fait que notre vie est toute céleste (notre vie chrétienne spirituelle est entièrement céleste). Il n’y a rien, sur la terre, qui soit pour notre vie spirituelle, même les liens familiaux les plus chers, quoiqu’indirectement, ils puissent nous aider. Mais, en eux-mêmes, ils n’entrent pas dans notre vie céleste, pas du tout. Et d’ailleurs, on peut le voir fréquemment, dans les familles ; c’est bien vrai. Il y a un élément de la famille qui est nettement plus spirituel que d’autres de la même famille vivant ensemble. Cette nuance peut se trouver dans le lien le plus étroit, qui est celui de mari et femme. On voit fréquemment la mari plus spirituel que sa femme, ou une femme plus spirituelle que son mari ; et cela tient, tout simplement, non pas à la différence du degré de connaissance, mais au fait que le coeur de l’un est beaucoup plus avec Christ dans le ciel. Et cela, quand cela existe et où que cela se réalise, ne peut pas ne pas se manifester. C’est ce qui fait qu’un chrétien le plus ordinaire (pas nécessairement un apôtre ; le christianisme n’est pas que pour les apôtres, et le Seigneur n’est pas monté dans le ciel que pour les apôtres), mais un chrétien qui a ses sources célestes, cela se saura, inévitablement. Son jugement spirituel est bien meilleur, et il a du discernement. Et, en même temps, il a un secret, pour réaliser une vie chrétienne et faire face aux difficultés, inimitable, qu’on ne peut pas copier. C’est un caractère qui est propre à l’individu, dans la mesure où, justement, il est céleste. Et, s’il est spirituel, on le reconnaît bien ; on peut être sûr que ses rapports avec Christ dans le ciel sont entretenus. Que le Seigneur nous donne de penser à cela. Le contraire d’un chrétien spirituel, cela peut être un chrétien charnel, c’est-à-dire que la chair prend une place marquée, évidente ; non pas quant aux choses grossières, mais la chair intervient dans le domaine où elle n’a aucun droit d’entrer. Dans les problèmes de la vie d’un chrétien, dans les problèmes d’un rassemblement, la chair n’a rien à faire. La nature elle-même n’a rien à dire, n’a rien à voir. La nature, ce n’est pas la chair. Si nous étions plus près du Seigneur, c’est-à-dire ayant des rapports plus vrais et soutenus avec le Seigneur dans sa gloire, eh bien, beaucoup de questions difficiles qui surgissent dans les assemblées ne verraient même pas le jour. C’est donc d’une grande importance. Au contraire, si nous sommes simplement des chrétiens terrestres, sans être proprement engagés dans le monde, mais nous contentant d’un christianisme convenable sans qu’il se nourrisse aux sources, eh bien, nous aurons des ennuis, parce que la force spirituelle ne sera plus la même pour réfréner la chair, la volonté, quand elles se manifesteront. Nous pouvons bien nous dire que, si une assemblée avait existé, étant formée d’éléments de la trempe de l’apôtre Paul, frères et soeurs, ils n’auraient pas souvent eu de problèmes, et que la joie céleste des saints, la puissance de l’Esprit dans les saints, aurait rappelé ce qui s’est passé au début lors de la Pentecôte, où, nous le voyons bien, la nature elle-même était éliminée (au début, à la Pentecôte, l’égoïsme avait disparu), et où la manifestation la plus brillante et la plus puissante était justement de cet ordre-là, que l’égoïsme avait entièrement disparu, que le moi était effacé. Pourquoi ? Parce que le Saint Esprit remplissait tous les coeurs et les occupait de Christ. À ce moment–là, ils ne le voyaient plus. Il était monté au ciel. Qu’il nous soit donné de méditer, de reprendre ces textes, de les étudier et d’en tirer profit.
Le son, dans le livre des Juges, a changé. L’infidélité, Dieu ne peut pas fermer les yeux sur cela. Et alors, il dit : Je vous avais promis le pays ; je vous y ai tous fait entrer, tout le peuple ; mais vous n’avez pas écouté ma voix, et vous n’êtes pas restés séparés des peuples ; vous deviez les abattre. Ils devaient entrer et tuer détruire tous les peuples, entièrement. Ils ne l’ont pas fait. La conséquence, c’est que Dieu les laisse aux effets de leur incrédulité, de leur infidélité. Et quand Dieu parle ainsi, alors nous voyons ce fameux verset qui parle de Bokim. L’ange de l’Éternel n’est plus à Guilgal, et il monte à Bokim. Guilgal, c’était là que Dieu manifestait sa présence, parce que Guilgal était le lieu où le peuple, quand il était en bon état, revenait après les victoires remportées. Ils revenaient se retremper à Guilgal, pour retrouver là la puissance que Dieu donne lorsqu’on vient devant Lui pour confesser ce en quoi on a manqué. Guilgal, c’est la circoncision, en pratique l’application de la mort aux manifestations de la chair. Quand le peuple revenait à Guilgal et repartait de Guilgal, il y avait de la force. Et maintenant, c’est terminé. Cette phase dans l’histoire du peuple d’Israël a pris fin. Plus de Guilgal, et c’est Bokim qui prend la place. C’est le lieu des pleurs, où, tout de même, le peuple adore. Quand a commencé «Bokim», pour l’Église ? Qui peut le dire ? Mais peut-être que nous pourrions faire des réflexions utiles en nous demandant si, plus d’une fois, nous n’avons pas, par notre comportement, entraîné, dans une mesure, le changement de Guilgal à Bokim, dans nos vies personnelles, et même dans la vie des rassemblements. Nous pouvons nous le demander, cela.
Et qu’est-ce qui se passe ensuite ? Nous le savons. C’est la période des réveils, comme il s’en est produit dans l’Église. Le peuple crie. C’est son peuple ; Dieu entend, il envoie un sauveur. Le peuple retombe, et ainsi de suite, jusqu’à la fin de cette période. Qu’il nous soit donné de retenir les instructions à l’égard de cela. Dans chaque assemblée locale, revenons à Guilgal, au jugement de la chair, du moi qui se manifeste de tant de manières, chacun de nous étant exercé dans sa propre vie. Et il ne s’agit pas seulement des actes extérieurs, il s’agit d’abord des pensées, des sentiments intérieurs. La pureté, la sainteté, commencent par le dedans ; et si le dedans est en bon état, la marche pratique s’en suivra.
Qu’il nous soit donné d’être exercés pour que les réunions, étant l’objet de prières de la part de chacun, nous permettent de goûter ensemble nos joies célestes. Que nous soyons toujours exercés pour que la chair ne se mêle pas à l’activité de l’Esprit. C’est un exercice permanent, pour tout service. Nous avons, si j’ose dire ainsi, à repartir de zéro chaque fois. Parce que nous avons été encouragés hier ou avant-hier, cela n’est pas une raison pour partir aujourd’hui d’une manière négligente. Il faut toujours revenir à la dépendance et à l’obéissance, qui sont les caractéristiques de la vie chrétienne.
Et alors, je termine en disant un mot sur ce passage d’Éphésiens. On lit fréquemment le passage d’Éphésiens 2 au culte ; c’est une excellente chose. Le culte se rend dans les lieux célestes. Nous sommes assis dans les lieux célestes en Christ ; c’est une position. On demanderait à bien des chrétiens dans la chrétienté ce que cela veut dire, beaucoup d’entre eux diraient : Nous ne pouvons pas comprendre cela, nous ne comprenons pas ce langage ; je sais que je vais au ciel, j’irai au ciel quand je mourrai, quand le Seigneur viendra. Mais qu’est-ce qu’un chrétien dans les lieux célestes, beaucoup ne sauraient pas expliquer ce que cela veut dire. C’est difficile à expliquer à quelqu’un. Ces choses, en général, se comprennent quand on y est. Vous ne pourrez jamais faire comprendre à quelqu’un ce qu’est que d’être né de nouveau ; c’est impossible ! Ce sont des expressions sur lesquelles achoppent les théologiens les plus attentifs. Ils n’arrivent pas à comprendre ; alors ils donnent souvent des explications fantaisistes, pour dire le moins. Quand quelqu’un est né de nouveau, fût-il un enfant de dix ans, il ne peut pas expliquer ce que c’est, mais il sait qu’il l’est. Il a l’assurance divine qu’il appartient à Dieu, même un enfant. De même, être dans les lieux célestes, nous ne pouvons l’expliquer à personne, mais nous pouvons le réaliser, et goûter ce qui correspond à cela. Il s’agit de la réalisation pratique. Évidemment, l’exercice de chacun joue, mais la position est acquise. Nous sommes pour toujours assis dans les lieux célestes en Christ. Que nous ne tirions pas toutes les conséquences de cette position-là, hélas, c’est autre chose ! Comme de beaucoup de choses, nous ne tirons pas toutes les conséquences du fait que nous avons la vie divine en nous. On devrait voir produits d’autres caractères, dans notre comportement, si nous tirions toutes les conséquences des vérités que nous savons. Que Dieu nous donne de faire des progrès, en tout cas. Alors, dans les lieux célestes où nous sommes entrés, où, par le Saint Esprit, nous entrons, il y a là ce fait qui parait évidemment étrange : Satan est là. Satan et ses anges sont là, de même que les Philistins étaient là, dans le pays de la promesse où le peuple avait déjà posé son pied. Il s’agissait pour le peuple de déloger les Philistins. Pour nous, que s’agit-il de faire ? Chasser Satan ? Non, pas du tout ! Mais nous avons là un genre de combat qui est unique dans l’Écriture. C’est un combat contre Satan et ses anges dans les lieux célestes. En quoi consiste ce combat ? En quoi consiste la défaite ? En quoi consiste la victoire ? Dieu permet que Satan soit dans les lieux célestes. Il n’approche pas de la lumière inaccessible, mais il a accès jusqu’au trône des jugements, et il est un accusateur. Cette expression–là, nous la trouvons en Apocalypse 12 : «l’accusateur des frères». Il est notre accusateur, et Dieu le permet. C’est très solennel. Nous glissons sur beaucoup de vérités, qui pourtant sont liées à des faits réels. Dieu permet cela, et emploie Satan. Il l’emploie à l’égard même des saints. Et par exemple, Dieu peut permettre en rapport avec un frère qui s’endurcit dans une voie, Il peut permettre d’abord que Satan se fasse devant Dieu l’accusateur de ce frère. Pourquoi pas ? C’est un pouvoir que Satan exerce tant qu’il ne sera pas chassé du ciel, d’une part, et lié pendant mille ans, d’autre part, et enfin jeté dans l’étang de feu et de soufre qui est préparé pour lui. Satan joue encore un rôle, et Dieu l’emploie. Quelqu’un écrivait à l’égard de Job : «Voyant l’état de Job, Dieu a envoyé Satan labourer ce coeur en friche». C’est solennel, et nous savons ce que Satan a fait, Dieu le permettant et gardant la haute main, la haute direction. Mais, tant que le travail n’était pas fait dans le coeur de Job, Dieu a laissé l’ennemi agir. De même, nous trouvons Satan employé dans les épîtres. L’apôtre menaçait de livrer quelqu’un à Satan afin qu’il apprenne à ne pas blasphémer. Et, quant à quelqu’un de Corinthe, à l’égard duquel se manifestait une lenteur extraordinaire et insolite quant à la mesure disciplinaire à prendre, l’apôtre dit : «S’il faut, je livrerai cet homme à Satan». Il était le seul à avoir, de la part de Dieu, ce pouvoir. Mais Satan est là, et cet homme aurait été livré au pouvoir de Satan, pour que cet homme, dont Dieu a renforcé l’endurcissement, connût des tourments d’âme et tout autant que de corps. Car Satan a un pouvoir étrange, dans la création même. Nous voyons qu’il a déchaîné un peuple contre Job (1:15, 17). Dieu lui en avait donné la liberté. Cela est à considérer. C’est un sujet très solennel, dont les âmes même de beaucoup de chrétiens n’ont pas idée. On a dit que Satan avait un pouvoir sur la création de loin supérieur à celui des hommes. Et on a, pour faire comprendre la chose, donné cet exemple suivant : avec un verre ordinaire qu’on place en face des rayons du soleil, aucun effet n’est produit au-delà du verre ; mais si on prend un verre grossissant, avec le même soleil, dans les mêmes conditions, on peut enflammer un objet. Et c’est à cela qu’on a comparé le pouvoir exceptionnel de Satan dans les éléments de la création, et Dieu se servant de tout cela.
Satan est dans les lieux célestes, et Dieu s’en sert. Il a accès jusqu’au trône du jugement. C’est très solennel, et bon à savoir. Lorsque le chrétien s’endurcit, Dieu peut se servir de Satan pour l’arracher à cet endurcissement. N’oublions pas cela, chers amis… Ce ne sont pas du tout les possessions démoniaques, qui peuvent avoir lieu surtout dans les pays païens. Il ne s’agit pas de cela ; il s’agit ici d’un ennemi auquel les chrétiens ont à faire dans les lieux célestes. Et qu’est ce que Satan cherche à faire à l’égard des chrétiens, des frères, des soeurs ? Il voudrait à tout prix les empêcher d’être célestes. Car il sait très bien que le jour où nos relations avec un Christ céleste seront coupées, nous deviendrons inévitablement des chrétiens mondains, des chrétiens terrestres, dont l’horizon sera borné aux choses de la terre. Et alors, Satan aura remporté une immense victoire. Ceux qui suivraient cette génération-là, manifesteraient probablement, à moins que Dieu n’intervienne, l’incrédulité et l’apostasie, dans laquelle, d’ailleurs, on s’achemine à grands pas.
Eh bien, n’oublions pas que nous combattons dans les lieux célestes. Satan vient parfois nous empêcher de jouir des choses du ciel. Que le Seigneur nous donne d’avoir à faire à Lui, et que nous lui demandions qu’Il nous garde. Rappelons-nous que Satan a toujours de la prise sur la terre, mais qu’il n’en a jamais sur le nouvel homme. Il a de la prise sur le vieil homme ; et voilà pourquoi, pour être à l’abri de ses attaques, nous avons une armure qui est décrite. Et cette armure revient, dans l’ensemble, à ce que notre état moral soit bon, un état moral droit, un bon état. Car, encore une fois, dans les choses chrétiennes, ce qui est d’ordre moral est supérieur, parce que cela se rattache à la nature de Dieu, et non pas à son gouvernement. Dieu est amour ; Dieu est lumière. Toutes les vérités morales se rattachent à cette nature, qui est l’essence même de Dieu.
Que le Seigneur nous donne de lire ces passages. Il faut lire toute la Bible, en particulier les passages qui sont propres à nous édifier, à nous encourager, à nous relever, à nous instruire, à nous faire prendre connaissance des ressources que nous avons pour tous les combats, contre la chair, contre le monde, et aussi contre Satan et ses anges qui sont dans les lieux célestes. Que le Seigneur nous garde, nous instruise dans les assemblées. Nos frères prédécesseurs ont enseigné cela ; ils ont écrit sur cela. Donnons-nous la peine de lire, et même si cela nous parait difficile. Nous faisons, pour entrer dans la connaissance des sciences de l’homme, les efforts nécessaires. Nous savons consacrer des heures et des années à l’étude de ce dont nous pourrons avoir besoin. Pouvons-nous dire cela de l’étude des choses qui nous sont utiles pour le présent, et qui nous permettront d’être plus heureux sur la terre, parce que, sur la terre comme au ciel, on n’est vraiment heureux que quand on a Christ dans son coeur ?
[LC n° 16]
Rocheville — 28 décembre 1965
Dieu ne nous amuse jamais. Il nous instruit toujours d’une façon morale. Depuis que le péché est entré dans le monde, continuellement le travail de Dieu se fait, à l’égard du mal. Retenez cela, jeunes gens : le travail de Dieu est exclusivement en rapport avec le mal et le bien. L’Écriture nous montre la manière dont le bien a triomphé du mal. Dieu prend l’homme tel qu’il est, et le bénit malgré lui.
Ce qui a de l’intérêt, pour Dieu et pour la foi, ce ne sont pas les découvertes des hommes. Il y a des progrès dans un domaine, et du recul dans beaucoup. Ce que Dieu note, c’est ce qui se passe dans les coeurs des hommes, ce qu’ils disent, ce qu’ils sont. La grande affaire, c’est ce que l’homme fait, quant au bien et quant au mal. Tout le reste disparaîtra. Quand la scène où s’est jouée la question du bien et du mal disparaîtra, les acteurs, eux, ne disparaîtront jamais. Chacun aura sa destinée. Voilà le drame de l’histoire du monde.
Chers frères et soeurs, voyons un peu les choses ainsi. Et, au lieu de nous laisser emporter par l’erreur universelle, que Dieu nous donne d’avoir le regard ouvert sur ce qui est véritablement l’histoire du monde. Nous savons bien que tous les chrétiens du monde ne peuvent pas convertir un homme. Mais ils peuvent prier pour cela, et peuvent être exercés pour que leur façon d’être rappelle à celui-ci que la grande question, c’est celle des rapports de l’homme avec Dieu.
Si un homme finit comme le brigand sur la croix, c’est lui qui est le riche, et tous les autres, couronnés de succès et enivrés par les flatteries de ceux qui les poussent à ce succès, iront dans les ténèbres éternelles. Ce sont les vrais pauvres.
Nous ne sommes pas placés dans le Témoignage pour ne pas être exercés à chercher la vérité. Les chrétiens devraient être, dans ce monde, les témoins que le chrétien est plus fort que Satan.
«Ô Timothée, saisis ce qui est vraiment la vie» (1 Tim. 6:19-20). Il n’y a pas deux choses qui soient vraiment la vie. Il n’y a qu’un chemin qui soit vrai : le chemin de la foi ; non seulement de la foi qui sauve, mais de la foi qui marche, qui triomphe, qui aide les autres. C’est la vraie vie, au lieu que le chrétien soit comme un esclave lié de pesantes chaînes, au point qu’on ne le distingue pas d’un inconverti.
Ici, le peuple d’Israël vient de passer le Jourdain. C’est le troisième fait d’une importance majeure qui caractérise l’histoire du peuple, qui n’est semblable à aucune autre.
Trois grands faits extérieurs ont marqué l’histoire d’Israël.
1°. La Pâque. Le peuple de Dieu ne pouvait pas sortir d’Égypte sans que Dieu règle son propre compte. Il a eu besoin de l’agneau pascal, pour ne pas être frappé. C’est un peuple sur lequel le jugement a passé, étant subi par un autre. Cela est assez familier, mais ne doit pas devenir banal. Il n’y a pas d’accoutumance, dans les choses de Dieu. Il ne doit pas y en avoir.
2°. La traversée de la mer Rouge. C’est aussi la mort. C’est un peuple à l’égard duquel la puissance de Satan est détruite. Cela ne veut pas dire que Satan le laissera tranquille et ne lui fera pas de mal. Mais Satan ne peut effrayer les chrétiens, avec la mort, comme il effraye les inconvertis (Héb. 2:14). Le chrétien sait que la puissance que Satan détient est une puissance, pour lui, détruite.
3°. Le passage du Jourdain. C’est une chose encore presque plus admirable, car nous voyons, dans le récit, que l’arche est là. Elle se tient dans le Jourdain. Les sacrificateurs y entrent. Les eaux du Jourdain reculent. Les sacrificateurs se tiennent là, avec l’arche et, pendant ce temps, le peuple passe. C’est l’image d’une vérité autre que celle de la mer Rouge, une vérité qui risque de devenir un peu désuète parmi nous, un peu oubliée (je ne parle pas du peuple chrétien professant, qui s’attribue les privilèges et les promesses comme s’il en avait le droit).
Ce peuple est un peuple en règle avec Dieu quant au jugement. La puissance de Satan, quant à la mort, ne l’effraie pas. Mais cette vérité dont nous parle le passage du Jourdain a été oubliée, dans la chrétienté, et elle risque d’être oubliée parmi nous. La possession de ce fait est peut-être le point le plus important, quant à la puissance de la vie chrétienne.
Que signifie le fait que les sacrificateurs soient là, pendant que le peuple passe ? C’est que le peuple de Dieu est un peuple mort. C’est une vérité d’une importance incalculable. Le fait que l’arche est restée là, au fond du Jourdain, marque l’identification du croyant avec un Christ mort, puis avec un Christ ressuscité, de l’autre côté de la mort. Combien pensent à cette vérité que lui, le chrétien, est mort ? Dieu ne lui demande pas son avis ; Dieu le voit ainsi. C’est une vérité très pratique, car il est alors de l’autre côté de la mort. Il est mort, mais il est aussi ressuscité.
C’est un des traits caractéristiques du Témoignage des frères. Et les frères ne peuvent en être les continuateurs intelligents et fidèles que dans la mesure où ils sont exercés sur ce point. Tous les vrais chrétiens disent : Jésus est mort pour moi. Mais combien disent : Je suis mort et ressuscité avec Christ ? Quand je dis : Jésus est mort pour moi, je ne vois là que des privilèges. Je suis assuré d’aller au ciel. Mon salut est certain (le salut, c’est tout ce que Dieu fait pour un homme, du moment où Il le prend dans son état de péché jusqu’au moment où Il l’amène dans la gloire). Toutes les vérités ont des conséquences pratiques : Christ est mort ; je suis mort avec Lui. Ce n’est pas toujours agréable, mais Dieu présente cela comme une très bonne nouvelle.
On veut bien prendre ce qui est agréable à la chair, et rejeter ce qui lui déplaît. Tandis que si je reçois cette vérité que je suis mort avec Christ, je n’ai plus le droit d’avoir une volonté propre. Le premier Adam a été condamné à mort, et n’a plus le droit de se montrer. Comment se montre-t-il ? Par l’amour du monde, la volonté propre, des paroles légères, de mauvaises pensées. Vous n’allez pas dire que c’est le nouvel homme qui est la source de cela ?
Le nouvel homme n’a pas besoin d’être exhorté. Mais c’est moi, dans ma condition complexe, qui ai besoin de l’être. J’ai deux natures, mais je suis un seul être. Si le vieil homme se montre, je suis coupable. Cette vérité est sévère, mais puissante. Voilà un chrétien qui a une tendance particulière ; c’est la vieille nature qui est en lui qui le pousse dans ce sens. L’un aimera les richesses, l’autre les honneurs, l’autre les plaisirs, et ce, tout en étant chrétien ! Dieu donne des ressources pour résoudre les problèmes qui, sans Lui, ne pourraient l’être, quant au nouvel homme qui n’aime que Dieu.
Tout le secret de la vie chrétienne est là. Quelquefois, de jeunes chrétiens (vraiment convertis, et qui ont le Saint Esprit) sont torturés, parce qu’ils s’aperçoivent qu’ils ont les mêmes tendances qu’avant. Dieu nous apprend que nous avons besoin d’autre chose que d’être assurés quant au jugement de Dieu. Nous avons besoin d’être délivrés de cette puissance que nous avons tous en nous, qui s’appelle le vieil homme, cette source d’énergie propre que nous avons indépendamment de Dieu. Que l’homme veuille quelque chose, c’est une monstruosité, pour Dieu. C’est une abomination, même s’il prétend vouloir bien faire. Il n’en a pas le droit. La perfection d’un chrétien, c’est de ne rien vouloir, pas même faire le bien, par lui-même. Celui qui entraîne les autres à l’appeler bienfaiteur frustre Dieu, qui est seul digne d’être appelé ainsi.
Il faut condamner l’homme sans la moindre hésitation. Non seulement le chrétien est à l’abri du jugement, mais l’homme en Adam est condamné par Dieu. La racine, le tronc, les branches, les feuilles, les fruits, tout cela a été entièrement condamné à mort. Les frères qui nous ont enseigné ont tiré ces vérités de l’Écriture, au prix d’un labeur considérable. Il n’y a pas de témoignage vrai, dans ce monde, sans cette vérité-là.
Si les chrétiens n’ont pas ces vérités vivantes dans leur âme, l’un ira à droite, vers le monde, celui où on s’amuse, l’autre vers celui où on réussit. Satan a toutes sortes d’appâts qu’il offre à ce vieil homme, et il les offre aux chrétiens, pour en faire des chrétiens vaincus.
La force pratique des chrétiens découle de ces vérités, et elle leur donne de vivre à la gloire du Seigneur. Quelle supériorité serait celle d’un chrétien fidèle, même s’il était, extérieurement, le dernier des hommes ! Le chrétien a un secret. L’incrédule ne peut pas comprendre sa vie. Voyez l’apôtre Paul : on le mettait en prison ; il y était heureux. Impossible de rendre malheureux un chrétien fidèle.
Nos convoitises, tout ce qui nourrit le moi, tout cela est contraire au témoignage du Seigneur. Le peuple de Dieu est un peuple enseveli dans la mort. Nous devrions être exercés à ne présenter devant les hommes que le visage qui manifeste le second homme venu du ciel. Qu’est-ce qui caractérise les traits moraux d’un tel homme ? C’est l’obéissance, la dépendance, la confiance en Dieu, le souci constant de ne rien faire que ce que Dieu veut. Au tombeau de Lazare, Jésus était là. Mais quant on dit à Jésus : «Lazare est mort», Jésus n’a rien fait. Ce n’était pas le moment. Il attend un ordre de son Père. Et alors, le Seigneur, dans cette perfection d’obéissance et de dépendance, a l’occasion d’avoir la gloire, non pas de guérir un malade, mais de ressusciter un mort. Toutes les fois que nous avons à coeur la volonté de Dieu et faisons passer la nôtre derrière, soyons bien assurés que nous recevrons la bénédiction et l’honneur qui viennent de Dieu. Il y a une gloire qui vient de Dieu.
Il ne faut pas croire que nous serons tous identiques, au ciel. Dans la mesure où nous nous serons servis et honorés nous-mêmes ici-bas, dans cette même mesure, nous serons abaissés, à ce moment-là. Celui qui aura cru gagner sa vie la perdra. Il s’agit de la carrière chrétienne. Dans cette carrière, les choses que nous avons cru être un gain, si elles n’ont pas été faites pour le Seigneur, seront une perte. C’était la grande différence entre les chrétiens qui ont eu à coeur le Témoignage et d’autres.
Pour la foi, qui est le Maître, le Chef ? Un, et un seul. Tous les autres sont heureux de n’être que ses esclaves. Retenons cela, que Jésus n’est pas mort seulement pour nous justifier et pour nous laver, mais pour faire de nous un peuple au service de Dieu, un peuple libéré de ses chaînes.
Chers jeunes amis chrétiens, prenez la Parole de Dieu, prenez les écrits des frères qui ont fait leurs preuves, dans des conditions qui n’étaient pas plus faciles qu’aujourd’hui.
«Souvenez-vous de vos conducteurs… et, considérant l’issue de leur conduite, imitez leur foi» (Héb. 13:7).
La chrétienté du jour cherche une issue pour sortir d’un marasme qui s’accroît d’une semaine à l’autre. Mais elle cherche mal, parce qu’elle ne veut pas l’Écriture seule. Car l’Écriture condamne tout ce qui n’est pas de Dieu.
Ici, dans notre chapitre, voilà le peuple qui a traversé le Jourdain. Ce peuple a été mort, et il passe de l’autre côté de la mort. Il est ressuscité. Nous voilà à Guilgal. Nous sommes dans le pays de la promesse. Nous sommes dans les lieux célestes. Quand on entre dans les lieux célestes, on jouit des choses qui y sont. La manne cesse. Pour nous, c’est un peu différent, parce que nous sommes à la fois dans les lieux célestes et dans le désert. Le croyant a la manne, qui est Christ homme, pour le désert, et, en même temps, il a le vieux blé du pays. Il se nourrit d’un Christ glorifié.
On dit que le Seigneur a été présenté, dans son oeuvre, dans trois positions différentes. La Réformation a rappelé la première de ces trois : la croix, le sang qui lave, la justification par la foi. Mais elle n’est guère allée au-delà. Ce n’est qu’une partie du christianisme.
Deux autres vérités ont été remises au jour au siècle dernier : Christ dans la gloire et le chrétien ayant affaire à Lui dans les lieux saints, et Christ revenant chercher l’Église. Ces vérités ont fait le tour du monde. Le Saint Esprit a employé des serviteurs pour remettre ces vérités en évidence. Vous pouvez toujours lire l’Écriture. Si le Saint Esprit ne vous aide pas à le faire, elle est pour vous un livre fermé. Quand Dieu met en évidence la folie de son peuple qui s’est écarté de Lui, il arrive un moment où Il dit : «Engraisse le coeur de ce peuple» (És. 6:10). Cela peut arriver à un chrétien. Dieu peut lui retirer l’intelligence. On ne se moque pas de Dieu.
Soyons sérieux. Cela ne veut pas dire «tristes», car le chrétien est heureux ! L’homme n’est pas heureux, dans ce monde, où tout bonheur est menacé. Tandis qu’un chrétien n’est pas insouciant, mais exercé. Du Seigneur, il n’est jamais dit qu’on l’ait vu rire. Pourtant, Il pouvait dire : «Afin que ma joie soit accomplie en vous» (Jean 15:11). Il nous laisse sa joie, comme sa paix. Prenons le plus possible de la vérité divine ; nous ne le regretterons jamais. Alors, tant d’idoles que nous avons devant nous et dans notre coeur tomberont, l’une après l’autre, sans que nous nous en rendions compte. C’est une question de foi pratique.
Le peuple est donc là, dans le pays de la promesse. À Guilgal s’accomplit la circoncision. Du moment où un homme est un chrétien, il a passé la Pâque, la mer Rouge, le Jourdain. Mais il peut ne pas en avoir conscience, et ne pas en réaliser la puissance. Si l’Église n’était pas en ruine, tous les chrétiens sauraient cela.
Les pierres, à Guilgal, rappellent que la mort a été vaincue. C’est le mémorial de Christ (je ne dis pas que c’est la Cène, bien que cela s’y rattache). Le peuple devait réaliser la circoncision, c’est-à-dire qu’il avait à réaliser, en lui-même et pour lui-même, qu’il avait été enseveli dans la mort de Christ. Cela, c’est la vie chrétienne, que nous pouvons appliquer tous les jours. Nous avons à appliquer la mort de Christ aux tendances de notre volonté propre. Nous avons le privilège de pouvoir le faire. L’arbre entier a été mis à mort, et l’Esprit de Dieu nous demande de faire mourir les actions de la chair. Dieu s’est chargé de mettre la chair à mort, et nous avons à la tenir comme telle. Si nous avons en nous de l’orgueil, par exemple, nous avons à mettre à mort le bourgeon qui est en train de se manifester. Tandis qu’un inconverti peut toujours essayer de le faire ; il ne le peut pas.
On confesse au Seigneur qu’on a une tendance, une mauvaise pensée. On reconnaît que c’est une chose très mauvaise, et Dieu nous rétablit dans sa communion. La mort a donc passé sur nous. Voilà le christianisme pratique. Il repose sur une activité de la foi pour entrer dans la pensée de Dieu, pour faire mourir les tendances par la confession de nos manquements. Et d’abord, nous trouvons un Avocat auprès du Père (1 Jean 2:1).
Mais il y a encore mieux. Nous pouvons demander à Dieu qu’Il nous aide préventivement. Voyons la prière d’Héb. 4:16 : «Approchons-nous… du trône de la grâce, afin que… nous trouvions… du secours au moment opportun». Cette ressource est préventive : demander à Dieu de nous prévenir contre nous-mêmes. Puis, quand nous avons manqué, l’autre ressource est la confession. C’est toute la merveille de l’oeuvre de Dieu envers ses enfants.
Nos pauvres moralistes sont dans l’erreur. Comme il vaut la peine d’être engagés dans ce chemin royal de la vérité divine, tracé par le Seigneur, au milieu d’un monde mauvais ! Avec le Seigneur, un Sauveur mort mais ressuscité, nous avons des rapports vivants, vrais, réels. Nous ne L’avons jamais vu, mais Il est Celui que nous aimons le plus au monde. Ce sont des choses profondes, les seules choses vitales. Nous devons cela à la mort de Christ, à sa résurrection, à sa glorification. Et Il désire que les siens vivent dans les lieux célestes et qu’ils jouissent des choses qui ne se voient pas (et pas seulement au culte, bien que le culte soit l’expression la plus haute de l’adoration).
Est-ce que notre christianisme est un peu orienté de ce côté-là ? Veuille le Seigneur faire qu’il en soit ainsi. Que nous ne disions pas, à la fin de notre carrière : J’ai perdu mon temps. Ce serait triste de dire : Jésus est le meilleur Maître, sans l’avoir réalisé. C’est pourquoi ne forçons personne à exprimer ce qu’il ne réalise pas, bien que chanter un cantique puisse être un moyen d’édification.
Le peuple revenait à Guilgal après une victoire. Une fois, ils ne l’ont pas fait ; ils ont été battus (c’est l’exemple d’Aï — Jos. 7). Dans nos combats spirituels, nous avons à nous souvenir d’appliquer la mort à nos tendances, à notre moi, si nous ne voulons pas que l’ennemi soit plus fort que nous.
Les chutes ne se produisent pas en un jour. Elles sont le fruit d’endurcissements progressifs et, un jour, le chrétien est emporté. Mais il y a parfois un état de sommeil. Nous sommes heureux d’aller au ciel. Nous avons raison. Mais Dieu nous offre le ciel aujourd’hui, dans notre vie, dans ce monde. Et c’est ainsi que nous pouvons L’honorer et montrer que nous L’aimons, en ayant faim et soif des choses du ciel, au lieu d’avoir un tel appétit pour les misérables choses de la terre. Que de fois nous avons chanté : «Ta présence est le bien suprême», sans le réaliser. Quelle grâce de savoir qu’il y a au moins Quelqu’un qui soit toujours vrai et toujours fidèle !
Que la grâce et la paix soient toujours avec nous, pour toute notre carrière chrétienne !
Dieu attache une très grande importance à la carrière d’un chrétien. Qu’il nous accorde d’en faire autant !
[LC n° 17]
29 novembre 1953
Nous savons tous — nous l’avons souvent entendu — que le livre de Josué nous présente ce qui correspond, dans le Nouveau Testament, à l’épître aux Éphésiens, le Jourdain nous représentant la frontière qui sépare le pays de la promesse de ce qui n’est pas le pays de la promesse ; géographiquement, qui sépare le désert du pays de la promesse. Moralement, pour nous aussi, le Jourdain, c’est le fleuve de la mort, que le peuple a traversé pendant que l’arche se tenait au fond du fleuve. L’arche était là, et dresse les eaux du Jourdain. C’est ce que nous avons dans ce livre. Et, pendant que l’arche est là, que les sacrificateurs sont là, leurs pieds sur le fond du Jourdain, le peuple passe. Et, de l’autre côté, c’est le pays de la promesse.
Ceci est une figure de l’entrée dans le pays de la promesse qui, pour les chrétiens, n’est rien moins que le ciel. Par la foi, nous entrons dans le ciel, et nous entrons dans les lieux célestes, par la mort. Nous trouvons cela exactement, dans l’épître aux Éphésiens : «Nous étions morts dans nos fautes et dans nos péchés» (2:1). Alors nous voyons que Dieu nous a fait asseoir dans les lieux célestes dans le Christ Jésus (Éph. 2:6). C’est le livre de Josué. Et le livre de Josué, comme toute l’Écriture, a été écrit comme type des choses qui nous concernent, afin que nous recevions, par ces choses historiques, instruction pour nous-mêmes (1 Cor. 10:11). Ce livre de Josué nous montre un peuple qui est entré dans la mort, et qui est sorti de la mort.
Redisons-le donc, encore une fois, comme il est toujours nécessaire d’y revenir. L’histoire morale de chacun de nous — histoire quotidienne — montre qu’il est indispensable que nous revenions aux grandes lignes de la vérité, et que nous y revenions dans la réalisation des détails de la vie de tous les jours. C’est ce qui fait que la vie chrétienne est à la fois élémentaire, simple, et très grande ; élémentaire et simple, parce qu’elle se relie, dans le cadre dans lequel nous nous trouvons, avec tous les hommes ; très haute et élevée, parce que les motifs, les éléments, qui la nourrissent et la gouvernent, sont d’ordre divin.
Un chrétien, en apparence, extérieurement, pour un oeil humain, ne diffère pas beaucoup d’un autre homme ; sauf que l’oeil humain peut être frappé d’un cachet — et il devrait l’être pour nous tous — moral, formé de bien des caractères plus ou moins fondus, qui doivent distinguer même un chrétien d’un autre homme. Mais la vie ordinaire d’un chrétien est remplie des vicissitudes qui constituent la vie d’un homme, dans ce monde. Quelle est sa grandeur ? Est-ce que la grandeur de notre vie chrétienne réside dans les exploits que nous sommes appelés à accomplir ? Aucunement ; ou, en tout cas, pas des exploits visibles. On peut même dire que le Seigneur a fait des miracles. Alors là, il y avait une manifestation spéciale de puissance. C’était le déploiement de puissance dans un homme, le plus humble des hommes, le plus effacé des hommes, le plus fidèle, dans tout ce qu’il avait à faire. Les disciples aussi ont fait des miracles. Et il y avait un déploiement de puissance divine dans des hommes qui étaient simples : l’un était autrefois un pêcheur ; un autre, un savant appelé apôtre, et, de temps en temps, il faisait des tentes. Il n’y a rien, dans ce qui gouverne un chrétien — et de tout pays qu’il soit — qui lui fasse méconnaître la réalité de la vie courante, les devoirs de la vie courante. Seulement, la grandeur de la vie chrétienne, l’incomparable grandeur, la grandeur qui ne peut pas ne pas se manifester là où il y de la piété, n’est pas dans l’éclat des gestes faits, des actes accomplis, dans le spectacle qu’ils peuvent offrir aux yeux des hommes. Mais elle est dans la profondeur, la pureté et la puissance, des motifs qui les font accomplir.
On a pu même dire — et combien c’est vrai — que le Seigneur, sur la croix, dans sa mort, dans l’accomplissement de sa mort, a offert, dans cet acte suprême, le plus glorieux, le plus merveilleux, et alors le plus efficace, de ce qui a jamais pu être accompli. On a pu dire que, dans l’accomplissement de cette mort volontairement acceptée, dans ce que le Seigneur a fait, il n’y avait pas de trace d’héroïsme. Il n’y a pas trace d’héroïsme, dans la vie chrétienne. Ce n’est pas un élément qui constitue la vie chrétienne. C’est-à-dire que l’héroïsme, c’est l’effort que fait un homme (comme l’enseignent les sages de tous les temps ; ils enseignent les hommes à sortir d’eux-mêmes, par une sorte de sursaut d’énergie, et à se montrer supérieur à ce que l’homme est, et à sortir du niveau médiocre, du niveau humiliant, de l’humanité). Il n’y a pas d’héroïsme, dans la vie chrétienne, aucunement. Il n’y a pas tellement trace de cela. Si nous cherchons cela, c’est la chair qui le cherche.
Qu’est-ce que nous trouvons donc, dans la réalisation de cette vie divine ? Comme nous l’enseigne le Nouveau Testament, et en figure ce que nous avons lu, qu’est-ce qui fait qu’elle est grande, tout en étant simple, élevée, profonde, tout en étant vécue dans le cadre de ce que nous faisons tous les jours, les uns et les autres, pour gagner notre vie ? Qu’est-ce qui fait que la vie chrétienne est une très grande chose, qu’un chrétien, s’il est fidèle, ne peut pas ne pas être revêtu de grandeur ? Ce n’est pas parce qu’il sort de lui-même et que, par un effort exceptionnel et remarquable, il cherche à sortir de lui-même. Mais c’est tout l’inverse. C’est parce que Dieu est en lui. Voilà le secret de toute notre vie chrétienne à tous, nous qui sommes chrétiens. Dieu était en Christ : «Celui qui m’a vu, a vu le Père» (Jean 14:9). Dieu était en Christ. Dieu doit se voir en chaque chrétien. Si Dieu ne se voit pas, aucun effort, aucune éducation chrétienne, aucune influence quelle qu’elle soit, aucun effort pour sortir de soi, ne réussira, pour un chrétien, à faire qu’il manifestera ce que Dieu seul peut manifester en lui. Un chrétien, c’est quelqu’un en qui Dieu est et doit se manifester. Y a-t-il rien de grand comme cela ? C’est incomparable, inimitable. Nous le chantons : «Modèle inimitable…». Mais la vie qui était en Jésus, c’est la nôtre. Et alors, chers amis, quelques mots sur ce que nous avons lu, qui nous donne quelques-unes des conditions pour que ce soit réalisé. Nous le sentons tous — nous le redisons souvent ici. Mais il faut penser que chacun de nous le sente beaucoup plus qu’on ne le lit, parce que c’est la vie de tous les moments. Est-ce que j’ai Dieu avec moi ? Est-ce que je jouis de Dieu avec moi ? Est-ce que Dieu se manifeste en moi ? Je n’ai pas besoin de me sonder, pour cela. Mais voilà la vie chrétienne : Dieu dans un homme.
Et c’est ce que nous avons lu, au moment où le peuple entre dans le pays de la promesse, en traversant le Jourdain, de même que nous sommes entrés dans le Jourdain en traversant la mort. Le passage du Jourdain, c’est le croyant mort avec Jésus. La Pâque, c’est Jésus qui est mort pour le croyant. Au Jourdain, c’est le croyant qui est mort avec Jésus. Et il passe de l’autre côté du Jourdain, image de la résurrection, et même, on peut dire, de l’ascension.
Dieu dit à Josué : Voilà le pays. Il donne les frontières jusqu’à l’Euphrate, jusqu’à l’Égypte. Jamais le peuple n’a eu tout cela. Il n’a pas eu la force de le faire. Voilà ton pays ; voilà les frontières. C’est le premier point. Cela aura lieu plus tard. Mais, deuxième point : Tout lieu que foulera la plante de votre pied sera à vous. Voilà les frontières de votre pays. Mais votre pays, pratiquement, ce pays, n’est à vous que dans la mesure où vous mettez le pied sur lui. Le point que votre pied atteint, c’est le territoire qui est à vous. Celui qui est au-delà de l’endroit où votre pied s’est posé n’est pas à vous. Pratiquement, les choses de Dieu ne sont à nous que lorsque nos coeurs les ont saisies. Et alors, nous trouvons là la différence entre avoir une connaissance extérieure des frontières, et avoir fait la conquête. Il y a une grande différence. On dirait à n’importe lequel d’entre nous, même jeune chrétien : Quels sont les éléments du christianisme et de la doctrine chrétienne ? Il répondra généralement d’une façon très juste. Mais on nous demanderait ensuite : Qu’est-ce que vous en réalisez, de cela ? On demande à quelqu’un : Vous êtes sauvé ? Oui. Vous irez au ciel ? Oui. Et dans quelle mesure réalisez-vous le ciel maintenant ? Voilà l’autre côté, l’autre face. Or, c’est ce côté-là qui intéresse Dieu, le Seigneur, et qui, pratiquement, nous intéresse, parce que c’est cela, pour nous, être chrétien. C’est triste, si nous disons : Je serai chrétien au ciel. Il n’y aura plus de chrétiens, au ciel, dans le sens où nous le sommes sur la terre. Il n’y aura plus de témoins, au ciel. C’est sur la terre qu’il y a des chrétiens témoins, des chrétiens combattants, des chrétiens soldats de Jésus Christ. Dans le ciel, ce sera fini, heureusement. Il n’y aura plus de combats, plus d’adversaires, plus de corruption, plus de ce mensonge qui a ravagé ce pauvre peuple. Au ciel, on est chez soi. Et si on n’est pas chez soi, alors là, nous sommes repris, certainement tous, quand la Parole nous dit : Comment sommes-nous chrétiens pratiquement ? Où est le point que notre pied a atteint ? Sur quel point s’est-il posé ? Peut-être la plupart d’entre nous sommes restés au bord. Le Jourdain est franchi. Et encore, il y en a peut-être beaucoup qui n’ont pas franchi le Jourdain ; qui sait ? Ou bien la Pâque a passé sur eux. Ils le savent, et ils sont dans le désert à la Pâque. Ils ont franchi la mer Rouge, et sont dans le désert.
Le christianisme, c’est quoi ? Du désert, rien que du désert. C’est triste, si on n’a que le désert ; c’est très triste. Voilà pourquoi les gens du monde nous disent : Vous êtes plus malheureux que tous les hommes. L’Égypte est plus heureuse que les gens qui habitent dans le désert, mais moins que ceux qui sont dans Canaan, qui vivent dans un pays ruisselant de lait et de miel. L’Égypte peut faire envie à quelqu’un qui n’est pas sorti du désert, qui n’a rien que le sable. Il y avait les poireaux, les concombres. Mais il y avait le Pharaon. On l’oublie (il y avait le diable ; on l’oublie). Mais si on jouit du pays ruisselant de lait et de miel, si on compte sur lui, l’Égypte ne fait pas envie.
Nous l’avons déjà dit, nous sommes à la fois dans le désert et dans le pays de Canaan ; le désert, parce que tout le monde y connaît les expériences et a à apprendre les leçons du désert ; mais notre coeur peut entrer au ciel. C’est ce que nous sommes invités à faire. Est-ce que nous sommes diligents pour réaliser notre prise de possession du ciel ? Lisons l’épître aux Éphésiens. Est-ce que nous sommes diligents ? Il faut peu de choses, pour que le ciel n’intéresse pas, très peu de choses ; un petit détail, et le ciel est fermé ; un manque de vigilance, et le ciel perd sa saveur. Si on trouve une apparente verdure, dans ce monde, on s’y arrête ; et on s’aperçoit ensuite que c’est le sable. Et les chrétiens sont mécontents. Ils se plaignent de Dieu, de tout le monde, des autres. Dieu dit à Josué : Tout lieu que foulera la plante de ton pied est à toi. Il est probable que nous avons encore des conquêtes à faire. Il y a peut-être des chrétiens qui font de grandes conquêtes, dans ce monde. Et, quand ils entreront là-haut, ils n’auront rien. Tandis que, si un chrétien est exercé par la prière, par la Parole, à vivre avec le Seigneur, il comprend le ciel beaucoup mieux. Des chrétiens disent : Je ne comprends pas bien l’Écriture. On la lit une fois par semaine ! Prenons le moindre livre technique, n’importe lequel, pour exercer n’importe quelle profession. Prenez votre ouvrage, le livre nécessaire pour exercer votre profession. Lisez-le une fois par semaine. Vous verrez comment vous réussirez, dans votre travail ! Contentez-vous de le lire une fois par semaine et à la hâte, et dites : Maintenant, je passe à autre chose.
Le coeur s’engage, les affections s’engagent, dans la mesure toujours croissante où on s’occupe des choses de Dieu. Un livre s’ouvre ; c’est une merveille, les passages dans lesquels on ne trouvait rien. Dieu révèle une profondeur de pensée, une source de bénédiction, de rafraîchissement, de force. On trouve Dieu là où on ne trouvait que des versets, des expressions. On trouve Dieu. On a Dieu, de l’instruction, de la force, de la répréhension.
Chers amis, eh bien, voilà comment il faut prendre possession du pays. Et puis, ce qu’il y a de très intéressant, c’est que tout le monde peut en faire la conquête toute entière. Il n’y a pas de conflit de prise de possession. Tout le monde peut la faire. Est-ce que nous faisons des progrès, dans la connaissance de ce pays d’en-haut ? Est-ce qu’il remplit notre coeur ? Est-ce qu’il nous remplit de joie ? Chers amis, oh, il ne s’agit pas d’une joie dite, de parler de joie ! Il faut l’avoir dans son coeur, dans sa vie, tous les jours, la joie que Dieu donne. Alors on peut faire son travail. Mais on le fait en passant. On travaille ailleurs ; on va ailleurs ; on acquiert ailleurs.
Voilà Josué. C’était pénible pour tous, la mort de Moïse ; un homme comme il n’y en a pas un autre, très doux, plus doux que n’importe lequel de ceux qui étaient sur la surface de la terre (Nomb. 12:3). Il avait appris la douceur, la patience. Il n’en avait pas, au commencement, quand il a tué (Ex. 2:12). Pour partir, il a tué un homme. Moïse est parti. Et alors, Dieu dit : Moïse n’est plus. Et Josué aurait pu être découragé : Qu’est-ce qui va arriver ? Dieu reste. Josué avait été préparé. Les hommes passent ; Dieu reste. Même les serviteurs de Dieu passent ; Dieu reste. Un serviteur disparu, en voilà un autre qui était tout prêt. Dieu n’avait rien dit, pour Josué. On le voyait poindre depuis longtemps. Dieu vient encourager Josué, et vient lui dire : Ne crains pas ; ne crains pas. Est-ce que Dieu vient nous dire : Ne crains pas ? Entendons-nous ? Notre coeur a-t-il une oreille pour entendre ces paroles de Dieu : Ne crains pas ? Qui doit-on craindre ? Dieu. Ne crains pas, dit Dieu. Il y a à craindre vis-à-vis de notre propre coeur, qui nous mène par où nous disons que nous ne voulons pas aller. Mais où nos pieds vont, notre coeur est allé d’abord. Il y a à craindre le diable, qui aura fait du mal, qui fait du mal au peuple chrétien, aujourd’hui ; quel mal !
Mais Dieu dit : Ne crains pas ; j’ai été avec Moïse, je serai avec toi. Attention, la confiance d’un homme de Dieu n’est pas passive, mais active. Et Dieu dit : Ne crains pas ; mais que ce livre de la loi ne s’éloigne pas de ta bouche, et médite-le jour et nuit ; ne t’en écarte ni à droite ni à gauche.
«Médite-le jour et nuit» : nous méditons la Parole de Dieu, chers amis, un peu tous les jours. Nous lisons la Parole de Dieu. Voilà ce que ce passage nous dit : «Médite-la jour et nuit… ne t’en écarte ni à droite ni à gauche… fortifie-toi et sois très-ferme… sois ferme». Comment peut-on être très-ferme, pour un chrétien ? Est-ce un homme qui est ferme, qui est violent, qui affirme avec violence sa volonté ? C’est un pécheur qui fait cela. Quand est-ce qu’on peut être très-ferme, selon Dieu ? Quand on est avec Dieu. Et quand est-ce qu’on est avec Dieu ? Quand on prie, qu’on lit la Parole, qu’on réalise la communion avec Dieu. On est tranquille ; on est très ferme ; on voit clair. Quelqu’un qui n’est pas ferme, d’abord, il peut hésiter. Il peut vaciller, parce qu’il est soumis à toutes sortes de choses. Et il ne voit pas son chemin. Pourquoi ? Parce qu’il y a trois ou quatre voix qui lui parlent en même temps. Alors on n’entend pas. On ne sait pas ce qu’il faut faire. On est tiraillé par trois ou quatre influences. On ne peut être ferme.
Être ferme, c’est entendre la voix de Dieu, écouter sa voix, entendre et écouter ce qu’il dit. «Parce qu’il est à ma droite je ne serai pas ébranlé» (Ps. 16:8). Il faut être ferme avec Dieu de la même façon. J’entends une voix ; je n’entends pas la voix d’un étranger ; j’entends la voix du bon Berger. On n’est pas faible ; on n’hésite pas. Et, d’autre part, on n’a pas peur.
Un chrétien qui n’est pas avec Dieu a peur. Il a peur des autres, des conséquences, de déplaire au monde, de déplaire à tel ou tel. Quand nous marchons avec Dieu, on n’a pas peur. Nous n’hésitons pas ; nous n’avons pas peur.
Je me rappelle un serviteur de Dieu qui savait ce que parler voulait dire, lorsqu’il s’agissait d’être fidèle au Seigneur. Et il savait ce que cela coûtait. Il répondait une fois à quelqu’un : Mais si vous faites ceci, les conséquences, l’avenir ! Il y a un avenir, pour le chrétien : la gloire de Dieu. Une seule chose compte, la gloire de Dieu, dans ce qu’on fait au moment même, et pour toutes les conséquences, l’avenir ; la gloire de Dieu.
Est-ce que nous nous appliquons, chers amis, à nous fortifier, à être fermes, et à être très fermes ? Nous le savons, il faut être énergiques, non pas d’une énergie naturelle. Cette énergie, il faut que Dieu la brise, une fois ou l’autre. Il ne se sert pas de l’intelligence de l’homme. Le cheval n’est pas utile à Dieu (c’est une image) ; les jambes de l’homme non plus. Dieu se sert d’un homme brisé. Oh, qu’il nous tienne brisés ! Dieu ouvre son chemin ; très bien. Il le ferme ; très bien. Un homme ferme est tranquille. Voilà l’homme énergique. L’exemple, le type, du chrétien énergique, c’est Paul. Un homme énergique, ferme, c’est un homme qui a un seul but : suivre Dieu dans ses voies. Si nous voulons plaire à beaucoup d’hommes avant de plaire au Seigneur, nous serons inconstants dans toutes nos voies (Jac. 1:8). Il est ajouté «comme l’eau de la mer». Paul, on pouvait l’avoir connu trente ans avant, et le retrouver après : on trouvait le même homme, mûri davantage. Il aurait eu davantage de marques sur lui, sur ses mains, sur son dos. On m’a outragé beaucoup depuis que je ne l’avais pas vu ; que d’outrages ne m’a-t-on faits ? C’était le même chemin, le même service, le même but devant lui. Que Dieu nous accorde que la fin de notre vie soit le terme d’une marche orientée dans le même but. Que Dieu nous accorde cette grâce et cette gloire pour lui.
Ensuite, ah, chers amis, ce sont de petites choses qui font la vie divine, la vie d’un homme ! Ce sont les petites influences, l’absence de l’influence divine vécue, réalisée, et de la fermeté qu’elle donne, qui font qu’un homme chrétien est soumis à de fortes influences, qui l’emportent.
N’allons pas dire qu’un chrétien mondain est plus heureux qu’un chrétien qui se promène en long et en large dans le pays de la promesse. Ce n’est pas vrai. Il nous arrive d’aller nous promener un peu partout, par le coeur et par la pensée. Qu’est-ce qu’il faut ? Que nous revenions. J’ai perdu du temps, et j’ai été bien malheureux.
La coupe de la joie que Dieu donne est pleine ; elle déborde.
Voilà, ce que Dieu dit à Josué, c’est qu’il y a un gros travail à faire, et immédiatement. Il y a plus qu’un travail ; il y a la guerre. Nous trouvons ensuite que, Dieu ayant parlé à Josué, Josué parle au peuple. Nous savons d’abord qu’avant d’avoir rien fait, il leur parle. Mais, le Jourdain franchi, avant de livrer aucune bataille, avant qu’aucun acte extérieur soit accompli, Dieu fait un travail intérieur. Dieu travaille en nous avant de travailler par nous. Dieu travaille toujours en nous.
Voilà par où commence la guerre. Et qu’est-ce que Dieu fait en nous ? Quel est le travail que Dieu fait en nous, pour que la guerre puisse être entreprise, vis-à-vis de ce qui est les Amoréens, etc. ? Qu’est-ce que Dieu fait ? Quel est le travail ? Qu’est-ce qu’il applique ? La mise de côté de tout ce que le peuple était par nature ; la mise de côté des sentiments, la mort, Guilgal. Rappelons-le, la mort. La mort en soi n’est pas la puissance. On l’a dit ; c’est tout à fait juste. En soi, la mort n’est pas une puissance. Mais elle est la condition pour que la puissance de Dieu soit là. Et où un homme vit avec sa volonté, son énergie naturelle, il n’a pas toujours Dieu pour lui, mais Dieu contre lui. Voilà pourquoi Guilgal. Nous avons vu la circoncision, la mort. Guilgal veut dire roulement : J’ai roulé de dessus toi l’opprobre de l’Égypte. Voilà un peuple qui avait le caractère de l’Égypte. À partir de ce moment-là, c’est un peuple sur lequel la mort a passé. C’est une figure. Nous sommes morts avec Jésus, et pratiquement, pour avoir la puissance de Dieu avec nous, dans notre vie. Un frère, une soeur, un père de famille, dans sa vie de tous les jours (qui n’est pas facile, très éprouvante, pleine de charges, de soucis, d’exercices de conscience et de coeur), a besoin de quoi, pour être chrétien ? Là comme ailleurs, quel est le secret de la force, pour jouir de Dieu, dans l’accomplissement de ce qui est tout à fait ordinaire, et dans lequel Dieu nous laisse ? Premièrement, de la mise de côté de nous-mêmes, de la mort. Guilgal est toujours là. C’est la mise à mort de ce qu’est l’homme naturel dans sa volonté et ses convoitises.
Voilà un guerrier de Dieu. C’est donc un homme qui est d’abord bien mort. Dieu, au lieu de nourrir l’énergie naturelle de l’homme, des chrétiens, la nôtre, commence par la détruire, et nous donne une autre énergie, qui est l’énergie spirituelle du Saint Esprit en nous. Oh, combien c’est vrai, chers amis, et profond ! Nous faisons tous l’expérience que, quand nous voulons même aider Dieu, Dieu est obligé de nous dire : Tu pèches ; tu désobéis. Et plus nous sommes heureux et plus nous sommes forts, plus Dieu nous brise. Et sa puissance s’accomplit ainsi dans notre faiblesse réalisée, et la puissance de Dieu remplit le vase que Dieu a commencé par vider. Cette expression, nous l’avons entendue depuis longtemps par nos devanciers et frères anciens que nous avons connus : vidé de soi-même, vidé de tout, vidé ! On comprend cela, en prenant de l’âge. Et quelle profondeur de vérité morale se trouve dans ce simple mot qui, d’ailleurs, se rattache à la vraie doctrine chrétienne : être vidé de soi. Oh, chers amis, c’est la perfection, la perfection pratique ! Le moi du chrétien, ce moi que Dieu reconnaît, c’est Christ. Le nouveau moi du chrétien, c’est Jésus : «Je ne vis plus, moi, mais Christ vit en moi» (Gal. 2:20). Le chrétien a changé de moi. Non seulement il a la vérité éternelle, pour ainsi dire. Mais il y a ensuite la réalisation quotidienne. Voilà l’application de la mort, Guilgal. Nous l’avons vu ; nous l’avons signalé ; chacun le sait. Et Josué retourna dans le camp à Guilgal. Pour quoi faire ? Pour reprendre contact avec cet état moral de choses où l’homme est mis de côté, et où Dieu se met au service des siens. Quel bonheur ! Que Dieu nous accorde cela !
Ensuite, nous trouvons à Guilgal qu’un homme se présente avec une épée nue dans sa main. Ce n’est pas une épée dans son fourreau, mais nue dans sa main. Une épée nue dans la main d’un homme de guerre, cela ne veut pas dire qu’on va se promener. Cela signifie que des choses sanglantes vont se produire, des combats sanglants vont se livrer, une lutte à mort. C’est vaincre ou mourir, comme on dirait parmi les hommes. On est vainqueur ou on est mort. Évidemment, il n’y a pas de moyen terme. On ne peut pas traiter avec les ennemis qu’on va rencontrer. Il n’y a pas d’alliance possible. On est contre eux jusqu’à la mort. Ou on sera avec eux, mais contre Dieu, jusqu’à la mort. Pas d’alliance possible : c’est ce que le peuple de Dieu a oublié. La fausse charité, qui épargne la chair pour ne pas épargner Dieu, conduit le peuple aux défaites et aux humiliations les plus sanglantes. Qu’est-ce que cela veut dire ? Avec qui ne pouvons-nous pas traiter ? Avec qui est-il impossible que le chrétien traite ? Avec les puissances spirituelles de méchanceté qui sont dans les lieux célestes (Éph. 6:12). Notre lutte n’est pas contre le sang et la chair, mais contre le diable ; et c’est ainsi. Voilà la lutte. On ne traite pas. Et le diable se sert de toutes sortes de choses. Nous n’entendons pas le diable parler. Nous ne voyons pas de démons, comme autrefois on le trouvait. Mais il emploie les mêmes moyens. Alors là, il n’y a pas d’alliance, aucune. Le Seigneur nous conduit à un combat sans merci. Celui qui n’est pas vainqueur est éliminé ; et nous savons ce que cela veut dire. Nous ne traitons pas. Voilà pourquoi nous trouvons ensuite une trahison. Il y a deux trahisons, dans ce que nous trouvons là, ou plutôt une.
