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LA DOCTRINE DU NOUVEAU TESTAMENT SUR

 

 

LE SAINT ESPRIT

 

William Kelly

 

Première partie (méditations 1 à 5). La seconde partie forme un document séparé.

La scission de cet ouvrage en 2 documents est seulement due à sa taille.

 

Table des matières :

1     Méditation 1    La nouvelle naissance et la vie éternelle    Jean 3:5

1.1      [La nouvelle naissance]

1.1.1             [La nouvelle naissance, un besoin de toujours]

1.1.2             [Dieu ne se borne pas à se révéler, Il opère dans l’homme]

1.1.3             [Ce qu’on comprenait de la nouvelle naissance avant Jean 3]

1.1.4             [Le Seigneur expliquant par des figures]

1.1.5             [Une révélation divine]

1.2      [Né d’eau (la Parole de Dieu)]

1.2.1             [Rôle de la Parole]

1.2.2             [La source de la vie nouvelle est le Saint Esprit (la Parole son instrument)]

1.3      [La nouvelle naissance : une nécessité]

1.4      [Une révélation céleste]

1.5      [Dieu se fait connaître dans l’homme né de nouveau]

1.6      [Un témoignage rejeté]

1.7      [Un Témoin du ciel]

1.8      [L’oeuvre de la croix pour apporter la vie éternelle]

1.9      [La vie éternelle, privilège spécifique des croyants du Nouveau Testament]

1.10      [La croix base d’une vraie paix]

1.11      [Dieu a agit par amour, non pas par simple nécessité]

2     Méditation 2 — «Une fontaine d’eau jaillissant en vie éternelle» — Jean 4

2.1      [Pour connaître Dieu, il faut une vie divine, la vie éternelle, la vie du Fils de Dieu (Jean 3)]

2.2      [Jean 4 — En plus de la vie nouvelle, Dieu communique la puissance (le Saint Esprit)]

2.3      [La femme samaritaine, son état et ses besoins]

2.4      [Choses à ne pas confondre]

2.4.1             [Le don du Saint Esprit (l’eau vive) autre chose qu’être né de l’Esprit]

2.4.2             [La source de la joie est autre chose que la vie elle-même]

2.5      [La puissance conférée ; la personnalité du Saint Esprit n’est pas en Jean 4]

2.6      [La soif]

2.6.1             [Les aspirations de l’homme déchu]

2.6.2             [L’eau vive, réponse divine à la soif de l’homme + un objet pour le coeur et une puissance]

2.6.3             [Avec le don du Saint Esprit, le croyant n’aura plus soif à jamais]

2.7      [Lien entre la puissance du Saint Esprit (source de joie dans l’âme) et le culte]

2.7.1             [Les systèmes religieux mis de côté]

2.7.2             [Les vrais adorateurs ont une source de joie au-dedans]

2.7.3             [Ne pas souffrir les contacts avec un culte mélangé]

2.7.4             [Sauvés pour adorer — le culte n’est pas l’édification]

2.7.5             [Distinguer les relations avec Dieu, le Père, Christ — influence sur le culte par l’Esprit]

3     Méditation 3    «Des fleuves d’eau vive»    Jean 7:1 à 39

3.1      [Ne pas séparer ce qu’est Christ de ce qu’Il fait]

3.2      [L’ordre de Jean 1 à 4]

3.3      [Jean 6  et 7 — Le règne de Christ précédé par sa mort]

3.4      [Le sens de la fête des Tabernacles]

3.5      [Un Christ glorieux introduit le don du Saint Esprit]

3.6      [Jean 7:37-39 — Des fleuves d’eau vive pour la soif du désert — L’avant-goût de la force et de la joie du ciel]

3.7      [Différence entre l’eau jaillissante (Jean 4) et les fleuves d’eau vive (Jean 7)]

3.8      [Vie professionnelle et témoignage rendu à Christ]

3.9      [Que Christ reste l’objet de nos coeurs]

4     Méditation 4    Le «Paraclet» ou le Consolateur    Jean 14:26 ; 15:26 ; 16:7 à 15

4.1      [Le Saint Esprit, plus qu’une puissance : une personne sur la terre]

4.2      [Dieu glorifie Jésus à cause de la croix]

4.3      [En attendant le retour du Seigneur, le Saint Esprit envoyé par le Père au nom de Jésus : un don digne de l’amour du Seigneur et digne de la croix]

4.4      [Le Saint Esprit : une personne envoyée, non pas une bénédiction répandue]

4.4.1             [Effusions annoncées par l’Écriture]

4.4.2             [Caractère unique de la période chrétienne]

4.4.3             [Le Saint Esprit pendant le millénium]

4.4.4             [Excellence du privilège chrétien]

4.4.5             [Le Paraclet / Consolateur : nom et fonction]

4.4.6             [Goûter la présence personnelle du Saint Esprit]

4.4.7             [Le Saint Esprit éternellement avec l’Église]

4.4.7.1    [Le Saint Esprit exclusivement avec l’Église]

4.4.7.2    [Le Saint Esprit en nous]

4.4.8             [Croire effectivement à la présence du Saint Esprit — Conséquences pratiques]

4.5      [Mission du Saint Esprit selon Jean 15 : Il rend témoignage au sujet de Christ]

4.6      [Mission du Saint Esprit selon Jean 16]

4.6.1             [Mission par rapport au monde (convaincre…)]

4.6.2             [Mission par rapport aux disciples]

4.6.2.1    [Conduire dans toute la vérité]

4.6.2.2    [Glorifier Christ]

5     Méditation 5    «Recevez l’Esprit Saint»    Jean 20:17 à 23

5.1      [La Résurrection de Christ et les disciples]

5.1.1             [Pierre et Jean]

5.1.2             [Marie de Magdala]

5.1.3             [Toucher Jésus ?]

5.1.4             [Matt. 28:9, 10, 16, 17]

5.2      [Jean 20:17 — Une nouvelle manière de connaître Christ]

5.2.1             [La connaissance de Christ propre au christianisme]

5.2.2             [Connaissance de Christ comme Messie selon l’Ancien Testament]

5.2.3             [Une nouvelle révélation (Jean 20:17)]

5.2.4             [Une nouvelle relation avec Dieu (Jean 20:17)]

5.3      [Jean 20:20, 21 — Paix vous soit]

5.4      [Jean 20:22, 23 — …Recevez l’Esprit Saint…]

5.4.1             [Des interprétations inacceptables]

5.4.2             [Le souffle de Dieu]

5.4.3             [Le Saint Esprit comme puissance de vie de résurrection]

5.4.4             [Remettre et retenir les péchés — l’autorité pour le faire (Jean 20:23)]

 

 

Note de l’éditeur du texte imprimé (2° Ed. 1969 ; Bibles et traités chrétiens, Vevey) : L’ouvrage de W. Kelly a paru en traduction intégrale dans l’Écho du Témoignage de 1868 à 1870, et elles furent réunies en 1871 en un volume. Le texte ci-joint est une forme révisée et quelque peu abrégée, sans que rien soit perdu, estime-t-on, de la pensée de l’auteur.

Notes Bibliquest :

1.                  les notes comportant l’indication (Réd) sont de l’éditeur du texte imprimé (Bibles et traités chrétiens, Vevey)

2.                  les sous-titres sont de Bibliquest

1                    Méditation 1    La nouvelle naissance et la vie éternelle    Jean 3:5

1.1   [La nouvelle naissance]

1.1.1       [La nouvelle naissance, un besoin de toujours]

Le sujet que je me propose de traiter, d’après la Parole de Dieu, envisagera essentiellement les opérations du Saint Esprit consécutives à la mort et la résurrection du Seigneur Jésus et particulières à la période chrétienne. Mais je suis heureux de commencer par présenter une vérité générale, s’étendant aux voies de Dieu en miséricorde envers ses saints dans tous les temps. À la différence des révélations divines propres à des circonstances particulières et à une époque spéciale des voies de Dieu envers l’homme, ce dont nous allons nous occuper d’abord concerne tous les croyants, existait dès l’entrée du péché dans le monde, n’a jamais été remplacé et ne saurait l’être, jusqu’à ce que la dernière trace de mal ait disparu pour toujours. C’est la réponse au besoin fondamental de toute âme, tandis qu’elle est retirée de la condition de l’homme déchu, qui est de mourir une fois et après cela d’être jugé. Le désir de Dieu était de se faire connaître. Il ne l’a fait d’abord que d’une manière partielle sans doute, selon diverses mesures, aussi bien qu’en plusieurs manières, comme l’apôtre le déclare en Hébreux 1 ; mais quelle que soit la mesure ou le mode de ses révélations, Dieu a toujours agi en souveraine miséricorde envers les âmes, et Il a donné de sa propre nature à ceux qui croient sur la terre. Tel est le sens de l’expression : être né de nouveau. Or il est nécessaire aujourd’hui plus que jamais, non seulement d’affirmer ce qui est particulier à l’économie chrétienne, mais de s’attacher à ce qui est universel. Ne perdons pas de vue ce qui ne change jamais, sans pour cela laisser de côté tout ce qu’il peut plaire à Dieu, selon sa propre sagesse, d’introduire pour simplifier, éclaircir, jeter de la lumière sur ces sujets ou leur donner de la profondeur. Dieu s’est manifesté de façon progressive jusqu’au moment où Christ parut et où son oeuvre fut accomplie. Le développement de la Parole de Dieu depuis le commencement fournit une vision des voies de Dieu qui s’élargit toujours, jusqu’au moment où Dieu lui-même, et non ses voies seulement, a été pleinement manifesté.

1.1.2       [Dieu ne se borne pas à se révéler, Il opère dans l’homme]

À travers tout le cours de ces économies diverses, nous trouvons la jouissance de cette bénédiction incomparable : la révélation divine. Et la raison en est manifeste : il y a d’un côté un Dieu de bonté, de l’autre l’homme perdu. «Mon Père travaille jusqu’à maintenant» (Jean 5:17), dit le Fils, qui travaillait aussi en grâce. La conscience peut suggérer l’idée d’un Dieu et de son jugement ; mais l’esprit de l’homme ne peut jamais s’élever plus haut que le fait, ou plutôt la conclusion, qu’il existe nécessairement un Dieu. Dieu lui-même n’est jamais connu de cette manière. L’esprit humain, comme tel, est incapable de découvrir Dieu ; et de fait, qu’est-ce qui donna l’essor à la raison de l’homme, sinon sa propre ruine ? Il raisonne au sujet de Dieu parce qu’il a perdu Dieu ; et tout ce que le raisonnement peut découvrir, ce n’est pas ce qui est, mais seulement, à partir de faits et d’hypothèses, ce qui doit nécessairement être. Mais un Dieu dont l’existence est simplement une nécessité, est une chose terrible pour une conscience chargée de sa culpabilité. Le Dieu qui doit exister pour un tel homme — c’est-à-dire pour un pécheur — ne peut être qu’un juge ; et si Dieu est le juge du péché et du pécheur, quelle doit être la portion de ce pécheur ? Si le juste lui-même est sauvé difficilement, où paraîtra l’impie ? Or en face de tout cela, Dieu ne s’est pas contenté de donner une révélation, de faire des promesses, de donner même des esquisses prophétiques de ce qu’il avait l’intention de faire : il a opéré dans l’homme. Et il est bien important de reconnaître qu’il ne s’agit pas seulement de l’âme du croyant tournée vers Dieu par la foi, mais d’une oeuvre intérieure qui est et a toujours été bien autre chose. Penser que les âmes ne font que regarder à Dieu est une façon de voir bien limitée et même pernicieuse. Outre le regard de la foi, outre l’acte de saisir la Parole de Dieu par l’opération de l’Esprit dans l’âme, il y a ce qui s’appelle la vie spirituelle. Et elle a toujours existé, car c’est la condition nécessaire pour avoir affaire avec Dieu. Dans tous les temps, et aujourd’hui encore, une nature nouvelle, positive, a été donnée au croyant. Autrement dit, il ne s’agit pas seulement de la foi, mais d’une nouvelle vie. Sans doute la foi est-elle le seul moyen par lequel cette nouvelle nature est communiquée, et la foi est aussi le moyen pour l’âme de s’assurer qu’elle est vraiment née de Dieu. Il peut y avoir d’autres preuves pour ceux qui nous observent ; mais la foi est destinée, selon la pensée de Dieu, à donner à celui qui la possède la certitude qu’il est né de Dieu.

1.1.3       [Ce qu’on comprenait de la nouvelle naissance avant Jean 3]

Or il est évident que cette vérité, je dirai même cette nécessité de la vie nouvelle, quoiqu’elle fût toujours réalisée dans les âmes, était bien faiblement comprise avant Christ. De fait, dans les temps de l’Ancien Testament, elle était plutôt sous-entendue qu’enseignée explicitement. Nous pouvons l’y trouver présentée en figure, ou sous la forme d’une expression morale ; mais nous n’y trouvons nulle part la déclaration distincte d’une nouvelle naissance, sinon comme un privilège annoncé. Aussi, lorsque Nicodème vint au Seigneur Jésus, frappé par ce qu’il avait vu, mais ayant en même temps le sentiment d’un besoin plus profond dans son âme (bien qu’il ait ignoré totalement de quoi il avait besoin), il demeura tout interdit et confondu par la déclaration formelle du Seigneur que si quelqu’un n’est né de nouveau, il ne peut même voir le royaume de Dieu. Les Juifs s’étaient tranquillement reposés sur la conviction que le Messie pourrait et voudrait tout faire pour eux. Or, dans un sens, ils n’avaient pas tort. Lorsqu’il vint, les Samaritains même étaient convaincus que le Messie leur ferait connaître toutes choses ; et les Juifs savaient que non seulement il enseignerait, mais qu’il accomplirait toutes choses. Il introduirait la justice éternelle, il scellerait la vision, il oindrait le Saint des saints, il en finirait avec les péchés et ferait propitiation pour l’iniquité (Dan. 9:24). Ils ne savaient guère comment la chose se ferait. Néanmoins il y avait dans l’esprit de tout Juif, sauf chez la portion incrédule de la nation, une conviction vague que l’avènement du Messie changerait la face du monde, en même temps qu’il introduirait plus particulièrement pour Israël la bénédiction promise et attendue. Dès lors, combien il était saisissant d’entendre annoncer cela solennellement par Celui qui se trouvait maintenant présent au milieu d’eux, par Celui que son précurseur, Jean le baptiseur, avait déclaré être le Messie, par Celui qui avait manifesté par des miracles qu’il était réellement, à tout le moins, un docteur venu de Dieu. Et pourtant c’est Lui qui, dès l’abord, arrête Nicodème en déclarant sans équivoque une nécessité dont celui-ci n’avait jamais eu conscience auparavant. Et cette condition était présentée d’une manière si générale, qu’elle devenait aussi absolue pour un Juif que pour un Gentil. «Si quelqu’un n’est né de nouveau...». Aucune exception n’est supposée, aucune question soulevée au sujet de la famille d’Abraham qui avait été choisie. Dieu l’exigeait aussi bien de ceux qui étaient près que de ceux qui étaient loin. «Si quelqu’un n’est né de nouveau, il ne peut voir le royaume de Dieu».

C’est pourquoi Nicodème adresse à notre Seigneur une question dépourvue d’intelligence : «Comment un homme peut-il naître quand il est vieux ? Peut-il entrer une seconde fois dans le sein de sa mère et naître ?» L’étonnement de Nicodème prouve la force de l’expression employée par le Seigneur ; je n’en connais même pas de plus forte dans l’Écriture : être né de nouveau. Mais la question posée conduit notre Seigneur à faire la déclaration sur laquelle je désire m’étendre un peu : «En vérité, en vérité, je te dis : Si quelqu’un n’est né d’eau et de l’Esprit, il ne peut entrer dans le royaume de Dieu». Celui qui voit le royaume (v. 3) entre dans le royaume (v. 5) ; mais il n’existe pas de possibilité de voir ni d’entrer, à moins d’avoir passé par cette nouvelle naissance. Quels en sont donc la source et le caractère ?

1.1.4       [Le Seigneur expliquant par des figures]

Ici le Seigneur explique la chose ; il le fait d’une manière figurée, selon son habitude dans les discours qu’il adresse aux Juifs dans cet évangile. Dans le chapitre précédent, il s’est servi de l’image du temple pour désigner son propre corps. Dans le chapitre qui suit, il prend occasion des besoins de la femme samaritaine ; et «une fontaine d’eau» devient l’image de cette bénédiction infinie sur laquelle nous espérons nous arrêter un peu tout à l’heure. Je pourrais parcourir ainsi cet évangile et prouver que ce choix de quelques figures bien connues, s’il embarrasse peut-être d’abord par le fait même qu’il s’agit de figures, ne jette aucune obscurité ; car ce n’est jamais là le but des figures dans l’Écriture, pas plus que dans aucun écrit honnête. Leur véritable but est plutôt de renfermer dans une seule expression une vérité qui, autrement, demanderait à être longuement développée ; en sorte que cette expression devient l’illustration d’une vérité, et dès lors brille de la lumière même de Dieu. Or les mêmes images étaient employées par les prophètes de l’Ancien Testament pour désigner les mêmes bénédictions. C’est pourquoi le Seigneur pouvait, avec une pleine justice qui en appelait à la propre conscience de Nicodème, censurer celui qui avait la responsabilité d’être le docteur d’Israël et ne connaissait pas ces choses.

Notre Seigneur rappelle par allusion plusieurs passages de l’Ancien Testament qui auraient dû rendre le sens de ses paroles intelligible pour Nicodème. Prenez par exemple Ésaïe 44. Dieu n’y avait-il pas promis de verser de l’eau sur celui qui a soif (v. 3) ? N’avait-il pas promis de répandre son Esprit sur la postérité de Jacob ? N’avait-il pas encore plus clairement déclaré, dans Ézéchiel 36, versets 24 à 26, que lorsqu’il aurait rassemblé Israël dans sa terre, il ôterait leur coeur de pierre, et mettrait en eux un coeur de chair, qu’il répandrait sur eux des eaux pures et mettrait son Esprit au-dedans d’eux — ce qui constitue précisément les deux éléments de la déclaration du Seigneur ? Ainsi, dans notre passage, le Sauveur parle clairement, ayant toujours en vue ces figures de l’Ancien Testament. Ce n’était donc pas quelque privilège nouveau qu’Il annonçait mais au contraire le rappel d’un besoin universel. Le Seigneur, avec la dignité et la gloire qui Lui sont propres, ne fait que donner sa pleine portée à une vérité qui se trouve dans toute l’Écriture, en la revêtant de l’autorité même du Fils de Dieu prenant la place de docteur sur la terre. «Jamais homme ne parla comme cet homme» (Jean 7:46). Tout en ne faisant que se servir d’une image existante et supposée connue, Jésus donne néanmoins à la vérité une profondeur caractéristique par la forme sous laquelle Il la présente à Nicodème. Il ne s’agit ici ni du baptême d’enfants, ni de recevoir un nouveau coeur, ou un nouvel esprit ; mais de la naissance d’eau et de l’Esprit, vérité capitale et de la plus grande portée pratique.

1.1.5       [Une révélation divine]

D’autres vérités sont peut-être plus propres à attirer les affections et à les fixer sur la personne du Sauveur, amenant l’âme dans une plénitude de liberté, de paix, de joie, aussi bien que de puissance ici-bas. Mais aucune n’a le caractère fondamental de celle-ci (à l’exception de l’oeuvre de Christ, dans laquelle Dieu Lui-même fut glorifié au point de pouvoir avec justice bénir un pauvre pécheur en lui donnant sa propre nature). Ici le Seigneur, avec la divine perfection qui lui est propre, confère à la vérité une nouvelle beauté, et une autorité divine. En sorte que nous discernons combien doit être glorieuse la personne qui profère la vérité d’une telle manière. «Si quelqu’un n’est d’eau et de l’Esprit...». Il s’agit bien d’une nouvelle nature, de quelque chose qui n’a aucun fondement dans l’homme et n’a de source qu’en Dieu. N’est-ce pas en effet Dieu lui-même, qui a son propre royaume dont Il est le centre, qui seul par conséquent peut donner une nouvelle nature ? Et quelle est la nature qu’il Lui convient de communiquer ? Ce ne peut être que la nature divine. «Si quelqu’un n’est né d’eau et de l’Esprit, il ne peut entrer dans le royaume de Dieu». Ainsi en arrivons-nous aux conditions.

1.2   [Né d’eau (la Parole de Dieu)]

1.2.1       [Rôle de la Parole]

J’ai attiré l’attention sur la force de l’expression «être né de nouveau» que nous trouvons dans les premières déclarations du Seigneur. Mais maintenant, si nous considérons la manière dont cette naissance est caractérisée, nous lisons : «né d’eau». L’eau, dans l’Écriture, est employée habituellement comme la figure de la Parole de Dieu appliquée par l’Esprit. Elle peut aussi représenter l’Esprit lui-même dans sa propre puissance. Mais ici nous avons l’eau distincte de l’Esprit parce que Dieu veut attirer l’attention sur la Parole appliquée à l’homme en vue d’agir moralement sur lui. Au premier abord celui-ci pourrait ignorer que c’est l’Esprit de Dieu qui lui a donné le sentiment de sa souillure ; mais ce qu’il sait toujours très bien, c’est que la Parole le juge, qu’elle le déclare coupable et entièrement incapable de se tenir en la présence de Dieu. Ainsi l’eau exprime l’action morale de la Parole sur une âme, non seulement pour la purifier mais pour la convaincre de sa souillure. Il s’agit d’abord de la communication d’une nouvelle nature que l’homme ne possédait pas auparavant. Et de même que nous avons vu le côté extérieur de cette action divine, de même nous en trouvons le côté intérieur : «si quelqu’un n’est né d’eau et de l’Esprit...».

Arrivé à ce point, il peut être bon de rappeler quelques passages de l’Écriture qui confirment indiscutablement le sens de cette expression. Dans l’épître à Tite, chapitre 3, Paul déclare que Dieu nous a sauvés «par le lavage de la régénération et le renouvellement de l’Esprit Saint». À dessein je ne cite pas la suite du passage qui présente un caractère plus complet de bénédiction que ce que le Seigneur exprime ici. Jusque-là, il existe une liaison bien évidente avec notre passage. Le lavage de la «régénération» correspond à la vérité que le Seigneur a ici devant Lui, et qu’Il présente avec force à Nicodème. En outre, quand nous lisons dans l’épître de Jacques (1:18) : «De sa propre volonté, il nous a engendrés», nous y voyons le commencement d’une vie que nous ne possédions pas auparavant. Ce n’est pas seulement que Dieu nous ait ainsi éclairés ; ce n’est pas seulement que des pensées, des vues, des vérités nouvelles aient été communiquées à l’esprit ; mais une nouvelle sorte de vie ou de nature est conférée que l’âme n’a jamais eue auparavant. «De sa propre volonté, il nous a engendrés par la parole de la vérité». Non seulement nous y trouvons le fait que nous sommes engendrés de la part de Dieu, mais aussi le moyen dont Il s’est servi : la parole de vérité. Cela se lie évidemment avec l’expression «né d’eau» dans notre verset de Jean 3. Et encore, nous trouvons dans la première épître de Pierre, chapitre 1, versets 22-23 : «Ayant purifié vos âmes par l’obéissance à la vérité, pour que vous ayez une affection fraternelle sans hypocrisie, aimez-vous l’un l’autre ardemment, d’un coeur pur, vous qui êtes régénérés, non par une semence corruptible, mais par une semence incorruptible, par la vivante et permanente parole de Dieu».

Il n’est pas nécessaire d’accumuler des textes sur un point qui doit être familier à la plupart des lecteurs ; mais j’ai pensé qu’il serait bon d’en citer assez pour montrer que ce sujet se retrouve chez tous les écrivains inspirés de la dernière partie de la révélation de Dieu. J’ai donc à dessein choisi des passages de différents apôtres. Que ce soient Paul, Pierre ou Jacques, qui écrivent, à des Juifs ou à des Gentils, c’est toujours la même vérité fondamentale ; mais, de fait, elle a reçu son expression la plus riche et la plus complète, sa forme la mieux définie et en même temps la plus profonde, des lèvres divines de notre Seigneur Jésus Christ.

1.2.2       [La source de la vie nouvelle est le Saint Esprit (la Parole son instrument)]

Une autre vérité d’une grande importance se rattache à celle-là. Pas plus que la nature de l’homme ne peut jamais être rendue spirituelle, ni améliorée ou modifiée de manière à s’élever jusqu’à une certaine connaissance des choses de Dieu, ni non plus être changée en une nature divine par un procédé spirituel quelconque ; de même, d’un autre côté, la nouvelle nature ne peut se détériorer, ne peut dégénérer en «la chair», ou en la nature de «l’homme animal». D’un côté, comme notre Seigneur le dit : «ce qui est né de la chair est chair» ; ainsi de l’autre : «ce qui est né de l’Esprit est esprit». La chose participe du caractère de sa source. La source de la vie nouvelle est donc le Saint Esprit, grand agent vivant qui la communique par un instrument : la parole de Dieu. Si le Seigneur n’avait présenté que cette dernière, la porte aurait été laissée ouverte à l’activité de l’esprit de l’homme, autrement dit à «la chair». Et ses prétentions à comprendre la Parole par ses propres moyens ne pouvaient que le mener au plus subtil des rationalismes. Mais il n’en est rien ; «ce qui est né de l’Esprit est esprit». La parole de Dieu est incontestablement le moyen que Dieu emploie ; mais, précisons-le bien, l’homme est né par la Parole, non de la Parole seule. Par contre il est né de l’Esprit, qu’est la source réelle, active et personnelle de la vie divine.

1.3   [La nouvelle naissance : une nécessité]

«Ne t’étonne pas», dit le Seigneur à Nicodème, «de ce que je t’ai dit : Il vous faut être nés de nouveau». Non seulement Il présente cette vérité comme une nécessité pour tout homme qui désire entrer dans le royaume de Dieu, mais Il enjoint : «Il vous faut être nés de nouveau». Ce qui conduit Nicodème à poser sa nouvelle question : «Comment ces choses peuvent-elles se faire ?». «Tu es le docteur d’Israël, et tu ne connais pas ces choses ?» — répond Jésus — «En vérité, en vérité, je te dis : Nous disons ce que nous connaissons, et nous rendons témoignage de ce que nous avons vu, et vous ne recevez pas notre témoignage». Remarquons la place que prend notre Seigneur Jésus Christ dans ce chapitre. Il parle comme celui qui est absolument et parfaitement intime avec Dieu. «Nous disons ce que nous connaissons», affirme-t-il ; et l’expression implique une connaissance personnelle et intrinsèque ; non pas communiquée et retransmise, à la manière de ce qu’un prophète, par exemple, pourrait exprimer après en avoir reçu la révélation. Jésus s’exprime comme connaissant Dieu et sa gloire, et en ayant la pleine conscience. «Nous disons ce que nous connaissons». Dieu seul, celui qui est Dieu, a le droit de parler ainsi. En même temps Jésus rend témoignage de ce qu’Il avait vu. Il n’est pas seulement celui qui était venu de Dieu et s’en allait à Dieu ; Il est aussi celui qui, en tant que Dieu, parle de scènes de gloire qui Lui sont familières. Il était avec Dieu en même temps qu’Il était Dieu ; Il savait pour l’avoir vu ce qu’exigeait la présence de Dieu ; Il avait la pleine connaissance non seulement de ce qui convenait à Dieu Lui-même, mais aussi de la scène où Dieu habite.

1.4   [Une révélation céleste]

Ainsi donc, selon cette parfaite connaissance de Dieu et cette absolue intimité avec le ciel, Jésus déclare : «Nous disons ce que nous connaissons, et nous rendons témoignage de ce que nous avons vu». Or l’homme n’avait aucun goût pour une révélation céleste — pas plus les Juifs que l’homme en général. Leur scène était la terre, et, comme Juifs, leur idée constante, fondée sur le témoignage de Dieu, c’était Dieu se révélant ici-bas ; Dieu bénissant ici-bas ; Dieu abolissant le mal ici-bas ; Dieu délivrant son peuple par des jugements ici-bas. Mais maintenant il y avait au milieu d’eux Celui qui différait essentiellement de tous ceux qui s’étaient jamais trouvés sur la terre, le Fils de Dieu Lui-même. Il n’est pas seulement celui que le Père reconnaît sur la terre comme bien-aimé et Fils ; car ceci n’impliquerait pas obligatoirement qu’Il soit Dieu de façon absolue et dans le sens le plus étendu. Or nous discernons dans la personne de Christ, unies en elle, non seulement la relation qui est la sienne comme l’objet des délices infinies du Père, mais la nature même de Dieu. En conséquence, il n’existe ni n’a jamais existé une seule pensée dans la Divinité à part de lui, si toutefois il nous est permis de parler de la pensée comme appartenant à Dieu — car, de fait, c’est une expression peu exacte. Dieu ne pense pas à la façon de l’homme : Dieu connaît. Ainsi Jésus, le Fils de Dieu, possédait entièrement en dehors d’une révélation cette connaissance absolue de Dieu, de ce qui était en harmonie avec la présence de Dieu, avec la nature et le royaume de Dieu ; en sorte qu’ici-bas sur la terre Il peut communiquer cette connaissance. Quelle place que la nôtre ! Quelle communion que celle dans laquelle nous sommes introduits, chers frères et soeurs, au milieu de cette mer de péché et d’iniquité, au milieu de la rébellion des hommes dont l’orgueil ne fait que souligner leurs propres pensées, et prouve combien ils sont éloignés de Dieu ! Quelle merveilleuse chose que nous soit ainsi présenté Celui même que l’homme rejette en niant qu’il soit Dieu !

1.5   [Dieu se fait connaître dans l’homme né de nouveau]

Pendant que nous nous occupons de ce sujet — sujet du plus profond intérêt possible — savoir, que celui-là seul qui était homme pouvait faire connaître Dieu à l’homme, ajoutons qu’il n’est pas dans la nature de la Divinité de se faire connaître à l’homme. Et le plan béni que Dieu a conçu est tout aussi nécessaire pour que nous Le connaissions, qu’il l’était pour nous sauver. Nous regardons volontiers aux moyens de notre délivrance, c’est-à-dire à l’incarnation du Seigneur Jésus Christ ici-bas, et au fruit de son oeuvre dans l’expiation : nous sommes, au contraire, portés à moins estimer le privilège infini de connaître Dieu ; alors qu’après tout, connaître le seul vrai Dieu et celui qu’Il a envoyé, c’est la vie éternelle. Dieu n’est jamais appelé la vérité dans aucune partie de l’Écriture, ni désigné par aucun terme équivalent, alors que le rationalisme et l’incrédulité en ont fait leur expression favorite. Et voici pourquoi : c’est que l’homme, de lui-même, prétend connaître Dieu et s’approcher de Lui par ses propres raisonnements ; mais de fait il ne le connaît jamais, et ne peut y atteindre. Car Dieu n’est connu qu’en Christ. Il m’est impossible de connaître Dieu, à moins d’être participant de la nature divine ; c’est là la raison pour laquelle je viens d’insister sur la vérité de la nouvelle naissance qui est la communication de cette nature. Ce n’est pas simplement la foi, bien que celle-ci soit nécessaire, car elle est le seul moyen d’être introduit dans la possession de cette nature. Et ce n’est pas non plus accompli seulement par la Parole, mais par l’application que le Saint Esprit fait de la Parole. Ainsi participons-nous à une nouvelle nature en vertu de laquelle nous connaissons Dieu. Or je crois pouvoir affirmer que cette participation à sa nature ne pourrait avoir lieu par la simple et unique action de Dieu, car un Être uniquement divin ne saurait ainsi donner de sa propre nature à l’homme, à moins qu’il ne se révèle dans l’homme : c’est ce qui a eu lieu en Christ, et seulement en Christ, de sorte qu’aucune âme n’aura jamais été rendue participante de la nature divine, qu’aucune âme ne sera jamais née de Dieu, sans que ce soit en rapport avec Christ. Je n’ai pas besoin de dire que les saints de l’Ancien Testament étaient ainsi nés de Dieu. Ainsi notre Seigneur Jésus ne parle pas ici en vue de l’avenir seulement, mais d’une manière absolue et universelle en vertu du caractère qu’Il prend dans l’Évangile de Jean, celui du Fils de Dieu. Il a devant les yeux à la fois l’avenir et le passé ; son regard embrasse tout le cours du temps jusque dans le royaume de Dieu. Et voici quel est le passeport pour y entrer : il faut qu’un homme soit né de Dieu, ou, comme cela est expliqué ici, né d’eau et de l’Esprit.

Il appartient à Dieu selon son bon plaisir, son amour souverain et sa propre sagesse, de s’introduire lui-même, pour ainsi dire, dans la nature de l’homme — de se révéler dans l’homme, aussi bien qu’à l’homme. Ne demeure-t-il pas en effet Lui-même dans une condition qui Lui est propre, dans laquelle il est parfaitement impossible que l’homme soit introduit, si ce n’est de cette manière bénie ? Mais maintenant qu’Il se révèle dans un homme, moi qui suis un homme je puis le connaître. Par l’opération de l’Esprit Saint, selon sa propre Parole, je puis être introduit dans une association vitale avec cet Homme béni qui est Dieu. Tout se trouve étroitement lié dans la foi des enfants de Dieu ; et si ces derniers admirent la merveilleuse manière dont il a plu à Dieu d’envoyer son Fils, né de femme, seulement en voyant la chose comme nécessaire pour l’abolition du péché, ils peuvent apprendre qu’elle était nécessaire aussi pour toute connaissance réelle de Dieu et toute communion avec Lui. Je ne puis rien connaître de Dieu, ni jouir aucunement de Lui, comme je le connais et jouis de Lui maintenant dans le christianisme, à moins que Lui ne trouve bon de se révéler par le moyen de l’homme Christ Jésus. Autrement dit, pour me servir du langage du jour, tant qu’il est simplement celui qui est absolu, je ne puis le connaître. Il faut qu’Il daigne devenir relatif quant à moi, qu’Il accepte de descendre dans la condition dans laquelle je me trouve.

