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SIMPLES ENTRETIENS SUR LES ÉVANGILES
Samuel Prod’hom
Ces Simples Entretiens sur les Évangiles sont une étude biblique ayant parue dans un périodique pour enfants intitulé «la Bonne Nouvelle annoncée aux Enfants».
Table des matières :
2.1 Chapitre 1 v. 1-17 — La généalogie de Jésus Christ
2.2 Chapitre 1 v. 18 à 25 — Naissance du Seigneur
3.1 Chapitre 2 v. 1-12 — Les mages
3.2 Chapitre 2 v. 13-18 — Hérode et les enfants de Bethléhem
3.3 Chapitre 2 v. 19-23 — Retour d’Égypte
4.1 Chapitre 3 v. 1-12 — Jean le Baptiseur
4.2 Chapitre 3 v. 13-15 — Baptême de Jésus
4.3 Chapitre 3 v. 16, 17 — Le Saint Esprit descendant sur Christ
5.1 Chapitre 4 v. 1-11 — La tentation
5.2 Chapitre 4 v. 1-3 — Première tentation
5.3 Chapitre 4 v. 5-7 — Seconde tentation
5.4 Chapitre 4 v. 8-11 — Troisième tentation
5.5 Chapitre 4 v. 12-17 — Retour de Jésus en Galilée
5.6 Chapitre 4 v. 18-22 — Appel des disciples
5.7 Chapitre 4 v. 23-25 — Activité de Jésus
6.1 Chapitre 5 — Le sermon sur la montagne
6.2 Chapitre 5 v. 1-12 — Les «bienheureux»
6.3 Chapitre 5 v. 13-16 — Sel et lumière
6.4 Chapitre 5 v. 17-37 — La loi maintenue et dépassée dans le royaume
7.1 Chapitre 6 v. 1-18 — Manière de pratiquer la piété
7.2 Chapitre 6 v. 19-34 — Le but de la vie
8.1 Chapitre 7 v. 1-12 — Conduite envers autrui
8.2 Chapitre 7 v. 13, 14 — Chemin étroit et chemin large
8.3 Chapitre 7 v. 15-23 — Faux prophètes et faux ouvriers
8.4 Chapitre 7 v. 24 à 29 — Conclusion
9.1 Chapitre 8 v. 1-15 — Trois guérisons
9.2 Chapitre 8 v. 16, 17 — À la suite de Jésus
9.3 Chapitre 8 v. 18-22 — À la suite de Jésus
9.4 Chapitre 8 v. 28 à 34 — Au pays des Gergéséniens
10.1 Chapitre 9 v. 1-9 — Guérison d’un paralytique
10.2 Chapitre 9 v. 9-13 — Appel de Matthieu
10.3 Chapitre 9 v. 14-17 — Le vin nouveau et les vieilles outres
10.4 Chapitre 9 v. 18-26 — Résurrection d’une jeune fille
10.5 Chapitre 9 v. 27-34 — Guérison de deux aveugles et d’un muet
10.6 Chapitre 9 v. 35-38 — Les brebis sans berger
11 Chapitre 10 — Mission des douze disciples
12.1 Chapitre 11 v. 1-6 — Les disciples de Jean auprès de Jésus
12.2 Chapitre 11 v. 7 à 19 — Jésus rend témoignage à Jean
12.3 Chapitre 11 v. 20-24 — Reproches de Jésus
12.4 Chapitre 11 v. 25-30 — La révélation du Père
12.5 Chapitre 11 — Appel au Sauveur
13.1 Chapitre 12 v. 1 à 8 — Le Fils de l’homme Seigneur du sabbat
13.2 Chapitre 12 v. 9-13 — Guérison d’un homme ayant la main sèche
13.3 Chapitre 12 v. 22-32 — Le blasphème contre l’Esprit
13.4 Chapitre 12 v. 33 à 37 — Bon trésor et mauvais trésor
13.5 Chapitre 12 v. 38-42 — Le signe de Jonas
13.6 Chapitre 12 v. 43 à 45 — Le sort d’Israël incrédule
13.7 Chapitre 12 — La mère et les frères du Seigneur
14.1 Chapitre 13 — Parabole du semeur
14.2 Chapitre 13 v. 10-17 — Pourquoi Jésus parlait en paraboles
14.3 Chapitre 13 v. 18-23 — Explication de la parabole du semeur
14.4 Chapitre 13 — Les six paraboles du royaume des cieux
14.4.1 Chapitre 13 — v. 24-30 — Parabole de l’ivraie
14.4.2 Chapitre 13 v. 31, 32 — Parabole du grain de moutarde
14.4.3 Chapitre 13 v. 33 — Parabole du levain
14.4.4 Chapitre 13 v. 36-43 — Explication de la parabole de l’ivraie
14.4.5 Chapitre 13 v. 44 — Parabole du trésor
14.4.6 Chapitre 13 v. 45, 46 — Parabole de la perle de grand prix
14.4.7 Chapitre 13 v. 47, 48 — Parabole du filet
14.5 Chapitre 13 — Jésus dans son pays
15.1 Chapitre 14 v. 1-12 — Mort de Jean le Baptiseur
15.2 Chapitre 14 v. 13-21 — Multiplication des pains
15.3 Chapitre 14 v. 22, 23 — Jésus sur la montagne
15.4 Chapitre 14 v. 24-33 — Les disciples dans la tempête
16.1 Chapitre 15 v. 1-11 — La tradition
16.2 Chapitre 15 v. 12-20 — La source de toute souillure
16.3 Chapitre 15 v. 21-28 — La femme cananéenne
16.4 Chapitre 15 v. 29-39 — Seconde multiplication des pains
17.1 Chapitre 16 v. 1-14 — Un signe
17.2 Chapitre 16 v. 5-12 — Disciples oublieux
17.3 Chapitre 16 v. 13-20 — Confession de Pierre
17.4 Chapitre 16 — L’Assemblée
17.6 Chapitre 16 v. 21-28 — Jésus annonce sa mort
18.1 Chapitre 17 v. 1-8 — La transfiguration
18.2 Chapitre 17 v. 9-13 — Élie
18.3 Chapitre 17 v. 14-21 — Impuissance des disciples pour chasser un démon
18.4 Chapitre 17 v. 24-27 — Les didrachmes
19.1 Chapitre 18 v. 1-5 — Ceux qui entrent et ceux qui sont grands dans le royaume
19.2 Chapitre 18 v. 6-10 — Les occasions de chute
19.3 Chapitre 18 v. 10-14 — La valeur d’un seul petit enfant
19.4 Chapitre 18 v. 15-17 — Comment régler les torts entre frères ?
19.5 Chapitre 18 v. 18-20 — Je suis là au milieu d’eux
19.6 Chapitre 18 v. 21-35 — Comment pardonner ?
20.1 Chapitre 19 v. 1-12 — Question touchant le mariage
20.2 Chapitre 19 v. 13, 14 — Encore les petits
20.3 Chapitre 19 v. 16-26 — Le jeune homme riche
20.4 Chapitre 19 v. 27-30 — Récompense des douze
21.1 Chapitre 20 v. 1-16 — L’ouvrier de la onzième heure
21.2 Chapitre 20 v. 17-19 — En chemin pour Jérusalem
21.3 Chapitre 20 v. 29-34 — Guérison de deux aveugles
22.1 Chapitre 21 v. 1-11 — Entrée royale de Jésus à Jérusalem
22.2 Chapitre 21 v. 12-17 — Jésus dans le temple
22.3 Chapitre 21 v. 18-22 — Le figuier stérile
22.4 Chapitre 21 v. 23-32 — Jésus et les chefs du peuple
22.5 Chapitre 21 v. 33-41 — Parabole des cultivateurs de la vigne
22.6 Chapitre 21 v. 42-46 — La maîtresse pierre de coin
23.1 Chapitre 22 v. 1-14 — Les noces du fils du roi
23.2 Chapitre 22 v. 15-22 — À qui payer le tribut ?
23.3 Chapitre 22 v. 23-33 — Question des sadducéens quant à la résurrection
23.4 Chapitre 22 v. 34-40 — Question des pharisiens
23.5 Chapitre 22 v. 41-46 — Question de Jésus aux pharisiens
24.1 Chapitre 23 v. 1-12 — Discours de Jésus aux foules et aux disciples
24.2 Chapitre 23 v. 13-39 — Sept fois «malheur»
25.1 Chapitre 24 v. 1-3 — Question des disciples touchant le temple
25.2 Chapitre 24 v. 4-14 — Première partie de la réponse de Jésus
25.3 Chapitre 24 v. 15-28 — Seconde partie de la réponse de Jésus
25.4 Chapitre 24 v. 20-31 — La venue du Fils de l’homme
25.5 Chapitre 24 — À quoi l’on connaîtra la proximité de la venue du Fils de l’homme
25.6 Chapitre 24 v. 36-44 — Exhortations à la vigilance
25.7 Chapitre 24 v. 45-51 — L’esclave établi sur les domestiques de la maison
26.1 Chapitre 25 v. 1-13 — Parabole des dix vierges
26.2 Chapitre 25 v. 14-30 — Parabole des talents
26.3 Chapitre 25 v. 31 à 41 — Le trône du Fils de l’homme
27.2 Chapitre 26 v. 3-5 — Premier conseil chez Caïphe
27.3 Chapitre 26 v. 6-13 — Jésus chez Simon le lépreux
27.4 Chapitre 26 v. 14-16 — Judas vend son Maître
27.5 Chapitre 26 v. 17-25 — La dernière Pâque
27.6 Chapitre 26 v. 26-30 — Institution de la Cène
27.7 Chapitre 26 v. 31-35 — Avertissement donné aux disciples
27.8 Chapitre 26 v. 36-46 — Gethsémané
27.9 Chapitre 26 v. 47-56 — Arrestation de Jésus
27.10 Chapitre 26 v. 57-68 — Comparution devant Caïphe
27.11 Chapitre 26 v. 69-75 — Reniement de Pierre
28.1 Chapitre 27 v. 1-10 — Fin de Judas
28.2 Chapitre 27 v. 11-26 — Jésus devant Pilate
28.3 Chapitre 27 v. 27-44 — La crucifixion
28.4 Chapitre 27 v. 45-49 — L’abandon de Dieu
28.5 Chapitre 27 v. 50-61 — Mort et ensevelissement de Jésus
28.6 Chapitre 27 v. 62-66 — La garde au sépulcre
29.1 Chapitre 28 v. 1-14 — Résurrection de Jésus
29.2 Chapitre 28 v. 5-10 — Apparition de l’ange aux femmes
29.3 Chapitre 28 v. 16-20 — Jésus et ses disciples en Galilée
Le mot évangile signifie : «Bonne nouvelle». En effet, quelle bonne nouvelle que celle qui présente aux hommes un Sauveur parfait, expression de l’amour de Dieu pour eux !
Nos lecteurs savent que les Évangiles sont au nombre de quatre et que tous, ils racontent la vie du Seigneur Jésus ici-bas. Mais vous êtes-vous demandé pourquoi Dieu nous a donné quatre écrits inspirés pour faire connaître la vie de son Fils bien-aimé dans ce monde, lorsqu’il semble qu’un seul aurait suffi ? La raison se trouve dans le fait que le Seigneur devait être présenté sous des caractères divers. Un récit unique ne pouvait convenir à l’Esprit de Dieu pour montrer, dans ses gloires diverses, celui dont les prophètes avaient parlé, qui était tout à la fois le Messie promis aux Juifs, le fils de David, Emmanuel (Dieu avec nous), le Serviteur et prophète, le Fils de l’homme, celui qui tout en étant la semence de la femme était en même temps le Fils de Dieu, Dieu lui-même. Il a fallu, pour révéler une Personne si glorieuse, quatre récits qui le présentent sous les quatre grands caractères dont les prophètes avaient parlé.
MATTHIEU place devant nous le Seigneur sous le caractère de Messie promis aux Juifs, il est appelé au premier verset : «Jésus Christ, fils de David, fils d’Abraham».
MARC raconte la vie du Seigneur comme répondant au caractère de prophète ou de serviteur dont Ésaïe, entre autres, a parlé (Chap. 42:1 ; 49:3, 5, 6 ; 52:13 ; 62:11). Le Psaume 40 le montre comme ayant annoncé la justice dans la congrégation d’Israël (v. 9, 10). Moïse a annoncé un prophète que l’Éternel susciterait au peuple (Deutéronome 18:15, etc.). Voilà déjà deux caractères du Seigneur qui occupent une grande place dans l’Ancien Testament : celui de Messie et celui de Serviteur.
Le troisième, non moins glorieux, est celui que LUC présente : le Fils de l’homme, l’homme selon les conseils de Dieu. Le premier homme, Adam, a, par son péché, perdu droit à tout, sauf au jugement. Le second homme, semence de la femme — ce qu’Adam n’était pas, puisqu’il n’était pas né de femme — hérite, en vertu de la rédemption, de tout ce que le premier a perdu ; c’est pourquoi il dut mourir et tout racheter ; aussi c’est à lui, l’homme parfait, qu’appartiennent la gloire et la domination sur toute la création, comme on le voit (Psaume 8:3 à 9 et Daniel 7:13 et 14).
Il reste encore le plus glorieux des caractères de Christ : celui de Fils de Dieu, celui sans lequel les trois autres ne pouvaient avoir leur réalisation parfaite, car le Messie, le Serviteur, le Fils de l’Homme, devait être le Fils de Dieu, Dieu manifesté en chair, le Créateur des cieux et de la terre qui est la lumière et la vie des hommes (Jean 1:4). C’est l’apôtre JEAN qui nous le présente comme Fils de Dieu ici-bas.
Ces quelques mots aideront nos lecteurs à entrevoir les glorieuses raisons que Dieu a eues pour faire écrire quatre récits concernant la présentation de son Fils bien-aimé aux hommes. Vous comprendrez qu’il est absurde d’unifier ces récits comme certains hommes le voudraient, sous prétexte de rendre les Évangiles plus compréhensibles, en abolissant les différences et les prétendues contradictions qui s’y trouvent ; ils n’ont pas compris que ce sont quatre récits différents, et très différents, et non quatre répétitions plus ou moins concordantes.
L’évangéliste conduit par l’Esprit de Dieu, et non remis aux soins de sa mémoire, a, dans chacun des Évangiles, rapporté les récits, les miracles, les paraboles, qui servaient à mettre en relief les caractères du Seigneur que Dieu voulait présenter ; de là proviennent les différences que l’on y trouve. Tout ce que le Seigneur a dit et fait, quoique parfait, n’était pas nécessaire pour présenter la vérité à l’égard de sa Personne ; aussi ce qui était utile à un évangile ne l’était pas toujours à l’autre, comme le confirme l’exemple suivant : Matthieu annonce la naissance du Messie, le roi des Juifs ; ce sont des mages, des gens de cour royale, qui viennent lui rendre l’hommage dû à un roi ; ils lui apportent des dons, de l’or, de l’encens et de la myrrhe ; tout y est en rapport avec le caractère de roi. Marc, qui présente le ministère du Serviteur, ne parle pas de sa naissance. Il n’est pas nécessaire de connaître la naissance ou la généalogie d’un serviteur ; on attend de lui l’accomplissement de son service. Luc, au contraire, entre dans beaucoup de détails relatifs à la naissance du Fils de l’homme, la semence de la femme, entrant dans ce monde dans l’humilité la plus profonde. Il est adoré par d’humbles bergers dans une étable ; et les anges qui célèbrent sa naissance disent : «Gloire à Dieu dans les lieux très hauts ; et sur la terre, paix ; et bon plaisir dans les hommes» (Luc 2:14). Tout cela, avec d’autres détails encore, est en accord parfait avec le caractère de Fils de l’homme. En Jean, pourrait-il y avoir une généalogie ou une naissance, puisque le sujet est le Fils de Dieu ? Absolument pas ! «Au commencement — des choses créées — était la Parole ;... et la Parole était Dieu» (Jean 1:1). Et lorsqu’il s’agit de sa présence au milieu des hommes, il est dit : «Et la Parole devint chair, et habita au milieu de nous (et nous vîmes sa gloire, une gloire comme d’un fils unique de la part du Père)» (Jean 1:14). On voit que pas un détail de chacun de ces récits ne peut être remplacé par ceux d’un autre. En en faisant un seul, on ne distingue plus rien. Il en est ainsi tout au long des quatre évangiles, quoique ce ne soit pas toujours facile à discerner.