La trahison d’Acan est une véritable trahison : l’entrée d’un interdit parmi le peuple de Dieu. Celui qui en est coupable est un traître. Voilà un peuple anathème. Et voilà un peuple qui a le Jourdain derrière lui, et les Cananéens devant lui. Il faut qu’il y ait Dieu à tout prix avec lui, ou c’est un peuple perdu — et de la façon la plus sanglante qui soit. De même avec nous : si nous n’avons pas Dieu avec nous dans la position chrétienne, le témoignage chrétien, nous sommes battus complètement. Nous ne pouvons pas être des chrétiens pour Dieu sans Dieu. Et Dieu est avec nous si Guilgal est réalisé, la mise de côté de nous-mêmes, et s’il n’y a pas d’interdit, comme nous le trouvons pour Acan. Qu’a pris Acan ? Pas grand chose. Il a désobéi à Dieu. Il a pris un manteau, un peu d’or. Il a caché tout cela. Personne ne l’a vu, ni Josué, ni personne. Il a dû le faire avec les siens : ils sont tous lapidés. Ils ont dû faire cela de connivence entre eux. Ils ont été très habiles. Mais un homme les a vus, un. Et Josué apprend cela. Comment ? Dieu le lui dit-il ? Non. Comment l’apprennent-ils ? Par les faits eux-mêmes, par une défaite à une petite ville, Aï, rien du tout ! Et ils sont battus, alors que Jéricho est tombée. Alors Josué, qui était un homme de Dieu et comprenait toutes choses, sait ce que cela voulait dire. Instantanément, il a le sentiment du drame, et que vraiment cette situation est terrible, qu’il y a un fait grave, de première gravité, qui s’est passé dans le camp. Alors nous voyons ceci : Dieu n’est pas avec eux. Il dit, avec raison : Pourquoi nous as-tu fait monter là, si tu ne nous conduis pas ? Pourquoi sommes-nous en défaite ? Oh, qu’ils aillent dans le monde, ceux qui veulent le monde et qui l’aiment ! Qu’ils y restent ! Ils ne peuvent pas avoir le monde avec eux, parmi le peuple de Dieu. On ne peut pas ; on apporte de l’interdit. Pour être le peuple de Dieu, livrer les combats de Dieu, faire face à la puissance du diable, qui veut à tout prix barrer, au peuple de Dieu, la route des joies célestes, il ne faut pas les éléments mondains qui restent là. Il y a ainsi des possibilités chrétiennes, aujourd’hui, à la fin de l’Église chrétienne. Mais, pour le témoignage du Seigneur, il faut des coeurs décidés, fermes, remplis de Jésus, qui cherchent leur joie auprès de Jésus, et des coeurs exercés. Que Dieu nous accorde cela, chers amis.
Acan était un traître. Acan, pour un peu d’or, pour un manteau, n’a pas reculé devant le fait de risquer toute la vie du peuple, puisque Dieu dit : Il y a de l’interdit ; je suis contre vous. Il est davantage contre son peuple, quand il y a de l’interdit, qu’il ne l’est contre le monde. Il se serait mis contre son peuple en laissant les Égyptiens bien tranquilles. Quelle leçon ! Que Dieu nous accorde de ne jamais oublier que le premier des caractères, le plus essentiel des caractères, du peuple de Dieu, c’est la sainteté. C’est le premier, le plus constant, le plus invariable, ce à l’égard de quoi Dieu est le plus exigeant. Il ne change pas. Et quelqu’un qui favorise ce manque de sainteté, de séparation, de jugement et de purification, du peuple, est un traître.
Acan et tous les siens y ont passé.
Nous trouvons ensuite Gabaon, et une autre faute. Mais là, Josué a manqué, comme peut-être aussi il avait manqué pour Aï. Car, en lisant beaucoup l’Écriture, et de près, on y découvre beaucoup de choses. Pour Aï, on voit qu’après l’échec sanglant, Josué inspecte le peuple. Il n’avait pas dû le faire avant. Et il aurait dû le faire de bon matin.
La négligence suit souvent un succès comme celui de Jéricho. C’est la porte ouverte aux défaillances.
Pour les Gabaonites, ils n’ont pas consulté la bouche de l’Éternel. Les Gabaonites viennent, racontent une histoire. On en a tant raconté, depuis, des histoires. Mais, au lieu de consulter l’Éternel, on essaie, pour la paix, sans doute. Voilà, on traite avec eux ; et on donne un serment de paix. Immédiatement, on découvre la supercherie. Et cette faute de Gabaon fut plus grave que celle d’Aï. On a manqué de consulter Dieu. On a traité alliance avec des éléments qui n’étaient pas avec le peuple de Dieu. Celui qui n’est pas avec moi est contre vous. Ceci ne veut pas dire que nous devons souhaiter du mal à qui que ce soit ; absolument pas. Nous souhaitons le bien du pauvre pécheur, du plus grand ennemi du peuple de Dieu. Nous souhaitons son bien. Le Seigneur dit : «Priez pour ceux qui vous persécutent» (Matt. 5:44). Lorsqu’il s’agit du témoignage du Seigneur, de la vérité divine, nous n’avons pas de pacte à signer. Ce n’est pas possible. L’homme, quel qu’il soit, s’il n’est pas pour Dieu, est contre Dieu.
Ce n’est pas la peine de le proclamer, comme nous le disons si souvent au culte, et de faire l’inverse. Un homme, quel qu’il soit, s’il n’a pas la vie de Dieu, est un ennemi de Dieu et des enfants de Dieu. C’est une question, non pas de caractère, mais c’est une question de nature. «Par ceci sont rendus manifestes les enfants de Dieu et les enfants du diable» (1 Jean 3:10). Ce n’est pas nous qui disons cela. Voilà un langage clair.
Et alors, pour le peuple de Dieu, témoignage du Seigneur, pour les combats de Dieu, nous ne pouvons avoir Dieu avec nous que lorsque ce qui est de Dieu est avec nous, et que nous veillons à la mise de côté de soi-même, chacun pour soi. Ceci est vrai pour tous les frères et soeurs.
Dieu encourage encore Josué, plus loin. Voilà des rois : Mettez les pieds sur les cous de ces rois. C’est le peuple qui a Dieu avec lui. Ces rois étaient terribles, pour la chair. Ils avaient peur, ces Israélites, devant toutes ces villes murées jusqu’au ciel. Dieu les réconforte. «Celui qui est avec nous est plus grand». Le diable, les gens du monde, emploient des armes que nous ne pouvons pas employer. Pour nous, la grande arme de l’arsenal que nous avons, c’est la mort. Si nous nous mettons de côté nous-mêmes et réalisons cela, nous sommes heureux, et nous avons Dieu avec nous. Il nous dit : Mettez vos pieds sur le cou de ces rois. «Nous sommes plus que vainqueurs…» (Rom. 8:37-39).
Celui qui est ainsi est plus que vainqueur en celui qui nous a aimés.
Que Dieu nous donne d’être plus que vainqueur à la gloire de celui qui est le grand vainqueur de la mort, et dont le peuple qui suit est un peuple qui devrait chanter, et non pleurer ; chanter la gloire, au lieu d’être un peuple mondain ; avoir des chants dans le désert et dans le pays. La première des choses, chanter à la gloire de Dieu qui a brisé nos chaînes, qui a fait des chrétiens un peuple qui soit libre au monde. La seule liberté qui soit pour l’éternité, c’est la liberté que Dieu donne par l’oeuvre de Jésus, qui non seulement est mort pour nous sur la croix, mais pour nous délivrer de la puissance de la chair, de la puissance du diable. Voilà la vraie liberté que Dieu reconnaît. Qu’il nous donne d’en jouir profondément. Et, qu’étant libres, nos coeurs soient des vases remplis de reconnaissance. Qu’ils fassent retentir le désert de chants à la gloire de Dieu et de celui qui a fait l’oeuvre par laquelle Dieu est glorifié.
Y aurait-il quelqu’un qui gémirait sous quelque esclavage ? Qu’il s’adresse à Dieu, demande à Dieu de le délivrer, de le remplir de joie, de force. Y aurait-il quelqu’un qui ne serait pas converti ? Qu’il s’adresse à Dieu. Dieu donne aussi le salut, encore aujourd’hui.
[LC n° 18]
24 février 1946
Le peuple d’Israël avait fait la Pâque (je passerai par dessus). Il s’était mis à l’abri du sang de l’agneau pascal.
Le croyant a su que «la colère était révélée du ciel», comme il est écrit en Romains 1:18 — l’épître qui présente l’évangile. Et il s’est mis à l’abri du sang de Christ. Il n’y a pas d’autre abri.
Le peuple est arrivé à la mer Rouge, qui a été la destruction de ses ennemis. Christ n’est pas seulement mort pour nous sauver, mais aussi pour nous délivrer de la puissance de l’ennemi.
Ensuite, c’est le désert, où le peuple apprend à se connaître. Les hommes de guerre sortis d’Égypte, les courageux d’alors, tous ceux qui ont pu avoir confiance en la chair, sont tombés dans le désert. Mais Dieu se glorifie en ceux qui étaient faibles, en ces petits enfants, pour lesquels craignaient les fils d’Israël. Ceux-là seuls passent le Jourdain, pour entrer au pays de la promesse.
La mer Rouge, c’est la mort de Christ pour nous. Le Jourdain, c’est la mort avec Christ. Après le Jourdain, c’est le pays de la promesse, c’est-à-dire, pour le croyant, les lieux célestes, défendus par les puissances spirituelles de méchanceté (elles sont dans les lieux célestes — Éph. 6:12). Mais il faut, pour y remporter des victoires, passer par Guilgal.
Dieu ne peut pas monter avec un peuple qui porte la livrée de l’Égypte. Il faut la circoncision — le signe de la mort. C’est la mort appliquée pratiquement à ce que nous sommes dans la chair. Alors Dieu peut dire : «J’ai roulé de dessus toi l’opprobre de l’Égypte».
La croix de Christ met fin à la chair. Un homme est converti : il est du ciel et pour le ciel. «Si quelqu’un veut venir après moi, qu’il se renonce soi-même, et qu’il prenne sa croix chaque jour, et me suive» (Luc 9:23). Il faut que la croix, que la mort, ait passé sur nous, pratiquement. C’est là la saine doctrine. «J’ai roulé de dessus toi l’opprobre de l’Égypte». Dieu nous enlève ainsi le caractère mondain que, hélas, Paul a dû flétrir chez des Philippiens : «Leur dieu était leur ventre», leur volonté propre ; leurs pensées étaient aux choses terrestres ; ils faisaient pleurer l’apôtre (Phil. 3:18-19). Et nous-mêmes ? Si l’apôtre venait au milieu de nous, ne pleurerait-il pas ?
Guilgal, c’est la mort. Les frères n’auraient-ils plus ce caractère ? celui de la mort qui a passé sur eux ? Il faut appliquer la mort et y revenir. Un croyant qui nourrit son ambition n’est pas passé, ou revenu, à Guilgal.
Si on y passe, c’est pour engager une lutte sans miséricorde avec le chef de ce monde. Voilà la vérité ! Frères, il nous faut vivre dans le vrai. Le vrai, c’est Dieu ; c’est Christ, Christ dans les siens. Il faut aller avec Dieu, et se contenter d’avoir Dieu tout seul ; ne pas avoir besoin des frères autour de soi. Au reste, il faudra bien Dieu tout seul, pour mourir.
Il s’agit bien d’une lutte sans merci. Jusqu’au bout, Paul a combattu. Près de déposer ses armes , c’est-à-dire d’être recueilli vers Dieu, il dit : «J’ai combattu le bon combat, j’ai achevé la course, j’ai gardé la foi» (2 Tim. 4:7). Celui qui ne combat pas a cédé. Il a traité. Il a tendu la main à l’adversaire de notre Seigneur Jésus Christ. Un chrétien qui se nourrit de la politique du monde a traité avec l’ennemi. «Adultères», dit Jacques, «l’amitié du monde est inimitié contre Dieu» (Jac. 4:4).
Ne pas livrer bataille, c’est s’être arrangé avec l’ennemi. Et cela est vrai du croyant en particulier, et aussi de l’assemblée.
Dieu est tout-puissant. Mais sa toute-puissance n’est pas pour nous, s’il n’y a pas, entre lui et nous, le lien de la foi. Ne l’oublions pas : si la foi n’est pas en exercice, la toute-puissance de Dieu n’est pas pour nous.
La mort appliquée à nous-mêmes, et qui nous rend propres pour le combat, n’est pas une chose agréable pour la chair. Elle nous fait peur. Pourtant, c’est le secret de notre joie et de notre force. Nous voulons être heureux dans le Seigneur et jouir beaucoup de lui ? Le secret, c’est d’appliquer la mort à ses désirs, à ses caprices.
Si on ne veut pas appliquer la croix, on récolte les conséquences de l’activité de la chair. On a traité alliance avec les habitants du pays. On est puni par là-même : «leurs dieux vous seront en piège». C’est Bokim.
L’Église aussi a traité alliance avec le monde. Et, à la fin, celle qui prétend être l’épouse de Christ reçoit un nom terrible.
Les frères ont retrouvé Guilgal. Ne sont-ils pas, depuis, descendus à Bokim ?
Si nous ne voulons pas résister, si nous tolérons en nous quelque chose du monde, nous pouvons, en gouvernement, souffrir d’une épine à nos côtés, jusqu’à la fin de notre vie.
Et que les frères ne l’oublient pas : ayant réalisé Guilgal, et combattant les combats de la foi contre les puissances spirituelles, ils sont, je l’ai souvent pensé, comme des sentinelles avancées sur la ligne de feu. Là, c’est l’orage. L’ennemi et ses autorités sont en jeu. La masse des chrétiens est en arrière, de vrais chrétiens ne luttant pas. En général, on ne lutte plus, dans la chrétienté.
Si des frères ou soeurs ne luttent pas, pourquoi sont-ils séparés des catholiques ou des protestants ? Pourquoi portent-ils le nom de frère ou celui de soeur ? N’ont-ils pas fait deux parts, dans leur vie ? Dans l’une, ils disent : «Seigneur, tu es mort pour nous, et nous te donnons gloire» ; et, dans l’autre, ils disent : «Nous sommes sauvés ; maintenant, nous pouvons faire à peu près ce que nous voulons». Pour les péchés grossiers, on est d’accord — faire à peu près ce qu’on veut, sauf de donner des scandales. Mais la volonté propre est un mal aussi affreux que le mal grossier.
Et combien ces combats sont importants ! C’est par eux que nous prenons possession du pays céleste. Posséder le pays, c’est croître en piété. L’ennemi sait bien que le croyant entrera en possession de l’héritage. Mais il ne veut pas qu’il l’ait avant sa mort. Et il s’oppose à lui. Cela rejoint les quelques pensées dont nous avons été occupés avec Éph. 5. On rencontre l’adversaire en séduction, et il y a le combat. On ne s’arrête pas à ces combats. Ils ne sont pas spectaculaires. Mais, dans la scène morale des choses, ils sont extrêmement importants. À la croix, ce qui s’est vu n’a pas été le plus important ; au contraire. C’est ce que l’homme a fait qui a pu se voir. Ce qui ne se voyait pas, c’est la victoire remportée sur le péché et sur l’adversaire, ce qui s’est passé entre Dieu et Christ.
Si on ne va pas à Guilgal, on trouve Bokim. De Guilgal, on part pour vaincre. À Bokim, on pleure. L’Ange de l’Éternel est bien descendu à Bokim — le Seigneur n’abandonne pas les siens — mais on pleure.
Et qui sont ceux qui attendent le Seigneur ? Seulement les bons soldats de Jésus Christ. Car veiller, combattre et servir, c’est une seule et même chose.
[LC n° 19]
19 mars 1950
Une ou deux remarques sur le caractère remarquable de la position du peuple ici, position qui correspond à la nôtre aujourd’hui. Le peuple venait de franchir le Jourdain. Il avait donc cette barrière derrière lui. Elle s’était ouverte d’une façon merveilleuse, l’arche du Seigneur de toute la terre s’étant tenue là, au fond du Jourdain, pendant que tout le peuple passait. Le peuple, maintenant, est dans le pays de la promesse. Mais il n’y a rien du tout. Il ne possède encore rien. Il s’agit de remporter la victoire sur tous les ennemis qui sont dans le pays. Il s’agit de les chasser, et de les chasser de haute lutte. Si nous suivons l’histoire d’Israël, nous voyons qu’il n’y est jamais arrivé. Cette position du peuple d’Israël correspond à la nôtre aujourd’hui. Si nous avons franchi le Jourdain, c’est-à-dire la mort, les vrais croyants ont franchi le fleuve de la mort. Et ils ont devant eux le ciel. Ils sont dans le ciel. Quelqu’un qui est converti est quelqu’un qui est entré au ciel, moralement. Et c’est très souvent à cela que s’arrête la connaissance de l’Évangile. D’ailleurs, au cours des siècles aussi, la connaissance de l’Évangile s’est volontiers arrêtée à ce point, que quelqu’un qui est converti est au ciel ; il peut mourir. L’Évangile que Dieu nous présente va plus loin, et nous montre qu’un chrétien est quelqu’un qui doit conquérir le ciel de haute lutte, qui doit apprendre à connaître ce qu’est le ciel, comme nous le trouvons au début de ce livre : «Tout lieu que foulera la plante de votre pied sera à vous» (1:3). Dieu ne considère pas qu’un chrétien, quelqu’un qui vient d’être converti, a fini. Mais il considère que ce quelqu’un commence, et doit apprendre à être chrétien comme Dieu désire qu’il soit. Et ce livre de Josué correspond à l’épître aux Éphésiens, au chapitre 6 en particulier, où nous trouvons que les chrétiens — non pas les inconvertis — luttent contre les puissances spirituelles de méchanceté qui sont dans les lieux célestes (6:12). Le combat proprement chrétien, c’est un combat qui est contre les puissances spirituelles de méchanceté dans les lieux célestes. Tous les autres combats ne sont pas des combats proprement chrétiens. Il y a des combats qu’on livre dans le désert. Israël a livré des combats, dans le désert. Il a abattu ces ennemis. Mais il n’avait pas un pouce de terrain de plus. Ce n’est pas un combat pour une possession.
Le diable veut que nous soyons des chrétiens mondains. Il fait tous ses efforts pour que, s’il ne peut pas nous ôter la vie, il nous ôte la spiritualité, le dévouement pour Christ. Il s’emploie, du moment qu’un homme est converti, pour que cet homme ne devienne pas un chrétien spirituel, reste un chrétien mondain, charnel, et qu’au lieu d’avancer dans le pays de la promesse, il soit comme quelqu’un qui n’est pas chrétien. Il ne peut enlever la vie à un chrétien. Il le sait très bien. Mais il peut enlever tout le discernement spirituel, le dévouement pour Christ, l’attachement pour Christ. Et il fait que les chrétiens, au lieu d’être comme des chrétiens qui ont abattu Jéricho, qui sont entrés dans le pays de la promesse, qui s’y promènent en long et en large, sont fiers de ce qui se passent dans le monde, et ont la bouche fermée sur ce qui se passe dans le ciel.
Dans ce cas, la victoire n’est pas du côté du peuple de Dieu, mais de Satan sur les chrétiens. Ces considérations sont d’une importance capitale — non pas pour le salut d’un homme ; s’il est converti aujourd’hui, il l’est toujours. Cet homme pourra être trouvé dans une condition infâme. Si Dieu a mis dans son âme la vie de Christ, il l’a pour toujours. Mais c’est un témoin, dans le monde, que le diable a été plus fort que la vie de Christ en lui, que le diable a été plus fort que lui. Ce n’est pas un témoin pour Christ, mais de l’ennemi contre le Seigneur. Hélas ! Nous le sommes tous, à des degrés divers.
Alors, l’Évangile de Dieu, de notre Seigneur Jésus Christ, ne s’arrête jamais à la possession de la vie éternelle. Le monde, l’ennemi, a son armée. Il a ses soldats ; Dieu a les siens. Le monde, l’ennemi, a ses serviteurs. Ce sont des anges, quelquefois. Ce sont aussi, souvent, des hommes. Eh bien, Dieu aussi a les siens. Dieu a ses serviteurs, qui sont des anges, mais aussi ses serviteurs. Tous les chrétiens devraient être des témoins et des serviteurs de celui qui a remporté, sur la croix, la victoire sur l’ennemi.
Je désirerais dire un mot, justement, sur ce côté de la vie chrétienne, que nous sommes toujours, chaque jour, en danger, puisque nous préférons une vie chrétienne facile à une vie chrétienne exercée. Nous la préférons tous.
Eh bien, nous trouvons justement, ici, le peuple qui met le pied, pour la première fois, dans le pays de la promesse. Un chrétien qui s’en tient là, c’est une position impossible. Il serait comme le peuple qui serait resté au bord du Jourdain, tout à fait au bord, ou dans le désert. Ce n’est pas une position normale, que le peuple soit resté toujours dans le désert. Dieu ne le lui avait pas dit. Il nous fait entrer dans le ciel. Dieu désire que nous connaissions le ciel, que notre coeur soit au ciel, jouisse de la communion avec le Seigneur qui est dans le ciel. «Là où est votre trésor, là sera aussi votre coeur» (Luc 12:34). Il n’est pas dit : «devra être votre coeur», parce que la chose est immanquable. Si votre trésor est votre porte-monnaie, votre coeur est dans votre porte-monnaie. Ce n’est pas un ordre qui est dit : Là où est votre trésor devra être votre coeur. Là où est votre trésor, là où il est, et ce qu’il est, votre coeur y est.
Le Seigneur désire que votre coeur soit avec lui, qui est à la droite de Dieu. Tout le problème de notre vie chrétienne est celui-là, qu’on le veuille ou non. Il s’agit de savoir, devant Dieu, devant l’ennemi, devant les anges de Dieu, devant les serviteurs de l’ennemi, si le peuple de Dieu sera un peuple pour Dieu, ou pour l’ennemi.
Nous trouvons, dans ce livre de Josué (qui est un très beau livre, parce que c’est un livre de victoires, en général, de triomphe ; c’est un livre où la force de Dieu se montre plus forte que la force de l’ennemi), si on veut, que c’est l’image de l’Église à ses débuts. L’Église, à ses débuts, était supérieure à tout. Il suffit de lire le livre des Actes : elle était supérieure à tout.
Nous trouvons donc ici cette entrée du peuple dans le pays de la promesse. Et, au chapitre 5, nous trouvons — ce qui est très remarquable — qu’avant d’engager tout combat, avant de croiser le fer avec l’ennemi, Dieu s’occupe de l’état moral de son peuple. Dieu n’envoie pas l’ennemi à un peuple qui serait dans un état tel, que Dieu serait le premier à se mettre contre lui. Dieu commence par préparer le peuple, et à le mettre dans un état moral, tel que Dieu puisse être avec lui. Il en est de même pour nous tous. Lorsque nous ne sommes pas dans un état tel que Seigneur puisse être avec nous, il se mettra contre nous dans ce qu’il ne peut pas approuver en nous. Nous le trouvons fréquemment : Je mettrai ma face contre vous. Je vous tournerai le dos, et non la face (Jér. 18:17) ; à tout son peuple.
Le premier point, ce qui est le plus important, ce dont tout dérive par la suite, c’est l’état moral du peuple. Cet état, nous le trouvons au chapitre 5. Avant d’opérer la mort parmi les ennemis du peuple de Dieu, il faut porter la mort dans le peuple de Dieu. C’est ce que nous trouvons dans ce chapitre 5. Il faut porter la mort dans ce qui doit être tué dans le peuple de Dieu. Alors nous voyons que Josué retourna à Guilgal. Chacun de nous pourra compter combien de fois nous trouvons : «Et Josué retourna avec le peuple à Guilgal» ; toujours revenir à Guilgal. Il fallait revenir à Guilgal pour prendre contact avec la mort. Qu’est-ce que c’est que Guilgal ? C’est la mort appliquée au peuple de Dieu. Nous avons été circoncis d’une circoncision par le baptême du Christ (Col. 2:11). Nous sommes morts avec Christ ; nous sommes morts en Christ. L’énergie du peuple de Dieu n’est pas une énergie naturelle. Dieu a tué cette énergie naturelle. Toutes les capacités naturelles du peuple de Dieu, Dieu les met de côté. Guilgal, c’est la mort, l’image de la mort. Nous avons été crucifiés avec Jésus (Rom. 6:6). Un chrétien, c’est quelqu’un qui a été crucifié avec Jésus. Un soldat de Jésus Christ est soldat dans la mesure où il réalise qu’il a été crucifié avec Christ, qu’il est mort avec Christ. Un bon soldat de Jésus Christ, c’est quelqu’un qui réalise qu’il est mort avec Christ. Mort à quoi ? Au monde, à la chair, à sa propre volonté. Parce que Dieu ne donnera pas sa force à la volonté de l’homme. Il ne l’a jamais fait. Il mettra sa force contre la volonté de l’homme. Voilà pourquoi le premier point est l’état moral du peuple. C’est vrai de chacun de nous. Nous voulons servir le Seigneur. Pourquoi notre service se solde-t-il, hélas, par des échecs, des défaites ? Parce que nous n’avons pas passé à Guilgal ; parce que nous sommes partis avec notre énergie naturelle, nos qualités naturelles ; et nous tombons. Guilgal signifie roulement : J’ai roulé de dessus vous l’opprobre de l’Égypte, c’est-à-dire l’opprobre du monde. Toute trace du monde sur le peuple de Dieu fait que Dieu, au lieu d’aider son peuple, le frappe. Dieu ne peut pas voir une trace de l’Égypte sur son peuple. Il se met contre son peuple, lorsqu’il voit une trace de l’Égypte. Cela va loin ; mais c’est ainsi. Nous voulons Dieu avec nous ? Laissons la mort de Christ ôter de dessus nous ce qui est appelé l’opprobre de l’Égypte. Nous n’appelons pas tout ce qui vient de l’Égypte opprobre. Nous l’appelons peut-être un grand honneur. Nous ne pouvons pas porter d’une main la croix de Christ, et de l’autre ce qui est du monde.
Voilà le premier point que je désirais souligner, sur ce chapitre, Guilgal. C’est vrai pour chacun de nous. Si nous avons l’intention, individuellement, et une très bonne intention, d’être des témoins du Seigneur dans ce monde, et devant l’ennemi, si nous avons l’intention d’être des témoins du Seigneur, une bonne intention ne suffit pas, ne suffit jamais. Et même de la bonne volonté, même la sincérité, ne suffisent pas du tout. Ce qu’il faut, c’est être dans un état moral tel, que Dieu puisse être avec nous ; parce que Dieu n’est jamais avec la chair, jamais. Nous en faisons bien l’expérience. Il nous faut revenir à Guilgal. Il nous faut appliquer, comme on l’a dit dans la prière, porter sur nous, la mort de Jésus, le mourir de Jésus, afin que la vie aussi de Jésus soit manifestée dans notre chair mortelle (2 Cor. 4:11). Chacun de nous fait l’expérience qu’il réalise la présence de Dieu avec lui et pour lui, dans la mesure où il réalise Guilgal.
Ensuite, un second point que nous trouvons ici, c’est que nous voyons que le peuple qui avait mangé la manne, mange maintenant du blé du pays. Et ceci est en rapport avec la nourriture spirituelle des chrétiens. On nous l’a souvent dit ici — et ce n’est jamais trop — et on nous dit souvent, qu’il faut que nous ayons nos âmes en relation avec un Christ qui est à la droite de Dieu. C’est ce qui est représenté par le vieux blé du pays. La manne a cessé. Et la manne, comme nous le trouvons dans l’Ancien et le Nouveau Testaments, est l’image de Christ dans son humanité, dans sa vie dans ce monde. La différence avec le peuple ici et nous-mêmes, c’est que nous nous nourrissons à la fois de la manne et du vieux blé du pays. Un chrétien spirituel se nourrit de Christ dans sa vie. Il se nourrit de Christ dans sa mort, et se nourrit de Christ dans sa gloire. Et c’est ce dernier trait qui est plutôt en rapport avec le vieux blé du pays.
On a souvent constaté que des âmes s’arrêtent à la croix, au pied de la croix, agenouillées au pied de la croix. Voyez le Sauveur sur la croix ; trouvez la paix au pied de la croix. Mais ce n’est pas ce que nous trouvons à Guilgal. Nous trouvons, à Guilgal, ce que le Seigneur nous dit : Ne vous arrêtez pas à la croix ; allez jusqu’au ciel. Le Seigneur n’est plus sur la croix. Il est à la droite de Dieu, dans la gloire de Dieu. Il va revenir de la gloire de Dieu. Nous l’attendons du ciel. Voilà où les affections doivent être formées. Et, au point de vue des conséquences pratiques, c’est incalculable. Parce que, si des chrétiens ont leur coeur avec Christ à la droite de Dieu, ils réalisent beaucoup mieux que ce qu’ils traversent, c’est le désert. Tandis que, si on s’arrête à la croix, le ciel est loin, le désert est près. Et c’est la chair qui l’emporte.
On voit toujours qu’un manque de plénitude dans l’enseignement, qui laisse les âmes au pied de la croix, peut finir par produire un état d’âme terrestre. Les âmes ne voient que l’évangile sur la terre, tandis que le chrétien a son Sauveur dans le ciel, ses affections dans le ciel, son trésor dans le ciel. Voilà le vieux blé du pays.
Enfin, nous trouvons, dans ce chapitre, une troisième chose, le chef de l’armée de l’Eternel avec son épée nue dans sa main. Une épée, elle n’est pas dans un fourreau. Elle est toute prête à être employée. C’est le chef de l’armée de l’Eternel. Qu’est-ce que cela nous dit ? C’est un des points que je voulais signaler. C’est que la lutte qui est engagée, par la position même du peuple de Dieu, qui est là avec Jéricho devant lui, le Jourdain derrière lui, c’est une position absolument intenable. Il faut vaincre, ou on est perdu. Eh bien, c’est la position chrétienne. Il faut aller de l’avant, ou on est perdu. La position chrétienne, qu’on le veuille ou non, celui qui ne veut pas de cette position est déjà battu, par le fait qu’il y renonce. La position chrétienne est une position qui est nécessairement une position de combat. C’est sa définition même. Le Jourdain derrière, le chrétien a franchi la mort. Il est au-delà de la mort. Et il est en lutte avec les principautés spirituelles qui sont dans les lieux célestes (Éph. 6:12). Cette guerre sans merci qui a commencé, sans miséricorde, c’est une épée nue. Le peuple chrétien n’a pas entrepris une promenade, dans ce monde. C’est un combat de haute lutte. C’est un combat sans miséricorde aucune. Et c’est le Seigneur lui-même qui conduit cette lutte. Alors, de deux choses l’une : nous sommes vainqueurs, lorsque nous avançons dans le pays de la promesse ; nous faisons un pas. Lorsque le Seigneur nous devient un peu plus précieux, c’est que nous avons agrandi notre territoire spirituel. Mais lorsque, au contraire, le Seigneur nous devient moins précieux, c’est une défaite. Nous avons subi une défaite. Et tout ce qui, dans ce monde, contribue à nous rendre Christ moins précieux, est pour nous une défaite. C’est à chacun de nous de voir ce qui l’entraîne dans cet état-là.
Je désire dire que la vie chrétienne est une chose extrêmement solennelle. Il suffit de voir ce qui arrive parmi le peuple de Dieu. L’ennemi ne nous ménagera pas, si nous le ménageons. Nous voyons qu’à Jéricho, on n’a pas même laissé vivre les animaux. Tout a été passé au fil de l’épée. Quand nous ménageons l’ennemi, il se retourne contre nous. Dans les livres qui suivent, nous voyons ce qui arrive, lorsqu’on a ménagé les ennemis par charité. Saül était un brave homme ; il n’aimait pas verser le sang. Dieu se met contre lui.
Ici, le peuple est en bon état. Il n’y a aucune question, pas de question. Il marche comme un seul homme, fait ce que Dieu lui dit de faire. Tout, dans Jéricho, est détruit. Voilà un bon état. Il n’y a pas de tendance pour signer un pacte avec le diable, avec l’ennemi. Et c’est la ruse de l’ennemi, de chercher à nous induire en erreur, pour que nous traitions la paix avec lui. Il n’y a pas de paix. Nous avons la guerre avec Amalek de génération en génération (Ex. 17:16). Il n’y a point de paix. Il n’y a point de repos, dans ce monde, point de paix. Chaque jour que nous passons est un jour de combat avec l’ennemi. Et nous avons tout ce qu’il faut pour que ce jour que nous passons soit un jour que nous passons dans le ciel, en communion avec Dieu, avec le Seigneur, avec les croyants, au lieu de le passer loin du ciel.
Je désirais souligner la solennité de la position chrétienne et du combat chrétien. L’oubli de ce sérieux du combat chrétien conduit à tout ce qui marque, hélas, l’histoire du peuple de Dieu.
Nous trouvons alors cette prise de Jéricho. Tout le monde sent très bien que la situation est terrible. Dans Jéricho, personne ne dit rien. Les gens ont peur, sont dans leur forteresse. Le peuple est là, avec le Jourdain derrière. Il n’y a pas de force apparente. Il y a bien quelques guerriers. Tout de monde sent très bien que l’un des deux adversaires doit anéantir l’autre. Tout le monde le sent. On le sent, dans l’atmosphère de ce chapitre.
Qu’est-ce que le peuple de Dieu a à faire ? Ecouter ce que Dieu dit, et le suivre à la lettre. C’est l’arche qui fait le tour de la ville. C’est Dieu, qui est au milieu de son peuple, qui est en question. Et, de même aujourd’hui, c’est la gloire de Dieu au milieu de son peuple qui est en question. L’arche fait le tour six jours durant. Il y avait l’arche ; devant elle, les sacrificateurs ; et devant, les soldats ; derrière, l’arrière-garde. Et, sans mot dire, ils accomplissent ce service une fois, deux fois, six fois ; une fois par jour. Et le septième, aux instructions de Dieu, sept tours, sept fois. Ils accomplissent ce service, qui était ridicule, aux yeux des hommes. Et la muraille tombe d’elle-même devant eux. Ils se lancent dans la ville, et la ville est abattue.
Je désirais simplement faire ces quelques remarques, laissant la place à d’autres, pour que nous n’oubliions pas, dans tous les exercices que nous connaissons, toutes les larmes que nous versons, que le seul moyen d’en sortir, le seul moyen de tenir, c’est d’aller de l’avant avec le Seigneur ; de nous souvenir que nous avons à lutter contre un ennemi tous les jours ; que la force de Dieu sera avec nous dans la mesure où nous revenons tous les jours à Guilgal ; et que Dieu ne demande qu’à nous offrir la possession du pays de la promesse, c’est-à-dire des lieux célestes.
Jéricho a été maudite. La malédiction a été appelée sur celui qui relèverait cette ville de Jéricho, symbole de la puissance de Canaan, du monde. Cette ville a été rebâtie. Elle a été rebâtie par Israël. Elle n’a pas été rebâtie par les peuples étrangers, mais en Israël, du temps d’un roi d’Israël.
Que de puissances de l’ennemi ont été rebâties, au sein de la chrétienté ! Que de Jéricho ont été rebâties, au sein de la chrétienté, depuis le temps où l’Église triomphante, au début, et sans force apparente, était plus forte que le monde ! Depuis ce temps-là, que de Jéricho ont été bâties, au sein même de la chrétienté !
Que le Seigneur nous donne de penser à ces choses, et d’être avec lui, en nous souvenant qu’il est pour les siens, et ne demande qu’à ce que les siens soient heureux avec lui, et vainqueurs par lui.
[LC n° 20]
9 février 1947
Nous avons souvent dit ici que ce livre de Josué fait le pendant à l’épître aux Éphésiens. Et puisque, incontestablement, l’épître aux Éphésiens est un livre dans lequel les frères puisent beaucoup, on ne saurait trop leur recommander, ainsi qu’aux soeurs, de puiser largement dans le livre de Josué. Ce livre nous fournit, en effet, sous une forme facile à saisir, de riches enseignements spirituels, car la position dans laquelle s’est trouvé le peuple d’Israël est précisément la position définie dans l’épître aux Éphésiens. Il est certainement à craindre que, lorsque nous avons dit que nous sommes assis dans les lieux célestes en Christ, nous pensions que nous avons tout dit, et qu’il nous suffit dès lors de nous reposer paresseusement sur ces déclarations, qui sont vraies, et qui sont pour nous. Mais elles ne sont pas tout ; il y a les combats.
Le livre de Josué nous présente la position du peuple de Dieu dont nous parle l’épître aux Éphésiens, en particulier le chapitre 6. Dans ce livre de Josué, le peuple franchit le Jourdain, c’est-à-dire la mort, et il le franchit après l’arche, qui est Christ. Nous voyons le peuple entrer dans le pays de la promesse, prendre possession de Canaan. Et c’est l’enseignement de l’épître aux Éphésiens, où nous sommes invités à prendre possession du ciel, c’est-à-dire à jouir de notre position en Christ, à être des chrétiens spirituels, des chrétiens célestes, des chrétiens dont la patrie est saluée par la foi. Une chose très remarquable, c’est que si nous sommes sûrs d’entrer un jour dans le pays de Canaan (un chrétien est sûr d’y arriver), Dieu ne dit jamais que nous avons à attendre de mourir pour y entrer. Mais il nous invite à y entrer dès maintenant, et c’est en quoi se différencient certains chrétiens aujourd’hui. C’est bien là, certainement, l’origine de toutes les difficultés et de toutes les confusions entre les chrétiens. Il ne faut pas s’illusionner sur ce point : l’origine de toutes les divergences et divisions qui ont marqué l’histoire du peuple de Dieu est là, elle gît là.
Nous voyons que, dès le commencement, Josué est appelé par Dieu à se fortifier. Ce n’est pas une petite affaire que cette perspective de traverser le Jourdain, puis d’entrer dans le pays de la promesse. La traversée du Jourdain, c’est la traversée de la mort avec Christ. Dans le Jourdain, un chrétien trouve la mort avec Christ. La mer Rouge, c’est Christ qui est mort pour le chrétien ; mais le Jourdain, c’est la mort avec Christ. Le chrétien est un homme ressuscité ; il a une vie nouvelle. C’est un autre homme, qui a derrière lui la mort, ce Jourdain traversé alors qu’il regorgeait par-dessus tous ses bords. La mort a été traversée par Christ et sa force épuisée, alors que toute la force de la mort était encore intacte. Jésus, l’arche de Dieu, a traversé la mort et, à sa suite, les chrétiens ont, par la foi, traversé la mort. Cela est tellement vrai que, si Jésus venait maintenant, tous les chrétiens partiraient avec lui sans passer par la mort.
«Josué, fortifie-toi et sois ferme» (Josué 1:6).
«Josué, fortifie-toi et sois très-ferme» (Josué 1:7).
On aurait pu croire que, lorsque Dieu prend la tête de son peuple, les choses doivent aller toutes seules, et qu’il suffira que Josué brandisse une bannière au nom de Dieu pour que tout soit facile. Eh bien non ! Le Jourdain franchi, il faut venir à Guilgal, où le peuple doit subir la circoncision. Ceux qui sont arrivés là, c’étaient les petits enfants. Les adultes étaient tous morts pendant les quarante ans dans le désert, sauf Josué et Caleb. Ces petits enfants ont dû être circoncis à Guilgal. La mort doit passer sur ce qui est de l’homme naturel ; c’est une leçon que nous avons à apprendre toute notre vie. Dieu n’a pas de relations avec l’homme naturel. Dieu ne donne pas sa force à la nature. Dieu donne sa force à l’homme nouveau. Il donne sa force à la foi, mais jamais à la nature.
Le peuple a franchi le Jourdain et, immédiatement après, avant d’entreprendre cette campagne, Dieu s’occupe du peuple. Avant de s’occuper des ennemis, Dieu s’occupe du peuple. C’est une chose bien remarquable. Il faut que le peuple soit dans un état moral convenable, pour entreprendre une conquête qui n’est pas facile. Et Dieu pense à cet état moral du peuple avant que tout combat commence — on pourrait trouver d’autres faits analogues Alors, Guilgal, ce lieu de Guilgal, est établi comme point de départ de toutes les campagnes de Josué. Si vous lisez ce livre, vous trouverez : «Josué retourna au camp à Guilgal» ; «ils retournèrent au camp à Guilgal» (10:15, 43).
Qu’est-ce que cela signifie ? Cela signifie que, dans tous nos combats, dans notre vie privée, dans notre vie de famille, dans notre vie d’assemblée, partout où nous avons à livrer des combats — et nous verrons lesquels — il nous faut, si nous voulons la victoire, revenir toujours à Guilgal, c’est-à-dire appliquer à notre coeur, à notre volonté, la mort de Jésus. Paul appliquait Guilgal continuellement ; nous le voyons plus d’une fois, dans les épîtres. Le secret de la force, c’est la mort. La meilleure arme, dans l’arsenal de Dieu, c’est la mort, la mort de Christ. Voulez-vous être un chrétien fort ? Ne redoutez pas la mort, la mort de votre propre volonté, la mort de Christ appliquée à vous-mêmes. Il suffit d’essayer pour savoir que ce n’est pas facile. Mais il n’y a ni puissance, ni liberté, ni témoignage, sans cela. Nous aurons l’occasion, Dieu voulant, de le souligner.
Au bord du Jourdain se dressait Jéricho, image la plus forte et synthèse de la puissance de l’ennemi. À l’entrée du pays de la promesse, c’était une ville murée jusqu’au ciel. Voilà donc la première chose que le peuple rencontre après le Jourdain. Il était ainsi, humainement, dans une situation terrible : derrière lui le Jourdain, un fleuve infranchissable, et devant lui les ennemis ; rien d’autre. Le peuple de Dieu a toujours été dans des situations extraordinaires. Le chrétien qui marche par la foi est toujours dans des situations extraordinaires. Si nous ne savons pas marcher sur l’eau, nous ne pouvons pas suivre Jésus. Il faut marcher sur l’eau, pour suivre Jésus, c’est-à-dire qu’il faut marcher par la foi. Si nous avons peur des situations extraordinaires, nous ne pourrons pas suivre Jésus.
Le peuple d’Israël est donc ici, ayant le Jourdain derrière et, devant, tout le pays peuplé d’ennemis terribles. Il y avait des géants, des villes murées, devant lui. Notre position est exactement la même. Alors, nous savons comment Jéricho est tombée. Cette ville imprenable est tombée sans coup férir. On n’a pas donné un seul coup pour que ses murs tombent. Elle a été prise d’une manière ridicule, absolument ridicule aux yeux des hommes. La gloire en a été pour Dieu, et non pour le peuple ; il en est toujours ainsi. Jéricho est tombée très facilement. Nous savons tous l’histoire de Jéricho, ici. Le monde chrétien la connaît ; mais la foi y trouve de riches enseignements. Et peut-être cette victoire facile a-t-elle endurci le coeur du peuple, obscurci son discernement spirituel, épaissi sa conscience… c’est bien possible !
Après Jéricho se présente une petite ville négligeable ; c’est la petite ville d’Aï. Nous avons lu ce qui la concerne. Il s’agit de la prendre. Alors on prend conseil. On a mesuré extérieurement la difficulté. Les sages se consultent ; la sagesse pèse et parle. On dit : Aï, il faut trois mille hommes ; trois mille hommes suffiront, ce n’est pas la peine de déranger toute l’armée, de troubler toute l’armée pour Aï. Les trois mille hommes montent et s’en vont vers Aï. Mais que se passe-t-il ? Ils tombent devant les ennemis, ils ne tiennent pas, ils sont battus. «Et le coeur du peuple se fondit et devint comme de l’eau». Voilà le fait.
Mystère, fait inexplicable : ils ont fléchi devant Aï, alors que, pour prendre Jéricho, un jour, deux jours, sept jours, et sept fois le tour ce septième jour, ont suffi… Il y avait des femmes, des enfants. Tous attendaient, sans mot dire. Personne ne dit rien. La parole n’est pas au peuple. Le peuple est là ; son sort se décide. C’est une question de vie ou de mort. Pourtant, on n’entend rien, pas une rumeur, dans cette foule de femmes et d’enfants. Et, fait inouï dans les annales militaires, Dieu l’ayant commandé, au septième jour, les sacrificateurs sonnent des trompettes, le peuple jette des cris, et les murailles tombent. «Par la foi ils ont pris Jéricho» (voir Héb. 11:30). Six jours durant le peuple avait attendu en silence que le miracle s’opérât. Au septième jour, le miracle s’accomplit. Il suffisait de prendre Dieu au mot, de dire : Dieu a parlé, attendons. Comme à la mer Rouge, où le peuple avait le Pharaon derrière et la mer devant, la foi, ici encore, n’a pas été déçue.
Mais alors, pour Aï, quel désastre ! Nous pouvons penser que la nouvelle a traversé tout le camp en un clin d’oeil : les guerriers sont partis, le peuple a fléchi, nous sommes battus ! Ce qu’il y avait de terrible, chers amis, c’est qu’ils avaient été battus — et tous le sentaient, et Josué le premier. Et cela signifiait que Dieu n’était plus là ! Or si Dieu n’était pas avec ce peuple, la position de ce peuple était la plus folle, la plus insensée qui soit au monde. La seule raison d’être de ce peuple, la seule justification de sa position, c’était la présence de Dieu au milieu de lui. Sans sa présence, la position était sans espoir.
Ainsi en est-il de la vie de la foi. Que de fois Dieu nous place dans des positions où, sans lui, nous sommes les plus misérables de tous les hommes ! Avec lui, tout va bien ; sans lui, tout est perdu.
Josué saisit toute la gravité de la situation. Mais on dira: ces trente-six hommes qui sont tombés, ce n’est pas une affaire ! Ce ne sont pas les trente-six hommes qui sont tombés, non plus que les trois mille qui ont reculé, qui font que Josué se jette par terre et déchire ses vêtements. C’est tout autre chose. Josué sent que Dieu n’est plus avec eux, que Dieu les a abandonnés. Voilà le drame. Voilà quelle est maintenant la situation de ce peuple et de Josué lui-même, à qui Dieu avait dit : «Fortifie-toi et sois très-ferme. Je déposséderai le Cananéen, le Phérézien, le Jébusien, je les ferai tomber devant toi» !
Josué n’a sans doute pas dit à tout le peuple ce qu’il éprouvait dans son coeur. Mais il s’adresse à Dieu tout de suite. Il ne réunit pas le peuple pour dire : essayons une deuxième fois, envoyons cent mille guerriers, cherchons l’élite du peuple. Non ; il s’adresse à Dieu, il va trouver Dieu. C’est une affaire entre lui et Dieu, au fond, entre le peuple et Dieu. Qu’on réunisse tous les sages, on ne fera pas tomber Aï. Qu’on réunisse tous les puissants, on ne fera pas tomber Aï. «Dieu n’est pas là ; et, s’il n’est pas là, c’est à Dieu que je vais m’adresser ; il faut à tout prix que je cherche et que je trouve Dieu». Cette scène est de toute beauté.
Que de fois nous ne suivons pas l’exemple de Josué ! Quand nous sentons qu’Aï se trouve sur le chemin du peuple de Dieu, est-ce que notre première pensée, c’est Dieu, c’est Christ ? Ou bien, n’allons-nous pas consulter tous les sages, autant que nous le pouvons ? Est-ce que nous consultons Dieu d’abord ? Si nous ne le faisons pas, nous ne sommes pas fidèles. Nous ne remplissons pas le service que le Seigneur nous a confié. Lorsque quoi que ce soit arrive qui nous exerce, peu ou beaucoup, ce qu’il nous faut chercher et trouver, c’est la face de Dieu.
Il y a des leçons pour nous tous, pour les jeunes, pour les vieux, pour les soeurs, pour les frères et, peut-être, pour eux plus que pour quiconque !
Josué déchire ses vêtements. C’est Dieu qui est contre nous ; et, si Dieu est contre nous, notre position est intenable, nous sommes perdus. Alors nous voyons le dialogue qui s’engage entre Josué et Dieu. Le peuple était une charge pour Josué, comme il en avait été une pour Moïse. Il y avait six cent mille hommes, plus les femmes et les enfants. Puis Josué dit : «Ton grand nom», qu’est-ce qu’on en dira ? Il dit à l’Éternel : Je ne peux pas. On ne peut pas entrer dans tous les détails de cette scène !
Alors Dieu répond. Josué cherche Dieu ; Josué a trouvé Dieu. Il s’est adressé à lui dans la détresse de son âme.
Quand nous sommes dans la détresse, tout est bien. Lorsque nous sommes brisés, c’est très bien. Notre esprit est brisé ; nous sommes en bon état pour trouver Dieu.
Lorsque nous sommes en mauvais état, que nous crions à Dieu, il ne répond pas. Si notre esprit est brisé, nous sommes dans l’état convenable pour trouver Dieu. Lorsque la main de Dieu nous serre et brise les ressorts intérieurs de notre volonté, nous sentons qu’il cherche à nous bénir.
Dieu dit à Josué : Qu’est-ce que tu fais là ? Lève-toi. Tu ne sais pas pourquoi tu es battu ? Je vais te le dire. Josué ne le savait pas ; Dieu va le lui dire. Rien n’échappe à l’oeil de Dieu de ce qui se passe parmi son peuple. Et voilà ce qu’ils ont fait : vous êtes devenus anathème, c’est-à-dire malédiction. Il y a un anathème parmi vous, et tout le peuple est devenu anathème. Ils ont menti, ils ont volé, ils l’ont mis sous leur bagage. Ils ont pris de l’anathème. Et regardez la précision, comme l’oeil de Dieu a suivi tout cela. Dieu aurait pu dire à Josué : Va voir sous telle tente ; tu trouveras ceci et cela. Non, il faut que le peuple soit témoin, que sa conscience soit exercée. Et Dieu travaille pour qu’il en soit ainsi, pour que tout soit révélé.
Le procédé de l’Ancien Testament est alors employé : on jette le sort ; tribu, famille untel, Acan fils de, fils de, etc. Voilà, le peuple est tout entier anathème. Je ne serai pas avec vous. Je me retire d’avec vous. Et, alors que je vous ai dit : Vos ennemis se fondront devant vous, c’est vous qui fondrez devant vos ennemis. C’est exactement ainsi que les choses vont, aujourd’hui, pour nous. Il ne faut pas nous imaginer que, parce que nous sommes chrétiens et frères, ce n’est pas pour nous.
Un interdit ! Le peuple est interdit ; l’interdit est dans le peuple de Dieu ! Un péché produit de l’interdit pour tout le peuple de Dieu. Un péché dans une famille peut produire de l’interdit dans la famille, toute la famille. Un péché chez un frère ou une soeur produit de l’interdit dans toute l’assemblée. On dira : Oh, cela ne regarde que moi ! Mais c’est ce qu’aurait pu dire Acan. Telle n’est pas la pensée de Dieu. Dieu ne dit pas cela. Tout le peuple est interdit ; et, si vous ne vous débarrassez pas d’Acan, je me débarrasserai de vous. Voilà ce que cela revient à dire.
Chers amis, nous savons bien que nous sommes sous la grâce, aujourd’hui. Mais la gloire de Dieu peut-elle briller moins sous la grâce que sous la loi ? Au contraire, elle doit briller davantage. Et non seulement cela, mais notre conscience doit être beaucoup plus délicate que celle des fils d’Israël. Dans l’ensemble, le peuple n’était même pas converti. Beaucoup d’entre eux n’étaient même pas des croyants. S’il y avait là un interdit, à plus forte raison l’interdit peut-il exister parmi nous pour beaucoup moins de choses.
Voilà Acan qui est désigné nommément. Quelle solennité, quelle beauté dans le langage de Josué : «Mon fils, donne gloire à l’Éternel et rends-lui louange». Chers amis, on n’aurait jamais attendu de pareilles paroles ! «Mon fils, donne gloire à Dieu». Quel est ici le moyen de donner gloire à l’Éternel et de lui rendre louange ? Est-ce de chanter des lèvres ? C’est de dire la vérité. «Mon fils, donne gloire à Dieu».
C’est en disant la vérité qu’on donne gloire à l’Éternel et qu’on lui rend louange. Souvenons-nous-en, frères et soeurs. Ce n’est pas en l’honorant des lèvres quand le coeur est fort éloigné de lui. La vérité ! Ce qui honore Dieu, c’est la vérité. C’est comme si Josué disait à Acan : Je t’adjure. Il fait appel à la parole d’adjuration, dont il est parlé autre part. Le Seigneur a été adjuré au moment où il allait à la croix. Il a dit ce qu’on lui demandait.
«Mon fils»… Ah, Acan ne peut pas se dérober ! «Mon fils, donne gloire…». Avons-nous, chers amis, ce souci de cette forme de louange à l’Éternel : la vérité ?
Ils ont menti, est-il écrit. Josué, à ce moment-là, ne connaissait sans doute pas tous les détails de l’affaire. Mais, même s’il les connaissait, il fallait la confession ouverte, franche, totale, d’Acan, pour que Dieu fût glorifié.
Eh bien, chers amis, une pareille scène, on ne peut prétendre la reproduire, la reconstituer. Mais soyons sûrs que nous avons à faire à un Dieu qui sait si nous lui rendons louange ou non. Dieu le sait. Dieu s’en souvient ; et il n’agira pas avec quelqu’un qui lui rend louange comme s’il ne le faisait pas. Il nous arrive souvent, chers amis, de cacher telle ou telle chose, et de dire : Après tout, cela passera bien. Mais nous avons à faire à Dieu. Voulons-nous la bénédiction dans nos familles, dans nos foyers — je dis cela, chers amis, dans nos foyers ? «Mon fils, donne gloire à l’Éternel et rends-lui louange».
Lorsqu’une épreuve arrive dans nos foyers (il y a différentes formes d’épreuves, et toutes les épreuves n’ont pas la même origine ; il ne faudrait pas croire que toutes les épreuves soient des châtiments ; ce n’est certainement pas vrai ; mais nous ne traitons pas aujourd’hui la question de la discipline et des épreuves), lorsque quelque chose nous arrive qui nous fait sentir que Dieu se retire de nous, ou se retire de notre foyer, qu’avons-nous à faire ? Dieu nous dit : «Mon fils, donne gloire à Dieu» ! Voulons-nous que la malédiction s’arrête et que la bénédiction arrive ? Alors c’est ce qu’il nous faut faire. On dira : après tout, tout s’arrangera ! Jamais.
J’insiste en grâce — le Seigneur sait que c’est en grâce — parce que je crois que nous méconnaissons que la façon d’honorer Dieu, c’est d’être vrais devant lui. Et nous oublions que ce que nous faisons dans nos foyers, ce que nous disons, même ce que nous pensons, si nous ne le disons pas, n’échappe pas à l’oeil de Dieu. Et Dieu établit un interdit dans notre foyer, dans notre famille, dans l’assemblée. Et tant que nous n’avons pas ouvert notre coeur et dit, comme Acan : «J’ai péché ; voilà ce que j’ai fait, voilà exactement ce que j’ai fait», nous ne saurions prétendre, chers amis, à la bénédiction de Dieu !
Ah, chers amis, nous vivons trop pour les frères seulement. Nous ne vivons pas assez pour Dieu. Si le péché d’Acan n’avait pas été jugé, le peuple aurait été consumé sur place ! Et un fait non jugé dans notre vie, vingt ans après, est vivant pour Dieu. Pensons au gouvernement de Dieu.
J’ai les frères ou je ne les ai pas. Est-ce que j’ai Dieu ? Si j’ai Dieu, j’aurai les frères ; mais Dieu d’abord. Nous mettons toujours Dieu à la deuxième place. Oh, chers amis, si nous vivions près de Dieu ! Que le Seigneur nous permette de dire : Seigneur, ce que tu voudras, pourvu que je t’aie toi-même, comme tu voudras, où tu voudras ; être avec toi, Seigneur, et tout va bien. Mais tous les frères du monde ne nous donneront pas cette assurance, je l’ai dit, et j’en suis de plus en plus persuadé.
Je supplie les frères de ne pas se séduire eux-mêmes et de ne pas chercher les voix de tels ou tels partisans, qui ne font que leur rendre un mauvais service, parce qu’elles leur cachent Dieu. Et il faudra avoir affaire à Dieu, une fois ou l’autre.
Lorsque nous aidons notre frère, un frère que nous aimons, un frère qui est ce que nous aimons le plus au monde — ce sont les frères que nous aimons le plus au monde — lorsque nous le voyons dans une situation de mensonge, nous ne devons pas l’aider à persévérer dans cette position de mensonge. Nous devons lui dire : Mon fils — en tête-à-tête, s’il le faut, ou autrement — ne recule pas, donne gloire à l’Éternel et rends-lui louange. Tu veux être béni ? Voilà le chemin. Il n’y a pas deux chemins !
Oh, combien il faut que nous nous encouragions de ce côté-là, chers amis ! Il nous faut lire beaucoup la Parole. Il y a des frères et des soeurs très droits. Il nous faut lire la Parole, pour que cette droiture soit mise en exercice avec intelligence spirituelle, et que vraiment nous marchions dans le chemin de Dieu.
L’interdit, l’anathème, cela existe. L’interdit, dans une vie de chrétien, c’est terrible : pas Dieu ! Qu’est-ce que c’est qu’un chrétien qui n’a pas Dieu avec lui ? Qu’est-ce qu’un foyer où on ne jouit pas de Dieu ? C’est une situation comme ici : Jourdain derrière, ennemis devant. «Car notre lutte n’est pas contre le sang et la chair, mais contre les principautés… la puissance spirituelle de méchanceté qui est dans les lieux célestes» (Éph. 6:12). Notre lutte est contre le diable et ses anges. On dira : Oh, moi, je ne veux pas avoir affaire au diable ! Il ne vous demandera pas votre avis. Et, si vous êtes charnel, il ne vous manquera pas. Si vous êtes mondain, il ne vous manquera pas. Vous ne voulez pas avoir affaire à lui ? Mais il a des droits. Il n’y a qu’un état sur lequel il n’a pas de droits, c’est l’état de quelqu’un qui réalise parfaitement la mort, qui porte dans le corps la mort de Jésus. Cet homme, qui est comme un mort dans la vie de ce monde, ne donne pas de prise à Satan. Mais si vous êtes mondains, si vous êtes charnels, vous donnez prise à Satan. Il ne vous ignorera pas ; il tombera sur vous. Vous serez pris à l’improviste, et il vous entraînera dans des défaites. Le savons-nous, oui ou non ?
L’histoire — sans remonter à l’histoire d’il y a deux mille ans — des contemporains, et celle toute récente même, ne nous démontre-t-elle pas la réalité de ces déclarations, que Satan nous saisit à l’improviste ? Nous ne veillons pas ; il nous saisit. Il a des droits sur la chair. Pourquoi ? Parce que l’homme est tombé, et que Dieu a permis ce châtiment gouvernemental qu’il a confié à Satan. Il a le pouvoir de la mort, et Satan a des droits sur la chair. Les choses sont ainsi.
Les gens du monde se moquent, ils plaisantent sur Satan. Ils ont son nom sur les lèvres. Ils ne savent pas qu’ils en sont les esclaves, en faisant cela. Tandis que le chrétien, instruit par la Parole, tremble. Michel, l’archange, dit : «Que le Seigneur te censure» (Jude 9), en parlant de Satan.
Alors je crois que nous avons oublié, méconnu, ce côté de notre vie chrétienne, le côté du combat. Que nous le voulions ou non, nous sommes des soldats, des combattants, nous sommes engagés dans la lutte. Par définition même, un chrétien est un combattant. Il y a des combattants, il y a des déserteurs, il y a des traîtres. Un chrétien mondain est coupable de haute trahison. Nous savons ce qu’on fait, dans le monde, dans un cas de haute trahison.
Chers amis, voilà donc Acan qui a ouvert son coeur : «Mon fils, donne gloire à Dieu» ! Nous pouvons être certains que l’origine de beaucoup de nos faiblesses, de nos défaillances, de nos langueurs, dans notre vie privée, dans notre vie de famille, d’assemblée, vient du fait que des interdits s’établissent. Comment ? On ne fait pas forcément ce qu’Acan a fait. Qu’a-t-il fait ? Il a menti et volé. Dieu avait dit : Ces villes, il faut les détruire ; pas de quartier. C’est ce que nous trouvons continuellement. Et, si vous vous alliez avec eux, d’une façon ou d’une autre, quelque alliance que vous fassiez, ils seront une épine pour vos yeux.
Chers amis, faisons-nous le compte des épines que nous avons, que le Seigneur a placées parmi nous à cause de nos infirmités ? Et puis Dieu les laisse. Vous avez voulu du monde ? Vous en aurez. Vous avez voulu de la chair ? Vous en aurez, et vous en aurez toute votre vie. Le témoignage en aura jusqu’au bout. Sans aucun doute, nos frères, autrefois, transigeaient beaucoup moins. C’est Dieu ou non. C’est la faiblesse ou c’est la force. Si c’est la faiblesse, rejetons cela.
Il faut que chacun de nous pense beaucoup à sa famille. Il n’est pas dit que chacun y pense toujours dans le vrai intérêt de celle-ci ! Le vrai intérêt d’une famille, c’est d’engager chacun à dire : «Mon fils, donne gloire à Dieu et rends lui louange» dans la vérité ; marche dans la vérité ; vis dans la lumière — pas de ténèbres ni de mensonge.
Le Seigneur nous demandera d’ouvrir notre porte-monnaie. Le geste est facile. Mais, lorsqu’il s’agit d’ouvrir notre coeur pour la confession devant Dieu, le geste est bien plus difficile. Il y faut un autre exercice de foi. Aussi, quand Dieu nous parle du coeur et très peu du porte-monnaie, il sait bien ce qu’il fait. Combien il faut nous encourager de ce côté-là !