1.6   [Un témoignage rejeté]

Il semble que c’est précisément là le besoin que notre Seigneur a ici en vue. Il affirme de la manière la plus forte sa divine prérogative : «Nous disons ce que nous connaissons, et nous rendons témoignage de ce que nous avons vu». Descendu ici-bas pour parler à l’homme, il avait un témoignage à rendre. Il rendait témoignage à la vérité qu’il n’y a pas d’autre moyen par lequel l’homme puisse être introduit dans la félicité dont nous jouissons maintenant ; il faut que l’homme soit né d’eau et de l’Esprit. Mais comment fut reçu ce témoignage ? L’homme voyait les choses qui lui étaient propres, autour de lui, là où il était né et avait été élevé. Il ne se souciait pas des choses divines ; bien plus, il était ennemi de Dieu. Éloigné de Dieu, il n’aimait pas entendre parler des choses de Dieu, ni de la sphère dans laquelle ces choses-là, et celles-là seules, apparaîtraient, c’est-à-dire le Royaume. Telle est la tendance de l’homme naturel : «Vous ne recevez pas notre témoignage». Or il est remarquable que cette constatation suive immédiatement ce que nous lisons dans le chapitre précédent (Jean 2:23-25), et qui semble une bien prompte réception des choses concernant le Seigneur. Il y est question de ceux qui crurent, contemplant les miracles que Jésus faisait. En fait il n’y avait de leur part aucune réception de son témoignage. Ils acceptaient des faits, autrement dit, ils recevaient ce qu’ils pouvaient voir, et ce dont ils pouvaient juger. Une telle attitude a pour effet de renforcer la bonne opinion que l’homme a de lui-même, parce que le fait de recevoir les choses d’après des preuves le place dans la position de juge : il conçoit, déduit, conclut, et ne fait ainsi que s’enfler de sa propre importance. Cela s’accorde avec l’orgueil de l’homme, qui s’érige en juge, même pour apprécier un miracle opéré par la puissance de Dieu ; tandis qu’il s’agit ici du témoignage de Dieu.

N’est-ce pas là ce que nous constatons tous les jours ? Tant que les âmes demeurent sans être exercées, elles ne s’inquiètent pas de ce qu’elles entendent. Quand les hommes sont sérieux, ils doutent, ou tout au moins ils examinent et ils pèsent. Tout autant qu’une résistance opiniâtre, la réception indifférente d’un témoignage, prouve qu’aucune oeuvre réelle n’est opérée dans la conscience. La raison en est simple. Si la Parole pénétrait le coeur, celui-ci prenant en elle un profond intérêt, il s’y trouverait aussitôt de l’activité. L’anxiété elle-même conduirait une personne à un plus ample examen. En même temps il y aurait le désir que cette Parole soit vraie. Par contre, quand une personne est entièrement morte dans ses fautes et dans ses péchés, le témoignage de Dieu ne produit aucun effet. Il est tout aussi facile de mépriser ce témoignage que d’en faire profession. L’effet de l’indifférence, c’est tantôt la profession facile, tantôt l’opposition ouverte à la vérité. En apparence totalement différentes, ces dispositions de l’esprit humain sont au fond deux manifestations de la même incrédulité. Tandis que, toutes les fois qu’une âme réalise l’importance de la vérité, celle-ci, lorsqu’elle a été crue, touche nécessairement le coeur. Si je sens ma culpabilité et combien j’ai mérité l’éternelle condamnation et si je crois que la grâce de Dieu en Christ m’en a délivré pour me donner une part au ciel avec Jésus, il m’est impossible, croyant tout cela, d’envisager froidement une vérité qui me concerne de si près. C’est pourquoi, lorsque vous rencontrez cette espèce de foi traditionnelle, inerte et sans portée, qui reçoit les choses avec une extrême rapidité et sans que se produise aucune action réelle sur la conscience et sur le coeur, il est tout à fait évident qu’elle ne correspond à aucune oeuvre vitale de Dieu : c’est tout simplement une conviction humaine, une affaire de sentiments, et par conséquent une chose sans valeur. Notre Seigneur, qui connaît ce qui est dans l’homme (chap. 2 v. 25), ne cache pas la résistance ou l’indifférence qu’il rencontre de sa part. Mais en même temps Il fait entrevoir des choses plus élevées : «Si je vous ai parlé des choses terrestres, et que vous ne croyiez pas, comment croirez-vous, si je vous parle des choses célestes ?» Et si ces «choses célestes» conduisent plusieurs d’entre nous en dehors de leurs pensées ordinaires, qu’ils veuillent bien peser les paroles du Seigneur ; car c’est sur celles-ci que je désire insister, et non sur des spéculations humaines.

1.7   [Un Témoin du ciel]

Le Seigneur Jésus avait affirmé, de la manière la plus forte possible, la nécessité absolue et générale de la nouvelle naissance pour entrer dans le royaume de Dieu. Tous ceux qui doivent se trouver dans les différentes sphères de ce royaume, soit ici-bas, soit en haut, quand il sera établi et manifesté dans ses deux parties, doivent être nés de nouveau. Une âme qui reçoit l’évangile maintenant est donc née de Dieu. Mais dans sa réponse à Nicodème, le Seigneur va bien au-delà de cette vérité. «Personne n’est monté au ciel, dit-Il, sinon celui qui est descendu du ciel, le Fils de l’homme qui est dans le ciel». Il confirme ainsi qu’il est bien véritablement homme, le Christ rejeté, le Fils de l’homme, mais aussi certainement Dieu. Le ciel était le lieu auquel il appartenait, ou plutôt qui Lui appartenait. Comme né de femme, né sous la loi, il fut lui-même vu et connu sur la terre et dans les limites du temps. Et malgré toute Sa grâce, toute Sa puissance et toute Sa gloire, l’homme ne voulut point de Lui. Mais celui qui était maintenant manifesté en chair ici-bas était réellement «le Fils unique, qui est dans le sein du Père», et revendiquait, même étant rejeté, le titre de «Fils de l’homme qui est dans le ciel». Ce n’est pas seulement, remarquons-le bien, qu’il avait été dans le ciel ; il est là ; peu importe quand ou comment — il est toujours le Fils de l’homme qui est dans le ciel. Son humiliation ne faisait que fournir l’occasion d’une nouvelle gloire pour Dieu et pour l’homme, en même temps qu’elle constituait le point de départ d’une nouvelle et plus pleine connaissance de Dieu de la part de l’homme. Il y avait là celui qui, étant lui-même l’Infini, entra dans ce qui était limité, afin que les hommes comme tels puissent eux-mêmes entrer dans la connaissance de Dieu et voir le Père en Lui. Il faut qu’ils aient affaire à la Parole ; qu’ils écoutent celui qui est à la fois Dieu et homme. C’était la grâce, mais c’était en même temps la vérité : la seule manière dont celle-ci pouvait être révélée. La vérité n’avait eu jusque-là qu’une manifestation partielle ; mais, chose merveilleuse, sa pleine manifestation se trouve maintenant dans l’homme — dans celui qui est Dieu, mais qui n’en est pas moins Homme. Cette venue en chair du Fils de Dieu apparaissant dans une sphère limitée cacherait-elle la vérité ? Au contraire, celle-ci ne pouvait être pleinement révélée qu’au moment où la Parole a été faite chair. C’est précisément dans la combinaison d’éléments en apparence incompatibles, unis dans la personne de Jésus, que vous trouvez la vérité. «Car la loi a été donnée par Moïse ; la grâce et la vérité vinrent par Jésus Christ». Cet Homme béni, modèle de toute débonnaireté, efface d’un seul mot toute la gloire de l’homme : «Personne», dit-il, «n’est monté au ciel, sinon celui qui est descendu du ciel». Or ce n’était pas seulement qu’il en était descendu. D’autres pouvaient y être ravis, comme nous le savons, par un acte de puissance ; mais Lui pouvait y prendre sa place comme la portion même qui lui était propre, et y entrer aussi simplement que possible quand l’heure serait venue. Plus encore, comme nous l’avons vu, il est dans le ciel, non seulement celui qui peut monter au ciel mais «le Fils de l’homme qui est dans le ciel». Cette gloire lui appartient en tant que personne divine et n’appartient qu’à lui.

1.8   [L’oeuvre de la croix pour apporter la vie éternelle]

Le Fils de Dieu s’étant ainsi présenté va montrer qu’une oeuvre doit être accomplie qui permette à Dieu de conférer à l’homme pécheur la bénédiction de sa propre nature. «Comme Moïse éleva le serpent dans le désert, ainsi il faut que le Fils de l’homme soit élevé, afin que quiconque croit en lui, ne périsse pas, mais» — quoi ? qu’il naisse de nouveau ? Non — «qu’il ait la vie éternelle». Il y a évidemment ici une différence importante et significative. Le Seigneur a déjà proclamé la nécessité pour tous d’être nés de nouveau. Mais lorsqu’il en vient à exprimer l’application au croyant de cette vérité fondée sur la rédemption, sur sa propre mort comme le Fils de l’homme élevé sur la croix, il ne veut pas décrire la chose simplement comme une nouvelle naissance, mais il se sert d’une expression différente. Sans doute est-il, Lui, le Fils, celui qui vivifie tous les saints, et par conséquent pour ma part je ne mets nullement en doute que les saints de l’Ancien Testament n’aient été aussi réellement vivifiés que nous-mêmes. Il n’y eut jamais qu’un seul Sauveur, et par conséquent, la nouvelle naissance, dont tous ont besoin pour le royaume de Dieu, ne peut être autre chose que la communication, par l’Esprit, de la vie qui est dans le Fils de Dieu.

1.9   [La vie éternelle, privilège spécifique des croyants du Nouveau Testament]

Ce n’est pas sans raison cependant que le Sauveur refuse, quand il lui plaît de décrire notre place, de la confondre simplement avec ce qui appartenait aux saints de tous les temps. Pour parler de cette vérité universelle et commune, dans son application aux croyants du Nouveau Testament, il emploie une expression particulière. L’Esprit de Dieu souligne ainsi l’honneur qu’il attribue à Christ et à la rédemption, lorsqu’il présente ce fait glorieux, cette oeuvre digne de Dieu, la plus grande en laquelle Dieu se soit jamais montré. Bien qu’elle concerne tous ses rachetés à travers tous les âges et toutes les économies, le Sauveur en présente maintenant les effets sous un jour et à un titre nouveaux et beaucoup plus élevés. Si nous sondons l’Ancien Testament, nous y trouvons la mention de la vie éternelle, ou de ce qui lui est équivalent ; car nous ne tenons pas à des termes techniques, mais nous considérons ces vérités sous un point de vue pratique. En les exprimant ici, le Seigneur change certains termes de ses phrases et ce n’est pas fortuitement qu’Il emploie une autre tournure. Ne pas tenir compte de ces différences serait de notre part indifférence et manque de sagesse.

Il est par exemple question dans Daniel 12 de la vie éternelle, et nous trouvons «la vie pour l’éternité» à la fin du Psaume 133. Mais nous pouvons remarquer que ces deux expressions sont liées avec l’espérance de la présence et du règne du Messie quand il introduira le royaume de Dieu d’une manière visible. Tandis que la merveilleuse vérité qui apparaît dans Jean, c’est que la gloire de la personne du Fils, maintenant manifestée, nous introduit dans la bénédiction indépendamment de toute cette manifestation future. Nous n’attendons rien de plus ; et pour quelle raison ? Parce que nous le possédons Lui. En conséquence, quoique le royaume terrestre n’ait pas encore paru avec la bénédiction publique correspondante, quoique les Juifs, au lieu d’être bénis, soient encore soumis à la malédiction sous laquelle ils se sont eux-mêmes placés (Matt. 27:25), et que la colère soit venue sur eux au dernier terme (c’est-à-dire, pour le moment, la suspension complète des promesses à leur égard) malgré tout cela, nous sommes introduits dès maintenant dans une scène illimitée de bénédictions riches et divines réunies dans sa Personne.

Ce qui rend cette vérité aussi touchante qu’instructive, c’est qu’elle nous assure maintenant la consolation et la joie d’une association personnelle avec Lui-même. Être «né de nouveau», est assurément une grande miséricorde mais ne confère rien de semblable. Sans doute, ce titre est-il indispensable pour avoir part au royaume de Dieu, privilège dont Christ est à la fois la source et le dispensateur. Mais il ne m’associe pas à proprement parler avec Christ. Dire de Christ qu’il est né de nouveau serait un blasphème, la négation même de sa personne. Ainsi donc, s’il n’était question pour nous que d’être «nés de nouveau», cela nous empêcherait plutôt de réaliser que nous sommes identifiés avec Christ, car cela nous rappellerait la différence essentielle qui subsiste entre ce que l’homme acquiert par grâce, et ce qui était en Christ. Mais du moment qu’il parle de la vie éternelle, j’ai part directement à cette bénédiction. Ma portion en lui c’est la vie éternelle ; car il est Lui-même cette vie éternelle qui était auprès du Père (1 Jean 5:20 fin). De sorte qu’au lieu de souligner une différence avec Lui, comme l’implique le don qui m’est fait d’une nouvelle nature, cet état béni est maintenant présenté d’une manière qui est vraie de Christ Lui-même. Il n’est pas seulement question d’être introduit dans la position du corps en relation avec la Tête ; tel n’est pas le sujet ici, ni d’une manière générale dans les écrits de Jean, dont l’objet, plutôt que l’union du corps avec la Tête, est la communauté de vie et de nature. Nous voyons ainsi que la plénitude de la bénédiction est devenue nôtre. Le Seigneur ne se contente pas de dire : «Il vous faut être nés de nouveau». Cela fut toujours vrai, et il ne peut en être autrement ; mais maintenant, bien qu’il s’agisse en substance de la même bénédiction, le caractère dont Jésus la revêt, et sous lequel il la présente à mon âme, me donne cette pleine assurance : j’ai reçu par grâce ce qu’il a et ce qu’il est. Lui, le Fils, est la vie éternelle aussi bien que le Dieu véritable. Mais à quoi servait-il, pour ce qui nous concernait, que Dieu soit ainsi manifesté en Christ ici-bas ? Il demeurait seul ; et l’homme de son côté lui restait étranger, mort aussi bien que plongé dans d’impénétrables ténèbres. Or Lui, le Sauveur, est mort et ressuscité ; et je le reçois, sachant que «celui qui a le Fils a la vie», et que cette vie est la vie éternelle.

1.10                   [La croix base d’une vraie paix]

Mais si j’envisageais simplement la croix du Seigneur Jésus Christ comme la base nécessaire de la justice divine, en même temps qu’elle était aussi la plus riche manifestation de miséricorde envers moi, pécheur coupable et ruiné, cela ne suffirait jamais en soi pour établir mon âme en parfaite paix devant Dieu. Encore moins cela me donnerait-il de Lui une connaissance adéquate. C’est pourquoi une autre expression est introduite, conduisant au même résultat que dans les versets 13 et 14, mais en réalité découlant d’une source plus élevée encore. «Car Dieu — dit le Fils — a tant aimé le monde, qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse pas, mais qu’il ait la vie éternelle». Il n’y avait pas eu auparavant, dans ce discours, un mot au sujet de l’amour de Dieu pas plus qu’au sujet du monde ; c’était purement l’intervention, et l’intervention nécessaire, du Fils de l’homme. Tout comme il faut qu’un homme soit né de nouveau pour entrer dans le royaume, ainsi il faut que le Fils de l’homme soit élevé sur la croix. Telle est la double condition d’une oeuvre efficace en justice pour le pécheur.

1.11                   [Dieu a agit par amour, non pas par simple nécessité]

Mais une simple nécessité ne pouvait satisfaire l’amour de Dieu. Et s’il n’y avait pas davantage qu’un : «il faut», cet amour resterait bien imparfaitement connu. Eh bien, mon privilège est d’entrer dans Ses propres sentiments, d’apprécier le témoignage de Sa propre grâce en Christ ! Est-ce une faveur extorquée à Dieu ? Certes non ! N’aime-t-il point ? N’est-il pas amour ? Écoutons plutôt ce que Jésus nous dit, Lui qui savait ce que nul autre ne pouvait savoir ou déclarer ! Oui ; Lui, le Fils, connaissait Dieu parfaitement et voulait le faire connaître tel qu’Il est, nous faire pénétrer dans ses sentiments mêmes au sujet du monde. C’est pourquoi cette révélation bénie de la grâce et de la vérité de Dieu, manifestées dans son oeuvre comme aussi dans sa personne même, est par Lui couronnée d’une déclaration vraiment divine : «Dieu a tant aimé le monde, qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse pas mais qu’il ait la vie éternelle». Quelle bénédiction, mes frères, d’avoir cette vie éternelle, et de savoir que nous la possédons ; de l’avoir, non seulement comme des dépouilles péniblement conquises dans la rédemption, mais aussi comme le fruit gratuit, complet et pour ainsi dire spontané de son amour, manifesté en celui qui était Lui-même l’objet le plus intime de l’amour du Père ! Ainsi, envers les plus indignes, Dieu veut se révéler dans le don le plus précieux qu’il pouvait faire, non seulement parce que je ne pouvais, moi, être béni d’une autre manière, mais parce qu’il voulait, lui, selon son propre coeur, me bénir pleinement. Il m’a donné en son Fils cette vie dont il n’est jamais parlé comme étant en aucun autre, une vie dont je considère en Lui la perfection. Et parce que je la possède en Lui, je suis capable de communion avec Lui-même ici-bas.

Assurément c’est une grande bénédiction que de connaître l’oeuvre qui répond à nos péchés et à notre misère. Mais c’en est une incomparablement plus grande que d’avoir part aux délices que Dieu lui-même pouvait trouver et trouva en effet en Jésus, le contemplant lorsqu’il marchait en toute dépendance et obéissance, dans la lumière et dans l’amour. Et cette perfection était d’autant plus merveilleuse qu’elle brillait dans un homme sur la terre. Eh bien, cette vie en nous partage ses propres pensées et ses propres sentiments, entre dans toutes ses joies, prend part à toute sa douleur, celle avec laquelle Il contemple l’homme rebelle, un monde ruiné, et maintenant, hélas ! nous devons ajouter, une chrétienté coupable. En Lui «était la vie». Quel privilège pour nous d’avoir en Lui cette vie, une vie déjà mise à l’épreuve au milieu et en dépit de tous, s’élevant à la plénitude de Dieu et pourtant exercée dans toutes les circonstances que peut rencontrer le coeur de l’homme ! Et c’est à cela que nous participons, mes frères, en possédant la vie éternelle en Christ selon la grâce de notre Dieu ; car ce que nous vivons maintenant dans la chair, nous le vivons dans la foi au Fils de Dieu, fondée sur la rédemption qu’Il a lui-même accomplie en amour.

Que le Seigneur veuille bénir sa propre Parole, donnant à nos âmes de retenir fermement toutes les vérités que nous connaissons, mais d’apprendre aussi que Dieu est toujours actif dans son amour. Son désir est de nous donner une plus grande liberté et une plus grande plénitude par un sentiment croissant de notre association avec Christ ! Si nous avons déjà fait quelques progrès réels, cela n’a pu être que dans cette direction et le secret n’en est pas ailleurs. Telles sont nos plus précieuses bénédictions ; et l’éternité tout entière le confirmera. Puissions-nous, en attendant, «être fortifiés en puissance par son Esprit, quant à l’homme intérieur» de sorte que le Christ habite par la foi dans nos coeurs, afin que nous soyons capables de comprendre la gloire qui est devant nous et de connaître son amour — lequel surpasse toute connaissance — de manière à en être remplis jusqu’à toute la plénitude de Dieu !

 

2                    Méditation 2 — «Une fontaine d’eau jaillissant en vie éternelle» — Jean 4

2.1   [Pour connaître Dieu, il faut une vie divine, la vie éternelle, la vie du Fils de Dieu (Jean 3)]

Le chapitre précédent nous a présenté le sujet de la nouvelle naissance, oeuvre du Saint Esprit dans l’homme. Celle-ci n’est pas, comme prétendent certains, un changement de la nature humaine, mais la communication de celle de Dieu (quoique dans l’homme), une naissance d’eau et de l’Esprit, sans laquelle personne ne peut voir le royaume de Dieu ni y entrer. Il faut pour le royaume de Dieu une nature qui soit de Dieu. Seule une nature divine est capable de connaître Dieu et de jouir de Lui ; et nulle bénédiction extérieure accordée à l’homme, nulle oeuvre accomplie en sa faveur, si précieuse qu’elle soit, ne suffisent à le rendre propre pour la présence de Dieu. Elles peuvent justifier Dieu à l’égard du péché et même le glorifier infiniment, comme cela a été réellement le cas dans l’oeuvre de notre Seigneur et Sauveur Jésus Christ. Mais j’ose affirmer que rien de simplement extérieur à l’homme ne saurait mettre celui-ci, qui est pécheur, en état soit de connaître Dieu maintenant, soit d’en jouir plus tard. Or cette même grâce de Dieu, qui donne Christ pour l’accomplissement de l’oeuvre de la rédemption, révèle Christ par le Saint Esprit au moyen de la Parole ; et par là, l’âme est née d’eau et de l’Esprit. Plus que cela : depuis la rédemption, l’homme a droit de connaître la vie divine dans sa forme pleinement révélée, dans son expression la plus élevée, celle qui appartient au Fils de Dieu lui-même. Il n’est pas seulement converti ou né de nouveau, mais il a la vie éternelle. Je ne veux pas nier le moins du monde qu’être né de nouveau c’est en réalité posséder la vie éternelle : je ne fais qu’expliquer, dans le sens qu’à mon avis nous devons lui donner, le langage du Seigneur. Au lieu de s’en tenir à l’expression la plus générale, ou à l’affirmation de l’absolue et universelle nécessité d’une nouvelle naissance, il daigne nous présenter la bénédiction acquise à la croix, sous ce caractère qui lui convient à Lui-même. Car Lui est la vie éternelle qui était auprès du Père et qui nous a été manifestée. Ainsi la grâce a opéré d’une manière digne du Fils de Dieu.

2.2   [Jean 4 — En plus de la vie nouvelle, Dieu communique la puissance (le Saint Esprit)]

Mais nous arrivons maintenant à une autre partie de notre sujet. Il ne s’agit pas simplement des besoins de l’homme, ni de la nécessité d’une nature qu’il n’a pas, et qui vient de Dieu seul. En envoyant son Fils bien-aimé dans un monde tel que celui-ci, Dieu ne se limite pas à faire ce qui est indispensable pour nous permettre de nous tenir dans sa présence. Il agit comme Dieu. Il ne communique pas seulement la nature elle-même, mais aussi une puissance capable d’opérer en elle. Il donne ce qui constitue l’énergie et la source de joie propres à la nature divine. En un mot, ce n’est pas seulement de la vie éternelle qu’il fait don, toute précieuse qu’elle est, mais il donne le Saint Esprit.

2.3   [La femme samaritaine, son état et ses besoins]

Ici les circonstances étaient, comme toujours, appropriées à ce que Dieu voulait révéler. Dans le chapitre précédent, l’homme était appelé d’une manière particulièrement pressante, en dépit des difficultés qui pouvaient lui sembler grandes. Mais à présent un pas de plus a été fait dans le sentier de grâce du Fils de Dieu : il est virtuellement rejeté. Le temps n’est plus où beaucoup croyaient en lui à cause des miracles qu’Il faisait. À présent la jalousie des pharisiens est excitée, et le Fils de Dieu quitte avec douleur cette Judée qu’il avait visitée en grâce de la part de Dieu. Son amour ne pouvait que ressentir douloureusement ce rejet qui n’était pas simplement le sien. En méprisant les grâces dont il était l’objet, le peuple rejetait Dieu Lui-même. Mais ce rejet conduit Jésus à une manifestation de grâce comme on n’en avait jamais entendu parler en Judée. Une femme de la Samarie, apparemment peu faite pour la compagnie du Messie, une pauvre femme de la ville de Sichar, dégradée même au jugement de l’homme, le rencontre tout seul au puits de Jacob où il s’était assis, fatigué de son voyage. Et Jésus s’ouvre bientôt un chemin vers son coeur.

Jésus demande un peu d’eau à boire. Il s’approche de cette femme, non pas comme le Messie, bien qu’il le soit, mais comme le Fils de Dieu qui n’avait pas besoin de gloire, mais qui avait besoin de montrer de la grâce. Car Dieu était ému de compassion envers sa créature perdue, et un seul pouvait s’occuper d’elle dans cet état, c’était Lui-même. Aussi, mû par son propre amour, il s’arrête et adresse une demande à la femme. Que ne ferait-il pas pour atteindre son coeur ? La femme est toute surprise ; car les Juifs n’ont pas de relations avec les Samaritains. Pour elle, il n’est qu’«un Juif», et elle-même seulement «une femme de la Samarie». Quelle erreur à l’égard de l’un et de l’autre ! Mais Jésus lui dit : «Si tu connaissais le don de Dieu, et qui est celui qui te dit : Donne-moi à boire, toi, tu lui eusses demandé, et il t’eût donné de l’eau vive». Elle ne le connaissait pas. On pouvait à peine dire qu’elle connaissait la loi de Dieu, quoiqu’elle en parlât ; mais pour ce qui est du don de Dieu — qui avait jamais entendu parler d’une telle chose ? Qui, même en Israël, ce peuple si favorisé, s’était jamais arrêté à cette vérité que Dieu donne ? Le système religieux auquel cette femme était attachée lui fournissait de Dieu une conception toute différente. La religion de l’homme le considère comme un être qui reçoit. Cette femme sans doute n’était qu’une pécheresse perdue, mais, même dans une pareille condition, on peut avoir l’orgueil religieux et partager la jalousie de ceux qui s’estimaient supérieurs. Pour cette femme, mais aussi pour ceux qui auraient dû avoir une connaissance bien plus grande, Dieu est toujours un être qui exige, et non pas quelqu’un qui donne comme Dieu seul peut donner. L’esprit de l’homme ne s’élève jamais au-dessus de cette notion de Dieu. Il peut constater les effets de la sagesse et de la puissance divines. Mais Dieu lui-même demeure inconnu, car il ne peut être connu qu’en Christ, c’est-à-dire en son Fils. Ceci, cette femme ne l’avait pas appris encore. Elle ne se doutait pas le moins du monde qui pouvait être celui qui lui avait dit : Donne-moi à boire. Sinon elle aurait eu distinctement et glorieusement devant son âme Dieu comme donateur.

Mais la grâce était loin de ses pensées. Elle ne voyait qu’un Juif qui lui demandait à boire. Elle ne connaissait pas la dignité de celui qui était maintenant sur la terre un homme parmi les hommes. Elle ne savait pas qu’il était le Fils unique ; elle ignorait la gloire de celui qui ne prouva jamais mieux cette gloire que lorsqu’il s’abaissa pour le salut des pécheurs. Car qu’y a-t-il de plus profond de la part de Dieu, ou du Fils de Dieu, que cette expression de grâce, cet abaissement en amour — non pas en condescendance, mais en réelle bonté ? La condescendance n’est qu’une sorte de patronage, une attitude purement humaine et mondaine. Il ne pouvait y avoir aucun sentiment semblable en Celui qui est la vraie, la seule manifestation de l’amour divin, d’un amour qui n’avait pas de motif en dehors de lui-même. Et celui qui était amour dans sa propre nature était maintenant sur la terre pour le manifester. Qu’y avait-il dans une aussi pauvre créature de propre à attirer l’intérêt ? Rien, mais cette misère complète met en pleine évidence un Dieu qui donne et le Fils qui s’humilie. Quand bien même il formule une demande ici, c’est afin de pouvoir donner. Cette demande d’un peu d’eau n’est pour Lui que l’occasion de donner l’eau vive ; et si quelqu’un en boit, il n’aura plus soif à jamais. Certes c’était pour elle un son bien nouveau que cette expression «de l’eau vive».

2.4   [Choses à ne pas confondre]

2.4.1       [Le don du Saint Esprit (l’eau vive) autre chose qu’être né de l’Esprit]

Être né de l’Esprit est tout autre chose que le don de l’Esprit ou de l’eau vive, dont le Seigneur parle à la femme de Sichar (Jean 4). Ces deux pensées n’ont aucune connexion entre elles, bien que, naturellement, l’une soit tout aussi vraie que l’autre. La première de ces choses avait toujours été. L’Esprit de Dieu n’avait cessé de travailler dans les âmes depuis que le péché était entré dans le monde. Mais il ne fut jamais donné jusqu’à ce que le Fils de Dieu soit manifesté, jusqu’à ce que Dieu lui-même ait pris la position de donateur, et que le Fils ait pris celle d’humiliation en amour pour les pécheurs. Voyez quelle place celui-ci prend en demandant à la plus nécessiteuse des âmes de lui donner à boire, éveillant sa confiance par sa grâce parfaite. C’est là la grande vérité qui rayonne de toutes parts dans cet évangile. Et vous le remarquerez, Christ est le donateur. Il ne s’agit pas de lui-même, non plus que de la vie éternelle simplement ; nous avons déjà trouvé pleinement ce sujet, et l’Écriture ne se répète pas. Quoique toutes les parties de la vérité de Dieu soient très certainement en parfaite harmonie, toutefois nous sommes ici sur un nouveau terrain, en présence d’une tout autre nature, de besoins plus profonds donnant lieu à une plus profonde manifestation de la grâce. Ce n’est pas un docteur d’élite comme Nicodème qui est devant nous, mais une misérable femme, repoussée de tous, indigne aux yeux du monde. Tel est l’être à qui les profondeurs de la grâce dans le Fils de Dieu commencent d’être révélées. Certes cette femme prouve de la manière la plus évidente qu’elle n’est pas préparée à recevoir le don inestimable. Et nous n’avons pas lieu de nous en étonner. Le chapitre 3 d’ailleurs n’est pas davantage à la gloire du savant Nicodème que le chapitre 4 n’honore la femme ignorante de la Samarie. La vérité sur laquelle le Seigneur insiste dans la première de ces deux scènes était capitale pour l’homme et le docteur d’Israël aurait dû la connaître. Jusqu’à quel point la saisit-il alors ? C’est ce que nous ne saurions dire. Dans le second récit, le don de l’eau vive était une vérité dans laquelle, avant ce moment-là, personne ne pouvait entrer. Loin d’être une nécessité générale dont on était tenu d’avoir connaissance, comment aurait-on pu la concevoir ? Quand avait-il jamais été donné une révélation de Dieu et de sa grâce telle que celle que Jésus présente à cette femme ? Où y avait-il jamais eu un pareil déploiement de la grâce divine : Dieu donnant de la sorte, le Fils s’abaissant ainsi en amour jusqu’à une créature dépourvue de toute justice, et le Saint Esprit devenant une source vive de rafraîchissement pour le coeur ? La femme cependant se rejette sur ce qui est la ressource constante de la nature dans ce monde, c’est-à-dire la tradition : «le puits de notre père Jacob». C’était un effort pour échapper à ce qui était trop vaste, trop profond, trop divin pour qu’elle y entre. Jésus avait quitté le lieu où son peuple habitait à l’ombre d’ordonnances divinement imposées. Des desseins d’un ordre plus élevé étaient en voie de s’accomplir. Notre évangile ne le présente pas comme venu pour accomplir les destinées du pays de la promesse ; car, après tout, qu’est-ce que la promesse ? C’est la grâce mesurée. Et Jésus était venu dans une grâce sans mesure car tout était perdu. Mais plutôt que de l’admettre, l’homme se trouve toujours un objet servant de paravent pour son âme. Même cette pauvre femme de la Samarie se retranche derrière cet abri pour son orgueil : «le puits de son père Jacob». Le patriarche en avait bu, ses enfants et son bétail : Es-tu donc plus grand que lui ? demande la femme. Oh ! la flétrissante incrédulité du coeur, si prompte à obscurcir la riche grâce de Dieu. Toutefois la réponse du Seigneur est pleine de patience : «Quiconque boit de cette eau-ci» — quoique puits de Jacob — «aura de nouveau soif ; mais celui qui boira de l’eau que je lui donnerai, moi, n’aura plus soif à jamais». Plus que cela : «L’eau que je lui donnerai sera en lui une fontaine d’eau jaillissant en vie éternelle».