Le Seigneur Jésus est donc présenté en Matthieu comme l’objet des promesses et des prophéties faites au peuple de l’Éternel (on pense qu’il a été écrit pour les croyants d’entre les Juifs, afin de fortifier leur foi en la personne de leur Messie que le peuple avait rejeté ; de là viennent les nombreuses citations de l’Ancien Testament, surtout d’Ésaïe, qui a beaucoup parlé du Christ). La généalogie est, comme le premier verset l’indique, celle de Jésus Christ, fils de David, fils d’Abraham, l’héritier des promesses faites à Abraham, et l’héritier du trône de David. Elle part d’Abraham et traverse trois séries de quatorze générations chacune, pour arriver à Joseph, le mari de Marie, mère de Jésus. C’est la généalogie officielle du Seigneur, seule valable pour les Juifs, parce qu’elle devait être la généalogie paternelle ; elle était donc celle de Joseph, qui était estimé parmi les Juifs être le père de Jésus (voir Luc 3:23). Les trois séries de générations correspondent aux trois grandes phases de l’histoire d’Israël depuis l’appel d’Abraham : d’Abraham à David (v. 2 à 6) ; de David à la transportation de Babylone (v. 7 à 11) ; et de la transportation à la naissance de Christ (v. 12 à 16).
Si la venue du Christ au milieu de son peuple répondait aux promesses faites dès longtemps, elle était toutefois en rapport avec la grâce de Dieu envers le peuple ; et le Seigneur naissant dans ce monde ne pouvait pas surgir d’une race d’hommes illustres dont l’histoire serait sans taches, puisqu’il descendait ici-bas comme Sauveur d’une race perdue. Sa gloire ne provenait donc pas de ses pères selon la chair, mais bien de ce qu’il était en lui-même, venu du ciel pour apporter la grâce et la vérité. Ainsi c’est sur le pied de la pure grâce qu’il est en rapport avec son peuple. Aussi voyons-nous dans cette généalogie glorieuse pour le Juif orgueilleux de descendre d’Abraham et de David, des noms qui nous rappellent de tristes choses ; car à côté d’hommes d’heureuse mémoire, tels qu’Abraham, David, Ézéchias, Josias, nous voyons des rois impies tels que Joram, Achaz, Manassé.
En outre, l’Esprit de Dieu a trouvé bon de mentionner des personnes faciles à omettre dans une généalogie officielle, si Dieu n’avait pas eu des raisons spéciales pour les citer ; ce sont quatre femmes au souvenir desquelles se rattachent des faits humiliants dans l’histoire des ancêtres. Thamar (v. 3), rappelle l’immoralité de Juda. Rahab (v. 5), une prostituée cananéenne, reçut les espions envoyés par Josué à Jéricho. Ruth (v. 5), n’a rien de déshonorant dans sa vie, sauf qu’elle était une Moabite, — et l’Éternel avait dit de ce peuple qu’ils n’entreraient jamais dans la congrégation d’Israël. Puis le nom de la mère de Salomon (v. 6) rappelle le grave péché de David qui avait fait mourir Urie à la guerre pour prendre sa femme.
Mais si ces noms font honte au cœur naturel qui cherche des sujets de gloire dans l’homme, les péchés qu’ils rappellent font ressortir l’immense grâce de Dieu qui s’est occupé de tels êtres en leur donnant un Sauveur. Nous ne pouvons entrer dans l’histoire de chacune de ces femmes ; nous y verrions l’activité de leur foi, car là où la grâce de Dieu opère, il y a aussi des œuvres qui en sont le fruit. Puis Dieu leur a accordé l’honneur de figurer dans la généalogie du Messie. Combien il est vrai que là où le péché a abondé, la grâce a surabondé (Romains 5:20).
Le récit de la naissance du Christ, très court dans notre évangile, est raconté de manière à établir par les Écritures que Jésus, méconnu et rejeté par son peuple, était bien le Messie promis. L’évangéliste montre que sa naissance eut lieu conformément à cette prophétie d’Ésaïe 7:14 : «Voici, la vierge concevra et elle enfantera un fils, et appellera son nom Emmanuel» (Emmanuel veut dire : Dieu avec nous). Un ange annonça à Joseph qu’il ne devait pas craindre de prendre la vierge Marie pour sa femme, car elle mettrait au monde un fils, qui, tout en étant bien fils de Marie, serait d’origine divine, ainsi que son nom l’indiquait. L’ange lui dit : «Tu appelleras son nom Jésus, car c’est lui qui sauvera son peuple de leurs péchés». Jésus signifie : l’Éternel-Sauveur. Ce nom nous dit que le Christ est bien l’Éternel, mais l’Éternel-Sauveur, entrant dans ce monde par la naissance comme un homme, afin de sauver les pécheurs du milieu de son peuple et du monde entier.
La personne du Seigneur Jésus est merveilleuse et insondable. Il est homme tout en étant Dieu. Il fallait qu’il en soit ainsi pour que nous ayons un Sauveur. Il fallait qu’il soit homme pour pouvoir mourir ; mais il fallait qu’il soit Dieu afin de triompher de la mort, ressusciter et entrer dans la gloire, frayant ainsi au croyant le chemin qui délivre du jugement et amène jusque dans la sainte présence de Dieu. Aussi l’union de la divinité et de l’humanité de Christ est-elle un mystère insondable, que Dieu seul connaît et qui fait le sujet de notre adoration et de nos louanges dès maintenant et pour l’éternité. La personne du Seigneur est si glorieuse qu’il dit lui-même : «Personne ne connaît le Fils, si ce n’est le Père». Mais il dit aussi : «Personne ne connaît le Père, si ce n’est le Fils, et celui à qui le Fils voudra le révéler» (Matthieu 11:27). Puissent ceux de nos lecteurs qui ne sont pas encore sauvés, ne pas méconnaître plus longtemps un tel Sauveur ; car : «Comment échapperons-nous, si nous négligeons un si grand salut ?» (Hébreux 2:3).
Au moment de la naissance du Seigneur, des mages en Orient virent une étoile par laquelle ils comprirent que le roi des Juifs était né. Ces mages, qui s’occupaient d’astrologie, de magie et de certaines sciences, étaient en honneur dans les cours royales. Ceux qui sont mentionnés ici, tout en appartenant à cette classe de savants, étaient sans doute pieux ; ils savaient qu’un roi était promis aux Juifs et ils l’attendaient (Nombres 24:17). Avertis de sa naissance par l’apparition de cette étoile, ils se mirent en route afin de lui rendre hommage. Arrivés à Jérusalem, ils demandent à voir le roi des Juifs qui a été mis au monde, s’attendant sans doute à trouver la ville remplie de joie par cet événement. Hélas ! il n’en était rien. Le peuple n’attendait pas plus son roi que les peuples chrétiens n’attendent aujourd’hui la venue du Seigneur Jésus (1 Thessaloniciens 1:10).
Lorsque Hérode apprit l’arrivée des mages et le but de leur visite, il fut troublé et tout Jérusalem avec lui. Il réunit donc les principaux sacrificateurs et les scribes, pour leur demander où le Christ devait naître. Ils lui répondirent : «À Bethléhem de Judée ; car il est ainsi écrit par le prophète : Et toi, Bethléhem, terre de Juda, tu n’es nullement la plus petite parmi les gouverneurs de Juda, car de toi sortira un conducteur qui paîtra mon peuple Israël» (v. 5, 6 et cf. Michée 5:2).
Le trouble causé par la nouvelle de la naissance du roi promis par les Écritures, nous fait voir dans quel triste état se trouvait le peuple. Ramenés de la captivité, conservés sur leur terre, au travers de mille difficultés, pour attendre leur Messie ; gémissant sous le joug des Romains ; ayant sur eux un roi exécrable, le misérable Hérode (*), un étranger ; possédant les Écritures qui leur annonçaient la délivrance par l’arrivée de leur vrai roi, le fils de David, les Juifs ne l’attendent nullement ; au contraire, sa naissance les troubla au lieu de les réjouir. Cela nous fait voir que la présence de Dieu gêne les hommes plus que leurs maux et leurs peines. Hélas ! comme nous l’avons dit : Aujourd’hui, avec la lumière du christianisme, on n’attend pas davantage le Seigneur, et pourtant chacun, comme les sacrificateurs et les scribes d’alors, possède la parole de Dieu qui enseigne clairement que le Seigneur va revenir. Il y a longtemps que l’Église professante a perdu de vue cette vérité, qui déplaît au cœur naturel et qui effraie le monde, car après l’enlèvement des saints, éclateront les jugements apocalyptiques. «Le jour du Seigneur vient comme un voleur dans la nuit. ...Alors une subite destruction viendra sur eux ... et ils n’échapperont point» (1 Thessaloniciens 5:1-3), tandis qu’il apparaîtra «à salut à ceux qui l’attendent» (Hébreux 9:28). Tous nos lecteurs l’attendent-ils ?
(*) Cet Hérode est appelé dans l’histoire «Hérode le Grand». D’origine Iduméenne (les Iduméens étaient issus d’Edom et n’avaient aucun droit à régner en Israël), il était par un de ses nombreux mariages, allié à la célèbre famille juive des Macchabées. C’est par finesse qu’il obtint des Romains le trône de Judée. Véritable tyran, cruel, ambitieux, il faisait mourir tous ceux qui lui portaient ombrage, dans le peuple comme dans sa famille. Soupçonneux, méfiant, ce qui arrive lorsqu’on a mauvaise conscience, il se débarrassait de ce qui le gênait. Cela fait comprendre le peu de cas qu’il fit de la vie des petits enfants de Bethléhem, pensant atteindre dans le nombre un prétendant au trône qu’il occupait à tort. Pour rendre son règne tolérable aux Juifs, qui naturellement le haïssaient, il fit restaurer splendidement le temple de Jérusalem. On travailla quarante-six ans à cette reconstruction ; c’est à ce temps que les Juifs font allusion en Jean 2:20. Hérode mourut l’année après le massacre des enfants de Bethléhem, après un règne de trente-quatre ans.
Son fils Archélaüs lui succéda ; il fut aussi cruel que son père. Son règne fut court.
Hérode, dont il est parlé dans les évangiles, pendant le ministère du Seigneur, était un autre fils d’Hérode le Grand, mais il était, comme nous le voyons en Luc 3:1, tétrarque de la Galilée (Le titre de Tétrarque désignait à l’origine celui qui gouvernait la quatrième partie d’un État démembré). Il régna jusqu’après la mort du Seigneur.
Le roi Hérode, nommé Hérode-Agrippa I dans l’histoire, dont il est parlé au chap. 12 des Actes, sans être fils du précédent, était petit-fils d’Hérode le Grand et roi de Judée.
Agrippa II devant lequel l’apôtre fit son apologie à Césarée, était aussi un Hérode, fils du précédent.
Personne n’était plus troublé à Jérusalem qu’Hérode, le faux roi des Juifs. Aussi appela-t-il secrètement les mages pour savoir quand l’étoile leur était apparue ; puis il les envoya à Bethléhem, leur disant de revenir auprès de lui lorsqu’ils auraient trouvé le petit enfant, feignant de vouloir, lui aussi, lui rendre hommage, tandis que son cœur était rempli du désir de le faire mourir.
Dieu guidait ces mages pieux ; il se servait de la connaissance qu’avaient les sacrificateurs pour leur enseigner où ils trouveraient Celui qu’ils cherchaient, et, lorsqu’ils furent en route, il fit apparaître l’étoile qu’ils avaient vue en Orient ; elle alla devant eux et se tint au-dessus du lieu où était Jésus. «Quand ils virent l’étoile, ils se réjouirent d’une fort grande joie. Et étant entrés dans la maison, ils virent le petit enfant avec Marie sa mère ; et, se prosternant, ils lui rendirent hommage ; et ayant ouvert leurs trésors, ils lui offrirent des dons, de l’or, et de l’encens, et de la myrrhe» (v. 10, 11). Dieu veillait à ce que son Fils reçut, à son entrée dans ce monde, les honneurs dus à un roi. Puisque les chefs de son peuple n’étaient pas en état de les lui rendre, il trouva ces sages d’entre
les Gentils pour accomplir ce service. En Luc, d’humbles bergers sont admis à voir le Seigneur à sa naissance, puisque le peuple ne l’attendait pas.
Dès le début de sa vie ici-bas, le précieux Sauveur a été méconnu et méprisé ; mais Dieu a toujours opéré dans le cœur de quelques-uns pour les amener à le discerner, le recevoir et l’honorer. Il en est de même aujourd’hui.
Dieu veillait sur le divin enfant qui, par sa naissance dans ce monde, était exposé à la haine de Satan et des hommes.
Connaissant les criminelles intentions d’Hérode, Dieu avertit les mages de retourner dans leur pays sans passer auprès du roi, ce qu’ils firent (v. 12). Après leur départ, Joseph eut un songe dans lequel le Seigneur lui apparut et lui dit : «Lève-toi, prends le petit enfant et sa mère, et fuis en Égypte, et demeure là jusqu’à ce que je te le dise ; car Hérode cherchera le petit enfant pour le faire périr» (v. 13).
Avant même qu’Hérode ait formé son dessein criminel, Dieu ordonnait à Joseph de fuir en Égypte. Le misérable roi ignorait qu’au-dessus de lui il y en avait un qui «connaît les pensées des hommes» (Psaume 94:11), et il savait encore moins quelle était la gloire de ce petit enfant, auquel personne ne pouvait ôter la vie, car Jésus ne mourut qu’en se livrant lui-même. Toutefois, pour protéger son Fils, Dieu n’a pas voulu accomplir un miracle qui aurait attiré l’attention des hommes, mais il prévint Joseph en silence, comme si Jésus avait pu être mis à mort. Puis cela permettait l’accomplissement de cette prophétie d’Osée : «J’ai appelé mon fils hors d’Égypte» (Osée 11:1). Comme Israël avait été appelé hors d’Égypte autrefois, Christ devrait l’être, lui aussi, le vrai Israël ; mais avec cette différence que Celui qui devait sortir d’Égypte, n’avait pas besoin d’être délivré, comme Israël l’avait été : il venait lui-même pour délivrer le peuple du pouvoir d’un plus puissant que le Pharaon.
Hérode, voyant que les mages s’étaient joués de lui, fut fort en colère. L’origine et le caractère de cette colère sont faciles à comprendre : Satan savait que la semence de la femme devait lui briser la tête ; aussi, depuis la chute, fit-il tout son possible pour empêcher l’exécution de cette sentence. Sachant que cette semence, Christ, surgirait du peuple juif, il essaya maintes fois d’exterminer cette race, comme en Égypte, lorsque le Pharaon ordonna de jeter les enfants mâles des Hébreux dans le fleuve. Souvent il amena le peuple sous les jugements de Dieu en le poussant à pécher, croyant le détruire de cette manière. La race royale, d’où devait naître le Christ, fut près d’être anéantie par la reine Athalie ; il n’en resta que Joas, un enfant sauvé par la fille du sacrificateur Jéhoïada. Dans notre chapitre, c’est Hérode qui est l’instrument du diable pour faire disparaître Jésus, quand il ordonne de mettre à mort les petits enfants de Bethléhem. Il crut finalement triompher en poussant les hommes à crucifier le Seigneur, mais c’est alors qu’il fut rendu impuissant et eut la tête brisée. Apocalypse 12:4, résume tout cet effort de Satan en nous montrant celui-ci, dans un tableau symbolique, prêt à dévorer «l’enfant mâle» qui devait naître de la femme, symbole d’Israël.
Mais c’est en vain que Satan et les hommes cherchent à s’opposer à Dieu. Dans un jour à venir, les rois de la terre se lèveront ensemble contre l’Éternel et contre son Oint, et il est dit : «Celui qui habite dans les cieux se rira d’eux, le Seigneur s’en moquera» (Psaume 2:4). Croyant ne pas manquer son but, Hérode fait tuer tous les petits enfants mâles qui se trouvent dans le territoire de Bethléhem, depuis l’âge de deux ans et au-dessous, selon le temps, est-il dit, dont «il s’était enquis... auprès des mages» (v. 16). On peut comprendre d’après ce passage qu’il s’était écoulé environ deux ans depuis que l’étoile était apparue aux mages en Orient, leur annonçant la naissance du Seigneur. Donc le petit enfant Jésus était en tout cas dans sa deuxième année à ce moment-là (*).
(*) En prêtant attention au récit biblique. on voit qu’il est absurde de placer les mages et les bergers ensemble à l’étable de Bethlehem, comme on l’a fait dans certains chants et récits relatifs à la naissance du Seigneur, puisque les bergers paraissent à sa naissance, tandis que les mages ne vinrent qu’environ deux ans plus tard.
La douleur causée à Bethléhem par le massacre de ces enfants entrait dans l’accomplissement d’une prophétie de Jérémie (chap. 31:15) : «Une voix a été ouïe à Rama, des lamentations, et des pleurs, et de grands gémissements, Rachel pleurant ses enfants ; et elle n’a pas voulu être consolée, parce qu’ils ne sont pas». Rama désigne la contrée dans laquelle était située Bethléhem. Si le Seigneur avait été reçu, accomplissant la restauration d’Israël dont parle ce chap. 31 de Jérémie, ces petits enfants n’auraient pas été mis à mort ; ils auraient joui de son règne ; mais ayant participé immédiatement à la réjection de Christ, ils auront leur part avec lui dans la gloire céleste, ce qui vaut encore infiniment mieux. Pour la terre, il est vrai, leur mort est un sujet de pleurs. Il est triste aussi de penser qu’un des premiers effets de la présence de Christ ici-bas, a été le massacre de ces petits enfants : cela montre ce qu’est le cœur de l’homme. Mais, comme quelqu’un l’a dit : «Si la terre se vide, c’est pour remplir le ciel». Le but de Dieu est de peupler, avec des hommes parfaitement heureux, une terre nouvelle ; voilà pourquoi, dans son insondable amour, il a fait descendre son Fils bien-aimé sur cette terre corrompue et remplie de violence.