Le Seigneur attire notre attention sur ce point : l’intérêt de nos frères, de nos familles, de l’assemblée, c’est de produire, de faire jaillir cette confession : «Mon fils, donne gloire à Dieu». Oh, que Dieu grave les mots de Josué à Acan dans tous nos coeurs ! Et qui est Josué aujourd’hui ? Le vrai Josué, c’est Christ. Il a fait traverser le fleuve de la mort et il fait entrer le peuple dans le pays de la promesse. Si nous voulons subsister devant Satan qui nous guette, qui poursuit le peuple et qui le harcèle, il nous faut la vérité, la lumière, la sainteté. Est-ce que nous pensons à cela, quand nous parlons chez nous, quand nous parlons entre nous ? Est-ce que nous pensons à la vérité de Dieu et à la gloire de Dieu ? Est-ce que nous avons ce souci-là ? Mais l’assemblée, mais cette famille, mais ces amis… est-ce que nous avons ce souci-là ? Dieu sonde et Dieu entend tout, et Dieu sait tout. Les frères utiles et les soeurs utiles, ce sont ceux qui parlent beaucoup à Dieu et, à l’occasion, à leurs frères et à leurs soeurs, de la bonne manière, dans la lumière.
Si le peuple de Dieu souffre et si le peuple de Dieu est battu, comme il l’est si souvent, en voilà les causes : des interdits. «Si vous vous mordez et vous dévorez l’un l’autre» (Galates 5:15) (voir les épîtres aux Galates et Corinthiens). «Celui qui hait son frère est un meurtrier» (1 Jean 3:15). La haine est égale au meurtre.
Est-ce que nous nous encourageons à nous aimer ? Est-ce que nous prions les uns pour les autres ? Est-ce que, lorsque nous prions, aucun nom n’arrête notre prière ? Pourrions-nous mettre, dans notre prière, les noms de tous ceux qui composent ce rassemblement, sans réserve, à l’instant même ? Pouvons-nous faire cela ? Chers amis, c’est le moment d’entendre ce que dit Josué : «Mon fils, donne gloire…». Oh, ce n’est pas facile, nous le savons ! Mais jamais Dieu n’a dit que le chemin du chrétien était un chemin facile. C’est un chemin où il faut commercer à se fouler soi-même au pied. Vous n’avez jamais vu quelqu’un qui le fasse de bon coeur. Mais, grâce à Dieu, il y a, dans cette attitude, une qualité de joie, une valeur de communion avec Dieu, qui font oublier toutes les amertumes. Et c’est, d’autre part, le secret du progrès.
Combien je désire que le Seigneur bénisse ce verset pour nous tous. Les frères ont des exercices. Il y en a qui en ont plus que d’autres, certainement. Mais lorsque de l’interdit se présente, qu’une difficulté surgit, la chose que nous avons à faire, c’est de nous jeter sur nos faces devant Dieu. Est-ce que nous prions le Seigneur, est-ce que nous le supplions ? Évidemment, les supplications peuvent avoir des valeurs très différentes. La Parole dit : «La fervente supplication du juste peut beaucoup» (Jacq. 5:16). Il y a deux conditions : il faut qu’elle soit fervente, et qu’il s’agisse d’un juste. Un juste, c’est quelqu’un qui marche dans la justice, qui voit ce qui est juste aux yeux de Dieu, qui plaît à Dieu dans sa vie. Cet homme, Dieu l’entend. Combien nous devrions nous encourager dans ce sens-là.
Mais il ne faut pas non plus que nous pensions que ce sont des faits spectaculaires, grossiers, qui jettent nécessairement de l’interdit. Il y a des faits bien plus subtils : ce qu’on pense de tel ou tel frère, ce qu’on dit de lui. Ce qu’on pense, Dieu le sait. Ce qu’on dit, des oreilles l’entendent, et Dieu le premier. Si c’est une chose qui est mauvaise, c’est un péché pour Dieu, et pour le fidèle qui entend cela. Il y a donc des péchés répandus parmi le peuple de Dieu. C’est de l’interdit. On dira : Mais nous périssons tous ! Si nous voulons Dieu avec nous, voilà l’exercice !
Il serait bien plus facile d’avoir un arrangement humain, une organisation, toute une administration humaine. Ce serait très facile. Il y aurait un conseil d’administration. Le conseil couvrirait la plupart des cas, arrangerait les choses pour le mieux, et on aurait des docteurs selon ses convoitises. C’est ce qui se fait. Un conseil d’administration dans les choses de Dieu, cela existe. On se demande comment on peut en arriver à de pareilles folies. Et puis, on en vient à s’amasser des docteurs selon ses propres convoitises. On peut avoir, quelque part, des docteurs, peut-être très savants, sans doute. Mais Dieu ne dit pas : des docteurs selon leurs besoins intellectuels ; il dit : «des docteurs selon leurs propres convoitises» (2 Tim. 4:3). Les convoitises du savant, de l’ignorant, du riche et du pauvre, c’est ce qui mène le savant, l’ignorant, le riche et le pauvre.
Alors, lorsque nous avons des exercices, frères et soeurs, et frères en particulier, cherchons et écoutons la voix de Dieu. Rendons gloire à Dieu. Et puis, il y a bien un enseignement spécial pour nous, afin que nous évitions, avec exercice, toutes causes d’interdit. Nous sommes sûrs que personne n’a, d’un coeur léger, pris une pierre, et jeté une pierre à Acan et à toute sa famille. Tout le monde y a passé, mais nous pouvons penser que ça n’a pas été sans souffrance et sans larmes. Toutefois, c’était l’ordre de Dieu. Je ne fais pas une application du fait — je n’en vois pas, il ne s’agit pas d’appliquer cela à la lettre. L’application à faire, c’est de juger le mal. Une mauvaise parole, une médisance, une calomnie, cela fait du mal au peuple de Dieu, d’une façon que Dieu connaît.
Paul le savait bien : «calomniés, nous le supportons» (1 Cor. 4:12-13). Il le supportait. Mais, lorsqu’il s’agit du mal fait au peuple de Dieu, des ravages que cela fait au peuple de Dieu, alors c’est incalculable. Celui qui calomnie ou qui médit, qui est à l’affût de cela (et si nous ne veillons pas, nos coeurs et nos lèvres sont vite en activité de ce côté-là), qu’il lise au livre des Proverbes : «Celui qui va rapportant divise les intimes amis» (16:28, comparer 17:9). Les frères, en particulier, doivent être très sages de ce côté-là, sobres de paroles, pesant leurs paroles, gardant leur coeur, donnant la parole dite en son temps et qui est bonne. Et encore une expression, dont je ne crois pas qu’il y en ait de supérieure, c’est : «la parole qui communique la grâce à ceux qui l’entendent» (Éph. 4:29). Quand nous voyons un frère triste ou abattu, ou conduit par telle ou telle pensée, avons-nous à coeur qu’il retrouve la communion du Seigneur ? Si nous étions fidèles, notre parole communiquerait la grâce à ce frère.
Le jugement est consigné, l’affaire est réglée. Acan est lapidé avec tous les siens. Il n’y a pas de compromis. Que d’exercices il y a, dans le peuple de Dieu. Il a eu affaire à beaucoup de difficultés. Il y avait Josué, et il y avait de la puissance. Ils ont eu affaire avec Aï parce qu’ils n’ont pas consulté Dieu. Les Gabaonites arrivent avec du pain moisi, et ils étaient à trois jours de là. C’est une ruse, et Josué se laisse prendre, et tous les anciens ; et ils étaient sages ! Voyez où est la sagesse de tous les frères ensemble. Ils n’ont pas consulté Dieu.
Chers amis, il nous faut beaucoup consulter Dieu, et vivre près de lui. On peut se servir de la Parole de Dieu pour soutenir toutes les causes. Toutes les sectes sont fondées, en apparence, sur des passages de la Parole de Dieu. La Parole en main, on peut soutenir les plus grandes hérésies. Prenons garde. La grande affaire, c’est d’être dépendants de Celui qui donne la parole, le passage, la pensée qu’il faut, au moment même et pour la circonstance même. C’est ce qui est difficile à réaliser. Mais, sans cela, on peut se battre avec des versets de la Parole, sans que la lumière jaillisse. Voilà la difficulté pratique de la vie du peuple de Dieu.
Il y a un nom qui est resté : Acor, trouble. «Comme tu nous as troublés».
Le peuple repart. Il prend Aï, mais avec beaucoup plus de peine que s’il était parti par la foi. Que le Seigneur nous encourage à beaucoup prier les uns pour les autres, pour les frères.
Lorsqu’un cas se présente, quel qu’il soit, ne disons pas : Qu’est-ce que je pense ? Ce n’est pas cela qui compte, mais bien : Qu’est-ce que le Seigneur pense ? Seigneur, où est ton chemin ; à tout prix, où est-il ?
Que le Seigneur nous encourage à rechercher une marche sérieuse. Et qu’il nous donne, dans nos vies, au cours de la semaine, de prier les uns pour les autres, et de ne pas parler les uns contre les autres, de ne même pas penser les uns contre les autres. Il est bien triste que des chrétiens de l’épître aux Éphésiens — c’est à eux qu’il est dit des choses de ce genre-là — dont il est dit qu’ils sont assis dans les lieux célestes en Christ, soient comme un calomniateur, un malfaiteur. Nous trouvons cela, dans cette épître.
Ne prenons donc rien à la légère, mais bien tout au sérieux. C’est-à-dire, prenons tout dans la présence de Dieu. Vivons avec Jésus ; recherchons sa communion ; jouissons de cette communion, et prions beaucoup pour qu’il n’y ait pas d’interdit dans l’assemblée, de sorte que l’Esprit agisse. Si le Saint Esprit n’agit pas, qu’est-ce que nous sommes ? Nous sommes des misérables, pris entre Aï et le Jourdain, entre tous les peuples guerriers qui sont là et le Jourdain. Nous sommes pris, pour ainsi dire, entre Satan et la mort, si le Saint Esprit n’est pas parmi nous. Mais, lorsque le Saint Esprit est là et agit, nous jouissons de la communion avec le Père et avec son Fils Jésus –Christ, et de la communion les uns avec les autres.
Nous pouvons prier (que les soeurs prient et supplient le Seigneur) pour que les frères n’aient aucun parti pris, qu’ils soient des hommes de Dieu et se tiennent là pour Dieu, pour Dieu d’abord — toujours Dieu d’abord. Que, lorsqu’une difficulté surgit, les frères n’aient pas de parti pris. N’y a-t-il pas un, deux ou trois frères à qui on puisse s’ouvrir ? C’est effrayant, de penser à cela.
Le Seigneur est avec nous. Le Seigneur ne nous a pas abandonnés. Quel bonheur d’y penser ! Justement parce qu’il est là, soyons exercés. Quand nous sommes devant une situation difficile, dont on se demande ce qu’elle peut bien être, jetons-nous sur notre face devant le Seigneur. Et ce que le Seigneur dira, faisons-le. Mais ce n’est pas facile de chercher la pensée du Seigneur sans arrière-pensée, sans parti pris. C’est loin d’être facile. Notre coeur est un abîme. Faire taire, étouffer toutes les voix de notre coeur, c’est seulement dans la présence de Dieu que nous pouvons le faire.
Que le Seigneur nous donne à tous, frères et soeurs, de veiller, de prier, pour qu’il n’y ait pas d’interdit dans notre vie individuelle, dans notre vie de famille, dans notre vie d’assemblée. S’il y a de l’interdit, disons : Seigneur, mets le doigt sur la plaie. Qu’est-ce que j’ai fait ? Qu’est-ce que j’ai fait en famille, en assemblée ? Et ne partons pas, ne continuons pas avec de l’interdit caché dans notre bagage : «Mon fils, donne gloire à l’Éternel, et rends-lui louange».
[LC n° 21]
Dimanche après-midi 10 octobre 1948
Méditations sur la vie chrétienne, édition FR 1995, p. 57
Dans le livre des Juges, c’est la décadence. Le peuple d’Israël a pris l’habitude d’aller de chute en chute ; un déclin, une détresse, on a perdu Dieu, on n’a plus rien ; on crie à Dieu, Dieu répond, Dieu délivre et on recommence : déclins successifs mêlés de restaurations partielles. N’est-ce pas ce qui nous caractérise aujourd’hui ? Dans le livre de Josué, on ne voit pas cela, pas du tout ; il y avait alors une progression continue ; peut-être quelques échecs : tel ennemi, tel Philistin, n’a pas pu être chassé de tel endroit, les Jébusiens, par exemple, qui sont restés très tard à Jérusalem ; mais, dans l’ensemble, une avance continue. À chacun de nous de se demander quel caractère porte sa vie : suite de déclins entremêlés de restaurations, ou progression de force en force par celui qui nous a aimés ?
Lorsque les Philistins avancent — et il est facile de transposer la pensée dans le domaine chrétien — c’est à notre honte : ce n’est pas normal. Toutes les fois que le monde gagne du terrain sur moi, que j’aime quelque chose dans le monde, quelque chose a pris mon coeur, je suis battu. Je ne le dis à personne peut-être, mais Dieu me le dira et je serai dans la détresse. Dieu use de grâce, mais si certains tablent sur la miséricorde illimitée de Dieu pour penser que Dieu entendra toujours, qu’ils lisent la fin des Juges ! C’est l’un des passages les plus sombres de l’Écriture. Dieu ne relève pas et ne ramène pas au même point. On ne se moque pas de Dieu. Une chute, lorsque nous ne nous jugeons pas, lorsqu’il n’y a pas un travail de Dieu profond, risque de laisser une trace, la marque de la victoire de l’Ennemi. Si je marche avec la lumière que Dieu me donne aujourd’hui, il me donnera une autre lumière demain ; mais si je ne marche pas avec la lumière qu’il me donne aujourd’hui, demain il me retirera cette même lumière.
Madian venait et ravissait toutes les récoltes : c’est l’image de l’Ennemi qui vient et empêche que Dieu bénisse son peuple. Lorsque, dans une journée, au long d’une semaine, l’Ennemi nous a détournés par ceci ou par cela, il nous a fait perdre la joie avec Dieu, il nous a ôté notre pain et nous sommes dans la disette. Nous continuons peut-être comme si nous avions bien mangé, mais nous n’avons plus les mêmes forces, car il faut que nous nous nourrissions continuellement du pain que Dieu nous a donné.
Madian vient et ravit tout. Si Dieu écrivait l’histoire de son peuple actuel, et d’une assemblée locale, et d’un chrétien individuellement, on verrait combien de fois Madian a passé par là et a laissé le peuple de Dieu dans le dénuement. Toutes les fois que notre âme a faim et a soif et qu’elle ne jouit pas de la communion avec Dieu, Madian a passé par là.
Il y eut, plus tard, une circonstance semblable : au temps de Samuel, le peuple de Dieu n’avait plus d’armes ; il fallait les aiguiser chez les Philistins (1 Sam. 13, 19-22). C’est ce qu’a fait l’Église professante, elle a demandé sa force au monde. Elle n’avait plus la force de Dieu, la puissance de l’Esprit de Dieu, et pour conserver son prestige et son autorité, elle a fait appel au pouvoir temporel ; elle a fait appel aux grands de ce monde. Quand Dieu retire sa force à son peuple ou à un chrétien, ce peuple ou ce chrétien font toujours appel aux forces extérieures pour ne pas perdre leur prestige ; cela nous guette tous !
Souvent un chrétien trouve, pendant un temps, sa force et sa joie en Dieu, et puis Dieu ne lui suffit plus et il cherche son plaisir dans le monde. Le chrétien devient alors une anomalie affreuse, parce que, d’un côté, il se proclame le témoin de Christ et, d’un autre côté, il déclare qu’il est bien vivant dans le monde et pour le monde. Qu’il nous soit donné de ne pas nous laisser ravir notre nourriture ! Prions et lisons la Parole tous les jours, même s’il n’est pas toujours facile d’allier les devoirs de la vie matérielle et les exigences spirituelles !
Le peuple crie à Dieu, Dieu répond (6:7-10). Mais avant d’intervenir, il parle à sa conscience ; il lui envoie un prophète et lui dit : Il y a bien longtemps que je t’ai annoncé ce qui t’est arrivé, et tu n’as pas écouté. Avant de faire un travail pour nous, Dieu fait un travail en nous. Avant de nous délivrer, avant de mettre de l’ordre dans notre vie quand l’Ennemi y a mis du désordre, Dieu veut mettre de l’ordre dans notre coeur. Aujourd’hui il n’envoie plus un prophète, comme il le faisait en Israël ; c’est la Parole qui remplace le prophète. Dieu veut qu’on soit droit, que son peuple convienne qu’il n’a pas écouté la voix de Dieu, qu’il a traîné le nom de Dieu dans le déshonneur, qu’il a péché contre Dieu en associant son Nom à ses péchés. Pour retrouver la communion, confessons à Dieu ce en quoi nous avons manqué ! Et il arrive qu’une confession devant les hommes soit nécessaire, s’il y a eu péché devant les hommes : il faut que la confession atteigne Dieu et ceux qui ont été touchés.
Pourquoi les restaurations sont-elles si rares et souvent si lentes ? Parce que les confessions sont incomplètes et qu’on ne les favorise pas. Si nous voulons aider quelqu’un que nous aimons, aidons-lui à ouvrir sa plaie, aidons-lui à ne rien cacher ! On nous dira : «Dieu le sait bien». Mais Dieu veut que vous le lui disiez, que vous montriez que vous êtes d’accord avec lui. Il faut que vous l’honoriez en jugeant ce que vous êtes et ce que vous avez fait, comme lui le juge. Vous ne pouvez pas avoir de communion sans cela. «Deux hommes peuvent-ils marcher ensemble s’ils ne sont pas d’accord ?» (Amos 3:3). De même, nous ne pouvons pas marcher avec Dieu si nous ne sommes pas d’accord avec lui.
Si nous avons eu le bonheur de connaître des frères ou des soeurs âgés et sérieux, nous avons pu être frappés de la manière dont ils prenaient garde aux détails dans leur vie personnelle. La crainte de Dieu, le désir d’être devant Dieu et au large avec lui, passaient avant tout autre chose. Que Dieu nous fasse la grâce de marcher ainsi !
Gédéon entre en scène. Avant de l’appeler, Dieu avait travaillé en lui. Gédéon a eu du courage. Que de fois il a mis sa vie dans la main de Dieu : il a risqué se vie, il l’a exposée pour sa gloire ! C’est Dieu qui lui a donné ce courage. Plus d’une fois, certainement, «son coeur fut agité… comme les arbres de la forêt sont agités devant le vent» (És. 7:2).
Gédéon met à l’abri ce que les Madianites voulaient ravir : il n’accepte pas le triomphe de l’ennemi. Voilà une preuve de spiritualité et de piété ! Lorsque nous voyons un ou plusieurs frères, et peut-être l’assemblée, ravagés par l’Ennemi, si quelqu’un dit : «Oh ! Dieu guérira, Dieu s’en chargera», ce n’est pas la preuve du travail de Dieu en celui qui parle ainsi ! Gédéon aurait pu faire comme tout le monde, après tout. Mais il n’accepte pas cette sujétion du peuple à Madian. Eh bien ! Vous verrez que c’est un caractère de la foi, dans toute l’Écriture, de ne pas accepter la domination de l’Ennemi. Bien souvent la foi paraît absolument insensée ; Gédéon n’avait pas le nombre avec lui, et souvent il a été seul.
Ce n’est pas normal que l’Ennemi ait l’air d’être plus fort que Dieu. Toutes les fois que la foi est réveillée dans un homme, elle dit : «Non, nous ne pouvons pas tolérer que l’Ennemi ait le dessus sur le peuple de Dieu». Alors on crie à Dieu. Gédéon ne commence pas par agir, mais par montrer qu’il n’a pas pris son parti de la situation. Josué non plus, quand il dit à ses chefs de milliers : «Approchez-vous, mettez vos pieds sur les cous de ces rois» (Jos. 10:24). Il n’y a pas d’équivoque, quand on voit de quel côté se trouve la gloire de Dieu. Certains diront peut-être : «Où est la charité ?» : «Mettez vos pieds sur les cous de ces rois» ! L’Ennemi auquel nous avons affaire ne nous ménagera pas, et nous n’avons pas à le ménager. Il se sert de qui il veut, quelquefois d’un frère, souvent du monde, toujours de la chair. Mais si nous sommes en bon état, nous saurons mettre le pied sur le cou de ces rois, non pas de simples soldats, mais des rois puissants, élevés. Voilà la part du peuple de Dieu. J’espère que personne n’a dit dans son coeur, en face de telle défaillance : «Il faut en prendre son parti». Ce n’est pas la foi qui parle ainsi ; la foi n’accepte pas la défaite du peuple de Dieu.
Qu’est-ce que Dieu fera ? Gédéon n’en sait rien. Il ne savait pas tout ce que Dieu avait préparé pour lui ; il allait avec la crainte de Dieu et l’amour du peuple de Dieu. Nous sommes tous responsables, dans une mesure, de ce qui se fait dans le peuple de Dieu ; lorsque nous voyons que l’Ennemi le bat en brèche, parlons à Dieu de son propre peuple, demandons-lui de le relever !
Gédéon rencontre Dieu. Dieu le regarde et Gédéon soutient son regard ; mais un homme qui n’a pas rencontré Dieu tremble. Gédéon aura peur, dans la suite, mais il est engagé. C’est dans la mesure où nous aurons rencontré Dieu que, en présence des difficultés, nous ne prendrons pas de décision charnelle. Alors que tout le monde tremble, Gédéon a Dieu avec lui. C’est le propre de la foi. Certains croyants ont besoin de milliers de croyants avec eux pour se sentir forts. Mais, à l’épreuve, l’hésitation s’empare d’eux, ils ne voient plus le chemin, ils ne savent plus que faire, ils sont affolés. Si nous avons une confiance pure, nous ne serons jamais indécis ; quand nous sommes indécis, c’est que Dieu ne nous a pas regardés.
Une fois engagée, l’affaire de Gédéon était très sérieuse ; il risque la vie du peuple et la sienne. Si ce n’est pas une victoire totale, ce sera une défaite écrasante. Il faut la foi : partir avec Dieu, continuer avec Dieu, aller jusqu’au bout avec Dieu. Mais au départ, il y a eu ce regard avec lequel l’Ange de l’Éternel a soupesé, pour ainsi dire, la valeur morale et spirituelle de Gédéon ; et c’est Dieu qui l’avait formé ainsi.
Certains disent : «Je verrai aux résultats si j’ai bien marché». C’est être conduit par la bride et le mors (Ps. 32:9), par les circonstances. La seule sécurité, c’est d’être conduit par le Saint Esprit. Que ce soit difficile, c’est certain ; mais le principe est là.
Gédéon, tremblant, demande des preuves (c’est une faiblesse de la foi), et Dieu, dans sa grâce, les lui accorde. Mais ses actes de foi sont extraordinaires. Quelqu’un oserait-il se lever pour dire qu’il a fait, étant chrétien, ce que Gédéon a fait ? D’abord Dieu lui dit : «Il faut aller chez ton père ; dans la maison de ton père, il y a un autel à Baal (un autel à Baal dans la maison du père de Gédéon !). Avant que tu montres ta force devant Madian, il y a des victoires à remporter beaucoup moins loin, à portée de ta main ; c’est la première épreuve à laquelle tu vas être soumis. Je ne peux pas t’aider tant qu’un autel à Baal est dressé dans la maison de ton père ; je ne puis pas supporter cette équivoque. Renverse l’autel, prends le taureau de ton père et offre-le en holocauste sur le bois de l’ashère que tu auras coupée». Avant, on avait dit à Gédéon : «Honore ton père et ta mère», mais Dieu vient lui dire : «Va dans la maison de ton père, et renverse l’autel». Gédéon prenait un risque de la part de son père et de tous les idolâtres. Il trouve quand même dix personnes pour venir avec lui. Était-ce un manque de foi ? Aurait-il dû aller seul ? Je ne sais pas. C’est une mise à l’épreuve. Ne pensons jamais que Dieu nous donnera une victoire en public avant que nous n’ayons remporté ses victoires dans le secret ! Et la première mise à l’épreuve est la plus difficile ; tous y ont passé.
Gédéon aimait l’Éternel plus que son père. «Celui qui aime père ou mère plus que moi, n’est pas digne de moi» (Matt. 10:37). Il agit pour Dieu et non pas pour ses caprices ou pour ses passions. Dans notre vie chrétienne, il y a des moments où Dieu met tout en balance : Dieu d’un côté et tout le reste de l’autre. Bien des fois, par souci de nos aises, pour continuer un petit train-train bien tranquille, nous jetons Dieu derrière notre dos (Éz. 23:35), selon ce que dit le prophète. Qu’il faille la foi pour aller de l’avant, c’est sûr. Gédéon a agi par la foi, autrement Dieu ne l’aurait pas approuvé.
Dieu a voulu associer quelques hommes à la victoire de Gédéon. Gédéon sonne de la trompette pour assembler les Israélites ; il en vient environ trente mille. On est bien content quand il y a beaucoup de monde. Mais Dieu dit : «Non, ils croiront que c’est eux qui ont remporté la victoire ; on va faire une épuration. Je te les épurerai». Après deux épurations, il en reste trois cents qui avaient l’intelligence de la pensée de Gédéon. Ils ne pensaient qu’à une chose, la bataille. Ils ont bu l’eau en passant ; les autres, qui ont cherché leurs aises, ne pouvaient pas remporter la victoire. Le principe est le même aujourd’hui. Laper l’eau, c’est suivre le vrai Gédéon, avoir le coeur continuellement engagé pour Christ et son peuple. Le Seigneur savait qui il choisissait. Déjà, dans le Deutéronome (20:8), il était dit : Si quelqu’un est dans telle circonstance et qu’il tremble, qu’il reste en arrière, on n’a pas besoin de lui ! Dieu a toujours remporté ses victoires avec des hommes décidés ; trente mille, c’est un embarras pour Dieu. Moins un homme est spirituel, plus il se glorifie de ce dont il n’a pas le droit de se glorifier.
Si nous voulons suivre Christ, nous sommes mis à l’épreuve. Il ne s’agit pas de jeter par la fenêtre tout ce que nous possédons ; il s’agit de laisser Dieu travailler dans notre coeur, tous les jours, sans cesse, et de chercher à garder la communion avec le Seigneur. Alors les choses de Dieu, qui ne se voient pas, auront du prix pour nous. Le chrétien pour qui le ciel n’est pas précieux n’est pas un bon soldat de Jésus Christ. Si, dans les difficultés, il est indécis, il a d’autres motifs que Christ pour agir.
Après cette épuration du peuple, c’est la bataille. Les batailles de Dieu ne ressemblent pas à celles que les hommes livrent. Trois cents hommes et Gédéon à leur tête, ce n’était pas beaucoup à côté des Madianites «nombreux comme des sauterelles» (Juges 7:12). Dieu leur donne une leçon d’humilité. Ils ont eu du courage, Gédéon et Pura, pour entrer dans le camp des ennemis. On admire un homme quand la bataille est remportée, mais quand il s’agit de s’engager, on hésite : le coeur est sondé. Gédéon et Pura auraient pu se dire : «Si jamais le peuple se réveille, nous sommes perdus». Ils y vont, la foi est simple. Gédéon accepte d’être le pain d’orge, du moment que le pain d’orge renverse la tente de Madian. Trois cents hommes, chacun avec une torche, une cruche, une trompette… Par les trompettes, le peuple se rappelait à Dieu, comme pour dire : «C’est ton affaire ; tu nous as amenés jusque-là ; mais si tu n’agis pas, nous sommes perdus». C’est toujours ainsi. Dieu entre en scène, et les ennemis eux-mêmes se détruisent.
Que le Seigneur nous donne d’être humbles, petits à nos propres yeux ; c’est le secret de toute victoire. Qu’il nous donne de l’honorer et de livrer les combats de l’Éternel par la foi !
[LC n° 22]
27 avril 1944
Les enfants d’Éli, le sacrificateur, comme ceux de Samuel, le prophète, n’ont pas été fidèles. Il ne suffit pas d’être enfants d’Éli ou de Samuel pour être assurés de fidélité, de génération en génération. Il est nécessaire de rappeler que nous avons toujours la guerre avec Amalek. Nous aurons aussi la guerre avec les Philistins, jusqu’à la fin, les Philistins représentant un ennemi qui est dans les limites mêmes du peuple. Nous trouvons aussi, dans ce chapitre, l’arche de l’Éternel. Le temps des juges a passé. Le peuple est entré dans le pays de la promesse, s’est corrompu, est allé après d’autres dieux. Dieu dit, encore aujourd’hui : Il ne faut pas demeurer dans le vague, mais transposer les enseignements d’une manière précise. Vous entrez dans le pays de la promesse. Vous êtes entrés dans le ciel. Les chrétiens sont des hommes assis, ressuscités, dans les lieux célestes en Christ. Mais le combat commence le jour où vous avez posé le pied dans le pays de la promesse. Le peuple a franchi le Jourdain. Il rencontre Jéricho. C’est Dieu qui jette par terre les murs de Jéricho.
La Parole nous enseigne que la position chrétienne est absolument certaine. D’une part, un vrai croyant est quelqu’un qui est ressuscité dans les lieux célestes, assis en Christ devant Dieu, comme Jésus l’est. D’autre part, la Parole nous dit que, tant que nous serons dans ce monde, le croyant doit lutter contre ses ennemis, Satan et ses anges, le monde, la chair. Les dernières étapes sont les plus dures. Le peuple de Dieu est fatigué. Nous sommes plus faibles que nos devanciers, et nous avons les mêmes ennemis. Le diable n’est pas fatigué. Il nous harcèle ; il s’attaque à l’Assemblée universelle locale. Nous serons prosternés, étonnés, émerveillés, quand nous verrons comment le Seigneur a pris soin de cette Assemblée, comment Il aura empêché les écarts, et comment, au moment où tout allait sombrer, le Seigneur, intervenant, a remis son témoignage, les saints, dans son chemin. S’il y a des frères et soeurs exercés à cet égard, ils peuvent considérer la patience, la grâce et la puissance du Seigneur envers son peuple, et de quelle manière le Seigneur aide, redresse, corrige et console les siens.
Après l’entrée dans le pays de la promesse, Josué meurt. Tous les ennemis du peuple ne sont pas anéantis. Les Philistins, Madian, restent. Pas une tribu, peut-être, n’a libéré complètement son territoire. Josué et les Juges disent que ces ennemis étaient laissés pour que les Israélites apprennent ce que c’est que la guerre. Il faut que nous apprenions à combattre. C’est pourquoi le Seigneur permet des exercices, individuels, d’assemblée. Il nous laboure, nous brise, nous jette par terre. Nous crions au Seigneur. Nous n’avons ni solution, ni remède ; alors le Seigneur intervient. Les frères et les soeurs qui ont l’oeil ouvert sur ces choses voient souvent, comme à l’oeil nu, le Seigneur intervenir. Il n’y a rien de si sérieux, ni rien de si beau.
Après la période de Josué, c’est celle des Juges ; c’est le déclin. Avec Josué, le peuple allait à la bataille, et remportait des victoires. Ensuite, c’est différent : un homme se lève, d’autres le suivent ; ensuite une femme, une poignée d’hommes se lève à sa suite. Aujourd’hui, cela se voit encore. Le Seigneur veuille susciter de tels frères et soeurs, pour opérer ces délivrances. Ce sera nécessaire jusqu’à la fin. Il n’y a pas, pour le peuple de Dieu, de périodes de repos, pas de laisser-aller. Nous ne pouvons pas dire : Après cette délivrance, déposons nos armes ; laissons-nous vivre tranquillement ; oublions que nous avons des combats à livrer. Si nous le pensons, nous allons au-devant de la défaite. Il n’y a pas, pour les frères et les soeurs, de repos. Nous avons toujours à combattre.
Lot a été harcelé. Pour son propre compte, Abraham, qui vivait avec Dieu, a eu à combattre. Il part en guerre, mais ce n’est pas pour son propre compte. C’est pour délivrer Lot, pour délivrer son frère enlacé dans le monde. Y a-t-il des frères et soeurs assez libérés d’eux-mêmes pour que, lorsqu’ils se lèvent et prennent une épée, ce soit pour couper les liens de leurs frères ? Sommes-nous si absorbés par nos propres circonstances, assez anéantis par l’ennemi, pour ne pas faire un propre pas nous-mêmes ? Un croyant dans un état heureux, utile, c’est celui qui, libéré pour son propre compte, vigilant pour ne se laisser entraîner par rien ni personne, lorsqu’il voit son frère, prend son courage devant Dieu et va délivrer son frère, à ses risques et périls.
Ce qu’a fait Abraham ne sera pas oublié. Le peuple de Dieu, aujourd’hui, a besoin d’hommes tels qu’Abraham. Quand nous voyons nos frères, considérons-nous s’ils sont libres ou enlacés ? S’ils sont enlacés, leur disons-nous : Mon frère, il faut rompre avec ce que le monde peut avoir versé dans ton coeur ?
La période des Juges est une période de déclin, parce que jamais le peuple entier ne part en guerre, comme dans Josué. Il y a un morcellement de la foi du peuple. Mais la foi individuelle brille d’autant plus. Au temps des Juges, après la délivrance, le peuple retombe dans sa nuit, de plus en plus épaisse. Il n’y avait pas de roi. Chacun faisait ce qui était bon à ses yeux (Jug. 21:25).
Le livre de Ruth, qui fait suite aux Juges, apporte une consolation. Lorsqu’on pourrait croire que tout est perdu, que le diable a le dessus, que les Cananéens ont le dessus, Dieu nous donne le livre de Ruth, pour dire : J’ai ma pensée ; Je sais ce que Je veux ; J’ai mes conseils, J’y arriverai.
Ruth entre dans la généalogie du Seigneur, mais par la foi. Qu’on ne vienne pas se prévaloir du cas de Ruth, ou d’un autre, pour nous dire que n’importe qui peut entrer dans le peuple de Dieu. Mais ce droit, cet honneur, c’est sa foi qui les lui a donnés.
La fin de l’histoire des Juges est lamentable. L’absence de moralité va de pair avec l’abandon de Dieu, de la Parole du Seigneur. Moralement, il y a chute. Ce que, dans un état prospère, on appelle bien, on l’appelle mal. Ce qui arrêterait une conscience, ferait crier, lorsque l’état du peuple est mauvais, on passe dessus, on ne dit rien.
Beaucoup plus souvent que nous le pensons, le Seigneur nous met à l’épreuve, et met en évidence le niveau spirituel de l’assemblée, afin que nous montrions comment nous réagissons devant tel ou tel fait. Un fait se présente. Si nous avons à coeur la gloire de Dieu, nous dirons : Ce n’est pas devant Dieu ; ce n’est pas selon le Seigneur. Si nous sommes en somnolence, nous dirons : Il faut beaucoup de support ; il faut nous souvenir que nous sommes des pécheurs ; il ne faut pas aller trop loin. Certainement, il nous faut de la grâce. Plus nous vivons près de Dieu, plus nous sentons que nous sommes des objets permanents de la grâce de Dieu. Mais il y a un moment où le Seigneur nous met à l’épreuve, et où il nous faut savoir faire comme les fils de Lévi, lorsque Moïse a dit : «À moi, quiconque est pour l’Éternel» (Ex. 32:26). Ou bien savoir faire comme un autre, Phinées, qui a brandi son épée à un moment solennel, où la corruption risquait d’entrer dans le temple de Dieu. Phinées prend son épée ; la corruption s’arrête immédiatement. Dieu lui fait une promesse, et lui dit que ses générations appartiendront toujours au peuple de Dieu.
Il y a des moments où il faut avoir l’air dur, sévère, parce qu’il s’agit de principes gouvernementaux du peuple de Dieu. Il ne s’agit pas d’un individu, mais de la vie ou de la mort du peuple de Dieu.
Et l’homme de Dieu qui vient parler à Éli met sa vie dans sa main, pour dire : «Ainsi dit l’Éternel». Ce n’est jamais un service agréable. Mais malheur à lui s’il ne donne pas la parole de l’Éternel.
Avons-nous à coeur le vrai bien du peuple de Dieu, le vrai bien de cette assemblée ? Il s’agit toujours de principes, de la vérité ou de l’erreur, qui sont en question, pour le bien ou le malheur du peuple de Dieu.
La moralité a baissé, à la fin des Juges. Ce livre se termine par une histoire affreuse. Nous n’en sommes pas surpris. Le chrétien ne finit pas mieux.
Et, à partir de ce moment-là, un lien est rompu avec le peuple. Dieu ne s’adresse plus à lui directement. Il fait surgir un prophète, puis Il introduit un roc. Le prophète, c’est Samuel, mis à part, dès son enfance, pour le Seigneur. Son histoire est divinement belle, riche d’instruction et, au fond, c’est l’histoire de l’homme de foi, de tout serviteur utile, d’une manière ou de l’autre. Il est affligeant de constater, un peu plus loin, que le peuple lui-même dit à Samuel : «Tes fils ne marchent pas dans tes voies» (1 Sam. 8:5). Samuel dit au peuple : «De qui ai-je pris l’âne, etc.», mais le peuple lui-même est juge : «Tes fils…».
Ces deux exemples nous parlent. Éli, le sacrificateur, peut nous parler de tous, frères, de toutes, soeurs. Nous sommes tous sacrificateurs. Samuel, le prophète, nous parle de la Parole de Dieu, et peut-être aussi de ceux qui la présentent. Que les enfants de ceux qui présentent la Parole de Dieu, de ceux qui sont rois et sacrificateurs, ne pensent pas qu’ils ont une espèce d’immunité. Et l’ennemi cherche toujours à frapper la tête. C’est une chose extrêmement sérieuse.
Le diable remporte une victoire bien plus grande lorsque, au lieu de faire broncher un chrétien qui va dans le monde — là, il n’y a pas de victoire à remporter — il s’attaque à un frère pour le piéger, à un fils de frère, à quelqu’un qui est fils d’Éli ou de Samuel. Quelle victoire, alors ! On en parle. Les anges le savent. Ils en sont les témoins. Tout le monde le sait. Quelle défaite, pour le peuple de Dieu. Y pensons-nous ?
Frères et soeurs, parents d’enfants chrétiens, y pensons-nous ? Pensons-nous que l’état du peuple de Dieu dépend de l’état de tous ses enfants ? Avons-nous cela à coeur ? Voilà la fidélité dans le détail et dans la pratique. Il est très facile d’être fidèle, de venir à toutes les réunions. C’est une chose très facile. Mais être fidèle au Seigneur, avoir la crainte du Seigneur, trembler à sa parole, faire des choses qui nous coûtent, personnellement, beaucoup, qui nous coûtent ce que personne ne peut savoir, par amour pour le Seigneur ? Que trouvons-nous, chez Éli ? Il ne tenait pas ses enfants. C’est effrayant ; c’est terrible.
Voyez l’amour, la grâce, la patience du Seigneur. Dieu a une patience illimitée, est plus patient que Paul, que Moïse — Paul a dépassé Moïse — qu’Élie, qui s’est irrité aussi. Les deux premiers, pour s’être irrités, pour n’avoir pas eu, dans leur coeur, cette patience infinie de Dieu, ont été frappés d’une manière qui nous paraît excessive. Moïse n’est pas entré dans le pays de la promesse. Et pourtant, il a supplié Dieu, qui lui a dit : «Ne me parle plus de cette affaire» (Deut. 3:26) ; comme si Dieu avait le regret d’avoir dû être obligé de fermer l’accès de Canaan à Moïse, un homme qui n’a pas eu son pareil. Cependant, il a manqué de patience. Élie a manqué de patience, et son ministère a pris fin. Dieu est plus patient que tous, mais il y a un moment où sa patience finit, où elle s’arrête.
Il y a peut-être des personnes qui viennent depuis quarante ans dans cette salle, des pécheurs, des inconvertis. Dieu a été patient quarante ans. Il ne le sera peut-être pas un jour de plus. En tout cas, il y a une seconde au-delà de laquelle la patience de Dieu n’ira pas. Cela est vrai pour un inconverti, une nation, le monde chrétien, et aussi, en gouvernement, pour les enfants de Dieu.
Éli est frappé très durement. Il y a une chose remarquable : l’arche est prise, et Éli meurt. Ce n’est pas la mort de ses fils qui a causé la sienne, mais c’est quand il a appris que l’arche de Dieu était prise. Le coeur d’Élie était avec l’arche, qui est Christ. Nous sommes réunis au nom du Seigneur. Le montrons-nous ? Toute notre attitude, notre conversation, nos relations, ici et dehors et dans le monde, sont-elles un témoignage permanent que nous connaissons l’arche et que nous l’entourons ? Si ce n’est pas cela, nous sommes infidèles. Et tout sacrificateur, frères et soeurs, que nous sommes, notre titre ne fait qu’accroître notre responsabilité, et un jugement peut tomber sur nous.
Un homme de Dieu surgit. Personne ne s’y attend. C’est souvent ainsi. En face d’Achab qui dit : «Te voilà, toi qui troubles Israël» (1 Rois 18:17), puis à propos de Samuel, lorsqu’il va pour oindre David, il est dit que tous tremblaient (1 Sam. 16:4 ; 1 Rois 18:10-12). Nous devrions trembler, quand le prophète passe, quand il parle. Dieu ne nous parle pas pour ne rien dire. Il n’oubliera pas ce qu’Il nous a fait dire tant de fois, et Il nous demandera des comptes.
Les faits de l’Ancien Testament sont instructifs, justement parce qu’ils nous donnent, sous une forme simple, mais solennelle, les enseignements les plus variés, les plus riches.
Le mal que faisaient les fils d’Éli est mentionné. Rien n’est inaperçu à Dieu ni au Seigneur.
L’assemblée a à s’occuper de ceux qui sont dedans. On peut sympathiser, aider les autres, mais administrativement, non. Lorsque nous sommes dans l’assemblée, que nous faisons profession d’appartenir au Seigneur, rappelons-nous que le jugement commence par sa propre maison. Dieu ne châtie pas de la même manière les Philistins que ceux qui font partie du peuple.
Pratiquement, lorsqu’un frère, une soeur, témoins de telles choses qui se passent parmi le peuple de Dieu, les supportent, ils se rendent solidaires vis-à-vis du mal commis. Les frères et les soeurs sont ceux entre les mains desquels l’administration est confiée. Si nous ne veillons pas et n’avons pas à coeur le bien de son peuple, sa sainteté, le Seigneur nous demandera des comptes, non seulement à ceux qui s’égarent, mais à ceux qui n’auront pas averti, pas pris soin.
Il y a là, pour nous, une leçon, certainement, si nous avons trop appris, trop vu. Depuis quelques années, pendant toutes ces années de tourmente, le Seigneur nous a parlé de trop de façons pour que nous fermions nos oreilles à son enseignement.
Voici Éli. Il honorait ses fils plus que l’Éternel. Est-ce que nous honorons les frères et les soeurs plus que le Seigneur ? C’est sérieux. Il ne faut pas penser que, parce que nous sommes dans l’assemblée, le Seigneur est moins exigeant ; au contraire. Éli supportait le mal chez ses enfants. Il faisait passer la gloire de l’Éternel après les caprices de ses enfants. C’est la Parole de Dieu qui dit cela : «Tu honores tes fils plus que moi» (2:29). Le Seigneur nous donne un autre verset, dans le Nouveau Testament : «Celui qui aime père ou mère plus que moi, n’est pas digne de moi» (Matt. 10:37). Et que de fois le Seigneur nous met à l’épreuve individuellement, et en assemblée. Vous dites que vous M’aimez ; montrez-le. Voilà deux voies à choisir. Une voie est douloureuse, mais c’est celle où le coeur montre qu’il est lié au coeur du Seigneur. Pensez-vous que les Lévites étaient contents de transpercer leurs propres familles, après le veau d’or ?
Mais c’est la foi qui est au-dessus de tout. Elle va sur le rocher, comme Jonathan. La foi est de Dieu. Elle ne s’embarrasse de rien ni de personne. Qu’importe le monde tout entier, lorsqu’on a Dieu avec soi.
Je désire placer cela sur nos coeurs à tous. Montrons-nous que nous sommes des frères et des soeurs, nous qui nous prévalons du fait que nous sommes séparés des autres chrétiens ? Montrons-nous que nous sommes avec le Seigneur, non pas en faisant étalage de connaissance, de doctrine ? Prouvons que nous aimons le Seigneur mieux que quiconque, non pas en parole, mais en fait, en renonçant. «Tu honores tes fils plus que moi» : cela ne peut pas honorer le Seigneur ; et combien c’est sérieux. Que de choses cela expliquera, un jour. Et puis, nous avons ce verset extraordinaire : «ceux qui m’honorent, je les honorerai ; et ceux qui me méprisent seront en petite estime» (v. 30). Le Seigneur honorera ceux qui l’auront honoré.
On est surpris qu’Il ait mis en réserve un David que, tout à coup, Il a mis en évidence sur la scène. Personne n’avait parlé de lui. Mais David, dans le secret, avait honoré Dieu. À son tour, Dieu l’honore.
On est surpris de voir surgir, parmi le peuple de Dieu, des inconnus, qui n’ont, spirituellement, ni père ni mère. Ce sont ceux-là dont le Seigneur se sert. Il n’y aura pas de surprises, lorsque le Seigneur manifestera les choses. Bien entendu, tout est grâce, de la part de Dieu ; et la fidélité d’un David, et l’honneur qu’on porte au Seigneur, sont un fruit de ce que Dieu opère. Mais il est dit : «Ceux qui m’honorent…». Quelqu’un qui a fait un sacrifice, refusé un avenir… — c’est arrivé à plus d’un, de tourner le dos à un avenir, à une carrière ; on n’a pas à s’en vanter, Dieu veuille que nous ne le fassions jamais, mais ce sont des choses qui comptent dans la vie, dans la mesure où ces refus, ces preuves de fidélité, sont donnés au Seigneur. C’est dans cette mesure-là que le service, la fidélité, la joie, le bonheur, se trouvent, dans la vie du chrétien. N’en doutons pas.
Celui qui veut tout entraîner avec lui, en disant : J’aurai le Seigneur quand même, ce n’est pas vrai. Il aura toujours le Seigneur, mais d’une autre manière. Un frère mondain n’aura jamais le Seigneur comme le frère spirituel qui vit près du Seigneur. Même si les choses ne se voient pas sur la terre, elles seront manifestées un jour : «Ceux qui m’honorent…».
Combien il faut nous encourager les uns les autres, dans ce sens-là. S’il nous fallait tout abandonner pour le Seigneur, combien, en ce moment-ci, en auraient la force ? S’il nous fallait le faire, Il nous donnerait la force, au moment même. Mais que de progrès à faire, chers amis ! Quand on veut suivre le Seigneur, on s’aperçoit qu’on a des attaches. Si quelqu’un s’est attaché à une table, et qu’il veuille marcher, il se rend compte qu’il est attaché. Il en est de même avec le Seigneur. Si nous voulons marcher, nous sentons que nous avons des attaches, des calculs, par devers nous. Et si nos coeurs étalaient tous les calculs, les intrigues, qu’il y a chez nous, croyants, combien verrait-on de coeurs vraiment libres, affranchis, dont le Seigneur pourrait dire : Voilà quelqu’un qui m’aime ? Alors, nous avons des progrès à faire. Nous le savons, et il faut en faire.
Au moment où le peuple dit en Jérémie, par trois fois : «C’est ici le temple de l’Éternel» (Jér. 7:4), c’est alors qu’il allait être pris, que Jérusalem allait être jetée par terre.
Ne pensons pas qu’il suffit de dire : C’est l’assemblée ; nous sommes l’assemblée, nous faisons partie de l’assemblée. Non, nous serons jetés par terre. Jamais la Parole ne parle ainsi. Et le Seigneur dit : «Si tu ne te repens pas, j’ôterai ta lampe de son lieu» (Apoc. 2:5). Si nous n’avons pas soin de sa gloire, le Seigneur en aura soin.
Les Philistins arrivent ; le peuple est battu. C’est le conseil de Dieu. Le peuple fait appel à son ultime ressource. Nous allons chercher l’arche ; elle a fait reculer les eaux du Jourdain. C’est l’arche du Seigneur de toute la terre. Elle a fait le tour de Jéricho pendant sept jours, et la trompette des sacrificateurs allait devant ; les murs de Jéricho sont tombés sans coup férir. Nous allons faire appel à l’arche. On l’a faite entrer. Le peuple criait ; la terre en tremblait. Mais Dieu restait silencieux. Dieu ne bougeait pas. Ce ne sont pas les cris du peuple qui font bouger Dieu. Il laisse prendre son arche. Quelle leçon ! On a vu que, malgré tous les titres que les saints pouvaient avoir, se réclamant des saints, de l’assemblée, le Seigneur laisserait le monde jeter l’assemblée par terre. Le Seigneur se chargera de revendiquer sa gloire. Les Philistins ont gardé l’arche sept mois. Mais le Seigneur a manifesté sa gloire en jugement, celle que le peuple n’avait pas su revendiquer en fidélité.
Ne disons pas : C’est ici l’assemblée de Dieu, avec un coeur léger et indifférent au mal. Mais montrons que c’est l’assemblée de Dieu, et comment il faut s’y conduire, car elle est la colonne et le soutien de la vérité.
Nous aimons à penser, frères et soeurs, que chacun, ici, a à coeur le bien de l’assemblée, plus que tous ses intérêts personnels. Sinon, le Seigneur dira : «Celui qui aime père ou mère plus que moi n’est pas digne de moi».
[LC n° 23]
16 novembre 1952
Je présente seulement quelques remarques en rapport avec la vie de David, avec les enseignements et les encouragements qu’une vie aussi riche en expériences que celle-là peut nous donner. C’est plutôt une invitation pour chacun de nous à lire et à relire ce que ces livres historiques nous apprennent de cet homme de Dieu. Le temps nous manquerait, si nous voulions étudier cette vie de David. Il est évident qu’il nous faudrait considérer d’autres parties de la Parole — c’est un sujet très intéressant, si on a un peu de temps — en particulier les Psaumes, qui ont été donnés par David (inspiré par l’Esprit de Dieu) au fur et à mesure des circonstances diverses qu’il a connues ou, en tous cas, en rapport avec elles. La suscription de plusieurs nous montre à quel moment David, inspiré, a écrit ces Psaumes. Et ce n’est pas le côté le moins profitable de la vie de David que ce que nous révèlent les Psaumes. David avait un coeur de lion, une énergie hors pair. C’était un homme vraiment extraordinaire. Quand Dieu fait un choix, Il sait le faire. Il connaît l’homme ; Il connaît les hommes, l’individu, chaque individu. Autrement dit, Il en connaît la capacité. Sur le terrain spirituel, Dieu connaît la capacité du vase, distincte du don qu’Il a mis dans le vase. D’ailleurs, le don, en général, est en rapport avec la capacité. C’est ce que nous trouvons dans le Nouveau Testament.
Pierre était un homme énergique ! Et ceux que le Seigneur appelle «fils de tonnerre»(cf. Marc 3:17) ! Ce n’est pas pour rien que le Seigneur les appelle «fils de tonnerre». Les disciples surnommés ainsi, le Seigneur les connaissait. Dieu se sert des caractères du vase. Il connaît chacun de très près, et Il prépare chacun pour telle ou telle circonstance. La haute main de Dieu est toujours là. Nous nous perdons souvent dans l’examen des circonstances, des hommes et des choses, alors que, simplement, la haute main de Dieu est là.
Nous en avons ici un exemple. Voilà une triste situation dans l’histoire du peuple, très triste. Il y avait là, à leur tête, Saül, dont l’histoire est non moins intéressante, mais dans un sens inverse de celle de David. Saül nous représente, absolument et de la façon peut-être la plus complète qui soit, la chair placée dans une position privilégiée. Saül, ce n’est que la chair qui a des capacités et des qualités. C’était, comme David, un homme qui n’était pas ordinaire. Mais c’est la chair mise à l’épreuve dans une position très privilégiée. C’était un homme distingué, et il a été roi d’Israël. Et comment finit-il ? Il est balayé par la tempête, et balayé d’une façon violente, après avoir d’abord fléchi sur plusieurs points très graves. À un moment de son histoire, deux de ces points sont rappelés. Premièrement, il n’a pas compté sur Dieu. Il n’a pas su attendre, peut-être un quart d’heure, peut-être quelques minutes. Il s’est impatienté. Samuel lui avait dit, par la parole de Dieu : Tu m’attendras là sept jours, jusqu’à ce que je vienne vers toi. Saül a attendu presque jusqu’à la fin. Mais la chair s’est impatientée. Il a offert le sacrifice, et il a péché. Dieu lui dit, à cause de cela : «Maintenant, ton règne ne subsistera pas». Une autre raison pour laquelle Dieu l’a éliminé comme roi, c’est qu’il n’a pas été fidèle dans la lutte contre Amalek. Il a ménagé l’ennemi numéro un du peuple de Dieu, Agag. Il aurait dû le mettre en pièce ; il ne l’a pas fait. Voilà une deuxième raison.
C’est que, lorsqu’il est question des ennemis du peuple de Dieu, il ne s’agit pas de mettre sa main droite du côté de Dieu et sa main gauche du côté du diable. L’apôtre Paul combat des armes de la main droite et de la main gauche. Le combat qu’il livrait de la main droite était le même que celui qu’il livrait de la main gauche ; c’était le même. Les armes visaient le même ennemi, ce qui n’est pas toujours commode, sans la droiture morale !
Saül a péché encore en ce qu’il a évoqué les esprits. Il s’est servi d’une nécromancienne, d’une femme qui évoquait les esprits, chose abominable ! Il a fait de très graves fautes. Il représente la chair pleine de qualités dans une position privilégiée, dans une position de responsabilité, mais pleine d’avantages. Et son exemple peut s’appliquer à toutes sortes de positions.
On peut l’appliquer, d’une façon générale, soit à la chair chrétienne dans un individu ou dans une position officielle dans la chrétienté, soit à la chrétienté tout entière comme telle, qui a une position privilégiée, position qu’elle a prise — et elle le reconnaît. Elle a une position tout à fait distincte des païens. Eh bien, elle sera balayée, au jour où la tempête de Dieu soufflera sur le monde. Saül l’a été d’une façon violente. Il est mort d’une façon violente, sur les montagnes de Guilboa. Le jugement est arrivé. Saül a été serré de plus en plus près, jusqu’au jour où il a été emporté, et avec lui, Jonathan. Jonathan était pourtant un homme de Dieu, un vrai croyant ; mais il a été emporté. Il était près de Saül — c’était son père ! Jonathan s’était dépouillé pour David — nous le voyons, à la suite de la scène de Goliath — aux pieds de David. Mais il n’a pas tenu jusqu’au bout. Il est l’image de quelqu’un qui a préféré les liens de la chair — et aussi, probablement, les avantages du trône — à la proximité et à la cause de David. Il était pourtant persuadé que Dieu avait réservé à David la royauté. Il est vrai qu’être persuadé d’une chose n’est pas ce qui garde de s’égarer.
Comme on l’a dit, la connaissance, la certitude humaine, ne gardent pas. C’est Dieu qui garde. Que Dieu fasse que les jeunes, en particulier, s’en souviennent ! Ce n’est pas ce qu’ils savent des vérités qui les protège, au contraire ! Et celui qui fait le mal, souvent avec beaucoup de connaissances, est très porté à invoquer le nom de Dieu pour endormir sa conscience ! Quand on pense que c’est parfois au moment même où nous faisons le mal que nous faisons ainsi ! Nous sommes des êtres pervers, chers amis !
«Or, à Celui qui a le pouvoir de nous garder sans que nous bronchions…» (Jude 24) : Dieu seul peut nous garder. Je me rappelle les paroles d’un serviteur du Seigneur qui a bien commencé, bien continué et bien fini, et qui disait, à ses dernières heures : «Je tiens à dire aux jeunes chrétiens : la connaissance ne vous gardera pas ; Dieu seul peut vous garder».
Si la connaissance nous gardait, chers amis, nous serions, pratiquement, beaucoup plus fidèles que nous ne le sommes ! Qu’est-ce que nous avons fait comme infidélités, depuis quelques jours seulement ? Chacun le sait pour lui-même. Et à l’égard de quoi ? La connaissance ! Mais chacun de nous est capable d’écrire un livre entier sur le Seigneur, sur la doctrine, la plus pure doctrine évangélique. Nous sommes tous capables de cela ! Mais ce que le Seigneur veut et nous demande, c’est d’être fidèles dans telle ou telle situation, de veiller. C’est la pureté, la sainteté, la fidélité. C’est autre chose que d’énoncer des vérités. Dieu le sait, et son oeil nous suit. Le reste, c’est — il faut l’appeler par son nom — de l’hypocrisie ou de l’inconscience.
Jonathan est un personnage extrêmement sympathique, spirituellement parlant. Mais quelle leçon que sa fin, chers amis ! Abigaïl brille davantage. Elle présente un état d’âme supérieur. Tout ceci nous parle de l’attachement des chrétiens à Christ, du degré d’attachement. Il y a des degrés, dans l’attachement de ces âmes à David. Ah, c’était sans doute difficile, pour Jonathan, de se détacher peu à peu de ce soleil que représentait Saül, placé par Dieu où il était, pour s’attacher à un David, qui était quoi ? «Une perdrix chassée sur les montagnes» (cf. 1 Samuel 26:20). C’est là une mise à l’épreuve. Que chacun de nous lise et médite ces choses.
La vie de David, en elle-même, est extrêmement riche en enseignements. Son départ nous donne un exemple rare. Le départ de David est très beau. Il y a peu de taches, dans le tableau de la vie de David ; très peu de taches, beaucoup de lumière, peu d’ombres. Mais il y a comme une éclipse, dans sa vie. Le départ est de toute beauté : un jeune homme mis à part par Dieu. Le peuple allait à ses convoitises ! Dieu supporte beaucoup de choses. Mais en même temps, Il avait l’oeil sur quelqu’un qu’Il avait préparé et mis à part. C’était le dernier d’une famille nombreuse, et d’une famille peu en vue. Et, au moment voulu, lorsque la menace apparaît, sous la forme d’un Philistin qui a été l’ennemi permanent du peuple de Dieu, et qui est l’image de l’ennemi situé à l’intérieur des limites du peuple de Dieu, David apparaît.
Saül est pourtant là. Il a sa couronne ; il est pourtant roi ! Mais il a peur. Il eut peur, il eut très peur ; nous le trouvons écrit plusieurs fois. Il eut très peur des archers. Voilà la chair. Elle aime bien avoir un trône. Mais quand l’épreuve arrive, la chair a peur ; elle a très peur des archers. Voilà ce qu’est la chair, exactement, toujours. C’est pourquoi, première leçon, ne comptons pas sur la chair, pas plus sur la nôtre que sur celle d’un autre. Que Dieu nous accorde d’apprendre au moins, de David, cette leçon, qu’il exprime dans tant de Psaumes : «L’Éternel est ma lumière et mon salut, il est mon Dieu, il est mon rocher». Voilà un bon état d’âme : «Il est mon rocher» (voir par exemple Ps. 27:1 ; 42:11 ; 62:2).
David apparaît, un jeune homme. Sa première épreuve publique, c’est Goliath. Je ne parlerai pas de David dans la façon dont il représente le Seigneur (ce n’est pas maintenant ce que j’ai à dire, bien que ce soit un des côtés les plus élevés de cette scène), mais simplement ce que cette scène peut nous dire à nous-mêmes. David est là et s’avance. Le peuple est en désarroi, car Goliath est un homme qui en impose ! On avait été ravi d’avoir un Saül, dont la tête dépassait toutes les autres. On voit cela, chez les frères et chez les soeurs qui peuvent s’appuyer sur tel ou tel, quand la chair a bonne apparence. Mais, quand elle se présente sous la forme d’un ennemi mortel, tout le monde a peur. Saül a peur, tremble.
Par la providence de Dieu — car Dieu a sa providence, Il se sert de tout, conduit tout — David est amené sur le front de bataille. Il ne l’a pas voulu ; il ne l’a pas cherché. C’est la volonté de Dieu. Dieu l’a préparé ; et le voilà juste au moment voulu. Ses proches ne le comprennent pas et l’accusent. Son frère aîné dit : «Oh, je connais l’orgueil qui est dans ton coeur» ! David aurait pu se laisser rebuter, dire : Je m’en vais. Il aurait pu retourner d’où il venait, en pensant : qu’ils se tirent d’affaire avec ce qu’ils ont devant eux ! Non, David va sur le front de bataille, et porte sur la situation un jugement divin. Il n’y a pas d’hésitation, de sa part. Ce n’est pas un jugement humain. Pourquoi ? Comment ? Aurait-on peur de ce Philistin qui est un incirconcis et qui a outragé les troupes rangées du Dieu vivant ? On aurait peur de celui-là ? Voilà la foi. Dieu entre en scène. Le conflit n’est plus entre David et les Philistins, mais entre Dieu et les ennemis de Dieu. Voilà ce que fait la foi, toujours. C’est un jeune homme qui fait cela. Il n’est pas interdit, à un jeune homme, aujourd’hui, d’en faire autant. C’est une question de foi. La foi fait intervenir Dieu. La chair compte ; elle compte ses amis, ses ennemis. La foi ne compte ni les uns, ni les autres. David est tout seul. Il le sent très bien, et aura à le sentir plus profondément : ses frères d’abord, et puis, un peu plus loin, Saül, qui va l’embarrasser. On veut l’aider ; on le gêne. David est tout seul ; voilà la foi. Il nous arrive de dire : Si seulement on pouvait s’appuyer sur ceci, cela, celui-ci, celui-là. Mais il faut la foi. La foi s’appuie sur Dieu.