2.4.2       [La source de la joie est autre chose que la vie elle-même]

Cela suppose que la vie éternelle est communiquée, mais suppose en même temps une source divine de joie que la vie éternelle en elle-même n’est pas, ni ne saurait jamais être. Au contraire, on détruirait toute la vérité de cette nouvelle et divine nature si on maintenait que la vie elle-même est une source. Telle n’est pas la nature de la vie ; elle est essentiellement dépendante ; mais ici je trouve une source, une source continuelle de secours. Autrement dit, il ne s’agit pas simplement d’une nouvelle créature qui, par le fait même qu’elle est une créature nouvelle, s’appuie sur Celui dont elle tire la vie et dont elle dépend ; mais ce que nous trouvons ici c’est une source vivante de joie. La figure même du puits l’illustre parfaitement et n’est-elle pas encore dépassée par cette expression : «l’eau vive» ? N’y voyons pas en effet quelque condition absolument indispensable pour être en relation avec Dieu. Hélas ! quel aurait été dans ce cas le sort de ceux qui avaient vécu avant sa révélation ? Non, il s’agit d’un privilège nouveau, d’une plénitude de joie qui, dans les voies et les conseils de Dieu, ne trouvait son temps et son application propres qu’à la venue du Fils. Dieu se devait de signaler dignement la venue de son Fils, sa propre manifestation en grâce dans la présence de son Fils ici-bas, aussi bien que l’accomplissement de l’oeuvre infinie de la rédemption. Non que cette oeuvre soit mentionnée ici ; mais elle est cependant impliquée dans l’humiliation du Fils. Il était impossible, répétons-le, que Dieu ne signale pas par quelque nouvelle bénédiction, quelque nouvelle source de joie pour le croyant, la révélation et l’accomplissement du plus grand des desseins de sa pensée et de son coeur. Pour peu qu’on Le connaisse, on confessera qu’il ne pouvait en être autrement. L’homme s’efforcera de rabaisser les magnifiques scènes des voies de Dieu, et de contester les éclatants témoignages de sa bonté et de sa sagesse dans ce monde, il mettra même en cause la révélation de Dieu. En dépit de tous ces efforts, la Parole de Dieu demeure et demeurera éternellement. Le dessein de Dieu est de faire tout concourir à la gloire de son Fils. Aussi, quand celui-ci vient, il donne à l’homme quelque chose de plus qu’une nouvelle nature.

2.5   [La puissance conférée ; la personnalité du Saint Esprit n’est pas en Jean 4]

En grâce, Dieu avait toujours fait naître de nouveau les âmes séparées pour son nom, les rendant propres pour sa présence ; et maintenant, outre la communication de cette nouvelle nature et le fait que Dieu regardait d’avance à l’oeuvre magistrale qui le justifierait dans le pardon des péchés, la nouvelle naissance pour le croyant est manifestée dans sa véritable nature et sa pleine valeur, comme la vie éternelle dans le Fils. Mais nous avons vu qu’il y a davantage encore. Une puissance divine est donnée à celui qui reçoit la vie éternelle, une fontaine d’eau jaillit en lui, en vie éternelle. Ce n’est pas seulement le fait, mais la puissance de la vie éternelle qui est conférée et cela non pas tant dans une nature communiquée, que dans un flux intarissable se rattachant à la source. J’admets qu’il n’est point question encore ici de la personnalité du Saint Esprit. Cette vérité se trouve plus loin, et elle nous sera présentée à sa place dans une autre occasion. C’est au moment où le saint Fils de Dieu s’en ira que cette question sera pleinement présentée. Alors une autre Personne viendra et prendra la place de Christ. Ainsi tout le sujet est présenté admirablement et dans l’ordre. Ici ce que nous avons c’est la puissance, plutôt qu’une personne ; mais une puissance intérieure pour celui qui a la vie éternelle, afin que son âme puisse sentir la pleine joie de la grâce. C’est ce dont parle le Seigneur quand il dit : «Celui qui boira de l’eau que je lui donnerai, moi...».

2.6   [La soif]

2.6.1       [Les aspirations de l’homme déchu]

Maintenant considérons un moment l’état de l’homme depuis la chute, et en contraste ce que Dieu est. Voyons-le se révéler dans et par le Fils à une pauvre créature déchue. Quel fut le changement qui survint lors de la chute de l’homme ? Quand Adam fut créé, éprouva-t-il quelque soif dans le sens spirituel de ce mot ? Absolument aucune ! Cela aurait été dans la création un défaut que le Créateur ne pouvait y attacher, puisque tout était très bon. Je ne pense pas que tel ait été le cas même sous le rapport physique ; mais je suis sûr que, dans le sens dans lequel parlait notre Seigneur, Adam n’éprouvait pas le besoin d’une nourriture qu’il ne possédait pas. Il était incapable de la soif spirituelle parce qu’elle suppose que le coeur n’est pas satisfait, qu’il n’y a rien autour de lui pour répondre à ses besoins, qu’il éprouve un incessant désir de ce qu’il n’a pas trouvé ni ne peut trouver. Telle n’était pas la condition d’Adam dans son état d’innocence. Sa satisfaction de créature éclatait, sans aucun doute, non pas certainement en culte spirituel, mais au moins en actions de grâces rendues à Dieu. Il jouissait de la bonté et de la sagesse de Dieu dans les innombrables choses excellentes répandues autour de lui et placées sous sa dépendance. Il pèche, tombe, et, en même temps que la connaissance du bien et du mal qu’il vient d’acquérir, il voit naître en lui ce désir de ce qui ne pourra jamais le satisfaire. Et telle est, depuis lors, la condition de tout être déchu. Sous sa forme la meilleure, c’est l’espérance, car l’homme espère et ne peut qu’espérer. De fréquents et amers désappointements à l’égard des choses de ce monde peuvent accabler l’esprit ; toutefois, même quand il en est ainsi, chacun sait comment l’espoir survit toujours, espérant contre toute espérance. Voilà ce qui a été acquis avec la chute : cette soif de l’âme dont la meilleure forme est celle de l’espérance, en tant qu’impulsion constante à l’activité. L’homme est devenu «comme Dieu». Et ainsi a germé en lui ce désir d’être quelqu’un, quelque chose, dans ce monde ; en fait, de prendre virtuellement la place de Dieu lui-même. Naturellement cette audacieuse aspiration est tenue en échec par Dieu ; elle ne s’est d’ailleurs pas encore pleinement manifestée ; mais elle existe dans chaque coeur et se donnera certainement pleine et libre carrière lorsque Dieu retirera tous les obstacles et que Satan mènera à bout tous ses desseins. En attendant ce temps qui approche rapidement, c’est précisément ce désir insatisfait qui, depuis le jour où le péché est entré jusqu’à aujourd’hui, a poussé l’homme à sa fiévreuse activité dans un monde perdu.

2.6.2       [L’eau vive, réponse divine à la soif de l’homme + un objet pour le coeur et une puissance]

En contraste Jésus vient et donne, non seulement la vie éternelle, mais «l’eau vive». Et tout aussitôt il y a un objet parfait pour le coeur, ce qui n’avait jamais eu lieu auparavant, avec une puissance nouvelle pour en jouir. Jadis, même ce qui éveillait les affections du coeur prenait encore le caractère d’une espérance. La confiance en Dieu et en ses promesses existait. Mais désormais un changement immense avait lieu. Christ était venu, Celui qu’on attendait était présent. Dieu lui-même était ici, dans la personne de cet homme assis fatigué près du puits de Sichar. Lui le plus humble des hommes, le plus effacé, montrait d’autant plus, du sein même des profondeurs de son abaissement, qu’il était le vrai Dieu dans son amour. Car en le donnant, Dieu ne voulait donner rien moins que Dieu. Non seulement il voulait communiquer sa nature, mais il voulait qu’il y eût dans l’homme une capacité divine de jouir de cette nature, ainsi que des relations qui lui sont propres.

Merveilleuse et divine réponse à la chute et à ses conséquences ; réponse qui n’est pas une simple accommodation à la ruine humaine, un stérile remède, une vaine réparation, mais qui manifeste Dieu lui-même en donnant toute leur riche et vaste portée aux ressources qui sont en lui. C’est la révélation de la grâce du Fils dans la puissance du Saint Esprit. C’est le christianisme dans quelques-uns de ses éléments les plus simples, les plus élevés, les plus essentiels. Une Personne divine est descendue ici-bas dans un amour parfait. Et Jésus est là, comme un Juif en dehors du judaïsme, ayant devant lui une femme samaritaine coupable, lui adressant une demande, non pas pour lui, mais pour elle, lui demandant la plus petite chose qu’elle puisse donner, en vue de fixer son attention. Mais c’est afin qu’il puisse la bénir de sa plus grande bénédiction à lui, d’une bénédiction impérissable dès à présent et pour toujours. Ce n’est pas seulement d’une nature nouvelle qu’il est question, mais d’une puissance effective à la fois pour l’homme et dans l’homme, communiquée de la part de Dieu, et en elle-même formellement divine. Et c’est là précisément ce que nous possédons maintenant pour la joie de nos âmes. Il nous a donné l’Esprit de Dieu ; il a accompli sa parole. Dieu a envoyé, comme il est dit, l’Esprit de son Fils dans nos coeurs, criant : «Abba, Père». «L’amour de Dieu est versé dans nos coeurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné» (Rom. 8:15 ; 5:5).

2.6.3       [Avec le don du Saint Esprit, le croyant n’aura plus soif à jamais]

Nous n’avons pas simplement reçu la vie éternelle, mais outre et par-dessus le don de cette vie, le Saint Esprit lui-même nous est donné. Et, remarquez-le, c’est alors que nous trouvons que le croyant «n’aura plus soif à jamais». Cela n’est pas dit de celui qui est simplement né de nouveau, ni même quand il est fait mention de la vie éternelle seule. Et, de fait, ce n’était pas vrai lorsque les âmes étaient seulement nées de nouveau et rien de plus, car jusqu’au temps où Dieu a donné en Christ et par Christ le Saint Esprit de grâce, il y avait dans les âmes croyantes un certain désir des choses du monde ; et Dieu lui-même ne condamnait pas absolument cela mais le permettait dans une certaine mesure — peut-être à cause de la dureté de leur coeur. Un homme pouvait, pour ainsi dire, avoir ce monde-ci, et avoir aussi le monde à venir, équivoque que bien des personnes tristement aveuglées et ignorantes du vrai christianisme estiment être possible même aujourd’hui. Les croyants d’alors n’étaient pas traités comme absolument morts à la chair et au monde. Dans l’Ancien Testament nous ne rencontrons nulle part un pareil langage même chez les saints de Dieu, pas plus chez les patriarches que parmi les enfants d’Israël ; nous trouvons même tout l’opposé, en particulier dans la forme de la condition juive : une espérance tout premièrement en quelqu’un qui devait venir, mais pas de délivrance du monde en tant que système jugé. On y trouve des fruits de la foi pleins d’intérêt pour nous, dans lesquels les saints s’élevaient par la grâce de Dieu bien au-dessus de tout ce qui les entourait. Dieu nous donne ainsi de précieuses instructions par le moyen d’Abel, d’Énoch, de Noé, d’Abraham, d’Isaac, de Jacob, de Joseph, de Moïse, et de tous les autres. Mais, outre que l’objet de leur espérance n’avait pas encore été révélé et que leur foi ne reposait pas sur l’oeuvre infinie de la rédemption puisque celle-ci n’était pas alors accomplie, on trouve chez eux une certaine mesure d’attachement aux biens d’une terre qui n’était pas encore entièrement jugée.

Maintenant, si Christ ne suffit pas à mon coeur, comment cela se fait-il ? Ce peut être parce que le Saint Esprit ne remplit pas mon coeur jusqu’à le faire déborder de la grâce de Jésus. Tout en étant divinement attiré à Christ, je ne me repose pas réellement en lui et suis encore occupé de moi-même. Je rampe dans la boue de ma nature, au lieu d’être emporté par la puissance de l’Esprit avec ce Christ qui est ma vie. C’est pourquoi il ne me satisfait pas à lui tout seul, et je soupire ardemment après ce qui est sans valeur, mondain ou charnel. N’est-ce pas bien triste que Dieu en Christ dans la plénitude de sa grâce ne suffise pas au coeur ? La possession et la connaissance d’un privilège accroissent la responsabilité. Mais la première chose, pour la foi, c’est d’y entrer et de le posséder. Dieu alors ne permettra pas que nos coeurs en soient occupés simplement comme affaire de témoignage ; il veut que notre âme y prenne ses délices par la puissance qu’il nous a donnée. Toutefois ce que j’affirme maintenant, c’est que le christianisme est parfaitement manifesté, et qu’il l’est selon la sagesse de Dieu. En premier lieu la nature divine est révélée dans la Personne qui en est la plénitude et la complète expression. En second lieu la puissance pour en jouir est communiquée. Le coeur trouve dans l’objet révélé ce qui seul peut le satisfaire : une Personne divine, celle du Fils de Dieu qui m’a aimé. Mais en même temps la puissance de l’espérance n’est pas perdue. Car nous avons aussi une espérance — non pas à présent une simple et lointaine espérance, comme c’était le cas jadis quand il n’existait rien d’autre. Mais dans un monde tel que celui-ci, tandis que nous sommes encore dans le corps, Dieu ne nous en laisse pas manquer, sachant que nous avons besoin d’un pareil stimulant. La soif spirituelle a cessé lorsque par l’Esprit nous jouissons de Christ, mais l’espérance subsiste, avec cette différence que Celui qui en est l’objet est Celui-là même que je possède. Le Christ après lequel je soupire est le Christ que j’ai actuellement, et je ne trouverai pas en lui quand je le verrai la plus légère différence. Je connaîtrai mieux ce bien-aimé Sauveur et le louerai davantage, car je serai dans une condition où c’en sera fini de mes infirmités, où mon corps lui-même sera incorruptible et glorieux, et où ne se trouvera rien de nature à nuire, à détruire, ou à produire de l’obscurité. Je le trouverai, lui, le même Christ qui m’aime aujourd’hui parfaitement. N’est-ce pas précieux de savoir que cela est vrai maintenant pour nos âmes, que nous le possédons ici, aussi certainement que nous le posséderons dans le ciel ? Ainsi tout en ayant dans un sens le bénéfice de la recherche, celui d’avoir à espérer quelque chose, dans un autre sens tout aussi vrai nos coeurs goûtent déjà un repos réel dans la possession de leur objet. Nous n’avons pas perdu l’espérance comme énergie d’activité, justement excitée et exercée dans un monde ruiné. En être privé serait une perte pendant que nous sommes ici-bas. Mais il faut que l’espérance passe. Dans le ciel, il n’est plus question, nous le savons, ni de foi, ni d’espérance, car elles supposent toujours une condition imparfaite, déchue, pour ce qui concerne le milieu dans lequel elles ont à s’exercer. Maintenant, avec l’espérance, nous possédons en Christ révélé à notre foi l’objet parfait pour un coeur renouvelé. Et nous sommes nous-mêmes bénis selon la perfection de l’oeuvre qu’il a accomplie, de sorte que la conscience aussi bien que les affections jouissent d’un repos parfait. Or comme en même temps la vieille création est encore là, et nous dans le corps au milieu d’elle, nous possédons dans l’espérance un précieux aiguillon pour nous exciter à l’activité de l’amour. Tout cela, je le demande, n’est-il pas digne d’un Dieu tel que le nôtre ? N’est-ce pas l’action de son amour parfait envers ses enfants, qu’il a ainsi bénis avec Christ, son propre Fils, et en lui ?

La preuve de l’amour divin a été donnée avant le réveil de la conscience et il est précieux qu’il en soit ainsi. En effet je comprends que la conscience ne puisse supporter d’être atteinte quand un témoignage d’amour n’a pas été préalablement donné. Mais inversement ce témoignage d’amour serait par lui-même sans aucun profit pour un pécheur. Il faut qu’il y ait réveil et mise en exercice de la conscience ; et c’est ce que nous trouvons ici.

2.7   [Lien entre la puissance du Saint Esprit (source de joie dans l’âme) et le culte]

Mais le point sur lequel notre attention doit être maintenant attirée, c’est le rapport de cette précieuse puissance de l’Esprit, source divine de la joie dans l’âme, avec le culte, au sujet duquel la femme, sachant peu quelle révélation elle allait provoquer, adresse une question au Sauveur. Pourquoi la pose-t-elle ? Par simple curiosité intellectuelle, peut-être même comme échappatoire pour une conscience qui était touchée et ne se prosternait pas encore complètement devant Dieu. Mais quel que puisse avoir été le motif de sa question, quelque mélangé qu’ait été ce motif (chose hélas ! que nous connaissons trop bien), cette femme nous fournit l’occasion de recevoir de la bouche du Seigneur, pour notre édification, un précieux enseignement sur une très importante portée du don de l’Esprit. Car nous ne sommes pas seulement en possession de la vie éternelle et du Saint Esprit, mais tout cela est en vue de fins excellentes selon Dieu. Et ce qui réclame ici notre attention est nécessairement la fin la plus élevée — ce qui monte, non pas ce qui descend. Nous avons notre place de culte, nous avons notre place de service ; et le culte et le service sont précisément les deux directions dans lesquelles le Saint Esprit conduit nos âmes, agissant en nous comme l’eau qui jaillit jusque dans la vie éternelle. Le culte de Dieu lui-même, de notre Père, est l’activité suprême. Il faut qu’il ait la première place. Sinon pourrait-il convenir à Dieu ? Mais nous sommes encore dans un monde où des âmes périssent ; d’autres sont dans une extrême nécessité réclamant notre service ! L’état actuel de la chrétienté est celui d’une profonde pénurie. Et en conséquence le ministère de la grâce trouve ici-bas sa pleine justification.

2.7.1       [Les systèmes religieux mis de côté]

Ce qui se présente ici pour le croyant, c’est donc cette connexion de l’Esprit avec le culte tel qu’il est expliqué par le Seigneur. «Nos pères», dit la femme, «ont adoré sur cette montagne-ci (car elle avait son opinion, et une opinion très décidée), et vous, vous dites qu’à Jérusalem est le lieu où il faut adorer. Jésus lui dit : Femme, crois-moi : l’heure vient que vous n’adorerez le Père, ni sur cette montagne, ni à Jérusalem». Ainsi, devant la présence du Fils disparaissent non seulement les faux systèmes mais même ce qui, comme révélation partielle, avait été sanctionné par Dieu : non seulement la montagne de Samarie, mais Jérusalem elle-même. Comment Jérusalem pouvait-elle garder sa place en présence du Fils de Dieu rejeté ? Elle était la ville du grand Roi ! Si le grand Roi y avait été reçu comme tel, il aurait occupé son trône dans cette cité conformément aux termes de l’ancienne promesse. Mais c’est là précisément ce qu’on lui avait refusé, et maintenant le Roi, méprisé par ceux qui passaient pour les meilleurs et les plus sages, avait tourné le dos à cette ville rebelle. Fait qui ne sert qu’à souligner la plénitude de la grâce divine, et atteste en outre qu’ici, comme toujours, la plénitude de la grâce est attachée à la plénitude de la gloire. Un péché aussi flagrant touchait à la gloire et donnait occasion à la grâce de Dieu de se manifester. Ne vous y trompez pas : il n’y a pas d’indifférence en Dieu. Il s’oppose à tout péché commis contre Christ, en vertu de l’amour même qu’il porte à son peuple coupable, aussi bien que du soin qu’il porte à l’honneur de son Fils. Pareillement, même s’il ne s’agissait que de l’intérêt de l’Église ici-bas, il ne veut pas laisser passer la plus petite tache, la moindre souillure, tolérer un affront fait à Christ. Outre cela, l’homme religieux avait éprouvé et éprouverait de plus en plus l’entière incapacité des ordonnances pour satisfaire à ses besoins ou à la gloire de Dieu.

Cette femme avait entendu parler des promesses concernant le Messie mais était bien peu préparée à le reconnaître en celui qui parlait avec elle. Il n’était entouré d’aucune pompe, et n’exerçait pas le jugement. En tant que Roi, il aurait pu naturellement envoyer ses armées et brûler Jérusalem, mais en tant que Fils, il lui suffisait de prononcer ces seules paroles : «l’heure vient, et elle est maintenant...». Celui qui avait tout créé par une parole effaçait de la terre par une parole, d’un mot, la place de Jérusalem comme centre du culte divin. Je le répète, non seulement les faux systèmes, mais même la révélation partielle touchant l’homme sur la terre, reçoit sa sentence et disparaît, afin que le Fils demeure. «Vous adorez, vous ne savez quoi — dit-il — nous, nous savons ce que nous adorons ; car le salut vient des Juifs». Il y avait dans la Samarie présomption et ignorance ; et le Seigneur ne dissimule pas non plus les avantages qu’Israël possédait en toute manière. Mais une chose à remarquer, c’est que Jésus ne parle jamais ainsi sauf de dehors. Il défend les Juifs quand il se trouve au milieu de leurs rivaux, et qu’il est lui-même rejeté. Quelle grâce ! Le Seigneur rejeté ne méconnaît pas ce qui avait été institué avec gloire, lors même que cette institution d’Israël fût active contre Lui-même. Il ne méprise pas la ligne de la promesse ; il n’oublie pas le fait capital dont dépendait la bénédiction de toute la terre : «Le salut vient des Juifs». Mais il ajoute : «L’heure vient». Il insiste même sur le fait qu’à ce moment-là, elle était pour ainsi dire arrivée : «L’heure vient, et elle est maintenant, que les vrais adorateurs adoreront le Père en Esprit et en vérité ; car aussi le Père en cherche de tels qui l’adorent». La loi que Dieu donna était en harmonie avec la relation dans laquelle son peuple était avec lui-même. Il s’agissait de ses voies morales envers la chair dans des hommes qui, comme peuple, ne possédaient rien d’autre. Mais c’est là précisément le changement immense qui intervient maintenant que le Messie est venu et a été rejeté. Le Père appelle et forme des fils par Celui qui est le Fils premier-né. Plus que cela, il leur donne l’Esprit d’adoption, l’Esprit de fils, afin que les vrais adorateurs l’adorent en Esprit et en vérité ; car le Père en cherche de tels qui l’adorent. Que signifie donc tout cet ensemble de rites et de cérémonies flattant les sens, qui montent actuellement de cette terre devant Dieu avec la prétention d’être son culte ? Que représente le culte des multitudes chrétiennes aujourd’hui ? Une flagrante et audacieuse contradiction à la gloire de Christ, jetée à la face de Dieu, un sujet de profonde peine pour tous ceux, contredits comme Lui, qui l’aiment et qui craignent son nom. Eh bien, la Parole de Dieu montre combien c’est chose sérieuse de jouer avec ce qui concerne de si près le Saint Esprit. Il est le témoin du Fils de l’homme, rejeté des hommes, mais exalté par Dieu. Et l’Esprit lui-même est méprisé parce qu’il rend témoignage au Fils de l’homme méprisé des hommes pour sa grâce et son humiliation. Quelle démonstration de ce que Dieu est, et en même temps de ce qu’est l’homme ! La superstition dans ses formes les plus grossières et les plus outrageantes trouve des sectateurs et des défenseurs dévoués, non pas simplement parmi les ignorants, mais parmi ceux qui se glorifient de leur savoir, de leur culture, et même de leur connaissance de la Bible. En dépit d’un témoignage tel que celui de notre chapitre — les paroles de Jésus lui-même — ces marchands de légendes s’arrogent la position de peuple de Dieu. Le culte qu’ils prétendent rendre à Dieu prouve qu’ils ne sont que des sectes mondaines faisant la guerre à l’Esprit de Dieu.

2.7.2       [Les vrais adorateurs ont une source de joie au-dedans]

Seul quelqu’un qui a la vie éternelle est capable d’adorer. Mais même alors, c’est dans la puissance du Saint Esprit que le culte est rendu. Ainsi l’adorateur est quelqu’un qui, ayant le Fils, a la vie ; c’est quelqu’un qui a le Saint Esprit comme source de joie au-dedans, et qui connaît le Père. Il n’est pas d’autre culte acceptable aujourd’hui. Le Père ne cherche pas d’autres adorateurs. Il cherche ceux-là. Permettez-moi de vous demander, chers amis, si vous faites tous partie de ces vrais adorateurs ? La joie cherche toujours à être partagée. La douleur peut s’épancher toute seule, rester comme un secret avec Celui qui est seul capable de sympathiser, de secourir comme nul autre ne le peut, de délivrer comme lui seul délivre. La joie, elle, est d’autant plus riche qu’elle en trouve d’autres pour y prendre part. Et quand découvrez-vous cette communion pour la première fois ? Pas avant que le Saint Esprit soit donné ! Vous voyez par là comment la vérité fait un tout. Tant que les âmes étaient simplement nées de nouveau, l’une ici, l’autre là attendaient la venue du Christ ; elles exprimaient leur peine devant Dieu, faisant monter vers lui des soupirs dans l’espérance du moment où paraîtrait le Sauveur promis. Mais il est venu, porteur de la grâce divine, il a ôté nos péchés, et en même temps nous a donné la vie éternelle. Plus que cela, en vertu du don de Dieu, nous avons reçu la puissance de nous approcher du Père par l’Esprit ; car c’est par l’Esprit que Juifs et Gentils qui croient maintenant ont accès auprès de lui. De cet aspect de la vérité découle la communion de joie, et, en conséquence, la communion de culte. Il ne s’agit plus seulement de la bénédiction de chaque âme là où elle se trouve. Maintenant, pour la première fois dans l’histoire de ce monde, il est question de la recherche individuelle de vrais adorateurs et de leur rassemblement, afin que ces adorateurs puissent eux-mêmes offrir en commun leurs actions de grâce et leur adoration. Pourquoi ? Parce qu’ils ont un seul et même Esprit, qui, par conséquent, les unit pour la célébration de la grâce de Dieu, en même temps qu’il les sépare de tous ceux qui ne sont pas de vrais adorateurs.

2.7.3       [Ne pas souffrir les contacts avec un culte mélangé]

Jusqu’à ce moment le culte avait été mélangé. Les samaritains adoraient ils ne savaient quoi. Les Juifs rendaient leur culte à Jéhovah le Dieu d’Israël ; ils adoraient le Tout-Puissant, l’Éternel Dieu des armées ; mais les adorateurs étaient isolés l’un de l’autre et rien n’était tenté pour les distinguer de la masse du peuple et les réunir ensemble. Ceci ne pouvait se faire avant que le Fils soit venu, que la grande oeuvre de la rédemption ait été opérée, et que le Saint Esprit ait été donné ! Le mur mitoyen de clôture était encore debout. Mais à présent Christ est venu. Méconnaître ce qu’il enseigne ici, c’est revenir en arrière, se défier du Saint Esprit, apostasier de la grâce et de la vérité. Soyez certains qu’elle approche à grands pas, cette effrayante apostasie. Et je vous y exhorte de la façon la plus solennelle, ô vous qui avez de jeunes âmes sous votre responsabilité, ne laissez jamais vos enfants, même s’ils sont encore inconvertis, avoir rien de commun avec les adorateurs de ce monde. Non pas que les hommes comme tels soient capables d’adorer, mais ils prétendent rendre culte, tout en étant pleinement responsables de sentir qu’ils ne sont pas de vrais adorateurs. Il est grave de permettre à nos enfants, sous prétexte qu’ils sont inconvertis, de se mêler avec le monde et d’en suivre la marche religieuse. Ne le tolérons jamais, par curiosité ou pour quelque motif que ce soit, car rien n’égale l’habileté du diable à fournir de bonnes raisons pour de mauvaises actions. Mais, chers amis, traitons toujours comme une imposture de celui qui séduisit Éve, les sollicitations à faire quelque chose qui ne soit pas la volonté de Dieu, même si on met en avant le bien qui pourrait en résulter. «L’heure vient, et elle est maintenant, que les vrais adorateurs adoreront le Père». Peut-il exister un autre culte que celui que Dieu approuve ?

J’admets que sa grâce pénètre là où nous, nous ne pouvons ni ne devons aller ; je reconnais qu’elle peut opérer partout, même quand est offert le «sacrifice de la messe». Car ce n’est pas le péché qui peut retenir la grâce de Dieu. Certes, si le péché avait pu faire obstacle à l’action du Fils, c’en était ici l’occasion. Mais c’était précisément parce que le péché était là, afin d’en délivrer les pécheurs, que le Fils de Dieu était ainsi venu. Et je n’en ai aucun doute, ce qui est vrai de la grâce en Christ l’est aussi de la grâce manifestée par le Saint Esprit. Mais, ne supposons surtout pas que la grâce excuse le mal ou le traite légèrement. Il n’y a rien, au contraire, qui le condamne d’une manière plus absolue. Et en même temps, il n’existe rien d’autre qui puisse délivrer ; car pendant qu’un Autre porte la condamnation, le coupable est sauvé dans l’amour divin, et cela non par la mort seulement, mais dans la puissance de la vie de Christ ressuscité d’entre les morts. Ainsi le Saint Esprit donne de la force pour accomplir le bien, de même qu’il est l’agent de la bénédiction et fait qu’on y prend ses délices. Il est ainsi la seule puissance réelle pour résister au mal dans ce monde. Voilà qui est propre à agir sur la conscience d’un saint. Avez-vous jamais adoré Dieu votre Père en esprit et en vérité ? Ou bien vous êtes-vous contentés jusqu’ici d’être mêlés au monde et de prendre part à ses cérémonies et à son rituel ? Rien de plus facile que d’être associé à un tel système. Un simple instrument de musique, sans coeur ni conscience, suffit à y jouer son rôle. Le culte tel que le monde le conçoit est un ensemble de formes propres à agir sur les sentiments, mais ne différant pas finalement des pratiques de l’idolâtrie. À la vérité, c’est ce que l’apôtre discernait chez les Galates (chap. 4) lorsqu’ils reprenaient les formes juives. Mais, qu’aurait-il pensé et dit de l’état actuel de la chrétienté ? Chose solennelle, cet état progresse de jour en jour et ne cessera pas jusqu’à ce que le Seigneur Jésus soit révélé du ciel, exerçant la vengeance contre ceux qui ne connaissent pas Dieu, et contre ceux qui n’obéissent pas à l’évangile de notre Seigneur Jésus Christ.

2.7.4       [Sauvés pour adorer — le culte n’est pas l’édification]

Eh bien, nous sommes sauvés pour adorer maintenant, oui, pour adorer en esprit et en vérité. Encore faut-il, j’en supplie mes frères, adorer réellement dans la joie de notre coeur et ne pas nous contenter simplement d’en parler. Il semble parfois qu’il en est ainsi quand nous nous assemblons pour adorer le Seigneur. Ce sont plutôt des exhortations ou des prières concernant le culte que l’adoration réelle. Bien-aimés, parler du culte ce n’est pas rendre culte. Nous ne nous réunissons pas en un tel moment pour exposer le sujet ou y insister avec force, chose qui peut être parfaitement convenable en une autre occasion. Si nous sommes réunis pour adorer, que chacun réalise qu’il est dans la présence du Seigneur pour le célébrer, l’exalter et se réjouir en lui. Le culte chrétien est l’effusion devant Dieu de coeurs qui ont trouvé, par le Saint Esprit, leur joie et leur satisfaction dans le Fils et dans le Père. Le coeur dont tous les besoins ont été pleinement satisfaits dans le Christ désire louer, et ne peut que louer, en communion avec tous ceux qui sont bénis de la même manière. N’a-t-il pas trouvé un objet, le Christ, celui que Dieu lui a donné présentement dans un monde tel que celui-ci ? Il refuse de s’associer avec les éléments d’un système ignorant de la grâce ou même du péché, étranger par conséquent à la communion avec le Fils et avec le Père. Il sent le besoin d’être conduit dans le culte par la volonté de Dieu qui a envoyé le Saint Esprit du ciel ici-bas pour en être la puissance. Et quel chrétien, sachant qu’il existe une telle puissance pour bien conduire les enfants de Dieu dans le culte, pourrait se contenter de quelque autre conducteur que le Saint Esprit agissant souverainement dans l’assemblée par le moyen de qui Il veut ? Il en résulte que le culte chrétien a toujours pour son objet central le Fils de Dieu révélant le Père, et suppose nécessairement le don spécial du Saint Esprit comme la puissance en nous pour jouir de Dieu et le célébrer convenablement. Mais seuls peuvent le réaliser les vrais adorateurs qui connaissent le Père. C’est un culte d’une nature inférieure, que d’être simplement occupés de nous-mêmes et les uns des autres et que de nous étendre sans cesse sur nos propres privilèges. L’édification elle-même, toute précieuse qu’elle est, n’est pas le culte : elle a pour objet les saints et non le Père et le Fils. À sa place et à sa manière, elle est admirable, et je ne nie pas que, si nous sommes réellement occupés en adoration du Père de notre Seigneur Jésus, il y aura rafraîchissement et édification. Mais il demeure toujours vrai que le but propre du culte, c’est notre commune louange montant vers Dieu, de même que celui du ministère, c’est la grâce et la vérité de Christ descendant ici-bas, et ainsi édifiant les saints. L’action de grâces elle-même, tout en faisant réellement partie du culte chrétien, me semble en être la forme la plus inférieure. En effet, elle n’est pas tant l’expression de notre joie en Dieu que de notre joie dans ce qu’il nous donne. Sans doute cette dernière est-elle toujours juste, et il est très convenable que nous gardions toujours le sentiment de ce qu’il a fait pour nous et nous a donné. Mais nous qui avons le titre et la position d’enfants, nous sommes si richement bénis comme chrétiens que nous pouvons laisser nos coeurs s’abandonner aux révélations de l’Esprit sur ce que notre Dieu est en Lui-même et ainsi nous réjouir en sa présence. Tout a son temps et sa place, les soins à donner aux âmes et la conduite réelle du Saint Esprit pour l’adoration.