Un ange du Seigneur apparut en songe à Joseph, en Égypte, pour lui annoncer qu’Hérode était mort : «Lève-toi», lui dit-il, «et prends le petit enfant et sa mère, et va dans la terre d’Israël». Comme il avait obéi pour s’en aller, il obéit maintenant pour revenir. En chemin, apprenant qu’Archélaüs régnait en Judée, il craignit d’y aller, sachant, sans doute, que le fils était aussi cruel que le père. Averti encore divinement en songe, Joseph se retira en Galilée et alla se fixer à Nazareth où il habitait auparavant, comme nous l’apprend l’évangile selon Luc (1:26, 27 et 2:4). Marie et Joseph avaient quitté cette ville pour venir à Bethléhem en vue du recensement ordonné par l’empereur Auguste, circonstance dont Dieu se servit pour que son Fils naisse à Bethléhem, selon les Écritures. Ils revinrent à Nazareth non seulement à cause de la méchanceté d’Archélaüs, mais afin que s’accomplisse encore cette parole des prophètes : «Il sera appelé Nazaréen». Ce terme indique non seulement qu’il venait de cette ville, dont le nom signifie : «séparé, consacré», mais désignait aussi le caractère de Jésus comme le vrai Nazaréen, l’homme absolument séparé de toute influence de ce monde pour servir Dieu dans une parfaite consécration. Sa perfection comme nazaréen provenait de sa divinité, mais se réalisait dans sa parfaite humanité. Le nom de nazaréen était aussi un terme de mépris par lequel l’homme, dans son aveuglement et sa haine, désignait Celui qui, dans sa parfaite sainteté, était l’expression de l’amour de Dieu pour le pécheur. Car Nazareth était un endroit méprisé dans la contrée de Galilée, qui, elle-même aussi, était méprisée par les Juifs (*).
(*) Quoique les Galiléens fussent Juifs, les Juifs, dans les évangiles, sont les habitants de la Judée.
Dans quelle humilité le Seigneur est venu pour nous sauver, chers lecteurs, lui, le Fils éternel de Dieu, Dieu lui-même, s’anéantissant comme tel, prenant la forme d’esclave ! Trouvé en figure comme un homme, il s’est abaissé lui-même (Philippiens 2:7, 8). Dès sa naissance, il est méprisé et délaissé des hommes, celui qui réalise dans toute sa vie ici-bas, qu’il est l’«homme de douleurs, et sachant ce que c’est que la langueur, et comme quelqu’un de qui on cache sa face ; il est méprisé, et nous n’avons eu pour lui aucune estime» (Ésaïe 53:3). Dès son entrée dans ce monde, il doit fuir la persécution ; rentré dans son pays, la méchanceté de l’homme le contraint à se retirer dans une contrée et dans une localité méprisées par l’orgueil du Juif ; et là, dans l’humilité, il passe trente années sur lesquelles nous n’avons pas de détails, sauf ce qui est rapporté en Luc 2:41 à 52. Il travaillait du métier de Joseph, car non seulement il est appelé : «le fils du charpentier», mais aussi : «le charpentier», en Marc 6:3.
Cet abaissement du Sauveur ne touche-t-il pas nos cœurs, lorsque nous nous disons en le considérant : «C’est pour moi qu’il a quitté la gloire pour prendre une telle place dans ce monde, et finalement, pour subir sur la croix le jugement terrible que j’avais mérité à cause de mes nombreux péchés» ? Combien alors, la vie de ceux qui connaissent le Sauveur et jouissent de son amour, ne doit-elle pas lui être consacrée et ressembler à la sienne, dans l’humilité, le renoncement, ces caractères du nazaréen, séparé de toute souillure, consacré à Dieu, que lui a réalisés dans toute leur perfection ? Si nous avons le privilège de croire en ce Sauveur bien-aimé, imitons son exemple. Le secret pour suivre sa trace, c’est de l’aimer, et le secret pour l’aimer, c’est de penser à son amour pour nous, et d’en jouir.
Le temps arrive où Christ doit être manifesté à Israël ; mais le Seigneur ne pouvait prendre place au milieu de son peuple dans le triste état où il se trouvait, sans une œuvre opérée dans les cœurs. Ésaïe avait prophétisé que la venue du Seigneur serait annoncée et préparée par un précurseur : «Voix de celui qui crie dans le désert : Préparez le chemin du Seigneur, faites droits ses sentiers» (Ésaïe 40:3). Ces paroles font allusion à ce qui se passait autrefois au moment de l’arrivée d’un souverain. Les routes n’étant pas entretenues comme elles le sont aujourd’hui, on faisait enlever les obstacles, niveler et redresser les chemins, de manière à faciliter la marche du roi et de sa suite. Ici, la préparation pour la réception du roi était morale ; elle devait s’accomplir dans les cœurs, par l’action de la parole de Dieu et du Saint Esprit. Jean le Baptiseur avait reçu de Dieu cette mission au milieu du peuple. Matthieu ne parle pas de la naissance de Jean, mais Luc en donne le récit détaillé et intéressant. Ici, comme en Marc, Jean apparaît soudain, prêchant dans le désert de la Judée et disant : «Repentez-vous, car le royaume des cieux s’est approché». Chose étrange que de voir quelqu’un prêcher dans un désert, mais ce désert représente ce qu’est pour Dieu le cœur du peuple, le cœur naturel de tout homme. Quelle merveilleuse bonté de sa part, qu’il ait fait prêcher les richesses de sa grâce. En effet, Jean avait vécu dans la solitude, dans une séparation entière d’avec un peuple corrompu. Il portait le vêtement des prophètes (voir 2 Rois 1:8) : un manteau de poil de chameau et une ceinture de cuir autour de ses reins ; il se nourrissait de sauterelles et de miel sauvage (v. 4). Les sauterelles, grosses et abondantes en Orient, servent encore à l’alimentation des habitants de ces contrées. Mais celui qui vit pour Dieu, séparé de ce monde, ne se nourrit pas de ce que le monde peut fournir.
Le Seigneur, ou l’Éternel, allait venir dans la personne de Jésus. Le royaume des cieux s’approchait, celui dont le gouvernement siège dans le ciel, en contraste avec les royaumes dont le gouvernement est de la terre. Le Seigneur ne pouvait pas établir son règne sur le peuple dans l’état de péché qui caractérisait celui-ci. S’il s’était présenté soudain dans l’exercice de son pouvoir, il aurait anéanti par le jugement ce peuple, composé uniquement d’hommes pécheurs. Comment donc un pécheur aurait-il place dans un royaume où seul ce qui est de Dieu peut subsister ? C’est ce que Jean annonçait en prêchant la repentance et en disant au peuple de croire en celui qui devait venir (Actes 19:4). Il se tenait à part du peuple, comme nous l’avons vu. On venait à lui de partout ; on confessait ses péchés, puis on était baptisé dans le Jourdain, du baptême de la repentance, et rendu propre pour recevoir le Messie. Dieu agit d’après le même principe pour la conversion du pécheur aujourd’hui ; Dieu lui offre le ciel ; mais à cause de son absolue sainteté, le pécheur ne peut y entrer. Que doit-il faire ? Confesser ses péchés. Ne pas dire seulement : «J’ai eu tort», mais dire : «Voilà ce que j’ai fait», en reconnaissant le jugement qu’il a mérité. Alors il pourra s’écrier, avec le psalmiste : «Je t’ai fait connaître mon péché, et je n’ai pas couvert mon iniquité ; j’ai dit : Je confesserai mes transgressions à l’Éternel ; et toi, tu as pardonné l’iniquité de mon péché» (Psaume 32:5).
Tous ceux qui venaient à Jean en toute droiture de cœur, confessant leurs péchés, étaient propres à recevoir le Seigneur, qui par ses souffrances à la croix, en ferait l’expiation. Mais il se trouvait là aussi des pharisiens et des sadducéens qui voulaient participer au royaume des cieux en vertu de leur position nationale et religieuse, croyant que, pour obtenir cette part, il suffisait d’appartenir à la race d’Abraham, sans que leur état de péché fût en jeu. Ils se trompaient entièrement, car ce n’est qu’en vertu de la grâce, par laquelle Dieu pardonne au pécheur, que le Juif, comme tout homme, peut jouir des bénédictions apportées par le Seigneur. Aussi Jean, indigné de leur manque de conscience et de leur mépris des droits et du caractère de Dieu, leur dit : «Race de vipères, qui vous a avertis de fuir la colère qui vient ?» Il ne leur dit pas qu’ils sont trop mauvais pour éviter cette colère, mais : «Produisez donc du fruit qui convienne à la repentance», c’est-à-dire : «Reconnaissez avec droiture votre état de péché, confessez-le, et que votre marche réponde à vos paroles». Il faut des fruits qui prouvent la réalité de ce que l’on professe. C’était inutile de se vanter de sa position d’enfant d’Abraham ; l’épreuve que Dieu avait faite de ce peuple et, par lui, du cœur de tout homme, était à son terme et n’attirait sur lui que le jugement. Aussi Jean ajoutait : «Déjà la cognée est mise à la racine des arbres ; tout arbre donc qui ne produit pas de bon fruit est coupé et jeté au feu». Le jugement ne s’exécutait pas encore, la hache n’était pas encore levée ; elle était posée au pied de l’arbre, prête à frapper, si les fruits de la repentance ne se produisaient pas.
Jean annonce ensuite l’arrivée de Celui qui venait après lui, qui était plus puissant que lui, dont il n’était pas digne de porter les sandales ; il ne baptiserait pas d’eau, mais de l’Esprit Saint et de feu : de l’Esprit Saint, qui serait la puissance de vie par laquelle ceux qui croyaient pourraient servir et glorifier Dieu dans le nouvel état de choses que le Seigneur introduirait ; de feu, c’est-à-dire du jugement de Christ sur ceux qui ne le recevraient pas. «Il a son van dans sa main, et il nettoiera entièrement son aire et assemblera son froment dans le grenier ; mais il brûlera la balle au feu inextinguible». Le van sert à séparer la balle du grain, lorsqu’on a battu le blé. L’aire était Israël, et le Seigneur venait pour accomplir ce triage et exécuter plus tard le jugement. C’est ce que les Juifs alors, ainsi que tout homme aujourd’hui, avaient à prendre en considération, afin d’agir en conséquence, en acceptant, comme pécheurs coupables, la grâce venue dans la personne de Celui qui sera le Juge pour ceux qui l’auront rejeté comme Sauveur.
Quelle scène merveilleuse ces versets placent devant nous ! Nous venons d’entendre la solennelle invitation à la repentance, adressée par Jean au peuple, quand il annonce l’arrivée d’un plus puissant que lui, le Seigneur, qui sauverait les siens de leurs péchés.
Le peuple attendait Celui qui allait paraître. D’où viendrait-il ? Comment apparaîtrait-il ? Quel serait son aspect ?
Un jour, sur les bords du Jourdain, arrive auprès de Jean un homme venu de Nazareth de Galilée, le plus humble des hommes qui n’ait jamais été vu sur la terre. Il demande le baptême, lui aussi. Jean, enseigné de Dieu, le reconnaît aussitôt (Jean 1:29-31), et veut l’empêcher de se faire baptiser, disant : «Moi, j’ai besoin d’être baptisé par toi, et toi, tu viens à moi !» Que pouvait penser le peuple qui assistait à cette scène ? Celui-là serait-il donc le Messie ? Comment se fait-il qu’il demande le baptême, lui, dont Jean a dit qu’il n’était pas digne de porter les sandales, lui qui doit exercer le jugement sur les pécheurs, lui qui n’a point de péchés à confesser ? Oui, c’est bien lui, mais, mystère insondable ! au lieu d’apparaître dans l’éclat de sa gloire messianique, il vient en grâce se joindre aux pécheurs repentants, prendre place au milieu d’eux ? Il les accompagne dès leurs premiers pas dans le chemin que Dieu leur ouvre pour les sortir de leur triste condition, pour les conduire aux bénédictions qu’il venait leur apporter, avant d’accomplir son oeuvre en jugement. Ces pécheurs repentants étaient les seuls sur la terre d’Israël en qui il puisse prendre plaisir ; c’est ce qu’exprime le Psaume 16:3 : «Tu as dit aux saints qui sont sur la terre, et aux excellents. En eux sont toutes mes délices». Le Seigneur formule la même pensée quand il dit : «Il y aura de la joie au ciel pour un seul pécheur qui se repent, plus que pour quatre-vingt-dix neuf justes qui n’ont pas besoin de repentance» (Luc 15:7). Quel amour que celui dont Jésus a été l’expression ici-bas et qui trouve son plaisir, sa satisfaction dans un pécheur qui se repent ! C’est au milieu de ces pécheurs que nous verrons ce précieux Sauveur tout le long de son ministère ici-bas ; et pour l’éternité, ce sont eux encore, alors glorifiés, qui l’entoureront en célébrant sa grâce et sa gloire dans un monde nouveau. Dieu veuille que tous nos lecteurs soient du nombre !
À Jean le Baptiseur qui, par une humilité bien compréhensible, refusait de le baptiser, Jésus répond : «Laisse faire maintenant, car ainsi il nous est convenable d’accomplir toute justice». Là encore, nous voyons la grâce merveilleuse et condescendante qui le fait s’associer aux pécheurs repentants et à Jean comme serviteur, en lui disant : «Il nous est convenable d’accomplir toute justice». C’était juste, pour celui qui entrait par la repentance dans le chemin de Dieu, de se faire baptiser ; le Seigneur qui entre en grâce dans ce chemin, comme homme, ne veut pas qu’il y ait d’exception pour lui ; Jean doit donc accomplir ce qui est juste à cet égard.
De sa demeure céleste, Dieu contemplait cette scène merveilleuse, où l’objet de ses délices éternelles, l’homme de ses conseils, était confondu avec les autres hommes et refusait toute distinction. Alors il proclame lui-même publiquement ce qui distingue son Fils. Jésus ayant été baptisé, «les cieux lui furent ouverts, et il vit l’Esprit de Dieu descendre comme une colombe, et venir sur lui. Et voici une voix qui venait des cieux, disant : Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai trouvé mon plaisir».
De grandes et merveilleuses choses sont présentées dans ce moment sublime. Énumérons-en seulement quelques-unes :
1° Le ciel est ouvert, afin que les regards de Dieu et son bon plaisir reposent sur un objet selon son cœur, chose que Dieu n’avait pu faire jusqu’ici à l’égard d’aucun homme.
2° Dieu lui-même proclame que Jésus était son propre Fils.
3° La Trinité se manifeste pour la première fois : le Père envoyant le Saint Esprit sur le Fils. Cette pleine révélation de Dieu caractérise les bénédictions du christianisme, où Dieu est révélé comme Père par le Fils et où le Saint Esprit est le sceau par lequel Dieu reconnaît le croyant comme enfant. C’est la grâce parfaite.
4° Le Seigneur est scellé du Saint Esprit en vertu de sa nature divine, absolument exempte de toute tache, afin que, dans la puissance de cet Esprit, cet Homme divin accomplisse son ministère de grâce au milieu des hommes, tandis que le croyant ne peut être scellé du Saint Esprit qu’une fois accomplie l’œuvre expiatoire de Christ. Dieu ne peut le reconnaître comme enfant avant qu’il n’ait été purifié de ses péchés par le sang de Christ.
Remarquons aussi la forme sous laquelle le Saint Esprit descend sur Christ. La colombe exprime l’humilité, la grâce, la douceur qui l’ont caractérisé dans son service d’amour ici-bas.
Quels sujets infinis les évangiles placent devant nous ! Quelle profondeur divine nous entrevoyons dans la glorieuse personne de Jésus, l’Homme-Dieu venu en grâce au milieu des pécheurs ! Mais c’est encourageant de savoir que, si ces choses merveilleuses sont cachées aux sages et aux intelligents, cachées à la raison humaine, elles sont révélées aux petits enfants, c’est-à-dire aux croyants.
Nous avons vu le Seigneur prendre place au milieu des pécheurs repentants. Nous le suivrons dans l’activité de sa grâce ; mais auparavant, nous le voyons emmené par l’Esprit pour être tenté par le diable ; car il est le second Homme, l’Homme obéissant, qui vient remplacer le premier homme, Adam, l’homme désobéissant.