Il n’est pas interdit, à un jeune chrétien, à une jeune chrétienne, de s’appuyer sur Dieu, de livrer les combats de Dieu et de remporter les victoires de Dieu ! Ce n’est pas interdit ! L’occasion est offerte à chacun. C’est une question de foi. David dit, d’autre part, dans les Psaumes : «Il est à ma droite, je ne serai pas ébranlé» (Ps 16:8). Si nous allions à travers ce monde en ayant Dieu à notre droite, nous n’aurions peur de personne. Rien ne compterait, aucune difficulté. Nous avons le privilège de pouvoir le faire. Qui est-ce qui nous empêche de le faire ? Personne.
David s’avance, et ce moment révèle David à Saül. Saül n’arrive pas à le comprendre. Mais une espérance s’éveille dans son coeur. En voilà un qui a l’air de ne pas parler, de ne pas être comme nous tous, un dont le coeur n’est pas comme les feuilles des arbres agitées par le vent, comme nous le trouvons à propos d’un autre : «et le coeur du roi fut agité comme les arbres de la forêt devant le vent» (cf. És. 7:2).
David répond à Saül : Voilà, j’ai tué le lion, et j’ai tué l’ours ; Dieu m’a délivré de cela, Il me délivrera de ce Philistin. Saül n’a plus rien à dire. Mais il veut l’aider, d’une manière charnelle et humaine, en le revêtant de sa propre armure. David dit non. David est tout à fait seul, et avec des ressources étrangères à tout ce que le peuple de Dieu peut lui présenter. Saül a une armure. C’est un homme avec une épée, une puissance extérieure, un homme officiel, un personnage officiel. Et les personnages officiels, dans ce monde, même chrétiens, ont une puissance extérieure dans leurs mains. Mais la foi n’en a pas. Et David nous montre que la foi compte sur Dieu, et n’a rien d’officiel. Ce qui est officiel, c’est la chair, toujours ! Alors David s’avance tout seul. Il faut que ce soit tout seul. C’est un combat singulier. Il est absolument seul ; on ne pourra pas l’aider. Le moment est arrivé où la rencontre se fait. La lutte va se réaliser ; et David sait, en s’avançant, qu’il ne peut compter sur personne. Tous les appuis sont vains. Et d’ailleurs, tout le monde est en arrière.
Alors nous voyons, chez David, briller la foi, avec la prudence, l’humilité, la modestie. Il dit au Philistin : Aujourd’hui, je donnerai ton cadavre à manger aux oiseaux des cieux et aux bêtes de la terre ! Le Philistin se considère comme insulté parce que David a un bâton au lieu d’avoir une épée. Il insulte David, le méprise. Mais David parle au nom de Dieu, de la part de Dieu, et dit : Aujourd’hui, ton cadavre sera donné en pâture aux bêtes de la terre. C’est ce qui a eu lieu, nous le savons. Voilà le départ de David. Probablement, nous n’avons pas eu le même. Mais Dieu veuille que notre vie soit marquée de faits dans lesquels nous avons vu Dieu avec nous. Sinon, vraiment, est-ce que nous serions de vrais chrétiens ?
Chez tout vrai chrétien, il y a des expériences faites avec Dieu, dans lesquelles il a appris ce que Dieu est pour le croyant, dans lesquelles il a vu les délivrances que Dieu opère pour chacun de nous, à un degré ou à un autre, de quelque façon que ce soit. Mais il n’y a pas de vrais croyants à qui Dieu ne se soit pas fait connaître comme Celui qui a tué le lion et l’ours. Ce n’est pas possible !
Comme on l’a dit bien des fois, la foi vaut ce qu’elle a coûté. David a pu dire qu’il a rencontré le lion et l’ours. Mais Dieu combat en lui, et de même dans sa rencontre avec Goliath.
Nous pouvons bien penser que son coeur d’homme a dû être fortement exercé en allant à un tel combat, surtout en raison des conséquences qu’il comportait. Que Dieu nous accorde à tous, aux jeunes et aux vieux — aux jeunes en particulier — de savoir un peu ce que c’est que d’abattre le lion et l’ours dans le secret. Je dis bien dans le secret. Ce n’est pas une petite chose (Dieu a choisi cela pour nous parler) de rencontrer le lion avec un bâton, ou rien, dans sa main. Ce n’est pas un fait ordinaire. Et Dieu souligne ainsi la difficulté de cette lutte. Que Dieu nous accorde de rencontrer le lion et l’ours, et de les abattre, et cela dans notre vie de tous les jours. Ce sont des exercices secrets, où nul oeil ne nous voit que l’oeil de Dieu, qui sont les plus importants, dans la vie du chrétien. Ce sont, de beaucoup, les plus importants. Les manifestations extérieures n’en sont qu’un effet.
Est-ce que nous cherchons à avoir Dieu avec nous et à remporter les victoires de Dieu contre le mal, contre l’ennemi, dans notre vie quotidienne ? C’est ce qui est, de beaucoup, le plus important.
David a été vainqueur publiquement, parce qu’il avait été vainqueur dans le secret, ce qui est toujours le cas. Et c’est pourquoi, quand nous sommes appelés à quelque service public, eh bien, la première chose à faire, c’est de remporter la victoire dans le secret, sous l’oeil de Dieu ; la victoire contre tout ce qui est ennemi de Dieu, contre tout ce qui est opposé à Dieu, opposé à la vie de Dieu. Et, incontestablement, c’est ce qui est, de beaucoup, le plus difficile.
David a appris à connaître Dieu, non pas d’abord dans la rencontre avec Goliath, mais dans la rencontre avec le lion et l’ours. Et notre vie, notre état chrétien à tous et à chacun, dépend de la façon dont nous remportons ces victoires sous le regard de Dieu, jour après jour. C’est très facile, de paraître un chrétien, mais il faut l’être devant Dieu. C’est la chose la plus difficile : être un chrétien devant Dieu.
Ensuite, nous trouvons que David devient l’objet de la haine de Saül. Ah, une telle chose n’est pas nouvelle, bien loin de là ! Pourquoi Saül hait-il David ? C’est que David marchait avec Dieu, et pas Saül. David, Dieu agissait en lui et par lui. En Saül, c’est la chair qui agissait. Et la chair a toujours de la haine. Pourquoi Caïn tua-t-il son frère ? Parce que les oeuvres de son frère étaient justes, et que les siennes étaient mauvaises. Saül, qui a été délivré par David, est jaloux de la grâce de Dieu dans David, et il le poursuit de sa haine jusqu’à la mort. Pauvre David ! Et il était si jeune, ce pauvre David ! Voilà une nouvelle expérience ! Il a été poursuivi de la haine de Saül. Saül a cherché à le traverser plusieurs fois de sa lance, à le clouer à une paroi. Comment cela se fait-il, chers amis ? Saül, qui avait été oint d’huile comme roi, Saül, que David n’a pas osé toucher ! Une fois, il lui a coupé le bord de son vêtement, et il est écrit cette expression remarquable : son coeur le reprit (1 Sam. 24:6). Il est obligé de juger ce simple acte, d’avoir coupé un morceau du vêtement de Saül. Et pourtant, il avait résisté à l’un de ses proches qui disait : un seul coup de lance et je le transperce ! Voilà un beau caractère, un beau trait de David, qui nous fait penser au Seigneur : il n’a pas l’esprit de vengeance. Pour un geste qui n’avait que l’apparence de la vengeance, son coeur l’a repris. Il dit de Saül que Dieu le fera tomber : «qu’il tombe au jour de la bataille ou quand ses jours s’achèveront, mais ma main ne sera pas sur lui» (cf. 1 Samuel 26:10). Que Dieu nous accorde cet esprit de grâce et de crainte de Dieu. David était comme un lion quand il fallait l’être, et il avait la pensée de Dieu. C’est un des traits qui le distingue : son intelligence des choses de Dieu. Il sait ce qu’il faut faire dans telle ou telle situation.
Le voilà pourchassé comme une perdrix, et sa vie est en jeu nombre de fois. C’est à propos de cela que nous trouvons, dans les Psaumes, beaucoup d’expériences qu’il a faites. Il a à faire à toutes sortes de gens, à des menteurs. Peut-être que, dans toute l’Écriture, on ne trouve pas de paroles plus fortes que celles de David sur les menteurs. Au Psaume 55:21 (il vise l’antichrist, mais c’est à propos de ce qu’il a rencontré), il dit : «Les paroles de sa bouche étaient lisses comme le beurre, mais la guerre était dans son coeur». Ah, chers amis, David n’était pas âgé, quand il a fait ces expériences. Et comme il a fallu que la grâce de Dieu veille sur lui !
David a commencé par des victoires : l’ours, puis le lion, et puis Goliath. Mais on peut se demander si tout ce qui a suivi n’était pas une épreuve bien plus profonde ; d’abord Saül, et puis d’autres personnes et d’autres circonstances !
Nous trouvons les accents de son coeur qui s’expriment, de la part de Dieu, dans les Psaumes, et cela nous fait du bien. Pourquoi avons-nous du plaisir à considérer les Psaumes de David ? C’est parce que nous y trouvons les sentiments d’un homme dont le coeur a été tant de fois brisé, broyé et mis à l’épreuve. C’est le propre de toute l’Écriture, qu’elle donne, en se servant d’autres personnes, une voix à nos sentiments. Elle a fait parler des coeurs, et en les entendant, nous disons : Voilà ma souffrance. Je trouve de la sympathie dans cette voix qui a parlé, il y a peut-être trente siècles ! Dans cette voix qui a parlé il y a trente siècles, je trouve du réconfort et de la sympathie. En voilà un qui a souffert, qui a pleuré, et je trouve dans les paroles que le Seigneur Jésus a mises dans son coeur à ce moment-là un précieux rafraîchissement, un précieux réconfort pour ma propre âme. Voilà l’excellente valeur de l’Écriture.
Que d’épreuves pour David ! Les épreuves vont-elles cesser lorsqu’il arrive au trône ? Non, pas du tout, les épreuves n’ont pas cessé. Et c’est là que nous trouvons, justement, la plus solennelle leçon de toute la vie de David.
David était plus beau, plus fidèle, plus glorieux — nous pouvons le dire — lorsqu’il allait d’une caverne à l’autre, ne sachant pas le matin où il coucherait le soir et s’il serait en vie le soir, poursuivi, non par les Philistins dont il a toujours triomphé, mais par le peuple de Dieu qui mettait sa vie en jeu, que lorsqu’il était sur le trône. La leçon la plus solennelle de l’histoire de David est une leçon que nous pouvons demander à Dieu de graver dans notre coeur à tous. C’est que le chemin du succès dans ce monde — le chemin du succès comme celui de David — n’est pas le chemin du chrétien. Ce n’est pas celui-là.
Que Dieu nous accorde d’être comme le David d’avant le trône, d’avant le règne, d’être contents de poursuivre notre chemin, voyageurs, forains et étrangers, souffrant, portant la croix jour après jour, mais fuyant tout ce qui pourrait ressembler à un succès, à un succès établi. Car le succès, c’est la porte ouverte à ce que nous trouvons de plus triste dans la vie de David. On voit des indices de fléchissement avant qu’il en arrive où il en est arrivé. Ces indices sont clairs, dans certaines choses que la Parole déclare, avec sa précision habituelle. Enfin, on voit David qui, au lieu d’aller prendre la tête de son armée, reste chez lui. C’est Joab qui s’en va. David reste chez lui. Il aurait dû aller coucher sous des tentes, aller partager les douleurs, les dangers, les périls de son armée, être en première ligne, comme son rôle l’y appelait. Il ne l’a pas fait. Et la vigilance, qu’on voit chez lui quand il était un enfant, pour vaincre le lion et l’ours, la dépendance de Dieu, la force de Dieu avec lui en présence de Goliath, sa persévérance, cette dépendance quand il va avec Dieu sur les montagnes, il les perd une fois. Cela a suffi. Il les a perdus une fois.
Mais David était un homme de Dieu, qui craignait Dieu, qui aimait Dieu. Et, même dans ce qui a suivi ce moment de sa vie, nous voyons qu’il a affaire à Dieu d’une façon remarquable, et qu’il trouve Dieu et continue à le trouver pour le reste de ses jours. La foi trouve toujours Dieu. Il n’y a pas de situation où Dieu ne puisse intervenir, où Dieu ne réponde pas à la foi. Et le David restauré est un David qui a appris à se connaître. C’est un David mûri qui parle au chapitre 23 de 2 Samuel où, au lieu de penser à lui, à son trône, à sa propre gloire, il regarde en avant vers un Autre : «Celui qui domine parmi les hommes sera juste» (2 Samuel 23:3). Il parle du Seigneur.
Eh bien, chers amis, que Dieu nous accorde de relire les Psaumes que David a écrits, de nous appuyer sur Dieu — jamais sur la chair — et de veiller sur nous-mêmes, de très près.
David est une des figures les plus belles de l’Ancien Testament. Et même avec l’éclipse qui marque sa vie, il demeure un des exemples les plus beaux d’un homme en qui Dieu a parlé et agit, et dont Dieu s’est servi. Une des choses les plus remarquables, et qui sont propres à nous encourager, c’est ce qu’il exprime, dans les Psaumes : «Il est mon Dieu, mon rocher, mon secours, ma délivrance». C’est une expérience personnelle. Il nous fait penser à Paul, qui parle d’une semblable manière. Mais ce qu’il y a de plus beau dans le David qui finit, c’est qu’on trouve en lui un coeur aussi vivant pour le Seigneur dans ses affections, et plus même, un coeur qui, loin d’avoir été endurci par le monde, le mal ou quoi que ce soit, trouve ses délices en Dieu lui-même.
Qu’il en soit ainsi pour nous tous, chers amis ; et que Dieu nous aide à ne pas chercher d’autre appui que lui-même. Que ce soit difficile et sérieux, il suffit de penser à la valeur d’un homme comme David ! Quant à sa piété, c’était un homme extraordinaire, et il avait une intelligence spirituelle qui nous confond.
Que Dieu nous accorde d’aller tous les jours en nous appuyant sur Lui, ne cherchant rien dans ce monde pour nos aises, mais nous appuyant sur Dieu.
Une fois, on était venu, on avait emporté tout ce qui était à lui. Et, chose plus grave (c’est la fin de 1 Samuel), ceux qui étaient autour de lui voulaient se révolter contre lui, dans la profondeur de leur douleur. On avait emmené leurs biens, leurs femmes, leurs enfants. Les Amalékites avaient emporté tous leurs biens. Il est dit que David — voilà une expérience quant aux épreuves — fut dans une très grande détresse. Immédiatement après, il est dit : «Mais David se fortifia en l’Éternel, son Dieu» (1 Sam. 30:6).
Que ce soit notre heureuse part !
[LC n° 24]
9 mars 1947
Il se dégage de cette lecture, qui n’est nouvelle pour personne sans doute ici, des enseignements assez divers. Je désirerais faire quelques remarques. Si Dieu nous donne des récits tels que celui-ci, ce n’est pas pour nous habituer à nous complaire à ce qui, actuellement, ne saurait être le chemin du chrétien. Ce qui se passe ici, cet emploi des armes diverses et la façon dont les hommes agissaient entre eux, même en Israël, et vis-à-vis des ennemis, n’est pas du tout la position chrétienne aujourd’hui. Aujourd’hui, le chrétien, il faut bien comprendre cela, n’est pas appelé à se servir de l’épée. Et, s’il a des ennemis, s’il lutte, ce n’est pas «contre le sang et la chair, mais contre les puissances spirituelles dans les lieux célestes». Le chrétien a une épée. Cette épée, c’est la Parole de Dieu, et c’est l’épée du Saint Esprit (Éph. 6). Nous ne saurions donc prendre à la lettre l’instruction qui se dégage de ce récit. La vie de David, le courage physique de David, ne sauraient être imités à la lettre, par le chrétien fidèle, aujourd’hui. Mais c’est de l’attitude de David et de la position du peuple que nous pouvons tirer des instructions, ces choses étant arrivées comme type de ce qui nous concerne.
Il y a un enseignement spirituel, dans la Parole de Dieu, qui est infini. Il n’y a pas une page de la Bible qui ne soit susceptible d’instruire un chrétien. La Bible est un tout ; la Parole de Dieu est un tout. Elle est comme un être vivant, un tout vivant, dont nous ne saurions prétendre sonder les profondeurs. Nous en recevons ce que Dieu nous donne. Mais elle est infinie, comme Dieu lui-même.
Nous sommes ici sur le terrain d’Israël. Et, en Israël, nous avons l’histoire de l’homme, une expérience faite par Dieu. Israël a conquis de haute lutte le pays de Canaan, et il l’a conquis contre les peuples qui étaient là. Il aurait dû garder ces possessions ; d’abord les réaliser entièrement, ce qu’il n’a pas fait, et puis les garder, ce qu’il n’a pas fait non plus. Israël, vainqueur des peuples qui sont là dans le pays de la promesse, est l’image du peuple chrétien, et du chrétien individuellement, qui est vainqueur de Satan et jouit du ciel. La spiritualité consiste à jouir du ciel, et Satan se met en travers tous les jours pour nous empêcher de le faire. Nous savons tous ce que, au long d’une journée Satan met en travers de notre chemin pour nous empêcher de jouir du ciel. Eh bien, c’est une victoire des Philistins sur nous. Toutes les fois que nous reculons, que nous baissons, spirituellement parlant, cela correspond à une avance des Philistins, à un recul d’Israël. Il nous faut prendre les choses ainsi. La prospérité extérieure d’Israël correspond à notre prospérité spirituelle. Ceci nous montre quel est le genre de lutte que nous avons à soutenir.
Nous voyons ici l’histoire du peuple. L’heure n’était pas très brillante. Le peuple avait demandé un roi. Il avait choisi Saül. C’était un homme qui se remarquait bien. Il était plus grand que tout le monde, et on aime beaucoup cela. Dieu dit : Vous voulez Saül ? Nous ferons l’expérience de Saül. Elle n’a pas été très longue. Ils ont voulu un roi quand Dieu était leur roi. Et Dieu leur donne un roi magnifique, qui flattait l’orgueil du peuple. Saül, plus grand que tous, ne manquait pas de qualités extérieures. C’est remarquable. Qu’est-ce qui manquait à Saül ? L’expérience, la mise à l’épreuve, n’a pas été longue, car Dieu la fait toujours.
Adam a été mis à l’épreuve dans l’innocence. Tout le monde est mis à l’épreuve. Saül est mis à l’épreuve. Il était roi, et il a été mis à l’épreuve comme roi. Et nous voyons de combien de manières il a manqué. Il a manqué parce qu’il n’a pas détruit Amalek. Dieu lui dit : Il y a Amalek, un vieil ennemi du peuple ; vous aurez la guerre avec Amalek de génération en génération ; il y a une déclaration de guerre permanente. Saül part en guerre contre Amalek. Tout va bien, en apparence. Mais Dieu lui avait dit : Tu vas passer au fil de l’épée tout ce que tu rencontreras ; et il n’a pas passé au fil de l’épée tout ce qu’il avait rencontré. Arrive Samuel qui avait la Parole de Dieu. Saül dit : «Béni soit l’Éternel, etc.». «Quel est ce bêlement de brebis que j’entends», dit Samuel (1 Sam. 15:14). Samuel savait bien, d’avance, que Saül n’avait pas pris au mot les déclarations de Dieu. Alors, malgré des excuses, Samuel dit : Eh bien, Dieu t’a rejeté comme roi. Le roi d’Amalek, lui, se réjouissait déjà, parce qu’il n’avait rencontré que Saül ; il n’avait eu affaire qu’à un infidèle.
Que de fois cela nous arrive, de faire comme Saül. Seigneur, nous avons fait ce que tu nous as dit ; nous avons accompli ta parole. Mais la Parole vient nous dire : «Qu’est-ce que ce bêlement de brebis ?». Samuel prend son épée, et c’est lui qui est chargé, de la part de Dieu, de détruire le roi d’Amalek.
Que de leçons il y a là, individuellement. Il y a des leçons pour tous les jours, lorsque nous ne suivons pas le Seigneur et que nous ne faisons pas ce qu’il nous dit. Si lui n’a pas le dessus sur nos coeurs, c’est Amalek qui a le dessus.
Il y a une autre épreuve pour Saül. Samuel lui dit : Tu iras à Guilgal ; tu attendras sept jours. Il attend presque sept jours. Il n’en manquait pas beaucoup ; mais il lui a manqué un moment de plus, et c’est le dernier qui est celui qui éprouve la foi. Dans notre vie chrétienne, c’est ainsi. La foi compte sur Dieu jusqu’au bout. La chair imite la confiance en Dieu, mais pas jusqu’au bout. La chair imite la confiance en Dieu jusqu’au bout moins quelques moments. Ceci a suffi à révéler ce que personne n’a vu, sauf Dieu : le véritable état de Saül. On dira : S’il avait attendu quelques moments de plus… C’est précisément pour le dernier moment qu’il fallait la foi.
Vous marchez avec Dieu ? On marche avec Dieu ? La chair marche avec Dieu, mais n’ira jamais si loin que la foi.
Toutes les rencontres de Saül et de Samuel sont étonnantes. Cela parle à la conscience et au coeur. Il ne faut pas, quand nous lisons la Parole de Dieu, lire de l’histoire. L’histoire et la géographie, même relativement à la Parole de Dieu, ne font de bien à personne. Il nous faut lire la Parole spirituellement, en priant et puis en disant ceci : «Mais je suis souvent un Saül, bien souvent».
Samuel a prié toute la nuit, quand Dieu a prononcé ce jugement : «J’ai enlevé Saül, c’est fini». Que de fois, dans l’histoire des hommes, nous voyons que Dieu dit : J’ai pris celui-là ; l’expérience est faite, c’est fini ; son tour est passé. Saül, c’est fini. Il s’accroche à Samuel ; il déchire son vêtement. Il peut prier, supplier ; c’est fini. C’est solennel. Toutes les fois que nous sommes infidèles, nous faisons une perte irréparable. Personne d’entre nous ne peut savoir ce qu’il a perdu, par infidélité. Personne d’entre nous ne peut savoir quelles auraient été ses richesses spirituelles si, dans toutes les circonstances où il a été placé, il avait obéi à Dieu. Nous le saurons un jour. C’est ce qui rend chaque moment de notre vie très important, et même solennel, qu’à chacun d’eux, suivant la façon dont nous agissons, il en résultera des conséquences qui peuvent être entièrement différentes, gain ou perte. Si on ne tient pas à la bénédiction de Dieu, on ne se pose pas tant de questions, mais on dit : Après tout, je vais tâcher de vivre comme je peux ; je suis sauvé, c’est tout ce que je désire. Mais celui qui tient à la bénédiction de Dieu pour le temps présent, qui désire marcher avec Dieu dans le temps présent, celui-là est exercé à chaque moment, et surtout dans les moments importants : Seigneur, donne-moi la foi qui compte sur toi, qui marche avec toi, qui se méfie des sentiments de la chair. Il y a toutes sortes d’influences. Ce n’est pas toujours facile.
Dieu dit : Je l’ai rejeté. Samuel a eu beaucoup de chagrin et a prié toute la nuit.
Dieu avait un homme par devers lui. C’était David, un jeune homme obscur, d’une famille obscure. C’est très souvent ainsi. Nous trouvons cela tout au long de la Parole de Dieu. Tout ce récit est facile à comprendre. Il y a des leçons desquelles nous ne pouvons pas nous détourner, à moins de vouloir être plus sages que Dieu.
Pendant que l’histoire de Saül se déroulait en public et qu’il brillait aux yeux des hommes, dans le secret, dans l’ombre, inconnu de tous, David était à l’école de Dieu. Il faisait ses armes à l’école de Dieu. Et, au jour où le peuple de Dieu est dans la détresse, où tous, du plus grand au plus jeune, tous les vaillants hommes — il ne manquait pas d’hommes vaillants — tous les soldats sont dans le désarroi, au moment où personne ne s’y attend, apparaît sur le champ de bataille l’homme formé dans le secret, dans la présence de Dieu.
C’est de toute beauté pour deux raisons au moins : c’est une façon de faire qui est générale de la part de Dieu ; en outre, cette façon de faire nous parle de celui dont David est la figure, Jésus lui-même.
Alors que l’histoire du monde, et d’Israël en particulier, se déroulait dans ses diverses vicissitudes, et que le monde était sous l’emprise de Satan, mené par Satan ; alors qu’Israël lui-même, qui avait les Saintes Écritures, avait sombré dans l’apostasie, et — on peut le dire — dans l’oubli de Dieu, et qu’on pouvait penser que c’était fini, que les expériences de Dieu étaient finies, que Dieu était battu, puisque même le peuple de Dieu, qui avait les commandements, les prophètes, les appels de Dieu, était tombé et avait trahi ; à ce moment-là, dans un moment très sombre de l’histoire d’Israël, où les âmes fidèles du début de Luc se comptaient presque sur les doigts d’une seule main (quelques portraits d’une beauté exquise tracés par Dieu : Élisabeth, Siméon, Anne, etc.) ; au milieu de ces quelques-uns qui sont là, dans la ruine générale, alors que le pays a été pris par les Romains, nous voyons apparaître, dans l’ombre, l’enfant de la crèche de Bethléhem. Jésus reste trente ans dans l’ombre. Ce n’est qu’à sa trentième année qu’il s’avance en face du Philistin. Il nous faut méditer cela. Il y a d’abord la personne de Christ, et, d’autre part, le principe général des voies de Dieu envers les siens. Que de fois cette question s’est posée, vis-à-vis de Jésus ! Que de fois ils se la sont posée, cette question, tous les pharisiens d’Israël, et tous ceux que rendait perplexes la personne de Christ ! Que de fois ils se la sont posée : «Abner, de qui ce jeune homme est-il fils ?». «Quel est son nom et quel est le nom de son père ?». Il n’avait pas passé, à l’inverse de toutes les façons de faire humaines, par les cours royales humaines. Il n’était pas connu dans les cours royales humaines. Il sortait de l’étable de Bethléhem. Il avait vécu dans l’ombre trente ans, avant de paraître en public pour rencontrer le vrai Goliath face à face.
Quel enseignement ! Je désire placer cette leçon sur le coeur de tous, et des jeunes en particulier, en les suppliant de croire que c’est la façon de faire de Dieu.
Tout le monde est embarrassé. Israël peut se ranger en bataille face à l’ennemi. Mais voilà Goliath qui s’avance, et on ne sait que faire. Tout le monde est perplexe ; l’effroi règne. Mais David paraît, et lui seul est à la hauteur de la situation. Il en est toujours ainsi de la foi. La chair nous met en avant, nous fait avancer, et puis elle ne nous tire pas d’affaire. Mais, avec la foi, on compte sur Dieu, et tout va bien.
Que de fois, même dans les temps de ruine où nous sommes, cela se voit, un homme de Dieu — nous en avons connu… — tout le monde est aux abois : prenons conseil, où est le chemin, faisons appel aux anciens ; il y a des sages, des anciens. L’homme de foi ne fait pas cela. L’homme de foi, tout en tenant compte de tout ce que Dieu peut avoir laissé parmi le peuple de Dieu, va droit au coeur de Dieu. Il a appris à se réfugier auprès de Dieu. Que de fois, chers amis, nous apprenons que nous ne savons pas bien faire cela.
Une épreuve arrive dans l’assemblée, une difficulté, une chose qui ne va pas bien (on l’apprend au long d’une semaine), quelquefois plusieurs choses. Qu’est-ce que nous trouvons ? Quelle expérience humiliante faisons-nous ? C’est que nous ne savons pas immédiatement nous réfugier auprès de Dieu. Nous prenons conseil ; nous parlons ici et nous parlons là, alors que notre première ressource devrait être le Seigneur. Que de fois David dit, dans les Psaumes (il pouvait le dire, il avait fait cette expérience) : Tu es mon fort refuge. Est-ce que nous faisons cela ? Si nous ne faisons pas cela, nous honorons les hommes plus que Dieu, les frères plus que Dieu ; et cela, Dieu ne peut pas le supporter.
Quand une difficulté, un exercice, arrivent, une chose pénible, est-ce qu’immédiatement nous nous tournons du côté du Seigneur ? Si nous le faisions, nous serions toujours tranquilles, ce qui ne veut pas dire que nous ne souffririons pas. C’est ce que le Seigneur a fait en Gethsémané. Une épreuve unique l’attendait. Eh bien, avant de passer par la croix, le Seigneur cherche et trouve la face de son Père. En Gethsémané, il n’a rien reçu de Satan ; il a reçu la coupe de la main de son Père.
Dans toutes les difficultés, individuelles, d’assemblée, je tiens à le dire, ce qui nous manque, c’est de nous jeter dans le coeur de Dieu. Seulement, il faut une absence de volonté propre, pour trouver le coeur de Dieu. Et c’est pourquoi, trois fois, le Seigneur dit, en Gethsémané : «Mon Père, s’il était possible… Toutefois que ce ne soit pas ma volonté qui soit faite, mais la tienne» (Luc 22:42), en soumission parfaite. Toutes les fois que nous réalisons la soumission parfaite, nous trouvons le repos de Dieu, et nous pouvons penser aux choses qui nous exercent, avec Dieu et non pas avec nous-mêmes, ce qui est tout autre chose. Notre volonté n’est plus en jeu, n’est plus en question, et nous avons la paix avec Dieu tout en souffrant. Tout en étant exercés, nous avons la communion avec Dieu.
Il faut désirer que les frères et les soeurs croissent dans cette recherche de la face de Dieu, dans la communion personnelle avec Dieu. On entend dire, plus d’une fois : Il n’y a plus de piété. La Parole de Dieu glisse, elle ne pénètre plus. Il n’y a plus de piété, non pas dans la chrétienté, mais chez les frères. On ne lit plus la Parole de Dieu ; on ne prie plus. On parle des choses de Dieu des lèvres, mais le coeur n’est plus engagé. Ou bien on s’engage avec les choses de Dieu quand elles ne font pas souffrir, quand il n’y a pas de souffrance, pas de renoncement, quand on peut se glorifier ; mais, quand il s’agit de souffrir, c’est autre chose !
Lorsque nous entendons ces choses ou que nous les constatons, en nous ou autour de nous, nous n’avons qu’une ressource : Seigneur, tu ne changes pas. Est-ce que le Seigneur est notre refuge, ou est-ce que nous attendons, pour être heureux et en paix, que nous soyons tous des apôtres comme Paul ? Nous n’aurons jamais la paix, alors. C’est difficile, de se contenter du Seigneur ; c’est bien difficile. C’est difficile de compter sur le Seigneur plutôt que de compter sur tous les frères ; c’est bien difficile. Mais c’est cela, être un homme de Dieu. S’il y avait un homme de Dieu ici, un apôtre, il dirait cela. Sans aucun doute, il nous donnerait cet exemple.
Donc David est seul à être tranquille. Soyons certains que, lorsque nous sommes troublés, c’est que notre volonté n’est pas brisée. Il y a des difficultés ; je suis troublé : ma volonté est en jeu. Si elle n’est pas en jeu, je verrai clair. Je serai exercé, mais pas troublé. Je dirai : Seigneur, c’est ton affaire. Porter la chose avec le Seigneur, c’est là que les frères et les soeurs peuvent être utiles. Il y en a qui le font, et le Seigneur le sait. Espérons qu’il y en a beaucoup.
Les combats, aujourd’hui, ne sont pas publics, glorieux, spectaculaires, comme ceux de David. Ce sont des combats qu’on livre dans sa chambre. Ce sont les combats les plus difficiles. Le Seigneur brise donc ma volonté. Ce n’est pas peu de choses, chers amis, c’est loin d’être peu de choses : «Seigneur, que ta volonté soit faite et non la mienne». Je demande à chacun de nous s’il trouve que c’est une chose facile. Et c’est à Saül que Samuel dit : «Obéir vaut mieux que sacrifice» (1 Sam. 15:22) !
Que de fois les chrétiens partent avec une apparence de dévouement, de consécration, de zèle ! Alors le Seigneur leur dit : Mon ami, tu es en train de faire ta propre volonté ; tu me désobéis en ayant l’air de me servir. Le Seigneur nous le dit. Nos frères ne sont peut-être pas assez fidèles pour nous le dire ; mais le Seigneur nous le dit. Si nous avons des oreilles, nous l’entendons.
Est-ce que nous préférons obéir avant tout ?
J’insiste sur quelques points très simples. D’abord, cette formation cachée de David. Vous trouvez rarement, dans l’Écriture, qu’un homme très fidèle ait eu des descendants très fidèles. Cela se voit, mais il faut que chacun passe à l’école. Dans le monde, les enfants d’un général ne naissent pas généraux. Il faut gagner ses galons, même dans le monde. David a gagné les siens ici. On nous laisserait croire quelquefois qu’il n’en est pas ainsi ; mais c’est ainsi, chers amis.
Et ce cher David, dont l’image garde, malgré tout, une fraîcheur remarquable, malgré ses chutes, a toujours, dans toute sa vie et dans toutes ses défaillances — ce qui est de toute beauté — trouvé son refuge dans le coeur de Dieu. Il a appris cela. Puissions-nous imiter un peu cela.
Voilà donc Goliath, qui est une image de la puissance de l’ennemi ! David s’avance. Il y a un combat singulier. Mais toutes les péripéties, tout ce qui précède le combat, est d’une très grande instruction. Nous voyons le désarroi du peuple, avec tous ses guerriers qui étaient là. Un seul champion suffit à arrêter l’élan des troupes. Pour lutter contre Goliath, il faut une seule puissance, la foi. Contre l’ennemi, nous n’avons qu’une puissance ; c’est la foi. Celui qui s’engage contre l’ennemi sans la foi est comme un soldat qui va avec ses poings nus contre une forteresse.
Faut-il repasser dans notre coeur toutes les défaites qu’une telle attitude a enregistrées, parmi le peuple de Dieu, les défaillances honteuses ?
C’est facile de partir, chers amis. Mais partir avec la foi, c’est difficile. Et, en passant, disons ceci (j’espère ne pas passer moi-même à côté de la leçon) : que personne ne dépasse sa mesure de foi ! Si quelqu’un dépasse sa mesure de foi dans un service, quel qu’il soit, dans l’activité, quelle qu’elle soit, il va devant la chute. Peut-être qu’on le flattera, qu’on le poussera, mais on ne trompe jamais Dieu. On a vu des serviteurs tomber, et de quelle affreuse manière !
Pour s’avancer contre Goliath, il fallait que David ait rencontré le lion et l’ours. Nous l’avons dit, mais est-ce que nous avons un peu combattu le lion et l’ours ? Jeune berger, il était tout seul. Il ne l’avait pas dit. On en avait eu quelque écho : «c’est un homme vaillant» (chap. 16). Mais David avait gardé cela pour lui ; il ne l’avait dit à personne, que nous sachions.
Mais quand Goliath est là, il dit : Dieu m’a débarrassé du lion, de l’ours ; il me débarrassera bien de Goliath. Ce n’est pas une question de limite ; c’est une question de l’excellence de la puissance de Dieu.
J’ai une petite difficulté dans mon chemin. Si je n’y vais pas avec Dieu, elle deviendra une grande difficulté et une occasion de défaite. Il arrive souvent que les chrétiens tombent à propos de rien. Parce que, dans les grandes épreuves, nous disons : Aujourd’hui, je ne peux plus rien ; il faut que Dieu agisse. Mais il faut que Dieu agisse dans les circonstances quotidiennes, sinon nous sommes battus. Qu’est-ce que cela veut dire : nous sommes battus ? C’est toutes les fois que nous faisons notre propre volonté. Il est donc probable que nous enregistrons pas mal de défaites, au long d’un jour. Nous sommes battus quand Satan nous fait faire notre propre volonté.
C’est ce à quoi il s’est acharné à Gethsémané contre le Seigneur. C’est sérieux, la vie chrétienne. Nous en faisons très souvent une parade devant les autres. Nous ressemblons beaucoup à Saül. Et puis, comme Satan sait très bien toute la faiblesse qu’il y a sous une fausse cuirasse, il sait très bien jeter par terre celui qui vit dans cette parade. De sorte que c’est celui qui a le moins d’apparence de force qui est le plus fort.
Celui que Dieu a éprouvé, c’était un jeune homme. Sa jeunesse est soulignée en contraste avec ce guerrier qui avait vu tant de combats. Mais David avait réalisé des combats ayant Dieu tout seul avec lui, avec la force de Dieu.
Combien il faut souhaiter que nous croissions dans cette vie avec Dieu. Quels sont nos combats ? Renoncer à ceci, renoncer à quelque chose. Quand nous regardons dix ans en arrière, est-ce qu’il y a telle ou telle chose dont nous pouvons dire : Le Seigneur m’a donné de renoncer à cela ; j’ai eu le dessus sur l’ennemi sur ce point ; le Seigneur m’a donné la victoire sur ce point ? Enregistrons-nous des victoires, ou vivons-nous dans notre train-train depuis dix ans ? S’il en est ainsi, il y a beaucoup de défaites qui sont passées inaperçues à notre oeil ; nous pouvons en être sûrs.
Quand le Seigneur, qui est le chef de l’armée de l’Éternel, qui voit tout, inspecte son armée — comme l’oeil doit être averti, pour voir l’état de ses troupes — passe en revue ses troupes, que voit-il ? Ah, la vie, ce n’est pas ce qui se voit ! La vie du chrétien, c’est ce qui se passe dans son coeur. Que de fois on l’a dit : C’est ce qu’il pense, ce qu’il aime. Elle n’est pas seulement ce qu’on voit.
Voilà, l’heure du combat approche. Saül, qui n’a pas de sens spirituel, dit à David : Tu ne peux pas aller comme cela ; tu n’as rien. Il lui donne son armure. Voilà ce que les hommes savent, ce que les théologiens de tous bords savent : il faut une bonne armure intellectuelle, théologale. On met cela à David. Il dit : Je n’ai jamais essayé cela ; quand j’ai tué le lion et l’ours, je n’avais pas cela ; je ne peux pas marcher avec cela. Tout ce que les hommes donnent paralysent l’homme de Dieu. Un homme de Dieu va avec Dieu, et ne s’embarrasse de personne. On a Dieu avec soi ; le reste ne compte pas. Tout le reste, ce sont des circonstances. Or, comme il vient d’être dit, les circonstances étant d’un côté et Dieu de l’autre, Dieu l’emporte, pour la foi.
David dit : Goliath a outragé Dieu ! La victoire est gagnée d’avance. Est-ce que nous disons cela ? Je sais que cela ne fait pas toujours plaisir, d’entendre que ce qu’on peut avoir comme talents ou comme avantages ne compte pas, devant Dieu. Nous sommes capables d’avoir une longue liste d’avantages, que peuvent avoir tous les Goliath du monde. Ce n’est pas ainsi qu’on peut avoir des victoires, c’est une erreur que de le prétendre. Les avantages du monde paralysent l’homme de Dieu et le livrent à l’ennemi. Combien c’est profond. Et celui qui veut être sage, qu’il devienne fou afin qu’il devienne sage. Le royaume de Dieu n’est pas en parole, mais en puissance. Que de fois nous avons vu des frères — nous en connaissons — très simples, vivant avec Dieu, remporter des victoires sur des points où nous, nous sommes battus. C’est cela qui est à la gloire de Dieu. Ce ne sont pas la parade extérieure et l’influence extérieure ; ce sont le combat et les succès secrets dans la vie.
David a combattu le lion et l’ours. Alors il dit à Saül : C’est Dieu qui me délivrera. Il en est de même que pour Daniel et Joseph : Dieu était avec eux. Cette expression se trouve fréquemment, à propos de tous ces hommes de foi : l’Éternel était avec lui.
David était très sage. On le craignait parce qu’il était sage. Saül le craignait ; son entourage aussi. On sentait que c’était un homme sage. Il ne fait pas deux pas sans consulter Dieu. On le craignait ; on sentait que Dieu était là.
Trouvons-nous nos délices profondes à jouir de la communion avec Dieu et avec le Seigneur tout au long du jour, et sommes-nous malheureux lorsque nous n’en jouissons pas ? Je prie encore qu’aucun de nous ne s’avance sur le terrain au-devant de l’ennemi au-delà de sa foi. Nous avons des exemples dans la Parole, et nous en avons autour de nous, qui montrent les tristesses qui en résultent.
Le combat a lieu. David s’avance avec sa fronde. Il n’a pas d’épée. Vous connaissez sa fronde. On peut y voir une allusion au Seigneur rencontrant le diable pendant quarante jours. Que chacun fasse l’interprétation, s’il le trouve bon. Mais il est certain que, quand le Seigneur a rencontré l’ennemi, c’était en faiblesse apparente. Le Seigneur n’était revêtu d’aucun des attributs qui font la force, dans le monde, soit au désert pour être tenté — Il est allé à jeun pendant quarante jours, Il n’avait aucune force extérieure — soit sur la croix — Il a été crucifié en infirmité. La force du Seigneur a été son obéissance absolue. C’est toujours la force de la foi. C’est difficile, même parmi nous ! Mais regardons à notre Seigneur. La force du peuple de Dieu, c’est la foi, parce qu’elle introduit Dieu.
C’est une scène de toute beauté. David s’avance, il déploie sa bannière. Goliath a sa bannière. Sur sa bannière : Philistie. Et David dit : Moi aussi, j’ai ma bannière ; je viens à toi au nom de l’Éternel des armées. Qui va l’emporter ? Ce combat singulier nous parle de la rencontre du Seigneur avec Satan. Le Seigneur est venu, pour la gloire de Dieu, rencontrer Satan. David prend sa pierre, sa fronde, petit enfant qui essaie des armes insignifiantes. Il jette le géant par terre et, avec l’épée du géant, il coupe la tête du géant.
Par la mort, Jésus a détruit celui qui avait le pouvoir de la mort, la mort qui était une arme entre les mains de Satan. Le Seigneur s’est servi de la mort pour annuler la puissance de Satan. C’est avec l’épée de Goliath que David a coupé la tête de Goliath.
Le Seigneur a traversé la mort, a annulé sa force. La mort ne pouvait rien en lui ni contre lui. Elle ne pouvait pas le retenir.
Quelle chose belle, magnifique ! Personne ne savait qui était ce David. Et c’est à la fin qu’on s’interroge. «Abner, de qui ce jeune homme est-il fils ? Je ne sais pas. De qui es-tu fils ? Je suis fils de ton serviteur Isaï, le Bethléhémite».
David, plus tard, a eu une éclipse dans sa vie, une sombre éclipse. La partie la plus belle de sa vie, c’est la première, et la fin aussi. Mais dans la première partie, pourquoi est-ce que c’est beau ? Parce qu’on voit un homme qui est chassé par Saül comme une perdrix sur les montagnes, qui se sauve de caverne en caverne et est obligé de compter sur Dieu tous les jours. Voilà la beauté de la vie de David. En face, pendant ce temps, il y avait Saül, qui avait le trône, toutes les attitudes officielles, les places officielles. Il nous faut bien faire attention, à cet égard : Dieu n’est pas avec tout ce qui est officiel. Dieu n’était pas avec Saül. Saül consulte l’Éternel, mais l’Éternel ne répond pas. Tandis que David, qui n’avait rien d’officiel, dit : Apporte-moi l’éphod. Dieu lui répond, et pas seulement une fois !
Il nous faut faire attention, chers amis. Dieu n’est pas avec ce qui est officiel. Ce qui est officiel, c’est la chair qui s’installe dans le royaume de Dieu. De quelle façon ne l’a-t-elle pas fait ? Qu’est-ce qu’on ne voit pas ? Mais, sans aucun doute, la vie chrétienne est un combat de haute lutte, du commencement à la fin. Et pourquoi David est-il tombé ? Il est tombé parce que, quand il s’agissait d’aller à la guerre, à un moment donné, il a envoyé Joab ; il est resté chez lui. Lorsque nous ne nous tenons pas à notre poste, que nous ne sommes pas sur le qui-vive, que nous pensons nous installer dans le royaume de Dieu et y trouver nos aises, et que nous ne sommes pas là à crier au Seigneur jour et nuit, c’est la défaite qui commence. Or David (2 Sam. 11) est resté chez lui et a envoyé Joab, histoire qui ne s’est que trop répétée. Il faut en faire notre compte. Nous avons Dieu avec nous dans nos combats, mais c’est un combat permanent.
Est-ce que nous avons pensé à ce caractère de la vie de David qui, certainement, est ce qu’il y a de plus beau : David, chassé comme une perdrix sur les montagnes, avec une bonne conscience et ayant Dieu avec lui ? Voilà la vie chrétienne. Pendant ce temps, la chrétienté s’installe, depuis deux mille ans. Et, si nous ne faisons pas attention, nous aussi nous pouvons nous installer dans des choses officielles, dans le royaume de Dieu. Officiellement, Saül pouvait interroger Dieu, demander l’éphod, revêtir ainsi les attributs extérieurs de la sacrificature et de la profession. Mais Dieu est sourd aux systèmes officiels.
On a le coeur fendu, déchiré, quand on voit de quelle manière cette pauvre chrétienté a sombré dans les ténèbres, et se réclame de Dieu, qui reste sourd à tout ce qu’elle dit et à tous ses appels. On a le coeur serré, quand on lit ce qui s’écrit, qu’on entend ce qui se dit.
Heureux David, bienheureux David pourchassé ! Que ne l’a-t-il été toute sa vie ! Au moment où, à la fin de sa course, David meurtri regarde ce qu’a été sa vie, il exprime des paroles de toute beauté. Il se détourne de lui-même. Il regarde à Jésus ; il regarde Christ. Tel est notre lot.
Mais je ne saurais trop insister pour qu’il nous soit donné à tous de faire notre compte que notre bonheur est avec Christ, même quand il est rejeté. Il est le vrai David, notre vrai David. Autour de David, il y avait des hommes fidèles, qui le suivaient de caverne en caverne. Est-ce que nous sommes contents de cela ? Mais si nous cherchons à nous installer dans le royaume de Dieu, à y acquérir de l’honneur sans le servir, sans l’exercice de la foi, nous allons au-devant de la chute. Et Dieu fermera ses oreilles à nos appels.
Que le Seigneur nous donne d’avoir beaucoup à faire avec lui, chers amis, chers jeunes gens. S’il y a un demain, Satan vous tentera demain. Que le Seigneur vous donne d’abattre le lion et l’ours, et qu’il vous forme pour le jour où le peuple désemparé aura besoin d’un homme de foi qui apportera la paix, montrera le chemin au peuple de Dieu et dira, de la part du Seigneur : «C’est ici le chemin, marchez-y» (És. 30:21). Il y faut la foi, et la foi seule, et ce n’est pas facile. Mais, si nous ne vivons pas par la foi, dans ce monde, si nous ne vivons pas avec Christ dans ce monde, je me demande avec qui nous vivons et pour qui nous vivons. Que le Seigneur soit avec nous et nous donne de vivre humblement. Qu’il nous garde des ruses de notre coeur, de tout ce qui l’enorgueillit. C’est la raison de la chute de David, certainement. David, quand il a été élevé, a perdu dans la qualité de sa foi. On le sent, en lisant les chapitres qui parlent de son accès au trône.
Notre vie est une vie d’exercices continuels, une vie de lutte, de combat. Et elle sera, à cette condition, une vie de victoires.
Que le Seigneur soit avec nous, du plus jeune au plus âgé.
[LC n° 25]
13 février 1955
Méditations sur la vie chrétienne, édition FR 1995, p. 67
Les livres des Rois nous donnent plus particulièrement le récit des faits, l’histoire même des rois. Les Chroniques montrent davantage de quelle façon le courant de la grâce de Dieu traverse cette histoire ; c’est davantage le côté de Dieu, la façon dont Dieu se glorifie envers son peuple infidèle. Dans les Rois, nous avons surtout un tableau des choses telles qu’elles se sont déroulées. Cette façon de présenter les faits n’est pas spéciale aux livres des Rois, elle se retrouve dans toute l’Écriture. L’Écriture nous rapporte en effet l’histoire de l’homme, la nôtre, celle de chacun, depuis Adam jusqu’à la fin, l’histoire telle qu’elle s’est déroulée — et se déroule — devant les yeux de Dieu. Elle nous présente les grands faits moraux, non pas tous les détails des actes commis par l’homme. Un fait pris dans la vie d’un homme suffit à présenter un principe permanent valable pour tous les hommes. Dieu dégage ce principe et le fait ressortir par des faits, non pas seulement par des commentaires et des méditations, bien qu’il s’en trouve dans l’Écriture. Les faits parlent plus fort que les commentaires. La chute d’Adam, par exemple, est un fait permanent : il a cédé, il s’est détourné de Dieu pour un fruit. Ce fait reste et parle à la conscience de tous les hommes avec plus de puissance que tous les commentaires qu’on peut en faire ; c’est un fait qui montre comment l’homme s’est comporté quand il a été mis à l’épreuve. L’homme, Adam, c’est moi, c’est nous tous. La chute d’Adam est un fait qui explique l’histoire de toute l’humanité. On ne comprend rien à cette histoire si on ne remonte pas à sa source, qui se trouve au jardin d’Éden. Dieu a gravé la façon dont l’homme se comporte. Il connaissait Adam avant qu’il soit tombé. Il connaissait aussi le dernier Adam avant qu’il vienne sur la terre. L’histoire sanglante et corrompue de l’homme n’a rien appris à Dieu ; il connaissait toute l’histoire qui allait suivre cette première défaillance du jardin d’Éden, en apparence fort bénigne.
Le geste meurtrier de Caïn est aussi un fait historique et moral majeur : la haine est née dans le coeur de Caïn parce que les oeuvres d’Abel étaient justes et que les siennes étaient mauvaises (1 Jean 3:12). Caïn se leva et tua son frère. Ce geste souligne la responsabilité de celui qui lève sa main contre son frère, et en particulier la responsabilité de l’homme à l’égard de Christ. Peu après, la corruption apparaît sur la terre (Gen. 6). Tels sont les deux grands caractères du péché : la violence et la corruption.
L’Écriture est l’histoire de l’homme comme Dieu la voit, mais elle n’est pas que cela. Un livre d’histoire écrit par un esprit de valeur peut présenter un réel intérêt ; mais il ne peut donner une juste perspective pour le passé, pour le présent, ou pour l’avenir, parce qu’il ne donne jamais le point de vue de Dieu. Dieu parle pour sa gloire, pour la gloire de Jésus, tandis qu’un historien pense à sa gloire à lui avant tout, et les choses sont ainsi faussées au départ.
Dans l’histoire du peuple d’Israël, des faits sont arrivés comme types de ce qui nous concerne. Il n’est pas écrit qu’Israël est un type lui-même, mais que les choses qui lui sont arrivées sont des «types de ce qui nous concerne» (1 Cor. 10:6). La relation du peuple d’Israël avec Dieu a été d’abord établie par la sacrificature, qui a failli : l’arche a été prise et la relation fondée sur la sacrificature a disparue en même temps. Après la sacrificature, Samuel, le prophète, fut un intermédiaire jusqu’à l’établissement de la royauté. Dieu a d’abord appelé Saül, qui représente la chair remplie de qualités ; mais quand il eut à porter la gloire de Dieu, il est tombé lamentablement, et sa fin a été terrible ; il a déshonoré Dieu.
Après Saül, la grâce de Dieu suscite David, un roi selon son coeur (1 Sam. 13:14 ; Actes 13:22). Dans ce temps, il n’y avait pas de hauts lieux. Le coeur de David était tourné vers l’arche de Dieu, il était avec Dieu. Il y a eu des défaillances, mais dans sa vie personnelle avec Dieu — nous la lisons dans les Psaumes — David n’a sans doute pas eu son égal. Ses dernières paroles montrent qu’il fixait son regard non sur lui-même, mais en avant, sur Celui qui «sera comme la lumière du matin, quand le soleil se lève, un matin sans nuages» (2 Sam. 23:4).
Dieu choisit ensuite Salomon pour succéder à David. Salomon commence bien et finit mal. Il avait dit à Dieu, devant le poids et la responsabilité de sa tâche : «Donne à ton serviteur un coeur qui écoute», et Dieu lui avait donné la sagesse (1 Rois 3:9, 12). Mais Salomon s’est écarté de la Parole de Dieu, dont il aurait dû s’occuper. C’est ce qui l’a ruiné, au faîte de la prospérité et de la gloire. Il a péché. L’histoire de sa chute commence quand il s’est allié à des femmes étrangères. Il n’avait pas demandé la richesse, mais, hélas, il s’en est beaucoup occupé et, pour en avoir beaucoup, il a employé de mauvais moyens : il a fait notamment du commerce avec l’Égypte pour avoir des chevaux. S’il avait lu la Parole, comme il y était invité, il n’aurait pas fait ce qu’il a fait (Deut. 17:16). La négligence de l’Écriture conduit toujours à la ruine. Si notre coeur nous sert de Bible, nous courrons à la ruine. C’est de l’Écriture seule qu’il faut nourrir notre âme, et de ce qui nous aide à la comprendre, c’est-à-dire du ministère oral et écrit de nos conducteurs. Nous sommes ingrats, aveugles et insensés de l’apprécier si peu. Alors le pied glisse, on ne voit pas juste, le coeur s’égare, la marche devient tortueuse. Dieu seul voit juste, parce qu’il sait tout. Il connaît tous les hommes à fond ; il connaît le diable ; il connaît l’état des choses ; le présent, le passé, l’avenir ; pour lui, le commencement et la fin d’une chose se touchent.
Après Salomon et son infidélité, il y a une division en Israël ; d’un côté les tribus de Juda et de Benjamin — le royaume de Juda — et de l’autre les dix tribus — appelées Israël ou Éphraïm. Jéroboam s’est mis à la tête des dix tribus, et il est écrit que c’est de par l’Éternel que cette chose a eu lieu (1 Rois 12:24). Jéroboam était très énergique, mais il marchait sans Dieu. La chair nous emmène loin de Dieu, mais ne nous ramène jamais à Dieu, jamais. Que Dieu nous donne de nous méfier de la chair, de la chair avec ses qualités et de la chair avec ses défauts ! Dieu ne reconnaît que les qualités de la vie divine.
Jéroboam fait deux veaux d’or. Il place l’un à Dan et l’autre à Béthel. Il se dit : «Il faut un centre religieux ; on ne tient pas les masses sans une puissance religieuse». Il établit une religion, offre lui-même sur les autels, invente des fêtes dans son propre coeur. Ceux qui s’écartent de l’Écriture inventent volontiers un système religieux de pensées et d’activités. Ils se croient très sages, alors qu’ils sont insensés. «Ce sont des fous» (Jér. 5:4). Mais Christ «nous a été fait sagesse de la part de Dieu, et justice, et sainteté, et rédemption» (1 Cor. 1:30). Sans la vie de Dieu, on n’a rien, car Dieu ne donne rien à la chair. Quelqu’un demandait à un serviteur du Seigneur : Que dois-je apprendre pour commencer ? — Apprenez bien ces six mots, dit-il : «la chair ne profite de rien». Leçon difficile, perdre nos prétentions et dire : nous ne valons rien.
Quand tout paraît ruiné, Dieu intervient ; il entre en scène et fait voir sa gloire. Alors on oublie l’homme. L’homme gâte tout, mais Dieu s’avance ; l’infidélité et la ruine de l’homme ne l’arrêtent pas. Jéroboam est en train de présenter l’encens sur un des autels qu’il a faits, celui de Béthel. Béthel signifie «maison de Dieu», et à ce nom de Béthel étaient liées des promesses. Un veau d’or à Béthel ! Dans la chrétienté, maison de Dieu, combien de veaux d’or ! «Venez à Béthel, dit le prophète, et péchez» (Amos 4:4). Toutes les fois qu’on établit une idole dans la maison de Dieu, on fait un veau d’or à Béthel.
Jéroboam est très actif. L’erreur est toujours plus active que la vérité. Celui qui n’a pas Dieu avec lui s’agite ; il est impatient, cherche à gagner des partisans, fait pression sur les autres. Celui qui marche avec Dieu s’en remet à Dieu pour toutes choses. Si nous marchons par la foi, Dieu est avec nous.
L’homme envoyé par Dieu crie contre l’autel : Autel, autel ! On te souillera et on brûlera sur toi des ossements d’hommes ! S’il avait seulement dit cela, les spectateurs auraient pu s’en moquer ; mais Dieu donne des preuves de ce qu’il va faire : l’autel se fend. Le roi fait alors valoir son autorité, il étend sa main et dit : Saisissez-le ! Il oubliait Dieu, mais Dieu ne l’oublie pas. Jéroboam, élevé au contact de la vérité, s’en est délibérément écarté : c’est un apostat. Il est repris sur le champ, sa main sèche. Il est arrêté par un homme de Dieu sans apparence. C’était une grâce pour Jéroboam, mais il n’en a pas profité et il a recommencé. Voilà le coeur de l’homme !
Plus tard, Dieu parle encore à Jéroboam en lui reprenant son fils, dont il est dit : «En lui seul, dans la maison de Jéroboam, a été trouvé quelque chose d’agréable à l’Éternel» (1 Rois 14:13). Cela n’a pas changé Jéroboam, il meurt dans son péché, qui reste l’infidélité-type pour tous les rois qui l’ont suivi : «Il marcha dans toute la voie de Jéroboam, fils de Nebath, et dans ses péchés par lesquels il avait fait pécher Israël» (1 Rois 16:26). Dieu l’a exprimé souvent à propos des rois infidèles, son coeur était sensible à cet outrage. Et quand les rois de Juda se sont alliés par mariage avec Israël apostat, ils ont participé au jugement qui a frappé la maison de Jéroboam. Dieu ne pense-t-il pas, au sujet de la chrétienté aujourd’hui : Elle a marché dans le chemin de Jéroboam, Jéroboam apostat, Jéroboam qui a ruiné la vérité, Jéroboam qui a inventé des choses selon son propre coeur, Jéroboam qui a endurci son coeur quand Dieu lui a parlé en miséricorde ?
L’homme de Dieu était plein de bonté, il a prié pour que la main de Jéroboam lui soit rendue et il a été exaucé. Voilà la bonté de Dieu ! Il a risqué sa vie en remplissant sa mission, il la perdra plus tard à cause de son infidélité. Il subit une première tentation de la part de celui que Dieu venait de guérir : Viens avec moi, tu te rafraîchiras. — Je n’irai pas chez toi, je respecte l’ordre que Dieu l’a donné, j’ai ma mission à remplir ; je suis venu par un chemin, je partirai par un autre. Il ne pouvait pas avoir de communion avec un ennemi de l’Éternel en mangeant à table avec lui, même s’il ne gardait aucun ressentiment contre Jéroboam qui, lui, l’aurait mis à mort sur le champ si Dieu n’était intervenu.
La deuxième tentation est plus subtile. Un vieux prophète était à Béthel ; il n’aurait pas dû être là ; il n’aurait jamais dû, par sa présence, sanctionner l’abomination de Béthel. Voilà un enseignement pour nous : ne jamais être dans une position qui sanctionne, dans quelque mesure que ce soit, le mal chez un autre, jamais. La piété sépare du mal. Si, étant chrétien, je me lie au monde, j’encourage le monde dans son péché. La forme de piété d’un chrétien mondain est bien plus dangereuse que la mondanité d’un inconverti, parce que le chrétien mondain encourage par sa présence le mal qui se commet dans le monde. Il participe à l’apostasie qu’il devrait publiquement condamner. Ce prophète, qui a perdu le sens de ce qui convenait, envoie un message menteur à l’homme de Dieu venu de Juda. L’épreuve est plus subtile que la première. Ne perdons jamais de vue la volonté que Dieu nous a communiquée. Cet homme de Dieu devait fuir Béthel et il mange le pain dans ce lieu devenu abominable. Alors Dieu lui parle en se servant du prophète qui lui a menti et qui lui annonce maintenant le jugement de Dieu : «Ton cadavre n’entrera pas dans le sépulcre de tes pères, parce que tu as été rebelle à la parole de l’Eternel», et c’est ce qui arrive. Le vieux prophète selle l’âne et l’homme de Dieu s’en va. Il est rencontré, sur le chemin, par le lion qui accomplit sa mission ; le lion a été plus obéissant à Dieu que le prophète. L’âne n’est pas tué, l’homme seul est tué. Tout, dans cette scène, nous dit que, même si on ne veut pas écouter Dieu, lui se fait entendre : la gloire de Dieu brille là. La suite a prouvé la vérité de ce que Dieu avait dit.
Que Dieu nous donne d’avoir à coeur sa gloire dans tout ce qu’il nous demande de faire, étant gouvernés par le seul souci de lui plaire, de faire sa volonté, sans être conduits par les influences et les passions qui entraînent si facilement les chrétiens ! Que Dieu fasse que nos coeurs soient remplis de Christ, qu’ils soient des sanctuaires où sa grâce est goûtée !
[LC n° 26]
28 janvier 1968
C’est un livre qui nous a paru, pour plusieurs, un peu difficile.
Ici, il nous est parlé d’un rôle que Satan a joué. Satan n’est pas inspiré ; un malfaiteur non plus. Mais tout ce qui est écrit dans la Parole, même ce qui se rapporte à Satan, le rapport des choses, est inspiré. Ne pensons pas que ce rôle que Satan a joué ici, ne fut que dans les temps reculés. Il s’en faut bien.