2.7.5       [Distinguer les relations avec Dieu, le Père, Christ — influence sur le culte par l’Esprit]

Une autre chose qui doit être remarquée, c’est que le Sauveur ne parle pas simplement d’adorer «le Père». Il nous dit : «Dieu est esprit, et il faut que ceux qui l’adorent, l’adorent en esprit et en vérité». Le culte chrétien est donc l’opposé d’une religion de formes, mais, bien que spirituel, il n’en est pas moins réel. Il y a des occasions où le Saint Esprit fait que le culte a spécialement Christ pour objet ; et d’autres où le Père est plus particulièrement devant l’assemblée. Parfois aussi c’est la seigneurie ou la grâce de Jésus qui occupent la première place, et d’autres fois encore c’est de notre repos en Dieu lui-même que nos coeurs sont davantage frappés ! Je ne veux pas dire que le culte se caractérise par l’un ou l’autre de ces thèmes exclusivement, mais je dis qu’on peut généralement sentir que tel ou tel des points de vue sous lesquels se présentent les vérités divines a donné au culte son ton et son caractère. Le formalisme naturellement est aveugle à ces différences, et les effacerait. Et certainement, là où le don et la présence du Saint Esprit ne sont pas réalisés, les âmes ne sont pas en état de comprendre ou d’apprécier cela. Certainement aussi tout est parfaite grâce ; et je connais peu de choses qui démontrent mieux combien nous sommes bénis, que le fait de pouvoir non seulement nous réjouir en notre Père, mais aussi nous réjouir en Dieu, nous glorifier en Lui comme il est dit en Romains 5:11. Réconciliés avec lui, et connaissant son amour par le Saint Esprit qui nous a été donné, nous avons notre sujet de gloire en Dieu comme Dieu. Car sa nature même et son caractère moral ont été si parfaitement justifiés et satisfaits dans l’oeuvre du Seigneur Jésus Christ pour nous, que désormais tout en lui peut se déclarer justement pour nous, maintenant et pour toujours. Lui qui hait le mal et en a par sa nature une horreur parfaite, qui ne saurait non plus aucunement l’excuser en nous, a été si absolument glorifié en Christ que son amour peut dorénavant se déployer sans réserve en notre faveur. Et pour notre part nous sommes libres de nous tenir sans cesse devant lui le coeur rempli de joie et débordant de louange. Ce n’est pas qu’il nous épargne la discipline nécessaire. Ne pas la connaître serait une perte et un danger pour nous qui sommes ici-bas, dans nos corps. Aussi en sommes-nous les objets de sa part dans son caractère de Père. Le châtiment dont nous sommes visités maintenant vient de notre Père (comp. Héb. 12 et 1 Pierre 1:17). Incontestablement notre Père est Dieu, mais il est bon de distinguer la nature des relations ; et l’Écriture le fait toujours. Il importe au plus haut point que nous connaissions cette étroite relation de Père qui, comme Jean nous le déclare, caractérise déjà les tout jeunes enfants de la famille de Dieu. Mais il est aussi de la plus haute importance de savoir que c’est le triomphe de la rédemption de nous avoir établis dans la paix avec Dieu comme tel, et de nous amener à nous glorifier en Lui, maintenant que toute sa nature peut se reposer pour nous en Jésus et en nous par Jésus.

Nous pouvons donc à juste titre nous réjouir de ce que ce Dieu est notre Père. Seulement il y a danger de nous limiter à cette vérité et de perdre de vue notre profond et parfait repos en Dieu comme tel (1 Pierre 1:21). Or, je dis que là où le coeur ne s’est pas soumis à la justice de Dieu et ne connaît pas pleinement la profondeur de la rédemption, on rencontre plus de confiance dans la relation de «Père», que dans le fait d’avoir affaire avec «Dieu» ; on n’apprécie pas assez l’oeuvre de Christ, ni peut-être sa gloire. Et comme la foi et l’état du coeur laissent à désirer, cela se trahit aussi par un défaut de liberté et de plénitude à la fois dans le culte et dans la marche pratique ; car toutes ces choses vont ensemble. «C’est pourquoi, recevant un royaume inébranlable, retenons la grâce par laquelle nous servions Dieu d’une manière qui lui soit agréable, avec révérence et avec crainte. Car aussi notre Dieu est un feu consumant» (Héb. 12:28, 29). Car «aussi Jésus, afin qu’il sanctifiât le peuple par son propre sang, a souffert hors de la porte. Ainsi donc, sortons vers lui hors du camp, portant son opprobre ; car nous n’avons pas ici de cité permanente, mais nous recherchons celle qui est à venir. Offrons donc, par lui, sans cesse à Dieu un sacrifice de louanges, c’est-à-dire le fruit des lèvres qui confessent son nom» (Héb. 13:12 à 15).

Mon but n’est pas de développer ces quelques remarques pratiques concernant le christianisme et le culte en général mais de montrer comment nos bénédictions et nos responsabilités se rattachent au don du Saint Esprit. Cette bénédiction qui résulte de la venue du Fils en humilité et en amour ici-bas, nous est donnée par Lui en vertu de sa gloire et de son humiliation en même temps. Dans le chapitre précédent, la nouvelle naissance est décrite par notre Seigneur comme une nécessité absolue et universelle pour le royaume de Dieu, avant qu’il dise un mot de sa présence dans ce monde, et bien moins encore de la rédemption. Les saints de l’Ancien Testament étaient nés d’eau et de l’Esprit tout aussi bien que ceux du Nouveau Testament ; mais ici nous nous trouvons en présence d’une bénédiction qui attendait la venue de Christ pour être accordée selon la pleine grâce de Dieu. Car véritablement notre communion est avec le Père et avec son Fils Jésus Christ. Elle est liée à la rédemption, mais la rédemption n’est pas introduite directement dans ce passage. Le but de celui-ci est de rapprocher étroitement la gloire de Dieu, tel qu’il nous est connu maintenant, la gloire du Fils malgré son humiliation, et dans son humiliation même, enfin le don de l’Esprit au croyant, qui en a été la conséquence bénie.

 

3                    Méditation 3    «Des fleuves d’eau vive»    Jean 7:1 à 39

3.1   [Ne pas séparer ce qu’est Christ de ce qu’Il fait]

Le sujet qui va nous occuper ne peut être séparé des chapitres précédents. Il se relie aux incidents relatés dans le chapitre 7, et surtout à l’aspect particulier sous lequel le Seigneur s’y présente à nous. C’est d’ailleurs là le secret de toute connaissance de la vérité. L’enseignement divin ne nous est pas dispensé d’une manière sèche et dogmatique, mais avec amour. Il fait partie de ces révélations de Dieu qui ont Christ pour objet primordial, car Dieu veut que Christ soit le centre de toutes choses. Gardons-nous par conséquent de «forcer la vérité» ou de la sortir de la place qu’elle occupe dans les plans divins, et ne séparons jamais ce qu’a fait Christ d’avec ce qu’Il est à la gloire de Dieu. Nous ne ferons des progrès qu’à cette condition, même si ces progrès peuvent paraître lents à première vue. Car nous ne pouvons recevoir de bénédictions solides et durables que de Dieu directement. Au lieu d’acquérir la connaissance par des moyens purement humains, nous recevons la vérité par l’action de la grâce divine, nos coeurs sont formés par la Parole et nous entrons ainsi dans le courant des pensées de Dieu. En examinant à ce point de vue le chapitre que nous venons de lire, nous reconnaissons dans la déclaration du Seigneur Jésus touchant le Saint Esprit un caractère nouveau. Par rapport aux chapitres 3 et 4 de cet Évangile, il y a ici un progrès évident qui dépend comme toujours d’une manifestation plus complète de Christ. Car la connaissance du coeur s’accroît en raison du degré de cette manifestation en même temps qu’augmente la force puisée dans la Parole de Dieu.

3.2   [L’ordre de Jean 1 à 4]

Nous avons observé cette progression dans nos deux premiers entretiens et ici je dois appeler l’attention sur l’ordre admirable observé dans l’Évangile de Jean. Nous y contemplons Christ, la Parole, seul de toute éternité avec Dieu et nous pouvons le suivre jusque dans le royaume à venir, où sa gloire sera pleinement manifestée (chap. 1). Alors il répandra la joie là où régnaient la désolation et la stérilité, et il fera disparaître tout ce qui peut offenser Dieu, par le jugement qu’il exercera là où l’homme avait corrompu et souillé la maison de son Père, savoir à Jérusalem (chap. 2).

Nous sommes ainsi amenés jusqu’au royaume durant lequel Christ établira la gloire de Dieu ici-bas. Et c’est alors que se pose la question : Quel homme pourra avoir part à ce royaume de Dieu ? Le troisième chapitre nous donne la réponse et démontre que, de tout temps, Dieu avait en vue des âmes qu’il préparait pour le royaume à venir. Il révèle la forme sous laquelle cette nouvelle nature est communiquée quand le Fils de Dieu Lui-même est manifesté. Il n’est pas un des attributs divins, ni une grâce accordée aux hommes, qui ne resplendisse avec un éclat jusqu’alors inconnu, quand Christ apparaît. Il était la vraie lumière, et, si nombreuses et précieuses qu’aient été les bénédictions goûtées avant sa venue, le seul contact avec la lumière de Christ les revêt d’une forme nouvelle. Forme riche, harmonieuse et bénie, qui, sans rien changer à la substance de la vérité déjà révélée, la transforme et l’illumine. Dès le commencement, tous les saints de Dieu participaient nécessairement de cette nouvelle et divine nature capable d’entrer en communion avec Dieu. Mais maintenant ils savent qu’elle n’est autre que la Vie Éternelle, leur portion actuelle dans son Fils.

Mais il y a plus encore ! Le chapitre 4 nous a montré le Fils de Dieu abaissé, donnant le Saint Esprit ; non pas seulement une nouvelle naissance qui provient du Saint Esprit, mais le Saint Esprit Lui-même pour être en nous une puissance de communion avec le Père et le Fils. Le Christ, celui qui avait été annoncé, était rejeté, et c’est pourquoi les anciennes promesses faisaient place à des révélations touchant l’indicible et éternelle gloire de sa Personne. Ainsi cette réjection avait pour résultat de faire ressortir toute la gloire du Fils de Dieu, mais du Fils de Dieu manifesté sur la terre dans sa grâce parfaite. Il ne s’agit pas ici de quelque important docteur juif venant à Jésus, mais du Seigneur de gloire allant au-devant d’une pauvre pécheresse samaritaine et développant un sujet d’une grâce ineffable : le don du Saint Esprit, par lequel le croyant peut entrer dès maintenant en communion avec le Père et son Fils Jésus Christ. L’homme est souillé, mort dans ses péchés, et par sa nature incapable d’hériter du royaume de Dieu ; il faut pour cela une nouvelle naissance et il en a toujours été ainsi ; mais nous avons un privilège transcendant qui va bien au-delà de ce royaume, et dont rien ne nous sépare. Pourquoi Dieu fait-il cette extraordinaire révélation ? Parce qu’il veut honorer son Fils rejeté par Israël. Il faut que toutes choses soient soumises au Fils, et rien n’est trop grand pour être donné par Lui. La venue du Fils dans l’abaissement était une raison de plus pour hâter ce don du Saint Esprit. C’est pourquoi, percevant la gloire du Fils, notre coeur peut savourer l’amour du Père par la puissance du Saint Esprit que Jésus donne. C’est pourquoi aussi ce bienfait inestimable est la source de tout culte réel. Les choses anciennes naguère ordonnées de Dieu sont mises de côté ainsi que la «dévotion volontaire» de l’homme.

3.3   [Jean 6  et 7 — Le règne de Christ précédé par sa mort]

Nous abordons maintenant un sujet tout différent (chap. 7). Le Seigneur Jésus ne veut plus demeurer en Judée, parce que les Juifs cherchent à le faire mourir. Le peuple, aussi bien que ses chefs, est jaloux de lui. Leur haine est arrivée à son comble, et ils n’attendent pour la satisfaire qu’une occasion favorable. Autant que cela dépend d’eux, ils veulent éteindre cette lumière de Dieu, et seul l’accomplissement de ce dessein pourra les contenter. Comme la fête des Tabernacles était proche, ses frères le pressent de se rendre en Judée pour montrer ses oeuvres miraculeuses. Le Seigneur Jésus avait été peu à peu chassé de Jérusalem, cette cité qui était un centre de grandeur et détenait orgueilleusement un monopole religieux parmi les Juifs. C’était en Galilée qu’il avait fait le plus grand nombre de ses miracles, et il semblait impossible à ses frères qu’un homme capable d’opérer ces prodiges ne cherche pas la publicité. «Si tu fais ces choses, montre-toi au monde toi-même».

Mais qu’avait été l’enseignement de Jésus au chapitre précédent ? Il avait frappé à la racine toutes ces espérances en refusant d’être fait roi par les Juifs (v. 15). Le Seigneur leur avait fait du bien en multipliant les pains ; et il se peut que ce miracle leur ait rappelé l’attente du Messie d’après le Psaume 132, verset 15. Ils désiraient hâter l’établissement du royaume, car certainement le Roi était parmi eux. Le Seigneur y répond par un refus absolu, et lorsque le peuple persiste à s’adresser à Lui, il se sert du miracle qu’il vient d’accomplir pour montrer le but de sa mission, qui dans cet Évangile n’est pas d’être reçu comme le Christ. Il va sans dire que dès le commencement Dieu savait que les Juifs rejetteraient le Messie, et les prophètes l’avaient clairement prédit. L’offre fut faite et l’homme ainsi mis à l’épreuve ; mais si l’homme faillit, Dieu y trouva l’occasion de faire de plus grandes choses. Ce n’est pas que Jésus n’ait pas donné les preuves les plus convaincantes qu’il était le Messie. Mais l’Évangile de Jean le considère dans sa nature divine et dans sa gloire éternelle et essentielle. Il était le Rejeté. Des desseins d’une portée plus profonde s’accomplissaient alors, savoir, la rédemption par son sang.

Tous les éléments voulus paraissent réunis si l’on regarde aux circonstances extérieures : le vrai Roi, le vrai peuple, le vrai pays. Que manque-t-il donc ? Dieu n’est pas dans les pensées des Juifs, et le péché n’a pas été jugé en sa présence. Jésus au contraire ne cherche que la volonté et la gloire de Celui qui l’a envoyé. C’est pourquoi l’établissement prématuré du royaume aurait été une offense à Dieu. Jésus ne peut accepter le royaume avec l’homme dans son péché et sans que l’honneur de Dieu soit sauvegardé. Aussi le point capital du discours de notre Seigneur est-il celui-ci : qu’au lieu de s’élever pour prendre possession du royaume, il est descendu pour faire la volonté de Celui qui l’a envoyé. Et cette volonté est de sauver, de recevoir tous ceux qui viennent à lui. Car il ne vient pas ici-bas pour faire sa propre volonté, ni pour choisir les personnes qui lui sont agréables. C’est une question de vie éternelle et de résurrection au dernier jour. Après ces vérités étonnantes, Jésus en exprime une autre plus extraordinaire encore. Il était venu afin de donner sa vie pour le monde ; et à moins de «manger sa chair et de boire son sang», on ne pouvait avoir la vie. C’est donc le Fils de l’homme apparaissant dans l’abaissement et dans la souffrance qui prend la place du Roi que les Juifs attendaient, et qui devait amener avec lui la prospérité, l’abondance et le bien-être ici-bas.

Remarquons qu’en Jean 5 Jésus est considéré comme le Fils de Dieu travaillant de concert avec le Père pour donner la vie aux hommes. Ceux qui ne voudront pas recevoir Jésus trouveront en lui leur juge, car il est aussi le Fils de l’homme auquel le Père remet tout jugement. En Jean 6 nous avons une vérité plus profonde encore. Le Seigneur n’est plus considéré comme juge, mais comme Fils de l’homme venant mourir, donner sa chair à manger et son sang à boire. Merveilleuse manifestation de l’amour de Christ qui se montre divin au moment même où son humanité est le plus clairement manifestée. Quel autre que lui est venu mourir ? Toute cette gloire royale du Messie si longtemps attendue disparaît et s’efface pour la mort, parce qu’il faut avant tout que Dieu soit exalté, que le péché soit jugé, et que l’homme puisse être béni selon les desseins de Dieu. À cette condition seulement nous réalisons la communion avec Christ lui-même dans son amour et dans son renoncement. Ces paroles «manger la chair» de Jésus et «boire son sang» impliquent non seulement son sacrifice offert mais encore la communion de sa mort, la reconnaissance de cette sentence de mort qui en est le résultat et qui pèse sur tout ici-bas, car même la gloire du Messie s’éclipse pour un temps. Nous savons que cette gloire sera bientôt manifestée et que le règne de Jésus sera fécond en bénédictions, étant fondé sur des bases immuables, mais maintenant c’est la mort qui est devant Jésus, et c’est ce fait avec les résultats qui en découlent qu’il expose à la multitude. La mort du Christ, le Fils de l’Homme, nous ayant donc été présentée comme la base de toute communion véritable avec ceux qui sont à lui, nous avons au chapitre 7 la fête des Tabernacles qui était une figure de la glorieuse perspective de la promesse de Dieu.

Les frères du Seigneur le pressent de se faire connaître. Il leur semblait que le moment favorable était arrivé. Le Seigneur énonce cette solennelle vérité que «leur temps était toujours prêt». Ils étaient du monde, ils parlaient le langage du monde, et le monde les écoutait ; mais quant à lui son temps n’était pas encore venu. Quelle grâce infinie nous découvrons dans ces paroles : «mon temps n’est pas encore venu», si nous nous rendons compte de la gloire de Celui qui les a prononcées, lui qui a créé le monde, et qui, héritier légitime de toutes les promesses, a le droit de tout prendre, de tout posséder ! Et aussi quelle condamnation du pécheur dans ces mots : «votre temps est toujours prêt» ! Quelle sentence de mort portée sur toutes les notions humaines, car le temps de l’homme c’est le présent, et par conséquent il est toujours prêt ! Sa principale préoccupation consiste à s’exalter lui-même. C’est en fait le mobile de toutes ses activités. En contraste, ce qui doit nous faire admirer le plus la voie du Seigneur, c’est que sa puissance n’est ici pas en question. Ses frères «ne croyaient pas en lui» mais ils ne doutaient pas de cette puissance. Admettre que Jésus était capable de faire ce qu’il voulait n’était pas de la foi. Au contraire, l’incrédulité de ces hommes se trahissait de bien des manières. Ils n’avaient aucun sentiment de ce qui est dû à Dieu, aucune intelligence de sa gloire, aucune notion juste de la condition de l’homme. Ils ignoraient tout de la grâce qui était en Jésus, ou de la contradiction qui existait entre lui et tout ce qui l’entourait. Mais Celui qui possédait toute puissance pour changer en un clin d’oeil la face des choses attend l’heure convenable. Son temps n’était pas encore pleinement venu.

Ses frères montent à la fête, et nous voyons là se manifester les pensées des hommes quant à Jésus, puis les Juifs montrer leur incrédulité. Ils murmurent, ils raisonnent, mais leurs pensées sont celles d’hommes qui n’ont aucune connaissance de Dieu. L’intelligence naturelle est totalement incapable de s’élever jusqu’à l’amour de Dieu. Les idées humaines sont aussi impuissantes que l’être qui les conçoit, et elles portent l’empreinte de la sécheresse et de la mort. En Jésus demeurait toute la puissance, mais aussi quelque chose d’incomparablement plus précieux encore : un amour divin. Il vint dans la pleine prescience de l’humiliation suprême qui l’attendait, et quand les hommes cherchèrent à le faire mourir, son esprit sonda toutes les profondeurs de ce qu’il devait endurer. Rien ne pouvait le prendre au dépourvu ; tout était mesuré, tout était prévu ; malgré cela Jésus ne hâte pas le dénouement. Il s’attend à Dieu avec calme et sérénité. Il ne court pas au-devant des événements qui doivent faire éclater le danger qui le menace et consommer la ruine de l’homme. Ce n’est pas non plus du mépris qu’il éprouve pour ce que le monde veut faire. Car, hélas ! il s’agissait du triomphe éphémère de Satan et de la plus insigne de toutes les folies de l’homme, lequel supposait qu’on pouvait se défaire ainsi de Celui qui jetait le trouble partout ici-bas. Mais l’amour, Dieu Lui-même qui est amour, est dans toutes les pensées et les sentiments de Jésus. C’est pourquoi il attend que la fête soit commencée, et alors, coûte que coûte, il s’y présente.

Il commence par annoncer son prochain départ (v. 33 à 36), ce qui, en rapport avec notre sujet, a une grande importance. En effet, le don du Saint Esprit suppose la mort du Seigneur Jésus et son départ pour le lieu où l’homme ne pouvait le suivre. C’est pourquoi «en la dernière journée», la grande journée de cette fête qui était la dernière de l’année parmi les Juifs, Jésus se tint là, et cria, disant : «Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi, et qu’il boive».

3.4   [Le sens de la fête des Tabernacles]

Occupons-nous un instant de la signification de cette fête. Elle avait été instituée pour commémorer le fait que le peuple de Dieu, après avoir séjourné dans le désert, était maintenant introduit dans la terre promise. Cette fête avait lieu après la moisson et la vendange, lesquelles préfiguraient deux aspects du jugement de Dieu. Un premier jugement sépare les bons des mauvais : c’est la moisson. Ensuite vient la vendange, autre jugement terrible et inexorable, qui atteint tout ce qui est impie et rebelle envers Dieu. Dieu montrait ainsi à son peuple quand et comment il pouvait compter sur la délivrance. Attendre la gloire avant l’exécution du jugement était une folie. Il est nécessaire que le jugement ait son libre cours avant que la gloire ne resplendisse. Mais cette fête des Tabernacles ne ressemblait pas aux autres fêtes juives. Elle offrait une particularité qui mérite notre attention, savoir qu’elle n’était pas limitée à sept jours, division ordinaire du cours du temps ici-bas. Il s’y ajoutait un jour surnuméraire, en plus de la semaine entière qui marque le cycle habituel de la vie humaine. Ce n’était pas le sabbat, figure de ce temps de repos béni vers lequel, d’après la Parole, se tournent les conseils de Dieu concernant Israël et la terre (bien que le Seigneur ne perde jamais de vue dans ses desseins et dans sa pensée le repos qui reste pour le peuple de Dieu). Ce n’est pas au septième, mais au huitième jour que Jésus se montre, le jour, non de l’amour créateur, mais de la gloire de la résurrection. «Jésus se tint là et cria, disant : Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi, et qu’il boive».

3.5   [Un Christ glorieux introduit le don du Saint Esprit]

Il est évident qu’il ne s’agit pas ici de la vie conférée par l’Esprit de Dieu, ni davantage de la communion qu’il nous permet de réaliser avec Jésus le Fils de Dieu. Le point que le Seigneur met en évidence dans tous les détails de ce chapitre est celui-ci : la gloire qui lui appartient dès maintenant dans le ciel détermine l’introduction immédiate ici-bas du Saint Esprit répandu sur tout croyant, comme un fleuve irrésistible et abondant en bénédiction. C’est là quelque chose de tout nouveau. Seule la mort de Jésus pouvait avoir une telle conséquence. Quel témoignage Dieu rend ainsi à la valeur de l’insondable abaissement où descendit son Fils !

L’amour du Fils se complaît dans le don gratuit du Saint Esprit au croyant, afin que celui-ci puisse jouir de la communion avec le Père et le Fils. Et sans ce don ineffable, qui pourrait comprendre l’amour de Christ ou apprécier la majesté de sa Personne ? Prétendre entrer en communion avec le Fils par notre propre capacité serait nous placer sur le même niveau que lui, car même la nouvelle nature que nous avons reçue ne peut y prétendre. C’est au Saint Esprit seul qu’il appartient d’établir ce lien.

Ici, en Jean 7, Jésus n’est pas présenté en sa qualité de Fils de Dieu, mais comme le Fils de l’homme, celui qui, ayant été rejeté, devait mourir, mais ressusciter des morts, puis être glorifié dans les cieux. Et remarquez que ceci se passe avant l’exécution du jugement de Dieu, avant qu’un seul châtiment ne tombe sur l’homme, qu’il s’agisse de prendre à lui les sauvés en laissant les perdus, ou d’exercer une vengeance inflexible sur les religions de convention qu’il a en abomination. Mais avant ces actes judiciaires de la part de Dieu, le Fils de l’homme quitte cette terre, qui demeure dans une parfaite insouciance. Il monte au ciel, et, de ce ciel où il a pris place, il envoie le Saint Esprit pour constituer le lien divin entre l’homme ici-bas et l’Homme glorifié à la droite de Dieu. C’est ainsi que le coeur trouve ses délices par la puissance de l’Esprit, d’abord en se réjouissant de l’élévation du Sauveur, ensuite en rendant son témoignage au près et au loin : Voilà Celui que je possède et que je sais être ma vie. Il est mort sur la croix pour me racheter et me nettoyer de mes souillures. Et maintenant il a rompu avec cette scène terrestre, ayant été rejeté par le peuple même qui aurait dû le recevoir. Les promesses pour ici-bas ont été différées pour un temps ; mais celui qui en est le centre, l’objet et l’auteur en même temps que le Oui et l’Amen, attend le jour où elles seront pleinement accomplies ; car ce que Dieu a garanti ne peut ni changer ni faillir. La ruine de l’homme a été consommée dans la croix de Jésus. Mais Dieu se sert de l’intervalle qui sépare sa mort de l’accomplissement des promesses pour introduire un état de choses incomparablement plus élevé. Au lieu de Christ, le Fils de l’homme établissant son règne universel ; au lieu de la manifestation d’une gloire terrestre, un ordre de choses est introduit auquel l’homme n’aurait jamais songé. Jésus envoie le Saint Esprit du ciel pour faire connaître d’avance aux siens le séjour qui leur est destiné, de manière qu’ils apprennent dès maintenant à s’y habituer, si je puis ainsi parler. Il me fait don du Saint Esprit qui connaît si bien ce séjour de gloire, afin qu’il puisse élever toutes les pensées, toutes les aspirations, toutes les affections de mon coeur vers Celui qui m’y attend.

3.6   [Jean 7:37-39 — Des fleuves d’eau vive pour la soif du désert — L’avant-goût de la force et de la joie du ciel]

«Si quelqu’un a soif...» : cette invitation suppose d’abord que l’homme reconnaît le dénuement de son âme et se place au point de vue de Dieu. Il reçoit alors en Christ la réponse à tous ses besoins réels. Il ne s’agit pas de ce que feront les autres ; on vient à Christ pour soi-même, et il répond lui-même aux besoins individuels.

Rien n’est plus dangereux que les théories appliquées aux vérités de la Parole. Soyons sur nos gardes ! Ce sont nos âmes plus que notre intelligence qu’il nous faut satisfaire. Toutefois, si c’est avec sincérité que nous avons été amenés à Dieu, ne craignons pas de sonder les précieuses vérités divines.

Car si Dieu produit le sentiment de ces besoins, c’est afin de les satisfaire dans sa grâce infinie : «... qu’il vienne à moi, et qu’il boive. Celui qui croit en moi, selon ce qu’a dit l’Écriture, des fleuves d’eau vive couleront de son ventre». Ainsi l’âme qui a soif se désaltère, et trouve sa joie dans tout ce qu’accorde le Saint Esprit. Mais il y a plus encore, car Christ est maintenant ressuscité d’entre les morts et glorifié dans les cieux d’où il est la source de la puissance. Cette puissance, celle de l’Esprit, triomphe de tous les obstacles. Le monde reste sans doute un désert aride et désolé — mais cela ne rend que plus merveilleux ce Don ineffable. La scène terrestre n’est pas changée ; l’iniquité de l’homme subsiste ; l’inimitié du monde contre Dieu n’est nullement atténuée, au contraire elle a été pleinement prouvée par la mort de Christ. Eh bien, c’est au milieu d’un tel état de choses que le Saint Esprit est donné pour être non seulement une source de vie pour le croyant, mais des fleuves d’eau vive qui se répandront sur tous ceux qui l’entourent. Que les voies de Dieu sont admirables ! Comme il fait face d’une manière digne de sa gloire au mal qui est dans le monde, et remédie au triomphe apparent de Satan ! L’adversaire n’est jamais aussi complètement vaincu que lorsqu’il semble être arrivé à ses fins. La défaite apparente du Fils de l’homme était précisément le moyen par lequel il devait accomplir l’oeuvre de la rédemption, et par là prendre une position nouvelle. Dès lors il établit un lien entre le croyant et Lui-même par le Saint Esprit envoyé des cieux et se répandant en fleuves d’eau vive pour rafraîchir un monde aride et désert.

Permettez que je vous adresse quelques questions solennelles : Comment Jésus vous apparaît-il, et quelles sont vos relations avec lui maintenant qu’il est dans le ciel ? N’avez-vous rien de plus que l’espoir d’y être vous aussi un jour ? Assurément, c’est là une espérance aussi précieuse qu’elle est certaine ; et plus encore, de savoir que nous serons avec lui éternellement. Mais est-ce simplement une espérance ? N’y a-t-il pas dès maintenant une part pour le coeur, une puissance actuelle nous unissant à Jésus là où il se trouve ? Il me semble que c’est ce que le Seigneur voulait révéler aux siens. Il ne veut pas que nous nous contentions de désirer avec ardeur le jour de la gloire ; il veut en donner à nos coeurs l’avant-goût, et nous procurer dès à présent la force et la joie du ciel. Il veut que nous traversions le monde, non seulement comme ceux qui reçoivent, mais aussi comme ceux qui donnent selon la riche miséricorde de Dieu. Les croyants qui sont venus à Christ dans leur dénuement, et ont bu l’eau vive alors que tout en eux n’était que lassitude et tourment, ont reconnu que Jésus les avait comblés des vraies richesses, bien qu’il ait quitté ce monde et que leur position soit de plus en plus précaire et isolée. Ainsi la part actuelle des croyants offre un contraste frappant avec tout ce que les saints de l’Ancien Testament connaissaient ou attendaient ici-bas. Écoutez par exemple les soupirs et les aspirations des Psaumes. Étudiez les prophéties de Jérémie, d’Ézéchiel ou tout autre : la condition de ces écrivains sacrés est-elle la même que celle des disciples ? Ce n’est pas certes qu’ils ne fussent pas bénis ou honorés de Dieu. Mais ces saints de Dieu, malgré leurs visions ineffables de l’avenir, ne jouissaient pas quant au présent de cette puissance d’adoration et de témoignage.

Incontestablement les souffrances des chrétiens peuvent être plus poignantes encore que celles de Jérémie ou d’Ézéchiel, car l’Homme de douleurs, l’affligé des affligés, n’épargne pas aux siens cette association avec lui. Mais nous ne jouirons pleinement de Christ et de notre union avec lui que dans la mesure où le peuple de Dieu sera rejeté par le monde, où nous serons les objets d’un mépris inconnu dans les anciens temps, car aucun Juif n’a eu à subir ce qui assaille aujourd’hui le chrétien. Et plus on prend la place qui convient au chrétien, c’est-à-dire la place de Christ (car après tout le christianisme n’est autre chose que notre association par le Saint Esprit avec Christ), autrement dit plus on est uni à Christ par la puissance de l’Esprit, plus on est rejeté par le monde.

Mais d’un autre côté, quelle gloire, quelle joie, quelle bénédiction sont notre part dans une telle position ! Pourquoi les chrétiens sont-ils si souvent découragés et oublieux des liens qui les attachent au ciel ? Pourquoi ne trouve-t-on pas chez eux cette joie abondante qui a sa source à la fois dans Celui auquel ils appartiennent, et dans leur position céleste ? Parce que, n’ayant pas appris à contempler le ciel par l’Esprit, ils ne regardent pas la terre comme un désert, bien que les fleuves d’eau vive puissent découler d’eux. Ils oublient ce que Jésus leur a donné ; ils considèrent la terre comme un lieu désirable. Pourquoi, se disent-ils, Christ ne serait-il pas exalté maintenant ici-bas ? Pourquoi n’aurions-nous pas, lui et nous, un nom glorieux dès à présent ? Pourquoi ? Parce que son heure n’est pas encore venue, ni la nôtre non plus, étant donné que nous sommes un avec lui. L’heure de l’homme signifia un entier mépris pour Christ. Le rejet et la mort furent sa part. La nôtre est de n’être rien, d’être méprisés, haïs des hommes comme il l’a été. Telle fut la portion de Christ sur la terre, et assurément nul ne peut l’éprouver comme lui, mais du moins pouvons-nous par sa grâce nous attacher fortement à lui, et prendre ainsi dans une certaine mesure notre part de son opprobre.

C’est pour cela que le Saint Esprit nous a été donné. Voyez la force de cette expression : «des fleuves d’eau vive». La puissance du Saint Esprit remplit le coeur du racheté de la gloire dans laquelle Christ est maintenant. Quelle puissance peut mieux convenir au désert qui nous entoure dans toute son aridité et sa stérilité, sans une seule source où puiser, sans un point verdoyant où reposer notre regard, sans le moindre abri pour nos âmes ? Quand le sentiment du vide de ce monde a pénétré notre coeur, l’Esprit prépare et fortifie notre âme selon Dieu.

3.7   [Différence entre l’eau jaillissante (Jean 4) et les fleuves d’eau vive (Jean 7)]

Dans Jean 4 nous avons trouvé le Saint Esprit mettant le croyant en rapport avec le Fils et le Père, ce qui le place sur le terrain du culte véritable. Quelle est donc la bénédiction nouvelle et spéciale qui est promise ici ? Elle s’applique plutôt au service qu’au culte, car l’expression «des fleuves d’eau vive couleront de son ventre» suggère la pensée d’une effusion abondante. Mais elle suppose aussi que, par la grâce, le croyant est élevé dans une atmosphère supérieure à celle du désert qu’il traverse. Le racheté sans cesse rempli de Christ qui le fait jouir de sa paix reçoit la puissance communicative du Saint Esprit. Le ciel devient alors un séjour présent dont la grâce lui a ouvert l’entrée à cause de Christ qui y est déjà. Ainsi le Saint Esprit unit si étroitement le croyant au Seigneur Jésus, que tout ce que le monde peut lui présenter ne lui semble plus qu’un hochet misérable. En contrepartie cet Esprit lui révèle d’inépuisables richesses, telles que le coeur de l’homme ne saurait les imaginer. Et nous reconnaissons que, s’il nous est donné de nous les approprier, c’est uniquement par la grâce du Sauveur. En somme, ce qui nous est présenté dans ce passage n’est pas tant l’Esprit du Fils nous donnant de nous réjouir dans sa Personne et dans sa grâce aussi bien que dans l’amour du Père, c’est plutôt la puissance du Saint Esprit dépeinte par Celui qui est maintenant élevé dans la gloire afin de nous donner l’assurance que cette gloire est nôtre en lui, et de nous remplir tellement de sa plénitude que nous soyons en mesure de communiquer des bénédictions à autrui.