Au commencement, après avoir préparé sur la terre un lieu de délices, Eden, Dieu y plaça Adam, chef de la création, capable de jouir d’un bonheur parfait dans l’innocence, à la seule condition d’obéir à la parole de Dieu. Il ne devait pas manger du fruit défendu. Dans cet heureux état, Satan vint tenter nos premiers parents en leur offrant autre chose que ce que Dieu leur avait accordé, en les engageant à faire ce qui leur était interdit. Hélas ! ils désobéirent à Dieu ; ils tombèrent sous le pouvoir de l’ennemi, et subirent dès lors, ainsi que tous leurs descendants, les conséquences de leur désobéissance. Aussitôt après, Dieu dit à Satan que la semence de la femme lui briserait la tête (Genèse 3:15), c’est-à-dire lui ôterait son pouvoir. Cette semence de la femme est le second Homme venu du ciel, que nous voyons entrer en scène dans notre chapitre. Il est seul de sa race, aussi seul qu’Adam au jour où il fut placé en Eden ; le seul, au milieu de tous les hommes, dont Dieu puisse dire : «Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai trouvé mon plaisir». Mais quelle différence quant aux circonstances où ces deux hommes se trouvaient ! Le premier était au sein du paradis terrestre ; le second entre dans le même monde, mais ruiné par le péché, un monde devenu un désert, un lieu où Dieu ne trouve rien qui puisse le satisfaire, un lieu souillé, hanté par les bêtes sauvages (Marc 1:13), où Satan agit en maître. Voilà ce qu’est devenu, ensuite de la désobéissance du premier Adam, la scène de ce monde, autrefois lieu de délices, et dans ces circonstances Jésus vient recommencer l’histoire du second homme, l’homme obéissant. Il dit en entrant dans le monde : «Voici, je viens — il est écrit de moi dans le rouleau du livre — pour faire, ô Dieu, ta volonté» (Hébreux 10:7). La volonté de Dieu était pour Christ la règle absolue. Alors Satan se présente pour tenter Christ, comme il l’avait fait avec Adam, pensant l’amener sous son pouvoir et l’empêcher d’accomplir la volonté de Dieu ; mais il trouve son vainqueur dans l’homme parfaitement obéissant, ainsi que nous allons le voir.
«Alors Jésus fut emmené dans le désert par l’Esprit pour être tenté par le diable. Et ayant jeûné quarante jours et quarante nuits, après cela il eut faim. Et le tentateur, s’approchant de lui, dit : Si tu es Fils de Dieu, dis que ces pierres deviennent des pains» (v. 1-3).
Dieu avait proclamé que Jésus était son Fils bien-aimé. Alors Satan vient, en quelque sorte, lui dire : «Agis comme Fils de Dieu ; use de ta puissance pour apaiser ta faim». Si le Seigneur était le Fils de Dieu, il était aussi l’homme, et c’est comme tel qu’il voulait obéir à Dieu. Au lieu d’entrer en pourparlers avec Satan, il lui répond d’après la règle que Dieu a donnée à l’homme pour se conduire dans ce monde : la parole de Dieu, et lui dit : «Il est écrit : L’homme ne vivra pas de pain seulement, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu» (Deutéronome 8:3). Ainsi donc, tant qu’il n’y aurait pas une parole de Dieu qui lui dise de faire des pains et de manger, il ne le ferait pas.
Avoir faim est un besoin naturel bien légitime, surtout après avoir jeûné quarante jours, mais pour Christ, ce n’était pas une raison pour manger, si en cela il n’obéissait pas à Dieu. Il en est de même pour le croyant aujourd’hui : le motif de nos actes ne doit pas se trouver seulement dans ce qui est naturel et légitime, mais dans la volonté de Dieu, pour sa gloire : «Soit... que vous mangiez, soit que vous buviez, ou quoi que vous fassiez, faites tout pour la gloire de Dieu» (1 Corinthiens 10:31). Si Satan vient nous proposer autre chose que ce qui peut se faire pour le Seigneur, répondons-lui, comme Jésus, par la parole de Dieu ; c’est le seul moyen d’obtenir la victoire, car il ne peut rien contre l’obéissance.
Satan vaincu une première fois, en tentant le Seigneur par une chose nécessaire au corps, l’attaque une seconde fois par une tentation spirituelle. Pour cela il emploie la Parole, en citant un passage des Psaumes qui garantit la protection de Dieu au Messie, ce que Jésus était précisément. Il «le transporte... sur le faîte du temple, et lui dit : Si tu es Fils de Dieu, jette-toi en bas, car il est écrit : Il donnera des ordres à ses anges à ton sujet, et ils te porteront sur leurs mains, de peur que tu ne heurtes ton pied contre une pierre» (Psaume 91:11, 12). Jésus lui répond : «Il est encore écrit : Tu ne tenteras pas le Seigneur ton Dieu» (Deutéronome 6:16). Tenter Dieu, c’est faire quelque chose pour éprouver la vérité de ce qu’il a dit. Nous pouvons compter sur les promesses de Dieu dans une confiance absolue, sachant que nous en ferons l’expérience en son temps, si nous demeurons dans le chemin de l’obéissance. Satan omit intentionnellement une partie du v. 11 du Psaume qu’il cite : «Il commandera à ses anges à ton sujet, de te garder en toutes tes voies». Les voies du Seigneur étaient des voies d’obéissance. Hors de là, nous ne pouvons compter sur la protection divine. Le Seigneur se confiait entièrement en son Dieu. Ne dit-il pas : «Garde-moi, ô Dieu ! car je me confie en toi» (Psaume 16:1) ? Ainsi il était inutile de mettre Dieu à l’épreuve, ce qui s’appelle le tenter. Satan est vaincu par la citation d’une parole de Dieu. Le Seigneur pouvant dire : «Il est encore écrit», il est un modèle pour nous.
Après cela, le diable le transporte sur une fort haute montagne (*), pour lui montrer tous les royaumes du monde et leur gloire ; puis il lui dit : «Je te donnerai toutes ces choses, si, te prosternant, tu me rends hommage». Ici, Satan essaie de tenter le Seigneur par la gloire du monde. Il est vrai que Jésus, comme Fils de l’homme, doit recevoir la domination sur tout l’univers ; les royaumes du monde lui seront assujettis et il recevra la gloire et l’honneur des nations (Daniel 7:13, 14 ; Apocalypse 21:26 ; Ésaïe 60:11, 12). Mais pour cela, il fallait qu’il remporte la victoire sur Satan et non qu’il lui rende hommage. Aussi Satan se démasque complètement en prenant à l’égard de Jésus la place de Dieu, ce qu’il a fait si facilement avec le premier homme. Jésus lui dit : «Va-t’en, Satan, car il est écrit : Tu rendras hommage au Seigneur ton Dieu, et tu le serviras lui seul». Jésus préfère passer par la mort, pour recevoir la domination des mains de son Dieu, que de reconnaître Satan et la recevoir de lui. À la fin Satan donnera son pouvoir à l’homme qui, pour un temps, exercera une grande puissance, mais sera détruit par le souffle de la bouche du Vainqueur de Satan (2 Thessaloniciens 2:8. Lire aussi Apocalypse 13 et Daniel 11:39).
Satan s’en va, vaincu par l’homme obéissant. Jésus a remporté la victoire ; il a lié l’homme fort et va piller ses biens (chap. 12:29), c’est-à-dire accomplir son ministère, allant «de lieu en lieu, faisant du bien, et guérissant tous ceux que le diable avait asservis à sa puissance» (Actes 10:38).
(*) On lit dans certains livres que le diable transporta le Seigneur en pensée ou en esprit sur le temple ou sur la montagne. S’il en était ainsi, la Parole l’aurait dit. Ce n’est pas en esprit qu’il eut faim, ni qu’il alla sur la montagne.
Le diable le laisse et les anges viennent le servir. Les anges sont des esprits administrateurs envoyés pour servir en faveur de ceux qui doivent hériter du salut (Hébreux 1:14). Jésus, homme ici-bas, est servi par les anges qu’il avait créés. Combien cela devait paraître étrange à ces êtres célestes, de venir servir leur créateur qui avait pris la forme d’un homme ! Aussi, ils désirent regarder de près dans ces choses (1 Pierre 1:12).
Rappelons-nous que c’est par l’obéissance à la Parole que Jésus a obtenu la victoire et que nous avons le même moyen à notre disposition. Nous sommes faibles et impuissants devant Satan, mais il ne peut rien contre nous si nous obéissons à la parole de Dieu. C’est pourquoi il importe de la connaître, afin de pouvoir répondre à l’ennemi : «Il est écrit», et «il est encore écrit». Car il sait aussi employer la Parole pour tâcher d’arriver à ses fins : Jamais il n’a été aussi actif que maintenant. Il est donc important de lire la Bible, dès le jeune âge ; quoique l’on ne puisse pas tout comprendre alors, son contenu se grave dans l’esprit plus facilement, la mémoire n’étant pas encore fatiguée par les choses de la vie ; et ainsi, plus tard, l’Esprit de Dieu pourra se servir de cette connaissance pour tout ce dont on a besoin (voir Deutéronome 6:6-9).
Souvenons-nous aussi, quant à la gloire de la personne du Seigneur, que la tentation n’a pas eu lieu pour voir si Christ succomberait, mais pour démontrer qu’il ne pouvait pas succomber ; car, malheureusement, il n’est pas rare d’entendre mettre cela en question. Ainsi, celui qui possède Christ pour sa vie, possède une vie mise à l’épreuve en Christ ici-bas et qui ne peut succomber à la tentation. C’est pourquoi l’apôtre Jean dit : «Celui qui est né de Dieu se conserve lui-même, et le méchant ne le touche pas» (1 Jean 5:18). Pour réaliser cela pratiquement, il faut agir comme le Seigneur devant l’ennemi. Et nous le possédons comme Souverain Sacrificateur, pour nous secourir au moment opportun. «Car en ce qu’il a souffert lui-même, étant tenté, il est à même de secourir ceux qui sont tentés» (Hébreux 2:18).
Maintenant Jésus commence son activité publique (v. 12-17). Ayant lié l’homme fort, il va piller ses biens, accomplissant son œuvre de grâce, de patience et de miséricorde, au milieu de ce peuple aveugle qui rejettera son Messie. Déjà son précurseur, Jean le Baptiseur, est jeté en prison par Hérode, présage de ce qui attend Jésus (v. 12). L’emprisonnement de Jean est raconté, en même temps que sa mort, au chap. 14:1-12, mais on ne sait au juste combien de temps il fut captif.
Apprenant le triste sort de Jean, Jésus quitte la Judée et se rend en Galilée où la haine d’Hérode avait obligé ses parents à se retirer à leur retour d’Égypte. C’était en même temps l’accomplissement d’une prophétie d’Ésaïe 9:1, 2. Le ministère du Seigneur devait commencer au milieu des pauvres en Israël, et non au milieu des orgueilleux Juifs de Jérusalem et de la Judée. La Galilée était, nous l’avons vu, méprisée par les Juifs à cause du mélange de population étrangère, de son éloignement du centre religieux et de son incorporation au royaume d’Israël, dont les habitants avaient été transportés en Assyrie sous Pékakh avant le reste des dix tribus (2 Rois 15:29). Mais selon la belle prophétie d’Ésaïe (*), c’est là que la lumière devait se lever : «Terre de Zabulon, et terre de Nephthali, chemin de la mer au-delà du Jourdain, Galilée des nations : le peuple assis dans les ténèbres a vu une grande lumière ; et sur ceux qui sont assis dans la région et dans l’ombre de la mort, la lumière s’est levée». Celui qu’ils connaissaient comme le fils du charpentier, apparaît tout à coup comme la lumière du monde qui resplendit sur eux. C’est dans cette contrée que Jésus accomplit la plus grande partie de son ministère.
(*) Ésaie 9:1, 2 ; Matthieu 4:15, 16.
Ce n’était pas que ces gens-là aient été meilleurs que d’autres, car, venu à Nazareth, Jésus en est chassé (Luc 4:16-30), ce qui l’oblige à aller à Capernaüm. Cette ville se trouvait justement dans la Basse Galilée, désignée par Ésaïe, sur le passage qui conduisait des bords de la Méditerranée en Orient, «le chemin de la mer». La grâce de Dieu ne regarde pas à ce qu’est l’homme, sinon pour le sauver. Dieu se plaît à faire briller sa lumière là où les ténèbres sont les plus profondes, afin de mieux manifester ce qu’il est, et aussi afin de montrer qu’il n’agit pas à la façon de l’homme, car il s’occupe de ce que nous méprisons le plus.
«Dès lors Jésus commença à prêcher et à dire : Repentez-vous, car le royaume des cieux s’est approché» (v. 17). Le roi se trouvait là, en effet, mais il fallait se repentir, car il ne pouvait régner sur des hommes pécheurs et impénitents, qui méconnaissaient l’amour de Dieu.
Le Seigneur a voulu s’associer des compagnons dans son œuvre d’amour, et il leur communiqua plus tard de la puissance pour l’accomplissement de la mission qu’il allait leur confier.
«Comme il marchait le long de la mer de Galilée, il vit deux frères, Simon appelé Pierre, et André son frère, qui jetaient un filet dans la mer, car ils étaient pêcheurs ; et il leur dit : Venez après moi, et je vous ferai pêcheurs d’hommes». Les disciples avaient à apprendre ce qu’était l’amour de Dieu pour eux, afin de pouvoir, eux aussi, travailler à délivrer d’autres hommes de la misère où le péché les avait plongés. «La mer» représente le monde, dans lequel le filet de l’Évangile est jeté pour amener des hommes à Dieu (Matthieu 13:47, Jean 21:1-14). Ils quittèrent tout et le suivirent. Plus loin, deux autres frères, Jacques et Jean, raccommodaient leurs filets avec leur père. Jésus les appelle aussi ; ils quittèrent la nacelle et leur père, et le suivirent.
L’appel du Seigneur avait assez de puissance sur leurs cœurs pour les amener à renoncer à tout afin de le suivre. Lui voulait les former pour le service auquel il les destinait, comme nous l’avons vu au v. 19. Il en est de même aujourd’hui. C’est le Seigneur lui-même qui appelle ses serviteurs et qui les forme, sans avoir besoin pour cela du concours de l’homme qui a voulu lui-même appeler et former les serviteurs de Dieu. Lui dit : «Je vous ferai pêcheurs d’hommes».
Du reste le Seigneur appelle aussi tous les pécheurs à le suivre dans le chemin qui mène à la vie.
Tous mes lecteurs ont sans doute entendu cet appel ? Tous ont-ils répondu ?
Les v. 23-25 nous donnent un résumé de l’activité de Jésus dans son service. Il allait par toute la Galilée, enseignant dans les synagogues, prêchant l’Évangile du royaume, et guérissant toutes sortes de maladies parmi le peuple. L’Évangile du royaume est la bonne nouvelle qui annonce aux hommes l’établissement du royaume de Dieu sur la terre. Il sera de nouveau annoncé après l’enlèvement des saints, à ceux qui n’auront pas entendu l’Évangile de la grâce, qui est prêché depuis la mort du Seigneur jusqu’à aujourd’hui.
La renommée de Jésus se répandit par toute la Syrie ; «et on lui amena tous ceux qui se portaient mal, qui étaient affligés de diverses maladies et de divers tourments, et des démoniaques, et des lunatiques, et des paralytiques, et il les guérit. Et de grandes foules le suivirent de la Galilée, et de Décapolis, et de Jérusalem, et de Judée, et de par-delà le Jourdain». On voit par ce merveilleux résumé, quelle activité Jésus a déployée dans ce monde et combien son ministère s’est étendu au-delà des territoires juifs, jusqu’aux contrées qui étaient comprises dans l’ancienne délimitation du pays (Josué 1:4 ; Deutéronome 11:24).
Au jour où Christ régnera, la bénédiction s’étendra aussi dans ces limites et jusqu’aux extrémités de la terre ; certains pays même, tels que l’Assyrie et l’Égypte, seront particulièrement favorisés (Ésaïe 19:24, 25).
On donne ce nom aux paroles de Jésus rapportées dans les chapitres 5, 6 et 7. L’Esprit de Dieu les a groupées en un discours ininterrompu dans cet évangile, quoiqu’elles aient été prononcées en diverses occasions, comme on le voit dans l’évangile selon Luc 6:20-49, 11:1-12 ; 12:22-31 ; 16:13.
Non seulement le Seigneur annonçait que le royaume s’était approché et qu’il fallait se repentir pour y entrer, mais il présente dans ces discours ce qui caractérise ce royaume et ceux qui en feront partie. Ainsi qu’il est dit de lui : «J’ai annoncé la justice dans la grande congrégation ; voici, je n’ai point retenu mes lèvres, Éternel ! tu le sais» (Psaume 40:9). Les Juifs prétendaient avoir droit au royaume, parce qu’ils étaient enfants d’Abraham, mais Jésus leur enseigne ce qui doit caractériser ceux qui seuls y auront part, ainsi les croyants de nos jours.