Ce qui est rapporté là de Job, est d’une importance pour chacune de nos vies pratiques, en ceci, c’est que Job était d’un temps très reculé. Il ne faisait pas partie du peuple d’Israël. Ainsi donc, nous avons à nous garder de limiter les manifestations de l’amour de Dieu à qui que ce soit. Dieu peut atteindre qui il veut. Il étend son amour plus loin que nous ne le pensons. Cet homme était remarquable par son intégrité.
Aucun ne peut dire, en dehors de l’Écriture, ce qu’est Satan. Ce n’est pas une influence. C’est un être. Le monde dit sur lui des choses déraisonnables. Et il ne s’aperçoit pas qu’il est gouverné par lui. Il y a des anges déchus enfermés dans l’abîme. Mais les démons, ceux qui sont avec Satan, ne sont pas enfermés. Ils sont ses serviteurs, et le servent.
Dieu se sert de Satan comme d’un serviteur. Car c’est, au fond, quand même, un être dépendant. Dieu se sert de Satan pour châtier un croyant. Dieu emploie Satan pour faire un travail, un certain travail, sans oublier que c’est Dieu qui commence. «Et l’Éternel dit à Satan : As-tu considéré mon serviteur Job, qu’il n’y a sur la terre aucun homme comme lui…» (Job 1:8). C’est lui qui arrête. C’est lui qui mesure.
La Parole nous dit ce qu’était Satan. C’était la plus élevée des créatures. Pas une créature n’était plus élevée que lui. Ézéchiel nous parle de lui. C’est très solennel, cela. Cette créature avait des gloires. Des pierres se trouvaient là, dans Satan. Mais n’oublions pas que Satan est un être dépendant. C’est très solennel. Ce sont des faits, cela ; les uns passés, et d’autres à venir.
Job était un homme de très grande valeur. Mais il y avait quelque chose à visiter, en lui.
Le méchant fait une oeuvre trompeuse. Il a creusé une fosse, et il y tombera. Il y a un verset, dans la Parole, qui en parle. «Celui qui égare les hommes droits sur un mauvais chemin tombera lui-même dans la fosse qu’il aura creusée» (Prov. 28:10). Mais les oeuvres de Satan le font reconnaître. Jamais Satan ne peut suggérer un acte bon, une bonne parole. Cela ne se trouve pas, en lui. Il est le méchant.
Un homme, un croyant, peut être appelé un méchant. Le méchant, c’est celui qui aime et fait le mal. Il est gouverné par Satan. Et c’est à cause de cela que, le mal dominant, l’assemblée doit ôter le méchant du milieu d’elle-même (1 Cor. 5:13). L’assemblée est obligée de s’en séparer. Le mal n’arrive pas tout à coup. Dieu parle une fois et deux fois. Et, si on n’écoute pas, c’est Dieu lui-même qui ensuite endurci le coeur. Il peut se servir de Satan, pour faire ce travail. C’est très sérieux. Il ne faut pas jouer avec ces choses. Que nous sachions répandre autour de nous ces solennelles vérités !
Le bagage que nous avons dans la tête n’est absolument rien. Ce n’est pas ce qui est dans la tête qui compte, mais bien plutôt la manifestation de la vie de Christ en nous. Cette vie nouvelle manifestée dans un homme, c’est cela qui compte.
Pour Satan, la vérité et l’amour sont totalement étrangers. Et c’est lui, Satan, qui a creusé sa fosse.
Dans ce monde dit chrétien, présenter Christ comme modèle, c’est l’affaire de Satan. Il le veut bien. Et n’est-ce pas ce que font les théologiens et les philosophes ? En attendant, derrière eux, Satan se moque d’eux. Ils accomplissent, sans s’en rendre compte, l’oeuvre de Satan. Mais parler de Christ, de la mort de Christ sur la croix, et de tous les résultats qui en découlent, cela lui est insupportable.
Satan voudrait souffler contre les frères, pour qu’on n’annonce plus la mort de Christ, car cela lui est insupportable. Il voudrait nous disperser complètement. Il ne voudrait plus nous voir réunis.
Satan a un pouvoir, dans la création, que nous ne soupçonnons pas. C’est lui qui met une haine, dans le coeur des hommes, contre une autre nation, que nous ne soupçonnons même pas. Satan a un pouvoir sur la création que nous ne trouvons pas ailleurs. C’est lui qui attise les convoitises, dans le coeur des hommes. On a comparé sa puissance extraordinaire à une image. Un frère donnait la comparaison suivante : Lorsque le soleil vous frappe à travers une vitre, il n’y a pas de danger. Mais placez-vous derrière une loupe, il vous brûlera. Il comparait ces choses, pour montrer de quelle manière infiniment puissante est le pouvoir de Satan sur les hommes, et que Satan a des moyens extraordinaires sur la création.
Certains hommes de ce monde viendront vous expliquer qu’un certain vent est venu, de telle manière, et a fait tomber la maison (Job 1:19). Ils veulent expliquer ces choses d’après leur propre intelligence. Tout cela, ce sont des historiettes, qui ne peuvent rien expliquer.
Certains pensent — et même parmi nous — que la prospérité extérieure est une bénédiction, que c’est parce que nous sommes sous la faveur divine. C’est à l’envers de ce qui est la réalité. En tous les cas, cela arrive souvent. Que nos conclusions ne soient pas le résultat d’une vue trop courte ! Que de fois, dans l’Ancien Testament, ne voyons-nous pas des fidèles gémir et crier à Dieu, dans leur détresse. Nous y voyons un Jérémie, un Job.
Mais Dieu avait quelque chose à dire à Job. Il avait à voir quelque chose de très grave, à reconnaître devant Dieu. Il était content de lui-même. Voilà le fond du livre de Job.
Il fallait la soumission, qui est toujours l’état parfait, se courber dans la paix, en ayant Dieu dans son coeur.
Juger par les apparences, c’est insulter Dieu. L’état extérieur des choses n’est pas le résultat de la vie intérieure d’un homme. C’est un grave jugement et, encore, une insulte à Dieu. Dieu montrera, en son temps, qu’il est le maître. Cela se verra, mais plus tard, au millénium.
Job est accusé par ses consolateurs, ses trois amis. Ils l’accusent de dissimuler du mal. Job leur assure qu’il n’avait rien sur sa conscience. En cela, Job disait vrai.
Job, comme nous l’avons dit, avait quelque chose à apprendre. Que voyons-nous, au chapitre 29 ? Et c’est «je», et c’est «moi», à n’en plus finir. C’est cela que Dieu voulait visiter. Mais qui est-ce qui met toutes choses à la lumière ? C’est Dieu. Job se complaisait en lui-même. Dieu visite l’état intérieur. Eh bien, chers frères et soeurs, nous avons tous à apprendre, dans ces choses !
Le chrétien fidèle, c’est le croyant qui a conscience de son néant. Vous n’aurez jamais la conscience de votre néant en dehors de lui. C’est pourquoi il faut engager les jeunes à avoir affaire au Seigneur. Veillons à ne pas nous mettre entre eux et le Seigneur. Le serviteur fidèle se cache derrière son Maître. Le service fait, il s’efface ; il disparaît.
Aux chapitres 38 et 39:37 : «Je suis une créature de rien» ; chap. 42:6 : «J’ai horreur de moi, et je me repens dans la poussière et dans la cendre». Précieuse parole, chers frères et soeurs ! Il est souhaitable que ces expériences ne soient pas faites à la fin de la course, mais que ces exercices se fassent au commencement de notre carrière. La flatterie : on flatte un frère, parce qu’on a besoin de lui. La flatterie, c’est un mensonge. Dieu ne flatte jamais.
Que le Seigneur nous accorde la grâce, lorsque nous avons accompli un service, d’oublier le bien qu’on a fait. On ne se nourrit pas de nous-mêmes. On ne se nourrit pas de ce qu’on a fait. On l’oublie. Bien des difficultés seraient ôtées, dans l’assemblée, si chacun de nous agissait ainsi. Mais mourir, c’est, au fond, s’effacer derrière le Seigneur. Je ne peux rien. Je ne suis rien. Nous avons besoin de veiller à cela.
Nos devanciers, c’est ainsi qu’ils agissaient. Christ était tout pour leurs coeurs. Et puis, ensuite, ils sont venus à penser qu’ils étaient des frères qui n’étaient pas trop mal. Ils ont pensé : Nous sommes bien ; nous sommes des gens très bien. Et puis Dieu les a visités. Les difficultés ont surgies. Le croyant le plus fidèle a besoin que les yeux de Dieu le suivent. Nous voyons ici que Dieu visite l’état intérieur.
Ce qui est à souligner, c’est que Job, vivant en un temps fort lointain, n’avait pas la Parole entre ses mains, comme nous, nous l’avons aujourd’hui. Il ne possédait qu’une connaissance bien faible, en comparaison de celle que nous avons maintenant. Il disait : «Et moi, je sais que mon rédempteur est vivant, et que, le dernier, il sera debout sur la terre» (Job 19:25). Tandis que nous, nous avons le Consolateur, qui nous met en relation directe et constante avec Christ.
Que nous ne nourrissions pas de satisfaction de nous-mêmes ! Un de nos frères devanciers, après avoir fait une visite à une personne, qui disait à ce frère : «Quelle bonne visite vous m’avez faite !», a répondu : Satan me l’a déjà dit à l’oreille. Voilà, chers amis, quelle était la qualité de ces croyants. Il ne s’agissait pas de les détourner en quoi que ce soit de la force qu’ils possédaient, dans cette vie secrète avec le Seigneur.
«Qu’il se retire de l’iniquité, quiconque prononce le nom du Seigneur» (2 Tim. 2:19). Et pourquoi ? Afin de devenir un vase utile au Maître. Et s’il n’est pas utile au Maître, il est souvent néfaste.
Nous sommes exhortés à prendre garde à ces choses. Sinon, c’est un endurcissement qui augmente. Ah, nous sommes accablés de devoirs, et nos journées sont remplies d’occupations ! À chacun de voir s’il peut jeter du lest, pour être plus libre pour le Seigneur. On peut venir à toutes les réunions, et ne pas être, pour cela, fidèle au Seigneur. S’il y a des troubles parmi nous, c’est que Dieu veut nous visiter. On peut être chez soi, et être rempli de soi-même.
La sécurité, où est-elle ? Avec le Seigneur. La force, où est-elle ? Avec le Seigneur. La joie, où est-elle ? Avec le Seigneur. Que le Seigneur nous accorde d’user de ces grâces merveilleuses.
[LC n° 27]
Mardi 22 octobre 1957
Ces états d’âme sont bien remarquables. Comment réalisons-nous celui du verset 4, et celui du verset 5 ?
Cette âme a été exercée pour voir, en dehors des mauvais jours, ce qui peut la séparer de Dieu, la détourner de cette contemplation de Dieu. Cette âme a recherché Dieu, alors qu’elle aurait pu rechercher mille autres choses. Et Dieu la garde, au mauvais jour. Nous pouvons être séparés de Dieu par des choses qui ne sont pas éprouvantes — nous pouvons le constater tous les jours — et aussi par des épreuves. Les deux choses sont néfastes pour l’âme.
Pour cette âme, Dieu est un Dieu cherché et connu en dehors du jour de la détresse, et un Dieu cherché et connu au jour de la détresse. C’est une connaissance de Dieu expérimentale et individuelle.
Par confrontation avec le verset 20 du Psaume 31, on voit que le mot «loge» particularise le prix de ce que représente d’être mis à couvert dans une loge. Il y a là une protection contre des dangers divers. Le fidèle, dans tous les temps, a dû être mis à l’abri des dangers que la malice des incrédules et des infidèles a mis devant ses pas. Mais c’est une consolation, une protection, de grande valeur, lorsque Dieu se place entre l’âme et les circonstances. «Calomniés, nous supplions», dit Paul (1 Cor. 4:13). En voilà un qui était à couvert dans sa loge !
La valeur des explications de ces versets, c’est leur application précise et pratique de la vie de la foi, dans tous les temps. On est caché dans un endroit, comme si on était tout seul, et comme si on avait Dieu pour soi seul.
Le rocher est une image infiniment plus présentée et plus répandue, dans l’Écriture. Sur le rocher, on est beaucoup plus près de Dieu. Et le terrain y est plus solide.
Il n’y a pas de doctrine, ici, mais ce qui est le but de tout développement doctrinal : amener l’âme en relation immédiate avec Dieu.
Que de fois le mauvais jour nous prend en désarroi ! Il n’y a jamais cela, chez le Seigneur. Chez lui, il n’y avait pas d’intervalle, entre le coup reçu de la part des hommes, et sa réalisation de la présence de Dieu. Tandis que, pour nous, il y a un long intervalle, parfois des semaines.
C’est étonnant de voir, au verset 4, que cette âme ne demande rien de ce qui constitue la plus grande partie de nos requêtes. Nous faisons souvent de Dieu notre serviteur. Et, ce qui est plus effrayant, c’est que nous voudrions en faire le serviteur de nos caprices. Ici, cette âme demande Dieu. On trouve cela chez Abraham, mais pas toujours ; chez Paul, presque toute sa vie ; chez chacun de nous, Dieu le sait.
Si nous réalisions toujours Dieu entre nous et notre détresse, nous n’aurions jamais de détresse ; mais nous souffririons. Jamais le jour de la détresse n’est vu à la légère, dans la Parole. Phil. 4:6-7 correspond au jour mauvais. Et ce qui suit ces versets correspond à la vie ordinaire. Ah, comme nous sommes des théoriciens !
David était très pur de coeur. Il a eu un égarement, dans sa vie. Mais cela a été une chute caractérisée, beaucoup moins grave qu’un état de mondanité ou un état charnel. Et il a eu un état d’âme très bon, avant et après. David n’a pas eu un coeur double. Salomon a eu un coeur multiple. Remarquons que jamais nous ne trouvons qu’un fidèle demande l’épreuve. Nous n’avons pas à la demander. Ce serait de la suffisance. Nous avons à rechercher Dieu, à lui demander : «Délivre-moi du mal». C’est facile, de parler de Dieu. Mais il s’agit ici d’un Dieu qu’on connaît — et cela, c’est une autre affaire — et un Dieu qu’on connaît présentement, et avec qui on ne se contente pas d’avoir vécu, il y a dix ans. C’est autrement difficile que de vivre sur des souvenirs.
Ici, on voit l’âme qui n’est pas préoccupée de l’effet qu’elle aura sur les autres, ou même de son service. C’est le secret pour ensuite accomplir le service que Dieu prépare.
Aucun credo, aucun dogme, aucun ensemble de vérités, jamais, ne donnera cela, savoir Dieu dans une âme. Les difficultés sont trop grandes. Le mauvais jour est trop fort, trop mauvais. Il faut autre chose qu’une vérité ; il faut Dieu. C’est trop éprouvant, de marcher par la foi.
Autre trait qui se dégage : quand on relit la vie de David, on a l’impression que cet homme a été bien seul, seul à son niveau. Abraham était seul. David a bien eu un Jonathan ; mais il l’a abandonné. «Vous me laisserez seul», a dit le Seigneur, «Je ne suis pas seul, car le Père est avec moi» (Jean 16:32).
C’est la seule vie que Dieu reconnaisse. La vie autre que par la foi, Dieu ne la reconnaît pas. Dans la mesure où nous marchons par la foi, notre vie est pleine. Pour tout le reste, notre vie est vide.
[LC n° 28]
9 décembre 1956
On trouve, dans les Psaumes, plusieurs autres passages où on voit une âme se parler à elle-même. Et il arrive souvent qu’il en est ainsi, lorsqu’une âme souffre, ou lorsqu’elle est dans une grande joie. C’est ce que nous trouvons, par exemple, dans d’autres Psaumes. «Éveille-toi, mon âme» ; «Éveillez-vous, luth et harpe» (Ps. 57:8). Nous avons tous connu, à cet égard, des moments d’une sorte et de l’autre. Il nous est arrivé à tous ainsi d’être seuls, et de sentir que nous étions seuls avec Dieu et devant Dieu, et de nous parler à nous-mêmes. Ce n’est pas une chose que l’Écriture interdise, puisque des exemples nous en sont donnés. Et, en particulier pour les moments pénibles, que de fois il nous est arrivé à tous de parler ainsi, dans une sorte de soliloque réalisé devant Dieu, et de répandre notre âme devant Dieu, nous-mêmes prêtant l’oreille à ce que nos coeurs exprimaient.
Ce sujet des épreuves et de la discipline (les deux ne sont pas nécessairement liés) est un sujet qui est toujours d’actualité. Aucun moment ne se passe sans qu’il y ait, ici ou là, une âme ou deux qui soit, qu’on le sache ou non, dans ces circonstances, où elles sont dans des exercices, des difficultés et des combats, que nous pouvons ignorer. Nous pouvons bien dire cela de notre passage ici-bas, sans qu’il acquière toujours, à tout moment, l’intensité que nous pouvons connaître à certains moments particulièrement, où nous sommes mis à l’épreuve et où, d’une façon ou d’une autre, nous sommes tenus sous la discipline, dans le meilleur sens du mot — car la discipline est loin d’avoir seulement un sens péjoratif.
Les sujets que nous trouvons dans l’Écriture nous instruisent à cet égard. Nous avons, dans l’épître aux Hébreux, un passage qui traite, entre autres, de la discipline que le Seigneur exerce. Et ne pensons pas qu’il exerce cette discipline seulement par moments. Il l’exerce d’une façon continue. La façon dont il l’exerce varie d’un moment à l’autre. Mais il n’y a pas un moment, dans notre vie chrétienne, où le Seigneur nous perde de vue, chacun de nous. Du moment que quelqu’un est au Seigneur, alors commence pour lui, non pas les travaux de la grâce pour l’amener à cette connaissance, mais les travaux de la grâce pour le préparer pour la joie éternelle avec le Seigneur. On a souvent comparé cela avec la pierre, qui est tirée toute brute de la carrière, et qui est soumise à des travaux nombreux, avant qu’elle ait pris la forme définitive de l’intention de celui qui dirige les travaux, que celui qui dirige tout veut lui donner en vue du dessein final. C’est pourquoi chacun, chaque jour, reçoit, en vue de ce dessein final, telle instruction. Il traverse telle circonstance, pour être formé pour le moment et pour le lieu où nous entrerons bientôt, quand le Seigneur nous y appellera.
Nous oublions trop qu’une fois qu’une âme est convertie, c’est quelque chose qui commence. Sans doute, c’est un passé qui finit. Mais nous pouvons dire que c’est une éternité qui commence, une période nouvelle qui commence, et se terminera dans l’éternité. Ce que nous rencontrons chaque jour est ce que Dieu peut, soit permettre, soit préparer (il ne faut pas croire que tout ce qu’il permet, il l’approuve). Mais il peut se servir de tout pour nous, finalement, comme il l’entend. C’est une chose qu’on a de la peine à apprendre, et que nous apprenons lentement, et à la longue, que Dieu a un dessein à l’égard de tout croyant. Il a un but précis à l’égard de chacun de nous. Il s’occupe de chacun. En apparence, il peut le perdre de vue ; en fait, jamais. En apparence, il peut se désintéresser des circonstances. Nous pouvons croire qu’en apparence, une journée qui s’est passée dans ce qu’on pourrait appeler le calme plat, est une journée pendant laquelle Dieu ne s’est pas occupé de nous. Ce n’est pas le cas. Dans cette journée, Dieu s’est occupé de nous, et a pensé à nous en amour et en vérité, même si — comme c’est très souvent le cas — nous l’ignorons.
Dans Hébreux, nous avons d’abord deux choses qui nous sont signalées, deux dangers différents quant à leurs caractères, à leurs causes. Ces deux dangers, à l’égard de la vie chrétienne et de la marche chrétienne, sont l’un, un fardeau, l’autre, un péché. Et, en méditant sur ces deux expressions, nous ne pouvons pas ne pas être frappés sur ce que, dans leur simplicité, elles embrassent comme profondeur d’expérience et de fait : le fardeau, le péché. Un fardeau pour le coeur ; un péché, fardeau pour la conscience : cela résume tout ce que nous pouvons rencontrer, et qui nous empêche de marcher et de vivre en chrétiens, et qui, pour ainsi dire, peut arrêter notre accroissement. Un fardeau, c’est un souci ; c’est l’épreuve ; c’est le chagrin. C’est ce qui oppresse le coeur, et risquerait d’arrêter le développement de la vie de l’âme, la vie spirituelle. Lequel d’entre nous, lorsqu’il a subi un choc, lorsque, dans son sentier, a surgi, tout à coup ou d’une façon plus ou moins prévisible, une circonstance difficile, n’a pas éprouvé que ce fait, ce fait pénible, cette circonstance douloureuse, s’est placé entre son coeur et le Seigneur ? C’est difficile, de trouver quelqu’un dont l’âme n’a pas été atteinte, de cette façon, par une circonstance de ce genre. Je ne dis pas que l’âme n’a pas été atteinte. Au contraire, il serait anormal qu’elle ne le fût pas. Mais il serait sans doute difficile, et probablement ne trouverait-on personne au monde, pas un chrétien, qui ne doive confesser que telle épreuve, dans sa vie, telle circonstance, a rompu le lien qui, pratiquement, unit l’âme du croyant au Seigneur. C’est là le danger de l’épreuve.
Il y en a au moins un (pour que nous ne pensions pas que ces pensées, ces considérations, soient purement théoriques, et qu’elles ne fassent pas partie de la vie chrétienne), et un homme, un vrai homme, qui a réalisé cela. C’est notre Seigneur Jésus Christ. Les épreuves ne lui ont pas manqué. Les coups qu’il a reçus, la Parole nous en donne, nous en décrit, quelques-uns, mais en bien petit nombre, par rapport à tout ce qu’il a rencontré. Jamais, à aucun moment, dans aucun lien, les épreuves qu’il a rencontrées, et que le Père permettait, jamais une seule n’a réussi à le séparer de la communion parfaite avec son Père. Arrêtons-nous, chers amis, sur cela : Jésus qui — nous le lisons, c’est écrit — est un modèle. Seulement, nous disons bien que Jésus est un modèle ; mais, souvent, nous ne désirons pas le suivre. On peut chercher, dans la vie de Jésus ; on ne trouvera jamais qu’un fait, une circonstance, une insulte, un outrage, la trahison de ses amis, l’ingratitude de la foule tout entière, n’a altéré, d’une part, ses relations avec son Père, et d’autre part, la manifestation de cette perfection vis-à-vis des autres.
Voilà le chemin qui nous est tracé, chers amis. Et je parle avant tout, ici, pour le moment, de ce que nous rencontrons, et qui s’appelle épreuve. Nos coeurs sont sensibles à l’épreuve ; et cette sensibilité à l’épreuve est loin de déplaire à Dieu. La dureté dans l’épreuve serait, au contraire, anormale. Les pleurs dans l’épreuve sont tout à fait à leur place. Et, pour nier cela, il faudrait arracher plus d’une page de l’Écriture.
Eh bien, qu’il nous soit donné, chers amis, d’être enseignés, de la part du Seigneur, à savoir monter les degrés — comme disait quelqu’un — de ce chemin qui nous conduit jusqu’au trône de la grâce, pour avoir du secours au moment opportun (Héb. 4:16). Quand l’épreuve nous assaille, elle se place très souvent entre notre coeur et le Seigneur. Et le travail de la grâce, de la foi, c’est de retrouver le Seigneur se plaçant entre notre coeur et l’épreuve. Nous pouvons prier les uns pour les autres, à cet égard.
Un autre qui a suivi de très près son Maître, c’était un homme pécheur. Il s’appellait l’apôtre Paul. C’était très difficile de le priver des consolations que son âme trouvait dans le Seigneur, et dans le Seigneur tout seul.
Nous avons beaucoup d’appuis, beaucoup plus que nous ne le pensons. Et ces appuis sont tout à fait légitimes. Mais ce ne sont pas des appuis, proprement, pour la vie de nos âmes. Il était très difficile de placer, entre le coeur de l’apôtre et Christ, une circonstance, un outrage, une prison. En prison, voilà un homme qui était plus heureux qu’en dehors de la prison. Le Seigneur nous enseigne ce secret-là, dans la vie. Notre vie est faite de menus détails, souvent aussi de circonstances beaucoup plus marquantes. Et, si nous sommes exercés à chercher le Seigneur jour après jour, dans le déroulement des circonstances habituelles, à le chercher et à le trouver, nous saurons mieux le trouver aussi dans les circonstances exceptionnelles.
Que le Seigneur nous y aide, et encourage les jeunes chrétiens à beaucoup se tourner du côté du Seigneur. David a appris cela. Le lion et l’ours ont été, pour lui, une occasion, tout jeune qu’il était, d’avoir Dieu avec lui, pour faire face à un danger. Cela a marqué tout sa vie. La vie de David a été marquée par ces deux faits initiaux, qui étaient un secret pour lui. Et gardons ces secrets ; ne les divulguons pas. Cultivons avec le Seigneur ces relations soutenues. Et gardons ce qu’il nous dira, et qui ne sera pas toujours — il s’en faut bien — des choses qui pourront plaire à la chair. Heureux celui qui a commencé avec de telles expériences dans la vie chrétienne. Heureux celui qui est exercé pour continuer de cette manière. Heureux celui à qui il est donné de commencer, à quelque moment que ce soit de sa vie chrétienne. Ce n’est jamais trop tard.
Pour parler du Seigneur dans sa vie d’homme de douleur et de communion continue avec le Père, nous ne pouvons pas passer sous silence qu’il y eut, dans sa vie, un moment, et un seul, où cette joie lui a été retirée. Ce moment, c’est celui qu’il a accepté de rencontrer, de traverser, avec la souffrance qui y était comprise. C’étaient les trois heures d’abandon où — nous avons à le rappeler et à le dire fermement, parce que cela n’est pas toujours reçu — il a perdu la joie de la communion avec son Père. Et il fallait qu’il en fut ainsi. Pour lui, c’était l’épreuve absolue, la souffrance absolue. Il ne pouvait pas compter, en entrant dans ces souffrances, sur la moindre consolation. C’est une chose unique.
Pour nous, quelle que soit notre douleur, nous pouvons nous tourner vers Dieu. Même un chrétien qui a manqué, et même gravement manqué, où voulez-vous qu’il se tourne ? Vers qui faut-il qu’il se tourne ? Y aurait-il toutes les portes fermées, si j’ai manqué, il y a une porte qui n’est jamais fermée, pour un chrétien. Jamais la porte qui le conduit à Dieu n’est fermée. Le péché qu’il a commis interrompt la communion avec Dieu. Mais, s’il n’avait pas la ressource de pouvoir s’adresser à Dieu, et s’il n’avait pas, d’après l’Écriture, l’encouragement que, quel que soit son manquement, il peut crier à Dieu, évidemment, il n’aurait qu’une issue, le désespoir. Il n’aurait que cela. Or ce n’est pas le chemin que nous donne l’Écriture. Pour le chrétien, il y a toujours un chemin.
Et nous arrivons ici à cet autre côté dont parle l’épître aux Hébreux : «le péché qui nous enveloppe si aisément».
Quand nous avons manqué, alors le péché paralyse notre course, et un fardeau la paralyse. Une épreuve la paralyse ; mais un péché aussi.
Le fardeau oppresse le coeur. Et chacun de nous sait que la tendance, dans une épreuve, c’est de se nourrir de sa douleur : «Mon âme refuse d’être consolée», dit le psalmiste ailleurs (Ps. 77:2). Nous avons tous passé par là, à vouloir nous nourrir de notre douleur ; alors que nous avons à l’apporter au Seigneur, qui apporte là la douceur de sa présence. L’épreuve reste. Que de choses qui ne peuvent pas être changées ! L’épreuve reste. Les larmes continuent ; mais leur amertume n’est plus la même. Que le Seigneur nous donne d’en faire l’expérience.
Mais alors, pour le péché, il y a une chose qui est plus grave. C’est que le péché est un poids pour la conscience. N’y a-t-il pas d’issue ? Il y a une issue, là aussi ; il y a un chemin. Nous avons d’abord à rejeter le péché, à fuir le péché. Et c’est une instruction que nous trouvons ailleurs. Et c’est une très grande sagesse, que nous avons à retenir jusqu’à la fin de notre carrière. Le grand secret de la sécurité, ce n’est pas de se débattre avec le péché, de se battre avec lui ; c’est de le fuir. La sagesse, c’est de fuir, fuir le péché le plus loin possible, et tout ce qui risque de contaminer notre âme. Que Dieu nous aide en cela.
Mais, quand nous avons manqué — et lequel d’entre nous n’a pas connu cela — si Dieu n’était pas Dieu, évidemment, nous n’aurions pas de ressource. Mais nous en avons une. Et cette ressource, c’est de nous tourner vers Dieu lui-même. Quel que soit le péché que nous avons commis, le premier offensé, c’est Dieu. Celui qui reçoit le plus d’outrage, c’est Dieu. Tout péché est, avant tout, un péché commis contre Dieu. Eh bien, tournons-nous vers Dieu. Un enfant de Dieu est un enfant de Dieu même s’il est désobéissant. Mais il est un enfant de Dieu à l’égard duquel Dieu établit une relation de réserve. Il n’est jamais dit que Dieu cache sa face de ses enfants, dans quelque état qu’ils soient. Il ne la cache jamais. Pour cacher sa face à un chrétien, même en mauvais état, il faudrait que Dieu cache sa face à Christ, ce qui n’est pas possible. Tel que Jésus est devant Dieu, tels sont les siens. Les siens sont aimés comme Jésus est aimé ; parfaits comme Jésus est parfait. Sa justice est leur justice. C’est à retenir ; c’est le fondement de la vérité.
Mais ce qui s’interpose entre notre âme et Dieu, c’est, quand nous avons un manquement, un nuage. Il n’est pas sur la face de Dieu ; il n’est pas sur la face de Christ. Il n’y a pas de voile — pour employer un mot de l’Ancien et du Nouveau Testaments. Nos péchés ne mettent jamais un voile sur la face de Christ. Dire cela n’est pas conforme à l’Écriture. Mais ils mettent un voile sur notre coeur. Ils mettent de la gêne dans nos rapports avec Dieu. Et nous en faisons bien souvent l’expérience. Si nous n’avions pas Dieu pour nous tourner vers lui quand nous avons manqué, nous pourrions dire : C’est le désespoir ; nous n’avons personne. Ce n’est pas mon frère qui peut enlever ce nuage que mon péché a établi sur mon coeur devant Dieu. Ce n’est pas mon frère, ni tous les frères ensemble. Qu’est-ce que j’ai à faire ? J’ai à confesser mon péché (nous le trouvons en toutes lettres ; ce n’est pas le sujet, ici) à Dieu, à me mettre d’accord avec Dieu. Dieu met son doigt sur mon péché. Je reconnais le mal ; je glorifie Dieu en cela. Je mets le péché de mon côté ; je justifie Dieu. Alors je jouis à nouveau de la face de Dieu.
«Rejetant tout péché», cela veut dire, a priori, qu’il y a une sagesse préventive. Il y a ce que la piété, préventivement, accomplit. Et plus un chrétien vit dans la crainte, plus il se défie, moins il sera porté à jouer à ce qui peut nuire à son âme. Il y a une sorte d’instinct spirituel qui se développe, et nous fait sentir que ceci sera mauvais et cela sera bon, et qui nous apprend (comme dit Héb. 5:14) «les sens exercés à discerner le bien et le mal». On ne pose plus la question : «Quel mal y a-t-il à ceci ou à cela ?». Quand on est exercé, la question est la suivante : «Est-ce que ceci réchauffera mon coeur, réchauffera mes affections pour le Seigneur, ou les refroidira ?».
Nous trouvons ensuite la discipline. Mais que personne ne pense que la discipline a un sens péjoratif. Au contraire, la discipline, ce sont les soins de l’amour à l’égard de ceux que Dieu aime. Nous avons beaucoup de choses à apprendre, dans la vie, et beaucoup de choses à désapprendre. Nous avons beaucoup d’illusions à perdre, et d’abord sur nous-mêmes. C’est un signe très fort, de voir ce progrès dans une âme qui, au lieu de nourrir de bonnes pensées à son sujet, ne s’occupe pas de soi. On l’a souvent dit — et, en prenant de l’âge, nous nous rendons compte que ceux qui nous l’ont appris avaient passé par là — de ne pas s’occuper de soi, sauf pour une seule chose, se juger. Mais, quand on s’est jugé, qu’on est au large avec Dieu, ne pas penser à soi, ni en bien, ni en mal, mais s’occuper de Christ et s’occuper des autres, pour leur être utile. Et, si on a à penser à soi, comme disait un serviteur du Seigneur — et retenons ces paroles, qui sont le fruit de longues expériences d’homme sérieux — penser à soi avec un mépris silencieux. Quel heureux état !
Il est encore écrit que «Dieu résiste aux orgueilleux, mais il donne la grâce aux humbles» (1 Pier. 5:5). Personne ne peut savoir si son frère est orgueilleux ou humble. Il peut avoir l’air de ceci ou l’air de cela, et n’être pas ce qu’il paraît. Mais Dieu le sait. Il ne s’y trompe pas ! C’est Dieu qui résiste aux orgueilleux et qui donne la grâce aux humbles. Il n’a besoin de personne, pour qu’on le renseigne sur l’état intérieur d’un coeur ou d’un autre. Il se charge de le connaître.
Dans 2 Cor. 12, voilà un beau passage. Que de fois il a pu nous consoler, chers amis, et aussi nous instruire. Voilà un très beau passage. C’est du christianisme pratique, cela. Ce qui n’est pas du christianisme pratique, n’est pas du christianisme de Dieu. Dieu ne parle pas pour qu’on ne tienne pas compte de ce qu’il dit.
Au chap. 12 de 2 Cor., voilà l’apôtre Paul qui nous lève le voile, un peu, sur une certaine tranche de sa vie. Et il nous dit qu’il a eu des révélations exceptionnelles. Ce n’était pas un mystique, dans le mauvais sens du mot. C’était un homme de sens très rassis. Il savait ce qu’il faisait, ce qu’il voyait. Et il savait s’occuper des détails matériels, à l’occasion d’un esclave qui avait quitté son maître. Il savait s’occuper de toutes sortes de questions matérielles, le cas échéant. Ce n’était pas un mystique qui se perdait dans les fruits de son imagination. C’était quelqu’un qui était à la fois de sens rassis et hors de sens : «Car si nous sommes hors de nous-mêmes, c’est pour Dieu ; si nous sommes de sens rassis, c’est pour vous » (2 Cor. 5:13).
L’apôtre Paul nous révèle là qu’il avait une épreuve. Il en parle. Cette épreuve, c’était son écharde. C’était une épreuve, une discipline. On ne pouvait pas dire que l’apôtre Paul avait manqué en cela. Non, il n’avait pas manqué. Il n’a pas mauvaise conscience, quand il parle ainsi. Cette épreuve a été une épreuve préventive. Mais il n’a pas manqué. Voilà un exemple où la discipline n’a pas un sens péjoratif ; elle n’a pas le sens de châtiment. On assimile souvent discipline à châtiment. Ce sont deux choses distinctes.
L’apôtre Paul, donc, avait eu des révélations ; et il était encore dans la chair. Nous sommes dans la chair. Nous pouvons nous enorgueillir d’être des chrétiens, par rapport à ceux qui ne sont pas convertis. Nous pouvons nous enorgueillir d’être des gens sérieux, par rapport à ceux qui ne le sont pas. On peut s’enorgueillir de tout, être fier de sa piété, se nourrir journellement, aujourd’hui, de la piété dont on a fait preuve hier. On n’en finit jamais ; jamais on n’en peut sortir. Il y a un moyen d’en sortir ; mais ce n’est pas un moyen humain. Aucun n’y échappe. On ne peut pas dire : Le plus pieux, le plus sérieux, est à l’abri de ce danger. Il n’y a pas, dans ce monde, de situation humaine à l’abri de cela. De sorte que, si nous pensons à tel de nos frères qui est en danger de s’élever parce qu’il a ceci que je n’ai pas, autre chose que je n’ai pas, je dois veiller sur moi-même à ne pas m’élever en pensant à ce que je pourrais avoir que lui n’a pas. De sorte que je dois d’abord penser à moi-même, à veiller à avoir mon âme en ordre pour moi-même. Voilà le secret du vrai bonheur, du grand bonheur : veiller à avoir une âme heureuse avec le Seigneur.
Alors on peut s’occuper des autres, quand le Seigneur nous donne de le faire ; penser aux autres, prier pour les autres. On a l’oeil beaucoup plus clairvoyant pour discerner une tendance chez d’autres. Et on prie pour eux, le cas échéant ; on peut servir. Mais, si nous ne sommes pas en bon état, nos services porteront à faux ; et nous oublierons qu’il y a la parabole de la paille et de la poutre, qu’il ne faut jamais perdre de vue. Quel bonheur que nous ayons la Parole de Dieu !
Nous avons là un serviteur, un homme sans doute unique, qui vivait bien près du Seigneur. Nous pouvons être certains de cela. Il a reçu des révélations — c’était un apôtre. Il a reçu des choses qui sont données de Dieu directement. Aucun homme, aujourd’hui, ne reçoit des révélations. La Parole de Dieu est complète. On peut recevoir l’intelligence des Écritures ; c’est sûr. Elle varie d’un chrétien à l’autre, suivant sa piété, ses relations avec Dieu. Mais ce ne sont pas de nouvelles révélations, sauf si on entend par là la révélation, à un chrétien ou à plusieurs, de la pensée déjà révélée dans l’Écriture. L’Écriture n’est pas ouverte aux intelligents, approfondie d’une façon égale, parce que Dieu ne peut pas nous parler en faisant abstraction de notre état moral. L’intelligence, le progrès spirituel, sont toujours fonction de notre état moral pratique. Il suffit d’un bon état moral pour avoir cette intelligence spirituelle. Il ne suffit pas de ne pas être mondain. On peut ne pas être mondain, et ne pas être en bon état. Il suffit d’être en bon état intérieur, où on se juge. «Dieu résiste aux orgueilleux, mais il donne la grâce aux humbles». Non seulement on se garde du monde, mais de soi-même.
Nous avons donc bien à faire, chers amis. Nous avons toujours à faire. Mais c’est la grâce de Dieu qui fait cela. Ce ne sont pas les regards de la loi ; ce n’est pas la condamnation de la loi. Et ne pensons pas que la grâce fasse bon marché, et un meilleur marché, de nos manquements ; bien loin de là. Elle touche des points sur lesquels la loi glissera facilement. Mais la grâce s’occupe de nous, nous supporte, nous relève, nous redresse, nous corrige.
Voilà l’apôtre. Il avait ses révélations. Et, pour qu’il ne s’enorgueillisse pas (la chair de Paul n’était pas meilleure que la nôtre), ne puisse pas penser : Il n’y en a pas deux comme toi (en effet, il n’y en avait pas deux), il a reçu une écharde, un ange de Satan pour le souffleter. C’est très sérieux. Il a prié trois fois pour que l’écharde lui soit enlevée. Voilà une triple prière non exaucée, et de la part d’un homme comme Paul !
Alors le Seigneur, qui connaissait bien son serviteur, dit : Non, Paul ; il faut que tu gardes ton écharde. Qu’était-ce ? On a beaucoup pensé — c’est la curiosité qui s’occupe de cela ; rappelons que la curiosité est toujours charnelle. Peut-être était-ce ce qu’on trouve dans les Galates : il avait une infirmité pour parler ; cela l’humiliait publiquement. Une humiliation publique, on n’aime pas cela. Aucun de nous n’aime cela. Avoir une humiliation publique permanente, devant tout le monde, on n’aime pas cela. On aime, au contraire, ce qui nous met en avant, ce qui orne l’homme. Mais le Seigneur, en apparence, a déshonoré son serviteur.
Voilà un homme qui était humilié par ce qu’il portait. Il n’avait point d’apparence extérieure. Mais «ma grâce te suffit, car ma puissance s’accomplit dans l’infirmité». La puissance de Dieu ne va pas avec l’apparence de l’homme ; retenons cela. L’énergie, la force de l’homme, les capacités de l’homme, quand elles sont au service de la volonté de l’homme, Dieu ne peut pas aller avec cela. C’est constant, dans l’Écriture, Ancien et Nouveau Testaments.
Que le Seigneur encourage les chers jeunes frères à chercher leur force auprès du Seigneur. Nous supplions qu’ils le fassent. Que le Seigneur leur donne de le faire, et d’apprendre ainsi (on l’apprend lentement, sauf quelquefois plus rapidement) que le Seigneur ne donne pas son appui à ce qui est de la chair, la volonté de la chair. On n’y croit pas vite. On est très lent, avant de le croire et avant de l’accepter. Et encore, peut-être faut-il, pour l’avoir bien compris, attendre qu’on en ait fini avec la vie dans ce monde. C’est bien possible.
Chers amis, notre bonheur, c’est Dieu lui-même. Et nous jouissons de Dieu dans la mesure où nous ne nourrissons pas ce que lui n’approuve pas, de nos prétentions. Quelqu’un qui est intelligent, quelqu’un qui a toutes sortes de qualités, ses qualités ne sont pas perdues. Mais elles ne doivent pas être au service du ressort moral intérieur, qui est la volonté de l’homme. Il faut que Dieu brise la volonté. Et il se servira de cet homme intelligent s’il le veut.
Quelle erreur, quel égarement, que tout ce qui est fait, enseigné, loin de la présence de Dieu !
Nous avons Dieu avec nous quand nous ne sommes rien. Quand nous étions jeunes — nous nous en souvenons bien, bien que cela commence à être très loin — nous avons toujours été frappés de ce que nos frères d’alors, dont beaucoup étaient très simples, sachant tout juste lire — tous n’étaient pas ainsi ; il y en avait de très capables, même éminents — nous mettaient en garde, et n’ont jamais cessé de nous mettre en garde, contre le danger qu’il y a, à vouloir mettre en avant la capacité de l’homme. On trouve cette tendance chez l’homme le plus insignifiant. Ne pensons pas que ce soit seulement le lot des hommes les plus capables.
L’apôtre dit : «Je prends plaisir dans les infirmités, dans les outrages, dans les nécessités… dans les détresses pour Christ». Qu’est-ce que les infirmités ? L’apôtre se glorifiait dans son écharde. On n’est pas fier d’avoir une écharde. On n’est pas fier d’avoir quelque chose qui humilie. Cela ne chargeait pas sa conscience. Faisons bien attention ; ce n’était pas le poids d’un manquement. C’était un brisement, qui contribuait à briser la volonté de Paul, à briser le vase dans lequel le trésor était contenu. Et l’apôtre Paul qui, avant sa conversion, était un homme auquel il n’aurait pas fait bon de donner une écharde — nous le comprenons bien — et qui ne devait pas supporter facilement un joug, voilà un homme qui peut dire : «Je me réjouis dans mes peines… pour Christ». Une infirmité, c’est tout ce qui brisait sa volonté, tout ce qui contribuait à le rendre capable de jouir davantage de Christ. Alors il dit : Je me réjouis ; car quand je suis faible et brisé, c’est alors que je suis fort, parce que j’ai Dieu avec moi et pour moi. Nous ne l’aurons pas autrement, chers amis, jamais.
Que le Seigneur nous encourage tous. Ceux qui ont bien des années de vie chrétienne ici, nous savons que nous avons besoin de cela. Nous en avons eu besoin dans la semaine qui vient de passer. Nous en avons besoin une heure après l’autre. Nous avons dû nous humilier bien des fois, et chercher le Seigneur dans le secret, et dire : Je n’ai pas su me contenter de toi ; je n’ai pas su être dépendant, être obéissant ; et je n’ai pas su chercher ta volonté à toi seul, et ta gloire à toi seul.
Mais, chers amis, que cela nous encourage. Et veuille le Seigneur produire cela chez les jeunes. Ce n’est pas un chemin pénible, mais un chemin où on est très heureux, quoique brisé. Un chrétien gardé dans ce chemin-là est beaucoup plus heureux. Nous sommes beaucoup plus heureux qu’il y a trente ans, d’un bonheur plus égal, dont on connaît mieux la source, dont on sait beaucoup mieux ce qui la tarit, ce qui vient nous en priver. Et on se défie davantage de soi — jamais assez. Mais on connaît beaucoup mieux Christ et le Père. On sait beaucoup mieux ce qu’on a. On se laisse beaucoup moins prendre par les apparences. La bonne volonté ne paraît pas mauvaise comme la mauvaise volonté. On ne mettrait pas sur le même plan, dans le monde, la bonne et la mauvaise volonté d’un homme. Mais la bonne et la mauvaise volonté d’un chrétien, c’est la même chose qu’une mauvaise volonté, si ce n’est pas la volonté de Christ.
Que le Seigneur nous donne de ne pas nous décourager.
Notre vie tout entière est une épreuve, une discipline, une formation, une éducation. Que le Seigneur veuille encourager en particulier ceux qui passent par l’épreuve. Il y a des épreuves que nous connaissons, parmi nous. Et il y en a d’autres que nous pouvons connaître, que tous ne connaissent pas, et qui sont de grandes épreuves.
N’oublions jamais que le peuple de Dieu est un peuple qui ne fait pas ses quatre volontés, qui n’est pas exempt de toutes les souffrances qui atteignent les hommes. C’est un peuple auquel nous avons besoin de penser, comme le Seigneur, en grâce, en charité, en intercession soutenue. Nous avons besoin de penser les uns aux autres, pour que le Seigneur se tienne près de chacun, dans le coeur de chacun, dans sa vie de tous les jours. Que le Seigneur nous accorde d’accomplir ce service.
[LC n° 29]
13 août 1970
Méditations sur la vie chrétienne, édition FR 1995, p. 75
La prière d’un chrétien en mauvais état n’est sûrement pas écoutée. «Qui détourne son oreille pour ne pas écouter la loi, sa prière même est une abomination» (Prov. 28:9). La Parole est grâce, mais aussi vérité absolue. Si nous n’y prenons pas garde, nous risquons de nous engager dans la voie de la profession sans vie. Nous ne tromperons jamais Dieu. Les frères et les soeurs, qui ont affaire au Seigneur pour eux-mêmes d’abord, dans cette sainte crainte de Dieu, rejetteront tout compromis ; ils seront de vrais serviteurs du Seigneur, même s’ils n’ont pas de service public. Tout frère, toute soeur, qui, dans l’assemblée, tend à affaiblir le poids de la Parole de Dieu sur la conscience des saints, fait du mal à toute l’assemblée. L’attitude qui plaît à Dieu est tout le contraire de la prétention et de la vanité à la recherche des avantages naturels ou mondains. En donnant une place au «moi», nous frustrons Dieu, nous tordons l’Écriture, nous voulons ignorer ce qui nous gêne pour ne retenir que ce qui nous convient. Ne cherchons pas ailleurs la cause du déclin et de la ruine ! Les bonnes habitudes ne suffisent pas pour faire un choix à la gloire de Dieu ou accepter un renoncement par fidélité envers lui.
Ceux qui plaisent à Dieu, nous le voyons dans l’Écriture, ce sont les petits, les pauvres, les humbles. Il est rare qu’un homme riche ne soit pas fier de sa fortune. Jésus dit au jeune homme riche : «Va, vends tout ce que tu as et donne aux pauvres,… et viens, suis-moi, ayant chargé la croix» (Marc 10:21). C’est toujours vrai. La vie d’un chrétien sans renoncement n’est pas la vie d’un chrétien fidèle. Il est difficile d’être un pauvre en esprit, que le Seigneur appelle bienheureux, quand on est puissant ici-bas. Ceux qui auront satisfait leurs intérêts terrestres, sous le couvert d’une piété et d’une fidélité apparentes, en étouffant parfois la voix de leur conscience, sauront un jour que c’était l’ennemi qui les entraînait. Christ nous aidera à tout surmonter, dans la mesure où nous lui serons attachés.
Le psalmiste dit : «Sonde-moi, ô Dieu !» (Ps. 139:23). Au lieu de fuir, il recherche la lumière. «Regarde s’il y a en moi quelque voie de chagrin». Une voie de chagrin ne désigne pas les épreuves de la vie, mais toute tendance susceptible d’entraîner le coeur dans des chemins d’égarement. «Conduis-moi dans la voie éternelle». «Quiconque veut venir après moi, qu’il se renonce soi-même, et qu’il prenne sa croix, et me suive» (Marc 8:34).
Le Seigneur suit de son regard les petits, les pauvres, les affligés, ceux qui ont davantage besoin de lui. Mais le coeur de ceux qui cherchent à satisfaire tous leurs besoins s’endurcit inévitablement. Si le Seigneur s’occupe d’eux, c’est pour se faire entendre d’eux. Il permet des épreuves pour briser l’orgueil, l’égoïsme, la volonté propre. «Bienheureux les pauvres en esprit» (Matt. 5:3). Qui sont-ils ? Des gens qui ne sont pas intelligents, peu doués, ou marqués par quelque infirmité mentale ? Non, ce sont des croyants, peut-être de la plus haute valeur humaine, mais que le Seigneur rend petits à leurs propres yeux. Ils ont le sentiment de leur néant, de leur petitesse.
Recherchons le Seigneur et marchons dans l’humilité ! Le seul moyen d’être humble, c’est d’avoir Christ dans son coeur. Demandons-lui qu’il nous accorde ce bonheur, cette joie, cette force, pour toute notre carrière !
[LC n° 30]
10 mai 1960
Sans doute est-ce là une portion de la Parole de Dieu qui est souvent lue, souvent méditée, que nous aimons, et qu’il fait toujours bon relire et méditer à nouveau. Car elle contient de l’encouragement pour nous, et aussi l’appréciation de ce que Dieu a donné pour les temps difficiles. Car ce Psaume ne fut pas écrit dans les temps glorieux du règne de Salomon, mais, selon ce que nous pouvons en déduire du Psaume qui suit, par les fils de Coré, cette génération d’hommes d’élite qui portaient sur eux, pour ainsi dire de génération en génération, le sceau divin du jugement dont ils auraient dû tous être atteints jadis. Mais, s’ils étaient encore en vie et existaient, c’était dû, bien entendu, à leur geste de foi, mais aussi à cette grâce qui les a approchés. Ceux-ci aussi, dans ce temps difficile, ont apprécié ce que Dieu a donné dans les temps difficiles. Et il est question de demeures de l’Éternel, des demeures du Très-haut. Il est question de l’habitation de Dieu. Dieu habite — la Parole nous le dit — la lumière inaccessible, que nul oeil ne vit jamais, que nul homme ne verra jamais dans son état de déchéance, d’abaissement (1 Tim. 6:16).
Mais, chers amis, Dieu, invisible pour le pécheur, n’a pas toujours été un Dieu invisible, qui ne s’est pas manifesté à sa créature. Les premières pages des Saintes Écritures nous en parlent, il en fut autrement, autrefois. Dieu visitait sa créature, au début, lorsqu’elle était encore innocente, ce reflet de la bonté de Dieu, comme Dieu l’avait créée. Tout ce que Dieu avait fait portait son sceau, était très bon. Et ainsi, la créature pouvait être visitée par Dieu même. Adam connaissait ce privilège. Hélas, ce bonheur-là, c’est le péché, qui s’est introduit plus tard par sa faute et celle de sa compagne, qui l’interrompit. Et, depuis lors, nul n’a plus jamais pu voir Dieu. Depuis lors, nous sommes des hommes séparés de Dieu. C’est une tout autre séparation, en effet, que celle dont nous nous sommes entretenus dimanche après-midi, séparation devenue nécessaire par l’appel qui nous est adressé par cet évangile glorieux : être séparé du mal ; être séparé pour Dieu, pour être béni par lui, et manifester, par sa grâce, au milieu du mal, le bien que produit en nous le don de la nouvelle vie et la puissance de son Esprit ; afin qu’ainsi, buvant à la véritable source du bonheur ici-bas, nous soyons quelque chose à la louange de sa gloire, déjà ici-bas.
Mais cette séparation initiale fut désastreuse. Et dans ce désastre se trouve l’homme naturel, séparé du Dieu bienheureux.
La loi ne changea, pour ainsi dire, rien à cela. L’homme ne pouvait s’approcher de Dieu, ne pouvait le voir. Même Moïse, qui aurait aimé voir l’Éternel, ne le put : «Tu ne peux pas voir ma face, car l’homme ne peut me voir et vivre» (Ex. 33:20).
Et pourtant, chers amis, Dieu voulait avoir ici-bas une demeure. Et la première des demeures, devenue justement nécessaire à cause de la déchéance humaine, nous la connaissons. Ce fut la tente dans le désert. Ce fut le tabernacle dans le désert, cette demeure, merveilleuse, pour celui qui la connaît, dans sa construction, dans ses détails ; qui, dans l’ensemble, nous le savons, représente les gloires de celui qui devait venir d’en haut, Jésus, par lequel seul fut porté le pécheur, son peuple, jusqu’à la venue du temps où les symboles que représentaient les sacrifices, offerts et ordonnés par la loi, par le livre du Lévitique particulièrement, seraient accomplis, afin que Dieu ait sa véritable demeure, celle qu’il voulait avoir, savoir le coeur des hommes rachetés, purifiés par la foi, placés sous le bénéfice du sang de l’Agneau, étant devenus, par le Saint Esprit, individuellement, un temple du Saint Esprit ; dans l’ensemble, l’habitation de Dieu par l’Esprit.
Mais, chers amis, que voyons-nous ? Lorsque déjà les symboles ou les ombres qui devaient annoncer la venue du Juste étaient exécutés, après avoir été érigés, élevés, dressés, dans le désert, les sacrifices offerts selon la prescription, que voyons-nous ? Justement, la gloire de Dieu s’est manifestée. Et les enfants d’Israël qui, depuis l’Egypte, avaient appris à marcher, à suivre Dieu, par la vue plus que par la foi, encore une fois, avaient la preuve de sa présence, tant dans la nuée qui couvrait le tabernacle, qui demeurait et qui était leur arrière-garde, leur avant-garde, que par cette manifestation de sa gloire remplissant le saint lieu.
L’effet produit est remarquable. Le peuple vit la gloire de Dieu, et nous lisons : Il tomba sur sa face ; il adora. Plus tard, le service de la tente ayant duré son temps, les conditions d’Israël ayant changé, et le fils de David, Salomon, ayant bâti une maison à Jérusalem, au lieu indiqué par lui, lorsque la dédicace et les sacrifices réclamés par la sainteté, la justice, de Dieu, furent offerts, encore une fois, le peuple put constater, put voir, que Dieu était au milieu de lui, que Dieu, sa gloire, remplissait le saint parvis, le temple. Le peuple, devant cette présence, devant la manifestation de cette gloire divine, se prosterne, adore Dieu, bénit Dieu (2 Chron. 7:3).
Hélas, chers amis, ces temps-là furent de trop courte durée. On n’apprécia pas ; pas même Salomon, jusqu’à la fin de ses jours, ne sut apprécier ce que, au début de sa carrière, il avait érigé, élevé, à la gloire de Dieu.
Hélas, chers amis, le temple fut détruit, nous le savons, par les armées de Nébucadnetsar, après les temps humiliants de la déchéance du royaume, des dix tribus qui partirent en captivité assyrienne, et ensuite le temps qui suivit (d’un peu plus de cent ans), puis ce fut la captivité babylonienne pour le résidu de Juda et de Benjamin, sous les rois que nous connaissons, Manassé et ainsi de suite. Hélas, là, il n’en restait plus trace.
Un second temple fut érigé. Et c’est probablement dans ce temps-là, lorsqu’il fut érigé, lorsqu’il semblait que déjà la joie d’avoir de nouveau un sanctuaire fléchissait, que l’Esprit de Dieu agit, dans le coeur de ces fidèles hommes de Dieu, ces fils de Coré, pour donner ce témoignage d’appréciation de leur coeur quant à ce qu’ils avaient de nouveau reçu par la grâce de Dieu.
Un faible résidu rentré de la captivité avait construit le temple. Un faible résidu l’avait rejoint plus tard. Sous Néhémie, les murs de la cité furent rebâtis, les portes remises, fermées, et ainsi de suite. Et il fallait toute l’énergie que donne la foi et le Saint Esprit, qui répondait aux besoins du coeur, pour que puisse être manifesté et maintenu, en quelque sorte, un intérêt vivant au milieu du peuple, l’appréciation de ce que Dieu avait, encore une fois, donné.
Hélas, ce temple-là fut, encore une fois, changé. Il prit un autre aspect. Car le temple que nous connaissons du temps du Seigneur Jésus ne fut pas celui-là. C’était le temple hérodien, duquel le Seigneur parle, disant qu’il serait détruit, qu’il n’en resterait pas pierre sur pierre (Matt. 24:2) (chose trop vraie, que l’histoire nous prouve, que les fouilles archéologiques ont mise à jour, sans aucun doute).
Un autre temple devait suivre. Et, dans les conseils de Dieu, nous en avons évoqué les traits, dont ces demeures-là étaient les images. C’était l’image de l’Église. C’est là où Dieu voulait habiter. Il veut avoir une maison, mais non pas faite de mains. Et c’est au début des Actes que les apôtres parlent de la véritable maison. Étienne et Paul répètent plusieurs fois, dans l’évangile adressé aux nations particulièrement, et même à la maison d’Israël : «Dieu habiterait-il réellement dans des temples faits de mains ?» (Act. 7:48 ; 17:24). Étienne cite une parole d’Ésaïe, qui avait déjà dit : «Quelle est la maison que vous me bâtirez, et quel est le lieu de mon repos ? Toutes ces choses, ma main les a faites» (És. 66:1-2) ; et il évoque l’étendue des cieux, la grandeur de la création.
Et maintenant, quelques frères ont réalisé le sens de son habitation. Réfléchissez donc ; il avait quelque chose d’autre en vue. Il voulait habiter à nouveau, mieux que jadis, le coeur de l’homme. C’est ce que Dieu veut ; c’est là qu’il veut habiter. Et c’est là, au début des Actes, après le labourage que nous voyons s’accomplir, dans les voies du Seigneur, envers tous ces disciples qui, plus tard, deviennent les porteurs du message, les apôtres en préparation, c’est après, que le Seigneur remonté dans la gloire, accomplissant la promesse du Père, envoie le Saint Esprit, au jour de la Pentecôte, et fonde réellement cette maison spirituelle, des pierres vivantes qui sont venues à la maîtresse pierre du coin, à la pierre vivante, le temple saint qui croît dans le Seigneur. Et qu’il était beau, au début !
Si, ici, il est question d’appréciation, dans ce premier verset : «Quelles sont aimables, tes demeures, qu’elles ont de la valeur, qu’elles sont belles pour toi, ô Dieu !», chers amis, qu’est-ce donc qui donne du prix au temple nouveau ? C’est Christ. C’est lui seul ; c’est son oeuvre. C’est l’excellence de sa personne, la valeur infinie de son oeuvre immortelle, éternelle, immuable. Et ce sont ses perfections. Ce sont elles qui donnent à l’Église son prix, sa valeur, ses qualités. C’est là, chers amis, que nous en sommes maintenant, dans les temps du début. Non seulement elle était agréable aux yeux de Dieu, Dieu y voyait réellement les gloires de son Fils, mais aussi, la puissance de l’Esprit ornait cette maison, ornait les coeurs qui la composaient. Le grand amour ardent, le grand dévouement que nous voyons aussi, étaient accompagnés d’une grande crainte, à la fois de Dieu, de lui déplaire, et de défiance, en même temps. Et cela ne peut pas être autrement, quant à soi-même. Et on s’appuyait sur celui qui avait tout donné, tout apporté. Et, dépendant ainsi, on regardait à lui. On persévérait aussi bien dans la doctrine des apôtres, dans la communion, dans la fraction du pain, dans les prières. Et c’est ainsi que ce temple croissait miraculeusement, au début de trois mille à cinq mille, et à des milliers plus tard. Il grandissait, non seulement en nombre, mais aussi en vertu.
Chers amis, les temps du début sont passés. Et il y a un parallèle malheureux, dans les voies de Dieu, par rapport au peuple de l’Ancien Testament, avec celui du Nouveau Testament. Et c’est à cela que nous en arrivons maintenant. La beauté du début, c’est le plaisir que pouvait avoir Dieu au début, de ce temple vivant, vivant de Christ, vivant pour Christ ; où le mal, pour ainsi dire, ne pouvait pénétrer ; où le Saint Esprit veillait, où il y avait des serviteurs qui veillaient, des anciens qui veillaient, des diacres qui veillaient, des femmes pieuses craignant Dieu qui veillaient, des frères, les hommes pieux, qui veillaient, priaient. C’était là le temple, au début. Mais, hélas, à peine trente ou quarante ans ont passés ; et qu’entendons-nous, de la bouche du Seigneur, lorsqu’il reprend justement l’église d’Éphèse, dans Apoc. 2 ? Que lui dit-il, après avoir reconnu ce qu’il y a dans l’église d’Éphèse ? Que déplore-t-il, que juge-t-il ? «J’ai contre toi que tu as abandonné ton premier amour» (Apoc. 2:4). Et le premier amour, chers amis, c’était non seulement l’appréciation de ce qu’on était devenu, de ce qu’on avait reçu, mais aussi, en même temps, l’église primitive avait une espérance vivante qu’elle chérissait. Aussi bien les Juifs que les païens s’étaient réellement détournés de quelque sorte d’idolâtrie, du moi, pour la religiosité de ses prétentions, de véritables idoles pour le païen, pour le serviteur, d’une manière vivante, par l’Esprit, pour servir le Dieu vivant et vrai et attendre des cieux son Fils (1 Thess. 1:9-10).