Bien que le sujet ne soit pas identique, il me semble que la différence que nous trouvons dans 1 Pierre 2, entre la sainte sacrificature (v. 5) et la sacrificature royale (v. 9), peut jeter quelque lumière sur le passage que nous étudions. Quelles sont les fonctions de la «sainte sacrificature» dont nous sommes revêtus ? Offrir des sacrifices spirituels. Ainsi consacrés, nous nous approchons de Dieu pour accomplir un service en rapport avec le culte du Seigneur. D’autre part nous sommes appelés une «sacrificature royale», et alors il n’est plus question de sacrifier à Dieu les louanges et les actions de grâces, mais d’annoncer les vertus de Celui qui nous a appelés des ténèbres à sa merveilleuse lumière. De sorte que l’une de ces sacrificatures s’exerce en louant Dieu par notre Seigneur Jésus Christ, tandis que l’autre a pour objet de manifester parmi les hommes l’excellence de ce Nom béni. Que le chrétien ne perde jamais de vue la dignité de cette vocation. Pour lui, chercher la gloire terrestre c’est en réalité s’avilir.

3.8   [Vie professionnelle et témoignage rendu à Christ]

La plupart des chrétiens pendant le cours de leur pèlerinage ici-bas sont dans l’obligation de gagner le pain quotidien pour eux et pour leurs familles. Et cela est bon, car peu d’entre nous seraient capables de supporter qu’il en fût autrement. Mais pourquoi ce travail nécessaire m’empêcherait-il de rendre un témoignage vivant d’amour et de fidélité à notre adorable Sauveur ? Toutefois pour le croyant ce travail est un gagne-pain, rien de plus. Aussitôt qu’on veut y attacher l’importance d’une vocation ou en retirer quelque honneur aux regards des hommes, le témoignage rendu à la gloire de Christ devient impossible. Nul doute que la grâce de Dieu ne puisse appeler des individus activement engagés dans des professions honorables selon le monde. Nous avons connu des hommes ainsi appelés de Dieu au moment même où ils entraient dans une de ces carrières chères au coeur naturel, et nous en avons vu quelques-uns faire preuve ensuite d’une grande simplicité de coeur. Nous ne disons pas qu’on ait tort de suivre ce genre de profession ; mais au nom de la gloire céleste de Christ, nous condamnons l’esprit dans lequel tout ce qui appartient au monde est organisé, et nous mettons en garde les enfants de Dieu contre la vaine gloire des hommes, contre le désir des grandeurs terrestres, contre la recherche de la bonne opinion du monde. L’heure de Christ n’était pas venue ; la nôtre ne l’est pas non plus. Si nous lui appartenons, nous n’avons que faire de la gloire de ce monde. Soyons convaincus que ces honneurs-là sont un déshonneur pour l’enfant de Dieu. Peu importent les biens que le monde nous offre ; quel besoin en avons-nous ? Toutes choses sont à nous. Nous jugerons le monde et même les anges. Au reste nous savons que les choses terrestres portent souvent l’empreinte de leur futilité et que les sages de ce monde admettent que le plaisir consiste plutôt à poursuivre qu’à atteindre l’objet de nos désirs.

Permettez-moi donc d’insister sur l’importance pour le chrétien (qu’il s’agisse de lui ou des siens) de se tenir constamment sur ses gardes quant au monde, le regard attaché sur Christ dans le ciel. Loin de moi la pensée que le christianisme impose à tous les croyants une uniformité d’occupations. La foi ne se manifeste pas nécessairement par l’abandon d’une profession, si l’on peut y demeurer avec Dieu, ou par la recherche d’un état qui soit en dehors de nos aptitudes. Ce n’est pas de la foi, mais un coupable dérèglement d’esprit. En vérité un seul mobile est digne d’un chrétien, c’est de tout faire en vue du Seigneur, que notre occupation journalière consiste à rédiger des actes notariés ou à réparer des souliers. Et si nous savons que nous accomplissons la volonté de Dieu, nous pouvons tout faire avec une bonne conscience et un coeur joyeux. Ce qui perd le chrétien, c’est d’oublier qu’il est sur la terre pour faire la volonté de Dieu et pour être un fidèle témoin d’un Christ rejeté par le monde, mais glorifié dans le ciel.

À l’inverse, quelle est l’ambition de l’homme du monde ? C’est de faire son chemin, d’accomplir quelque chose de grand. Et ce qu’il a pu acquérir aujourd’hui devient un marchepied pour obtenir demain de nouveaux honneurs. Il est naturel peut-être de souhaiter avoir une position plus brillante ou plus facile ; mais est-ce compatible avec l’attachement du coeur à Christ ? N’est-ce pas plutôt le signe qu’on lui préfère le premier Adam ? Toute la question est là. Si mon coeur appartient au second Adam, ne dois-je pas le montrer dans ma vie de chaque jour ? Ne faut-il honorer Christ que le dimanche ? Ce ne serait pas là assurément la loyauté que nous devons à notre Chef. Peut-être avez-vous été amenés par la grâce de Dieu à la connaissance de son amour pendant que vous occupiez une position regardée par le monde comme basse et méprisable ? Si vous pouvez demeurer avec Dieu en conservant cette position, quelle admirable occasion vous aurez alors d’exercer votre foi, une foi qui apprécie tout en fonction d’un Christ dans la gloire ! Il vous appartiendra en sondant la Parole de déterminer dans quelle mesure il vous sera possible d’honorer Dieu là où vous êtes. Car nous devons être ses épîtres lues et connues de tous les hommes. Et n’est-ce pas ainsi que par sa grâce des fleuves d’eau vive couleront de nous ? Nous ne manifestons nullement Christ quand nous étreignons avec force les biens que nous possédons, quand nous maintenons rigoureusement nos droits, quelques fondés qu’ils puissent être selon le monde ; quand nous résistons avec raideur à tout empiétement qui nous semble injuste. De même l’esprit de Christ n’est pas manifesté par un chrétien de condition dite inférieure qui profite avec avidité de toutes les occasions d’avancement qui peuvent se présenter. Que votre condition soit élevée ou modeste, l’occasion ne vous manquera pas de montrer ce que vous pensez de Christ.

La parole de Dieu seule peut nous diriger d’une manière infaillible, car notre propre sagesse n’est que folie. La volonté du Seigneur est tout. Il faut que la conscience chrétienne reconnaisse que, quelle que soit la position du croyant, chacun de nous peut faire la volonté de Dieu, peut être son serviteur, peut manifester que nous l’estimons infiniment au-dessus du monde. La bénédiction pour moi consiste à être satisfait du service que le Seigneur me donne à faire, quel qu’il soit. Quant aux circonstances qui doivent le glorifier, et qui conviennent à son serviteur, c’est à lui à en juger. Je les regarde simplement comme autant de moyens de publier ses louanges. Pour ce qui concerne ma profession, qu’elle soit honorée ou méprisée par les hommes, elle ne doit être pour moi qu’un gagne-pain. Ce point de vue n’est pas celui du monde. Traiter une profession honorable de gagne-pain ? Oui assurément ; un Sauveur crucifié ici-bas et élevé dans la gloire fait peu de cas du monde et de ce qui s’y trouve. Prenons un exemple. Je dois travailler comme cordonnier ; ai-je le désir d’être le premier cordonnier de Paris ? Supposez que je sois médecin. Mon ambition m’incite-telle à rechercher la plus nombreuse clientèle ? De semblables désirs proviennent-ils de Christ, et est-ce ainsi que nous honorons Jésus glorifié ? Est-ce de sa main que j’accepte mon travail, et pour lui que je le fais ? Si le Seigneur nous donnait réellement quelque chose à accomplir pour lui, notre amour s’appliquerait sans aucun doute à le faire le mieux possible. Loin de nous la pensée que les chrétiens doivent être négligents ou insouciants dans la manière de vaquer à leur occupation. Mais ce qu’il faut pour la foi, c’est la ferme conviction que Christ est le but de notre travail, que celui-ci soit important ou humble.

C’est ainsi que nous manifestons, même dans notre vie journalière, que nous ne vivons pas pour nous-mêmes en ce monde mais pour Celui qui est mort et qui est ressuscité. Alors nous aurons certainement pour nous la puissance du Saint Esprit. Précieux témoignage, bien qu’il soit rendu au milieu des choses passagères de ce monde, mais témoignage qui ne passera jamais. Nous ne faisons que traverser un pays étranger. Notre patrie est avec Christ et nous ne sommes que pour peu de jours là où le Seigneur lui-même nous a placés. Nous séjournons ici-bas aussi longtemps qu’il nous appelle à travailler pour lui. Nous campons au commandement de l’Éternel, et au commandement de l’Éternel nous partons (Nombres 9:18). C’est à lui à disposer de nous. Nous sommes au désert, mais, en attendant, au lieu de boire de l’eau d’un rocher, nous avons une source au-dedans de nous d’où découlent des fleuves d’eau vive. C’est la joie de Jésus qui se reproduit ici-bas — la puissance du Saint Esprit qui permet dès à présent au coeur de se réjouir en Celui qui est là-haut. Nous savons que nous lui appartenons, et ainsi les vanités de ce monde sont jugées pour ce qu’elles sont, c’est-à-dire comme l’appât dont se sert Satan pour séduire un monde condamné.

3.9   [Que Christ reste l’objet de nos coeurs]

Bien-aimés, dans quelle mesure nos âmes ont-elles ce but devant elles ? Je désire, par la grâce de Dieu, que les vérités qu’il a placées devant nous ne dégénèrent pas en une connaissance stérile. Plus que d’autres chrétiens, nous avons à nous méfier de ce piège. Dieu dans sa miséricorde a réveillé ses enfants en leur rappelant cette vérité, et en ravivant la foi qui a été «une fois enseignée aux saints». C’est là, sans doute, un grand privilège, mais il entraîne avec lui une sérieuse responsabilité et de graves périls. Qui sont ceux qui sont le plus exposés à perdre de vue cette vérité et peut-être à en devenir les adversaires déclarés ? Ceux-là mêmes qui l’ayant connue ont cessé de la réaliser et par conséquent de l’apprécier. Et comment peut-on la réaliser, à moins que Christ et non le moi soit notre premier objet ? Remplacez dans nos coeurs le Seigneur par des préoccupations personnelles touchant notre renommée ou notre bien-être, et aussitôt tout se corrompt jusqu’à la source. Dieu seul sait où s’arrêterait cette folie sans la grâce qui, après nous avoir pris quand il n’y avait pas dans nos coeurs la moindre étincelle d’amour pour Dieu, nous a gardés malgré toute notre misère, et qui peut encore empêcher les funestes conséquences de notre indécision et de notre infidélité. Dieu, qui a toujours Christ en vue et qui veut qu’il soit glorifié en nous, nous laisse assez de liberté d’action et de responsabilité morale pour montrer jusqu’où l’incrédulité peut nous entraîner. Mais il peut relever une âme, et c’est ce qu’il ne manque pas de faire. Puissions-nous toujours compter sur cette grâce pour nous garder aussi bien que pour nous relever. Qu’il nous apprenne à discerner la manière dont il juge les personnes et les choses, et à traiter avec sévérité tout ce qui tend à affaiblir la Parole, ou à abuser de la grâce pour diminuer la gloire du Seigneur Jésus Christ.

Veuille le Seigneur nous rendre humbles et nous maintenir dans l’humilité. Qu’il nous donne de le contempler continuellement dans la gloire, en sorte que tout ce qui est de ce monde soit jugé comme devant subir l’heure de la moisson et celle de la vendange, qui ne sont pas encore accomplies. Mais en attendant, notre joie, elle, est accomplie dans la glorification de Christ et dans le Saint Esprit qui nous a été donné avant cette heure. Nous connaissons Jésus dans la gloire céleste et nous savons qu’il a déjà envoyé le Saint Esprit pour nous faire participer dès maintenant à la richesse de cette gloire. Puissions-nous être ses fidèles témoins, même s’il faut pour cela que nous soyons brisés afin que les fleuves d’eau vive se répandent plus librement à la louange de la grâce et de la gloire de Dieu.

 

4                    Méditation 4    Le «Paraclet» ou le Consolateur    Jean 14:26 ; 15:26 ; 16:7 à 15

4.1   [Le Saint Esprit, plus qu’une puissance : une personne sur la terre]

Les chapitres que nous abordons maintenant présentent au sujet du Saint Esprit une vérité d’une si grande valeur en elle-même, et aussi d’une telle immensité dans ses conséquences que nous n’aurions pu en aucune manière la déduire des communications précédentes du Seigneur Jésus. Il ne s’agit plus seulement d’une source imprimant son propre caractère à la vie nouvelle donnée au croyant, comme au chapitre 3, ni d’une puissance qui opère intérieurement ou extérieurement, et cela dans le culte (chap. 4) aussi bien que pour le témoignage (chap. 7). Nous sommes ici en présence d’une Personne divine prééminente : le Saint Esprit présent sur la terre.

4.2   [Dieu glorifie Jésus à cause de la croix]

Or l’occasion de cette révélation explique une telle différence. Le Seigneur Jésus était sur le point de s’en aller, lui, la personne bénie qui avait appelé à lui les disciples et formé leur coeur pendant son ministère terrestre en leur révélant le Père. La scène allait se terminer par sa mort, dans laquelle Dieu serait infiniment glorifié. Comme il le déclare lui-même : «Maintenant le Fils de l’homme est glorifié, et Dieu est glorifié en lui». Pourquoi nomme-t-il Dieu et non le Père ? Parce que le péché était contre Dieu et devant Dieu ; il était par conséquent impossible que Dieu passe par-dessus. Sa nature morale devait se manifester dans toute sa force et toute son indignation contre le péché. Jésus, le Fils de l’homme, le Christ rejeté, prend le péché sur lui-même, devient responsable pour les iniquités de son peuple et acquiert pour Dieu sur la croix une gloire qu’il n’avait jamais eue auparavant et qu’il est impossible qu’il reçoive jamais une seconde fois. Dieu y fut glorifié, parfaitement et pour toujours. Dès lors et jusque dans l’éternité, Dieu a devant lui l’oeuvre à la fois grande et précieuse de témoigner sous toutes les formes possibles son appréciation des souffrances infinies dans lesquelles Jésus l’a glorifié. En premier lieu par la résurrection ! Ensuite Jésus, ressuscité d’entre les morts par la gloire du Père, prit sa place à la droite de Dieu dans le ciel. Rien d’autre n’aurait pu être pour lui un témoignage convenable de la valeur de la croix. D’autres résultats seront manifestés en leur temps. Aucune bénédiction passée ni à venir n’aura jamais été donnée qui ne résulte de la croix du Seigneur Jésus. Mais en même temps la croix a si parfaitement et entièrement satisfait la justice, la sainteté, la majesté et l’amour de Dieu — tout son caractère aussi bien que ses affections — qu’il n’a plus maintenant devant lui, pour ce qui concerne Christ et ceux qui le reçoivent, qu’une heureuse tâche : celle de satisfaire pleinement sa propre nature en bénissant selon tout ce qui est en son coeur. Cela seul explique tout ce qu’il fait maintenant. En vertu de cette gloire acquise à la croix, non seulement Dieu place Jésus à sa droite, mais il proclame son évangile, ce qu’il n’avait jamais fait auparavant — et il l’adresse à toute la création. Dieu est le même Dieu, et pourtant des milliers d’années avaient passé sur ce monde sans qu’il ait jamais fait annoncer aux hommes un pareil message. Il pouvait y avoir occasionnellement de bonnes nouvelles pour Abraham ou pour les enfants d’Israël ; mais jamais auparavant la bonne nouvelle de sa grâce n’avait été envoyée au loin à toute créature. Est-ce à dire que Dieu a commencé alors à être amour ? Certes non ! Ni Jésus Christ, ni sa croix, n’ont jamais produit l’amour en Dieu. Le caractère distinctif de l’amour divin est de n’être ni créé, ni causé, ni mis en action par ce qui est en dehors de lui. L’amour est dans la nature même de Dieu. L’amour y existerait même s’il n’y avait pour lui aucun objet, car ce ne sont pas les objets qui créent l’amour. Toutefois, selon la souveraineté de Dieu, son amour se manifeste, et c’est envers ceux qui sont les plus nécessiteux, les plus déplorablement coupables, les plus éloignés de lui-même, et les plus hostiles. Dieu peut dorénavant déployer son amour ; c’est la croix de Christ qui le justifie quand il le fait.

Mais ce n’est pas tout. Jésus disparaît de ce monde. Il fallait qu’il en soit ainsi. Le monde n’atteignait pas à ce que méritait son oeuvre. Tout ce que Dieu aurait pu y accomplir par sa providence, le don du trône de David et même la domination universelle du Fils de l’homme sur toute nation, tribu et langue, n’auraient pas été une récompense suffisante de la part de Dieu pour la croix du Seigneur Jésus. En conséquence, Dieu élève Jésus à sa droite dans une gloire céleste ; et c’est cet événement qui fournit l’occasion des incomparables enseignements de Jean 14.

4.3   [En attendant le retour du Seigneur, le Saint Esprit envoyé par le Père au nom de Jésus : un don digne de l’amour du Seigneur et digne de la croix]

Tout d’abord notre Seigneur présente la certitude de son retour. S’il s’en allait au Père, ce n’était pas que son amour pour ses disciples ait diminué. Il allait leur préparer une place. Aussi sûrement qu’il allait à la maison de son Père, il reviendrait et les prendrait auprès de lui, afin que là où lui serait, ils y soient aussi avec lui. Il leur avait manifesté le Père ici-bas. Ils avaient connu, ou ils auraient dû connaître, non seulement que le Père était en lui, mais que Lui était dans le Père. Il était une personne divine ; il était le Fils. Vérité essentielle, indépendante de son oeuvre ; mais en même temps qui donnait à cette oeuvre une valeur infinie. Maintenant il va plus loin et montre que pendant son absence dans la maison du Père, il fera aux siens un don digne de son amour et digne de la croix — une bénédiction nouvelle surpassant tout ce qui avait jamais été connu par l’homme sur la terre auparavant. Et voici comment il l’introduit : «Si vous m’aimez, dit-il, gardez mes commandements». Il ne voulait pas que leur vie et leurs affections se consument en inutiles regrets pour son absence ; il désirait par contre qu’ils prouvent leur amour d’une manière réelle et pratique — «gardez mes commandements». Lui, de son côté, prouverait son amour d’une manière parfaitement divine. «Et moi, je prierai le Père, dit-il, et il vous donnera un autre Consolateur, pour être avec vous éternellement, l’Esprit de vérité, que le monde ne peut pas recevoir, parce qu’il ne le voit pas et ne le connaît pas ; mais vous, vous le connaissez, parce qu’il demeure avec vous, et qu’il sera en vous» (v. 15 à 17). Et plus loin il le désigne de manière explicite. Il est «le Consolateur, l’Esprit Saint, que le Père enverra en mon nom» (v. 26). Remarquez ces derniers mots : «enverra en mon nom». Ce n’est pas seulement : «donnera». Pour parler de communiquer simplement de la puissance ou de fournir à l’homme une source divine de bénédiction jaillissant en lui, le verbe donner convient. Tandis qu’«enverra» s’applique à une personne consciente et consentante. «L’Esprit Saint, que le Père enverra en mon nom — dit Jésus — lui, vous enseignera toutes choses et vous rappellera toutes les choses que je vous ai dites».

4.4   [Le Saint Esprit : une personne envoyée, non pas une bénédiction répandue]

Arrêtons-nous quelques moments pour considérer qui est celui que le Père a envoyé au nom du Fils, du Seigneur Jésus. Lorsque l’Esprit Saint nous est présenté en figure comme répandu ou communiqué, il s’agit clairement de montrer la profusion de la bénédiction, la richesse, l’abondance et la prodigalité, si je puis dire, de ce que Dieu le Père donne maintenant pour la gloire de son Fils. Mais si grandes que soient les richesses du don et l’abondance de la grâce, nous avons ici, répétons-le, une pensée entièrement différente. Nous sommes en présence d’une Personne divine et non pas simplement d’une plénitude de bénédiction. Le langage même qu’emploie le Seigneur contribue à souligner cette grande vérité, car il savait qu’elle serait, hélas ! promptement oubliée par l’Église de Dieu.

4.4.1       [Effusions annoncées par l’Écriture]

L’Écriture nous enseigne qu’un temps viendra où les hommes ici-bas recevront une autre effusion de l’Esprit Saint. La pluie de la dernière saison est aussi certaine que celle de la première. Alors s’accomplira le beau type d’Exode 28 : le son des clochettes s’y fait entendre, non pas pendant que le Souverain Sacrificateur est au-dedans du lieu saint mais quand il y pénètre, puis de nouveau quand il en sort. Ainsi, de même qu’un témoignage a été rendu à la Pentecôte quand notre grand Souverain Sacrificateur fut entré dans le saint lieu, il y aura un autre témoignage de l’Esprit Saint, quand le Souverain Sacrificateur sortira pour apparaître «une seconde fois... à salut à ceux qui l’attendent» (Héb. 9:28). Aussi certainement que le son se fit entendre par la puissance de l’Esprit lorsque Jésus est entré dans les cieux, une nouvelle plénitude de la bénédiction de l’Esprit Saint sera répandue sur toute chair quand il en sortira (Joël 2:28 à 32). Mais avec cette différence que cet événement futur ne concernera pas le même corps de croyants qui avait reçu par l’Esprit Saint la première bénédiction de la grâce divine. Comme nous le savons, c’est l’ancien peuple de Dieu qui en sera l’objet. Dieu visitera de nouveau Israël en grâce. Il ne limitera pas, sans doute, la bénédiction à ce peuple. Mais de même qu’il a plu à Dieu maintenant d’appeler ses élus du milieu de toute nation sous le ciel, il en sera ainsi, d’une manière encore plus étendue au temps du second avènement de Christ et de son règne sur la terre.

4.4.2       [Caractère unique de la période chrétienne]

Reconnaissons-le toutefois, ces faits tels qu’ils sont annoncés par les prophètes seraient loin de nous apporter une pleine lumière relativement à l’Esprit de Dieu, aussi le Seigneur lui-même nous en explique-t-il la portée. Il ne s’agit pas simplement d’influences pour le bien de l’âme, ni d’une source jaillissante de la faveur divine, mais maintenant, pour la première et pour la seule fois, la présence personnelle du Saint Esprit est connue sur la terre, oui, l’Esprit Saint effectivement descendu du ciel ici-bas comme fruit de la rédemption et du départ du Seigneur Jésus pour le ciel.

Sans doute, conjointement avec cette présence personnelle, se manifeste une abondante distribution de puissance. Et nous savons aussi que bientôt, lorsque le Seigneur Jésus reviendra du ciel, il se produira une effusion plus grande encore, un déploiement beaucoup plus considérable de la bénédiction de Dieu. Mais où voyons-nous qu’il enverra l’Esprit dans ce temps-là ? Où trouvons-nous le Père envoyant le Consolateur au nom de Christ, le Fils ? À nulle autre période que celle-ci. Selon la parole de Dieu, l’économie chrétienne actuelle constitue l’unique époque et présente les seules circonstances et les seules conditions qui correspondent à la mission de l’Esprit sur la terre.

La clé de ces déclarations du Seigneur réside dans ce fait : la présence du Consolateur. Cette présence personnelle du Saint Esprit, mentionnée ici, est en rapport étroit avec l’absence personnelle de Christ après la rédemption, absence qui en est le fondement. Au contraire, le jour éclatant du Seigneur, ce jour qui vient, sera marqué, non par l’absence de Christ, mais par sa présence ; non par sa séance dans le ciel, mais par sa propre venue pour régner sur la terre ; et à ce jour-là ne se rattache aucune présence personnelle de l’Esprit. Il pourra alors y avoir une manifestation de puissance plus étendue, sinon plus profonde. Mais ce sera un état de choses absolument différent. Et l’une des différences les plus frappantes se trouve dans un fait qu’en passant nous pouvons mentionner ici : à savoir, que, dans ce jour-là, le Saint Esprit n’introduira personne dans le lieu très saint pour adorer. Cette activité qui est la sienne aujourd’hui aura pris fin. Le voile ne sera plus déchiré dans le jour millénial lorsque le règne du Seigneur Jésus Christ sera établi sur la terre.

4.4.3       [Le Saint Esprit pendant le millénium]

Certains peuvent être choqués que nous parlions ainsi d’un retour à un sanctuaire terrestre, à un voile de séparation, et à une sacrificature humaine aussi bien qu’au renouvellement des sacrifices extérieurs. Cependant rien n’est plus certain, si nous reconnaissons l’autorité des Psaumes et des Prophètes. Et quand ce jour viendra et que Dieu reprendra ses relations avec son ancien peuple Israël, il n’y aura plus de Pentecôte parmi les fêtes rétablies. La Pâque et la fête des Tabernacles seront célébrées mais non pas la fête des Semaines. En même temps aura lieu une effusion plus abondante de l’Esprit ; de telle sorte que certains dons extérieurs, communiqués au jour de la Pentecôte et par la suite, sont désignés sous le nom de «miracles (ou puissances) du siècle à venir» (Héb. 6:5). Pourquoi sont-ils ainsi appelés ? Parce qu’ils sont un spécimen actuel de cette énergie qui alors opérera sans entrave et fera connaître au vaste univers la délivrance que le Sauveur a accomplie en faveur de «toutes choses» aussi bien que de ceux qui croient. Les «puissances» conférées de la part du Seigneur par le Saint Esprit sont donc à juste titre appelées «miracles du siècle à venir» — miracles tels que la guérison des malades, des lépreux, la résurrection des morts, la vue rendue aux aveugles, l’usage de leurs membres aux impotents, etc. Ce sont là en effet autant d’expressions de cette puissance qui se déploiera librement et largement dans ce grand jour du règne du Seigneur. Il guérira alors toutes leurs maladies aussi véritablement qu’il pardonnera toutes leurs iniquités. En ce temps-là, il introduira et associera les deux bénédictions. Il est donc clair qu’il s’agit ici d’un état de choses bien différent de ce que nous possédons maintenant.

4.4.4       [Excellence du privilège chrétien]

C’est pourquoi, chers frères et soeurs, nous jouissons actuellement de ce privilège sans égal de la présence ici-bas du Saint Esprit, personne divine. Dieu l’accorde afin de publier l’excellente valeur et le bon plaisir qu’il trouve en l’oeuvre du Seigneur Jésus. Cette oeuvre qui a, sans nul doute, aux yeux de Dieu une valeur éternelle et infinie, comment se fait-il donc que, maintenant plutôt qu’en un autre temps, il en soit fait une estimation aussi extraordinaire et aussi divine ? Je crois qu’en voici la raison : le jour qui vient sera l’accomplissement de la promesse et de la prophétie touchant la bénédiction accordée au peuple de Dieu sur la terre. Ce peuple était terrestre, et, comme tel, les promesses le concernaient dans leur application littérale. C’est pourquoi ce jour sera celui où se réaliseront les promesses que Dieu avait expressément mises devant eux, le jour du peuple terrestre et de la terre (la terre d’Israël spécialement), comme centres de leur accomplissement. Mais Dieu ne s’est jamais limité à l’accomplissement pur et simple de ce qu’il avait promis. Et bien loin d’épuiser les richesses et d’atteindre le fond de la grâce de Dieu en saisissant les promesses, on constate en la sondant de plus en plus profondément que cette divine grâce va toujours au-delà des besoins de l’homme et de la terre elle-même (Rom. 5:20). Eh bien, cette grâce qui n’a jamais été définie dans la prophétie et dont la promesse n’a jamais été la mesure doit être nécessairement proportionnée à la profondeur de la bonté de Dieu lui-même. C’est parce que toutes ses promesses devaient être dépassées que Dieu a gardé par devers lui cette réserve bénie en la cachant «dès les siècles en Dieu» (Éph. 3:9). Et si maintenant le mystère n’est plus caché, c’est parce que dorénavant Dieu peut agir librement à cause de la croix. Il a, à sa droite, Celui qui a été rejeté par le monde. Considérant Christ entré là après avoir achevé l’oeuvre et apportant dans sa présence toute la valeur de la rédemption, Dieu ne se contente plus de donner selon la mesure du besoin d’un peuple terrestre ou selon les nécessités de ce pauvre monde. Il donne ce qui est digne de Lui-même et de Christ ; Il donne ce qui serait un honneur dans le ciel même. Qu’est-ce qui peut attester ou prouver cela mieux que l’envoi ici-bas de l’Esprit bienheureux, lequel connaissait si bien le ciel et pouvait partager tous les sentiments de Dieu le Père au sujet du Fils et de la rédemption ? De là la raison pour laquelle nous entrons aujourd’hui si pleinement dans cette bénédiction infinie.

C’est donc avec tout le poids de ces vérités nouvelles que le Seigneur Jésus Christ s’adresse à ses disciples. Il voulait les introduire dans les profondeurs jusque là impénétrables de la grâce du Dieu Sauveur et leur révéler la pensée même de Dieu le Père. Mais ce à quoi il engage son nom, ce qu’il promet aux siens de la part de son Père comme une ample compensation à la perte que son départ allait représenter pour eux, c’est de leur envoyer un autre «Consolateur» pour demeurer avec eux.

4.4.5       [Le Paraclet / Consolateur : nom et fonction]

Sans doute ce terme de «Consolateur» a-t-il rapport à notre affliction ? Il suggère l’idée d’une personne qui sympathise avec nous au milieu des détresses de ce bas monde. En effet, le Saint Esprit nous console et nous encourage. Mais cela n’est qu’une bien faible partie des fonctions dont le terme original «Paraclet» donne l’idée. Il s’entend de quelqu’un qui est identifié avec nos intérêts, soutient nos causes, s’engage à nous visiter dans nos difficultés, de quelqu’un qui, à tous égards, devient à la fois notre représentant et le grand agent personnel qui traite toutes nos affaires à notre place. Ce nom et cette fonction ont donc une portée incomparablement plus grande que celle des mots «avocat» ou «consolateur» : il signifie l’un et l’autre et bien davantage encore. En fait, il s’entend de quelqu’un qui est absolument et infiniment compétent pour se charger de tout ce qui peut être fait en notre faveur, quelle que soit la grandeur de nos besoins dans les difficultés ou dans les exigences de la grâce de Dieu pour la bénédiction de nos âmes. Tel est le Saint Esprit maintenant, et quelle bénédiction de le posséder ainsi ! Ceci d’autant plus que semblable bénédiction n’a jamais été connue auparavant et ne sera jamais connue de nouveau. La présence personnelle de l’Esprit ici-bas comme réponse à la gloire de Christ élevé à la droite de Dieu est un état de choses qui ne pourra jamais se renouveler. Tandis que le Souverain Sacrificateur est en haut, l’Esprit envoyé ici-bas fournit à l’homme un accès céleste dans sa gloire aussi bien que dans la rédemption. Et lorsque le Souverain Sacrificateur sortira pour occuper le trône terrestre, l’Esprit répandu alors rendra un témoignage approprié à la terre sur laquelle le Seigneur devra régner.

4.4.6       [Goûter la présence personnelle du Saint Esprit]

Si ces pensées restent présentes à notre esprit, quelle solennelle impression nous ressentirons en considérant le tragique état de la chrétienté ! N’est-ce pas elle qui était appelée à refléter au plus haut degré la gloire de Dieu ? Qu’est-ce donc qui pourrait être plus cher à l’Esprit, lequel est ici-bas pour glorifier le Fils en glorifiant le Père ? Et que pourrait-il y avoir de plus important pour les saints ? Ne vous étonnez donc pas si le diable tend tous ses pièges et déploie toutes ses ruses pour effacer et défigurer, pervertir et corrompre ce qu’il ne peut détruire. Or s’il est une chose qui plus qu’une autre devrait caractériser aujourd’hui les enfants de Dieu partout, quelle est-elle, d’après ces paroles du Sauveur ? N’est-ce pas la présence personnelle du Saint Esprit, la certitude que cette Personne divine est venue remplacer Christ ? Je veux bien que pour l’esprit de l’homme elle soit impénétrable, et pour les sens invisible, ainsi que cela est dit du monde dans ce passage. Évidemment, s’il s’agissait d’une chose que les sens et l’esprit puissent saisir, le monde aurait pour cela la même capacité que le croyant. Mais précisément le monde ne le voit pas et ne le connaît pas ; tandis que vous, vous le connaissez, dit le Seigneur. Nous le connaissons et nous savons qu’il est présent, d’abord sur la simple parole du Seigneur Jésus, mais aussi par la consciente jouissance de cette présence.