Le Seigneur commence par désigner les caractères de ceux qu’il appelle «bienheureux» (5:1-12). Ce ne sont pas ceux que le monde appellerait de ce nom, d’où il découle qu’ils ne sont pas du monde. Chose remarquable, presque toujours dans la Parole, ceux qui sont ainsi désignés ont besoin d’encouragements dans une position difficile, tandis qu’il est dit : «Malheur à vous quand tous les hommes diront du bien de vous» (Luc 6:26). Si l’on est agréable aux hommes en admettant leurs principes, on aura affaire avec le jugement de Dieu.
Ces «bienheureux», déclarés tels par Celui qui sait ce qu’est le vrai bonheur, sont d’abord les pauvres en esprit, ceux qui croient Dieu, comme de petits enfants. Ils ne raisonnent pas, ne font pas valoir leur intelligence pour discuter ce que Dieu a dit. Ils croient ; ils possèdent le royaume (voir chap. 11:25 ; 18:3 ; 19:14). C’est l’opposé de ce qui caractérise les hommes aujourd’hui.
Ceux qui mènent deuil sont aussi «bienheureux» ; ils ne peuvent que pleurer en voyant les ravages du péché dans le monde, le rejet du roi et de son autorité. Lorsqu’il régnera, ils seront consolés.
Les débonnaires sont bienheureux. À cause de leur douceur de caractère, ils n’insistent pas sur leurs droits dans l’état actuel du monde ; quand le roi fera valoir les siens, ils hériteront le pays (d’Israël).
Ceux qui ont faim et soif de la justice seront rassasiés ; ils ne la trouvent pas dans ce monde ; ils la recherchent, ainsi que le royaume de Dieu (chap. 6:33). Ils en seront rassasiés lorsque Christ régnera.
Les miséricordieux sont ceux qui agissent d’après les principes de la grâce ; miséricorde leur sera faite à leur tour. Le résidu, confiant en son roi, sera délivré de la condition difficile dans laquelle celui-ci le trouvera lorsqu’il apparaîtra.
Bienheureux ceux qui ont le cœur pur, car ils verront Dieu. Le cœur pur est celui qui n’a que des motifs purs, réglés à la lumière de Dieu qui juge les pensées et les intentions du cœur. Ce n’est pas quelqu’un qui ne pèche plus, mais qui, par exemple, ne veut obéir qu’à Dieu, ne désire pas faire autre chose que ce qui lui plaît.
Au milieu des troubles et de l’agitation causés par toutes les conséquences du péché, bienheureux ceux qui procurent la paix ; appelés fils de Dieu, ils seront manifestés comme fils de Celui qui est si souvent appelé le Dieu de paix (Romains 16:20 ; 2 Corinthiens 13:11 ; Philippiens 4:9 ; 1 Thessaloniciens 5:23 ; Hébreux 13:20).
Bienheureux ceux qui sont persécutés à cause de la justice, à cause de leurs actes justes, la pratique du bien. C’est à eux qu’est le royaume des cieux.
Bienheureux ceux que l’on injuriera, que l’on persécutera, dont on dira, en mentant, toute espèce de mal, à cause du nom du Seigneur, parce qu’ils aiment le Seigneur, et qu’ils se montrent ouvertement pour lui au milieu d’un monde qui le hait. Leur récompense est grande dans les cieux, et non seulement dans le royaume.
Comme nous l’avons dit, tous ces caractères doivent être les nôtres aujourd’hui, en attendant qu’ils soient ceux des futurs témoins de Christ au milieu du peuple apostat, dans l’attente de leur Roi. Car nous aussi nous attendons le Seigneur, et il désire nous trouver dans la fidélité et la vigilance lorsqu’il viendra. Cherchons donc tous à réaliser ces caractères, qui sont ceux que le Seigneur a manifestés ici-bas, lui notre parfait modèle.
Le Seigneur ajoute au tableau qu’il a fait des caractères de ses disciples, deux autres traits qui sont représentés par le sel et la lumière. «Vous êtes le sel de la terre». Le sel est l’emblème de ce qui conserve la pureté, en empêchant la corruption. Le croyant doit maintenir ce caractère au milieu du monde, afin d’en produire les effets autour de lui. «Mais si le sel a perdu sa saveur, avec quoi sera-t-il salé ? Il n’est plus bon à rien qu’à être jeté dehors et à être foulé aux pieds par les hommes». Si le croyant ne se sépare pas de la corruption, s’il se mêle au monde, il n’a plus sa raison d’être ; il ne sert à rien.
«Vous êtes la lumière du monde». La lumière manifeste tout, elle brille dans la nuit. Aussi elle doit être mise en évidence, sur un pied de lampe, et non sous un boisseau (*) qui en entraverait le rayonnement. Le boisseau peut aussi représenter les affaires de cette vie qui empêchent si souvent notre lumière de luire. «Que votre lumière luise ainsi devant les hommes, en sorte qu’ils voient vos bonnes œuvres, et qu’ils glorifient votre Père qui est dans les cieux». La lumière est toute manifestation de la vie de Dieu devant les hommes. Elle luit par des œuvres qui sont le produit de la nouvelle nature, ce que Dieu appelle des «bonnes œuvres», ou œuvres justes et droites, et non seulement ce que le monde appelle «des bonnes œuvres», ou œuvres charitables. Si les hommes voient ces œuvres-là, fruits de la vie divine, ils sont obligés d’en reconnaître l’origine. Soyons plus fidèles, afin que les hommes puissent attribuer à Dieu ce qu’ils voient en nous, et ainsi le glorifier. Au commencement cette lumière brillait plus vivement devant les hommes (Actes 2:47 ; 5:13). Dans le règne de Christ, non seulement les hommes verront cette lumière qui aura Christ pour foyer, mais ils marcheront à son éclat (Apocalypse 21:23).
(*) Ancienne mesure de capacité que l’on renversait, au besoin, pour en faire un pied de lampe.
Dans le reste du chapitre 5, le Seigneur maintient les exigences de la loi envers soi-même, en appliquant les principes de la grâce aux autres ; il montre que quiconque aura enfreint la loi en portera les conséquences. Si Jésus est venu apporter la grâce en révélant le Père, ce n’est pas en diminuant les exigences de la nature divine ; il n’abolit pas la loi ou les prophètes ; au contraire, il en a été l’accomplissement. Pas un iota, pas un seul trait de lettre ne passera que tout ne soit accompli. Les scribes et les pharisiens prétendaient s’y conformer en ne pratiquant que certaines cérémonies ; le Seigneur dit aux disciples que si leur justice ne dépassait pas celle de ces hommes-là, ils n’entreraient pas dans le royaume des cieux ; car il ne s’agit pas seulement d’accomplir certains actes, il s’agit de l’état du cœur devant Dieu.
La loi disait : «Tu ne tueras point», mais si quelqu’un se mettait en colère légèrement contre son frère, il était passible du jugement comme celui qui avait tué. «Quiconque hait son frère est un meurtrier», est-il dit en 1 Jean 3:15 ; voir aussi v. 11, 12. Celui qui disait : fou ou «Raca» (vaurien) était passible du jugement du sanhédrin ou de la géhenne du feu. Ces paroles de Jésus sont solennelles et nous font voir ce qu’est le mal aux yeux de Dieu ! Combien on se sent repris en les entendant, car il monte vite dans le cœur des pensées haineuses et peu bienveillantes à l’égard les uns des autres.
Le v. 24 établit le principe d’après lequel on ne peut se présenter devant Dieu pour lui rendre culte, si l’on n’est pas en règle avec son frère ; il faut premièrement se mettre d’accord avec lui. On ne peut s’approcher de Dieu avec du mal dans le cœur.
Les v. 25, 26 appliquent cela à Israël qui, par ses péchés, avait Dieu comme partie adverse. Il était en chemin avec Dieu dans la personne de Christ ; au lieu de se réconcilier, il a rejeté Christ, et le jugement l’a atteint. Israël est actuellement comme en prison ; il n’en sortira que lorsqu’il aura reçu le double pour tous ses péchés et payé jusqu’au dernier quadrant (Ésaïe 40:1, 2).
Nous voyons, aux v. 27-30, qu’il faut être sans miséricorde avec soi-même, à l’égard de tout ce qui peut nous faire broncher et jeter finalement dans la géhenne. Plutôt que de conserver dans nos habitudes quelque chose qui nous entraîne au mal, nous avons à renoncer à tout ce qui, tout en étant agréable, aimable, indispensable en apparence, peut nous amener à pécher. Que ce soit l’œil ou la main droite, membres si nécessaires, il faut s’en séparer. Nous retrouverons ce sujet au chap. 18:8-10.
(v. 33-37). — La parole doit être prononcée avec le sentiment de la présence de Dieu et acquérir par là toute sa valeur, sans qu’il soit nécessaire de faire intervenir le serment. Prendre Dieu à témoin à tout propos, a-t-on dit, c’est faire intervenir un absent, c’est-à-dire quelqu’un dans la présence duquel on n’a pas l’habitude de parler. Que oui soit oui et que non soit non, ce que l’on y ajoute vient du mal.
Dans le reste du chapitre, on voit que le disciple de Christ se caractérise par le principe de la grâce, d’après lequel agit Dieu, révélé comme Père. Sous la loi, c’était «œil pour ceil, dent pour dent» ; sous la grâce, il ne faut pas insister sur ses droits. C’est le trait distinctif des débonnaires, des miséricordieux, de ceux qui procurent la paix. Le croyant ne doit considérer personne comme son ennemi. Il faut faire du bien à tous, comme ceux qui possèdent la nature de leur Père qui est dans les cieux. L’amour s’élève au-dessus de toute considération charnelle, pour agir selon sa nature. Vous pouvez avoir des camarades qui vous haïssent ; il faut leur faire du bien, chaque fois que vous en avez l’occasion ; priez pour ceux qui vous font tort ou qui vous persécutent, et vous manifesterez les caractères de votre Père qui est dans les cieux, qui fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons et envoie sa pluie sur les justes et sur les injustes. Aimer seulement ceux qui vous aiment, c’est ne pas s’élever au-dessus de ce que font les plus grands pécheurs et de ceux qui n’ont aucune relation avec Dieu. «Vous, soyez donc parfaits, comme votre Père céleste est parfait».
Dans les v. 1 à 18, le Seigneur enseigne quels mobiles doivent nous diriger dans la pratique de la piété envers Dieu et envers les hommes. Envers les hommes, elle s’exprime par l’aumône et le pardon ; et envers Dieu, par la prière et le jeûne. C’est Dieu qu’il faut avoir en vue dans la réalisation de ces choses, et non les hommes, car c’est avec lui que nous aurons à faire pour tous nos actes. Contentons-nous d’avoir l’approbation de Dieu qui, au temps voulu, nous récompensera pour tout ce que nous ferons pour lui. Il importe tellement de ne pas faire l’aumône pour être vu des hommes, que le Seigneur dit : «Que ta main gauche ne sache pas ce que fait ta droite». Pourtant il est assez difficile de faire agir une main sans que l’autre le sache. Mettons donc assez de délicatesse dans notre manière de donner et de faire le bien à d’autres, pour que cela passe inaperçu ici-bas. Lorsque arrivera le jour où chacun recevra sa louange, «ton Père qui voit dans le secret, te récompensera» ; tandis que, dans ce jour-là, si nous avons déjà reçu les louanges des hommes, nous perdrons celles de notre Père. Et quelle perte ! car ce que nous recevons des hommes passe, mais ce que nous recevons de Dieu dure éternellement.
Dans la prière, comme dans tout exercice de piété envers Dieu, n’agissons jamais afin d’obtenir les louanges d’autrui. La prière chez les nations païennes, comme, hélas ! en général dans la chrétienté aujourd’hui, est considérée plutôt comme l’accomplissement d’un acte méritoire que comme la présentation à Dieu de véritables besoins. On s’imagine qu’en offrant de nombreuses prières, on gagnera mieux la faveur de Dieu. De là l’invention des chapelets, dans l’église romaine, pour compter le nombre des prières que l’on s’impose. Dieu connaît nos besoins avant même que nous ne les lui présentions ; c’est à lui que nous parlons ; c’est de lui que nous attendons la réponse ; c’est pourquoi, il n’est nul besoin de le prier de manière à être vu des hommes.
Dans les v. 8-14, le Seigneur enseigne aux disciples une prière en rapport avec l’état dans lequel ils se trouvaient, alors qu’ils attendaient l’établissement du royaume ; ils avaient à demander que tout ici-bas soit en harmonie avec le caractère du Père et de son royaume. Les prières des croyants, quoiqu’elles puissent contenir les mêmes pensées, sont en rapport avec la révélation que Dieu nous a faite de ses pensées à l’égard de l’Église et de nos relations avec lui. C’est pourquoi nous ne pouvons pas user de cette formule de prière, telle que le Seigneur l’a enseignée aux disciples, tout en désirant l’accomplissement de tout ce qu’elle contient. Le chrétien a la liberté de demander à Dieu tout ce qu’il veut, si c’est la connaissance de la pensée de Dieu qui forme ses désirs. Le Seigneur dit à ses disciples, en Jean 15:7 : «Si vous demeurez en moi, et que mes paroles demeurent en vous, vous demanderez ce que vous voudrez, et il vous sera fait». En Luc 11:5, il enseigne aussi qu’il faut placer ses besoins devant Dieu simplement, tels qu’ils existent. Comme l’ami qui avait besoin de trois pains, il dit : «Ami, prête-moi trois pains». Il n’y a pas un besoin, pas une difficulté qu’un jeune enfant éprouve et qu’il ne puisse présenter à Dieu en pleine confiance. Il est bon que, dès le jeune âge, les enfants s’exercent à exposer à Dieu toutes leurs peines et leurs difficultés. Dieu s’occupe de tout ce qui concerne chacun ; pour lui rien n’est trop petit, comme rien n’est trop grand.
Comme c’est en vue d’un avenir céleste que nous avons à agir, il ne faut pas non plus rechercher les trésors de la terre, où tout est vanité, où tout est exposé à être gâté, détruit, et où tout prendra fin par les jugements. Il faut donc s’amasser des trésors dans le ciel : ceux-là sont en sûreté et incorruptibles. Là nous trouverons les résultats de notre fidélité à Christ, lui-même notre grand trésor. Le cœur s’attache à ce qu’il aime ; si l’objet de notre cœur est dans le ciel, nous nous conduirons d’une manière céleste. S’il est sur la terre, nous agirons d’une manière terrestre et matérielle. Ayons 1’œil simple (v. 22 et 23), c’est-à-dire n’ayons d’autre objet devant nous que Christ et ce qui lui convient. L’œil méchant est celui qui considère plusieurs choses à la fois ; alors le cœur s’attache à ce qui est de ce monde, et il n’a pas la lumière nécessaire pour se conduire selon la pensée de Dieu, tandis que, avec l’œil qui ne voit que Christ, le corps tout entier est plein de lumière. Puis vient une parole bien solennelle pour chacun de ceux qui ont le privilège d’être en contact avec la lumière de l’Évangile. Si cette lumière, donnée à chacun par la révélation de Dieu le Père, ne produit pas d’effet, et qu’elle laisse le cœur dans les ténèbres de l’incrédulité, combien seront grandes les ténèbres ! Elles seront difficiles ou plutôt impossibles à dissiper. La lumière ne se fera qu’au jour du jugement, mais ce sera trop tard.
(v. 24-34). — Si l’on a l’œil simple, on ne servira qu’un maître, le Seigneur. Si l’on veut en servir deux, on en négligera un : on le haïra même ; on le méprisera. Avec un cœur aussi mauvais que le nôtre, nous savons bien lequel des deux sera le plus vite méprisé, Dieu ou le monde, Mammon. Si le cœur s’attache au monde, il délaissera Dieu. Quel mépris de Dieu que de se détourner de lui ! Les soucis de la vie présente nous exposent à nous attacher aux choses de la terre et au monde. C’est pourquoi le Seigneur nous exhorte à ne pas être en souci de ce que nous mangerons ou boirons, ni de nos vêtements. Les oiseaux ne font pas de provisions ; ils n’amassent pas de fortune ; c’est Dieu qui les nourrit. Les lis des champs ne peuvent se préoccuper de leur parure ; cependant Salomon, dans toute sa gloire, n’était pas vêtu comme l’un d’eux. Les oiseaux ont peu de valeur ; les lis peuvent tomber sous la faux d’un jour à l’autre et se dessécher, et pourtant Dieu s’occupe de ce qui les concerne. Combien plus Dieu s’occupera-t-il des siens qui ont à ses yeux un si grand prix ? «Celui même qui n’a pas épargné son propre Fils, mais qui l’a livré pour nous tous, ... ne nous fera-t-il pas don aussi, librement, de toutes choses avec lui ?» (Romains 8:32). Nous pouvons donc rejeter sur lui tous nos soucis, tandis que le monde ne connaît pas Dieu comme Père et ne dépend pas de lui ; il n’a pour sa part que les choses d’ici-bas et ne travaille que pour la matière. Nous avons à rechercher premièrement le royaume de Dieu et sa justice, et tout le reste nous sera donné par-dessus, afin que nous n’ayons pas à nous préoccuper des choses de la vie, de manière à être détournés vers le monde. «Votre Père céleste sait que vous avez besoin de... ces choses». «À chaque jour suffit sa peine». Il ne faut pas ajouter à la peine d’aujourd’hui celle de demain, car nous ne verrons peut-être pas un autre jour et, si nous y arrivons, nous y trouverons ce que Dieu aura préparé. Lui qui prépare la nourriture aux petits du corbeau (Job 39:3), il donne à tous la nourriture en son temps (Psaume 104:27).