Le premier amour, chers amis, se complèterait toujours, et se complètera toujours, par l’attente du bien-aimé, la relation de l’épouse avec l’époux. Il n’en peut pas être autrement. Et, hélas, c’est là ce que l’Église a fait : elle a perdu de vue son véritable appel. Elle n’a plus apprécié d’être appelée à la gloire de Dieu, à la gloire éternelle. Et, les affections s’étant lassées de ce côté-là, les yeux du coeur se sont dirigés vers la terre, vers les frères, vers l’église ; vers l’église, peut-être. Et, justement, c’était l’état d’Éphèse. Elle était encore dans un certain ordre. Et je voudrais bien que toutes les assemblées du monde entier, qui existent aujourd’hui, soient encore dans l’état moral, spirituel, dans lequel se trouvait, à ce moment-là, malgré la sévère répréhension de l’apôtre, l’église d’Éphèse.
Pourtant le Seigneur la reprend. Il lui manquait ce qui était le plus précieux : «Tu ne désires pas être là où je suis ; tu as abandonné ton premier amour. Dans ton premier amour, tu voulais quitter la terre. Où est ton témoignage pour moi ? Tu souffrais pour moi ; tu continuais à souffrir. Et maintenant, tu te plains dans la souffrance. Tu vis pour toi, tes honneurs, et tu ne veux plus être près de moi».
Faisons attention que le Seigneur ne puisse pas, un seul jour, nous reprendre de ce manque d’affection de retour pour lui et, en même temps, que notre coeur manque de vibrer, à son égard, du désir d’être là où il est.
Hélas, la déchéance s’en est suivie. Et, au lieu d’une Église pure, d’une épouse chaste, comme elle était fiancée au Christ par l’apôtre des nations, chers amis, nous lisons d’autres paroles, prophétie du seul sage, du Seigneur de gloire.
L’apôtre dit que, dans les temps de la fin, les temps fâcheux, les temps dans lesquels nous sommes parvenus, de la grande maison, le chemin est tracé au fidèle, comment il pourra plaire à son Dieu, à son Sauveur.
Les ans avaient passé. Et maintenant, permettez-moi de rappeler quelque chose. La captivité de Babylone était une réalité, pour l’Église. Elle était spirituelle. La captivité de l’Église était devenue une chose, pour ainsi dire, complète. Les autorités du monde déterminaient ce qui devait être enseigné, ce qui devait être cru. Et l’Église, s’étant mise, pour ainsi dire, à l’asservissement humain du pouvoir séculier, n’avait plus du tout le caractère du début, de l’épouse unie au chef glorieux. Et cet état de choses a duré bien longtemps. Il fut secoué bien des fois, au cours de l’histoire de l’Église, jusqu’au siècle dernier. Au début de ce siècle, le réveil est venu et a secoué, pour ainsi dire, les âmes sincères, dans notre pays, dans le vôtre, dans d’autres pays du monde, comme j’en ai connaissance, en même temps aussi, indépendamment de nous-mêmes, dans l’Afrique du Sud, où il y a des âmes qui connaissent la vérité comme nous la connaissons, qui attendent le Seigneur comme nous l’attendons. Elles n’ont pas tout à fait les mêmes vues à tous égards. Mais, dans l’ensemble, pourtant, elles ont été secouées par le souffle puissant du Saint Esprit, comme l’ont été les devanciers auxquels nous devons tant. Et les frères du début, était-ce facile pour eux de se réunir, en Angleterre, en France ? Si vous écoutez ce que vous disent vos ancêtres, si j’écoute ce que me disent les ancêtres de notre pays, les frères du début ont eu à lutter pour cela. Ils ont souffert pour cela. Ils ont souvent été repris par les autorités pour cela.
Je connais une assemblée de notre petit pays où, en ce temps-là, parce qu’il était interdit par la loi de célébrer la sainte cène hors des murs de l’église officielle catholique, malheur à qui s’avisait de le faire en dehors. Et ces chers amis, enseignés par le Saint Esprit à se souvenir du Seigneur Jésus, se réunirent, comme nous avons le bonheur de le faire jusqu’à ce jour. Que leur est-il arrivé, plusieurs fois ? Vers le milieu du culte, les gendarmes, sachant très bien le moment, s’acheminaient vers la fraction du pain, venaient dans le local, y prenaient place. Et, lorsque le moment arrivait où les frères allaient rompre le pain, ils s’avançaient, emportaient le pain et le vin et, menottes aux mains, emmenaient les frères qu’ils jugeaient être responsables, et ne les relâchaient qu’après plusieurs semaines de souffrances et le paiement d’une amende. Ces choses se sont répétées bien des fois.
Une autre question : l’assemblée de cet endroit diminuait-elle pour cela ? Au contraire ; il semblait que, plus on la persécutait, plus on avait le bonheur de souffrir pour la vérité, plus il y avait d’âmes qui s’y attachaient. Elle a grandi. Les temps changèrent. Et, une vingtaine d’années peut-être plus tard, on obtint, de la part des légistes de notre pays, une faveur qui accordait à ce moment-là la liberté de l’exercice du culte.
Mais ce que je viens de dire, c’est l’appréciation de ce que le Seigneur a donné dans des temps difficiles auxquels nous sommes parvenus. Ces chers devanciers ont lutté pour cela. Ils ont trouvé, comme les fils de Coré, que ce que Dieu avait institué avait du prix. Et ils ont lutté, ils ont souffert, pour cela. Et Dieu les en a bénis.
Est-ce maintenant le temps de grandes choses ? Est-ce que réellement il y a eu restauration pleine et entière de l’état du début ? Non pas. C’est un résidu comme celui qui était rentré de la captivité babylonienne, un faible résidu, qui a écouté la parole de Dieu, qui s’y est soumis et a été béni. Et de ce résidu, chers amis, toute âme qui le compose encore, jusqu’à ce jour, a le même privilège que ces devanciers-là.
Et le résidu du Nouveau Testament nous est présenté, à Philadelphie, dans Apoc. 3.
Puissions-nous chercher à manifester les caractères de ce résidu, à aimer le Seigneur, à ne pas le renier. Il faut souffrir pour lui, à l’instar de ceux qui ont été avant nous dans ce chemin-là, garder sa Parole tout entière, et ensuite, aussi, attendre son retour. Les trois choses vont ensemble.
Le Seigneur appelle ainsi Philadelphie à garder ce qu’elle a, afin que nul ne perde sa couronne (Apoc. 3:11). Une couronne, c’est le prix, la récompense, qui sera donné à ceux qui tiennent ferme malgré le courant contraire que nous rencontrons de nos jours (si ce n’est pas une hostilité ouverte, une persécution ouverte, violente, qui se manifeste dans nos pays, elle n’en est pas moins grande aujourd’hui, et dangereuse, avec les erreurs qui pullulent, avec toutes les choses mauvaises qui se présentent autour de nous, avec toutes les voix qui ressemblent à celle du bon Berger. Il faut une oreille attentive pour la discerner). Il faut que le résidu s’approche de lui, connaisse la voix de bon Berger, pour être gardé dans le bon chemin.
Et c’est là quelque chose qui est précieux pour le Seigneur, si nous le faisons réellement pour lui, et pas pour nous. Puissions-nous devenir de ceux qui apprécient ce que Dieu donne.
«Combien sont aimables tes demeures…». Et si, au début, Dieu habitait l’Église, Dieu habite-t-il moins le rassemblement, de nos jours ? Le Seigneur est-il moins présent de nos jours qu’aux jours du début ? Non pas ; il n’a pas changé. Ses promesses sont demeurées et demeurent. Tant que l’Église sera ici-bas, elle peut être assurée de la constance de ses promesses, de la constance de ses soins et de son amour. Et il donnera pour elle tous ce qu’il conviendra de donner. Et il habite là où deux ou trois sont assemblés en son nom.
Vous me direz : Oh, mais ce verset, même les catholiques le citent beaucoup ; et tous les protestants le citent ! C’est vrai ; chacun se prévaudra de ce verset. Et, à toute occasion, on se réclamera de la valeur de ce verset. Mais quel est le vrai sens de ce verset ? Est-ce que le Seigneur veut dire : Là où deux ou trois, à l’occasion, sans se connaître, sans rapports suivis, sans respecter l’ordre que je dépeins dans ma Parole, quand occasionnellement ils se rencontrent, est-ce que je serai là, au milieu d’eux ? Est-ce là ce qu’il dit ? Non pas. Il est le Seigneur dans l’ordre, Dieu de paix, Dieu d’ordre. Il faut que nous connaissions les relations permanentes dans lesquelles nous sommes placés. La base de nos relations, c’est la vie éternelle qui nous est donnée. Et nous sommes ainsi dans une relation permanente avec lui. Ensuite, nous sommes appelés à la communion avec lui, sur la base des enseignements donnés par sa Parole. Nous sommes appelés à la communion avec les frères, encore une fois, selon la Parole écrite. Et être rassemblés au nom du Seigneur Jésus à Paris, c’est savoir que le Saint Esprit nous a réunis en un, nous attachant à Christ qui est là chef de l’Église, comme nous sommes un faisceau de vivants. Et, comme un faisceau, nous faisons partie, où que nous soyons, de ce rassemblement. Mais nous en donnons réellement l’expression vivante, nous le réalisons, lorsque nous l’attendons. Alors nous manifestons que nous sommes un avec Christ, et que nous sommes son assemblée, lorsque nous respectons ses droits.
C’est quelque chose de ce que signifie être rassemblés au nom du Seigneur Jésus, du Seigneur, respectant les droits de sa seigneurie. Cela devrait être précieux à nos yeux, précieux à nos coeurs. Comme les fils de Coré, nous devons aimer cela, aimer être aimés par le Seigneur que nous servons, non pas, en aucune manière, comme le sont les hommes, les grands de ce monde. Il est un Seigneur d’amour ; et c’est une réunion d’amour. Et c’est l’amour qu’il versa dans nos coeurs qui fait appel à notre affection de soumission, pour qu’en retour, en amour, nous aimions sa volonté pour la faire.
[LC n° 31]
18 novembre 1962
Méditations sur la vie chrétienne, édition FR 1995, p. 78
«L’année de la mort du roi Ozias…». Le chapitre 6 d’Ésaïe débute par cette mention qui caractérise l’époque. La signification en est importante. Qui est ce roi Ozias ? 2 Chron. 26 nous renseigne sur une partie de la vie de ce roi. Son nom signifie : «L’Éternel est ma force». Il avait eu un très bon début. C’est le cas de beaucoup de croyants. Au début, notre force n’est pas en nous-mêmes, mais en Christ. Tout serait en ordre si nous ne nous appuyions jamais sur nous-mêmes, comme nous le faisons si souvent.
Bon début. Quelques jeunes frères dans l’assemblée donnent des espoirs. Il est important qu’il y ait des jeunes frères pour remplacer les frères âgés qui partent ; mais il faut veiller à respecter l’autorité de la Parole, il faut que les jeunes frères soient soumis aux anciens. Nous sommes dans les temps de la fin. L’esprit du monde — l’indépendance, la révolte contre l’autorité, le désir d’être quelqu’un aux yeux des autres — cet esprit-là ne reste pas à la porte de l’assemblée, il s’introduit également au milieu de nous.
2 Chron. 26:15-16 nous dit : «Il fut merveilleusement aidé jusqu’à ce qu’il devint fort. Mais quand il fut devenu fort, son coeur s’éleva jusqu’à le perdre, et il pécha contre l’Éternel, son Dieu, et entra dans le temple de l’Éternel pour faire fumer l’encens sur l’autel de l’encens». Ce service était réservé aux sacrificateurs. Des sacrificateurs, hommes vaillants, se sont opposés au roi. Où sont les hommes vaillants dans l’assemblée ? Il y a des esprits qui prennent des initiatives qu’on ne doit pas laisser passer ; il faut des hommes forts pour s’opposer à eux. Nous devrions tous être de ces hommes vaillants, les soeurs aussi. Nous avons tous la Parole de Dieu, qui nous donne la mesure déterminée par l’Éternel. Aucun ne peut dire : «Je ne le sais pas». Quand on doit dire quelque chose à un frère, il arrive qu’on se heurte à de la violence ; il se fâche, comme Ozias : «Et Ozias s’emporta» (v. 19). La nature humaine est toujours la même aujourd’hui. «Et le roi Ozias fut lépreux jusqu’au jour de sa mort». Si quelqu’un, dans l’assemblée, devient lépreux — péché manifeste ou mauvais état du coeur — il doit être mis dehors, comme le roi Ozias, qui «habita, lépreux, dans une maison d’isolement, car il fut exclu de la maison de l’Éternel» (v. 21). Il est important de comprendre ce que signifie l’exclusion. Toute l’assemblée devrait s’humilier devant Dieu. Dieu peut alors donner la grâce pour que celui qui a péché soit rétabli. Toute l’assemblée est responsable. Me suis-je préoccupé de ce frère, de cette soeur exclu ? Lui ai-je lavé les pieds à temps ? Mais une fois l’exclusion prononcée, il ne faut pas briser la discipline de l’assemblée par une poignée de main ou des paroles d’amitié, sinon le frère exclu a beaucoup plus de peine à revenir ; il faut que cette discipline serve à le rétablir. Beaucoup de frères et de soeurs manifestent un amour faux. Si quelqu’un sort vers le lépreux, il est lui-même atteint de lèpre, et cela se répercute sur toute l’assemblée.
«L’année de la mort du roi Ozias», c’est un moment tout particulier pour Ésaïe, jeune homme, que Dieu veut employer comme prophète, «envoyé de Dieu» vers un peuple révolté. L’apôtre Paul se dit souvent «appelé de Dieu». Dans la chrétienté, plusieurs sortent sans être envoyés. Il ne suffit pas de sortir, il faut être appelé. Un frère a dit : «Le Seigneur légitime lui-même ses serviteurs, ils n’ont pas besoin de se recommander eux-mêmes» (2 Cor. 10:18). Ésaïe reçoit son service de Dieu. Ce n’est pas un service agréable que celui de prophète ; il doit réveiller la conscience, et on n’aime pas être tiré de son sommeil. Il n’y a plus actuellement de prophètes au sens de l’Ancien Testament, mais le service de prophète existe toujours pour réveiller les consciences. «Réveille-toi, toi qui dors, et relève-toi d’entre les morts» (Éph. 5:14). On peut être dans un sommeil analogue à la mort ; il faut être sérieusement secoué pour en sortir, mais il importe que la vie soit conséquente avec les paroles.
Ésaïe, jeune homme, avait vécu une partie de l’histoire du roi Ozias ; il savait quel avait été son sort : il avait eu affaire à un Dieu saint. Nous aussi, nous sommes bien en relation avec Dieu comme notre Père en Jésus Christ, mais l’autre face demeure : il est un feu consumant, un Dieu saint ; il ne peut rien laisser passer de mauvais, il juge le mal (1 Pierre 3:12 ; Ps. 34:12-16). Dieu se manifeste à Ésaïe, cette année-là, pour l’introduire dans la lumière de sa présence. «Je vis le Seigneur assis». Il s’y reconnaît pécheur, perdu. Dans sa lumière, tout change ; nous nous rendons compte de notre néant. Son trône est haut et élevé (És. 6:1 ; Apoc. 4:2-8) ; nous voyons l’Éternel dans sa gloire. Dès lors, qu’est-ce que l’homme ? Que sommes-nous, nous ses enfants, bien que, en Jésus Christ, il soit notre Père ? Que sommes-nous ? Des grains de poussière. Et il nous a sortis des ténèbres, dans son amour, pour nous posséder pour l’éternité.
C’est lui, l’Éternel, qu’Ésaïe voit. En sa présence, il s’écrie : «Malheur à moi ! car je suis perdu» (És. 6:5) «Et l’un des séraphins vola vers moi» (v. 6). Les séraphins, êtres sans péché, ont six ailes, comme les quatre animaux d’Apocalypse 4. Si nous parlons de ces êtres aux hommes, ils nous disent : ce sont des fables pour les enfants. Le croyant sait par la Parole de Dieu que les anges existent, et qu’il y a plusieurs classes d’anges ; il y a même parmi eux des princes. Satan était un prince des anges ; dans son orgueil, il s’est élevé pour être l’égal de Dieu ; il a été précipité, et de nombreux anges avec lui.
«De deux ailes ils se couvraient la face». N’oublions jamais ni la grandeur, ni la sainteté de Dieu, en particulier dans la maison de Dieu, dans l’Assemblée ! «Soyez saints, car moi je suis saint» (1 Pierre 1:16). «Prends garde à ton pied, quand tu vas dans la maison de Dieu… Ne te presse point de ta bouche, et que ton coeur ne se hâte point de proférer une parole devant Dieu ; car Dieu est dans les cieux, et toi sur la terre» (Eccl. 5:1, 2).
«De deux ailes ils volaient». Ils sont les exécuteurs de la volonté de Dieu (Ps. 103:20-21). Dans l’Ancien Testament, ils apparaissent souvent pour accomplir leurs missions divines. Les ailes sont l’image de la disponibilité pour le service de Dieu. «Vous vous êtes tournés des idoles vers Dieu, pour servir le Dieu vivant et vrai» (1 Thess. 1:9). C’est la première des choses que nous faisons quand nous sommes sauvés ; nous disons au Seigneur : «Que puis-je faire pour toi ? Montre-moi comment je puis te servir !». Puis par la suite, nos ailes restent souvent sans force faute d’être employées ; nous dispersons nos efforts aux choses de ce monde.
«Et de deux ils se couvraient les pieds». Nous nous salissons les pieds en traversant cette terre. Les anges, eux, ne se les salissent pas. Combien plus de motifs avons-nous de nous couvrir les pieds, c’est-à-dire de nous mettre à l’abri du sang de Golgotha par le jugement de nous-mêmes ! Plus nous le ferons, plus notre conscience sera délicate à l’égard des petites souillures. Il est fidèle pour nous pardonner.
«Et les fondements des seuils étaient ébranlés à la voix de celui qui criait, et la maison était remplie de fumée» (És. 6:4). La fumée vient d’un feu de jugement. Avant que cette vision ne lui apparaisse, nous entendons Ésaïe dire par six fois : «Malheur à ceux qui…» (És. 5). Ici il doit dire : «Malheur à moi ! car je suis perdu ; car moi, je suis un homme aux lèvres impures» (És. 6:5). Si un homme se condamne lui-même, Dieu peut alors envoyer un séraphin avec un charbon ardent : «Et ton iniquité est ôtée, et propitiation est faite pour ton péché» (v. 7), car Dieu a donné un autel sur lequel Jésus Christ, l’Agneau de Dieu, a été immolé. Sur cet autel, il fallait qu’il supportât tout le jugement de Dieu de la sixième à la neuvième heure. Il faisait nuit, à Golgotha ! Un type de Christ, Isaac, lorsqu’il montait vers Morija, dit à son père : «Voici le feu et le bois ; mais où est l’agneau pour l’holocauste ?» (Gen. 22:7). Christ, lui, savait qu’il devait être l’agneau pour l’holocauste. C’est à cause de nos péchés que le couteau l’a transpercé. Nous ne pouvons nullement comprendre cette oeuvre, cependant notre Dieu Sauveur l’a accomplie. «Il plut à l’Éternel de le meurtrir ; il l’a soumis à la souffrance» (És. 53:10). Il a été pilé très fin pour que Dieu flairât l’odeur de l’encens «saint, consacré à l’Éternel» (Ex. 30:36-37). L’offrande de l’holocauste est coupée en morceaux (Lév. 1:6). Ce sont des expressions qui, toutes, ont trait aux souffrances du Seigneur pour nos péchés. Quand le charbon ardent a touché nos «lèvres impures», a brûlé notre péché, alors nous pouvons dire : «Grâces à Dieu pour son don inexprimable !» (2 Cor. 9:15).
«Qui enverrai-je ?». Dans quel but le Seigneur veut-il envoyer quelqu’un ? Pour mettre le doigt sur le péché du peuple rebelle. «Me voici, envoie-moi». Là où nous sommes placés, nous avons un service à accomplir pour le Seigneur. Si nous ne sommes pas fidèles dans les petites choses, le Seigneur ne peut pas nous en confier de grandes. Il n’est pas nécessaire de tout quitter et de partir en Chine pour le servir. Il y en a quelques-uns qui y sont appelés, mais ce n’est pas le grand nombre. La première des choses est d’accomplir notre travail dans notre famille, auprès de nos voisins, de nos collègues, dans la ville où nous vivons. Pouvons-nous dire comme l’apôtre Paul : «Je suis net du sang de tous» (Act. 20:26) ? Nous avons manqué plus d’une occasion. Avant de sortir pour travailler pour le Seigneur, il faut d’abord apprendre, il faut savoir attendre, jusqu’à ce que lui ouvre la voie. Si chez tel ou tel frère il y a une activité de l’Esprit, l’assemblée le constatera, elle sera avec lui dans son service. Comment pourrait-il sortir sans la bénédiction de l’assemblée ?
«Je vous exhorte donc, frères, par les compassions de Dieu, à présenter vos corps en sacrifice vivant, saint, agréable à Dieu, ce qui est votre service intelligent» (Rom. 12:1). Ceci s’adresse aussi aux soeurs. Notre corps est le temple du Saint Esprit ; nous ne pouvons plus agir à notre guise. Nous devons pouvoir dire au Seigneur : «Je suis pour toi seul». Laissons la saleté de ce monde, ce que l’apôtre Paul appelle des ordures ! Pour qu’un ballon puisse monter, il faut jeter du lest par-dessus bord. Il vaut la peine que nous nous conformions à la Parole et non pas au monde. Aimons-nous assez le Seigneur pour cela ? «Si vous m’aimez, gardez mes commandements» (Jean 14:15).
[LC n° 32]
Dimanche après-midi 20 juin 1948
Méditations sur la vie chrétienne, édition FR 1995, p. 85
Celui qui descend d’Isaï régnera sur la terre et sera roi de justice et roi de paix. Cette espérance de voir enfin régner la justice et la paix, ce désir, cette soif, cette faim sont, au fond, dans les coeurs et les esprits de tous les hommes. Le monde entier est fatigué. Il n’y a rien de nouveau sous le soleil : la violence et la corruption ont tour à tour, et souvent tout ensemble, régné dans ce monde ; là où la grâce de Dieu ne touche pas les coeurs et les esprits, les hommes sont fatigués. L’inquiétude générale des peuples, des esprits et des coeurs, parle aux croyants de la fin des choses. Nous sommes tout près de la fin des jours, selon l’expression de l’Ancien Testament. Il y aura enfin un moment où ce ne sera plus le règne de l’homme, bien que, en réalité, Dieu conduise toutes choses, comme Zacharie nous le montre sous l’image de chevaux conduits entre deux montagnes d’airain (Zach. 6) : la puissance providentielle de Dieu, dans l’inextricable complexité des choses, ne perd jamais de vue ses desseins.
Bien que le chrétien soit du ciel, il brûle de voir s’établir sur la terre cette ère de paix et de justice, où enfin le Seigneur Jésus sera glorifié et honoré comme il doit l’être, où enfin la vérité ne trébuchera plus sur la place publique (És. 59:14). Depuis combien de siècles la vérité ne trébuche-t-elle pas sur la place publique ! Depuis combien de siècles le mensonge ne s’en donne-t-il pas à coeur joie dans ce monde ! Le chrétien est le premier à désirer l’établissement du règne, d’un état de choses où la justice sera la ceinture du roi de paix. Son coeur aspire à l’établissement du règne de Christ. Dieu a par-devers lui un homme qu’il mettra à la tête de la création, celui qui sera Roi des rois et Seigneur des seigneurs. Mais en attendant ce moment où Jésus sortira du sanctuaire, revêtu de puissance et de gloire, nous disons : «Seigneur, tant que tu n’as pas ta couronne de gloire, nous ne pouvons pas avoir la nôtre, car, aux yeux du monde, tu conserves toujours ta couronne d’épines». Les prophètes — je ne saurais trop conseiller à chacun de les lire — déploient le conseil de Dieu quant à la terre avec une force extraordinaire. Si nous sommes rassasiés de la gloire de Christ, nous savons que, jusqu’à ce moment-là, nous n’aurons point de repos sur la terre, ni justice, ni gloire, ni vérité, ce n’est pas possible. Le moment vient où le Seigneur, après avoir dit à son Père : «Je ne fais pas de demandes pour le monde» (Jean 17:9), lui demandera le monde. Le «jusqu’à ce que» prendra fin : «Assieds-toi à ma droite, jusqu’à ce que je mette tes ennemis pour le marchepied de tes pieds» (Ps. 110:1). Le moment vient où celui qui a renoncé à tout, que le monde a oublié et que le monde est heureux d’avoir chassé de la terre, paraîtra aux yeux de l’univers ; les rois seront consternés (Ps. 48:4-5), voyant paraître en gloire, avec les armées du ciel, celui qui a été crucifié. Nous, nous serons pas étonnés, puisque nous viendrons avec lui.
Rien n’est propre à nous élever au-dessus des contingences si médiocres et si corrompues dans lesquelles nous vivons tous les jours, comme la pensée que Jésus vient et que nous sommes liés à un Christ qui est Roi des rois et Seigneur des seigneurs. Nous, les croyants, nous sommes les premiers à brûler de voir cette aube millénaire où enfin le roi de gloire, l’homme selon le coeur de Dieu, qui a été abreuvé d’opprobres et à la face duquel on a craché, régnera par toute la terre et la couvrira de sa gloire comme les eaux couvrent le fond de la mer.
Dans la dernière demi-semaine de Daniel, trois ans et demi, Satan sera précipité sur la terre ; il ne sera plus l’accusateur des frères, comme maintenant ; il n’aura plus de frein, toute sa force sera employée à égarer les hommes et à persécuter les croyants. Lorsque les chrétiens seront partis, le Saint Esprit, «celui qui retient» (2 Thess. 2:7), la plus puissante barrière contre le mal, ne sera plus sur la terre. La dernière semaine de Daniel sera marquée par des événements d’une violence et d’une densité incroyables.
L’Église sera enlevée avant les épreuves, comme Énoch a été enlevé avant le déluge : «Il ne fut plus, car Dieu le prit» (Gen. 5:24). Mais, comme Noé a été sauvé dans l’arche à travers le déluge, le résidu juif sera sauvé à travers la catastrophe effroyable qui va venir sur le monde. Ce résidu sera constitué d’un petit noyau de fidèles au milieu d’une masse juive infidèle, hostile et prête à recevoir l’antichrist. Le déluge est une image des événements de la fin, des jugements effroyables qui atteindront les nations et le peuple juif apostat. Car il y aura une double apostasie, l’apostasie chrétienne et l’apostasie juive ; et l’apostasie, c’est l’abandon public de la foi, la négation ouverte de ce qu’on a professé pendant un temps. Alors un roi régnera en justice sur toute la terre. Il aura anéanti l’antichrist par le souffle de sa bouche et détruit la bête romaine, le chef de l’Empire romain ; ils seront jetés tous deux dans l’étang de soufre, qui est la seconde mort.
Il y a en effet deux morts. La première, c’est la mort gouvernementale, qui passe à tous les hommes en raison de la désobéissance d’Adam ; c’est un gouvernement terrible, aucun n’y échappe. La seconde mort, c’est l’étang de feu, un état de souffrance éternelle. Tout le monde ressuscitera, mais pas au même moment. Lorsque le Seigneur viendra chercher les croyants, ils partiront avec lui. Leur corps corruptible sera changé en un corps glorieux, et les corps des croyants, déposés dans les cimetières du monde entier, ressusciteront. À cette première résurrection se rattache, avant la règne de Christ, la résurrection de ceux qui ont été mis à mort sous le règne de la bête romaine, car ils régneront mille ans avec Christ. «Bienheureux et saint celui qui a part à la première résurrection : sur eux la seconde mort n’a point de pouvoir» (Apoc. 20:6). Les incrédules ressusciteront aussi : ils passeront devant le grand trône blanc ; leur état éternel sera la seconde mort, l’étang de feu, c’est-à-dire la souffrance éternelle loin de Dieu, les ténèbres du dehors. Devant le trône blanc, il n’y aura pas un avocat pour plaider la cause des prévenus ; il n’y aura que des accusations. Chacun devra reconnaître que Dieu a raison ; chacun reconnaîtra la gloire et la sainteté de Dieu. Ce n’est pas la gloire de l’homme qui est en question, c’est la gloire de Dieu. Dieu ne fait pas de compromis avec le mal. Nous, nous en faisons facilement ; mais Dieu jamais. Ce qui met en relief, de la façon la plus éclatante, les droits de la gloire de Dieu quant au péché, c’est la croix ; ensuite, c’est l’étang de feu, la seconde mort. Ceux qui ont porté atteinte à la vérité des peines éternelles ont toujours commencé par méconnaître la sainteté de Dieu d’une façon qui touche au blasphème.
Dans Ésaïe 60, toutes les nations apportent leur gloire et leur hommage à la capitale du monde, cette ville où notre Seigneur Jésus Christ a été crucifié. Toutefois, cette gloire ne durera que mille ans. Au commencement de ce règne, il n’y aura que des justes ; mais ceux qui naîtront après ne le seront pas forcément. Pendant le règne, l’homme ne sera pas mis à l’épreuve, puisque Satan ne sera pas là. Mais, à la fin de ce règne, l’homme, après avoir joui de Dieu, sera entraîné par le diable : c’est la fin des jours. Le coeur de l’homme est incurable. Rien ne montre mieux l’état de notre coeur à tous, et pas seulement celui des habitants du règne millénaire, que la croix, la grâce, la gloire. Quand donc serons-nous délivrés de la puissance du mal qui est en nous et dont nous n’avons souvent même pas conscience ? Dans le ciel, parce qu’il ne restera en nous plus rien de la vieille création. Jusque-là nous ne sommes pas à l’abri.
Nous sommes fatigués du monde : il ne s’y trouve rien de bon, de pur, d’innocent, de saint ; le Seigneur le sait. Qu’il nous donne la force de le traverser à sa gloire ! Prenons soin de nos vêtements, comme il est dit aux quelques fidèles de Sardes (il n’y en avait pas beaucoup) : «Tu as quelques noms à Sardes qui n’ont pas souillé leurs vêtements ; et ils marcheront avec moi en vêtements blancs, car ils en sont dignes» (Apoc. 3:4). Ceux-là ont pris soin de leurs vêtements.
Quelle gloire, quel bonheur, quel repos quand notre coeur, enfin, aura atteint le port !
[LC n° 33]
Jeudi 7 août 1969
Dieu est le Dieu de tous les hommes, et chacun aura à faire à lui. Le péché a introduit, dans les relations de Dieu avec l’homme, un obstacle infranchissable.
Dieu s’est choisi un peuple, au milieu duquel il se manifestait de plusieurs manières, en lui parlant par les prophètes, et aussi par des châtiments. Le jugement commence toujours par la maison de Dieu (1 Pier. 4:17). Plus on est près de Dieu, plus les exigences de Dieu sont grandes.
Dieu habite dans l’Église. Le Seigneur la forme. L’évangélisme n’est pas l’Église. Les frères, qui ont été mis à part, ont pour responsabilité de réaliser un témoignage, à propos duquel il ne leur est pas laissé le loisir de le former à leur guise. C’est la Parole de Dieu qui révèle ce qu’est l’Église. Une assemblée locale représente l’Église, à condition qu’elle suive les instructions de l’Écriture, par la puissance du Saint Esprit.
Tout est en désordre, aujourd’hui. C’est pourquoi il faut nous arrêter devant les paroles données à Jérémie. Jérémie a beaucoup pleuré, du fait de la douleur que causait en lui l’infidélité du peuple, malgré tous les appels de Dieu. Est-ce que nous souffrons parce que les assemblées sont en désordre ? Est-ce que nous souffrons parce que l’assemblée ne marche pas selon l’Écriture ? En souffrons-nous, ou prenons-nous les choses facilement ? Paul versait aussi des larmes pour l’assemblée. Sommes-nous indifférents, quand des irrégularités se manifestent, dans la marche d’un frère ou dans la vie d’assemblée ? Sommes-nous portés à arranger nous-mêmes les affaires ? Avons-nous le droit d’arranger quoi que ce soit à notre gré ? En aucune manière.
Dieu dit à Jérémie trois choses : «Si tu te retournes, je te ramènerai, tu te tiendras devant moi» ; «Si tu sépares ce qui est précieux de ce qui est vil, tu seras comme ma bouche» ; «Qu’ils reviennent vers toi, mais toi ne retourne pas vers eux».
Jérémie ne s’était pas placé là de sa propre volonté. Dieu l’y avait appelé. Et il a appelé chacun de nous pour le service qu’il veut lui confier. Chacun a une place à occuper, et doit veiller à ne pas dépasser la mesure qui lui est accordée, et à être fidèle dans cette place. Si chacun était fidèle dans sa propre tâche, quel bien il en résulterait pour tous ! Un frère qui est là, fidèle, et dont la marche est en rapport avec la lumière qu’il reçoit de la Parole de Dieu, peut être plus précieux que les frères les plus doués. La valeur morale d’un chrétien est dans la manière dont il réalise la présence du Seigneur et marche avec lui.
Nous avons à désirer avec ardeur qu’il y ait des jeunes qui demandent au Seigneur qu’il les qualifie pour son service. Il est heureux de voir un appel de jeunes pour le service. On ne commence guère une carrière à soixante ans. Mais combien de jeunes risquent d’avoir l’oreille fermée à l’appel de leur Maître ! Pour quelle raison ? Dieu le sait ; et eux-mêmes doivent le savoir. Beaucoup d’entre eux sont trop pris par les affaires de la vie.
Il pourrait aussi arriver que, la conscience étant mal à l’aise, on cherche à atténuer ce malaise, et qu’on trouve l’apaisement par de l’activité volontaire, qui ne serait pas le fruit de la dépendance du Seigneur. Cela n’arrangerait rien, au contraire.
Plût au Seigneur qu’il y ait des jeunes qui s’engagent à la suite du Seigneur. «Si quelqu’un me sert, qu’il me suive» (Jean 12:26). Le suivre, c’est lui obéir. La Parole est pleine de phrases très simples, dont le contenu a une portée infinie.
Les tendances à remplacer par des initiatives personnelles le simple fait de l’obéissance est un symptôme d’un état général mauvais. Nous avons à mener deuil, dans l’assemblée, quand se manifestent des tendances à l’indépendance.
«Si tu sépares ce qui est précieux de ce qui est vil, tu seras comme ma bouche» ; paroles remarquables, qui ont joué un grand rôle dans la formation des ouvriers du siècle dernier. «Si tu sépares…» : voilà le bon travail d’un serviteur fidèle. Autrement dit, le fruit d’un travail ainsi opéré, c’est de contribuer à mettre fin au mélange. La victoire de l’ennemi, dans la chrétienté la meilleure, c’est de faire enseigner des doctrines mélangées, soit sur le terrain moral, soit sur le terrain doctrinal. On entend dire : «Sur le terrain doctrinal, il ne faut pas être trop strict !». Nous trouvons, dans l’Écriture, que si quelqu’un ne vient pas chaque jour après Christ, en portant sa croix, il ne peut être son disciple (Luc 14:27). Heureux ceux qui auront su séparer ce qui est vil de ce qui est précieux. Pour plusieurs, cette fidélité leur a coûté la vie. Aujourd’hui, en sommes-nous là ?
Qu’est-ce qui est vil ? Tout ce qui vient de la volonté de l’homme, c’est-à-dire l’activité de la chair sous toutes ses formes, voilà ce qui est vil. C’est le mal. Séparer ce qui est précieux de ce qui est vil, voilà le service fidèle ! Ne jouons pas avec les vérités dont l’importance, en apparence, paraît moindre. Chacun aura à faire au Seigneur. Tout se ramène, au fond, à des questions morales.
Dieu est amour ; mais il est aussi lumière. Pouvons-nous, en toute révérence, partager, pour ainsi dire, la nature de Dieu en deux ? Même entre les frères, il n’y a jamais d’amour vrai sans la lumière.
Ne flattons jamais un frère. C’est l’ennemi qui fait faire cela. Ne nous laissons pas influencer, ni par les flatteries, ni par les menaces. Un homme de Dieu, c’est le plus grand trésor qui soit au monde.
Plus un frère a de maturité d’âme, de spiritualité, d’intelligence des choses de Dieu, plus il est responsable d’agir en conséquence. Et s’il est appelé à aider, il est responsable s’il se laisse influencer par des considérations humaines.
Qu’il y ait beaucoup de crainte ! Vous voulez attirer la jeunesse par toutes sortes de moyens ? Vous faites le travail de l’ennemi. Soyons exercés pour que la présence du Seigneur soit goûtée parmi nous. Les âmes seront gagnées, et il y aura des conversions. Nous n’avons pas besoin de forcer une âme à une confession : « De l’abondance du coeur la bouche parle» (Matt. 12:34).
Apprenons donc que nous ne sommes rien du tout !
J’ai toujours été frappé que le frère à qui nous devons tant s’est toujours fait le serviteur de tous. Nous aimons ces frères pour leur valeur morale et spirituelle. Nous sommes portés à chercher notre réputation. Nous devons fuir cela. Jouir de la communion de nos frères, de nos soeurs, oui ; mais d’une vraie communion en Christ, sinon le «moi» s’y mêle. Et c’est toujours ce qui gâte tout ! Des soeurs peuvent faire beaucoup de mal, en influençant. Retenons la manière dont le Seigneur a repris Pierre : «Arrière de moi, Satan» (Matt. 16:23).
Ce n’est pas la présence des frères qui nous aide, avant tout, dans nos douleurs et nos peines. C’est la présence de Christ, la présence du Seigneur. Même pour un évangéliste, ce n’est pas sa présence propre qui peut attirer les âmes. C’est la présence du Seigneur avec lui, dans son service, dans sa marche.
«Si tu sépares…» : il nous faut être convaincus, divinement, de la position que nous avons. Nous devons pouvoir répondre, avec l’Écriture, à quiconque nous demande raison de l’espérance qui est en nous.
«Si quelqu’un parle, qu’il le fasse comme oracle de Dieu» (1 Pier. 4:11). Si nous avons cinq paroles seulement, n’en disons pas dix ! La présence du Seigneur se réalise par l’Esprit Saint.
«Qu’ils reviennent vers toi, mais toi ne retourne pas vers eux». Le Seigneur nous a séparés. Et il faut bien que nous prenions conscience de la position si étrange que nous avons vis-à-vis d’autres chrétiens. Du moment que nous avons compris cela, nous pouvons bien comprendre cette parole : «Toi ne retourne pas vers eux». Celui qui a reçu la vérité que Dieu révèle est responsable de la garder. C’est une impossibilité intérieure, et divinement sentie, de retourner vers eux.
S’il y a des frères qui sont mondains ou charnels, qui cherchent leurs propres intérêts, nous n’avons pas à les imiter ! Le Seigneur connaît les sentiments intérieurs, avant que les hommes s’en aperçoivent. Il faut s’occuper des âmes, de la part du Seigneur, et avec lui. Cela implique toujours la dépendance. Les frères qui sont en avant sont très responsables de réaliser cette dépendance. Ils doivent avoir le Seigneur dans leur coeur. Ne cherchons aucune place, sinon celle où le Seigneur se tient près de nous. Chacun doit accomplir sa tâche avec le Seigneur. Nous avons besoin de lui tous les jours. Paul dit : «Pour moi, vivre c’est Christ» (Phil. 1:21), et non pas : vivre, c’est le servir. Jamais le service ne peut remplacer le Maître.
«Là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis là au milieu d’eux». Les frères du commencement se cramponnaient à cette promesse, comme un navire dans la détresse s’attache à une ancre. Ne voyez-vous pas que cette promesse du Seigneur est valable dans tous les temps, même dans les temps de ruine ? C’est la grande ruine, aujourd’hui ! Le vaisseau que représente l’Église fait eau de toutes parts. Mais le Seigneur est là ; et c’est lui qui répond à tout.
Christ est le seul chef. Nous sommes tous dépendants du Maître. Comment connaîtrons-nous la vérité ? En étant exercés. C’est dans ce passage qu’il est dit : «Tout ce que vous lierez sur la terre sera lié dans le ciel». Ceci est vrai à condition que l’assemblée soit en bon état. Les réunions d’administration sont donc très importantes. Que la crainte de Dieu remplisse les coeurs ! Ce bon état n’est pas lié à un don.
Quand un cas exerçant se présente, ce n’est pas un frère qui tranche l’affaire. Le Seigneur laisse à l’assemblée le soin d’être exercée. Et elle doit s’attendre à lui, pour qu’il manifeste sa pensée. Qui oserait dire que tous ceux qui sont à la table du Seigneur sont de véritables croyants ? On peut tromper les frères ; on peut tromper une assemblée ; mais pas le Seigneur. Donnons ce sentiment de crainte aux jeunes. Ne leur laissons pas croire que ce qui se passe dans l’assemblée nous laisse indifférents.
Si nous encourageons quelqu’un à entrer dans l’assemblée avec un motif étranger, nous l’encourageons à avoir, pour le reste de ses jours peut-être, le sentiment d’avoir étouffé sa conscience. Si nous agissons d’une manière telle que nous laissions penser qu’il est équivalent, quant à la responsabilité, d’être dedans ou d’être dehors, nous péchons. La différence entre le dedans et le dehors doit être manifestée dans la vie pratique. Le Seigneur ne bénira pas toutes les voies détournées, à moins que, dans sa grâce, il produise des exercices ultérieurs.
Tout ce qui touche à l’Assemblée touche aux droits du Seigneur, à la gloire du Seigneur, à la volonté du Seigneur. Tout cela est très sérieux, mais en même temps très heureux. Car la crainte du Seigneur maintient dans le chemin de la piété, de la paix. Quand nous avons le Seigneur avec nous, nous sommes à l’abri de Satan. Au contraire, si nous le méprisons, Satan nous entraînera loin de lui.
Si nous rendions un témoignage plus vrai, si nous servions le Seigneur plus fidèlement, nous produirions, dans le coeur même des inconvertis, des sentiments qui pourraient leur être très salutaires. Car la crainte de Dieu est un élément fondamental, au départ, pour toute la vie chrétienne.
L’assemblée n’est pas un lieu où l’on peut rechercher ses propres intérêts. Que le Seigneur nous donne d’y penser ! Paul a dû reprendre Pierre, alors que celui-ci risquait d’entraîner à la dérive tout le témoignage. Paul n’hésite pas à reprendre Pierre en face (Gal. 2:11, 14).
Que le Seigneur nous garde, les uns et les autres. Qu’il nous garde près de lui ! Si nous avons baissé, et ne sommes pas en état d’accomplir tel ou tel service, arrêtons-nous, et cherchons la lumière de sa face !
La même puissance qui peut faire passer une âme, jeune ou non, des ténèbres à la lumière, est nécessaire, pour que soient gardés, dans le chemin de l’obéissance et quel que soit leur âge, tous les enfants de Dieu.
Que le Seigneur nous soit en aide à tous. Et que nous nous attendions à lui !
[LC n° 34]
Dimanche après-midi 22 octobre 1950
Dans ce que nous avons lu dans Jérémie, nous avons des déclarations relatives à la confiance en Dieu. C’est difficile de se confier en Dieu, très difficile. Lorsque Dieu, qui est fidèle, nous place dans des situations par lesquelles Il nous force à nous confier en Lui, nous sommes étonnés de voir combien la confiance en Dieu est un état, pratiquement, étranger à notre âme. C’est très humiliant.
La Parole renferme d’innombrables passages sur la confiance en Dieu. Ce sont des points de la Parole de Dieu essentiels pour la vie de l’âme. Ce ne sont pas des points doctrinaux. La doctrine peut aider quelqu’un à connaître Dieu et à se confier en Lui. Elle le fait, comme toute vérité. Toute la vérité est bonne, la vérité de Dieu — c’est la seule. La vérité vient de Dieu et lie à Dieu. Mais une vérité, pratiquement, n’a de valeur que si elle porte le coeur qui la saisit à s’appuyer sur Dieu un peu mieux après l’avoir reçue qu’avant. C’est très difficile, de se confier en Dieu.
Nous pourrions rappeler beaucoup de passages, et notamment ce verset, que nous connaissons bien, du Ps. 16:1 : «Garde-moi, ô Dieu! car je me confie en toi». Nous, souvent, nous disons : Garde-moi, ô Dieu — et nous pouvons bien faire cette prière. Mais si nous ajoutions : «car je me confie en toi», souvent, nous serions obligés de dire que nous sommes des menteurs. Nous sommes très désireux que Dieu nous garde, mais il faut pouvoir dire tout le verset, qui s’applique, d’une manière absolue, à Christ, comme tout ce Ps. 16. On n’invente pas cette application ; elle est faite dans le Nouveau Testament.
Alors, quand nous disons à Dieu : «Garde-moi, ô Dieu», est-ce que nous pouvons achever le verset ? Cela rejoint la pensée de l’épître de Jacques, qui dit : «Qu’il demande avec foi, ne doutant nullement» (1:6). Quelqu’un qui ne demande pas avec foi, qu’est-ce que cela prouve ? Que son coeur a sa confiance ailleurs qu’en Dieu.
Une conséquence de la chute a été de jeter dans le coeur de l’homme — dans notre coeur à nous, et non pas seulement celui des païens et des mondains — la méfiance vis-à-vis de Dieu. On se méfie de Dieu. On se confiera dans sa fortune, son intelligence, sa sagesse, sa piété, son dévouement, ses amis, dans un homme, mais pas en Dieu. Il faut reconnaître devant Dieu que, tout de même, ce n’est pas tout à fait en ordre. Si les choses étaient en ordre, on devrait s’appuyer d’abord sur Dieu pour tout, pour toutes choses, pour gagner sa vie, pour la santé, etc. Nous savons tous bien ce que nous faisons et, avec cela, nous nous croyons de très braves chrétiens, des chrétiens modèles. Et nous pensons qu’il n’y a pas mieux que nous, qu’il n’y a jamais eu mieux que nous !
«Garde-moi, ô Dieu, car je me confie en toi» : si nous ne pouvons pas dire la fin du verset, l’âme n’est pas droite. Cela arrive souvent.
Voilà pourquoi aussi Dieu ne répond pas toujours. Si notre confiance était en Dieu, et en Dieu seul, quelle que soit notre détresse, Il répondrait.
Le christianisme pratique est une chose éprouvante. Et le christianisme qui n’est pas pratique ne vaut rien du tout, aux yeux de Dieu. Au contraire, c’est un péché. Dieu veut du vrai, dans notre vie. C’est pourquoi il nous fait passer par le feu. Quand il voit que ce qui n’est pas vrai envahit et gâte tout, il nous fait passer par le feu. Il brûle tout ce qui nous embarrasse.
Il y a encore bien d’autres passages, innombrables, qui nous parlent de la confiance. Ce n’est pas un sujet d’étude que la confiance, mais c’est un sujet qui doit nous occuper toute la vie, un sujet qui doit remplir l’âme. La Parole nous donne, à ce sujet, beaucoup d’exhortations et d’exemples, et celui de Christ en tout premier lieu. Voilà le seul homme qui se soit confié en Dieu. Ce qui rend d’ailleurs la scène de la croix si extraordinaire, c’est que le seul homme qui se soit confié en Dieu, celui précisément dont la confiance était totale, a dû être abandonné de Dieu. Et l’abandon a dû être total, parce qu’il prenait la cause de l’homme pervers, de l’homme méfiant vis-à-vis de Dieu.
Nous trouvons que «ceux qui se confient en l’Éternel sont comme la montagne de Sion, qui ne chancelle pas, qui demeure à toujours» (cf. Psaume 125:1). Une montagne ne s’ébranle pas. Si nous nous confiions en Dieu sans cesse, si notre âme était dans cet état de confiance en Dieu seul, rien ne nous ébranlerait.
Que Dieu nous donne de faire de grands progrès. Il vaut bien mieux quelqu’un qui ne sait rien quant à la doctrine chrétienne, mais qui connaît Dieu, qui peut dire : Je connais Dieu ; j’ai passé là, Dieu m’a aidé ; je sais ce que c’est que s’appuyer sur Dieu ; dans telle circonstance, Dieu m’a suffi.
Est-ce que nous avons des circonstances de ce genre, dans notre vie ? Si nous n’en avons point, qu’est-ce que nous avons fait ? Qu’est-ce que nous avons donc fait de Dieu, de ce Dieu qui nous a amenés à sa connaissance ? Quelle place lui avons-nous donc donnée, dans notre coeur ? Nous disons que nous aimons Dieu, et nous nous méfions de lui !
Une chose extraordinaire, remarquable, c’est que la confiance en Dieu brille justement quand c’est difficile.
Le Seigneur, comme homme, aurait pu se servir de sa puissance divine pour s’abriter. Jamais ! Il s’est appuyé sur Dieu, a tout enduré comme homme et, comme homme, a eu une confiance parfaite en Dieu.
Dans le livre de Jérémie, qui est un livre extrêmement beau, on voit, dans le chap. 17 entre autres, les sentiments d’un homme croyant qui aime Dieu et les fidèles. Il dit : «Maudit l’homme qui se confie en l’homme» et, plus loin, «béni l’homme de qui l’Éternel est la confiance». Voilà une malédiction et voilà une bénédiction. S’il y a un pauvre pécheur qui ne soit pas converti et qui se confie en l’homme, en ce que l’homme enseigne, dans les moyens de salut que les hommes ont inventés, eux qui disent aux pauvres pécheurs : Confiez-vous dans vos bonnes oeuvres, confiez-vous en vous-mêmes ; Dieu lui dit : «Maudit l’homme qui se confie en l’homme». C’est une confiance mal placée que la confiance en soi pour faire son propre salut.
Mais «béni l’homme qui se confie en l’Éternel». Le croyant se confie en Dieu pour le salut de son âme. Il a saisi le moyen que Dieu offre : «Qui croit au Fils a la vie éternelle» ; «le sang de Jésus Christ nous purifie de tout péché» (cf. Jean 3:36 et 1 Jean 1:7). Pour un pécheur qui croit cela, la foi qu’il a équivaut à la déclaration : Je ne me confie pas en moi ni dans mes bonnes oeuvres ; mais je me confie en Dieu, dans le sang de Christ. Et c’est la confiance de base de la vie chrétienne. Sans cela, il n’y a pas de christianisme.
Ainsi, ces versets s’appliquent très bien au salut de l’âme. Mais ils vont beaucoup plus loin, et sont très importants pour la vie chrétienne pratique. C’est sur ce point que je désirais dire quelques mots.
Chers amis chrétiens, frères, soeurs, rappelons-nous ce que Dieu dit : «maudit l’homme qui se confie en l’homme, et qui fait de la chair son bras». La chair, c’est l’homme. Dieu nous dit lui-même qu’Il ne se confie pas dans l’homme : «Il ne se complaît pas aux jambes de l’homme» (Ps 147:10). Il n’a pas besoin de son intelligence, de son zèle. Dieu n’a besoin de personne. Tout le monde a besoin de Lui, tandis qu’on voudrait nous faire croire le contraire. On voit des hommes qui s’efforcent de vivre sans Dieu et de se passer de Dieu, alors que personne ne peut se passer de Lui, et que Dieu pourrait se passer de tout le monde.
«Maudit l’homme qui se confie en l’homme», cela va très loin. Est-ce que, dans notre vie, nous nous appuyons sur l’homme, ou sur Dieu, dans nos circonstances ?
«Béni l’homme qui se confie en l’Éternel». Il vous arrive une circonstance difficile. Vous pouvez appeler tous les voisins, tous vos amis, tout le monde ; ils ne pourront rien faire pour changer votre circonstance, pour changer votre douleur en joie, votre chagrin en allégresse. Personne au monde, et même tous les chrétiens du monde eux-mêmes, ne peuvent rien à vos circonstances. Il ne peuvent pas, par eux-mêmes, changer la volonté propre d’un homme en obéissance à Dieu, sa haine contre Dieu en amour pour Christ. Personne ne peut faire cela au monde. Si vous appelez des chrétiens, ils peuvent prier pour vous, pour que Dieu fasse ce travail dans votre âme, le seul qui compte. Mais que de fois on s’appuie sur toutes sortes d’appuis, et on jette Dieu de côté. Dieu est-Il insensible à cet outrage ? Il sent tous les outrages. C’est un outrage à Dieu que de se confier en l’homme. Et je dis cela en sentant, pour moi-même, combien c’est difficile de se confier en Dieu.
Qu’une difficulté nous arrive, notre premier mouvement est-il de dire : Seigneur, voilà tout ce qu’il y a, exactement tout ? C’est à toi que je pense ; je t’apporte cela. C’est là une preuve pratique de la confiance en Dieu. Tandis que si vous allez chercher d’autres appuis, vous mettez le Seigneur de côté, et votre confiance n’est pas en Lui. Et si vous faites appel à des frères ou à des soeurs, que ce soit pour qu’ils prient afin que Dieu vous donne cette confiance qui fait qu’il n’y a rien entre Dieu et l’âme. Ah, si nous comptions sur Dieu en toutes choses ! Il faut compter sur Dieu quand c’est difficile. D’ailleurs, c’est toujours difficile de compter sur Dieu. Nous trouvons : «Confiez-vous dans l’Éternel en tout temps», (Psaume 62:8), quand le ciel est serein comme quand l’orage gronde. Lorsque l’épreuve survient, la détresse, ah, on pense à Dieu ! Mais il y a tellement d’intermédiaires qu’on a laissé se glisser entre le coeur et Dieu, que la confiance en Dieu est, en somme, très lointaine, et qu’il faut la faire remonter à la surface du coeur, au prix de beaucoup d’exercices.
C’est difficile, chers amis, de se confier en Dieu. Mais Dieu le sait. Dieu tient compte de la confiance des siens, et il n’y a que cela qui lui plaise.
Dieu nous parle, chers amis, aux uns et aux autres. Et il arrive qu’Il nous envoie une circonstance difficile, parce que nous sommes tombés dans un état de torpeur où Dieu n’a aucune place dans notre âme. Il nous envoie une épreuve pour nous réveiller, pour nous faire dire : Où est-ce que j’avais mis Dieu ? Et j’osais dire que je me confiais en Lui !
Quand on se confie en Dieu, on ne s’agite pas. C’est sérieux, de s’appuyer sur Dieu. C’est solennel, de chercher à donner à Dieu la première place. Je ne dis pas que nous le réalisions. Que Dieu nous fasse faire des progrès dans cet état-là. Mais s’appuyer sur Dieu, ne pas s’appuyer sur des appuis que nous aimons tous, c’est toujours éprouvant.
Dans Jérémie, nous avons deux exemples qui m’ont souvent réconforté, chers amis.
Le premier est celui d’Ébed-Mélec, l’Éthiopien. Un Éthiopien ! Dieu choisit cet homme, qui n’était pas favorisé en Israël, et le désigne ainsi pour montrer que cet homme, qui, a priori, n’avait pas été enseigné comme les Israélites, brille par sa confiance en Dieu. On voit Ébed-Mélec agir ; et, après, Dieu dit : «parce que tu as eu confiance en moi». (chap. 39:18) Qu’avait-il fait ? Il a mis sa vie dans sa main. Il aurait pu dire de Jérémie : Ce n’est qu’un prophète ! Il a vu Jérémie qu’on mettait dans la fosse (car on mettait les prophètes dans la fosse, dans ce temps-là… et on en a mis pas mal depuis) parce qu’il annonçait la parole de l’Éternel : Jérusalem sera prise ; livrez-vous aux Chaldéens. En effet, Dieu avait décidé de balayer son peuple de sa terre, tellement il avait péché.
Jérémie a parlé pendant peut-être plus de quarante ans ; quarante ans à souffrir ! Il tient bon et dit ce que Dieu lui fait dire, toujours. De guerre lasse, on s’empare de lui, on le fait mettre dans la fosse. Ce qui rend la situation solennelle, c’est qu’on condamne Dieu, en condamnant Jérémie.
Ébed-Mélec prend intérêt à Jérémie. Et, au prix de sa vie, cet Éthiopien, homme sans influence, va au-devant du roi et dit : C’est mal, de faire mourir Jérémie. Il s’emploie à faire remonter Jérémie hors de la fosse.
Si les princes, qui avaient jeté Jérémie dans la fosse, avaient vu cela, Ébed-Mélec risquait sa vie. Mais quand Jérusalem a été prise — car elle l’a été — Dieu n’a rien oublié. C’est pourquoi nous trouvons ce que nous avons lu. Dieu fait porter son message à Ébed-Mélec par Jérémie. Ce sont des paroles de toute beauté. Dieu ne perd rien, enregistre tout, se souvient de tout, de tout ce que Lui a produit dans les siens. Ce sont des paroles extrêmement belles : «ainsi dit l’Éternel des armées…» (chap. 39:16).
Ébed-Mélec n’était pas un héros. Dieu dit lui-même qu’il avait peur. Il n’avait pas une énergie naturelle telle qu’il ne sentait rien. Et Dieu lui dit : «Je te délivrerai en ce jour-là… je te sauverai… et tu auras ta vie pour butin ; car tu as eu confiance en moi, dit l’Éternel» (chap. 39:17-18).
Chers amis, il est beau de voir que Dieu attribue aux siens ce qu’il leur fait faire. Les fruits de la grâce qui agit en eux, il les leur attribue comme une bénédiction. Dieu sait en quoi nous nous confions. Bien des serviteurs de Dieu, qui ont annoncé que ce monde est un monde condamné, perdu, et la chrétienté elle-même, ont eu, pour cela, à endurer la mort ! Mais un jour viendra où la récompense de cette fidélité leur sera donnée, non pas sur la terre, comme ici en Israël, mais en vie et en gloire éternelles. Dieu tient bien ses comptes. Il sait ceux qui se confient en Lui : «Les yeux de l’Éternel parcourent toute la terre pour voir ceux qui sont d’un coeur parfait envers lui» (cf. 2 Chron. 16:9). Et les yeux de l’Éternel sont cette parfaite connaissance que Dieu a de tout ce qui se passe dans les coeurs de tous les hommes, à chaque instant : «les yeux de l’Éternel parcourent toute la terre».
Qu’il nous soit donné de nous confier en Dieu pour tout. Nous avons une épreuve ? Qu’il nous soit donné de penser à Dieu, de crier à Dieu. Est-ce une épreuve pour laquelle nous n’osons même pas faire appel peut-être à nos frères, à nos soeurs ? Crions à Dieu ; prions Dieu ; demandons à Dieu qu’Il nous donne de compter sur Lui. «Rien n’est impossible à celui qui croit» (cf. Marc 9:23) ; rien, absolument rien.
Vous avez des situations, des circonstances inextricables ? Personne n’y peut rien ? Vous ne savez pas comment vous en sortir ? Priez Dieu. Seulement, il faut la foi. Notre foi est en question.
Voilà pourquoi nous pouvons prier tous les jours, pour que Dieu nous donne de la foi, dans le déroulement de notre vie quotidienne, dans l’accomplissement de notre humble tâche quotidienne. Il ne faut pas la faire sans Dieu, mais compter sur Dieu. Et, dans les circonstances plus remarquables, nous aurons Dieu avec nous.
Ensuite, nous avons l’exemple de Baruc. Il a beaucoup souffert, parce qu’il n’était pas à la hauteur. Mais il avait à coeur le bien du peuple. Jérémie a beaucoup souffert parce que son coeur était avec le peuple. Et Dieu lui disait : Je le consumerai ; son histoire est finie. C’était terrible, pour un homme de Dieu comme Jérémie, d’être obligé de dire lui-même, de la part de Dieu, au peuple qu’il aimait de tout son coeur : C’est fini ; le jugement est là.
Tout le livre de Jérémie, et plus encore les Lamentations, expriment quelque chose de cette douleur profonde de Jérémie.
À Baruc, Dieu dit aussi : «Tu auras ta vie pour butin» (Jérémie 45:5). Baruc a été avec Jérémie ; il a eu sa vie pour butin.
Que Dieu nous donne d’imiter la confiance de notre Seigneur Jésus Christ.
C’est quelque chose de profond que la confiance en Dieu, que se confier en Dieu tous les jours. Sinon, on se confie en soi. Que de fois nous nous confions en nous ! Je vais faire ceci, établir mon plan, voir, réfléchir. Je fais appel à ma sagesse, à ma connaissance, peut-être à ma piété. On peut se confier en tout ce qui est de soi, et pas en Dieu.
Une deuxième vertu chrétienne, dont je désirais dire un mot pour la proposer comme sujet de méditation, est mise en évidence dans Jean 11 ; c’est la dépendance. Le Seigneur montre une dépendance absolue. La dépendance, c’est chercher la volonté de Dieu avant de faire quoi que ce soit.