Il faut d’abord que je le reçoive simplement sur la parole du Seigneur. Mais quand j’ai reçu la vérité dans mon âme, suis-je privé du sentiment de sa présence ? Suis-je empêché de goûter la joie de l’Esprit Saint habitant soit en moi soit dans l’assemblée de Dieu ? Assurément nos coeurs peuvent bien attester le contraire. Seulement il ne suffit pas de croire pour que cela devienne une réalité. «Ne savez-vous pas», dit l’apôtre, «que votre corps est le temple du Saint Esprit ?» Ce qui signifie que ce n’est pas seulement une affaire de foi. Une âme est d’abord amenée à la bénédiction par la foi en Christ et rien de plus. Mais ne pas laisser de place pour la jouissance qui est ensuite trouvée en lui, tout réduire à une affaire pure et simple d’acceptation de la parole de Dieu concernant le Seigneur Jésus, ce ne serait de notre part qu’un bien pauvre témoignage à la puissance de l’habitation de l’Esprit ou à la révélation de la grâce du Sauveur. Que penserait-on d’un homme qui n’aurait d’autre assurance, concernant la réalité de la relation de sa femme avec lui, que le nom de celle-ci inscrit en face du sien au registre de l’état civil ? Cela dénoterait un état de choses bien extraordinaire et bien fâcheux. Et supposez-vous que la présence du Saint Esprit, Personne divine envoyée ici-bas expressément pour nous communiquer la puissance, la joie, la bénédiction et le rafraîchissement de la grâce de Dieu dans la connaissance de Christ, supposez-vous que la présence de cette Personne divine soit pour le nouvel homme une moins grande réalité que la consolation fournie par une épouse donnée à l’homme pour la vie présente ?

Sans doute, si mon âme une fois réveillée se contente d’accepter l’évangile et ne désire rien de la part de Celui qui est ici-bas pour glorifier Christ, je ne dois pas m’étonner si je reste au-dessous de la jouissance goûtée par d’autres. Le Saint Esprit ressent ce mépris fait à sa grâce, et ce qu’a d’outrageant cette disposition à être satisfait de la plus faible mesure possible dans la connaissance de Christ. J’éprouverai immanquablement une perte si je m’obstine à ne rien chercher de plus. En soi cette disposition est, quant au principe, rationaliste : elle réduit la parole de Dieu à une simple lettre ; c’est le coeur se refusant à avancer dans la jouissance de cette puissance et de cette présence bénie de l’Esprit, sous prétexte qu’il a cru l’évangile du salut sur la parole du Seigneur. Nous remarquons au contraire que la Parole prend tout particulièrement soin de montrer que la puissance de l’Esprit nous communique individuellement une assurance divine de notre relation avec Dieu. De même, dans l’assemblée de Dieu, j’ai le droit non seulement de croire que l’Esprit est là, mais aussi celui de goûter la douceur et les puissants effets de sa présence. C’est pourquoi, en Romains 8, passage qui se rapporte à la nouvelle position de l’âme en Christ, il n’est pas simplement déclaré que le Saint Esprit demeure en moi, croyant, mais qu’il «rend témoignage avec notre esprit, que nous sommes enfants de Dieu». Est-ce que cela signifie seulement qu’un homme croit l’évangile ? Sans doute est-ce bien par là qu’il nous faut commencer, c’est-à-dire par une foi pure et simple au témoignage que Dieu a rendu de sa propre grâce à l’égard de nos âmes, par une foi qui ne repose sur aucune émotion ou expérience, sur rien d’autre que sur la parole de Dieu dans la bonne nouvelle du salut par Christ. Mais supposez que je conclue que c’est là tout ce à quoi la grâce me donne droit, ne serait-ce pas une erreur presque aussi préjudiciable que celle qui consiste à confondre la foi avec les sentiments et avec les expériences ? Là où la foi est réelle, elle conduit nécessairement à une expérience profonde, tant pour ce qui est personnel à une âme que pour ce qui regarde l’Église de Dieu. Quoi qu’il en soit, j’espère que ces remarques suffiront pour éclairer notre sujet. Il m’a paru d’autant plus profitable d’y faire allusion que, par réaction contre la confusion ordinaire produite par la recherche d’évidences intérieures, un retour à la foi simple expose les âmes à limiter tout ce qui regarde le Saint Esprit à la simple parole du Seigneur concernant l’Évangile. Cette parole est bien donnée comme fondement ; mais il y a autre chose encore à rechercher. Et il nous faut veiller, en évitant une erreur, à ne pas tomber dans l’erreur opposée. Accepter l’Évangile sur la simple parole du Seigneur, c’est une chose bénie et admirable que le Seigneur nous enseigne d’autant plus clairement peut-être quand nous sommes criblés par l’Adversaire. Mais supposer que l’Esprit, personne divine descendue ici-bas et demeurant réellement en nous, ne communique à nos âmes aucune jouissance sensible de sa présence, c’est se tromper d’une manière tout aussi grave.

4.4.7       [Le Saint Esprit éternellement avec l’Église]

Le Seigneur commence par prier le Père, comme il l’annonce, en vertu de la position de médiateur qu’il prend dans ce chapitre : «Je prierai le Père, et il vous donnera un autre consolateur, pour être avec vous éternellement». Nous sommes ainsi en présence d’une vérité majeure concernant le Saint Esprit. Il n’est pas donné seulement pour une occasion ; mais lorsqu’il vient, c’est pour demeurer éternellement avec nous. Toute cette portion de l’évangile de Jean considère déjà la rédemption comme accomplie sur la terre et Christ exalté dans le ciel. Cette perspective donne ses dimensions à la bénédiction présentée ici. La rédemption n’y est pas vue dans l’une ou l’autre de ses nombreuses applications, mais comme fondement de la glorification de Christ en haut et de la descente du Saint Esprit sur la terre. C’est pourquoi, l’Esprit est promis ici, non pas pour un séjour limité, comme c’était le cas du Seigneur Jésus, mais bien «pour être avec vous éternellement».

Ces considérations nous font mesurer combien est tragique le tableau qui partout frappe nos regards dans la chrétienté. S’il y a une vérité qui a été particulièrement abandonnée, c’est bien celle de la présence personnelle du Saint Esprit. Alors que d’autres vérités, telles que la nécessité d’être né de nouveau, la valeur de l’oeuvre de Christ, la gloire de sa personne comme Dieu et comme homme, sont encore enseignées dans les systèmes de la chrétienté, celle qui nous occupe a été presque complètement perdue de vue. Certes, on ne met pas en doute l’existence ni la divinité de la personne du Saint Esprit. Mais je parle de sa mission personnelle sur la terre et de sa présence actuelle avec les chrétiens, soit individuellement, soit collectivement. Où trouve-t-on réalisé ou confessé ce qui est pourtant la grande vérité caractéristique du christianisme, une vérité qui devrait retentir au-dehors et gouverner l’Église au-dedans ? N’est-ce donc pas un sujet de solennelle réflexion et d’humiliation que de voir cette vérité (qui constitue la gloire du chrétien, la force de l’Église de Dieu et le privilège spécial en vue duquel il était avantageux que Christ s’en allât) à ce point méconnue dans les divers systèmes de la chrétienté ?

4.4.7.1              [Le Saint Esprit exclusivement avec l’Église]

La promesse du Seigneur aux siens comporte une autre précision. Le Consolateur sera éternellement avec eux. Nulle part l’Écriture n’enseigne que l’Esprit sera donné à tous les hommes. Seuls le reçoivent ceux qui font partie de l’Église. Les croyants de l’Ancien Testament n’ont même pas eu connaissance de cette vérité. Les saints du millénium ne la connaîtront pas non plus sous sa forme actuelle, bien qu’il doive y avoir alors, nous l’avons dit, une puissante effusion de l’Esprit sur toute chair. Israël même n’aura pas l’Esprit comme nous le possédons maintenant, quoique dans un jour prochain ce peuple doive être richement béni et même doué, je pense, d’une puissance extérieurement supérieure à tout ce qui a été jamais connu dans l’Église. Car le jour millénial sera témoin des manifestations les plus merveilleuses que la puissance divine ait jamais opérées en permanence au milieu des hommes dans ce monde. Je ne doute nullement que les efforts dont l’homme s’enorgueillit tellement à présent : ses inventions, ses sensationnelles acquisitions scientifiques et techniques, sa civilisation raffinée, tout cela disparaîtra du monde pour faire place à un état de choses incomparablement meilleur. Et Dieu ne permettra jamais que l’homme ait le dessus sur lui et ne voudra rien lui devoir. Ne nous imaginons pas qu’une époque de péché et de volonté propre, dans laquelle Jésus est rejeté et l’Esprit méprisé, puisse fournir à Dieu les matériaux convenables pour le règne de son Fils sur une terre réconciliée. Il me semble impossible que Dieu se serve des moyens stériles de l’homme dans ce jour éclatant. Tout comme autrefois Jéricho dut tomber et les anciens centres cananéens disparaître afin que Dieu en choisisse de nouveaux pour son peuple, pareillement dans le jour qui va venir, le Saint Esprit substituera sa puissance et son activité à celles de l’homme. Et il est évident qu’il n’y aura ni fléchissement ni interruption dans ce qu’il entreprendra, mais que le déploiement de sa puissance sera approprié au caractère du Seigneur régnant alors sur le monde, ainsi qu’aux instruments qu’emploiera le Saint Esprit.

4.4.7.2              [Le Saint Esprit en nous]

Actuellement l’Esprit opère d’une façon différente et pour d’autres fins. Envoyé ici-bas par Christ glorifié à la droite de Dieu, il amène les âmes dans une association vitale avec Jésus. C’est le Céleste nous rendant célestes par le Saint Esprit, lien divin entre Lui en haut et nous sur la terre. Voilà ce dont notre passage parle ici, et pour cette raison le contraste se trouve établi entre le croyant et le monde. Il est, ajoute le Seigneur, «l’Esprit de vérité, que le monde ne peut pas recevoir». Jésus insiste sur le fait d’une possession spéciale de l’Esprit et de sa présence personnelle qui est la part du chrétien seul et que le monde ne peut pas recevoir, «parce qu’il ne le voit pas et ne le connaît pas ; mais vous, vous le connaissez». Ce privilège appartient exclusivement ici-bas au croyant : «il demeure avec vous, et... sera en vous». Loin de leur donner simplement la jouissance d’une bénédiction transitoire, l’Esprit demeure avec eux ; et qui plus est, il est aussi «en eux». Ces deux vérités sont capitales. L’Esprit ne demeure pas seulement avec les saints comme occupant une position extérieure, ce qui est vrai dans une assemblée de croyants ; mais il est en eux. Chers frères et soeurs, retenons ce fait essentiel que le Saint Esprit demeure avec nous, que ce n’est pas par occasion seulement qu’Il nous visite, mais qu’il demeure réellement avec nous, afin que nous puissions continuellement regarder à lui. Mais en outre, ainsi que l’ajoute le Seigneur, «il sera en vous», ce qui implique la présence la plus intime qu’il soit possible de concevoir : l’Esprit de Dieu «dans» aussi bien que «avec» ceux auxquels il était envoyé, et cela «éternellement».

Les conséquences en sont ensuite développées. «Je ne vous laisserai pas orphelins», ajoute le Seigneur ; «je viens à vous». «Encore un peu de temps, et le monde ne me verra plus ; mais vous, vous me verrez ; parce que moi je vis, vous aussi vous vivrez».

Le Saint Esprit nous forme en un seul corps, unissant le croyant à Christ comme la Tête. Plus que cela : ici, c’est la communauté de nature qui est enseignée, et non, comme dans les épîtres de Paul, l’unité du corps. «Parce que moi je vis, vous aussi vous vivrez». Rien ne saurait être plus intime. Puis Jésus montre de quelle manière cela a lieu : «En ce jour-là, vous connaîtrez que moi je suis en mon Père, et vous en moi et moi en vous». «Ce jour-là» est venu ! Et ceci fait voir de nouveau combien cette présence actuelle du Saint Esprit diffère de l’effusion de l’Esprit pendant le millénium. Ce verset 20 sera-t-il vrai des saints de ce temps-là ? Il est clair qu’il n’existera alors rien de semblable. La base dont dépend la vérité qui nous occupe a été posée maintenant, et maintenant seulement. Christ a pris place en haut ; non pas seulement dans le ciel, mais, comme il le dit, «en nom Père». «En ce jour-là vous connaîtrez que moi je suis en mon Père...» Il ajoute : «et vous en moi», pendant que lui est là-haut, en même temps que «moi en vous», pendant que nous sommes ici-bas. Ce verset constitue donc la preuve décisive que notre Seigneur fait correspondre ce don merveilleux dont il parle avec sa présence dans le ciel. C’est alors seulement que se réalise notre association avec lui en haut par le Saint Esprit envoyé en bas. Lorsque le Seigneur Jésus Christ quittera le ciel et prendra possession du royaume, tous ces éléments seront changés. Un nouvel état de choses s’établira, en harmonie avec la position nouvelle que lui prendra. Autrement dit, c’est toujours en rapport avec la position occupée par Christ que le Saint Esprit agit ou est donné. À l’absence personnelle de Christ correspond la présence personnelle de l’Esprit Saint. Et comme c’est la présence personnelle de Christ qui caractérisera ce siècle à venir, l’action du Saint Esprit s’en trouvera nécessairement modifiée.

4.4.8       [Croire effectivement à la présence du Saint Esprit — Conséquences pratiques]

Je me suis attaché à comparer l’état de choses actuel avec ce qui a existé et ce qui pourra exister dans les jours à venir, de façon à faire ressortir le caractère spécial de notre bénédiction. C’est toujours en regardant à Christ que la foi entre dans la pensée présente de Dieu, dans ses conseils et dans ses voies. C’est pourquoi quand l’âme réalise clairement la présence de Christ à la droite de Dieu dans le ciel, chaque aspect de la vérité se trouve à sa véritable place. À l’inverse, lorsque nos âmes ne font pas de cette vérité la clef de voûte de notre relation avec Dieu aussi bien que de notre position vis-à-vis du monde, tout est perdu — j’entends quant à ce qui nous distingue comme chrétiens. Sans doute, il peut exister cette foi en Christ qui saisit le pardon des péchés et une certaine mesure de paix avec Dieu. Mais notre propos n’est pas de nous arrêter aux simples consolations de l’âme, ni même à la grâce qui nous fait traverser ce monde après nous avoir éternellement sauvés par Christ. Nous nous occupons de la gloire de Dieu et de ce qui répond à ses affections, de ce qui est bon et saint, source de puissance et de bénédiction pour le chrétien qui réalise sa relation avec Dieu. Assurément rien de cela ne sera connu si l’oeil de la foi n’est pas continuellement fixé sur Christ à la droite de Dieu. Avoir nos regards dirigés vers lui dans le ciel, voilà ce qui assure à l’Esprit sa liberté d’action dans l’âme. Et c’est pourquoi nous constatons que ceux qui ne croient pas à la présence personnelle du Saint Esprit ici-bas n’ont aucune intelligence de la position actuelle de Christ comme Tête de l’Église dans le ciel. Ils ne mettent pas en doute qu’il soit à la droite de Dieu. Ils déclarent formellement croire au Saint Esprit, ainsi qu’à la communion des saints. Mais il ne s’agit pas maintenant de répéter les paroles d’un formulaire ou d’un credo, telles qu’en établissent toutes les dénominations religieuses fondées sur des principes humains absolument indépendants de la présence et de l’opération de l’Esprit Saint dans l’assemblée. On peut dire que l’état actuel de la chrétienté sous toutes ses formes est caractérisé par l’incrédulité à l’égard de la principale vérité distinctive de l’Église, savoir celle qui concerne le Saint Esprit.

Il est de la plus haute importance que les enfants de Dieu se pénètrent de cette vérité. La question n’est pas de savoir comment et en quel endroit ils ont pu recevoir du bien pour leurs âmes. L’Esprit de Dieu bénit parmi et souvent malgré ces systèmes. En tous il se trouve des âmes chères à Christ ; en tous on rencontre non seulement des membres vivants, mais des serviteurs du Seigneur, tout au moins partout où les grands fondements se rattachant à la Personne ou à l’oeuvre de Christ sont reconnus en quelque mesure. La question consiste pour chacun à se demander : «Suis-je là où le Saint Esprit envoyé du ciel peut agir librement, conformément aux intentions du Seigneur et à sa Parole ? Suis-je là où le fait de sa présence est cru ? L’assemblée dont je fais partie est-elle l’expression de la présence du Saint Esprit ?» Ce n’est pas des prédications que je veux parler, ni même des réunions pour la lecture en commun et la méditation de la Parole de Dieu. Celles-ci ont leur place ; mais je fais allusion aux occasions dans lesquelles l’Église, c’est-à-dire les membres du corps de Christ, se rassemblent au nom du Seigneur Jésus, soit pour le culte qui est la grande occasion centrale et distinctive, soit pour l’édification. Or dans ces occasions-là, avons-nous présente à nos âmes cette vérité transcendante qu’au milieu de nous il en est Un qui est compétent pour toutes les difficultés ; Un qui prend soin de la gloire de Christ ? Oui, Un qui, à cause de l’amour qu’il porte à Christ, et de la valeur qu’il attache à son oeuvre, soutient nos intérêts, nous comble de toutes sortes de joies, nous aide dans nos afflictions, nous fortifie contre les pièges du diable, nous rend capables, par sa propre grâce, d’être simples, humbles, vrais et fidèles ; enfin, Un qui s’occupe de nous sur le principe de la Parole de Dieu lorsque nous manquons à ce qui est dû à la Personne de Christ ou à la vérité de Dieu.

Or, je maintiens que de toutes les vérités divines concernant le corps de Christ, aucune n’est plus importante ni plus nécessaire que celle-là. Et la raison en est bien simple. Si l’on croyait vraiment qu’il existe une Personne divine envoyée du ciel, et que cette Personne est réellement présente avec nous pour diriger l’assemblée, pensez-vous que le comportement des chrétiens ne serait pas bien différent ? Je ne veux pas parler seulement de l’opération de l’Esprit ; car il peut agir dans une chapelle méthodiste, par un ministre anglican, ou par un pasteur de l’Église réformée. J’admets pleinement que, sans l’opération de l’Esprit Saint, nulle âme ne pourrait être convertie ou recevoir aucune vérité de la Parole de Dieu. Ainsi l’opération de l’Esprit est aussi diverse que sa propre grâce, souveraine et variée ; ou, suivant la comparaison du Seigneur, semblable au vent qui souffle où il veut. Mais ceci est sans rapport avec la reconnaissance de la présence de l’Esprit Saint et de son action libre et souveraine dans les membres qu’il lui plaît d’employer au sein de l’assemblée chrétienne.

Les chrétiens connaissent-ils la réalité de cette présence de l’Esprit sur laquelle on peut compter ? Assurément l’Écriture est claire à ce sujet et les saints sont appelés à reconnaître ce fait de façon à y trouver leur bénédiction. Or, peut-elle être pleinement connue, à moins qu’elle ne soit aussi crue ? Hélas, tous les chrétiens individuellement n’ont pas une mesure complète de foi. Tous ne sont pas parvenus à une plénitude d’assurance et de simplicité dans cette confiance qui nous convient relativement à la présence du Saint Esprit — confiance d’autant plus souhaitable qu’il s’agit d’une des vérités les plus élevées, quoiqu’elle soit une des plus simples après tout. Assez souvent en effet, les plus hautes vérités deviennent les plus simples une fois qu’on les a saisies. Que pourrait-on concevoir de plus simple, par exemple, que la présence de Christ à la droite de Dieu dans le ciel ? Cependant n’est-ce pas là le centre même du mystère, la source de toutes les bénédictions spirituelles que Dieu nous a données en Lui ? De même, je ne connais rien de plus simple et de plus profond à la fois que la présence du Saint Esprit sur la terre, concordant avec la séance de Christ à la droite de Dieu. Tout chrétien, où qu’il se trouve, devrait être versé dans la connaissance de ces grands faits. Et je sens que Dieu nous a donné cette charge sérieuse de travailler à l’instruction des enfants de Dieu où que nous les rencontrions, afin que, comme ils ont reçu Christ, ils croient aussi réellement en la présence du Saint Esprit sur la terre. Mais tout en ayant ce sentiment, ce n’est pas une raison pour exiger de chacun de ceux qui sont reçus qu’il possède une connaissance préalable ou une foi exercée à l’égard de cette présence de l’Esprit. Nombreux sont les membres du corps de Christ qui sont bien faibles dans cette connaissance et qui n’en mesurent guère le prix. Mais aussi longtemps que l’assemblée comme ensemble est dirigée par l’Esprit, aussi longtemps que Sa présence est reconnue sans empêchement fixé ou sanctionné ; aussi longtemps qu’on n’a pas recours à des plans humains, règles ou arrangements qui gênent l’action du Saint Esprit, aussi longtemps qu’il en est ainsi, tous les enfants de Dieu peuvent y être entièrement heureux. On peut bien se tromper, sans doute ; nous sommes tous sujets à errer. Mais dans ce cas, notre consolation est de savoir qu’il est présent avec nous, qu’il est seul à même de redresser toutes les erreurs, et que, dans sa propre grâce, il est descendu du ciel dans l’intention expresse de s’occuper des saints. C’est pourquoi nous ne devons jamais désespérer, quelles que soient les difficultés. Et nos âmes ne devraient jamais abandonner cette confiance que le Saint Esprit, présent avec nous et en nous, saura pourvoir à tous les empêchements et à tous les dangers. Qu’il nous suffise d’avoir foi en Lui et d’invoquer le nom du Seigneur. Soyons assurés que l’Esprit est ici dans le but, je ne dirai pas d’honorer notre foi, mais dans le but bien plus sûr et plus excellent de glorifier Christ. À ceci il ne peut jamais manquer. En même temps, si la foi en sa présence est la grande pensée de la réunion dans son ensemble (bien que ce puisse ne pas être la pensée dominante de chaque enfant de Dieu présent) on fera l’expérience de sa puissance divine. Inversement, si l’assemblée n’est pas gouvernée par cette grande vérité, il est évident qu’on pourra y introduire toutes sortes de règlements humains qui seront en contradiction avec l’action du Saint Esprit dans ces mêmes réunions. Nous aurons l’occasion de revenir sur ce sujet en considérant les Épîtres. Je n’y fais allusion ici que pour le lier, en passant, avec Jean 14, comme montrant la souveraine importance de cette grande vérité de la présence personnelle du Saint Esprit.

Permettez-moi de renouveler ici ma question. Si vous admettez qu’un chrétien, quel qu’il soit, croie à la présence d’une Personne divine, ne pensez-vous pas que pour lui toutes choses seront gouvernées d’après une vérité aussi considérable ? S’il s’agissait seulement d’un chef ou d’une personnalité parmi les hommes, aurions-nous la présomption, vous ou moi, de prendre en sa présence des décisions qui ne relèvent que de lui ? À supposer qu’un souverain traverse ses États, ou visite une de ses administrations, le premier devoir de chacun de ses subordonnés ne serait-il pas de lui rendre l’honneur et le respect ? En tout cas partout où existent l’intelligence et le sentiment vrai de ce qu’est la volonté de Dieu en matière d’autorité terrestre, il est évident que nul homme qui recevrait le chef de l’État dans sa maison ne pourrait ne pas en tenir compte et se conduire comme si celui-ci n’était pas là.

Eh bien ! chers frères et soeurs, ce qui est vrai de notre propre maison l’est à plus forte raison de celle de Dieu, c’est-à-dire de l’Assemblée. Assurément si quelqu’un peut y agir de plein droit, c’est bien Celui qui est Dieu. En conséquence, il est évident qu’il ne saurait y avoir la foi en la présence du Saint Esprit sans qu’on Lui reconnaisse dès lors la primauté et qu’on s’attende à son action dans l’Assemblée. En général ce n’est pas cette autorité du Saint Esprit qu’on met en discussion, car de fait le raisonnement habituel est le suivant : on admet que dans les jours primitifs de l’Église, il y avait des apôtres, des miracles, une puissance divine à l’oeuvre, mais qu’à présent tout est changé. Ce qui revient à dire pratiquement qu’une partie des Écritures se trouverait aujourd’hui périmée. Aussi, lorsque les personnes qui raisonnent ainsi parlent du Saint Esprit, elles sous-entendent qu’Il se confond avec les grandes énergies et les serviteurs remarquables qui ont existé autrefois. Mais elles ne croient pas à la présence sur la terre d’une Personne divine qui a daigné, pour la première fois, descendre du ciel pour agir au milieu des saints assemblés pour adorer et prendre la Cène du Seigneur, ou accomplir quelque autre acte de culte ou d’édification chrétienne. Et la preuve qu’on n’y croit pas, c’est que tous les arrangements et précautions sont pris par l’homme pour que la machine fonctionne précisément comme s’il n’était pas là. Ils espèrent que Dieu bénira les moyens employés, agira par des instruments qui ont été arbitrairement établis ; mais le but de toute cette organisation est de faire marcher les choses aussi bien que possible dans l’ignorance évidente de la présence personnelle de l’Esprit dans l’assemblée. Or, il n’est personne qui oserait agir de la sorte s’il avait le sentiment que seulement un auguste personnage humain est présent. Cette présence suffirait à apporter un changement au ton et aux habitudes ordinaires. À plus forte raison, si au lieu d’un personnage humain, on réalise que c’est une Personne divine qui est présente ; alors, ce qui en résultera : la révérence, la conscience de son amour, la soumission à sa direction, ne sera de notre part que l’expression légitime de cette foi.

Nous qui sommes redevables au Seigneur de tant de bénédictions, nous avons besoin de veiller attentivement à ce que, quand «nous nous réunissons ensemble» nous agissions en ayant par la foi conscience de la présence du Saint Esprit. Qu’elle soit la pierre de touche de nos voies et de notre comportement. Il suffit quelquefois de bien peu de chose pour trahir la vraie mesure de notre foi en sa présence réelle. Prenons-y garde si nous proposons une hymne, si nous prions, si nous prononçons une parole, ou enfin quoi que nous fassions. Le Seigneur veuille que nous ne jetions pas de discrédit sur cette précieuse vérité qu’il a donnée à nos âmes. Je suis persuadé qu’il n’existe pas d’attaque, pas d’opprobre du dehors, pas de persécution de la part des ennemis, pas de dénigrement de la part des faux frères, pas de moquerie de la part du monde qui puissent jamais renverser ceux qui ont foi en la présence du Saint Esprit. En revanche, hélas, la pauvreté de notre foi pratique, ainsi que nos fréquents et affligeants manquements, ouvrent la porte à l’ennemi. Et c’est de cela plus que de tout le reste que Satan se sert comme pierre d’achoppement pour ceux qui, dans l’état actuel de confusion et d’agitation des systèmes de la chrétienté, cherchent ici et là un port de sûreté au milieu de leur désarroi. Que Dieu nous accorde, aux frères et aussi aux soeurs, de ne pas oublier à quelle place de dignité et de responsabilité nous avons été appelés. Veillons à ce que notre esprit, notre tenue, nos regards même et nos paroles, s’il nous arrive d’ouvrir la bouche, ne se trouvent jamais en discordance avec la foi en la présence du Saint Esprit.

 

4.5   [Mission du Saint Esprit selon Jean 15 : Il rend témoignage au sujet de Christ]

Avant de terminer, nous dirons quelques mots des deux autres chapitres. La fin du chapitre 15 présente l’Esprit Saint, le Consolateur, sous un point de vue légèrement différent du chapitre 14. «Quand le Consolateur sera venu, lequel moi je vous enverrai d’auprès du Père, l’Esprit de vérité, qui procède du Père, celui-là rendra témoignage de moi. Et vous aussi, vous rendrez témoignage ; parce que dès le commencement vous êtes avec moi». Le point particulier enseigné ici est le caractère céleste du témoignage de l’Esprit. Selon le chapitre 14, l’Esprit rappelle les choses que Jésus a dites (v. 26). Suivant le chapitre 15, il rend témoignage au sujet de Christ lui-même. Les disciples rendent témoignage, parce qu’ils étaient avec lui dès le commencement. Et maintenant le Saint Esprit vient et leur apporte du ciel un témoignage complémentaire. Ainsi, c’est le Saint Esprit qui descend du ciel, lui qui connaît la place et la gloire dans lesquelles Christ a été reçu. Il leur est expressément envoyé, non seulement pour leur rappeler ce qu’ils avaient vu et entendu sur la terre, mais aussi afin de leur apporter, pour le développement de leur connaissance et la joie de leurs âmes, ce que lui seul pouvait dire de la gloire céleste de Christ. En un mot, le Saint Esprit est vu ici comme apportant une connaissance originale, un nouveau et céleste témoignage concernant Christ, sans que les disciples perdent le témoignage terrestre qu’ils avaient reçu préalablement et dans lequel le Saint Esprit vient au contraire les fortifier comme témoins de Christ.

4.6   [Mission du Saint Esprit selon Jean 16]

4.6.1       [Mission par rapport au monde (convaincre…)]

Au chapitre 16, nous avons une déclaration qui va plus loin encore, concernant l’Esprit de Dieu. Notre Seigneur avait dit à ses disciples, au chapitre 14:28, qu’au lieu de s’attrister de son départ, ils auraient dû s’en réjouir : parole particulièrement touchante, parce qu’elle montre combien le Seigneur apprécie notre amour et combien il compte sur la joie exempte d’égoïsme qu’il nous convient de trouver dans son propre bonheur et sa propre gloire. Assurément, c’était pour lui une heureuse transition que de passer des plus profondes douleurs de la croix à la présence de Dieu le Père au ciel. Est-il étonnant dès lors que le Seigneur attende que les siens portent de l’intérêt à ce qui le concerne, et qu’ils se réjouissent de ce que lui s’en va au Père, quoique ce soit en soi une grande perte pour eux ? Mais maintenant il présente l’autre côté de la vérité, et leur dit que, dans un sens, c’est aussi pour eux-mêmes qu’ils devraient se réjouir. La tristesse avait rempli leur coeur, mais lui leur déclare : «Toutefois, je vous dis la vérité : Il vous est avantageux que moi je m’en aille». Le chapitre 14, annonce que c’est avantageux pour lui, le chapitre 16 montre que c’est avantageux pour eux, parce que s’il ne s’en allait pas, le Consolateur ne viendrait pas à eux. «Si je ne m’en vais, le Consolateur ne viendra pas à vous ; mais si je m’en vais, je vous l’enverrai». Ainsi, nous voyons que, sous différents aspects, le sujet de la mission personnelle du Saint Esprit est commun à tous ces chapitres. «Et quand celui-là sera venu, ajoute le Seigneur, il convaincra le monde de péché, de justice et de jugement». En premier lieu nous trouvons ici quelle est la position que prend l’Esprit vis-à-vis du monde. C’est à bien des égards celle de la loi. Dans les dispensations de Dieu envers Israël, la loi était le grand censeur. Maintenant le Saint Esprit prend sa place, et au lieu de limiter son action à un peuple particulier, il vient pour «convaincre le monde». Le monde pouvait être moral, ou religieux, ou zélé pour la loi ; mais l’Esprit le convainc de péché (non seulement de péchés, les actes, mais de péché, son état), et de justice, et de jugement. «De péché», non parce qu’ils avaient enfreint la loi, mais parce qu’ils ne croient pas au Seigneur. «De justice», non parce que Christ avait gardé la loi pour eux, mais «parce que, dit-il, je m’en vais à mon Père, et que vous ne me voyez plus». La justice maintenant est inséparable de Christ. Il est la seule justice qui soit valable pour l’âme aux yeux de Dieu. Je ne parle pas de ce qui peut avoir de la valeur parmi les hommes au point de vue social. Cela, sans doute, a sa place. Mais maintenant j’ai en vue l’éternité, et ici Christ seul est la vie, seul le chemin de la vie. C’est pourquoi ne pas croire en lui est une chose fatale et sans appel. Quelque apparence de justice qu’il puisse y avoir parfois dans le monde, il n’y a réellement pas d’autre justice devant Dieu que celle de Christ, attestée et caractérisée par sa glorification à la droite de Dieu le Père. C’est justice que le Père ait placé là le Christ que la terre a rejeté. Si nous sommes faits justice de Dieu, par grâce, c’est en Christ, qui a reçu du Père honneur et gloire en haut (voyez 2 Cor. 5).

Mais une autre et très solennelle vérité s’ajoute à ce verset 10. «Et que vous ne me voyez plus», dit le Seigneur. Le monde a perdu Christ. Jésus est venu, non pour juger, mais pour apporter la bénédiction. Il avait tout pouvoir et il ne dépendait que de lui d’introduire le royaume, pour autant qu’il s’agissait de sa propre puissance et de sa propre gloire. Mais l’état du monde par rapport à Dieu était tel qu’introduire le royaume eût été, d’une part, faire peu de cas du péché, et en même temps, traiter légèrement la gloire de Dieu qui avait été totalement compromise. C’est pourquoi en fait, bien que le Messie fût venu et qu’il ne se trouvât en lui ni tache ni défaut, bien que l’homme fût responsable de la manière dont il recevait Christ, néanmoins, l’homme étant coupable devant Dieu, il était impossible moralement que le royaume fût établi alors. C’eût été la négation de la ruine de l’homme et de la gloire de Dieu, chose que Jésus ne pouvait sanctionner. C’est pourquoi dans cet évangile, Jésus ne se présente jamais comme le Christ. D’autres pouvaient le désigner comme tel, mais lui ne le fait jamais (sauf en reconnaissant la vérité quand elle est confessée). En effet, dans l’évangile de Jean, Christ a toujours conscience de son rejet comme Messie, bien qu’il soit en même temps le Fils unique de Dieu. De là vient que, quoiqu’il soit sur la terre, qu’il accomplisse la prophétie et que d’autres le désignent comme le Christ ou le Fils de David, il se donne à lui-même un autre titre, celui de Fils de l’homme. On trouve continuellement en lui, le sentiment noble et serein de sa gloire personnelle, gloire qu’aucun rejet, aucun opprobre de la part de l’homme ne pouvait ternir un seul instant. C’est pourquoi les bénédictions qui nous sont propres sont fondées sur sa personne rejetée, mais excellente et glorieuse (voyez Matt. 16), et répondent à sa gloire comme Homme exalté dans la puissance de résurrection du Fils de Dieu.