Dans le chap. 6, nous voyons l’exercice de la piété envers Dieu et envers les hommes et, au commencement du chap. 7, la conduite à suivre vis-à-vis de nos frères, ou de nos semblables. Les v. 1-5 nous mettent en garde contre la tendance du cœur naturel à juger les autres, à vouloir redresser, chez eux surtout, ce qui nous déplaît. Dans son gouvernement, Dieu agira envers nous comme nous aurons agi envers les autres (chap. 6:14, 15). «De la mesure dont vous mesurerez, il vous sera mesuré», tandis que : «Bienheureux les miséricordieux, car c’est à eux que miséricorde sera faite». Le plus souvent, lorsque nous voyons des défauts chez nos frères — la paille qui est dans leur œil — c’est que nous sommes peu capables d’en juger, ayant dans le nôtre une poutre, c’est-à-dire un péché, un défaut bien plus grave que celui qui nous offusque chez notre prochain. Examinons-nous à la lumière de Dieu et là, voyant tout le mal qui est dans notre cœur, nous ne jugerons pas notre frère, si même nous discernons en lui une paille, nous serons miséricordieux.
Combien ces enseignements ont aussi d’à-propos dans nos familles, où les enfants sont facilement portés à s’accuser et à se juger les uns les autres, au lieu de s’occuper chacun de soi-même devant Dieu, lui confessant ses propres fautes pour être délivré du mal et être rendu plus agréable à autrui. Il faut avoir aussi du discernement au sujet des choses saintes (v. 6), pour savoir quand les présenter aux hommes. Il y a des occasions qu’il faut savoir saisir, dit l’apôtre Paul (Colossiens 4:5).
Aux v. 7-12, le Seigneur revient sur le sujet de la prière, car si, d’un côté, notre Père sait de quoi nous avons besoin, il veut que nous mettions de l’énergie et de la persévérance dans nos requêtes. Cherchez, heurtez, demandez ; le Père vous entend. Précieux encouragement de savoir qu’il répondra à nos demandes ! Celui qui dit : «Je donnerai», dit aussi : «Demandez». Si l’homme dont le cœur est méchant sait donner de bonnes choses à ses enfants, «combien plus votre Père qui est dans les cieux donnera-t-il de bonnes choses à ceux qui les lui demandent !»
Cette manière d’agir de notre Père doit trouver son expression en nous, de manière à ce que nous soyons des modèles pour les autres. «Toutes les choses donc que vous voulez que les hommes vous fassent, faites-les-leur, vous aussi, de même ; car c’est là la loi et les prophètes». L’apôtre Pierre dit : «Qui est-ce qui vous fera du mal, si vous êtes devenus les imitateurs de celui qui est bon ?» (1 Pierre 3:13).
À cause du péché et de la volonté de l’homme, ennemis de Dieu, il y a dans ce monde une opposition constante à ce qui est bien, de sorte qu’il faut une énergie continuelle pour entrer dans le chemin de Dieu et accomplir le bien. C’est ce que représente l’effort à faire pour entrer par une porte étroite, tandis que la porte large, qui ouvre sur un chemin spacieux, se franchit sans difficulté. Il n’y a qu’à se laisser aller au courant entraînant de ce monde et aux penchants naturels de son propre cœur qui aime ce qui est facile et donne du plaisir. L’homme n’est pas ici-bas pour toujours, comme ce serait arrivé s’il était resté dans l’innocence. À cause du péché, la naissance place tout homme sur le chemin de la perdition. Grâces à Dieu ! son amour a ouvert un autre chemin, celui qui mène à la vie. Mais peu y entrent, parce qu’il n’offre pas au cœur naturel l’aliment qu’il désire, en un mot : le péché, qui le conduit à la mort et au jugement.
Chers lecteurs, souvenez-vous que tout ce qui attire la chair, tout ce que le monde approuve, ce qui ne demande aucun effort, caractérise le chemin large. Jamais l’entraînement dans ce chemin n’a été si puissant et surtout si subtil que maintenant. On y est entraîné par le luxe, par les études, les lectures, le choix de ses camarades, les exercices corporels de tous genres, et tant d’autres choses qui agissent d’autant plus subtilement que plusieurs sont utiles et même nécessaires. Pour en user d’une manière saine et ne pas se laisser entraîner par elles dans le chemin large qui conduit à la perdition, il faut une vigilance qui ne s’obtient qu’en écoutant la parole de Dieu. Tout ce qui sert à nous introduire et à nous maintenir dans le chemin étroit qui mène à la vie est désagréable au cœur naturel et se heurte contre la volonté propre. Écouter et lire la Parole et les publications qui en parlent, agir d’après les enseignements divins, obéir à ses parents en tout, renoncer à tant d’attractions offertes à la jeunesse, tout cela coûte des efforts à faire pour entrer par la porte étroite et demeurer dans le chemin resserré qui mène à la vie. Comme Moïse, choisissez «plutôt d’être dans l’affliction avec le peuple de Dieu, que de jouir pour un temps des délices du péché, estimant l’opprobre du Christ un plus grand trésor que les richesses de l’Égypte ; car il regardait à la rémunération» (Hébreux 11:25, 26).
Les choses mondaines ne sont pas seules à nous nuire ; il y a aussi des gens qui affectent un certain dédain des choses mondaines et qui ont l’apparence des «brebis», c’est-à-dire, de ceux qui font partie du troupeau du bon Berger et qui ne sont en réalité que des loups ravisseurs, qui introduisent de faux enseignements, prétendant parler, comme les faux prophètes d’autrefois, au nom de l’Éternel. On les reconnaîtra à leurs fruits, seul moyen de discerner à quelle espèce un arbre appartient. Malgré leur belle apparence, ils ne produiront rien pour Dieu, ils seront coupés et jetés au feu.
D’autres personnes n’auront que l’apparence de la piété. Elles se réclameront du nom de Christ — aujourd’hui du nom de chrétiens — disant à tout propos : «Seigneur, Seigneur !» Mais Lui leur dira : «Je ne vous ai jamais connus ; retirez-vous de moi, vous qui pratiquez l’iniquité».
Ces avertissements, toujours à propos, seront tout particulièrement appréciés par le futur résidu juif, dans les temps terribles d’épreuve qu’il traversera avant la venue glorieuse de Christ, en vue duquel le Seigneur a prononcé ces discours ; ils s’adressaient au résidu juif d’alors et demeurent écrits pour le résidu à venir. Dans ce temps-là, des méchants s’élèveront du milieu d’eux pour leur nuire : «Plusieurs se joindront à eux par des flatteries». Il y en a qui seront entraînés «par de douces paroles» (Daniel 11:32-34). «Plusieurs faux prophètes s’élèveront et en séduiront plusieurs : et parce que l’iniquité prévaudra, l’amour de plusieurs sera refroidi ; mais celui qui persévérera jusqu’à la fin, celui-là sera sauvé... Car il s’élèvera de faux christs et de faux prophètes ; et ils montreront de grands signes et des prodiges, de manière à séduire, si possible, même les élus» (Matthieu 24:11, 12, 13, 24). Ces passages font comprendre combien il faudra lutter pour entrer par la porte étroite, et se défier des apparences trompeuses de ces loups et faux prophètes, dans les temps à venir, où tous ces enseignements trouveront leur application littérale. En attendant, n’oublions pas qu’ils sont écrits pour nous aussi.
Dans les v. 24 à 29, qui terminent ces discours, le Seigneur montre d’une manière solennelle la différence qu’il y a entre le fait d’écouter ses paroles seulement, et celui de les mettre en pratique. Celui qui les met en pratique est semblable à un homme qui a fondé sa maison sur le roc ; les torrents et le vent se sont déchaînés contre cette maison ; mais elle est demeurée ferme. Celui qui se contente d’écouter, sans mettre en pratique ce qu’il entend, est comparé à un homme insensé qui a bâti sa maison sur le sable. Les torrents et le vent sont venus, ils ont donné contre cette maison, sans plus de violence que contre celle qui est bâtie sur le roc ; mais, fondée sur un sol mouvant, elle est tombée, et sa chute a été grande. Au jour de l’épreuve ou du jugement, pour qui que ce soit, tout ce qui se basera sur les pensées et les raisonnements des hommes sera renversé ; la ruine sera grande aussi, car elle sera éternelle. Au contraire, tout ce qui reposera sur le roc de la parole de Dieu, demeurera éternellement. «Le monde s’en va et sa convoitise, mais celui qui fait la volonté de Dieu demeure éternellement» (1 Jean 2:17). Il n’est pas dit «celui qui entend», pas même «celui qui dit qu’il croit», mais «celui qui fait la volonté de Dieu». Faire la volonté de Dieu, c’est la seule preuve à donner que l’on a cru. Il importe de saisir que l’on est sauvé par la foi sans œuvres de loi, mais on risque d’oublier que les œuvres qui découlent de la foi sont inséparables du salut et qu’il est inutile de prétendre être sauvé, si l’on ne met pas en pratique la parole de Dieu ; le Seigneur dit : «Ma mère et mes frères sont ceux qui écoutent la parole de Dieu et qui la mettent en pratique» (Luc 8:21 ; Matthieu 12:50). «Ce ne sont pas tous ceux qui me disent : Seigneur, Seigneur, qui entreront dans le royaume des cieux» (v. 21). Lire aussi ce que dit l’épître de Jacques à ce sujet (chap. 2:14-26).
«Et il arriva que, quand Jésus eut achevé ces discours, les foules s’étonnaient de sa doctrine ; car il les enseignait comme ayant autorité, et non pas comme leurs scribes» (v. 28, 29). Ce sont, en effet, des paroles d’autorité divine, propres à introduire dans la vie éternelle, qui se font entendre aux oreilles de chacun, de la bouche même d’Emmanuel, Dieu avec nous, venu en grâce pour sauver sa créature perdue.
Puissions-nous tous, chers lecteurs, n’être pas des auditeurs oublieux, mais des faiseurs d’œuvre ! (Jacques 1:25).
Après avoir présenté, dans ces discours, les caractères de ceux qui participent à son royaume, le Seigneur descend auprès du peuple pour agir en grâce et en puissance, afin de le délivrer des conséquences du péché et de la puissance du diable, montrant qu’il est Emmanuel, Dieu avec nous, le même qui avait dit autrefois à Israël : «Je suis l’Éternel qui te guérit» (Exode 15:26). C’est la personne de Jésus, se présentant en grâce et en puissance à son peuple, qui fait le sujet de ce chapitre et du suivant.
À son retour de la montagne, un lépreux s’approcha, se prosterna et lui dit : «Seigneur, si tu veux, tu peux me rendre net». Il savait que le Seigneur avait le pouvoir de le guérir ; mais il doutait de son vouloir. Jésus étendit la main et le toucha en disant : «Je veux, sois net. Et aussitôt il fut nettoyé de sa lèpre» (v. 1-3). La lèpre est une figure du péché sous son caractère de souillure, un mal sans autre moyen de guérison que la puissance de l’Éternel (voir Lévitique 14:1-9). Remarquez, chers lecteurs, combien la gloire de la personne de Jésus est évidente dans cette guérison, ainsi que sa puissance : il peut guérir ; sa bonté : «Je veux» ; sa divine pureté, car il est Dieu manifesté en chair. Il étend sa main, il touche le lépreux, et au lieu d’être souillé par cet attouchement, comme tout homme l’aurait été, c’est le lépreux qui est purifié. Quel sujet de contemplation que la personne de Jésus dans son abaissement, au milieu des hommes souillés et perdus, pour leur apporter les ressources divines que réclamait leur état misérable. Tout ce qu’est Dieu en puissance, en grâce, en pureté, était là dans un homme, l’Homme-Dieu, inattaquable par le péché, et à la disposition de tous ceux qui voulaient en profiter.
Le Seigneur reconnaît le système légal sous lequel il est venu ; c’est pourquoi il envoie le lépreux purifié se montrer aux sacrificateurs, pour offrir ce que Moïse avait ordonné, et il ajoute : «Pour qu’il leur serve de témoignage». Si les sacrificateurs reconnaissaient que le lépreux était net, ils avaient devant leurs yeux, d’une manière évidente, le témoignage que Jésus était l’Éternel, puisque lui seul pouvait guérir la lèpre. Hélas ! ce témoignage irrécusable de la présence du Messie au milieu d’eux, suivi de bien d’autres, ne les a pas empêchés de le rejeter.
Le second miracle narré dans ce chapitre s’opère en faveur d’un Gentil, un étranger aux bénédictions que le Messie apportait à son peuple, mais chez qui se trouvait la foi, une foi, dit Jésus, telle qu’il n’en avait point trouvée en Israël. Ce centurion, officier romain, reconnaissait la puissance divine et la grandeur de la personne du Seigneur. Dans une touchante humilité, il supplie Jésus au sujet de son serviteur atteint de paralysie. Le Seigneur, dans son dévouement, lui dit : «J’irai, moi, et je le guérirai». Mais le centurion répond : «Seigneur, je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit, mais dis seulement une parole, et mon serviteur sera guéri ; car moi aussi, je suis un homme placé sous l’autorité d’autrui, ayant sous moi des soldats ; et je dis à l’un : Va, et il va ; et à un autre : Viens, et il vient ; et à mon esclave : Fais cela, et il le fait» (v. 7-10). Cet homme illustre, par son exemple, la position dans laquelle il trouvait le Seigneur sur la terre : c’était l’homme dépendant, l’homme parfait ; mais le Fils de Dieu qui avait autorité sur toutes choses. Il reconnaît donc à Jésus un pouvoir illimité et le droit de le faire valoir. Quel bel exemple de foi ! Il est à remarquer que la foi voit les choses comme Dieu les voit. La grande foi honore Dieu ; la petite foi sauve, parce que Dieu a égard non à la mesure de la foi que nous avons, mais à l’objet que la foi saisit. La foi reconnaissait au Seigneur sur la terre la puissance par laquelle il établirait son royaume : telle celle du brigand repentant sur la croix. Aussi la réponse à cette foi est-elle une part à ce que la grâce donne actuellement comme plus tard. La foi du centurion fournit au Seigneur l’occasion de parler de l’introduction des Gentils dans les bénédictions du royaume, tout en déclarant aux Juifs que leurs privilèges extérieurs ne leur donnaient pas le droit d’y avoir accès, sans la foi. «Et Jésus, l’ayant entendu, s’en étonna, et dit à ceux qui le suivaient : En vérité, je vous dis : je n’ai pas trouvé, même en Israël, une si grande foi. Et je vous dis que plusieurs viendront d’Orient et d’Occident, et s’assiéront avec Abraham et Isaac et Jacob dans le royaume des cieux ; mais les fils du royaume seront jetés dans les ténèbres de dehors : là seront les pleurs et les grincements de dents» (v. 10-12). Les fils du royaume, sous la loi, étaient les Juifs ; mais par la loi, personne n’a pu rien obtenir ; alors Dieu accorde à la foi, où qu’elle se trouve, l’accès à ses bénédictions ; car sans la foi, il est impossible d’être agréable à Dieu (Hébreux 11:6). Le Seigneur montre donc aux Juifs le moyen d’hériter de la bénédiction à laquelle ils pensaient avoir droit par nature ; et, puisque c’est par la foi, tous ceux qui la possèdent auront une part à la bénédiction du royaume des cieux, tandis que ceux qui ne l’auront pas seront jetés dehors, qu’ils soient Juifs, païens, ou chrétiens de nom ; aucun titre, aucune religion, pas plus que le privilège si grand d’être un enfant de chrétien, ne peut donner le droit d’entrer dans le royaume, sinon la foi qui reconnaît Dieu tel qu’il se révèle, et qui prend sa place humblement devant lui comme un pauvre être indigne de tout. Le Seigneur répondit au centurion : «Va, et qu’il te soit fait comme tu as cru ; et à cette heure-là son serviteur fut guéri» (v. 13).