Que de fois nous faisons l’inverse ! Nous prenons une décision dans notre coeur ; elle est transformée en acte dans notre vie ; et puis nous disons : Seigneur, bénis-moi. C’est-à-dire, bénis ce que j’ai fait ; c’est-à-dire, au fond, bénis ma propre volonté. Voilà comment nous comprenons les choses ! C’est l’inverse de la dépendance ; c’est donc l’indépendance ; tandis que la dépendance reste bien illustrée par l’attitude du Seigneur à la mort de Lazare. Lazare était malade. Le Seigneur le savait ; mais Il reste là où il était, trois jours, sans se déplacer. Tout le monde, les Juifs, les disciples, et Marthe, même Marie, agit comme pour faire sortir le Seigneur de cette dépendance absolue qui était la sienne.
Le Seigneur n’avait pas de commandement de la part de son Père. Aussi Il ne fait pas un pas. Il savait que Lazare était malade, mais il ne fait pas un pas. On lui a fait des reproches : Seigneur, voilà, il est mort ; si tu étais venu, il ne serait pas mort. La dépendance recevra toujours des reproches de l’indépendance. Ces pauvres disciples étaient bien charnels, comme nous le sommes. Ils ont fait souffrir le Seigneur. Pourtant, dans sa grâce, Il leur dit : Vous avez persévéré avec moi dans mes tentations (Luc 22:28).
Voilà la dépendance : le Seigneur ne fait pas un pas. C’est difficile, chers amis, quand on sait qu’on pourrait faire quelque chose, de ne pas le faire ; c’est très difficile.
Qu’est-il résulté de cette dépendance absolue du Seigneur ? Eh bien, tout le monde savait qu’il guérissait les malades. Et on a vu, du fait de sa dépendance, qu’Il pouvait ressusciter un mort. Ressusciter un mort, c’est autre chose que de guérir un malade. C’est autre chose, à la gloire de Dieu ! C’est pourquoi le Seigneur dit : «Cette maladie n’est pas à la mort, mais pour la gloire de Dieu» (Jean 11:4). Si nous dépendons du Seigneur, dans les petites et dans les grandes choses, nous glorifierons Dieu. Mais souvent, nous nous agitons, lorsque quelque chose nous arrive, au lieu de nous arrêter à ce que le Seigneur veut. Il est vrai que nous avons peut-être tellement peu l’habitude de consulter le Seigneur, que nous n’entendons pas sa voix quand Il parle, sauf quand Il nous parle très fortement, quand Il nous oblige à nous arrêter. Si nous avions l’habitude d’entendre la voix du Seigneur, nous dirions : Là, le Seigneur m’arrête ; je le sens, je sens qu’Il veut que j’attende ; je ne fais pas un pas, je reste tranquille ; et puis, Il m’ouvre la porte, et je vais en avant. Le Seigneur dit à Philadelphie : «Je tiens devant toi une porte ouverte que personne ne peut fermer» (cf. Apocalypse 3:8).
Nous n’aurions qu’à dépendre du Seigneur ! Hélas, il nous suffit de voir ce que nous faisons pour constater combien nous sommes loin de ce que le Seigneur attend de nous, dans notre vie de tous les jours et, à combien plus forte raison, dans les circonstances graves. Nous regardons dix ans en arrière, et nous disons : Si j’étais resté tranquille, Seigneur, je me serais épargné telle agitation, telle souffrance qui, non seulement ont été vaines, mais ont été une désobéissance.
Voilà la dépendance : attendre que le Seigneur nous dise d’agir. Il ne dit rien, alors ne rien faire. C’est ce que le Seigneur faisait, absolument, parfaitement. Tandis que nous, nous faisons bien souvent l’inverse, et en invoquant le nom du Seigneur. Et puis nous disons : Seigneur, bénis-nous, alors que nous devrions dire : Seigneur, nous avons désobéi ; nous ne nous sommes pas attendus à toi. Cela va bien loin. Mais si nous sommes chrétiens pour le ciel seulement, ce n’est pas la peine de parler de christianisme pratique. Si nous ne sommes chrétiens que pour le ciel, si nous sommes contents de connaître Jésus simplement pour le ciel, faisons nos quatre volontés ouvertement, et ne nous réclamons pas du nom de Celui qui est mort, non seulement pour nous sauver, mais aussi pour que nous vivions pour lui !
Un troisième point, c’est l’obéissance. L’examen de ces trois vertus chrétiennes n’est pas le fait du docteur chrétien, c’est le fait de la piété et de la foi. Et on trouvera, sans aucun doute, devant le tribunal de Christ, que tel frère inconnu ou telle vieille soeur inconnue, ou qu’un chrétien vivant n’importe où, aura vécu ces trois vertus chrétiennes beaucoup plus que nous, qui savons beaucoup de choses et ne les vivons pas.
La confiance en Dieu, la dépendance de Dieu, l’obéissance au Seigneur dans les détails, dans notre vie pratique, quand nous sommes devant les hommes, quand nous sommes devant les frères, dans les réunions, dépendre du Seigneur et du Saint Esprit dans les petites choses… Si nous le réalisions, nous remplirions le coeur de Christ de joie ; et, pour nous, ce serait le ciel sur la terre.
Que le Seigneur nous exerce, les uns et les autres, à secouer ces mensonges que constituent les apparences dont nous nous contentons, la plupart du temps, et à apprendre, dans la communion avec notre Sauveur bien-aimé, le trésor de notre coeur, notre vie pour l’éternité, ce que c’est que de Le suivre dans ce pauvre monde. Peut-être que, demain, nous n’aurons plus le privilège de pouvoir le faire.
[LC n° 35]
13 mars 1955
Méditations sur la vie chrétienne, édition FR 1995, p. 91
Le livre de Daniel se divise en deux parties : les six premiers chapitres concernent Daniel et ses compagnons ; les six derniers sont prophétiques. La prophétie ne concerne pas l’Église, mais c’est à elle que Dieu révèle ses pensées à l’égard de toutes choses. Ce qui se passait à Sodome ne concernait pas Abraham : il n’y habitait pas ; mais Dieu lui en parle. On aurait mieux compris que Lot en soit instruit, pour sa sauvegarde, mais c’est Abraham qui est le dépositaire de la pensée de Dieu au sujet de Sodome. «Cacherai-je à Abraham ce que je vais faire ?» (Gen. 18:17). La prophétie est l’ensemble des pensées de Dieu déposées entre les mains de l’Église pour son profit. Savoir ce qui va se passer dans ce monde n’est pas sans intérêt ; cela nous aide à ne pas mêler notre vie à celle du monde. Si un frère a sa vie entrelacée avec celle du monde, la vie de ses enfants sera une vie mondaine. C’est un coupable égoïsme de limiter à soi-même les conséquences d’une infidélité quant au monde ; quand bien même on s’efforce de la cacher, Dieu la voit et les enfants aussi.
Est-ce que nous lisons l’Écriture avec application et zèle ? Il me semble que, parmi nous, se manifeste de plus en plus un manque d’intérêt pour la lecture de l’Écriture, même chez les éléments les plus respectables ; c’est pourquoi il n’y a plus la même lumière, ni la même sûreté. On s’en tient souvent à la répétition des mêmes exhortations de détail, mais la Parole nous apporte autre chose que cela. «Mon peuple est détruit, faute de connaissance» (Osée 4:6). «Mon peuple ! ceux qui te conduisent te fourvoient» (És. 3:12). «Mon peuple est un troupeau perdu» (Jér. 50:6). Pour quelle raison ? Ils avaient abandonné l’Écriture, ils ne la lisaient plus ; ils la portaient sur eux, mais pas dans leur coeur, et ils n’avaient plus la crainte de Dieu. Aujourd’hui, la connaissance des Écritures est moins profonde qu’il y a seulement trente ou quarante ans. La connaissance approfondie de la Parole ne s’acquiert pas à la légère, et elle est nécessaire plus que jamais pour la vie du peuple de Dieu.
Ceux qui nous ont donné l’exemple sur beaucoup de point étaient plus zélés que nous pour sonder l’Écriture, pour lire et étudier toute l’Écriture. Ils se sont nourris à la source vivante de la Parole. En cela, la responsabilité des frères est bien plus grande que celle des soeurs. Les conséquences d’une négligence de la Parole peuvent être très graves. Ceux qui nous ont enseignés au cours du siècle dernier seraient surpris de constater que nous avons si mal gardé dans nos coeurs les appels qu’ils nous ont adressés. La Parole était leur vie ; ils y ont consacré leur vie. Que Dieu nous accorde de ne pas reculer devant l’effort pour sonder les Écritures ! Nous sondons beaucoup d’autres choses. Ne laissons pas entrer dans notre existence des préoccupations qui deviendront des devoirs devant les hommes et nous empêcherons de consacrer du temps à la Parole de Dieu ! Tout ceci est fondamental dans la vie d’un individu, d’une famille, d’une assemblée et de tout témoignage du Seigneur. Plus on lit l’Écriture, moins on est en danger de la remplacer par des idées personnelles. Le livre de Daniel notamment nous montre que la révélation de la pensée de Dieu ne nous sera pas donnée si nous traitons la Parole de Dieu à la légère.
Dieu nous a donné des conducteurs qui nous ont enseignés, et dont le dévouement, l’autorité morale et la consécration nous sont en exemple. Ils ont dit que le témoignage confié aux frères a été, avant tout, non pas un travail d’évangélisation parmi les masses incrédules, bien que cela ait toute sa place, même parmi les frères — et que Dieu veuille nous donner du zèle pour cela ! — mais le maintien et la proclamation des droits du Seigneur, de la Parole de Dieu, de toute la vérité, morale et doctrinale, alors que la chrétienté va à l’abandon, au relâchement moral, à l’apostasie et à la rébellion contre l’Écriture. Voilà ce que le Seigneur a confié aux frères et dont nous sommes les héritiers. Qu’il nous soit donné de ne pas le perdre de vue ! Des évangélistes, des serviteurs, le Seigneur en a partout ; il y a du zèle, de l’activité et des résultats un peu partout ; mais le témoignage à toute la vérité de Dieu selon l’Écriture, dans la dépendance du Saint Esprit, avait été confié aux frères. Si nous nous écartons de cela, nous pourrons dire que nous aurons, sur ce point, apostasié.
L’exemple de Daniel donne une instruction morale valable pour chacun. Daniel et ses compagnons étaient captifs, ils n’étaient pas chez eux : captivité, souffrance. Plus le chrétien est pieux, plus il souffre. Le trône de Dieu n’était plus à Jérusalem ; le peuple n’avait plus de rapports avec Dieu. Telle est aussi la situation de l’Église, depuis longtemps déjà ; le niveau de foi a baissé, le monde l’a pénétrée. Des multitudes d’hommes qui n’ont pas la vie de Dieu ont mis la main sur les trésors sacrés, comme on avait jadis emporté à Babylone les trésors sacrés du temple pour les placer dans des temples d’idoles. Des gens qui se disent croyants, et qui sont incrédules, ont mis la main sur les choses de Dieu : sur la Bible, sur la vérité divine, sur la vérité relative à la personne du Seigneur. Des peuples se sont appropriés les choses divines, comme si elles étaient à eux. Pourquoi ? Parce que l’Église n’est pas restée fidèle dans la séparation du monde. Au début des Actes, il y avait une barrière morale autour d’un petit groupe d’hommes et de femmes absolument séparés ; il y avait un rayonnement de la grâce et de la vérité autour d’eux. Hélas ! Nous croyons bien vite que les choses, après tout, ne sont pas en si mauvais état, alors que c’est la ruine complète, un état de désordre complet aux yeux de Dieu.
Daniel souffre à Babylone, isolé, mais le chemin vers Dieu est toujours ouvert à la foi. Et peut-être trouverait-on difficilement dans l’Écriture un homme qui ait un témoignage aussi pur que celui de Daniel ; on ne trouve rien à redire dans la vie de cet homme, dans les conditions les plus défavorables. Il cherche Dieu. Il est là, à la cour du roi ; il se soumet, mais il est séparé pour Dieu. Il ne mange pas du pain du roi, il ne boit pas du vin du roi ; il n’a pas communion avec le roi qu’il sert. Est-ce que nous buvons aux coupes, aux joies du monde ? Est-ce que nous mangeons le pain du monde ? Si nous nous nourrissons de ce dont le monde se nourrit, jamais nous ne pourrons être fidèles comme Daniel et ses trois compagnons. Ils sont là, ils souffrent ; il n’y a que Dieu qui répond aux besoins de leur coeur, aux besoins de leur foi. Pour trouver Dieu, ils se séparent. Ils font leur service impeccablement ; on aurait bien voulu trouver en eux des fautes pour les condamner et les mettre à mort, par jalousie. Dieu donne à Daniel une intelligence supérieure, mais il était impeccable vis-à-vis du monde, fidèle dans son service. Alors on dit des mensonges à son sujet, comme toujours.
Dieu est en aide à Daniel et ses compagnons, qui, malgré la parole du roi — dans la conscience duquel la vie d’un homme ne pesait pas lourd — ne mangent pas le pain ni ne boivent le vin du roi pendant les trois ans de mise à l’épreuve. Ils réalisaient la présence de Dieu ; ils ne pouvaient se nourrir à la fois des mets du roi et de Dieu lui-même. Nous non plus, nous ne pouvons pas davantage être heureux avec le Seigneur et manger le pain du monde.
Daniel est fidèle, sans bruit, sans éclat ; son attitude est un refus silencieux et fidèle, une disposition du coeur bien arrêtée, gouvernée par la crainte de Dieu. Est-ce notre attitude dans le secret de notre coeur ? Daniel n’a pas fait cela en pensant à l’avenir ; il est fidèle dans le présent. La modestie et la fidélité brillent chez Daniel et ses trois compagnons. En raison de cette séparation, de ce nazaréat, Dieu donne à Daniel et ses compagnons l’intelligence. Nous avons l’intelligence des pensées de Dieu et de la Parole de Dieu dans la mesure où nous sommes séparés du monde ; c’est la règle. L’intelligence des pensées de Dieu, la joie dans les choses de Dieu, sont en rapport exact avec la mesure de séparation que nous réalisons vis-à-vis du monde. Daniel ne sort pas du monde ; il ne se soustrait pas à ses obligations, il les accomplit scrupuleusement. mais, moralement, c’est un étranger. Son coeur est avec le Dieu des cieux, pour employer une expression propre à ce livre.
Dieu trouble le grand roi par un songe, et personne ne peut le lui révéler. Alors la sagesse de Daniel brille et, avant sa sagesse, sa piété ! La vie de Daniel et de ses compagnons est en jeu. Le roi, mécontent, veut tuer tous les sages, mais l’intervention de Daniel arrête son bras. Daniel se concerte avec ses compagnons. Il y a une difficulté, ils ne savent pas comment en sortir ; ils prient, ils vont consulter Dieu. Il ne s’agissait pas seulement d’expliquer le songe, mais de le raconter avant de l’interpréter. Cela venait de Dieu, parce que Dieu voulait se montrer au-dessus du roi et de tous les sages. Dieu veut manifester sa gloire dans les hommes ; le Seigneur sera admiré dans ceux qui auront cru. Mais il désire l’être déjà sur la terre. Il n’envoie pas un ange, comme il aurait pu le faire. Il exerce Daniel et ses trois compagnons : c’est l’exercice de la foi, et Dieu y répond. Il révèle le songe et son interprétation. Pour cela, il fallait deux choses : la séparation du monde et la persévérance dans la prière.
Daniel prie. «Alors le secret fut révélé à Daniel dans une vision de la nuit» (Dan. 2:19). Il n’était pas plus capable qu’un autre de le connaître par lui-même, mais il craignait Dieu et se séparait de ce dont Dieu se sépare. Ne prétendez pas aimer Dieu si vous gardez contact avec ce que Dieu ne peut pas supporter ! Le songe fut révélé à Daniel ; avant de porter la réponse à Nébucadnetsar — il aurait pu se dépêcher pour sauver la vie de ceux qui étaient menacés — il se met à genoux, se prosterne devant Dieu pour lui rendre grâces. : «Toi, Dieu de mes pères, je te loue…». C’est l’ordre normal des choses. De même, Éliézer, après son long voyage, au moment où Dieu lui a répondu, se prosterne pour bénir. Mettons-nous Dieu en premier lieu lorsqu’il nous répond ? Nous savons peu montrer à Dieu que nous l’aimons, parce que nous l’aimons peu.
La foi suit un chemin étroit, certes, mais plein de clarté, de paix, de bonheur. Il comporte l’exercice de la prière dans la séparation de ce dont Dieu est toujours séparé, par sa nature même, de ce dont Jésus était séparé. Alors le coeur est droit. Qu’il nous soit donné d’honorer Dieu ! Lui honore la foi. Ces jeunes Hébreux n’ont-ils pas honoré Dieu ? En retour, Dieu leur donne un honneur rattaché à son nom. Plus tard, la foi de compagnons de Daniel a été aussi ferme quand ils ont occupé une haute position que lorsqu’ils sont arrivés là, pauvres jeunes prisonniers. Mais à l’épreuve, ces jeunes Hébreux sont restés fidèles, dans l’épreuve de la fournaise ; leurs liens ont été détruits, le feu les en a délivrés. Et c’est le roi qui les avait fait lier. Ils sont trouvés en compagnie de Quelqu’un pour qui le feu ne compte pas. La foi active et puissante trouve Dieu partout, et on ne s’aperçoit pas du feu.
Craignons Dieu et donnons-lui gloire, dès maintenant et à jamais !
[LC n° 36]
10 mai 1953
Ce livre est écrit par l’un des trois prophètes qui ont parlé après la captivité, c’est-à-dire qui se sont adressés au résidu remonté de Babylone à Jérusalem. Ce résidu est un résidu de Juda. C’est ce résidu qui est revenu à Jérusalem et à qui le Seigneur a été présenté. Il vient des deux tribus, Juda et Benjamin, qui ont sur la conscience un fait qui ne pèse pas sur la conscience des dix tribus : le rejet du Messie, la mort du Seigneur. C’est pourquoi la restauration des deux tribus sera faite suivant un processus différent de celui qui marquera la restauration des dix tribus. Et on trouve cette différence, dans l’Écriture. Nous ne nous arrêterons pas au côté prophétique du livre, bien qu’il soit d’un extrême intérêt, mais sur le côté moral de ce que nous avons lu. Il y a là, comme dans toute portion de l’Écriture, une valeur morale permanente. Le Nouveau Testament déclare d’ailleurs que «toute écriture est inspirée de Dieu, et utile pour enseigner, pour convaincre, pour corriger, pour instruire dans la justice, afin que l’homme de Dieu soit accompli et parfaitement accompli pour toute bonne oeuvre» (2 Tim. 3:16-17). Si nous perdons cela de vue, nous perdons immédiatement le fruit, le bénéfice pour lequel Dieu nous a conservé l’Écriture. Elle n’est pas un jouet pour les mains de l’homme, comme, hélas, elle l’est devenue ! L’Écriture est une bénédiction entre les mains de l’homme, mais aussi une épée dans sa main. Et, comme nous l’avons dit quelquefois ici, c’est une épée qui n’a pas de poignée, dans ce sens que celui qui la prend est le premier à en sentir la puissance, à sentir qu’elle a une autorité divine. Eh bien, un des côtés de l’intérêt que présente ce livre pour nous (que je laisserai plutôt à la recherche de chacun, parce que ce serait trop long d’entrer dans les détails de ce que nous avons lu), c’est de montrer le chemin que Dieu fait suivre à un homme, ou, plus exactement ici, à une partie de son peuple, pour sa restauration.
On peut dire que ce chemin de restauration, c’est aussi, moralement, le travail que Dieu fait chez un inconverti. Car, lorsqu’un inconverti vient à Dieu, on peut parler de sa restauration. Il s’agit, en effet, d’un retour de l’homme à Dieu, qui a été d’abord en relation avec l’homme. Mais cette relation a été rompue par l’infidélité de l’homme. Et le travail que la grâce de Dieu opère consiste à renouer des relations entre Dieu et l’homme. On peut donc appliquer ce travail de restauration au travail opéré dans le coeur d’un homme qui retrouve Dieu, comme aussi au travail de Dieu dans un chrétien après un écart et un éloignement d’une importance variable.
Au premier chapitre, nous avons quatre cornes, puis nous avons quatre ouvriers. Les quatre cornes sont les images de quatre empires. Une corne, dans l’Ancien Testament, est l’image d’une puissance, et quatre cornes sont les images de quatre puissances. Ces quatre cornes — quatre puissances — ont été celles qui ont contribué à disperser le peuple de Dieu par un châtiment que Dieu lui-même a ordonné. La première de ces cornes, c’est Nébucadnetsar, c’est Babylone ; ensuite les Perses ; ensuite l’empire grec d’Alexandre ; et enfin, l’empire romain, dont on n’a pas fini de parler, puisque, si son activité a subi une interruption, elle doit reprendre.
Ces quatre cornes nous sont présentées comme des instruments dont Dieu s’est servi pour disperser son peuple. Mais, nous l’avons vu, si Dieu a dispersé son peuple, dès le premier chapitre, il nous en a donné les raisons. Dieu donne souvent, et avec beaucoup de soin, la raison de ce qu’il fait. Ici, il dit : J’ai dispersé mon peuple parce qu’il a été infidèle. Un des livres les plus remarquables à cet égard, c’est Osée. Il est presque tout entier un plaidoyer de Dieu (à part quelques passages proprement prophétiques), Dieu prenant la peine de dire devant son peuple, devant l’auditoire, devant le lecteur : Voilà ce que j’ai fait à mon peuple ; voilà pourquoi j’ai fait cela à mon peuple, comme pour dire : Ne pensez pas un instant que j’ai agi de façon injuste, arbitraire, que j’aurais pu faire autrement. Soulignons en passant l’immense et permanente valeur morale de ce fait.
À la fin du chapitre premier, les quatre cornes nous sont présentées. Mais auparavant, nous trouvons, mis en évidence, l’état du peuple. «Vos pères, où sont-ils ? Qu’ont-ils fait ? Revenez à moi et je reviendrai à vous,… revenez donc de vos mauvaises voies».
Vous n’êtes pas revenus à moi ? Eh bien, voici une première corne, et les autres continueront. Retenons donc cet enseignement, que Dieu nous donne ici et qu’on trouve partout dans la Parole, que lorsque Dieu frappe les siens, il en donne la raison, montrant que son action n’est jamais arbitraire, jamais injuste. Bien entendu, Dieu n’écrit pas, pour chacun des siens ou pour son peuple, un nouveau chapitre ; mais il se sert de l’Écriture déjà donnée pour éclairer chacun à cet égard et justifier ses voies envers nous.
C’est une leçon très importante que ce premier chapitre nous donne.
Il disperse ; Il frappe. Il a des raisons pour cela : Où sont vos pères ? Qu’ont-ils fait ? Ils ne m’ont pas écouté, et vous non plus. Eh bien, voici, le moment du châtiment est arrivé ! On trouve cela continuellement, dans l’Écriture.
Mais nous savons très bien que notre coeur est disposé à dire, lorsque la main de Dieu nous tient d’un peu près : Mais, ne fais-tu pas erreur ? N’est-ce pas à un autre que tu devais dispenser ces circonstances ?
Dieu, pourtant, ne se trompe jamais. Nous trouvons, précisément dans ce livre, qu’à la fin du travail de Dieu dans son peuple pour le restaurer, lorsqu’ils se lamenteront, chaque famille à part et leurs femmes à part, chaque tribu à part et leurs femmes à part, alors ils ne diront plus : Dieu s’est trompé et n’aurait pas dû nous disperser. Mais entre le moment où Dieu a frappé et celui où Il restaurera son peuple, combien de siècles se seront-ils écoulés ? Il y a déjà une vingtaine de siècles que l’histoire de Jérusalem est close. Jérusalem a été balayée de la carte du monde comme capitale, lorsqu’elle a été prise par Titus, après la mort du Seigneur. Cela a été la fin de l’histoire d’Israël. Mais cette histoire reprendra. Si nous interrogions les descendants des survivants de ces périodes remarquables, nous recevrions certainement, en majorité, des réponses qui condamneraient Dieu, et qui diraient : «Pourquoi Dieu nous a-t-Il fait ainsi ?» ; comme nous le trouvons dans Jérémie. Jérémie avait été envoyé avant que le jugement tombe, pour faire revenir le peuple de Dieu, si c’était possible. Le peuple disait, en voyant les calamités qui étaient finalement venues sur lui : Mais pourquoi Dieu nous a-t-Il fait cela ? Pourquoi ces choses sont-elles arrivées ? On trouverait sans doute, chez ceux qui retournent, en ce moment, dans le pays de la promesse, des sentiments analogues. Ils y retournent assurés qu’il n’y a pas de différend entre Dieu et eux, alors que la question reste entière : Où sont vos pères ? Vous m’avez abandonné !
Il en est souvent de même dans la vie d’un individu. On se contente d’une profession où le coeur se complaît, parce que, pendant ce temps, on oublie de régler ses propres comptes avec Dieu. Et, quand Dieu nous parle de juger la profession, Il nous parle à chacun, pour que nous réglions nos voies avec Lui en nous jugeant.
Comme quelqu’un l’a dit, un commerçant dont les affaires ne vont pas ne regarde pas volontiers ses livres de comptes. De même, un chrétien en mauvais état ne tourne pas volontiers certaines pages de sa vie. Il ne s’y arrête pas, mais les tourne très vite. Il n’en veut pas parler. Dieu dit : Nous en parlerons, une fois ou l’autre ; nous en parlerons bien un jour. Car il y a, comme disait encore quelqu’un, des échéances. Oui, il y a des échéances. Il y a eu des échéances, pour Israël. Les quatre cornes ont été suscitées, quatre empires, quatre puissances, qui ont, de la part de Dieu, pris l’autorité sur la terre à la place du peuple de Dieu. Il faut voir les Lamentations de Jérémie pour comprendre un peu combien Dieu a souffert, en supprimant Jérusalem. «Il aimait ce qu’Il a frappé, et Il a dû frapper ce qu’Il aimait».
Mais toujours, avant de frapper, Dieu avertit. Même Jérémie, qui annonce l’imminence du jugement, lance des appels au repentir. C’est en vain, et il est obligé de répéter : «Jérusalem sera prise». On le menace ; on le frappe ; on le met dans la fosse, dans la boue. Il répète : La ville sera prise. En passant, considérons quelle fidélité il y a eu, chez cet homme ! Voilà un serviteur de Dieu ! Que le Seigneur nous aide à imiter cette fidélité, malgré les influences, les dangers, le souci de nos intérêts.
Jérémie donc, s’il annonce un jugement inexorable à moins qu’on ne se repente, fait encore appel à la conscience et au coeur. Et puis, il ouvre un horizon devant la foi. Le service des prophètes, en général, est double : ils appellent pour le temps présent et, en même temps, ils annoncent l’avenir. Quand le temps présent est très sombre, parce que Dieu lui-même va entrer en scène pour frapper, alors ils annoncent l’avenir, la bénédiction future, selon le conseil de Dieu en grâce.
Après les quatre cornes, nous avons les quatre ouvriers. Les quatre ouvriers parlent du travail que Dieu fera quand Il restaurera son peuple. Cette restauration a un double caractère ici, et on peut dire que le cas est général. Il y a une restauration extérieure et une restauration intérieure.
Nous trouvons, dans les passages que nous avons devant nous, un très grand nombre de questions. Au chapitre 4, c’est un homme qui semble se réveiller de son sommeil. Il découvre des choses et, en vue de les comprendre, pose une multitude de questions. Il représente le peuple d’Israël, qui est comme tombé dans un profond et long sommeil. Et ce n’est qu’après un très long temps que les choses concernant Israël reprendront leur cours, et que se réalisera sa lente restauration. Ce peuple reprendra peu à peu conscience de ce qui le concerne devant Dieu. Il retrouvera la vie. Ézéchiel 37 dépeint les effets du travail de Dieu dans le résidu de son peuple, dans des versets d’une extraordinaire beauté, d’une force et d’une vie saisissantes ! De ces os secs et épars sur la face du sol, on voit peu à peu se lever une «immense armée».
Au chapitre 2, on voit un homme qui mesure Jérusalem avec un cordeau. Mesurer, c’est prendre possession. Dire que Dieu fera mesurer Jérusalem, c’est dire qu’Il va s’en occuper pour en prendre possession. Le travail de Dieu commence. Dieu annonce qu’Il s’occupera de Jérusalem, que la joie reviendra dans cette ville. De même, quand Dieu travaille dans le coeur d’un chrétien en mauvais état ou d’un pécheur qui ne connaît pas Dieu, son premier travail n’est pas un travail qui donne tout de suite de la joie. Mais lorsque Dieu a fini son travail, c’est la pleine joie, la vraie et profonde joie ; «et personne ne vous ôte votre joie» (Jean 16:22).
Au commencement, très souvent, le travail de Dieu dans une âme est marqué par des exercices de conscience douloureux. En Matthieu 13, l’un des quatre terrains représente un état d’âme sur lequel la Parole produit tout de suite une joie extérieure ; mais elle ne dure pas, parce qu’elle n’est pas de Dieu. La nature seulement est touchée. Cette âme n’a pas reçu la vie de Dieu. La semence est tombée en elle sans prendre racine. On voit des personnes touchées par l’Évangile, par les paroles de vérité et de grâce que la Parole apporte, et qui se réjouissent. Mais quand la tribulation ou la persécution surgissent, comme il est dit dans cette parabole, elles s’en vont.
Le travail de Dieu dans une âme est marqué par le fait que la conscience est touchée, aussi bien que le coeur. On l’a souvent dit. C’est pourquoi, d’ailleurs, quand nous voyons une âme s’intéresser aux choses de Dieu, ne l’entourons pas trop. Nous lui rendrions un mauvais service. Elle risquerait d’être touchée par des manifestations de charité, et de perdre Dieu de vue. Or, il est bien clair que nous ne remplacerons jamais Dieu auprès d’elle ! Laissons-la à Dieu. Pensons à elle en prière. Suivons-la sans le laisser trop paraître, et laissons-la avoir affaire à Dieu. Qui, hors Dieu, la connaît ? Et qui, sinon Lui-même, peut agir en elle ? De plus, qui a le droit de s’interposer entre une âme et Dieu ? C’est l’un des caractères du clergé. L’attitude convenable est souvent difficile à réaliser, pour les parents, dont le désir de voir Dieu bénir leurs enfants les pousserait, pour ainsi dire, à essayer de forcer la main de Dieu. Mais la foi et la piété seules, dans cette situation comme dans toute autre, savent, par la grâce de Dieu, comment il faut agir. Et elles sont actives aussi pour la prière et l’intercession.
Ainsi, le prophète annonce que Dieu s’occupera de son peuple, de Jérusalem. L’effet du dernier travail de Dieu pour son peuple, qu’il s’agisse d’Israël et à bien plus forte raison du peuple céleste, ou de chacun, ce qui couronne le travail de Dieu pour les siens, c’est la joie, c’est le bonheur. Il nous le donne déjà, et Il nous le donnera pour toujours. Et s’Il ne nous donne pas de le goûter chaque jour d’une manière continue, c’est de notre faute. N’accusons pas Dieu, comme nous sommes tellement portés à le faire ! Quand nous avons souillé nos vêtements — et c’est ce que nous allons trouver maintenant — quand nous avons mal marché et déshonoré Dieu, quand notre volonté s’est mise en face de celle de Dieu et que, comme nous le trouvons un peu plus loin, nous avons rendu notre coeur comme un diamant, Dieu ne peut pas nous rendre heureux. Il se doit à Lui-même, et Il nous doit à nous-mêmes, de ne pas nous rendre heureux. Nous ne pouvons pas être heureux en Lui quand nos coeurs vont boire aux coupes que ce monde offre ; ou même si, entre chrétiens, nous oublions que Dieu Lui-même est la source permanente de nos joies, et que sans Lui, nous n’avons rien.
La source de notre joie, de notre bonheur, est en Dieu. Il y a d’autres joies tout à fait légitimes que nous connaissons. Mais la source des joies chrétiennes est en Dieu. Et c’est une source inépuisable, que nous goûterions constamment, dans notre vie courante, si notre vie était toute entière pour le Seigneur, comme la robe du Seigneur — image de sa vie — était tissée d’une seule pièce, sans couture.
Quel fait immense que cette activité de Dieu en vue de rétablir son peuple à Jérusalem ! Quel fait immense ! Il bénira son peuple, et aussi toute la terre. C’est aussi un fait immense pour une âme, quand Dieu commence à s’en occuper. Il s’agit essentiellement d’un travail intérieur. Car qu’est-ce qui importe le plus, dans nos rapports individuels avec Dieu ? Est-ce simplement la correction apparente d’une marche où l’oeil humain n’a pas grand chose à redire ? Aucunement. Même une amélioration dans les voies d’un homme n’indique pas qu’il soit converti. La morale chrétienne imprègne tant d’âmes qui n’ont pas pour autant la vie divine. Le monde chrétien revient à un ancien paganisme, tout en gardant les formes chrétiennes.
La morale chrétienne a fréquemment une influence sur les moeurs, sans qu’il y ait eu pour autant conversion réelle.
Eh bien, le travail intérieur, nous le trouvons au chapitre 3. Qui voudrait ouvrir son coeur ici, tout entier ? Nous sommes tous pourtant de braves gens ! Hélas ! Un homme qui ne paraissait pourtant pas être un chrétien, disait une fois : «Je ne sais pas ce qui se passe dans le coeur d’un criminel, mais je sais ce qui se passe dans le coeur d’un honnête homme, et c’est affreux !».
Le travail intérieur, effectué dans notre coeur, c’est le travail le plus difficile ; et c’est celui que nous n’aimons pas. Nous n’aimons pas que Dieu mette le doigt sur la plaie intérieure ! Or tout est là. C’est ce que nous trouvons au chapitre 3. C’est très beau, comme tout ce que Dieu fait.
Pour découvrir le péché, Dieu est impitoyable. Mais c’est son amour qui le fait. Il ne laisse rien passer, parce qu’Il veut nous bénir complètement. Si un homme tolère quelque chose qui ne soit pas selon Dieu, il doit se dire : Voilà quelque chose que Dieu devra visiter un jour. «Ils arrivent, les jours de la visitation !» (Os. 9:7) ; c’est la parole d’un prophète.
Le chapitre 3 nous présente Joshua, le grand sacrificateur, un homme qui a une importance considérable pour le peuple. Et c’est lui qui est vu avec des vêtements sales. Pourquoi lui ? Parce qu’il représente le peuple. S’il est en mauvais état, le peuple aussi. Or, il est en mauvais état. Le voilà avec des vêtements sales. On parle de restaurer Jérusalem, mais Joshua a des vêtements sales. Comment Dieu peut-Il recevoir un homme qui a des vêtements sales ? Ces vêtements représentent la marche, qui révèle l’état intérieur : «Ils marcheront devant moi en vêtements blancs, car ils en sont dignes» (Apoc. 3:4). Joshua est là avec des vêtements sales. Et il y en a un autre qui est là : Satan, l’accusateur des saints (Apoc. 12).
Le Seigneur a une activité continuelle de Souverain Sacrificateur. Il s’occupe des saints. Il les porte sur son coeur, sur ses épaules, et s’occupe continuellement des saints. Quand ils ont manqué, Il est leur avocat auprès du Père, pour qu’ils puissent retrouver la communion avec le Père. Et, en tant que sacrificateur, Il donne à tout croyant un droit permanent d’entrer dans la présence de Dieu, et du secours ici-bas pour qu’il soit gardé, au moment opportun, afin qu’il ne pèche pas. Tandis que le diable, dans les lieux célestes (mais non pas dans la lumière inaccessible), exerce une activité anti-sacerdotale, et le fera jusqu’au moment où il sera chassé du ciel sur la terre.
Joshua a des vêtements sales. Satan est à sa droite, et ils sont devant l’Éternel. Joshua ne peut rien dire. S’il avait ouvert la bouche, Satan la lui aurait fermée. Qui parle ? Dieu. Qui peut parler ? Dieu seul ; et c’est Dieu qui parle. «Que l’Éternel, qui a choisi Jérusalem, te tance».
Voilà notre ressource en tout temps. Notre ressource, c’est la grâce de Dieu. Cette grâce a un dessein qui est de nous bénir. Lorsque Dieu va bénir un homme, Il le tient devant Lui tel qu’il est, avec des vêtements sales. Est-ce qu’il y a des vêtements sales ici ? Quelqu’un a-t-il des vêtements sales ? Un pécheur inconverti ? Ou un chrétien qui a de la souillure et des taches sur ses vêtements, des choses qui ne sont pas jugées ? Ils sont là, devant Dieu. Et le diable s’en sert pour accuser et faire tomber. Le diable s’en sert ; il accuse. Dieu ne peut pas dire qu’un vêtement sale est un vêtement blanc ; le diable le sait très bien. Chers amis, que Dieu nous accorde la grâce d’avoir devant Lui une bonne conscience, continuellement. C’est la chose la plus difficile qui soit. On passe à la légère. On a de très bons rapports avec tous les amis, avec un frère par-ci, avec une soeur par-là ; et on garde par devers soi de l’interdit avec Dieu. On ne le dit pas, même pas au meilleur de ses amis. On ne peut pas le dire ; et même, si on s’en ouvrait à eux, les amis rendraient-ils toujours le bon service, de dire : il faut avant tout régler votre état avec Dieu ?
Eh bien, Dieu dit : Ôtez les vêtements sales ; revêtez-le d’un vêtement blanc, et mettez une tiare pure sur sa tête. Dieu peut alors recevoir son peuple, et Dieu peut recevoir le pécheur restauré ; mais pas avant. Qui fait tout ? Dieu. Satan doit se taire. Et qui est-ce qui reste tranquille, comme celui à l’égard de qui Dieu fait tout ? Joshua, l’homme, le pécheur.
Quel bonheur d’avoir affaire à Dieu ! Mais quelle scène solennelle ! Oh, que Dieu nous accorde de veiller, dans le jugement continuel de nous-mêmes, afin que nous ne laissions pas s’accumuler des choses mauvaises en nous, du péché envers Dieu, des torts envers le prochain. Nous sommes frappés, en lisant l’Écriture, de voir la place que tiennent, d’après l’Écriture, les péchés envers Dieu, et ceux qui touchent le prochain. Tout cela est sérieux, mais combien précieux aussi ! Et pensons à la scène solennelle du tribunal de Christ !
Au chapitre 5, il est question d’un rouleau, d’un épha et d’une femme : la méchanceté. C’est une scène distincte, comme il y en a plusieurs dans ce livre-là. Tout d’abord, un rouleau de malédictions, un rouleau qui vole, qui proclame : tout menteur sera détruit, tout voleur sera détruit. On peut très bien appliquer cela à nos temps actuels. La Parole de Dieu a une valeur permanente. Aujourd’hui, le voleur et le menteur, très souvent, triomphent. Le royaume de ce monde, et en particulier du monde chrétien, on peut l’appeler le royaume des menteurs. Le royaume des menteurs ? Que c’est triste ! Sur tout ce monde chrétien, cette parole vole, un rouleau écrit : le voleur sera détruit d’une part, le menteur sera détruit d’autre part. Voilà ce qui est écrit. C’est la malédiction qui sort. Dieu ne ferme jamais les yeux. Ses yeux voient, est-il dit (Psaume 11:4), ses paupières sondent les fils des hommes. Et encore : «Les yeux de l’Éternel parcourent la terre». L’Écriture parle d’yeux à l’extérieur et à l’intérieur, car Dieu a la connaissance extérieure des choses, et aussi la connaissance intérieure de tout. Dieu a, de toutes choses, la connaissance directe et totale.
Oh, chers amis, quel bonheur d’avoir Dieu comme refuge de notre coeur ! Si notre coeur n’a rien à cacher à Dieu, nous sommes très heureux d’avoir affaire à Lui. Mais s’il a quelque chose à cacher à Dieu, il n’y a de refuge nulle part, ni sur la terre, ni au ciel.
La malédiction sort. Elle est prononcée sur cette terre chrétienne. Ce langage n’est pas trop fort ; car nous lisons, en Romains 1, que «la colère de Dieu est révélée du ciel». Nous parlons de l’évangile de la grâce de Dieu. Cet évangile dit aussi : «La colère de Dieu est révélée du ciel». C’est un glaive suspendu sur le monde entier : tout voleur sera détruit et tout menteur sera détruit. Quelle scène, quand Dieu commencera à juger. Nous ne pouvons pas du tout avoir l’idée de ce que se sera !
Chapitre 5, verset 4 : Le menteur jure faussement par son nom. Il invoque le nom de Dieu, du Seigneur, pour mentir. Quel endurcissement ! Prenons garde ! Ensuite verset 6, c’est l’épha qui sort… «Et il y avait là une femme assise au milieu de l’épha. Et il dit : c’est la méchanceté. Et il la jeta au milieu de l’épha, et il jeta le poids de plomb sur l’ouverture. Et je levai mes yeux, et je vis ; et voici, deux femmes sortirent, et le vent était dans leurs ailes, et elles avaient des ailes comme des ailes de cigogne, et elles soulevèrent l’épha entre la terre et les cieux. Et je dis à l’ange qui parlait avec moi : Où celles-ci emportent-elles l’épha ? Et il me dit : Pour lui bâtir une maison dans le pays de Shinhar ; et là elle sera fixée et posée sur sa base». Qu’est-ce que cela veut dire ? L’épha, c’est la plus grande mesure de capacité. Où la méchanceté avait-elle atteint sa plus grande mesure ? En Israël. Le peuple qui s’appelait du nom de Dieu était le plus méchant qui fût. Et pourquoi cet épha est-il emporté par deux femmes qui avaient comme des ailes de cigogne, cet animal qui retourne toujours à son lieu ? C’est que la méchanceté est emportée à son lieu d’origine, Babylone, Babel. C’est l’origine du mal qui était dans le peuple d’Israël ; de même que Babylone, moralement parlant, est l’origine du mal qui est dans la chrétienté. Dieu nous montre la source. Le mal a sa source dans l’homme déchu. Babel, c’est la première puissance royale après le déluge. Eh bien, le mal qui avait sa source dans un pays étranger à Dieu est venu élire domicile dans le peuple de Dieu, à Jérusalem. C’est encore vrai. Est-ce trop sévère de dire que la chrétienté est devenue cette demeure du mal ? Pas du tout. Il faut lire ce que l’Apocalypse nous dit de Babylone, sur le front de laquelle est écrit le nom : «Mystère, Babylone la grande». Jean n’arrivait pas à comprendre qu’une telle méchanceté se trouvât parmi ce qui prétendait être l’Église.
Avons-nous à coeur que la méchanceté ne se trouve pas parmi le peuple de Dieu ? L’Assemblée est la colonne et le soutien de la vérité. Avons-nous à coeur cela, chers amis ? Quand le mal n’y est pas jugé, notre coeur devient comme une pleine mesure de méchanceté. Que de maux à juger ! Puissions-nous rechercher cette vérité qui doit caractériser l’Assemblée, et rejeter le mensonge, la méchanceté, la malice («quant à la malice, soyez de petits enfants» — 1 Cor. 14:20). «Célébrons la fête, non avec du vieux levain, ni avec un levain de malice et de méchanceté, mais avec des pains sans levain de sincérité et de vérité» (1 Cor. 5:8). Nous ne serons heureux qu’à cette condition-là.
Nous avons lu aussi qu’à la fin, le peuple, au lieu d’accuser Dieu, se frappera la poitrine, confessera sa coulpe, et dira : Nous avons péché. Chacun sentira et confessera ses manquements.
Nous terminerons sur un des beaux versets que nous avons lus : «Aimez donc la vérité et la paix» (chapitre 8:19). Nous voulons souvent la paix sans la vérité. Il y a ici la vérité et la paix. La paix sans la vérité, c’est la paix du diable. La paix avec la vérité, c’est la paix de Dieu. Que Dieu nous la donne dans notre coeur, dans nos familles, dans l’Assemblée.
[LC n° 37]
Dimanche 2 mai 1948
Dans la fin du chap. 4, nous avons d’abord un résumé de tout le ministère du Seigneur, de tout ce que le Seigneur a fait. Son ministère s’est déroulé en grande partie en Galilée. Le Seigneur ne s’est pas reposé ; il n’a point eu de repos. Il a trouvé le monde dans un tel état, qu’il ne pouvait pas se reposer. La foi ne peut pas se reposer, ici-bas ; ce n’est pas possible. Seul le chrétien qui veut suivre le monde arrive à se reposer. Il se laisse emporter au fil de l’eau ; et alors il se dit : «Oh, après tout, je vais au ciel, je serai avec le Seigneur ; ce n’est pas utile ni nécessaire que je me donne de la peine et que je me fasse du souci». Chers amis, ce chrétien renie son maître.
On a remarqué bien des fois qu’un des caractères les plus profonds et les plus remarquables de la vie de Jésus, c’est qu’il n’a jamais rien fait pour lui-même. Nous, nous faisons beaucoup de choses pour nous, beaucoup. Mais Jésus n’a rien fait pour lui. C’est peut-être le trait le plus frappant de sa vie. Il est venu, et il a vu le monde. De même, nous aussi le voyons, et nous en souffrons. La foi en souffre. Elle ne peut pas ne pas souffrir. Elle souffre de voir que le mal est partout, que tout contriste le Saint Esprit, que le nom du Seigneur est blasphémé, que nous-mêmes ne sommes pas fidèles, parce que nous voudrions toujours être en communion avec le Père et avec le Fils, et que toutes sortes de choses, indépendantes ou dépendantes de nous-mêmes, nous en empêchent. Dans sa vie, le Seigneur a réalisé ceci : ne pas perdre un seul moment la communion avec son Père, et ne pas se reposer un seul moment. Il ne s’est pas reposé un seul instant, et il n’a pas perdu un seul instant la communion avec son Père. La vie de Jésus est notre modèle.
À la fin du chap. 4, il va d’un village à l’autre. Qu’est-ce qu’il rencontre ? Des paralytiques, des démoniaques, ou des gens dans un triste état : vous, moi. Il n’est pas besoin d’être paralytique, ou d’être affligé d’une grave infirmité, pour dire : Je suis dans un triste état, par nature. Si je me regarde un peu à la lumière de la Parole, je dis : Ce n’est pas brillant ; ce n’est pas beau. Voilà ce que Jésus a vu. Il allait au milieu des hommes et lisait dans les coeurs. Nous, nous voyons seulement une action lorsqu’elle s’accomplit. Lui voyait l’origine du moindre geste, de sorte que toutes les mauvaises pensées des hommes étaient sans cesse devant lui, et qu’il a traversé le monde avec ce spectacle continuel devant lui. Personne ne peut imaginer ce que Jésus a souffert (sinon le Père). Nous désirons d’être avec le Seigneur pour repasser un peu son propre chemin et comprendre quelle a été sa patience, sa grâce.
Des foules le suivaient ; mais il ne s’appuyait pas sur les foules. Si elles étaient contentes de se faire guérir, elles devaient dire bientôt : «Ôte, ôte ! crucifie-le» (Jean 19:15). Le Seigneur leur adresse le sermon sur la montagne, résumé en Matthieu en un seul discours, dispersé dans les autres évangiles.
On aurait pu penser que, si Dieu venait dans ce monde, il allait y arriver les mains pleines, et établir immédiatement un état de choses glorieux et heureux. Quand Dieu vient dans ce monde, il y vient pour souffrir. Et, au lieu d’établir un règne ouvert à tout le monde, il dit : «Entrez par la porte étroite… car étroite est la porte, et resserré le chemin qui mène à la vie, et peu nombreux sont ceux qui le trouvent» (7:13-14).
Tout d’abord, dans ce chap. 5, nous trouvons les béatitudes (du mot «bienheureux»). Or, quel signe caractérise tous ces bienheureux et les marque, avant cette joie qui leur est promise ? C’est la souffrance dans ce monde : «Bienheureux ceux qui mènent deuil». Est-ce que nous menons deuil ? Est-ce que nous sommes de ceux qui mènent deuil ? Quand un deuil a frappé une famille, eh bien, tous les membres en sont touchés. Ils ne sont plus les mêmes. Ils portent même un signe extérieur sur eux, par lequel ils rappellent aux autres qu’une brèche a été faite, que leur coeur a été traversé, que leurs affections profondes ont été touchées. On marque cela. Eh bien, le chrétien est un homme qui mène deuil. La terre est pour lui le tombeau de Jésus. «Bienheureux ceux qui mènent deuil, car ils seront consolés». Nous menons deuil aujourd’hui ; nous serons consolés demain. Si nous menons deuil aujourd’hui, nous aurons aujourd’hui une consolation, mais demain nous serons consolés en gloire. Aujourd’hui, nous sommes consolés dans les larmes, en restant dans l’épreuve ; et c’est une leçon assez difficile à apprendre.
Chacun de nous a tendance à dire : Seigneur, change mes circonstances et je serai content. Le Seigneur dit : Non, je ne changerai pas tes circonstances, et je te rendrai content quand même. Le Seigneur changera nos circonstances quand il nous introduira dans sa gloire. Le Seigneur nous console dans notre affliction, au milieu même de notre affliction. Mais notre premier mouvement, c’est de dire : «Seigneur, enlève un peu ce poids que j’ai, cette épreuve ou tel ou tel exercice dans mes circonstances ou dans l’assemblée» ! Le Seigneur répond : «Non, mais je vais te donner ma force en te laissant dans cette difficulté». «Bienheureux ceux qui mènent deuil, car ils seront consolés».
Plusieurs des caractères qui sont donnés là nous font penser au Seigneur lui-même. Dans ce monde, il devrait être visible que le chrétien, lui non plus, n’est pas chez lui, mais se trouve dans un pays étranger.
Dans la rue, quand on rencontre les gens, il ne faut pas croire que tous les gens sont malheureux. Lorsqu’on prêche l’évangile, on a l’air de supposer, parfois, que les gens sont malheureux. Beaucoup, au contraire, sont très heureux. Il y a les délices du péché, dont parle la Parole de Dieu. Ceux-là disent des chrétiens : «Voilà des gens qui toujours se tiennent à l’écart, ont toujours peur de faire leur volonté. Moi, je fais ce que je veux». C’est un plaisir de faire ce qu’on veut, un très grand plaisir. Et c’est une grande peine, de ne pas faire ce qu’on veut. La chair, en effet, souffre toujours, quand il s’agit d’obéir. Mais «bienheureux ceux qui mènent deuil, car ils seront consolés». Que le Seigneur nous donne de trouver des consolations au sein de nos peines, de nos travaux, de nos exercices. Nous devons bien comprendre que les circonstances ne sont jamais idéales, ici-bas.
Les pauvres en esprit sont ceux qui sont humbles, qui ont rencontré Dieu, qui se tiennent devant Lui. On a dit beaucoup de choses sur cette expression, et on en a beaucoup déformé le sens, dans le monde. On s’en est beaucoup moqué (de quelle parole, d’ailleurs, ne s’est-on pas moqué ?). La littérature même s’est emparée d’expressions telles que celle-là. La dureté du coeur de l’homme et son orgueil ne reculent pas devant le fait de porter la main sur la Parole de Dieu. Mais cette parole même se retournera contre eux : «Bienheureux les pauvres en esprit». Vous rencontrez des gens qui sont très fiers d’être instruits, ou intelligents, ou très énergiques, et qui sont très sûrs d’eux-mêmes. Le monde est rempli de cet état d’esprit. «Bienheureux les pauvres en esprit». Que le Seigneur nous donne de réaliser qu’à eux est le royaume de Dieu, à ceux pour qui Dieu est tout. C’est un fait. Dieu est tout, et il le montrera. Nous avons donc, dans notre vie, à lui faire cette place, à laisser Dieu être tout. Et c’est dans la mesure où nous le faisons que nous sommes heureux et que nous avons sa force. «Bienheureux les pauvres en esprit». Ce n’est pas toujours agréable d’entendre des gens qui se vantent sans raison parce qu’ils sont puissants ou qu’ils ont toutes sortes de moyens à leur disposition. Ce n’est pas toujours agréable de supporter sans rien dire, et de rejeter l’état d’esprit qui les caractérise. Voilà encore un sujet de souffrance, pour le temps présent.
Le chrétien qui se met à l’unisson avec le monde perd ses caractères. Lui ne souffre plus. Il y a des chrétiens qui, lassés de souffrir, prennent le ton du monde. Mais ils ne réalisent plus les joies que Dieu donne. Ils en ont d’autres. «Bienheureux…», dit le Seigneur.
Que chacun de nous veille à ne pas se lasser de connaître uniquement les joies que Dieu donne, et à ne pas boire à d’autres coupes qu’à la coupe que le Seigneur lui réserve dans le chemin. «La portion de mon héritage et de ma coupe», dit le Ps. 16:5. L’héritage, c’est la part éternelle. La coupe, c’est la part distribuée le long du pèlerinage, dans le chemin. Est-ce que Dieu est la source de nos joies, chers amis ? Est-ce que, dans la semaine qui vient de s’écouler, nous avons cherché en Dieu, et en Dieu seulement, la source de nos joies ? «Bienheureux les pauvres en esprit».
Quand nous pensons à notre Seigneur Jésus Christ, sa viande était de faire la volonté de son Père qui était dans les cieux. Et l’extrême opposé de Jésus sera l’antichrist, qui ne fera que sa volonté à lui. Il sera l’image parfaite de l’homme absolument indépendant, le contraire des pauvres en esprit, le contraire de celui qui mène deuil. Le Seigneur est le modèle pour la foi.
Je dirais un mot sur la fin du paragraphe. D’abord de ceux qui sont purs de coeur ; ce sont ceux qui n’ont que Dieu pour objet. Nous avons besoin de faire très attention. On peut commencer pur de coeur, et continuer avec un coeur qui n’est plus pur. On peut avoir soi comme objet, ou beaucoup d’autres choses.
Heureux ceux qui ont le coeur pur. Ce n’est pas facile. Et les chrétiens, ici, qui sont les plus âgés savent quels exercices il faut, pour garder un coeur pur. On disait une fois, en parlant de Paul qui gardait un coeur pur : Mais c’est un vieillard ! Mais Paul aimait ce que tout le monde aime par nature. Et ce n’est pas extraordinaire, que quelqu’un aime les choses du monde. Tout le monde aime les choses du monde. Il n’y a pas un homme qui arrive au monde et qui n’aime pas le monde. Son coeur est fait pour le monde, et le monde est fait pour lui.
«Bienheureux ceux qui sont purs de coeur». Chers amis, il faut être exercés pour être purs de coeurs. Il faut prier. Il ne faut pas que notre enseignement, notre christianisme, soient artificiels, que l’enseignement soit de l’air et ne porte pas. Jésus n’a pas dit cela pour que nous retenions des mots. Le Seigneur est mort pour mettre le sceau sur les propres paroles de Dieu. Il a scellé de son propre sang, pour ainsi dire, les vérités divines. Il est sérieux que ce soit le Seigneur qui ait parlé, comme dans toute la Parole de Dieu. Chers amis, nous pouvons poser la question : Dans la semaine passée, est-ce que tout le monde s’est mis à genoux ? Les chrétiens, frères et soeurs, ont-ils su se mettre à genoux pour demander au Seigneur que leur coeur soit gardé pur ? On n’a pas un brevet pour toute la vie, dans le fait d’être converti. La conversion est une chose ; mais il s’agit d’une autre, dans ce verset : «Bienheureux ceux qui ont le coeur pur». Sans doute, il faut d’abord avoir la vie de Dieu. Mais il faut aussi la réalisation pratique de cette pureté du coeur, qui n’a qu’un objet. Qu’est ce qu’il y a dans votre coeur, chers amis ? Ah, si on nous pose la question, nous nous détournons. Ah, le glaive, le fil du glaive de la Parole de Dieu, l’épée aiguë à deux tranchants qui sépare entre les jointures et les moelles, et qui vient me dire : «Tes meilleurs sentiments sont un péché pour Dieu, et ce qu’il y a pour Dieu en toi, ce n’est que ce que Dieu y a mis» ! Le fil de ce glaive, nous voulons tous le détourner ! Quand l’oeil scrutateur de Dieu veut plonger dans notre coeur et nous dit : «M’aimes-tu ? Est-ce que c’est moi que tu aimes ?», nous nous cachons. On peut se cacher aux frères, aux soeurs, mais pas à Dieu.
Nous devrions avoir ce souci, chers amis, d’avoir le coeur dans la présence constante de Dieu, un coeur pour Christ. Que voulez-vous que le Seigneur pense si vous dites : «Seigneur, je t’aime», et que vous aimiez autre chose ?
Ce discours a une portée générale, morale et spirituelle. Mais je me borne à quelques pensées générales, sans envisager le côté dispensationnel. «Bienheureux ceux qui sont purs de coeur» : il nous faut veiller sur notre coeur. Plus loin, nous avons lu : «La lampe du corps, c’est ton oeil». Ton oeil est simple ou ton oeil est méchant. «Si ton oeil est simple, ton corps tout entier sera plein de lumière». Combien il est indispensable que les parents prient pour leurs enfants, pour qu’ils soient convertis et aussi éclairés ! Quelqu’un peut être très consciencieux, et marcher à l’opposé du chemin de Dieu. Bien des gens ont une conscience naturelle en éveil, et restent incrédules. Ils sont très consciencieux et très sérieux, lorsqu’ils font des choses opposées à Dieu. Il ne suffit pas d’être très consciencieux naturellement. Il faut que la conscience soit éclairée. La lampe, c’est l’oeil. Qu’est-ce que je regarde, quel est l’objet que je regarde ? «Si ton oeil est méchant…» : le christianisme pratique trouve là sa pierre de touche, chers amis. C’est très facile, le christianisme théorique. Il y a des millions de chrétiens théoriques, qui n’ont même pas la vie. «Ce ne sont pas ceux qui me diront Seigneur, Seigneur…» (7:21). Judas a fait des miracles, et combien d’autres depuis. «Vous les reconnaîtrez à leur fruit» (7:16). Nous l’avons dit plusieurs fois, le Seigneur nous l’a précisé d’une façon extraordinaire : «Ce n’est pas celui qui dit…».
Je prie encore, et je supplie les frères, de s’arrêter devant les déclarations de Dieu : «Celui qui dit…». Il peut dire et être un menteur. Mais, est-il écrit : «Moi, je sonde les coeurs et les reins».
Nous trouvons ensuite : «Ne jugez pas afin que vous ne soyez pas jugés». On a prétendu que cette parole interdit l’examen d’une situation par les chrétiens. Elle ne dit pas cela. Nous trouvons ailleurs cette parole : «Vous, ne jugez-vous pas ceux qui sont de dedans ?» (1 Cor. 5:12). Nous n’avons pas le droit de juger les motifs de quelqu’un, parce que c’est l’affaire de Dieu. En le faisant, nous prendrions la place de Dieu. Mais nous sommes tous responsables vis-à-vis du Seigneur, et les frères doivent le réaliser, de tout ce qui se voit et de tout ce qui s’entend. Ils ont plus que le droit de juger, dans ce sens-là ; ils en ont le devoir. Un chrétien qui est dehors, marchant avec n’importe quel milieu, il ne nous appartient pas de rien lui dire. Mais quelqu’un qui est dedans, vous, ne le jugez-vous pas ? J’ai donc à me garder d’imputer tel ou tel motif à quelqu’un. Je dis : «Seigneur, tu sais tout ; cette situation ne me paraît pas claire ; quant aux motifs, tu les connais ; mais j’ai le devoir de juger ce qui est dedans quant aux faits». Tout chrétien en a le devoir ; et il en a la capacité, suivant sa spiritualité. C’est de toute importance.
Le Seigneur est fidèle. Il nous montre notre tendance à être des chrétiens théoriques, très contents d’eux-mêmes. S’il s’agit de la connaissance, tout va très bien. Mais le Seigneur nous met à l’épreuve : Tu as bonne opinion de toi ; nous allons nous rencontrer un peu, tous les deux. Et il nous fait passer à l’épreuve. Une épreuve ne suffit pas ; il en envoie tout le long de la vie, beaucoup. Il est fidèle ; il nous aime.
Et que va-t-il dire à ses pauvres disciples ? On pourrait dire : Comment notre Seigneur Jésus Christ a-t-il pu entraîner à sa suite de pauvres gens pour leur dire : «Lâchez tout ce que vous avez ; vous aviez une vie quiète, tranquille, vous étiez comme tout le monde, suivez-moi. En attendant, faites comme moi, portez votre croix. Voilà la croix» ? Il nous dit la même chose, aujourd’hui. Ah, nous la posons bien souvent, la croix, plus d’une fois par semaine ! Et, pendant que nous la posons, nous ne suivons plus Jésus.
Quel bonheur d’avoir le Seigneur. En voilà un qui ne nous a pas trompés, qui nous a appelés et ne nous a pas trompés. Certes, il ne nous ménage pas. Il n’appelle pas bien ce qui est mal, ni esprit ce qui est la chair, jamais. Mais, quand nous sommes dans la détresse et que nous disons : «Seigneur, mais comment pourrai-je sortir de là ?», sa main se tend et nous soulève. Il en vaut la peine, le christianisme vécu avec le Seigneur. Que de fois les saints en ont fait l’expérience.