Ainsi donc, dans le temps actuel, l’Esprit de Dieu remplit vis-à-vis de ce monde une fonction en harmonie avec la position de Celui auquel il rend témoignage. Et il fait des Écritures, pour ainsi dire, le texte de son témoignage à Christ. D’où il résulte que le monde, qui ne croit pas en Christ, est convaincu de péché, de justice et de jugement. La justice est hors de vue et ainsi on en fait peu de cas. L’exécution du jugement est également différée ici-bas où le monde marche dans sa volonté propre. Mais la croix, aussi bien que l’exaltation de Christ, est la preuve la plus positive que le prince de ce monde est jugé aux yeux de Dieu. Ce monde comme tel, n’a jamais été digne de l’attention du croyant depuis la croix de Christ. Jusque-là Dieu a manifesté envers lui une longue patience, pleine de grâce. Depuis lors, Dieu regarde ce monde comme son ennemi. Le croyant qui a de l’intelligence sait, lui aussi, que le monde est en effet l’ennemi mortel du Père. De même que la chair a été condamnée, le monde l’a été pareillement ; le caractère de l’un et de l’autre ayant été déterminé par la croix de Christ. L’Esprit rend ce témoignage vis-à-vis du monde ; et de quelle manière ? Non pas en y habitant selon la doctrine qui prétend que tout le monde possède l’Esprit ; mais, bien au contraire, en se tenant en dehors du monde. Si le monde avait cru en Christ, le Saint Esprit y aurait demeuré. Mais le monde ne croyant pas, le Saint Esprit se tient en dehors et par conséquent il convainc le monde, au lieu d’y demeurer comme un consolateur. Ce n’est que parmi les saints et dans l’Assemblée qu’il peut faire son habitation.

4.6.2       [Mission par rapport aux disciples]

4.6.2.1              [Conduire dans toute la vérité]

De là découle une autre question : quel service, quel ministère exercera le Saint Esprit par rapport aux disciples ? Le Seigneur aborde ainsi ce sujet : «J’ai encore beaucoup de choses à vous dire ; mais vous ne pouvez les supporter maintenant. Mais quand celui-là, l’Esprit de vérité, sera venu, il vous conduira dans toute la vérité». Le Saint Esprit remettra toutes choses en mémoire. Ce n’est pas seulement qu’Il rendra témoignage à Christ dans sa gloire céleste. Venu personnellement pour être avec et dans les saints, comme un divin Compagnon, il s’attachera à les conduire dans toute la vérité. Le Seigneur ajoute : «Il ne parlera pas de par lui-même». Cela ne signifie pas que l’Esprit ne parlera jamais au sujet de Lui-même. Au contraire, dans presque toutes les Épîtres, l’Esprit nous fournit une large somme d’instruction à son propre sujet. Ces mots signifient que le Saint Esprit ne parle pas au titre de son autorité indépendante, mais qu’il agit de concert avec le Père, dans le but de glorifier le Fils ; ainsi que le confirme le contexte : «Il ne parlera pas de par lui-même ; mais il dira tout ce qu’il aura entendu». Il est descendu ici-bas pour rendre honneur à Christ. Ce qu’il entend du Père, aussi bien que ce qu’il entend du Fils, il nous le communique. Il lui a plu de prendre sur la terre, si nous pouvons ainsi parler avec révérence, une position subordonnée à cette intention, tout comme le Fils prit ici-bas une position de subordination au Père. Par rapport à sa divinité, le Fils était sur un pied d’égalité avec le Père ; néanmoins Il vint sur la terre dans le but exprès de faire la volonté du Père en qualité de serviteur. Pareillement le Saint Esprit daigne maintenant se faire le serviteur des desseins du Père et de la gloire du Fils, tout comme le Fils le fut auparavant à l’égard du Père.

C’est pourquoi nous lisons : «Il dira tout ce qu’il aura entendu, et il vous annoncera les choses qui vont arriver». L’Esprit ne se contente pas de nous conduire dans toute la vérité que Jésus avait révélée précédemment. Bien des choses restaient à communiquer que les disciples n’avaient pu supporter jusque-là. De plus, l’Esprit parle de «choses qui vont arriver», vérité importante pour les âmes qui sous-estiment les révélations de Dieu concernant l’avenir. Ce n’est pas simplement, me semble-t-il, la mise à notre disposition de la Parole révélée de Dieu. Mais, possédant cette révélation de Dieu maintenant complète, et le Saint Esprit lui-même habitant en nous, l’Église devrait pouvoir interpréter tout ce qui l’entoure dans ce monde. Il n’y a rien maintenant que le croyant soit incapable de comprendre par le Saint Esprit, à la condition qu’il se serve de la Parole de Dieu dans la puissance de l’Esprit. Le chrétien a, dans un certain sens, une position prophétique aussi bien qu’une position sacerdotale. Il est appelé à discerner les temps ; il peut lire ce qui se passe dans le monde, et il doit le faire. Sans doute, ses sens peuvent ne pas être exercés à discerner le bien et le mal, et ainsi il sera paresseux à écouter. C’est ce que l’apôtre reproche aux Hébreux (5:11-14). Mais je parle maintenant du rôle pour lequel nous sommes considérés comme compétents par la vertu de l’Esprit Saint.

4.6.2.2              [Glorifier Christ]

«Celui-là me glorifiera», dit le Seigneur. Nous avons ici le ministère principal du Saint Esprit clairement désigné, soit qu’il s’agisse de révéler la vérité, de dire ce qu’il a entendu, ou d’annoncer les choses à venir ; la gloire de Christ est le centre autour duquel, pour ainsi dire, tous ses offices et toutes ses fonctions font converger leur complète opération. «Celui-là me glorifiera ; car il prendra de ce qui est à moi, et vous l’annoncera». C’est, je crois, pour cette raison principale qu’il n’est jamais parlé dans l’Écriture du gouvernement ou de la domination du Saint Esprit. Le Saint Esprit affirme la seigneurie de Christ : il exalte Christ au lieu de se glorifier lui-même. C’est pourquoi il n’est jamais présenté comme gouvernant l’Église. Il est parfaitement clair et sûr qu’il agit souverainement, mais parler de gouvernement du Saint Esprit est une assertion différente tendant à déplacer le Seigneur de la position qui lui est due et à introduire le désordre dans la relation des saints vis-à-vis de lui. Jésus rejeté et glorifié est le «seul Seigneur» dans le sens officiel (dans un autre sens, le Père et l’Esprit le sont également comme Dieu). Le Saint Esprit est présent pour soutenir cette vérité conforme à la volonté de Dieu. C’est pourquoi il agit au milieu des saints pour exalter Christ devant nos yeux. L’Esprit opère, et en nous, et avec nous, et par nous. Mais Jésus Christ est notre Seigneur, et il nous est ainsi révélé par l’Esprit, qui par conséquent nous place dans une position de sujétion envers lui. Il a pris à tâche de glorifier Christ dans le temps présent, et imprime sur nous le caractère d’esclaves de Christ.

Veuille le Seigneur réveiller dans chacun de nos coeurs le sentiment que ses paroles avaient pour objet de produire dans celui de ses disciples : le sentiment vif et distinct de la présence personnelle du Saint Esprit, envoyé par lui qui est à la droite du Père. Et que cette précieuse vérité occupe non seulement une place de plus en plus importante dans nos coeurs individuellement, mais qu’elle soit toujours davantage estimée dans les assemblées de Dieu sur la terre.

 

5                    Méditation 5    «Recevez l’Esprit Saint»    Jean 20:17 à 23

5.1   [La Résurrection de Christ et les disciples]

Peu de passages souffrent plus que celui que nous avons sous les yeux d’être séparés de leur contexte. Impossible de saisir la force des communications spéciales du Seigneur, de sa conduite à l’égard de Marie de Magdala, de ce qu’il a dit et fait le soir de cette glorieuse journée, si l’on ne rattache pas strictement ces faits et ces paroles à sa résurrection en qualité de Fils de Dieu. C’est parce qu’il ressuscite les morts qu’il est démontré être tel (Rom. 1:4). Et c’est essentiellement comme Fils de Dieu que le Saint Esprit le contemple dans ce chapitre : non pas ici comme ressuscitant les autres, mais bien comme se ressuscitant lui-même. La parfaite aisance qui préside aux circonstances, les linges pliés avec ordre, et, à part, le suaire qui enveloppait sa tête, sont pour l’oeil tant soit peu exercé la preuve évidente que, toute glorieuse que soit la scène, elle s’est opérée avec la simplicité et la sérénité d’un homme qui se lèverait du lit où il vient de passer la nuit. En vérité, c’est le Fils de Dieu qui vient d’accomplir l’oeuvre de grâce pour laquelle il était envoyé du Père ; il ne nous est pas présenté ici comme l’objet de la puissance divine pour le ressusciter des morts. Cette dernière vérité a sa place dans d’autres passages. Il est bien vrai que Dieu l’a ressuscité ; Pierre et Paul insistent sur ce fait. Mais il n’en est pas moins vrai que Christ ressuscite les morts ainsi que lui-même comme Fils de Dieu.

5.1.1       [Pierre et Jean]

«Détruisez ce temple», dit-il au chapitre 2 de cet Évangile, «et en trois jours je le relèverai». Il ne manque pas d’ajouter plus tard : «j’ai reçu ce commandement de mon Père» (10:18). Son obéissance parfaite unit la conformité à la volonté du Père à la puissance divine qui le proclame Fils de Dieu par le moyen d’une telle résurrection. Il s’agit de la même puissance par laquelle il avait lui-même ressuscité des morts : la fille de Jaïrus, le fils de la veuve, ainsi que Lazare au sujet duquel il déclarait : «cette maladie n’est pas à la mort, mais pour la gloire de Dieu, afin que le Fils de Dieu soit glorifié par elle» (Jean 11:4). Ainsi maintenant il se ressuscite lui-même. Pierre et Jean toutefois nous montrent de quelle faible manière la vérité de sa résurrection selon l’Écriture avait pénétré leur esprit. Bien que ce soit à sa propre honte ainsi qu’à celle de Pierre, Jean en donne le récit et conclut : ils entrèrent et virent et crurent. Tout en étant de vrais enfants de Dieu, ils ne s’étaient que bien pauvrement approprié la pensée révélée de Dieu. Ils n’avaient pas saisi le «il fallait» de l’Écriture (Luc 24) et pas davantage ils n’avaient encore compris que la grâce et la gloire de Dieu ne pouvaient trouver leur digne et parfaite expression que dans la résurrection du Fils. Quant aux faits, ils les voient ; ils constatent les preuves, puis s’en retournent chez eux, ce qui trahit l’impuissance de l’esprit de l’homme pour apprécier les faits divins, même si la conclusion qu’il peut en tirer est juste.

5.1.2       [Marie de Magdala]

Mais il n’en est pas ainsi de Marie. Elle n’a peut-être pas plus de connaissance de la gloire de la résurrection, ou de la parole qui l’annonçait, que n’en avaient Pierre et Jean. Mais pour elle au moins, Jésus est Celui qui répond aux besoins du coeur. Si grande est la peine de son âme qu’elle ne peut que demeurer attachée au lieu où le corps de son Maître avait reposé. Il lui est impossible de prendre son parti de sa disparition aussi facilement que les deux apôtres. De fait, elle ne peut plus avoir de «chez elle» dans un monde dont son Sauveur est absent. C’est pourquoi elle s’arrête à ce sépulcre vide du Seigneur. Voici bien ce qui révèle à quel point son esprit était absorbé dans ses pensées et son amour pour Jésus : elle regarde à nouveau dans ce tombeau qu’un moment auparavant elle savait être vide (puisqu’elle venait d’en apporter la nouvelle), et voit deux anges, vêtus de blanc, assis l’un à la tête, l’autre au pied du lieu où le corps de Jésus avait été couché, mais cette vue ne produit en elle aucun signe d’alarme, tel que chez les femmes dont il est question ailleurs. En des circonstances ordinaires, quelle surprise, quelle frayeur, une pareille apparition ne lui aurait-elle pas causées ! Eh bien, notre évangéliste ne lui attribue pas même l’ombre d’une pareille émotion. Le besoin de Jésus possédait tellement son coeur que la présence de tous les anges n’aurait pu la troubler le moins du monde. Les deux anges qui sont là l’interrogent : «Femme, pourquoi pleures-tu ?» Aussitôt, elle épanche le sentiment de son coeur : «parce qu’on a enlevé mon Seigneur — répond-elle — et je ne sais où on l’a mis». Alors elle se tourne en arrière et aperçoit Jésus, qui lui aussi demande : «Pourquoi pleures-tu ? Qui cherches-tu ?» Tout d’abord ne reconnaissant pas le Maître, pensant que c’était le jardinier, elle répond en exprimant de nouveau son unique préoccupation : «Seigneur, si toi tu l’as emporté, dis-moi où tu l’as mis, et moi je l’ôterai». Mais un mot rompt le charme, lui rappelle la vérité, et révèle le Seigneur. C’était sa voix, la voix du Bon Berger appelant sa propre brebis par son nom. «Marie», dit Jésus. Aussitôt elle se tourne vers lui et le reconnaît comme son «maître».

5.1.3       [Toucher Jésus ?]

«Ne me touche pas», enjoint alors le Seigneur, expression qui ne rend pas complètement la force de l’expression originale, qui se traduirait littéralement : «Ne me touche pas avec la main». Jésus invite Marie à ne pas céder à son désir de s’attacher familièrement à sa personne (le mode particulier du verbe suppose un attachement continu au Seigneur). Autrement dit la phrase aurait cette portée : «Ne persiste pas à t’attacher à moi !».

Cela me semble donner à ce passage beaucoup plus de force et de précision. En effet, nous voyons en Marie de Magdala quelqu’un qui regarde à Jésus selon les espérances juives, quelqu’un qui, dans la ferveur de ses sentiments, ne pouvait que mener deuil sur son absence corporelle et aurait même trouvé une douloureuse satisfaction à penser que son corps mort était encore là. Ceci étant, nous comprenons facilement l’instinct, dirai-je, par lequel elle se saisit du Seigneur sitôt qu’elle le reconnaît. Mais tout de suite, il le lui défend. Et cela est d’autant plus frappant que, dans l’évangile de Matthieu, lorsque les femmes de la Galilée lui saisissent les pieds, il ne refuse pas cet hommage ; au contraire, il l’accepte. Bien plus, dans ce même chapitre de Jean, nous entendons, huit jours plus tard, le Seigneur inviter Thomas à avancer le doigt, à mettre sa main dans son côté.

À quoi attribuer ces différences ? Comment concilier ces attitudes en apparence contradictoires : le fait que Matthieu nous présente l’hommage comme accepté, alors qu’il est ici refusé ? La raison en est aussi simple qu’instructive. En Matthieu, où le Messie nous est présenté comme rejeté par son peuple, nous trouvons aussi le dessein auquel la grâce de Dieu va faire servir ce rejet : celui de proclamer l’évangile aux nations, et d’appeler des disciples du milieu de toutes ces nations. Pensée bénie ! La grâce se refuse, pour ainsi dire, à l’inaction. Il faut à l’énergie de l’amour de Dieu que cette grâce se manifeste. Si le Juif la repousse, il est impossible que Dieu ne prenne pas de nouvelles mesures, qu’il ne répande même de plus grandes bénédictions. Si l’ancien peuple abandonne ses propres miséricordes, il en est d’autres, pauvres et misérables, que Son amour avait jadis comparativement négligés. Israël incrédule, ingrat et aveugle à l’Orient d’en-haut qui l’avait visité, a consommé cette incrédulité par le rejet et la mort de son propre Messie. Dieu alors se sert de ce rejet même pour l’accomplissement de la rédemption et fait proclamer ces bonnes nouvelles à toutes les nations sous les cieux. Et pourtant, malgré ce déploiement des ressources de la grâce envers les Gentils, Matthieu nous fait voir les femmes de Galilée, se tenant fermement attachées à Jésus ressuscité et l’adorant. Quel témoignage ! Jésus est rejeté de la nation ; Dieu va faire servir ce rejet au développement de sa grâce ; et toutefois il prend le plus grand soin que les espérances juives soient maintenues sur une base immuable. Le rejet du Messie signifie la ruine d’Israël, mais le dernier mot est-il dit ? C’est bien la justice, mais que fera la grâce ? Le temps viendra où la miséricorde de Dieu attirera à Lui les coeurs impénitents, à Lui qu’ils auront trop longtemps méprisé. Cette miséricorde ranimera leurs espérances et les liera si étroitement au trône du Fils de l’homme glorifié, qu’au moment même où Dieu jugera le monde en justice, eux seront reçus en grâce ! La chaîne de la miséricorde divine se trouve si fortement rivée à la mort et à la résurrection du Seigneur que, toutes différées que soient leurs espérances, elles conservent pourtant une base inébranlable, et la grâce de Dieu les bénira alors dans la plénitude de ses conseils souverains aux derniers temps.

5.1.4       [Matt. 28:9, 10, 16, 17]

La fin de l’évangile de Matthieu nous fournit de cette vérité en quelque sorte un gage assuré. Non seulement par les paroles du Seigneur (comme dans la prophétie du chapitre 24) mais encore dans le culte figuratif du chapitre 28. Les femmes de la Galilée forment le type de ce résidu du peuple juif qui, au dernier jour, sera attiré par la grâce, et s’attachera à Jésus, trouvant en lui le Seigneur. Et lui-même ne rejettera pas le culte de ce résidu ; culte qui se distingue par sa présence personnelle et corporelle, après qu’il sera revenu au milieu de son peuple élu. Le Juif, en tant que tel, n’est guère appelé comme le chrétien à marcher par la foi, mais plutôt par la vue : Ils verront celui qu’ils ont percé, déclare Zacharie 12. En effet, ils le contempleront réellement. Il ne s’agit pas de la foi ; ils le verront de leurs propres yeux. Aussi, cette réception du Seigneur par les femmes de la Galilée, leur attachement à sa personne, le fait même qu’il accepte leur culte, tout cela constitue le gage sûr de cette miséricorde du Seigneur qui se déploiera au dernier jour envers le résidu de son ancien peuple, quand il apparaîtra pour régner sur eux ici-bas.

5.2   [Jean 20:17 — Une nouvelle manière de connaître Christ]

Telle est aussi probablement la raison pour laquelle la scène de l’ascension n’est pas décrite dans l’évangile de Matthieu — circonstance qui plonge le critique dans la perplexité mais qui est pour le croyant la simplicité même. Si l’ascension de Christ avait été introduite ici, elle aurait fait sortir le Seigneur de cette relation. Tandis que sa présence corporelle au milieu des siens, sans mention aucune dans ce chapitre de son départ pour le ciel, le laisse pour ainsi dire avec eux comme leur joie éternelle pour les bénir à tout jamais en miséricorde. Mais au 20° chapitre de Jean, nous avons précisément le contraire : nous y avons une femme, pleinement pénétrée de sentiments israélites, qui, à la vue de Christ ressuscité des morts, témoigne encore de son attachement à ces espérances juives, et cela d’autant plus ardemment que la croix et la mort l’avaient pour un moment privée de tout espoir. Ce qui explique qu’elle ne veuille pas se dessaisir de Christ. Mue par cet amour instinctif, elle s’empare de lui, mais lui la prie de ne pas le saisir ainsi : «Je ne suis pas encore monté vers mon Père». C’est d’une autre manière en effet qu’il se fera maintenant connaître. Il va quitter la scène unique où le résidu d’Israël, plus tard, se rattachera au Messie. Cette espérance-là ne sera pas flétrie ; elle fleurira en son temps et en son lieu ; mais à présent le Seigneur met le résidu à part d’Israël. De fait, c’est ainsi que commença le christianisme : «Le Seigneur», est-il dit, «ajoutait tous les jours à l’assemblée ceux qui devaient être sauvés» (Act. 2:47 note).

5.2.1       [La connaissance de Christ propre au christianisme]

Marie de Magdala représente ici ce résidu d’Israël. Jusqu’à ce jour elle avait nourri l’espoir que le Seigneur allait introduire la gloire et la félicité ici-bas pour Israël. Mais Jésus lui apprend que ce n’est pas de cette manière que dorénavant il se plaît à bénir. C’est comme monté auprès du Père qu’il devait être connu du chrétien. Par conséquent songer à le retenir ici, même si cela avait été possible, était hors de saison. Il avait au coeur une pensée infiniment plus haute et allait précisément charger Marie d’en faire part à ses disciples. Annonce, non pas d’un éloignement ou d’une séparation, mais au contraire des liens les plus étroits qui soient : ceux qui nous unissent à Jésus à la droite de Dieu. N’est-ce pas une étrange manière d’opérer l’union, contraire aux pensées de la chair ? Mais la chair n’est aucunement le moyen de notre association avec le Seigneur, tandis qu’il en est ainsi d’Israël. Jésus était lui-même Juif d’origine et de naissance. Mais le chrétien ne le connaît pas ainsi, comme le dit Paul : «Et si même nous avons connu Christ selon la chair, toutefois maintenant nous ne le connaissons plus ainsi» (2 Cor. 5:16). C’est d’une façon bien plus excellente que nous avons affaire à lui. Le connaître ici-bas comme le Messie était une vraie bénédiction, et à ces femmes de la Galilée le Seigneur donna un avant-goût de l’accomplissement de cette bénédiction dans un jour encore à venir. Mais, répétons-le, ce n’est pas cette connaissance-là de Christ qui est le propre du christianisme.

Ayant accompli l’oeuvre de la rédemption, Christ prend sa place à la droite de Dieu comme l’homme céleste. De sorte que le christianisme n’est pas seulement la bénédiction descendant sur la terre, bien que cela aussi soit parfaitement vrai. Mais la scène et la nature de notre félicité sont célestes, notre bien-aimé Sauveur étant déjà au ciel et notre bénédiction s’y trouvant en Lui. En tant que manifestation de Dieu, il n’est rien de plus béni que de contempler dans les évangiles le Seigneur Jésus comme homme ici-bas. Mais ne perdons pas de vue la position spéciale qui résulte de notre union avec lui là-haut. Christ a achevé l’oeuvre qui efface nos péchés et glorifie la nature de Dieu à l’égard de tout ce qui pouvait la compromettre dans ce bas monde. Il est maintenant monté au ciel où il est révélé à nos âmes, et où aussi nous lui sommes unis. En même temps qu’il doit monter au ciel à cette fin, à cette fin aussi le Saint Esprit doit en descendre. La présence de l’Esprit Saint sur la terre est la réponse nécessaire à l’absence de Jésus monté à la droite de Dieu, après avoir opéré la rédemption.

Telles sont les deux grandes et nécessaires vérités qui constituent le christianisme et la raison pour laquelle le Seigneur défend à Marie de le retenir ; car il n’était pas encore monté vers son Père. Tel il devait dorénavant être connu ; telle était la relation qui s’établissait avec lui pour ceux qui croiraient, débarrassés de leurs préjugés juifs et mis en rapport avec l’amour et la gloire dans lesquels il allait entrer lui-même, dans la maison du Père.

5.2.2       [Connaissance de Christ comme Messie selon l’Ancien Testament]

Un passage de l’Ancien Testament nous aidera à éclaircir un peu le sujet qui nous occupe. Ce sont au chapitre 5 de Michée les versets annonçant la naissance du Seigneur : «Et toi, Bethléhem Éphrata, bien que tu sois petite entre les milliers de Juda, de toi sortira pour moi celui qui doit dominer en Israël, et duquel les origines ont été d’ancienneté, dès les jours d’éternité». Ce verset 2 associe sa naissance humaine d’origine israélite et sa gloire éternelle — Celui qui, quoique né de femme, était néanmoins «d’ancienneté, dès les jours d’éternité». De qui s’agit-il ? De celui qui est désigné au verset 1 comme le dominateur d’Israël, de qui il est écrit : «ils frappent le juge d’Israël avec une verge sur la joue» (v. 1). Il ne peut évidemment s’agir que de l’humiliation du Messie — né ici-bas à Bethléhem de Juda ; et pourtant, tout aussi bien qu’il est homme, il est Dieu de toute éternité. De sorte que ce verset nous met en présence de vérités touchant Jésus Christ qui ont une importance capitale et dont découle une bénédiction immense. Aucune imagination humaine n’aurait pu les concevoir. Dieu seul, dans la connaissance absolue et parfaite qui lui est propre, peut nous les enseigner dans toute la plénitude de leur simplicité. Voilà ce qui met le comble à la culpabilité d’Israël : c’est qu’une telle Personne, qui était en même temps leur Juge, ait pu être frappée, et surtout par eux, d’une verge sur la joue. «C’est pourquoi il les livrera», ajoute le verset 3. C’est exactement ce qui a eu lieu. Le Juge d’Israël, frappé, a abandonné Israël pour un temps, «jusqu’au temps où celle qui enfante aura enfanté».

Grand est le dessein de Dieu pour les derniers jours ! Le chapitre 12 de l’Apocalypse met en scène cette femme (Israël) mettant au monde un fils mâle (le Messie). Le dragon qui la menaçait est précipité ; la lutte en faveur de la terre et du peuple terrestre se poursuit. Enfin le Juge d’Israël revient, et l’ancien peuple reprend de nouveau sa place, mais dorénavant sous l’autorité de son Messie ici bas. Autrement dit, selon les voies de Dieu, il doit y avoir aux derniers jours un retour à ses conseils concernant les Juifs. De fait, où en sommes-nous aujourd’hui ? Christ a paru ; il a été rejeté par les Juifs et lui les a abandonnés. Depuis la croix, non seulement ils sont abandonnés comme nation, mais Dieu en a appelé du milieu d’eux un certain nombre pour les unir aux Gentils qui ont cru, et pour composer ainsi le corps de Christ. Ce sont ceux dont il est écrit au second chapitre des Actes que «le Seigneur ajoutait tous les jours à l’assemblée ceux qui devaient être sauvés» (v. 47). Mais quand viendra le moment d’accomplir les conseils futurs et éternels de Dieu envers Israël sur la terre, alors, poursuit le passage de Michée, «le reste de ses frères (au lieu d’être séparés comme aujourd’hui pour former l’Église) retournera vers les fils d’Israël» (v. 3). Aujourd’hui les croyants juifs perdent leur caractère israélite, pour former avec ceux des nations «un seul homme nouveau». Mais dans ce jour futur, ils retourneront aux conseils anciens et aux voies initiales de Dieu envers son peuple terrestre. Admirons la clarté et l’harmonie de toute la vérité, l’ancienne et la nouvelle. N’est-ce pas à la fois la preuve et le fruit de la vérité divine qu’elle nous mette encore à même de trouver une nouvelle beauté, un nouvel ordre dans ce qui, avant cette connaissance additionnelle, pouvait sembler incohérent, un amas immense de matériaux que nous n’avions jusque-là aucun moyen de coordonner ? Mais il suffit que Dieu nous dise touchant n’importe quelle partie de la vérité : «que la lumière soit», pour que tout s’illumine aux yeux de notre foi. À sa manière propre et glorieuse, Dieu montre alors comment la nouvelle lumière s’adapte heureusement à l’ancienne.

5.2.3       [Une nouvelle révélation (Jean 20:17)]

Ce qui paraît ici interrompre les conseils de Dieu, introduire la confusion dans ses voies, en constitue précisément la clé de voûte. De fait aucun conseil de Dieu ne saurait jamais faillir. Peut-être le coeur devra-t-il être mis à l’épreuve par une longue attente. L’incrédulité semble avoir tout pour elle ; mais la foi seule a toujours raison, et chaque parole que Dieu a prononcée sera accomplie, tous ses desseins aboutiront infailliblement, et cela par le moyen de la mort de Christ.

Le Seigneur fait ici une révélation tout à fait nouvelle. Elle concerne sa Personne. Remarquons d’ailleurs comment dans l’évangile de Jean tout se rattache à cette Personne ; il s’agit non de dispensation, mais de lui-même. Ici il est considéré dans son ascension. En vérité après la rédemption, rien n’est plus important à comprendre si nous voulons faire des progrès et jouir du christianisme. Prenez n’importe quel autre système : les personnes qui s’y rattachent sont comparativement insignifiantes ; l’une disparaît, une autre la remplace. Mais séparez Christ du christianisme, que reste-t-il ? De plus, le Saint Esprit peut-il sceller de son sceau le moindre déshonneur fait au Seigneur Jésus, le moindre mépris de son oeuvre ou de sa gloire ?

Jésus annonce à Marie qu’il va monter vers le Père, et que pour cette raison l’hommage rendu à sa présence corporelle ne concorde pas avec la manière dont il veut désormais se révéler, manière qui ressort de tout l’évangile de Jean. Celui-ci se compose de deux grandes parties. La première est la révélation du Fils de Dieu et de son oeuvre ; la seconde, la révélation d’une autre Personne, également divine, qui, au départ de Christ, prend sa place ici-bas parmi les disciples. Tout le christianisme est là : Christ lui-même, l’objet de la foi ; et le Saint Esprit, la puissance qui établit la gloire de Christ dans l’Église aussi bien qu’en chaque chrétien.

5.2.4       [Une nouvelle relation avec Dieu (Jean 20:17)]

De ces deux parties, c’est spécialement la première, concernant Christ, que nous trouvons dans le message confié à Marie par le Seigneur : «Va vers mes frères, et dis-leur : Je monte vers mon Père et votre Père, et vers mon Dieu et votre Dieu». Non seulement il associe les siens avec lui — fait d’une immense valeur — mais, en outre, il détermine leur relation avec Dieu. Cette relation n’a aucun rapport avec les formes anciennes de bénédiction. Ce n’est pas la révélation de sa puissance protégeant ses pauvres pèlerins sur la terre. Il n’est pas fait mention du Dieu Tout-puissant. Ses voies de gouvernement envers Israël dont il était le Dieu comme Jéhovah l’Éternel, ne s’y trouvent pas davantage. Ici tout est en rapport avec Christ montant au ciel. C’est le texte même de son message : «Je monte vers mon Père et votre Père, et vers mon Dieu et votre Dieu». Parole pleine de bénédiction ! Ce que le Père est pour le Fils, il le devient désormais pour les fils. Ce que le Père était pour cet Homme béni qui vient d’abolir le péché, il le devient, et rien de moins, pour ceux dont les péchés ont été abolis. Dieu qui est pleinement en relation avec Jésus comme Dieu et Père l’est dorénavant aussi avec nous par la rédemption de Christ et dans la résurrection.

Il ne s’agit pas d’une connaissance vague de Dieu comme paternel dans ses voies. Dans la grande détresse d’Israël, Ésaïe le prophète fait dire à ce peuple : Véritablement, «tu es notre Père : si Abraham ne nous connaît pas, et si Israël nous ignore, toi, Éternel, tu es notre Père» (És. 63:16). Le but de ce langage n’est évidemment pas de décrire leur relation mais simplement de leur apporter de la consolation. Ce n’est que comme nation qu’Israël pouvait réclamer une place pareille, comme le montre par exemple Exode 4. Mais ici, nous avons infiniment plus. En effet, lui qui était Fils, et qui connaissait le Père comme nul autre ne pouvait le connaître, était descendu sur la terre. Il était venu ici-bas comme un homme, l’objet alors des délices du Père tout aussi parfaitement que lorsqu’il était simplement Dieu, dans sa présence. Jamais un mot n’avait été prononcé par lui, jamais aucune émotion ressentie, jamais pensée ne lui était entrée au coeur, jamais motif ne l’avait inspiré, qui n’ait été la parfaite expression de la bonté même de Dieu. Seul, Jésus répondait moralement en esprit, en oeuvres et en paroles à tout ce qui se trouvait en Dieu. Aussi Dieu se penchait-il du ciel pour considérer ce seul Objet qui puisse faire en tout temps ses délices. Sur ce monde coupable dont les iniquités le provoquaient continuellement, il portait le regard d’en haut et parfois y répondait par les coups terribles de son jugement. Mais maintenant, pour la première fois depuis le commencement des âges, il ne s’agissait pas seulement d’entrevoir un rayon éloigné de sa gloire : Dieu se réjouissant dans un Énoch ou un Noé. Le Fils se trouve là lui-même ; le ciel s’ouvre et Dieu fait descendre le Saint Esprit sur Jésus en tant qu’homme. Il ne peut être en effet question de la descente du Saint Esprit sur lui comme Dieu ; c’est comme homme qu’il fut oint de l’Esprit Saint. «C’est lui que le Père... a scellé» — «le Fils de l’homme». Afin de trouver pour la première fois ce qui répondrait à tout son jugement, à tous ses sentiments, à tout son être moral, à ses plus intimes affections, Dieu eut à porter le regard sur un homme !

Mais, l’heure vient où un changement immense s’opère sur le Bien-aimé. Une scène nouvelle se présente : les cieux sont voilés par d’épaisses ténèbres. Dieu lui-même, du sein de cette profonde obscurité, agit contre lui. C’est l’heure où il est permis à l’homme poussé par Satan de se dresser contre le Messie et de l’accabler. Et au milieu de cette scène, Dieu, dans toute sa majesté et son horreur absolue du mal, se déploie contre le péché dont la sainte personne de Christ est chargée comme victime de propitiation.