Le troisième miracle est la guérison de la belle-mère de Pierre, qui était atteinte de la fièvre (v. 14, 15). Si la lèpre est une figure du péché dans son caractère de souillure, la paralysie nous représente l’incapacité où le péché met l’homme quand il s’agit pour lui d’accomplir la volonté de Dieu. La fièvre symbolise l’agitation qui caractérise l’homme sans Dieu. Le péché prive du repos et de la paix qui sont la part de celui qui a été amené à Dieu. Toute l’activité fiévreuse, qui augmente de plus en plus dans ce monde, vient de ce que l’homme, loin de Dieu, cherche sa propre satisfaction dans ce que le monde peut offrir ; il s’agite pour l’obtenir, terrible distraction qui l’empêche de penser à Dieu et de voir son état dans sa présence ! De cette manière, l’homme est incapable de servir Dieu ; pensant n’avoir pas assez de temps pour lui-même, il ne peut en consacrer à Dieu. Lorsque le Seigneur eut touché la main de la belle-mère de Pierre, «la fièvre la quitta ; et elle se leva et le servit». Quand Dieu a accompli son œuvre dans une âme et l’a délivrée de la puissance du péché qui cause cette agitation, cette âme peut jouir du repos de la conscience et du cœur ; elle est en paix ; elle possède le calme et peut ainsi servir le Seigneur. L’apôtre dit aux Thessaloniciens : «Vous vous êtes tournés des idoles vers Dieu, pour servir le Dieu vivant et vrai, et pour attendre des cieux son Fils» (1 Thessaloniciens 1:9).
Le soir était venu (v. 16, 17) ; c’est, en Orient, le moment favorable pour sortir à cause de la chaleur excessive qui règne pendant la journée. On conduisit auprès de Jésus beaucoup de démoniaques dont il chassa les esprits par une parole, et il guérit tous ceux qui se portaient mal. Il accomplissait ce qu’Ésaïe avait dit : «Lui-même a pris nos langueurs, et a porté nos maladies» (Es. 53:4). Ces paroles nous font comprendre de quelle manière le Seigneur faisait usage de sa puissance : il n’a jamais délivré quelqu’un auquel son cœur et ses sentiments, aussi parfaitement humains que divins, seraient restés étrangers. Il ne délivrait personne des conséquences du péché, sans avoir ressenti en sympathie toute la douleur qu’éprouvaient ceux qu’il soulageait. C’est pourquoi il est dit qu’il a porté nos maladies, ce qui est autre chose que d’avoir porté nos péchés sur la croix, pour en recevoir le châtiment. Il n’a porté nos péchés que sur la croix, tandis que, durant tout le cours de son ministère, son cœur sentait tout le poids des conséquences du péché sous lesquelles gémissaient ceux qu’il affranchissait. C’est pourquoi nous voyons ce précieux Sauveur pleurer au tombeau de Lazare, au lieu d’aller directement l’appeler hors du tombeau, ce qu’il fit après avoir témoigné sa sympathie à celles qui pleuraient leur frère et ressenti profondément la puissance de la mort qui pesait sur l’homme par suite de sa désobéissance.
Il est précieux, chers amis, de savoir que le Seigneur est toujours le même en faveur de ceux qui sont dans l’affliction, de quelque manière que ce soit ; la gloire où il se trouve n’a pas changé son cœur, au contraire, hors d’atteinte de la souffrance, il peut d’autant plus sympathiser avec ceux qui s’y trouvent encore.
Comme les foules se pressaient autour de Jésus, attirées, sans doute, par les miracles qu’il faisait, il voulut se soustraire à leur curiosité, comme à leur admiration, puisqu’il avait accompli son service au milieu d’elles, et commanda de passer à l’autre rive. Un scribe lui dit : «Maître, je te suivrai où que tu ailles. Et Jésus lui dit : Les renards ont des tanières, et les oiseaux du ciel ont des demeures ; mais le Fils de l’homme n’a pas où reposer sa tête» (v. 18-20). Ce scribe, les foules émerveillées, les disciples même, tous étaient heureux et honorés d’avoir au milieu d’eux un tel homme. Les foules disent au chapitre suivant (v. 33) : «Il ne s’est jamais rien vu de pareil en Israël». Aussi, ce scribe pensait à la gloire qu’il y aurait pour lui à suivre un maître comme celui-là. Mais si tous avaient un domicile dans ce monde, où la grâce avait fait descendre le Fils de l’homme, lui, venu du ciel, ne pouvait en avoir ici-bas, car rien sur la terre ne pouvait offrir de repos à un tel Homme, tout étant empreint des conséquences du péché et de la puissance de Satan. Il n’était pas venu pour rendre agréable à l’homme son séjour sur la terre, mais afin de lui ouvrir un chemin le sortant du monde et l’amenant là où le Seigneur est déjà lui-même, hors de cette première création souillée et soumise à Satan, là où Dieu se reposera dans son amour et où il introduira tous ceux qui auront cru en son Fils bien-aimé et auront marché dans le chemin qu’il leur a frayé ici-bas. Jésus, dans sa réponse, indique à ce scribe à quelle condition on peut le suivre. C’est comme s’il disait : «Voilà l’avantage matériel que tu trouveras en me suivant, car le chemin ne peut être différent pour toi et pour moi : tu n’y trouveras pas un lieu pour y reposer ta tête».
Un autre de ses disciples lui dit : «Seigneur, permets-moi de m’en aller premièrement et d’ensevelir mon père. Mais Jésus lui dit : Suis-moi, et laisse les morts ensevelir leurs morts» (v. 21, 22). Le Seigneur montre que pour le suivre, il faut reconnaître entièrement ses droits sur notre cœur. Le Seigneur a quitté la gloire pour venir ici-bas ouvrir le chemin du ciel à l’homme perdu, de sorte que, pour marcher après lui, il faut abandonner tout ce qui caractérise un monde étranger à la vie de Dieu. Le Seigneur seul a des droits absolus sur son racheté. On peut aller ensevelir son père, mais pas premièrement, comme disait le disciple ; il faut premièrement suivre Christ et lui obéir.
Laissez-moi vous demander, chers lecteurs, combien de choses vous faites premièrement, avant celles qui sont agréables au Seigneur. Savez-vous que Christ seul a tout droit sur vos cœurs, si vous êtes à lui ? Et si vous ne marchez pas à sa suite, sur le chemin du ciel, vous savez dans lequel vous vous trouvez ; il n’y en a que deux : le chemin étroit qui mène à la vie, et le chemin large qui conduit à la perdition. Dans les versets qui précèdent, nous venons de voir ce qui doit caractériser celui qui veut suivre le Seigneur. Dans les v. 23-27, nous trouvons ce que l’on rencontre dans ce chemin : «Et quand il fut monté dans la nacelle, ses disciples le suivirent». Les disciples pouvaient penser qu’en accompagnant le Seigneur, ils seraient à l’abri de toutes les difficultés. Il n’en est rien ; les difficultés abondent, au contraire, car Satan sait susciter l’orage sur la route de ceux qui ne sont plus sous son pouvoir ; c’est ce que nous enseigne la tempête qui surprend et effraie les disciples. «Et voici, une grande tourmente s’éleva sur la mer, en sorte que la nacelle était couverte par les vagues, mais lui dormait». Malgré leur effroi et les dangers apparents du voyage, il aurait dû suffire aux disciples que Jésus soit avec eux. L’Éternel ne dit-il pas au résidu d’Israël qui passe par l’orage de la persécution : «Ne crains point, car je suis avec toi» (Ésaïe 41:10) ? Le Seigneur dormait, mais il était avec eux. Il manquait aux disciples la connaissance de la gloire de sa personne ; s’ils l’avaient connue, ils n’auraient pas été effrayés, sachant qu’ils avaient avec eux le Créateur du monde, venu dans la forme d’un homme pour accomplir les conseils éternels de Dieu ; ils auraient compris que sa vie ne pouvait être en danger, que les flots ne pouvaient l’engloutir, ni eux non plus, puisqu’ils étaient avec lui. Il nous arrive souvent de ne croire à la puissance et à l’amour de Dieu que si nous les voyons en activité en notre faveur ; si non, le Seigneur nous paraît, comme aux disciples, indifférent à nos circonstances. «Les disciples s’approchèrent et le réveillèrent, disant : Seigneur, sauve-nous ! nous périssons. Et il leur dit : Pourquoi êtes-vous craintifs, gens de petite foi ? Alors, s’étant levé, il reprit les vents et la mer, et il se fit un grand calme». Le Seigneur éprouve la foi, afin de la fortifier en manifestant sa puissance et sa bonté en son temps ; ainsi nous apprenons toujours mieux qui est Celui qui veut être toujours avec nous, afin que nous puissions dire, comme le psalmiste : «Même quand je marcherais par la vallée de l’ombre de la mort, je ne craindrai aucun mal ; car tu es avec moi» (Psaume 23:4).
Le récit suivant (v. 28 à 34) nous fait voir l’accueil que le Seigneur reçut dans ce monde. Arrivé sur l’autre rive du lac, dans le pays des Gergéséniens, «deux démoniaques, sortant des sépulcres, vinrent à sa rencontre ; et ils étaient très violents, en sorte que personne ne pouvait passer par ce chemin-là. Et voici, ils s’écrièrent, disant : Qu’y a-t-il entre nous et toi Jésus, Fils de Dieu ? Es-tu venu ici avant le temps pour nous tourmenter ?» Quelle épouvantable figure de l’état de l’homme sous le pouvoir de Satan nous représentent ces deux démoniaques : l’homme violent, qui n’est plus maître de lui-même, et qui est dangereux pour ses semblables ! Quel affreux caractère de l’homme tombé par le péché entre les mains de l’Ennemi, et qui a transformé ce monde en un sépulcre, le péché y étant entré et, par le péché, la mort ! C’est au milieu de ces êtres et dans cet état de choses, que Jésus est descendu pour apporter la délivrance. Si «personne ne pouvait passer par ce chemin-là» (v. 28), lui le pouvait, et il y a passé en grâce pour nous délivrer.
Mieux que les hommes, les démons reconnaissent en Jésus le Fils de Dieu, celui qui les jugera quand le temps sera venu. Lorsqu’un pécheur reçoit le Fils de Dieu comme son Sauveur, il possède le salut ; mais, pour les démons, il n’y a ni pardon, ni délivrance. Ils le savent ; et ceux-ci demandent au Seigneur de leur permettre de s’en aller dans le troupeau de pourceaux qui paissait non loin de là, puis ces animaux se ruèrent du haut de la côte dans les flots et y périrent. Leurs gardiens s’en allèrent dans la ville pour y raconter tout ce qui s’était passé. «Et voici, toute la ville sortit au-devant de Jésus ; et, l’ayant vu, ils le prièrent de se retirer de leur territoire». Triste tableau de ce qui est arrivé lorsque le Seigneur se présenta pour délivrer l’homme de la puissance du diable ! L’homme préféra l’esclavage de Satan à la présence de Dieu en grâce, et c’est ce qui causa pour Israël sa ruine définitive ; car semblables aux pourceaux qui périrent dans les eaux, sous l’influence des démons, les Juifs ont été chassés de leur territoire et engloutis dans la mer des peuples, jusqu’au moment où ils reconnaîtront celui qu’ils ont rejeté.
Remarquons que la ville est mentionnée ici, non à cause de son importance, mais à cause de son caractère qui, dans la Parole, est toujours mauvais. L’homme déchu, sous le pouvoir de Satan, et chassé de la présence de l’Éternel (Genèse 4), se construisit une ville. Cette ville, figure du monde avec tous ses agréments, semble lui fournir tout ce qu’il faut pour rendre supportable la présence de Satan et les conséquences du péché. Lorsque Dieu se présente en grâce pour le délivrer, l’homme le prie, pour ainsi dire, de se retirer, comme les Gergéséniens. N’est-ce pas ce que fit entendre le cri : «Ôte, ôte, crucifie-le», et : «Nous ne voulons pas que celui-ci règne sur nous» ? Aussi, depuis le rejet de Christ, ce qui caractérise le monde — et non seulement les Juifs — c’est que Satan, que l’on a préféré à Christ, en est devenu le chef. Dieu ne cesse pourtant pas d’offrir sa grâce à chacun ; il déploie sa grande patience envers tous les hommes ; il les supplie d’être réconciliés avec lui, pour éviter la colère à venir. Position effrayante que celle des gens du monde au jour du jugement ! Que tous nos lecteurs qui pourraient n’être pas encore sauvés, acceptent, sans retard, la grâce qui leur est offerte aujourd’hui, afin de pouvoir attendre du ciel Jésus qui nous délivre de la colère qui vient !
Le Seigneur passe à l’autre rive et revient dans sa propre ville, qui était Capernaüm. Là on lui apporta un paralytique couché sur son lit. «Et Jésus, voyant leur foi, dit au paralytique : Aie bon courage, mon enfant, tes péchés sont pardonnés». Ici encore, nous voyons que Jésus répond à la foi. Dans ce cas, c’est à celle de ceux qui apportent le paralytique. En Marc 2, on voit l’énergie de cette foi qui surmonte toutes les difficultés pour placer le pauvre malade en présence du Seigneur. Ce récit contient, entre autres, une leçon dont nous avons tous besoin de profiter, petits et grands. Nous avons dit que la paralysie est une figure de l’incapacité où se trouve placé l’homme, par le péché, de faire quoi que ce soit pour avoir la vie. Il faut donc que ceux qui ont la vie nouvelle aident ceux qui en sont encore privés, comme le firent les personnes qui, en amenant au Seigneur le paralytique, avaient la foi pour sa guérison. Chacun peut faire quelque chose pour mettre un pécheur en contact avec la puissance qui guérit, soit en parlant du Seigneur à l’occasion, soit, surtout, en le lui présentant par la prière, soit encore en l’engageant à venir entendre la prédication de l’Évangile, en distribuant des traités, en profitant de toutes les occasions qui s’offrent pour attirer les âmes au Sauveur. On connaît beaucoup de conversions produites par le moyen de jeunes enfants qui ont été ainsi des porteurs de paralytiques. Nous ne pouvons pas convertir ; mais nous pouvons indiquer le chemin du salut, contraindre d’entrer dans la salle des noces ceux qui se tiennent dehors (Luc 14:23). N’oubliez pas, mes chers lecteurs, l’enseignement que nous donne la foi des personnes qui amenèrent le paralytique à Jésus !
Des scribes, entendant le Seigneur dire à cet homme : «Tes péchés sont pardonnés», l’accusent de blasphème ; mais le Seigneur connaissait leurs pensées et leur dit : «Pourquoi pensez-vous du mal dans vos cœurs ? Car lequel est le plus facile, de dire : Tes péchés sont pardonnés, ou de dire : Lève-toi et marche ? Or, afin que vous sachiez que le Fils de l’homme a le pouvoir sur la terre de pardonner les péchés... ; alors il dit au paralytique : Lève-toi, prends ton lit, et va dans ta maison» (v. 1-8). Ces scribes ne reconnaissaient pas en Jésus l’Éternel qui visitait son peuple, accomplissant ce qui est dit au Psaume 103:3 : «C’est Lui qui pardonne toutes tes iniquités, qui guérit toutes tes infirmités». Celui qui possède ce pouvoir était, sur la terre, le Fils de l’homme, titre que prend toujours le Seigneur rejeté. Il lui était aussi facile de dire : «Tes péchés sont pardonnés», que de dire : «Lève-toi et marche». Sous le gouvernement de Dieu au milieu de son peuple, celui qui était affligé d’une infirmité, l’était à cause de certains péchés qu’il avait commis, de sorte que guérir un tel homme, c’était lui pardonner ses péchés, les péchés qui avaient causé son infirmité. Or ce n’était que Dieu seul qui pouvait faire cela. Dans la personne de Jésus, Dieu était là pour guérir Israël tout entier, s’il eût voulu le recevoir. En voyant cela, les foules furent saisies de crainte et glorifièrent Dieu qui avait donné un tel pouvoir aux hommes. Elles le constataient, mais cela ne veut pas dire qu’elles croyaient que ce Fils de l’homme était l’Éternel, Emmanuel, Dieu avec nous. Les hommes sont plus vite frappés par la puissance de Dieu qu’attirés par son amour. Mais les sentiments produits par la vue des miracles ne sauvent pas ; il faut la foi en la personne du Seigneur et en sa Parole.
«Et Jésus, passant de là plus avant, vit un homme nommé Matthieu, assis au bureau de recette ; et il lui dit : Suis-moi. Et se levant, il le suivit. Et il arriva, comme il était à table dans la maison, que voici, beaucoup de publicains et de pécheurs vinrent et se mirent à table avec Jésus et ses disciples» (v. 9, 10).