Est-ce que nous reculons devant cela ? À l’avance, on dit : Ce n’est pas possible ; tout va être contre moi. Le Seigneur nous dit : Tout a été contre moi ; je sais ce que c’est que d’avoir tout le monde contre soi. Notre Seigneur Jésus Christ a eu tous les hommes contre lui, à part quelques fidèles (est-ce que nous serons comme ces fidèles qui le suivaient ?). Et puis, ayant été abandonné, honni, méprisé, bafoué de tous, il a été frappé par Dieu à cause de nos péchés, de la sixième heure à la neuvième heure. Voilà notre Seigneur, celui que Dieu nous a donné, notre modèle. Vous cherchez un grand homme dans ce monde pour le suivre ? Vous en cherchez encore un ? Vous croyez encore à ce mensonge du diable ? Voilà notre vie, notre modèle. C’est Jésus, et Jésus rejeté de la terre, le délaissé, le méprisé des hommes, l’homme aimé de Dieu et de la foi.
«Vous êtes bienheureux quand on vous injuriera». Il y a encore les souffrances pour la justice (5:10-11). On peut souffrir parce qu’on fait ce qui est juste. Un chrétien doit faire ce qui est juste aux yeux des hommes. Mais, de ce fait, souvent les hommes vous en veulent ; et cela arrive parfois même entre chrétiens. Il arrive qu’en désirant faire ou dire ce qui est juste, on se heurte à des chrétiens qui vous en voudront. Cela arrive souvent ; mais c’est la souffrance pour la justice.
Il y a quelque chose de meilleure encore : «Réjouissez-vous lorsqu’on dira du mal de vous en mentant à cause de moi». C’est souffrir pour Christ. C’est non seulement souffrir pour faire ce qui est bien, même aux yeux des hommes ; mais c’est souffrir pour Christ, par affection pour Christ. Dans le résidu juif, auquel ce discours s’adresse en partie, dans un sens, il y aura des croyants qui seront mis à mort, sous le règne de la bête, dans la dernière demi-semaine. Eh bien, ce verset est pour eux, comme pour tous ceux qui auront été mis à mort pour Christ, ceux qui ont été mis à mort dans les siècles passés, ceux de qui on a dit toute sorte de mal. Et nous, quand on dit du mal de nous en mentant à cause de Christ, est-ce que nous nous réjouissons ? Est-ce que nous savons nous réjouir ? Nous devrions dire : Seigneur, je te rends grâce de ce que tu me donnes cette portion. Le Seigneur, chers amis, a connu toutes les joies et toutes les souffrances, sauf celles que nous connaissons, nous, à cause de nos infidélités.
Il nous faut maintenant penser un peu à cette expression : «être le sel de la terre». Le sel a de la saveur. Il garde de la corruption. Mais si le sel a perdu sa saveur, il n’est bon à rien. Quand perd-il sa saveur ? On n’est pas devant un chrétien comme devant un homme du monde. Il y a de la crainte, devant un chrétien fidèle, même dans le monde. Et, dans ce sens-là, les chrétiens préservent de la corruption, incontestablement. Un chrétien fidèle est craint ; l’expérience de tous les jours le montre. Mais si ce chrétien perd cette autorité morale, que seule peut donner la présence de Dieu (on peut chercher à l’imiter, mais rien d’autre ne la donne), qui fait ressortir que l’homme craint Dieu même s’il le hait, il n’est plus bon à rien. Sommes-nous très pressés d’être semblables au monde ?
Aujourd’hui, il faut répéter ces vérités, dans les assemblées. Et on peut supplier que ceux mêmes qui prêchent l’évangile ne s’arrêtent pas à ce seul service, mais rappellent aussi aux jeunes chrétiens que Christ n’est pas seulement le Sauveur, mais aussi la vie des chrétiens, le modèle des chrétiens. Christ n’est pas seulement pour mourir, mais aussi pour vivre ici-bas. Si Christ n’est pas pour vivre ici-bas, vous ne vivrez pas en chrétien, dans ce monde ; il y a trop d’obstacles. Pour vivre en chrétien dans ce monde, il faut que Christ soit la vie de l’âme. C’est à cause d’une lacune de cet ordre qu’on a pu voir de jeunes convertis, mal enseignés sur ce point, mal nourris, se replonger dans le monde et sombrer dans le monde. C’est triste. Ce n’est pas du tout ce que le Seigneur veut, car il est venu pour rassembler en un les enfants de Dieu dispersés.
«Vous êtes, est-il dit encore, la lumière du monde». Où faut-il aller chercher la lumière ? Auprès des conducteurs, des grands chefs des hommes ? Nous les reconnaissons comme des autorités que Dieu a établies, et Dieu lui-même les appelle des dieux, dans l’Ancien Testament, car ils sont des juges qui représentent Dieu. Mais aucun ne le représente, en fait. C’est pourquoi Dieu dit, dans un Psaume : «Dieu juge au milieu des juges» (82:1), parce qu’ils n’ont pas représenté Dieu comme ils auraient dû faire. Il y a beaucoup de lumières, pour le monde, des hommes qui émergent l’un après l’autre, et que Dieu a placés dans le monde. Mais, à côté de tout ce que les prophètes appellent étoiles par exemple, ou même soleil, à côté des autorités humaines, Dieu a placé une lumière à lui. Et cette lumière à lui, ce sont les chrétiens. Dieu a une lumière. Quand Jésus était ici-bas, il était la lumière du monde. Il ne l’est plus, mais il reste la lumière des croyants. Qui est maintenant la lumière du monde ? Les croyants. Est-ce que nous y pensons un peu ?
Quand quelqu’un est angoissé, perplexe sur telle ou telle question touchant le péché, la mort, le jugement, le bien ou le mal, est-ce que les chrétiens sont là comme des lumières fixes auxquelles ces hommes peuvent s’adresser ? «Vous êtes la lumière du monde».
Je m’arrête en terminant sur la conclusion que le Seigneur donne, bien qu’il y ait beaucoup d’autres choses dans ces versets. Dans la conclusion, il nous dit d’abord : «Beaucoup se glisseront parmi vous en vêtements de brebis». C’est le Seigneur qui le dit. «Vous les reconnaîtrez à leurs fruits». C’est triste, cela, chers amis. On aimerait toujours avoir un coeur ouvert a priori, prêt à accepter a priori tout ce qui se dit, tout ce qui se fait. Mais le Seigneur dit : Voilà, il y en a qui se glisseront parmi vous en vêtements de brebis ; vous les reconnaîtrez à leurs fruits… Ce sont, soit de faux chrétiens, soit de faux apôtres. Ce ne sont pas les douces paroles qui témoignent le plus de la vérité intérieure et de l’amour vrai ; mais c’est très souvent le contraire. Lisez, dans l’Ancien Testament, le Psaume 55, qui parle de l’antichist. C’est un des passages peut-être les plus forts de toute l’Écriture, pour montrer cette attitude de quelqu’un qui est faux et qui se présente sous de beaux dehors. C’est, je crois, l’un des passages les plus forts de l’Écriture : «Ses paroles étaient lisses comme le beurre, mais la guerre était dans son coeur ; ses paroles étaient douces comme l’huile, mais elles sont des épées nues». Plusieurs passages analogues se trouvent dans les Psaumes et dans le Nouveau Testament, où nous avons aussi que plusieurs se glissent sous de beaux dehors. La vérité de Dieu se présente ainsi, avec la grâce de Dieu certes, mais avec toute la force de la vérité de Dieu. Le Seigneur Jésus venait, avec cette droiture dans tout ce qu’il disait, dans tout ce qu’il faisait. Cette clarté, mettant toujours en lumière la vérité, était jointe à la grâce d’une façon divine et parfaite.
«Vous les reconnaîtrez à leurs fruits». Nous pouvons avoir une hésitation à leur sujet, avant qu’ils n’aient porté des fruits. Il faut attendre qu’il y ait des fruits. Que de fois on n’a pas su laisser passer quelques saisons, attendre une saison où un homme porte des fruits. Pas de fruits ; ce n’est pas la saison. Attendons les fruits. Que le Seigneur nous donne de retenir toutes ces choses. C’est lui qui le dit. Et il dit, à la fin : Quant à celui qui entend et ne met pas en pratique, tout ce qu’il aura entendu ne sera d’aucun profit pour lui.
Il ne suffit pas d’entendre. Il faut mettre en pratique, ce qui revient à dire qu’il faut saisir par la foi, comme une vérité vivante, les paroles de notre Seigneur Jésus Christ.
Que notre coeur s’appuie sur Lui, et sur Lui seul.
[LC n° 38]
3 février 1957
Chacun a remarqué que l’évangile de Luc, tout en suivant le plan général des deux premiers évangiles, en diffère sensiblement. Par exemple, la partie centrale (et essentiellement morale) de Luc, les paraboles (dont la plus connue est celle du fils prodigue), ne se trouve pas ailleurs. Il y a d’autres choses qui ne se trouvent que dans Luc. Le Saint Esprit nous présente, dans Luc, les faits moraux, et la bénédiction morale présente apportée par le Seigneur, avec des révélations morales projetant une vive lumière sur l’état de l’homme. C’est dans Luc seulement qu’on trouve, après la parabole des outres et du vin nouveau, une remarque finale, trait vif de lumière morale révélatrice de l’état du coeur de l’homme : «il n’y a personne qui ait bu du vieux, qui veuille aussitôt du nouveau ; car il dit : Le vieux est meilleur» (Luc 5:39). Ce trait nous dépeint l’inéluctable tendance du coeur de l’homme à préférer ses propres pensées, à se préférer lui-même, à ce que Dieu lui apporte d’entièrement nouveau, d’essentiellement différent. Cette déclaration du Saint Esprit est applicable à des positions religieuses. Mais, dans Luc, nous trouvons surtout le côté moral des faits (bien que tout se tienne).
Nous savons, hélas, par notre propre expérience, avec quelle ténacité notre coeur naturel se tourne vers ce qu’il a toujours aimé, et se détourne de ce qu’il a toujours, également, invariablement haï ! Ce que notre coeur naturel a toujours aimé, c’est lui-même ; et ce qu’il a toujours haï, c’est Dieu. Ces traits brillants de lumière morale que nous trouvons dans Luc donnent à la vérité éternelle des expressions beaucoup plus fortes, beaucoup plus puissantes que tous les développements qu’on pourrait imaginer. Nous trouvons aussi, dans Luc, ce récit merveilleux, tant de fois lu et tant de fois médité, de cette pauvre femme du chapitre 7, qui dépeint exactement la façon dont une âme, sous l’effet du travail divin, arrive à la connaissance du Seigneur. Cette scène, qui fait ressortir la confession muette mais combien touchante de cette femme, nous donne par là une instruction profonde quant aux indices sûrs du travail de Dieu dans une âme qui a trouvé le Seigneur Jésus.
Chacun, d’ailleurs, peut trouver du profit à rechercher, dans la lecture de l’évangile de Luc, ce qui le distingue des autres évangiles, en particulier dans la scène de la croix. Il en est parlé dans Luc avec des détails qu’on ne trouve dans aucun des trois autres évangiles. Seul Luc rapporte un fait d’une immense importance, en nous parlant des deux hommes qui ont été les compagnons de Jésus quand le Seigneur connaissait l’opprobre et l’outrage, dans ce spectacle qui s’offrait à tout l’univers, à tous les hommes, au cours des siècles — et, ne l’oublions pas non plus, aux anges.
Partout où il a passé, notre Seigneur Jésus Christ a manifesté ce qu’on ne trouve et qu’on ne peut trouver qu’en lui. À chacun des pas qu’il fait, nous voyons toujours jaillir des rayons de grâce et de lumière, qui montrent que celui qui passe, là où il passe, est toujours supérieur à tout ce qu’il rencontre.
La croix a abaissé Jésus comme rien d’autre ne pouvait l’abaisser. Il a accepté cet abaissement. Il a accepté la honte sans nom d’être présenté comme il l’a été sur la croix, d’être présenté comme le dernier, à la dernière place. Du point de vue de l’homme, c’était la dernière place. Il l’a prise. Il savait ce que c’était que de prendre la dernière place. Il n’a disputé la place à personne, et personne ne pouvait lui disputer la sienne ; car les hommes ne se précipitent pas vers la seule place qui soit toujours vide, la dernière.
Notre Seigneur Jésus Christ est le même partout où il passe, que ce soit dans la crèche, que ce soit dans sa vie d’homme obscur — car il a été cela, un homme ignoré, un homme obscur (nous pouvons nous demander où était sa demeure), un homme inconnu, un homme dont le secret de la vie était connu de lui seul, et qui trouvait à faire la volonté de Dieu des délices ininterrompues — où qu’il soit. Et il est le seul merveilleux, le seul qui puisse éblouir les yeux de la foi.
Arrêtons-nous sur cette scène de la croix qui est placée devant nous. Nous avons tous fait tout notre possible pour que Jésus soit accablé par une honte telle qu’il refuse de l’accepter, tous fait notre possible pour qu’il refuse d’accepter la croix. On a fait tout ce qu’on a pu pour cela. Et nous sommes tous coupables de cette réjection de Christ, tous. C’était une épreuve à laquelle il était soumis, que d’avoir à rencontrer la honte, la honte publique, la honte qu’il était obligé de confesser, mais à laquelle le coup le plus dur allait se rajouter, celui dont Dieu lui-même devait le frapper. Combien il est nécessaire que, dans toutes nos réunions, et nos méditations aussi, nous ne perdions pas de vue ce fait essentiel : la mort de Jésus sur la croix, et les conditions dans lesquelles cette mort s’est réalisée.
Nous sommes tous très fiers, très vaniteux, très susceptibles, quand il s’agit de notre réputation. Et combien d’hommes, par souci pour leur réputation, iront en enfer ! Ils auront préféré leur réputation à l’approbation de Dieu. Il n’y a rien sur quoi l’homme soit plus difficile que sur sa réputation. «C’est pourquoi mon peuple se tourne de ce côté-là, et on lui verse l’eau à pleins bords», dit le psaume 73 (v. 10), psaume prophétique et historique en même temps, qui montre que ceux qui flattent la réputation du peuple de Dieu (ou de tout homme) ont facilement l’oreille et le coeur de ceux qu’ils flattent.
Ah, la flatterie, comme nous l’aimons ! Nous l’aimons tellement que, lorsque personne ne nous flatte, nous nous flattons nous-mêmes, dans le temple secret de nos coeurs. Cela n’est-il pas vrai, chers amis ? Il y a là une emprise indéfinissable du mal sur le coeur naturel, et à laquelle chacun est sensible. D’ailleurs, la société humaine, la société en chute, est fondée sur cela.
Chers amis, frères et soeurs, chers rachetés du Seigneur, que Dieu nous soit en aide, pour détruire dans nos propres coeurs ce mal intérieur qui nous égare et nous emporte loin de Dieu. Mais nous qui connaissons le Seigneur Jésus, dont nous pouvons dire qu’il est notre Sauveur et notre libérateur — Sauveur dans le sens de libérateur, de substitut, car il a porté nos péchés en son corps sur le bois, mais aussi dans le sens de libérateur, de rédempteur qui délivre — sachons que la première de toutes les puissances dont nous avons à être délivrés, c’est celle-là : l’emprise sur nous-mêmes de notre propre moi.
Quelle merveille que la croix par laquelle vient cette délivrance ! Aussi ne demandons pas la réalisation de la délivrance de soi-même à un inconverti, et ne la demandons guère à un jeune chrétien. Mais nous, qui avons des années de vie chrétienne, ne l’avons-nous pas un peu apprise ? Autrement, c’est bien dommage et bien triste.
Il n’y a rien de plus subtil que le moi, chers amis. Mais ne jetons la pierre à personne, car c’est un mal universel, et qui fait que, lorsqu’on ne veille pas, lorsqu’on ne jouit pas du Seigneur, lorsqu’on ne cultive pas des rapports avec Dieu et avec le Seigneur, et qu’ainsi le coeur est vide de Christ, voilà qu’il se remplit à flot de ce qui est de la terre.
Quel bonheur d’avoir la Parole qui jette sa lumière divine, absolue, implacable, sur notre coeur, pour nous bénir.
Mais notre Seigneur Jésus Christ n’a pas pensé à sa réputation. Il n’avait pas cela devant lui. Souvenons-nous qu’on lui disait en face : «Ne disons-nous pas bien que tu es un samaritain» (Jean 8:48), et qu’on disait de lui : «il a un démon et il est fou, pourquoi l’écoutez-vous ?», et encore : «il chasse les démons par Béelzébul, le chef des démons» (Luc 11:15). Pensons un peu à cela, nous qui sommes si susceptibles. Celui qui désire défendre la gloire du Seigneur saura d’ailleurs, mis à l’épreuve, combien cette épreuve est dure.
Remarquons qu’il était bien facile d’insulter le Seigneur. C’était un charpentier. «Charpentier» et «fils de charpentier» : on trouve ces deux qualificatifs, dans l’Écriture.
Quelle merveille que la vie de notre Seigneur Jésus Christ ! Comme Jésus met tout à sa place, non pas dans les faits, mais quant aux vérités morales. Et il veut mettre de l’ordre dans notre coeur. Quelle merveille de grâce, chers amis ! C’est merveilleux, cela ! Nous pouvons bien dire, à l’exemple du brigand repenti : Ah, mon Maître, mon Sauveur, celui dont je me glorifie, c’est lui qui est là, sur la croix ; voilà celui dont je me réclame, celui qui pour moi est plus que tout le monde entier ! Mais soyons gardés de le dire sous l’effet d’une exaltation, ou parce que d’autres le disent !
Ce brigand sur la croix est un homme peu ordinaire ! Lequel d’entre nous n’envierait pas de faire ce qu’il a fait par la foi, quand il était cloué sur la croix, devant tout le monde ! Quelle leçon pour nous, qui aimons tellement à paraître et à avoir une très bonne place, une place chrétienne, ou une bonne place dans ce qu’on appelle l’échelle sociale ! Il confesse le nom du Seigneur quand il n’y avait, extérieurement, aucune raison de le faire. Il ne pouvait espérer des autres aucun secours, et tous se moquaient de Jésus… Eh bien, ce brigand (son nom, nous le saurons un jour ; nous saurons le nom de cet homme) a fait, à ce moment-là, ce que nous pouvons, de tout notre coeur, désirer imiter. Et il est tout seul à l’avoir fait. Autour de lui, dans la foule, tous les éléments sociaux et religieux se trouvaient réunis. Et voilà la merveille de la foi, l’intelligence de la foi, l’énergie de la foi, la certitude de la foi : il ne s’occupe de personne. S’il avait tenu compte du jugement qu’on a rendu sur Jésus, il aurait dit : Jésus est condamné par des juges, par des hommes qualifiés extérieurement, des hommes officiels (car le pouvoir civil et le pouvoir religieux ont ensemble condamné le Seigneur). Il aurait pu dire : Moi, je suis moins compétent que tous les juges pour porter un jugement sur Christ. Mais ce témoignage jaillit de son coeur : «Celui-ci n’a rien fait qui ne se dût faire» (23:41). Voilà ce qui sort du fond de son coeur. Il est à l’encontre de tous les autres. Il dit l’inverse de ce que tout le monde a dit !
Avons-nous, parfois, fait comme ce brigand, l’avons-nous imité ? Hélas bien peu, chers amis !
Il y a un autre point qui brille, dans son attitude. Cet homme souffrait de toutes manières, physiquement et aussi moralement, sous le poids de la honte d’être rejeté par la société. Est-ce qu’il pense à ses souffrances ? Non : «celui-ci n’a rien fait qui ne se dût faire». En pensant à lui, il confesse : «Nous recevons justement ce que méritent les choses que nous avons faites» ! Il reprend son compagnon. Merveilleux effet de la grâce, il parle de lui pour dire : Moi, je suis justement condamné !
On passe souvent cette confession sous silence. Mais remarquons la vérité de l’Écriture. On présente le cas du brigand sur la croix comme une merveille de grâce — c’en est une. Mais c’est une merveille de vérité non moins grande. Cet homme, devant tous ceux qui l’ont condamné, au lieu d’être rempli de ressentiment et de haine, et au lieu d’être accablé par ses souffrances, dit : «Nous recevons justement ce que nous méritons». C’est la confession de ce qu’il a fait ! La femme de Luc 7 nous enseigne tout pareillement, car toute son attitude était une confession — muette sans doute, mais combien éloquente. On en trouve d’autres exemples. La confession est un signe qui démontre que Dieu est en train de bouleverser une âme, de fouiller une âme jusqu’au fond. Il la fait parler, et non pas avec un langage de convention ! Ce que dit le brigand glorifie Dieu bien mieux que n’importe quel discours de théologien. Pourquoi ? Parce qu’il accepte sa sentence ; il proclame ce sentiment profond qu’il a manqué, qu’il est un pécheur. En même temps, il déclare que Jésus, qui est là, est juste, bien qu’il soit en apparence plus abaissé même que lui, parce qu’aux insultes des autres se sont encore ajoutées celles des deux brigands, celui-ci avant qu’il fût touché par Dieu, et l’autre. Ce qu’il dit a le cachet et la puissance de la vérité. Quand Dieu fait parler un homme, on sent que c’est Dieu qui le fait parler.
Que Dieu nous donne d’avoir affaire à lui tout le temps, à lui d’abord, et souvent à lui seul !
Quelle scène ! Voilà deux hommes exactement dans la même condition, tous les deux brigands. L’un ne voit pas ; l’autre voit. Il voit, sur la tête de Jésus meurtrie par la couronne d’épines, une autre couronne. «Souviens-toi de moi, Seigneur, quand tu viendras dans ton royaume». «Celui-ci n’a rien fait qui ne se dût faire». Et puis il voit le roi que Dieu a par devers lui. Quelle foi, chers amis !
On nous demande : Vous croyez en Jésus ? Mais vous ne l’avez pas vu ! «Quoique nous ne l’ayons pas vu, nous l’aimons ; et, croyant en lui, quoique maintenant nous ne le voyions pas, nous nous réjouissons d’une joie ineffable et glorieuse» (1 Pierre 1:8).
Le christianisme, et toutes les interventions divines, se moquent de nos pauvres appréciations humaines. Quand Dieu entre en scène, tout ce que l’homme fait, ses jugements, ses traditions, ses conventions, son éducation, tout cela est jeté par terre !
C’est ainsi qu’être converti, cela ne veut pas dire s’être rangé dans sa vie. Il y a beaucoup de personnes qui se sont rangées. D’ailleurs, le seul souci de sa réputation peut faire qu’on se surveille. Il y aura des gens très intègres, honnêtes, braves gens, qui seront dans les ténèbres de dehors. Cela ne veut pas dire qu’il faille devenir un criminel pour être converti, car il y aura aussi des multitudes de criminels dans les ténèbres de dehors. Mais lorsque la foi agit — c’est l’action de la Parole et du Saint Esprit dans l’âme — elle se manifeste aussi bien dans le brigand sur la croix que dans l’homme bien élevé, et dans le jeune homme ou la jeune fille qui a reçu une éducation chrétienne et biblique très scripturaire.
Peut-être que certains ne sont pas satisfaits d’avoir pour compagnon de foi un brigand ! Pourtant, parmi ceux qui ont confessé le Seigneur, c’est un des plus brillants exemples de la foi, du salut et de la façon dont le Seigneur peut être honoré par les siens ! C’était un brigand ! Mais si le Seigneur n’a pas repoussé la compagnie de cet homme et a répondu à cette foi à laquelle il ne peut jamais ne pas répondre, nous, nous pouvons être heureux de compter parmi ceux que nous verrons dans la gloire de Dieu ce brigand, et d’autres, et de plus coupables que tous ceux-là : chacun de nous-mêmes. Comme c’est heureux, chers amis, de nous arrêter devant les sources éternelles de la vérité, de cette vérité que l’activité de notre esprit et de notre coeur voile et obscurcit ! La vérité brille dans l’Écriture, toute nette, absolue, merveilleuse. Qu’on est heureux, chers amis, de lire la Parole ! Jamais on ne s’en lasse ! Dans ce monde, vous ne pouvez pas marcher avec vous-mêmes sans être fatigué en dix minutes. Avec le Seigneur, on ne se fatigue pas. Avec lui, nous goûtons déjà les joies pures, éternelles et toujours nouvelles, qui seront le partage des élus.
«Aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis» (23:43). Ce n’est pas, comme on a voulu le dire : Je te dis aujourd’hui : Tu seras avec moi dans le paradis, plus tard. Mais : «Aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis». Il est parti dans le paradis de Dieu le même jour que le Seigneur. Est-ce que ce n’est pas merveilleux et glorieux ?
Si Dieu est Dieu, il doit s’occuper de tout le monde. Il ne peut pas choisir un roi plutôt qu’un brigand. Il est écrit, d’ailleurs : «il n’y a pas de différence, car tous ont péché et n’atteignent pas à la gloire de Dieu» (Romains 3:22). Est-ce que, chers amis, nous ne sommes pas parfois aveuglés par les différences établies dans le monde ? Rendons honneur à qui l’honneur — c’est écrit — et sans peine, sans arrière-pensée. Honorons qui nous devons honorer et, d’une façon générale, tous les hommes. Mais, quand il s’agit de la présence de Dieu et du Seigneur, il n’y a pas de différence. Et c’est la grâce du Seigneur seule qui peut répondre aux besoins du pécheur.
Un mot sur le passage que nous avons lu en Matthieu 11. Il rassemble en quelques phrases des déclarations d’une portée et d’une profondeur exceptionnelles. Dans ce chapitre 11, un changement se réalise dans la position du Seigneur. À partir de ce moment-là, il est le Messie rejeté. Eh bien, au lieu d’être accablé par son rejet — pourtant il en souffrait infiniment — il trouve son réconfort et sa joie dans la communion avec son Père : «Je te loue, ô Père, Seigneur du ciel et de la terre». C’est le langage du Messie rejeté.
Est-ce que nous, chrétiens, frères et soeurs, nous trouvons, au milieu de nos souffrances, notre réconfort dans la communion avec le Seigneur et avec le Père ? Nous pouvons, il est vrai, être encouragés par la sympathie chrétienne. C’est une fleur qui croît et se développe dans le coeur qui cherche Jésus, qui vit près de Jésus. Mais, avant tout, cherchons les ressources qui sont dans le coeur de Jésus. Alors, au lieu de se fermer, de s’isoler, de se protéger contre ce qu’il ne peut pas ne pas trouver autour de lui dans ce monde, notre coeur s’ouvrira, comme le coeur de Jésus l’a fait : «Je te loue, ô Père». Mais le Seigneur ne s’arrête pas là, et c’est une merveille. Il ajoute, alors même qu’il est méprisé et rejeté : «Venez à moi, vous tous qui vous fatiguez et qui êtes chargés, et moi, je vous donnerai du repos». Il n’y a pas un coeur semblable à celui de Jésus ! Que le Seigneur nous donne de boire à la source qui en jaillit éternellement.
[LC n° 39]
juin 1969
Le Seigneur est venu visiter la terre. Il est venu, et a rencontré tout ce qui, moralement, caractérisait l’état de péché, tout cet état de choses qui, depuis ce premier drame, avait considérablement fleuri.
Depuis l’histoire d’Israël, il n’y avait que de la misère. À chaque pas, le Seigneur rencontrait les conséquences du péché. La Parole est toujours aussi belle. Personne ne peut parler comme le Seigneur l’a fait.
«Venez à moi, vous tous qui vous fatiguez et qui êtes chargés, et moi, je vous donnerai du repos» (Matt. 11:28). Voilà une parole que nous pouvons faire entendre. Et dire que nous pouvons l’avoir d’une façon continue ! S’il n’en est pas ainsi, c’est de notre faute. Les hommes du monde, il n’y a rien, pour eux, qui les rassasie. Le repos de Dieu, c’est le terme final des pensées de Dieu à notre égard. Ce n’est pas le repos de l’homme, mais le repos de Dieu.
Notre activité est toutefois dans le repos. Un croyant qui travaille pour son Maître a de la fatigue. Mais, au fond de son coeur, se trouve le repos. Le repos ne peut se trouver qu’en Dieu.
On l’a souvent dit : Le monde ne peut remplir un coeur. Mais Dieu peut le faire. Est-ce cela que nous recherchons ? Connaissons-nous ce bonheur, chers amis ?
Dieu seul peut dire : «Venez à moi». Nous ne pouvons pas le dire. Nous n’avons pas le droit de détourner les âmes de Dieu seul. Voilà le joug de la liberté. La volonté propre est le premier vice, chez l’homme. L’homme n’a pas le droit d’avoir une volonté propre.
«Venez à moi, et vous trouverez le repos de vos âmes». Le secret du bonheur se trouve dans la dépendance avec le Seigneur.
Vous n’avez jamais vu quelqu’un qui vit dans la communion avec le Seigneur être malheureux. On n’a pas besoin de marcher dans les chemins du monde, pour apprendre ce qu’est le monde.
Notre grande affaire, notre grand problème, pour nous tous, chers amis, c’est de vivre avec le Seigneur, que nous soyons seuls ou que nous soyons ensemble. Nous avons des progrès à faire, sans doute. Avons-nous considéré la vie de cet homme, Hénoc ? Il a marché avec Dieu trois cents ans. Et, à cette époque, il n’était pas facile d’être un témoin.
Un chrétien qui raisonne est toujours en mauvais état. Dans la lumière, on ne raisonne pas. Avec Dieu, on ne raisonne plus.
Que le Seigneur, chers amis, nous donne de nous attacher à lui dans notre coeur. Dans ces conditions, vous n’aurez pas à rebrousser chemin. Jamais vous n’aurez à revenir en arrière. La dépendance est un fardeau léger. Il n’y a rien de si tyrannique que la propre volonté. «Venez à moi, vous tous qui vous fatiguez et qui êtes chargés, et moi, je vous donnerai du repos».
Nous avons à faire à Dieu. Qu’y a-t-il au-dessus ? Rien. Au ciel, nous n’aurons pas autre chose. Au ciel, nous n’aurons besoin de rien d’autre. Qu’il nous soit donné, chers amis, de ne pas faire des efforts qui échouent. Ce n’est pas bien, cela ! Qu’il nous soit donné de vivre avec lui, pas à pas. C’est un homme heureux, celui-là.
Col. 1:9-11 : Ce sont des exhortations pour chaque croyant. «Remplis de la connaissance de sa volonté». Est-ce que nous connaissons Dieu mieux qu’il y a dix ans ? Alors Dieu est connu de plus près. Il a une plus grande place dans le coeur. Qu’y a-t-il au-dessus ? Rien.
La foi honore Dieu, en croyant la Parole, en croyant Dieu.
Les inconvertis s’occupent de la première création, alors que les croyants s’occupent de la deuxième création.
«Fortifiés en toute force, selon la puissance de sa gloire, pour toute patience et constance, avec joie…». Cela nous arrive, de manquer de force. Si nous étions plus vigilants, cela ne nous arriverait point.
Il y avait un martyr qui disait, un peu avant d’être décapité : «Courage, mes frères, je vois la gloire en Dieu !». Si nous étions plus conscients que toute cette gloire est à nous !
Que voulez-vous qu’on fasse à de tels hommes ? Ils sont invincibles. On ne savait qu’en faire, de ces gens, qui ont brillamment été fidèles jusqu’à la mort. On ne pouvait pas leur ôter Christ dans leur coeur. On ne savait pas qu’en faire. «Toute patience et constance, avec joie» (v. 11) : La foi relevait le tout, «avec joie». Quand vous voyez quelqu’un qui est accablé, et qui est heureux malgré tout dans son coeur, vous dites : Dieu est là. Il ne peut en être autrement. Il y en a certainement, et peut-être dans des milieux que nous n’attendrions pas. Et cela est vrai.
Quelqu’un disait : «Oh, les prisons sont les collèges où le Seigneur fait passer les siens». Et celui qui en parlait en savait quelque chose.
Que le Seigneur nous réveille tous, chers amis ; c’est-à-dire, qu’il devienne plus cher à nos coeurs. On ne se réjouit pas dans les circonstances heureuses (sinon, cela tarit avec notre joie), mais dans le donateur. On se réjouit en lui. On pourra voir cela chez des croyants qui ont été sevrés des choses naturelles de la vie, ce contentement en Dieu seul, parce que Dieu était leur seule ressource. Est-ce du temps gagné, ou du temps perdu ? C’est sûrement du temps gagné. On le verra au tribunal de Christ.
Il y aura trois choses qui nous surprendront, arrivés au ciel. D’abord, de m’y trouver moi-même ; ensuite, d’y voir des personnes que je n’aurais pas pensé y trouver ; et aussi, de ne pas y voir ceux que je m’attendais à y trouver.
Un frère a dit : L’esprit de soumission et de dépendance envers Dieu est supérieur à tout don, même la puissance du témoignage. C’est tout céder, tout accepter. L’état de ce chrétien est supérieur à ce que fait ce chrétien. Et c’est toujours le point le plus délicat, une vie de confiance, d’humilité, de contentement. «Or la piété avec le contentement est un grand gain» (1 Tim. 6:6). Que le Seigneur nous fasse faire des expériences avec lui ! Que nous ne le chassions pas de notre vie. Un christianisme honoré par le monde n’est pas un christianisme honoré par Dieu. Là où il n’y a que Christ, la réponse, c’est la haine. Il n’y a que cela. La pierre de touche, c’est Christ. Parce que Dieu, par Christ, a manifesté la lumière selon Dieu.
Nous avons le secret que les autres cherchent. La vérité, qui la donnera ? Chacun, dans la fosse, tombe. Il n’y a pas de réponses à ces questions, dans ce monde. Tandis qu’avec le Seigneur, nous avons toutes les réponses dont nous avons besoin. Que le Seigneur nous soit en aide, et nous garde bien près de lui.
Le «moi» est un traître. C’est par le Saint Esprit que nous pouvons tenir le «moi» à sa place.
Que le Seigneur nous soit en aide, à tous !
[LC n° 40]
novembre 1947
Méditations sur la vie chrétienne, édition FR 1995, p. 98
Dieu avait introduit Israël en Canaan, chassant devant lui les peuples qui y habitaient et dont l’iniquité était parvenue à son comble. Il se servait de l’épée d’Israël pour châtier ces peuples impies. Il continue d’agir ainsi : un peuple est une verge pour un autre peuple ; c’est le gouvernement de Dieu. Mais Israël est tombé dans l’idolâtrie et a fait des choses plus graves que les nations qui habitaient le pays avant lui. Pourtant Dieu avait averti Israël : «Si vous ne dépossédez pas devant vous les habitants du pays, ceux d’entre eux que vous laisserez de reste seront comme des épines à vos yeux et comme des piquants dans vos côtés» (Nomb. 33:55). Mais Israël a dit : «Je suis bien aussi sage que Dieu ; un peu de charité à l’égard de mes voisins et je répondrai bien quand même à ce que Dieu attend de moi». Dieu ne parle jamais pour ne rien dire. Il connaît notre coeur mieux que nous. Entre deux conseils, nous devrions toujours suivre celui de Dieu, même s’il va à l’encontre de nos desseins les plus chers. Dieu ne s’est jamais trompé.
Israël — faute terrible — n’a pas honoré Dieu en gardant sa Parole. Il a fait comme les nations. Il est revenu de la captivité de Babylone débarrassé du démon de l’idolâtrie, certes, mais habité par sept autres esprits plus mauvais que lui : Israël a rejeté son Messie. Les évangiles relatent la dernière expérience que Dieu a faite avec Israël, c’est-à-dire avec l’homme. Non seulement il a envoyé ses prophètes, chaque jour se levant de bonne heure, comme disent plusieurs passages, mais il s’est présenté dans son Fils. La conclusion ? «Nous ne voulons pas que celui-ci règne sur nous» (Luc 19:14). Ne jetons pas la pierre à Israël ! Toute l’humanité était représentée à la croix, les Gentils et les Juifs, tout le monde y était. Et nous, nous l’avons rejeté toutes les fois que nous avons renié notre maître et seigneur Jésus Christ ; toutes les fois qu’un objet passe avant Christ dans nos coeurs, nous ne voulons pas de son empire sur nous. Il est très facile de voir les choses de loin, dans le temps et dans l’espace, mais quand nous sommes devant Dieu, nous disons : «Dieu a écrit mon histoire en écrivant celle d’Israël, l’histoire de tous ceux qui ont péché, la mienne». Il faudrait que nous soyons amenés à dire, comme Job : «Maintenant mon oeil t’a vu : c’est pourquoi j’ai horreur de moi, et je me repens dans la poussière et dans la cendre» (Job 42:5-6). Il n’y a rien de si beau ! «Mon oeil t’a vu», c’est fini, j’ai compris. Si nous marchons devant les hommes au lieu de marcher devant Dieu, nous aurons manqué notre vie.
Après la croix, Dieu a prolongé encore l’épreuve d’Israël, en réponse à la prière de Jésus : «Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu’ils font» (Luc 23:34). Le Seigneur leur a envoyé un ambassadeur, Étienne. Ils ont tué l’ambassadeur. Alors l’histoire d’Israël est close, Dieu a épuisé l’expérience d’Israël. Dieu pense désormais à Israël en grâce souveraine.
Le péché contre le Saint Esprit : on en a beaucoup parlé ; des âmes ont été troublées. «Il ne lui sera pardonné ni dans ce siècle, ni dans celui qui est à venir» (Matt. 12:32). Pour les Juifs, il y a trois siècles : avant la loi, la loi, le règne millénaire. Ils savaient que celui-ci serait un règne de bénédiction. Dire que ce péché ne serait pardonné ni dans ce siècle ni dans le règne, cela voulait dire qu’il ne serait jamais pardonné. Le péché contre le Fils de l’homme serait pardonné, le péché contre le Saint Esprit jamais. Le péché contre le Fils de l’homme, c’est son rejet. Après son ascension, il y a eu le don du Saint Esprit. Nous sommes sous cette dispensation ; c’est la période chrétienne. Dieu offre le salut, même après le rejet du Fils de l’homme. Mais dans ce salut par la foi en Jésus et ce don de l’Esprit réside le conseil total de Dieu. Dieu n’a plus rien à offrir à l’homme après cela. N’attendons pas mieux ! Dieu a ouvert et vidé son coeur, de sorte que celui qui rejette le témoignage du salut rendu par le Saint Esprit n’a pas à attendre d’autre grâce de la part de Dieu. Le seul chemin pour arriver à Dieu, c’est Jésus.
Dans Hébreux 6 et 10, le rejet de la grâce et de la vérité place l’âme dans une position sans miséricorde. Or il s’agit de personnes qui ont été influencées extérieurement seulement par la puissance du Saint Esprit. Lorsque le Saint Esprit est venu à la Pentecôte, la maison même a tremblé ; il y a donc de toute évidence des effets de la puissance du Saint Esprit qui ne sont pas des effets vitaux. Être sous l’effet du Saint Esprit ne suppose pas du tout la vie ; le chrétien qui a été scellé du Saint Esprit, chez lequel le Saint Esprit habite, a la vie ; mais les influences extérieures du Saint Esprit sur un homme ne supposent pas du tout que cet homme ait la vie. Balaam, Saül et d’autres ont prophétisé.
Le Seigneur rencontre l’opposition ; les pharisiens se mettent en travers de son chemin. Il y a toujours de l’opposition à la vérité. Si le Seigneur avait cherché à leur faire plaisir, à les flatter, à accommoder la vérité à leur état d’esprit, il n’y aurait pas eu d’opposition. Ils le harcèlent tellement que le Seigneur, plein de grâce, est obligé de leur dire les choses les plus dures : «Vous avez pour père le diable» (Jean 8:44). C’est la condition d’un inconverti, il est «enfant du diable». C’est terrible ! Nous voulons souvent ménager la chair chez d’autres, mais, au fond, c’est pour la ménager en nous ; nous voulons nous ménager nous-mêmes.
S’il ne veille pas, un chrétien peut, après avoir été heureux le dimanche, être dans le monde le lundi, parler comme lui, aimer ce qu’il aime. Et une assemblée ! Elle peut être spirituelle un temps et tout à coup se révéler charnelle, conduite par la chair, par la volonté propre, alors que tout devrait être fait avec dépendance, pour la gloire de Dieu. Le déclin vient par le détail, par les défaites dans les petites choses : on perd la capacité de distinguer entre ce qui est de Dieu et de la chair ; on perd l’approbation de Dieu, la présence de Dieu, on perd tout. Nous voulons être forts ? Restons séparés pour Dieu ! L’expérience est faite : le secret de la force et de la puissance du peuple de Dieu, c’est la séparation du mal, le jugement de soi. Ni le monde ni la chair ne nous ont jamais rien donné, et ont fait beaucoup de mal.
La première parabole de Matthieu 13 est celle du semeur. Le Seigneur Jésus, venu chercher du fruit parmi son peuple et n’en trouvant point, change d’attitude : au lieu de chercher du fruit, il sème. Il y a une semence, la Parole de Dieu, mais quatre terrains, quatre façons de réagir en présence de la Parole de Dieu. L’image s’applique aussi bien à un inconverti qu’aux chrétiens, elle s’applique à nous tous.
Le premier terrain : le long du chemin. Quelques grains tombèrent le long du chemin et les oiseaux des cieux les dévorèrent. Tout le monde passe sur un chemin, le terrain est dur. Si vous êtes très au courant de ce qui se fait dans le monde, jusqu’aux antipodes, en politique, dans les affaires, le monde piétine votre coeur. Si vous ne limitez pas vos activités dans ce monde juste à ce qu’il faut pour faire votre devoir à la gloire de Dieu — et encore en vous sanctifiant après l’avoir fait pour retrouver la face de Dieu — votre coeur sera dur comme un chemin. N’allons pas chercher plus loin la cause de beaucoup de faiblesse, de beaucoup de ravages !
Le second terrain : les endroits rocailleux ; peu de terre, mais le grain lève. Celui qui entend la Parole la reçoit avec joie, mais il ne croit que pour un temps ; quand la persécution survient, il est aussitôt scandalisé. Il ne nous faut pousser personne de force dans le royaume de Dieu. Ne cherchons pas de recrues, mais prions que le Seigneur en suscite ! Vous poussez quelqu’un, et c’est un terrain rocailleux. La Parole est reçue avec joie, la semence lève très vite : voilà un bon élément, un bon départ, une bonne recrue ! Survient la persécution, l’épreuve, le mépris — Dieu est fidèle, il éprouve pour manifester la réalité — alors : «Non, je ne peux pas supporter cela, c’est trop pénible !». Chacun sera salé de feu : nous passons tous par l’épreuve. Dieu veut voir s’il y a de l’or dans la gangue. Ce qui intéresse le Seigneur, c’est l’or. Les démonstrations trop hâtives ne sont pas un bon signe. Un bon signe, c’est quand un homme dit : «Je suis un pécheur».
Le troisième terrain : les épines ; la semence est étouffée, elle ne donne pas de fruit. Il faut bien faire ses affaires, dira-t-on. Faites vos affaires, faites-les jusqu’à la mort ! «J’abattrai mes greniers, et j’en bâtirai de plus grands… Cette nuit même ton âme te sera redemandée» (Luc 12:18, 20). Les hommes manquent de perspective ; ils croient éternel ce qui les concerne ; la folie les aveugle. Qu’il faille travailler, c’est une loi à laquelle on ne se soustrait pas sans dommage. Mais il y a danger. Le travail peut remplir le coeur d’épines.
Le quatrième terrain : la bonne terre. Est-ce un brave homme ? Non, c’est un coeur que Dieu a broyé. Vous voyez des gens très éprouvés dans le monde, mais ils restent avec leur misère, sans Dieu ; quand ils auront assez pleuré, ils se mettront à rire. Voilà l’histoire du monde ! Il faut que ce soit la grâce de Dieu qui brise le coeur et la conscience, prépare le terrain, y jette la semence et la fasse lever. Ce n’est pas seulement valable pour les inconvertis. Notre vie quotidienne dépend de la façon dont nous recevons la Parole de Dieu.
La dernière parabole de ce chapitre est celle de la seine jetée dans la mer. Le filet de l’évangile est jeté dans la masse des peuples. Il a attiré sur la rive toute sorte de poissons, une masse de gens. Les pêcheurs séparent les bons poissons des mauvais. Dans l’Ancien Testament, les bons poissons ont des nageoires et des écailles (Lév. 11:9) : un chrétien doit être moralement séparé du milieu qui l’entoure et ne pas se laisser entraîner par le courant. Ce n’est pas facile de remonter le courant. C’est plus facile de se laisser emporter, vivre comme tout le monde, sans lutte ni fatigue, ni effort, ni larme. Mais porter sa croix, c’est une autre chose, et souvent il faut consentir à être seul. Pour séparer les bons poissons des mauvais, il faut du discernement. Dans l’assemblée en particulier, il faut du discernement pour séparer les chrétiens de nom des vrais chrétiens. C’est une tendance aujourd’hui, et souvent un sujet de lutte, de recevoir tous les croyants de la même manière, sans discrimination et sans nuance. Quand on voit le pouvoir du monde et de la chair sur les chrétiens eux-mêmes, leur volonté propre, leurs passions, leurs convoitises, on se rend compte combien il est difficile que quelqu’un entre dans le royaume de Dieu ; la porte est étroite, ne laissons pas croire qu’elle est large !
Le travail des pêcheurs est un travail présent ; mais, de façon analogue, à la fin du temps actuel et avant son règne glorieux, le Seigneur enverra ses anges pour séparer, parmi les peuples de la terre, les bons d’avec les méchants. Ils enlèveront les méchants pour les juger et les jeter dans la fournaise de feu, et ils laisseront les bons pour jouir du royaume millénaire. Si vous fermez l’oreille aujourd’hui, Dieu vous fermera la bouche demain.
Que Dieu nous donne à tous de nous tenir toujours dans sa présence !
[LC n° 41]
20 juin 1954
Ce chapitre comporte sept paraboles, dont six sont des paraboles du royaume des cieux, la première n’étant pas proprement présentée comme telle, bien que la semence semée soit «la parole du royaume». Le moment où ces paraboles sont présentées, dans cet évangile, est caractéristique. Elles sont données lorsque, après sa présentation, la présentation qu’il a faite de lui-même à son peuple, le Seigneur Jésus n’a pas été reçu. Nous savons bien qu’on a pu appeler chaque évangile l’histoire de la réjection du Seigneur. C’est un sujet intéressant, pour le lecteur qui désire croître dans la connaissance de la Parole de Dieu. Il est intéressant de noter, au cours de la lecture d’un évangile, le nombre de fois où le Seigneur est l’objet de cette réjection manifestée. Peut-être le rencontre-t-on une quarantaine de fois par évangile, avec des différences suivant les évangiles. Mais la patience du Seigneur Jésus, sa fidélité comme homme — car c’est ce qui a été le principe de toute sa vie, sa fidélité comme homme — ont immédiatement, dès son entrée dans son ministère, suscité contre Lui ce qu’on appellerait aujourd’hui, selon les hommes, la réaction du coeur de l’homme. Et celle-ci s’est manifestée d’une façon croissante, jusqu’à ce que le coeur de l’homme se soit montré dans sa nudité, sans retenue, sans honte — «l’inique ne connaît pas la honte», dit le prophète (Soph. 3:5) — à la croix ou aux abords de la croix. Jusque-là, la retenue naturelle, ou celle que Dieu pouvait produire, ou celle de l’éducation religieuse (car le Seigneur n’est pas venu au milieu de païens, et il y avait autour de lui l’influence de l’éducation religieuse), pouvait constituer un frein. Mais cette haine contre Jésus est allée croissant, jusqu’à ce que la haine ait étouffé la voix de tout sentiment de retenue. Et cela s’est manifesté ouvertement aux abords de la croix. De sorte que nous, les croyants, si nous écoutons la Parole, nous sommes tout à fait et définitivement fixés sur ce que peut produire l’homme. C’est une grave injure que nous faisons au Seigneur, que nous faisons à Dieu, lorsque nos coeurs perdent le sentiment et le souvenir de cet enseignement que nous donnent les abords de la croix à l’égard de ce qu’est l’homme naturel. C’est une grave insulte que nous faisons à Dieu. Dieu a ainsi manifesté notre coeur ; et chacun peut dire pour soi : «il a ouvert mon coeur devant moi ; il a ouvert mon propre coeur devant moi». C’est une pensée, un sentiment, qui est très important pour la vérité, pour la gloire de Dieu, et aussi pour notre profit personnel, un sentiment qu’il est extrêmement utile de porter en soi. Lorsque ce sentiment baisse, c’est que la piété baisse. Et nous sommes alors capables de tomber dans les égarements qui, précisément, correspondent à ce tableau moral de notre coeur qui nous est donné, non pas seulement en déclarations, comme dans l’épître aux Romains, mais en actions. Dans les évangiles, l’homme n’est pas dépeint, vis-à-vis de Jésus, par des déclarations morales. Dieu ne dit pas simplement que l’homme n’a pas fait ce qu’il devait faire et a fait ce qu’il ne devait pas faire. Il ne dit pas simplement : «leurs pieds sont rapides pour verser le sang» (Rom. 3:15). Mais on les voit, aux abords de la croix, et en rapport avec Jésus. On voit des pieds rapides pour verser le sang. On voit leur gosier comme un sépulcre ouvert ; on voit cela. C’est pourquoi il n’y a rien de pareil à l’enseignement que nous donne la description de l’homme dans son activité à l’égard de Jésus.
Une autre raison fait que ce déploiement de ce qu’est l’homme ne s’est produit qu’aux abords de la croix. C’est celle-ci : c’est qu’il était selon les voies de Dieu, selon ses conseils, que le Seigneur, ayant lié l’homme fort, pût accomplir dans ce monde un service de bonté, de charité, de vérité (les deux vont ensemble), mais un service de bonté et de vérité en grâce. Il a accompli ce service après sa tentation au désert, alors qu’il est dit que «le diable le laisse pour un temps» (Luc 4:13).
Il y a eu là, au désert, avant son ministère, une épreuve de Jésus. Il en est sorti vainqueur. Il n’a pas succombé aux tentations qui étaient, dans l’ensemble, des offres séduisantes. Il n’a pas succombé ; il a refusé, et il a réalisé ce qui est appelé, dans le Nouveau Testament, avoir «lié l’homme fort» (Matt. 12:29). L’homme fort, c’est le diable. Il a été lié par le Seigneur au désert, pas ailleurs. L’homme fort ayant été lié, le Seigneur avait à accomplir, selon les voies de Dieu, un ministère. Il fallait que l’expérience fût faite, l’expérience de la façon dont nous recevrions le ministère, l’enseignement, les bienfaits du serviteur, du serviteur par excellence, du serviteur semblable à nul autre ! Et c’est pourquoi on peut dire que le Seigneur a eu, ayant lié l’homme fort, le champ libre pour accomplir son service dans sa vie, son service de charité dans la vérité. C’est ainsi qu’il nous a visités : «il est allé de lieu en lieu, faisant du bien, et guérissant tous ceux que le diable avait asservis à sa puissance» (Act. 10:38). C’est là qu’on voit l’exercice de sa puissance, de sa puissance en miracles, et de toutes sortes de manières : il guérit, chasse des démons, soulage les hommes, et fait tout ce qu’il était possible de faire pour voir s’il y aurait, au fond du coeur de l’homme, une étincelle qui répondrait à cette activité divine à son égard. Il n’y a pas eu d’étincelle. Le prophète l’annonçait ; il n’y en a pas eu. Pourtant nul chrétien — et probablement aucun homme sérieux au monde — n’oserait mettre en doute la qualité du travail du Seigneur. Personne ne peut mettre cela en doute. Et quant au sens de ses miracles, nous savons — c’est un des faits remarquables des évangiles — que tous ses miracles sont des miracles en bonté, sauf deux : l’un, c’est la malédiction du figuier ; l’autre, c’est un fait qui n’a pas l’apparence d’une bénédiction (mais cela a été en partie une bénédiction) : les démons sont entrés dans les pourceaux, et les pourceaux se sont jetés dans la mer. Mais tous les miracles cités de Jésus — il y en a une infinité qui ne sont pas cités — sont des miracles de bonté en puissance. L’homme ne peut pas dire que Dieu ne l’a pas visité. Dieu a visité l’homme. Il nous a visités. Personne ne peut dire que Dieu ne l’a pas visité. Il a pris connaissance de l’état foncier de l’homme, de ses misères, et il était là pour apporter le remède. Mais son travail s’est révélé vain, nous pouvons le dire sans tordre l’Écriture, puisqu’il est écrit en És. 49:4 : «J’ai travaillé en vain, j’ai consumé ma force pour le néant».
N’oublions jamais, chers amis chrétiens, que le Seigneur Jésus n’a rien fait, n’a rien dit, dans toute sa carrière, qui fût pour lui. C’est peut-être le trait le plus merveilleux des évangiles, incomparable. C’est peut-être le trait qui prouve, au plus haut point, l’inspiration des évangiles, et le fait qu’aucun homme n’aurait pu inventer une telle histoire, parce qu’il n’y a pas la moindre trace de ce qu’on trouve abondamment dans tout ce que l’homme dit, fait et pense : l’égoïsme ; il n’y en a pas une trace ! Qu’il se lève, celui qui peut, sondant les évangiles, mettre à jour quelque fait concernant l’activité de Jésus qui ait eu un autre objet que la gloire de Dieu et la bénédiction de l’homme, et cela en s’oubliant lui-même, puisque cette activité et l’accomplissement de ses desseins ont été faits au prix de douleurs qui n’ont pas été seulement les douleurs de la croix — bien qu’elles soient seules dans leur genre, et supérieures à toutes les autres ! Il a été l’homme de douleurs toute sa vie. Il n’y a pas eu un instant, dans la vie de Jésus, où il n’ait souffert d’une infinité de manières, tout en réalisant une parfaite joie et une parfaite paix dans la communion avec son Père.
Quand il est rappelé, dans cet évangile de Matthieu, qu’il est l’homme de douleurs, qu’il a pris nos langueurs et porté nos maladies, ce n’est pas à l’occasion de la croix, mais bien quand il vient d’accomplir des miracles en guérison (chap. 8:17).
Son travail a été vain. Il n’est pas surpris de cela. Rien ne prouve davantage le fait que l’homme est perdu. Toute l’histoire passée le disait ; l’expérience faite par l’activité de Jésus dans sa vie le confirme, et clôt la série des activités de Dieu dans ce sens-là. L’expérience de Dieu avec l’homme ne se continue plus ; elle est finie. Il est bon que nous rappelions cela. L’expérience de Dieu est close ; la conclusion est tirée par Dieu, bien posée. Cette conclusion, les faits la proclament, l’Écriture la tire : l’homme est absolument, dans son état naturel et quel qu’il soit, du haut en bas de l’échelle (ils ont tous été mis à l’épreuve), opposé à Dieu. Qu’on lui parle de tout, mais pas de Dieu ; ou qu’on lui parle d’un Dieu serviteur de l’homme ; bien entendu, il l’acceptera. Mais qu’on lui parle de Dieu comme Dieu, qu’on lui parle du Dieu à qui tout homme, quel qu’il soit, dans quelque condition qu’il soit, a des comptes à rendre, l’homme y est opposé.
Voilà la grande conclusion. N’allons pas chercher ailleurs les explications de tout ce qui se passe à la surface de la terre, dans les choses cachées comme dans toutes les choses que le soleil éclaire tous les jours. Il n’y a aucun lien entre l’homme et Dieu, aucun. Et Dieu a fait tout ce qu’il a pu pour gagner le coeur de l’homme dans la personne de Jésus, dans sa vie.
Nous ne pouvons pas estimer comme négligeable le travail du Seigneur dans sa vie. Quel blasphème ce serait que d’avoir une telle pensée ! Mais c’est un temps qui est terminé. La vie de Jésus dans ce monde est une chose passée. Le monde ne le reverra plus. Jésus a disparu, et le monde ne le connaît pas. Il a été remplacé par une personne divine que le monde ne voit pas — les chrétiens non plus ne la voient pas, mais ils savent que le Saint Esprit est sur la terre, et ils sentent sa présence.
Il y a une personne divine dans ce monde, mais ce n’est plus Jésus. Le temps du travail de Jésus dans sa vie est passé. C’est une période close, un temps révolu ; autre chose le remplace. Ceux qui n’ont pas écouté dans la période précédente, malheur à eux ! Ceux qui n’écoutent pas dans la période actuelle, bien supérieure, malheur à eux ! Cette période, elle non plus, ne durera pas toujours ; elle aussi aura un terme.
Jamais Dieu n’a dit qu’il donnerait à l’homme une éternité pour se repentir, et qu’il lui parlerait une éternité durant ; jamais, au contraire ! Ce n’est pas parce que mille ans sont comme un jour pour Dieu, qu’il n’y a pas une fin dans ses voies d’un certain caractère, et qu’il n’y a pas une fin de toutes ses voies. La fin de toutes ses voies à l’égard de l’homme, c’est le commencement de l’éternité.
Jésus a donc été rejeté. Nous nous en étonnons, quelquefois. Mais si nous nous connaissons, nous ne devons pas nous en étonner. Un croyant qui a accepté le Seigneur dans son coeur dès l’école du dimanche refait quelquefois, trente ou quarante ans après, moralement, l’expérience de ce qu’il est en lui-même, et même d’une façon plus complète !
Eh bien, voici qu’au chapitre 11, le Seigneur Jésus proclame le moment d’un changement. Dans ce chapitre, au lieu d’être le roi présenté à son peuple, il dit : «Venez à moi, vous tous», non pas seulement vous les Juifs. C’est une invitation universelle : «Venez à moi, vous tous qui êtes chargés». Et cet appel a été lancé dans le monde entier au cours des siècles. «…et moi, je vous donnerai du repos». Voilà le changement ; nous le trouvons à la fin du chapitre 11. La mère et les frères de Jésus essaient de le voir et de faire valoir les liens naturels (sa mère le fait plus d’une fois, et nous avons noté — après d’autres — que le Seigneur n’a jamais reçu la parole de sa mère : «Qu’y a-t-il entre moi et toi, femme ?») ; et le Seigneur répond, à la fin du chapitre 12 : «Quiconque fera la volonté de mon Père, celui-là est mon frère, et ma soeur, et ma mère». Autrement dit, les anciennes relations sont rompues. Tout ce qui pouvait rattacher un Juif au Messie présenté, tout cela est rompu ; et de nouveaux liens sont formés par la réception de la Parole de Dieu. On entre en rapport avec Dieu par la foi dans la Parole de Dieu : «Celui qui écoute la Parole de Dieu et qui la garde, celui-là est mon frère et ma soeur et ma mère». «La foi vient de ce qu’on entend, et de ce qu’on entend par la Parole de Dieu» (Rom. 10:17). Celui qui a cru est en relation avec Dieu, celui qui a cru dans son coeur ! On ne croit pas dans sa mémoire. La foi n’est pas dans la mémoire, aucunement. Il faut le dire et le redire jusqu’à la fin, sans se lasser : Ce n’est pas la Parole de Dieu gravée dans la mémoire qui sauve, pas du tout (l’Écriture est là pour le dire) ; c’est la foi du coeur : «Si tu crois dans ton coeur que Dieu l’a ressuscité d’entre les morts, tu seras sauvé» (Rom. 10:9). Si quelqu’un dit : «Je ne sais pas ce que c’est que croire dans son coeur», on peut se demander s’il est un chrétien, parce que les choses de Dieu se comprennent quand on y entre. On peut savoir des vérités sur les choses de Dieu, mais quand on n’y est pas entré, on ne les comprend pas. Un homme qui n’est pas converti peut être capable de faire un livre sur n’importe quelle vérité chrétienne, mais il ne comprend pas ce que c’est que d’être né de nouveau !
C’est pourquoi on ne peut pas demander à un inconverti de se conduire comme un chrétien, pour la bonne raison que les sentiments et les pensées qui dirigent et soutiennent la vie sont en rapport avec les relations de cette vie. Lorsqu’une relation est établie, il y a les pensées en rapport avec cette relation. Dans la relation entre un petit enfant et sa mère, le petit enfant ne sait pas lire, mais il comprend sa mère. Il y a là une relation ; et les sentiments jouent continuellement, en rapport avec cette relation. Lorsqu’une relation n’existe pas, vous ne pouvez pas faire naître ces sentiments. Lorsqu’un homme est inconverti, vous ne pouvez pas le faire aimer Jésus comme un chrétien l’aime, bien qu’il puisse l’estimer et sentir le poids moral, la grandeur, de la personne de Jésus — et cela se sent très bien. Ceux qui ont condamné Jésus sentaient qu’ils avaient affaire à quelqu’un qui les dépassait dans sa grandeur morale infinie. Mais ce n’est pas cela qui les a touchés !
Est-ce que chacun, ici, est en relation vitale avec Dieu ? Est-ce que chacun a l’amour de Jésus dans son coeur ? Est-ce que tout le monde peut regarder, pour ainsi dire, le Seigneur en face et lui dire, dans le secret de son âme — quand on est tout seul avec Jésus — ce que la reconnaissance sait dire, sans copier les autres, sans redire ce que les autres disent ? L’amour sait toujours que dire à l’objet de ses affections, toujours. Est-ce que quelqu’un ici, chers amis, n’en serait pas là ? C’est sérieux ; rien n’est plus sérieux que cela.