C’est bien l’heure redoutée où les comptes doivent être rendus. Le jugement divin contre toute iniquité et indifférence, contre l’injustice envers l’homme et la révolte contre Dieu, ce jugement tombe sur le Saint de Dieu. Aussi, ce n’est pas seulement l’heure de l’homme, ni exclusivement la puissance des ténèbres, c’est encore, et au-delà de tout, l’heure de Dieu ; l’heure où sa sainteté, qui ne saurait rien épargner, revendique ses droits sur Celui qui porte le péché : son propre Fils se livrant Lui-même, victime responsable, pour porter le jugement de nos péchés sur la croix. Tout ce que Dieu pouvait ressentir contre le péché s’épuisa alors sur le Fils, sans qu’aucune circonstance atténuante vienne briser, pour ainsi dire, la force de sa colère et de son indignation. Et c’est pourquoi cette rédemption par le sang de Christ est parfaite dans le sens absolu. Dieu n’a plus besoin dorénavant pour la justification et le maintien de son caractère d’ajouter un seul mot, un seul acte, qui n’ait déjà fait valoir ses droits sur la personne du Seigneur Jésus Christ. À une oeuvre aussi entière, ne peut que répondre une révélation entière aussi bien de sa nature de Dieu que de l’amour du Père. Rien dans le saint caractère de Dieu n’est plus caché ni gardé en réserve : tout ce qu’il ressent contre le péché s’est épuisé sur le Seigneur Jésus. Et par conséquent, tout ce qui se trouve en lui, comme Père et comme Dieu, s’exprime désormais en notre faveur. Le mal qui est en nous a été si pleinement condamné qu’il ne s’agit plus maintenant pour Dieu, non seulement comme Père mais comme Dieu, que de témoigner sa parfaite satisfaction dans la rédemption accomplie par le Seigneur Jésus.

Et c’est bien dans ce sens-là que le Seigneur s’adresse à ses disciples par le message qu’il leur envoie. Ils l’avaient vu se remettre à son Père lorsque personne ne pouvait sympathiser à ses douleurs, déjà comme homme de douleurs dans ce monde sans être encore la propitiation pour le péché. Ils avaient su que chaque jour, avant l’aurore, il était avec son Père. Ils avaient pu voir que pendant le sommeil des autres, lui était toujours devant le Père. Ils avaient pu voir aussi que chacun des fardeaux dont il se chargeait, chaque souffrance humaine qui attirait son regard remplissait son coeur de divine compassion et l’amenait plus près du Père. Mais à la croix, il ne s’agit plus de sympathie ni de communion. Il s’agit de ce que Dieu ressent contre nos péchés imputés au Seigneur Jésus, nullement toutefois contre lui-même. Jamais au contraire Christ n’est davantage l’objet des délices ineffables de Dieu qu’au moment où il porte le jugement de nos péchés. Néanmoins il importe au caractère de Dieu que les souffrances de Jésus ne soient nullement un semblant de souffrance, mais qu’il endure réellement, effectivement, le jugement divin. Car il prend réellement en notre faveur cette position devant Dieu, de même qu’auparavant il avait joui réellement, durant sa vie entière, d’une communion parfaite avec son Père.

Nous comprenons maintenant toute la précieuse portée du message dont Marie est chargée. Ce que Jésus connaissait comme Fils de Dieu né dans le monde, il le remet, en quelque sorte, entre nos mains. Ce n’est pas, certes, que nous puissions partager ce qui lui appartenait ici-bas en tant que Personne divine. Il est, il était le Fils unique avant la création des mondes. Là, évidemment, nous ne saurions prendre place avec lui. Comme tel, il est pour nous tout simplement l’objet de l’adoration et du service dévoué. Mais lui, le Fils avant toute création, était Fils de Dieu. Il était Fils de Dieu comme homme ici-bas, et c’est à l’évangéliste Luc qu’a été commise la charge de retracer sa marche comme tel parmi les hommes. Tous, par nature, nous étions enfants de colère. Lui, dans sa nature humaine aussi bien que dans sa nature divine, était Fils de Dieu. L’ange annonce à Marie que le saint (enfant) qui naîtra sera appelé Fils de Dieu (Luc 1:35).

Entre Christ et l’homme, existait à tous égards un contraste parfait. Alors qu’il était impossible à ce dernier de goûter la communion avec Dieu, celle de Jésus avec Dieu était continuelle et il était pour le coeur du Père l’objet de parfaites délices. La condition de l’homme pécheur était celle du mal et de la colère. Mais la rédemption délivre celui qui croit, de tout mal, de toute colère. Sinon, serait-il possible de se fier à la Parole de Dieu ? Que voudraient dire les assurances constantes et solennelles qui y sont adressées à la foi ? Si la Parole m’a apporté un tel témoignage touchant la croix, mon âme se repose-telle sur ce témoignage ? Suis-je bien assuré que devant Dieu il ne reste plus sur moi, comme croyant en Jésus, absolument aucun mal ? Il est entièrement effacé et banni. Ce n’est pas de l’expérience que je parle ici. Il est clair que quiconque a de la conscience sent son propre mal ; et nous qui avons la foi, par cela même, nous le sentons davantage. Plus nous connaîtrons son amour, et plus nous aurons horreur du péché. Nous ne serons pas jugés pour le péché ; c’est précisément pour cela que nous devons nous-mêmes condamner tout péché. Si nous étions jugés, nous serions perdus. Ce que Christ a accompli nous met à même, nous qui croyons, de juger maintenant le péché. La responsabilité du chrétien consiste à porter, pour ainsi dire, dès à présent, la sentence de Dieu contre le péché ; en nous-mêmes premièrement, mais aussi quand nous le rencontrons chez ceux qui portent le nom de Christ et avec lesquels nous sommes unis comme membres de son Corps, qui est un. Si le mal est détestable quelque part, c’est bien chez l’enfant de Dieu. Et c’est là précisément qu’il nous faut l’intervention de la rédemption et la puissance de l’Esprit.

Beaucoup de chrétiens semblent ne jamais dépasser le stade de la rémission des péchés et de la nouvelle naissance. Ils se privent du privilège de vivre pour Dieu. Ils méconnaissent les nouvelles relations de la grâce dans laquelle ils sont placés. C’est cette base et la forme de ces relations, tant envers Dieu qu’envers Christ lui-même, qui nous sont présentées dans le message confié à Marie : Dis à mes frères : Je monte vers mon Père et votre Père, et vers mon Dieu et votre Dieu. Ainsi je puis regarder en haut comme quelqu’un que Jésus n’a pas honte d’appeler son frère. Je puis regarder en haut et voir son Père et le mien, son Dieu et mon Dieu, dans la certitude absolue que je suis ainsi amené à lui dans toute la valeur et la relation intime de Jésus, et que l’oeuvre accomplie par lui et acceptée de Dieu est la base morale de mon salut et de ma bénédiction. Dans la grâce qu’il nous témoigne aujourd’hui, Dieu rend, en quelque sorte, justice à cette oeuvre et en reconnaît la pleine valeur. On peut même affirmer que l’oeuvre infinie de la croix ne serait pas pleinement justifiée par Dieu s’il n’usait pas envers nous de grâce entière et ne reconnaissait pas les relations proclamées maintenant par Jésus lui-même. Hâtons-nous d’ajouter que ces bénédictions n’ont pas été péniblement extorquées à Dieu. Au contraire, elles répondaient à ses propres desseins. Il désirait trouver des êtres qui prendraient place dans son amour et en jouiraient en vertu de ces relations mêmes, établies par le Seigneur Jésus. Le Père avait contemplé le Fils comme un homme sur la terre. Et maintenant c’est comme s’il disait : il me faut des fils ; il me faut des âmes, jadis pécheresses, qui deviennent mes enfants. Autrefois j’avais un peuple ; en dépit d’une bonté inépuisable à son égard, celui-ci s’est corrompu ; il est devenu aussi misérable que le péché pouvait le rendre ; mais voilà, je vais me former un peuple nouveau, une famille qui ne soit pas de ce monde, bien qu’elle soit encore dans ce monde.

Et c’est de cela que Dieu s’occupe maintenant. Son amour agit sur la base de l’oeuvre de la croix, et de la résurrection qui en est le résultat. Ceux qui sont appelés, Jésus les reconnaît comme ses frères, et cela après sa mort et sa résurrection. Contrairement aux affirmations du rationalisme et de la religion conventionnelle, d’accord pour une fois, le seul moyen d’avoir de saintes relations avec Dieu conformément à sa pensée est bien cette base posée sur la croix de Christ. Ce n’est pas, comme certains théologiens l’ont prétendu, et le prétendent encore, l’incarnation du Seigneur Jésus qui établit l’union avec sa créature. Dans l’Écriture, la base invariable du lien qui nous attache à notre Chef glorifié, c’est sa mort, sa résurrection, son ascension. L’incarnation était nécessaire pour manifester un homme parfait et une personne divine : le Fils de Dieu, ici-bas. Mais la rédemption fut accomplie afin de nous introduire dans sa propre relation. La rédemption ne se proposait et n’effectuait rien moins que cela. Car la justice de Dieu qui sans la croix aurait dû s’abattre en châtiment sur nous, nous place maintenant, autant que la chose est possible, dans la position de Christ devant Dieu. Combien notre Dieu est bon et sage ! Quelle efficace dans la mort et dans la résurrection de Christ, sauvant ceux qui croient et leur donnant déjà le titre (et, par la puissance du Saint Esprit, la joie aussi dès à présent) de sa propre position comme Fils de Dieu et homme ressuscité ! Je le répète : sa place de Fils, objet pour nous d’un culte incessant, n’est pas mise de côté. Mais il nous accorde, à nous, d’être fils, et de goûter ses propres affections dans cette relation si intime ; en contraste avec la simple position de saints, ou de membres d’un peuple béni sur la terre. Voilà ce que notre Seigneur Jésus établit tout d’abord.

5.3   [Jean 20:20, 21 — Paix vous soit]

Mais il fait encore davantage. Le soir de ce même jour, le Seigneur se trouve au milieu des siens rassemblés. Et le premier mot qu’il prononce, c’est celui de paix : «Paix vous soit !» Précieuse parole ! Ce n’était pas simplement la rémission des péchés, toute bénie qu’elle soit. La paix est bien autre chose que le simple pardon des péchés. «Ayant dit cela, il leur montra ses mains et son côté». Il leur fait voir ce qui constitue le signe et le témoignage du sang versé sur la croix, par lequel il a fait la paix. «Les disciples se réjouirent donc quand ils virent le Seigneur». Il leur dit encore une fois : «Paix vous soit !», moins comme une parole personnelle que comme préambule à leur mission. Car il ajoute : «Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie». La première parole de paix est essentiellement pour leur propre joie, tandis que la seconde déclaration se présente comme prélude à leur ministère. C’est le message avec lequel ils sont envoyés vers d’autres. Ils se mettront en route munis de la force renouvelée de cette paix. Comme le Père l’avait envoyé, de la même manière le Fils les envoie, lui qui parle toujours comme le Fils de Dieu, dans la jouissance consciente de sa communion avec le Père.

5.4   [Jean 20:22, 23 — …Recevez l’Esprit Saint…]

Mais un signe remarquable accompagne cette parole. «Ayant dit cela, il souffla en eux, et leur dit : Recevez l’Esprit Saint. À quiconque vous remettrez les péchés, ils sont remis ; et à quiconque vous les retiendrez, ils sont retenus» (v. 22, 23).

5.4.1       [Des interprétations inacceptables]

Deux théories contradictoires se sont fait jour dans la chrétienté au sujet de ce passage. L’une affirme que notre Seigneur établit ici une sorte d’autorité sacerdotale, en vertu de laquelle ceux à qui il s’adressait alors, ainsi que leurs successeurs, recevaient le pouvoir d’accorder en son nom la rémission des péchés à quiconque confesserait convenablement ses fautes. Ils admettent bien tous qu’il se peut que les conditions ne soient pas remplies — et qu’après tout, la rémission ne soit pas effectuée. Mais pourtant, ils soutiennent que, là où existe la droiture de la part de l’homme, le Seigneur s’engage à faire sa part par l’entremise de ses serviteurs, et par cela on entend l’absolution prononcée par le moyen d’un clergé mandaté à cet effet. Non, rétorque le parti opposé, ce n’est pas ce que le Seigneur institue ici. Ce passage suppose une action miraculeuse. Si de nos jours on a la prétention d’absoudre les gens de leurs péchés, pourquoi ne pas aussi guérir les lépreux et ressusciter les morts ? Pourquoi ne pas opérer les autres miracles que le Seigneur rendait ses disciples capables d’accomplir ? Il est clair que cet argument suppose que, si les hommes pouvaient guérir les lépreux et ressusciter les morts, ils auraient aussi le pouvoir d’absoudre les péchés. Mais je nie que les disciples aient jamais possédé le droit d’accorder une telle absolution.

5.4.2       [Le souffle de Dieu]

En vérité, il est difficile d’affirmer laquelle de ces deux théories s’écarte le plus de l’Écriture. Ce qui donne la clef du sujet, c’est la résurrection du Seigneur telle qu’elle est présentée ici. Une plus intime connaissance de Christ et de la puissance de sa résurrection ferait comprendre ce qui en est le fruit. Observons-le bien : c’est après que notre Seigneur a envoyé ses disciples comme messagers de sa paix qu’il souffle en eux. Je ne connais dans la Bible qu’un seul acte dont celui-ci puisse être rapproché tout en comportant avec lui un contraste plein d’instruction. En nous reportant au deuxième chapitre de la Genèse, nous constatons une différence très frappante entre la formation de l’homme par l’Éternel et celle des autres animaux. Quand il créa les variétés multiples d’animaux : poissons, oiseaux, reptiles, bêtes des champs... chacun eut en lui «une âme vivante» par le simple fait qu’il possédait une organisation appropriée. Mais pour l’homme, il n’en fut pas ainsi. Il fut fait de la poussière du sol ; mais ce n’est pas pour avoir été ainsi façonné qu’il devint une âme vivante. Lui seul reçut sa vie directement d’en haut : L’Éternel Dieu «souffla dans ses narines une respiration de vie, et l’homme devint une âme vivante» (Gen. 2:7). Aucun autre être animé ne fut fait de la même manière. L’homme seul possède le souffle de l’Éternel Dieu. C’est là la vraie source de l’immortalité de l’âme (*). C’est aussi la raison pour laquelle seul l’homme se trouve directement dans une position de responsabilité morale vis-à-vis de Dieu ; il doit rendre compte des choses faites dans le corps à ce Dieu qui lui donne ainsi son âme et son esprit. Le principe vital de la bête périt avec elle, parce qu’il s’agit simplement de ce qui, par la volonté de Dieu, se rattache à son organisation physique. Tandis que l’homme possède une âme et un esprit qui, en vertu de leur origine, subsistent à toujours, distincts du corps, ayant avec Dieu lui-même un rapport conscient. L’âme participe à une immortalité que le corps tout seul, vivant ici-bas de sa propre nature, ne possède point. La mortalité du corps relève simplement de la volonté de Dieu. Au contraire l’immortalité de l’âme et de l’esprit dépend d’un principe intrinsèque, indestructible qui leur est attaché. Voilà pourquoi aussi le corps de l’homme sera ressuscité et réuni à son âme et à son esprit ; et ainsi «chacun de nous rendra compte pour lui-même à Dieu» (Rom. 14:12).

(*) Immortalité : ici et plus loin : dans le sens d’existence éternelle. À strictement parler, l’âme n’est pas immortelle puisque celle de l’incrédule connaîtra l’horreur de la seconde mort après la résurrection de jugement qui aura réuni cette âme à son corps (Réd.).

5.4.3       [Le Saint Esprit comme puissance de vie de résurrection]

Revenons à notre sujet, c’est-à-dire à la Personne du Seigneur Jésus Christ sous le double caractère que cet évangile est seul à réunir : Il est homme — ici, homme ressuscité — mais il est aussi l’Éternel Dieu ; et Thomas le confesse peu après : «Mon Seigneur et mon Dieu». En ce premier jour de la semaine, il est devant nous, lui, l’homme ressuscité, le second homme ; et comme Esprit vivifiant, il souffle en ses disciples pour leur donner la vie. C’est l’Esprit du Christ Jésus ressuscité des morts ; c’est le Saint Esprit accompagnant cette vie de résurrection et en étant la puissance, que le Seigneur, comme Chef d’une nouvelle famille, confère aux membres de celle-ci. Ils avaient cru en lui, ils avaient donc déjà la vie éternelle. Mais maintenant ils reçoivent cette vie en abondance.

C’est donc là le changement capital qu’introduit l’acte de notre Seigneur Jésus Christ. Certains diront peut-être : «Si l’on obtient la vie éternelle, je ne vois pas quelle différence cela fait que ce soit une vie de résurrection — ni ce qu’elle peut donner de plus». Je voudrais qu’ils prennent conscience à quel point la victoire complète diffère de la lutte avec la mort, la liberté diffère de la servitude, le repos en Christ diffère du tourment qui consiste à poursuivre le bien sans parvenir à l’atteindre, à s’efforcer d’éviter le mal tout en y étant sans cesse entraîné. Ce dernier état est celui de l’homme qui ignore la puissance libératrice de la résurrection de Christ. Mais pour celui qui a la foi, cet état a pris fin. Le croyant réalise qu’il est introduit dans une position nouvelle par la mort et la résurrection du Seigneur Jésus Christ. La vie que je reçois aujourd’hui en Christ est une vie qui n’est pas asservie à la loi ; elle n’a rien à faire avec la terre ni avec ses ordonnances. C’est la vie de Celui qui m’a fait entrer dans la paix parfaite avec Dieu, de Celui qui m’a mis en possession de sa propre relation. Et c’est pour donner cette vie dans sa forme la plus condensée, dans sa plus entière puissance, que le Seigneur souffle dans ses disciples. Il détermine ainsi le nouveau caractère de la vie que déjà ils possédaient, attestant que ce qu’ils vivaient dans la chair était véritablement la vie de la foi au Fils de Dieu. «Je ne vis plus, moi, dit l’apôtre, mais Christ vit en moi» (Gal. 2:20). Et c’est en soufflant ainsi en eux qu’il leur communique cette vie. Il les fait participer à lui-même, tel qu’il est en résurrection, maintenant que toutes les questions ont été à jamais réglées et que la délivrance parfaite, assurée par lui, est accordée aux siens.

Paul fait allusion à cette vérité quand il s’écrie : «Il n’y a donc maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont dans le Christ Jésus». Et pourquoi ? «Car, ajoute-t-il, la loi de l’Esprit de vie dans le Christ Jésus, m’a affranchi de la loi du péché et de la mort» (Rom. 8:1, 2). La loi (ou le principe) de l’Esprit de vie dont parle l’apôtre est exactement ce qui est ici accordé aux disciples. C’est l’Esprit Saint, mais comme Esprit de vie ; non pas ici comme l’Esprit de puissance, opérant des miracles, ou déployant son énergie — ce que les hommes sont portés à admirer beaucoup plus. Encore bien moins était-ce cette prétention extrême selon laquelle l’homme prend la place de Dieu et prétend pardonner les péchés sur la terre. Jamais apôtre ne s’est arrogé un tel droit. C’était un privilège de tout autre nature, et il est aussi vrai actuellement qu’au jour où Jésus ressuscita des morts. Cette action du Saint Esprit consistait, et consiste encore, simplement dans la communication de la vie selon le caractère et la puissance de la résurrection par l’entremise de Jésus Christ, le second homme, ressuscité des morts. C’est la portée de l’expression : «Recevez l’Esprit Saint». L’Esprit de Dieu accompagne toujours la vie que le Seigneur donne. Sans doute, c’est Christ qui est l’objet de la foi et qui donne la vie ; mais, c’est par l’opération du Saint Esprit qu’il la donne. Communiquée durant le cours de sa vie humaine ou dans les jours actuels, c’est toujours l’Esprit de Vie qui accompagne cette vie ; et c’est pourquoi ces paroles de Jésus en confèrent la puissance.

5.4.4       [Remettre et retenir les péchés — l’autorité pour le faire (Jean 20:23)]

Mais il ajoute : «À quiconque vous remettrez les péchés, ils sont remis ; et à quiconque vous les retiendrez, ils sont retenus». On dira : Croyez-vous cela ? Assurément ; et bien plus, je crois que tous les enfants de Dieu possèdent ce pouvoir et sont responsables envers Dieu d’y conformer leur marche. Voilà, diront certains, une prétention peu ordinaire ! Appartient-il à un autre qu’à Dieu de remettre et de retenir les péchés ? Le passage répond par l’affirmative. Mais à qui le Seigneur s’adressait-il ce jour-là ? Non pas seulement aux douze apôtres, mais à tous les disciples. «Le soir donc étant venu, ce jour-là, le premier de la semaine, et les portes du lieu où les disciples étaient... étant fermées...» Si cela avait été une prérogative restreinte au corps des apôtres, assurément l’Esprit aurait pris soin de le signaler. Mais ici le Seigneur parlait aux disciples — à leur nombre tout entier. Prenons la Parole telle qu’elle est écrite. Ce qu’il dit alors ne s’applique-t-il pas à tous ? La vie de résurrection du Seigneur Jésus Christ n’était-elle que pour les douze ? La paix conférée par le Seigneur avec tant de solennité et d’une manière répétée, n’était-elle que pour les apôtres ? Évidemment non ! Les apôtres y eurent part, sans doute, et y attachèrent certainement le plus grand prix.

Sans parler de dons personnels, le Seigneur conférait à ses apôtres une autorité spéciale pour former les assemblées et pour les gouverner une fois formées. Ce privilège de poser le fondement comportait des actes d’initiative et de gouvernement que l’Écriture n’assigne qu’aux apôtres. Mais il entre si peu dans le dessein et le caractère de l’évangile de Jean de s’arrêter à ce qui est officiel, que le mot «apôtre» ne se trouve nulle part dans son récit. L’esprit, la forme, la substance de cet évangile sont consacrés à ce qui est essentiel et qui ne passe pas. De plus, nous le verrons, cette portion de l’évangile place expressément le christianisme sur une base qui lui est propre et lui imprime un caractère tout à fait distinctif devant Dieu et devant les hommes. Ce sont autant de raisons pour nous convaincre que nous ne devons pas restreindre l’application de ces paroles aux douze, ou à d’autres qui leur succéderaient. Encore moins peut-on les rattacher aux fonctions des anciens, comme si le pouvoir de remettre et de retenir les péchés leur avait été officiellement confié ainsi que certains corps religieux le prétendent avec tant d’assurance. Le fait est que le Seigneur Jésus a devant lui ses disciples comme tels ; c’est à eux tous qu’il communique l’Esprit ; c’est donc bien eux tous qu’il charge de cette importante mission. Mais l’histoire inspirée des apôtres, ainsi que les épîtres, ne jettent-elles aucune lumière sur le sens dans lequel les premiers croyants entendirent les paroles de Christ, et dans lequel nous devons aussi les interpréter ? Prenez, par exemple, ceux qui furent convertis le jour de la Pentecôte, et d’autres que le Seigneur ajoutait progressivement. Par qui leurs péchés étaient-il remis ? Ils ne se contentaient pas de croire à l’Évangile individuellement ; ils soumettaient à ceux qui étaient chrétiens avant eux leur confession du nom du Seigneur. C’est là un fait de la plus haute importance. Il ne m’est pas permis de me déclarer chrétien sur la seule opinion que je forme de moi-même, sur mon propre jugement quant à la foi que je professe ; je dois soumettre mes prétentions à ceux qui ont été en Christ avant moi. Toute miraculeuse qu’ait été sa vocation, Paul lui-même n’en fut pas dispensé. Il fut baptisé par un certain disciple ; plus tard il fut reçu par d’autres. Voilà qui est plein de consolation. Pour un chrétien, se refuser à ce privilège, ou l’affaiblir, est de la présomption. En effet, plus la foi d’un homme est véritable et plus il désirera que d’autres en fassent l’examen. Il est bon de se soumettre les uns aux autres et cela dès le commencement, dans la crainte de Dieu qui est plus sage que l’homme et qui a déclaré sa volonté par le moyen de ces paroles du Seigneur Jésus.

Lorsqu’une personne fait profession de revenir à Dieu avec repentir et foi ; lorsqu’elle croit au nom du Seigneur Jésus Christ, il ne lui est pas seulement demandé de se reposer sur ce divin Sauveur pour le salut de son âme ; elle doit «confesser de sa bouche» aussi bien que «croire dans son coeur» (Rom. 10). Cette confession a normalement lieu en rendant témoignage devant le monde. Mais il convient qu’elle soit faite aussi devant d’autres enfants de Dieu. Un nouveau converti pourrait nourrir des pensées portant atteinte à la gloire de Christ ou ne pas être assez sur ses gardes contre tel danger pour son âme et pour celle des autres. Alors s’exerce cette fonction de la plus haute importance qui échoit à ceux qui sont avant lui dans la foi — fonction que l’Écriture ordonne pour la gloire de Dieu, comme nous voyons faire à l’apôtre Paul dans le 15° chapitre des Romains (v. 7). Soyons sûrs que les disciples constitués en assemblée de Dieu sanctionnèrent dans certains cas la rémission des péchés, dans d’autres les retinrent. Ils avaient à recevoir cordialement et en simplicité, comme frères de Jésus, ceux qui peu auparavant se corrompaient peut-être dans toute espèce de péchés, mais qui d’un moment à l’autre s’étaient tournés vers Dieu. N’était-il pas capital dans ces conditions qu’il y ait dans ce monde un corps constitué par le Seigneur, possédant une autorité positive pour reconnaître la réalité de ces conversions ? Capital de prendre acte de la confession de ceux qui étaient sincères et d’examiner les prétentions de ceux qui faisaient profession de christianisme ? Un tel examen ne pouvait aucunement nuire à un véritable enfant de Dieu. Au contraire, c’était une grande consolation pour lui, une joie de plus pour son coeur. Il était reconnu et accueilli ici-bas comme il l’était au ciel où les anges se réjouissent devant Dieu au sujet d’un pécheur qui se repent. Par contre c’était un frein sérieux chaque fois qu’il y avait de la réserve, que quelque méchanceté se cachait ou qu’on percevait le désir d’introduire quelque chose en secret !

L’assemblée de Dieu agissait constamment dans l’esprit de cette règle ; on remettait et on retenait les péchés. Je ne parle pas de la circonstance solennelle où Ananias et Sapphira furent frappés de mort à l’instant et sur place, mais d’occasions où ceux qui péchaient devaient être retranchés puis rétablis publiquement. Les deux épîtres aux Corinthiens illustrent les deux faces de ce sujet. Un homme avait été retranché comme méchant à la suite de ce que Paul avait écrit dans la première épître (chap. 5). Dans la seconde, le cas est de nouveau examiné : «il suffit, pour un tel homme — déclare l’apôtre — de cette punition qui lui a été infligée par le grand nombre, de sorte qu’au contraire, vous devriez plutôt pardonner et consoler, de peur qu’un tel homme ne soit accablé par une tristesse excessive. C’est pourquoi je vous exhorte à ratifier envers lui votre amour» (2 Cor. 2:6 à 8). Dans ce cas, nous trouvons d’un côté le péché retenu, de l’autre le péché remis. Et je pense qu’une des raisons pour lesquelles les chrétiens ont cessé de tenir leur position séparés du monde et de marcher heureux dans la joie que le Seigneur donne, source de riches bénédictions pour les autres, c’est qu’ils ont perdu de vue cette responsabilité, la traitant de fonction ministérielle ou de puissance depuis longtemps évanouie. L’Église, qui avait pour dot l’amour et la gloire du Seigneur Jésus, n’a pas, sous prétexte de charité, maintenu sa position de peuple à part ; elle a cru pouvoir annexer le monde, christianiser des foules et des peuples entiers sans ce contrôle de la foi individuelle. Mais aucune indulgence charitable ne peut être en profit à ceux qui ne croient pas. Il n’en est pas même question envers ceux qui ont la foi. Les bornes publiques et distinctives de la grâce et de la sainteté ont ainsi été foulées aux pieds, et par conséquent la fonction qui consiste à remettre et à retenir les péchés — si l’on excepte les superstitieux qui en font un acte sacerdotal — a été sous-estimée ou même absolument mise de côté.

Les paroles du Seigneur enseignent au contraire que l’assemblée chrétienne dans ce monde doit être connue comme le témoignage public et l’expression de ce que la grâce a fait. De quelle manière ? En recevant ceux dont la confession lui paraît satisfaisante et en rejetant publiquement ce qui ne se recommande pas à sa conscience. Précisons bien que le critère pour être reçu n’est pas un certain degré de lumière et d’intelligence. Sans aucun doute, l’intelligence spirituelle a sa place et sa valeur. Mais soyons certains d’une chose : ce que Jésus souffla en ses disciples n’était pas de l’intelligence simplement ; c’était sa propre vie de résurrection. Et c’est bien là ce qu’il voudrait nous voir accueillir ; c’est là ce que nous devons reconnaître chez ceux qui se présentent. Il vous a vivifiés ensemble avec lui, vous ayant pardonné toutes vos fautes (Col. 2:13). Ceci ne permet pas de sanctionner le péché sous prétexte que la vie de Christ est aussi là. Mais nous devons accueillir les brebis et les agneaux de Christ et témoigner un grand support en nous occupant des fautes qui sont les fruits d’une fausse position et d’un mauvais enseignement. Prenons bien garde de ne pas faire le jeu de l’ennemi en ayant même l’apparence de confondre le principe sur lequel nous recevons, avec un certain degré d’instruction ou d’expérience chrétiennes. Retenons ferme ce fait — grand, simple et infini — que Jésus souffle en ses disciples l’Esprit de sa propre vie de résurrection. À ce titre nous devons recevoir les plus faibles comme faisant partie de l’assemblée chrétienne. Mais si d’une part nous accueillons, de l’autre ne craignons pas de rejeter, selon que la confession est, ou n’est pas digne du nom de Jésus. Un homme a-t-il véritablement la vie de résurrection de Christ ? attendez-vous de sa part à la sainteté, fruit d’une conscience purifiée. De plus nous pouvons admettre que Christ sera la mesure de tous ses jugements, de même qu’il est la source de toutes ses bénédictions, et, après tout, l’objet dont son âme sera occupée. C’est pourquoi, le nom de Jésus, passeport unique et suffisant pour la simple créature qui possède en lui la vie éternelle, ce même nom reste la pierre de touche pour rejeter toute prétention qui compromet Sa gloire. Que le Seigneur soit pour nous, comme il l’est en vérité, la parfaite, la seule mesure. S’il est reconnu honoré tout ira bien, et nous en serons bénis. En revanche, essayer d’unir Christ au péché est une tentative fatale. Quoi de plus outrageant pour Dieu ? Aussi, il est de toute importance que nous le tenions, lui, fermement devant les yeux ; nous éviterons ainsi les pièges tendus pour nous faire ériger des systèmes, des théories ecclésiastiques, choses que nous avons laissées derrière nous.

Soyons persuadés que toute théorie religieuse est fausse si d’une manière quelconque on lui permet de voiler la valeur de Christ. S’associer avec un système voulant retenir quelque chose qui n’est pas de Christ, ne pas «apporter la doctrine de Christ», c’est la ruine. Un homme pourrait paraître aussi orthodoxe qu’un apôtre sur la vérité ecclésiastique, et posséder impeccablement toute autre vérité du Nouveau Testament, que vaut toute cette science là où le nom de Christ est déshonoré ? Mais inversement là où Christ est l’objet de l’âme, même si celui qui le confesse est très ignorant, Christ a soufflé Sa vie en lui. Et si nous sommes soumis à Christ, notre règle de conduite est claire : Quiconque se présente au nom de Jésus est le bienvenu de nos coeurs. C’est l’affaire de l’Église d’accueillir tous ceux-là, et de les instruire. Comment, en effet, croîtraient-ils en lumière, où trouveraient-ils à redresser leurs fausses notions, si ce n’est dans l’Église de Dieu ? Par contre si nous les tenons à l’écart jusqu’à ce qu’ils soient parfaitement établis, c’est pour eux-mêmes une impossibilité et pour nous cela signifie l’abandon de notre position de secours et de responsabilité envers eux. L’Assemblée de Dieu est la colonne et le soutien de la vérité, et la vérité ne peut réellement s’apprendre que si l’on vit en elle ; m’en faut-il davantage pour recevoir ceux qui eux-mêmes ont reçu Christ ? Puis-je moi-même me vanter d’en posséder davantage ? Alors, pourquoi la moindre hésitation ?

Que le Seigneur nous apprenne à écarter les difficultés et qu’il ouvre nos coeurs pour accueillir les âmes chaque fois qu’il n’y a pas trace d’opposition à Dieu dans la foi ou dans les moeurs. Je ne dis pas chaque fois que se trouve la doctrine de la justification par la foi : bien des choses mauvaises peuvent marcher de concert avec cette doctrine retenue et même enseignée. Ces paroles de notre Seigneur Jésus Christ constituent une règle immuable, et nous sommes responsables d’agir d’après elles. Si nous sommes rassemblés en son nom, une expression claire, ferme, de notre position, de nos privilèges doit y correspondre. Notre action collective doit être aussi ferme en faveur de la vérité que notre marche individuelle. Possédant Christ, estimant ce don, nous sommes tenus en son Nom de remettre les péchés, et de les retenir s’il reste quelque chose qui soit incompatible avec ce Nom ! Nous n’avons aucunement la prétention de nous interposer entre Dieu et l’homme. Le pardon aussi bien que la condamnation restent du ressort du Juge suprême. Jamais l’Église ne réclama un tel droit ; jamais les apôtres n’aspirèrent à une action pareille. Mais il est clair que Jésus appelait les disciples collectivement à se charger tant de retenir que de remettre les péchés. Et, comme nous l’avons vu, ce privilège fut exercé dans l’Assemblée chrétienne sous son double aspect, à savoir de retrancher ou au contraire de rétablir devant les hommes. Non pas, répétons-le, comme question éternelle entre Dieu et l’âme, mais comme affaire d’administration, comme devoir envers Christ d’accueillir le vrai et le bien, de rejeter le faux et le mal.

Que le Seigneur nous accorde de ne pas manquer à cette responsabilité et de L’honorer ainsi collectivement !