Si l’Éternel était au milieu de son peuple, c’était sur le pied de la grâce, et il agissait selon cette grâce qui ne tient pas compte de ce qu’est l’homme pour opérer envers lui. Le Seigneur veut s’associer des hommes, les apôtres, pour accomplir son œuvre d’amour et de puissance au milieu de son pauvre peuple, comme nous le voyons au chapitre suivant. Il ne prend pas pour cela un pharisien ou un docteur de la loi, car rien de ce qui caractérisait ces hommes religieux ne les qualifiait pour cet appel, pas plus que chez les autres hommes. Il appelle un péager, un homme méprisé par les Juifs à cause de sa vocation. C’est la grâce qui le formera pour son service (voir Marc 1:17). Les péagers, qui prélevaient les droits de péage pour le compte des Romains, le faisaient souvent sans conscience, très arbitrairement, ainsi que Jean le Baptiseur le dit à ceux qui venaient à lui (Luc 3:13). Aussi, les Juifs qui supportaient difficilement le joug des Romains, méprisaient-ils profondément ceux des leurs qui acceptaient ces fonctions. Ils les mettaient au rang des pécheurs, des gens de mauvaise vie, les excluaient de leurs synagogues et leur témoignage en public n’avait aucune valeur. Mais Dieu ne regarde pas plus aux défauts qu’aux qualités de l’homme pour s’occuper de lui. Il est venu apporter la grâce à tous, parce que tous, sans distinction, étaient perdus. Les pharisiens, qui s’estimaient supérieurs aux autres, voyant Jésus à table avec les publicains et les pécheurs, disent à ses disciples : «Pourquoi votre maître mange-t-il avec les publicains et les pécheurs ? Et Jésus, l’ayant entendu, leur dit : Ceux qui sont en bonne santé n’ont pas besoin de médecin, mais ceux qui se portent mal. Mais allez et apprenez ce que c’est que : «Je veux miséricorde et non pas sacrifice» (Osée 6:6) ; car je ne suis pas venu appeler des justes, mais des pécheurs» (v. 11-13). Quelle belle définition de la grâce venue au milieu d’eux dans la personne de Jésus, et qui veut faire miséricorde à tous, parce que Dieu ne peut accepter aucun sacrifice offert par l’homme souillé par le péché. Dès qu’un homme reconnaît qu’il est pécheur, perdu, il peut aller au Sauveur et il reçoit le pardon de ses péchés. Mais tant qu’il se croit juste et qu’il demeure dans son état de perdition, il ne peut apprécier la grâce ; ainsi il se trouve en opposition avec la parole de Dieu qui dit : «Il n’y a point de juste, non pas même un seul» (Romains 3:10).
Viennent ensuite les disciples de Jean le Baptiseur, qui demandent à Jésus pourquoi eux-mêmes et les pharisiens, jeûnaient souvent et non ses disciples. Jésus leur dit : «Les fils de la chambre nuptiale peuvent-ils mener deuil tant que l’époux est avec eux ? Mais des jours viendront, lorsque l’époux leur aura été ôté ; et alors ils jeûneront» (v. 14, 15). Le Seigneur compare la position de ses disciples à celle des amis d’un époux dans le jour des noces : remplis de joie par sa présence, le jeûne ne leur conviendrait pas. En effet, pouvait-on jeûner si l’on comprenait qui était ce divin Maître, si l’on jouissait des effets de sa présence et de son activité ? Les disciples étaient les objets de son amour, car ils avaient trouvé, comme le dit Philippe à Nathanaël, «celui... duquel les prophètes ont écrit» (Jean 1:46). On voit combien même les disciples de Jean avaient peu compris qui était celui dont leur maître avait dit : «L’ami de l’époux, qui assiste et l’entend, est tout réjoui à cause de la voix de l’époux ; cette joie donc, qui est la mienne, est accomplie» (Jean 3:29). Dans sa réponse aux disciples de Jean, le Seigneur a aussi devant lui son rejet, qui amènera pour eux les temps de tristesse et de jeûne dont il les entretient en Jean 16:16-20.
Dans les figures dont le Seigneur se sert (v. 16 et 17), il montre que la grâce apportée par lui est une chose entièrement nouvelle qui ne peut être contenue dans les formes légales du judaïsme, ni convenir à la propre justice des pharisiens. «Personne ne met un morceau de drap neuf à un vieil habit... On ne met pas non plus du vin nouveau dans de vieilles outres ; autrement les outres se rompent, et le vin se répand, et les outres sont perdues ; mais on met le vin nouveau dans des outres neuves, et tous les deux se conservent». En effet, les outres, dans lesquelles, en Orient, on conserve les liquides, ne supportent pas lorsqu’elles sont vieilles la force de la fermentation du vin nouveau. De là vient l’exemple que le Seigneur prend pour montrer que tout doit être nouveau sous le régime de la grâce qu’il introduisait dans ce monde. Le système légal, qui s’adressait à l’homme dans la chair afin de l’éprouver, ne pouvait convenir à la grâce qui ne tenait aucun compte de lui, qu’il fût Juif ou Gentil, religieux ou grand pécheur, et qui agissait librement envers tous ceux qui en avaient besoin.
Comme le Seigneur parlait ainsi, un chef de synagogue, appelé Jaïrus, en Marc et Luc, s’approcha de lui et lui dit : «Ma fille vient de mourir, mais viens et pose ta main sur elle, et elle vivra». Jésus le suivit aussitôt, accompagné de ses disciples. Sur le chemin, une femme souffrant depuis douze ans d’une perte de sang — image de la vie qui s’en va — s’approcha par derrière et toucha le bord de son vêtement, disant en elle-même : «Si seulement je touche son vêtement, je serai guérie. Et Jésus, s’étant retourné et la voyant, dit : Aie bon courage, ma fille ; ta foi t’a guérie. Et la femme fut guérie dès cette heure». Arrivé à la maison de Jaïrus, Jésus trouve les joueurs de flûte qui faisaient entendre le son des complaintes, en usage en Orient lors d’un décès, et la foule qui menait grand bruit. Il les fit tous retirer disant : «La jeune fille n’est pas morte, mais elle dort. Et ils se riaient de lui. Et lorsque la foule eut été mise dehors, il entra et prit sa main, et la jeune fille se leva. Et le bruit s’en répandit par tout ce pays-là» (v. 18 à 26). En contraste avec ceux qui méconnaissaient la personne de Jésus, on aime à voir la foi du père qui sait que, si Jésus touche sa fille morte, elle vivra, et la foi de cette femme, assurée de sa guérison si elle touche son vêtement. Puis au-dessus de tout, l’amour infatigable du Seigneur Jésus, toujours prêt à répondre aux besoins qu’il rencontre. C’était là sa nourriture, la satisfaction de son propre cœur.
Outre cela, il y a, dans ces faits, un enseignement figuré qui nous fait voir le but du ministère de Jésus en rapport avec Israël. La jeune fille morte représente l’état de mort morale de la nation. Le Seigneur est venu pour réveiller Israël, l’appeler à la vie, ce qui n’aura lieu qu’aux temps de la fin, puisqu’il a été rejeté. Mais en attendant, tous ceux qui, individuellement, sentent la gravité de leur état comme cette femme et qui ont la foi, peuvent profiter de la puissance et de l’amour du Seigneur pour être guéris. C’est ce qui eut lieu pour tous ceux des Juifs qui reçurent le Seigneur, et cela s’étend à tous ceux qui croient en tout lieu, en attendant la résurrection morale d’Israël.
«Et comme Jésus passait de là plus avant, deux aveugles le suivirent, criant et disant : Aie pitié de nous, Fils de David ! Et quand il fut arrivé dans la maison, les aveugles vinrent à lui. Et Jésus leur dit : Croyez-vous que je puisse faire ceci ? Ils lui disent : Oui, Seigneur. Alors il toucha leurs yeux, disant : Qu’il vous soit fait selon votre foi. Et leurs yeux furent ouverts» (v. 27-30).
Ces aveugles présentent un autre côté de l’état moral d’Israël — comme de tout homme — aveugle, incapable de profiter de la lumière venue dans la personne de Jésus, sans l’intervention de sa puissance qui ne répond qu’à la foi ; car, au milieu de ce triste état d’Israël, ceux qui faisaient appel au Fils de David trouvaient en lui la réponse à leur foi et profitaient de ce qu’il était venu offrir à tout le peuple : la lumière qui manque à tout homme inconverti.
Jésus défendit aux aveugles de dire ce qui leur était arrivé, ainsi qu’il l’avait enjoint au lépreux (chap. 8:4). Mais eux répandirent sa renommée dans tout le pays. Le Seigneur ne voulait pas exciter la curiosité des foules. Venu pour répondre aux besoins des pécheurs, il ne cherchait pas non plus la gloire qui vient des hommes. C’est pourquoi, au chap. 8:18, quand il voit venir après lui les foules, il passe à l’autre rive. «Et comme ils sortaient, voici, on lui amena un homme muet, démoniaque. Et le démon ayant été chassé, le muet parla» (v. 32-34). Le mutisme représente aussi un des caractères de l’état moral de l’homme déchu : il ne peut pas mieux parler que voir. Il ne peut rien dire de l’amour de Dieu, ni des perfections de Jésus, ni des choses célestes qu’il ne connaît pas ! Mais le Seigneur est là pour le délivrer de la puissance de Satan et le rendre capable de parler de lui, de voir ses beautés, de le suivre, et, comme dans le cas de la belle-mère de Pierre, de le servir. Heureux changement, dû à la grâce parfaite comme à la puissance de Dieu ! C’est bien passer de la mort à la vie, des ténèbres à la lumière, du pouvoir de Satan à Dieu. Quelle gloire lui revient dès maintenant et dans toute la bienheureuse éternité !
Les foules étonnées dirent : «Il ne s’est jamais rien vu de pareil en Israël ; mais les pharisiens disaient : Il chasse les démons par le chef des démons» (v. 33, 34). Si la présence de Jésus est plus insupportable au monde que celle de Satan, son activité en grâce et en amour remplit de haine et de jalousie les orgueilleux pharisiens, les gens religieux du peuple juif. Ils sentent leur petitesse en présence de la grandeur du Seigneur Jésus ; ils craignent de voir diminuer leur prestige devant les hommes ; aussi pour sauvegarder le caractère de leur prétendue mission divine aux yeux du peuple, ils ne craignent pas d’attribuer au diable la puissance du Fils de Dieu, le rejetant ainsi formellement, commettant ce qui est appelé : «le blasphème contre l’Esprit» (chap. 12:31), pour lequel il n’y a pas de pardon.
Malgré la haine dont Jésus était l’objet, haine manifestant ouvertement que son peuple ne voulait rien de lui, il poursuit son œuvre, prêchant l’évangile du royaume dans les villes et les villages, mettant sa puissance et son amour à la disposition de qui en sentait le besoin. Il guérissait toute maladie et toute langueur (v. 35).
Malgré l’opposition des chefs du peuple, il y avait des besoins dans les foules. «Et voyant les foules, il fut ému de compassion pour elles, parce qu’ils étaient las et dispersés, comme des brebis qui n’ont pas de berger» (v. 36). Ceux qui avaient pris la place de bergers au milieu du peuple, les sacrificateurs, les scribes et les pharisiens, ne se souciaient pas du troupeau ; ils en tiraient tous les avantages possibles à leur propre profit. L’Éternel le leur reproche par Ézéchiel, en annonçant l’arrivée du bon berger qui prendrait soin des brebis (Ézéchiel 34). La méchanceté des conducteurs d’Israël, leur infidélité à l’égard du troupeau, leur haine vis-à-vis de Jésus n’étaient qu’une raison de plus pour lui d’accomplir son œuvre d’amour envers les misérables. Aussi il dit à ses disciples : «La moisson est grande, mais il y a peu d’ouvriers ; suppliez donc le Seigneur de la moisson, en sorte qu’il pousse des ouvriers dans sa moisson» (v. 36-38).
Combien cet amour infatigable du Seigneur est merveilleux ! Il est comme cette source rafraîchissante et pure qui suit paisiblement son cours ; lorsqu’elle se heurte à un dur rocher, elle ne fait que s’en détourner pour porter ailleurs son action bienfaisante. Cette source de grâce et de vie rencontre-t-elle un cœur dur chez un de nos lecteurs ? Qu’il se laisse fléchir par la bonté de Dieu qui le pousse à la repentance, afin que la source du salut ne se détourne pas de lui à jamais, mais qu’au contraire, il puisse chanter en toute sincérité :
Heureux celui qui, près du fleuve,
Arbre vivant par Toi planté,
Prend racine et croît, et s’abreuve
De ses eaux, pour l’éternité !
Source d’amour, toujours nouvelle,
Qui jaillis pour nous du Saint Lieu,
De ta plénitude éternelle,
Tu nous remplis, Source de Dieu !
À la fin du chapitre précédent, Jésus avait dit aux disciples de supplier le Seigneur de la moisson afin qu’il pousse des ouvriers dans sa moisson. Ici, il les envoie lui-même ; car malgré son abaissement, il est néanmoins le Seigneur de la moisson, comme aussi Seigneur de tout ; et il se révèle comme tel en faisant annoncer à son peuple que le royaume des cieux s’était approché. Aujourd’hui, il se sert de son autorité pour donner la vie éternelle, comme nous le lisons en Jean 17:1, 2 : «Père, l’heure est venue ; glorifie ton Fils, afin que ton Fils te glorifie, comme tu lui as donné autorité sur toute chair, afin que, quant à tout ce que tu lui as donné, il leur donne la vie éternelle». Plus tard, le Seigneur usera de cette même autorité, pour exercer le jugement sur ceux qui n’auront rien voulu de lui durant le temps de sa longue patience.
Jésus appelle ses douze disciples, nommés «apôtres» ou envoyés, et les envoie deux à deux, afin qu’ils annoncent aux Juifs que le royaume des cieux s’est approché. Nous avons déjà dit que ce qui caractérise l’évangile selon Matthieu, c’est que Jésus se présente comme Messie à Israël. Ce fait ressort bien nettement des instructions qu’il donne à ses disciples : «Ne vous en allez pas sur le chemin des nations, et n’entrez dans aucune ville de Samaritains ; mais allez plutôt vers les brebis perdues de la maison d’Israël» (v. 5, 6). C’est à Israël déjà que Jean le Baptiseur s’était adressé, et maintenant c’est le Messie lui-même qui fait proclamer, au même peuple, l’approche du royaume des cieux. En revanche, la prédication de l’Évangile de la grâce à tous les hommes n’a eu lieu qu’après le rejet de Christ. Nous avons déjà parlé de la différence qu’il y a entre l’Évangile du royaume et l’Évangile de la grâce prêché actuellement.
Jésus confère aux douze le pouvoir d’accomplir des miracles ; ils présentent ainsi au peuple la puissance par laquelle le royaume serait établi, nécessaire pour délivrer l’homme des conséquences du péché et du pouvoir de Satan. En prêchant le royaume des cieux, ils devaient guérir les infirmes, ressusciter les morts, rendre nets les lépreux, chasser les démons. Toute cette puissance sera de nouveau en activité lors de l’établissement futur du règne de Christ ; c’est pourquoi ces miracles que les disciples accomplissaient en prêchant l’Évangile sont appelés, en Hébreux 6:5, «les miracles du siècle à venir».
Les disciples avaient reçu gratuitement et devaient donner gratuitement sans faire aucune provision pour le chemin. Le roi lui-même les envoyait en Israël, où son autorité devait être reconnue. Plus tard, lorsque le rejet du roi est accompli, quand le Seigneur va à la croix, il parle tout autrement aux disciples, alors les envoyés d’un Christ rejeté (Luc 22:35, 36). Mais maintenant, les messagers d’une nouvelle aussi réjouissante que celle de l’approche du royaume des cieux allaient mettre le peuple à l’épreuve : ceux qui les recevaient, jouiraient de la paix qu’on leur apportait, tandis que, si la maison dans laquelle les disciples entraient était indigne, et qu’ils n’y soient pas reçus, en en sortant, ils devaient secouer la poussière de leurs pieds en témoignage contre elle. Le Seigneur ajoute : «En vérité, je vous dis : le sort du pays de Sodome et de Gomorrhe sera plus supportable au jour du jugement que celui de cette ville-là». Tout grossiers pécheurs qu’ils étaient, les habitants de ces villes ne seront pas responsables d’avoir méprisé un privilège tel que celui de ces villes d’Israël, qui, au lieu de recevoir le Messie annoncé depuis longtemps par les prophètes, le mirent à mort. Aussi, après ce rejet, le temps de la longue patience de Dieu envers son peuple arriva à son terme, Israël fut rejeté et dispersé parmi les nations jusqu’au moment où il sera ramené et béni, selon les promesses immuables de Dieu, en vertu du sang de la nouvelle alliance, répandu sur la croix.
Jusqu’au v. 15, le Seigneur donne aux disciples les instructions concernant leur service exclusivement pendant le temps qui s’est écoulé avant sa mort, et ensuite celles qui ont une portée plus générale et embrassent toute la période qui s’écoule entre sa première venue et sa venue glorieuse comme Fils de l’homme (v. 23) ; mais toujours en rapport avec Israël. Car après la mort du Seigneur, les disciples ont encore exercé leur ministère au milieu du peuple premièrement, avant d’aller annoncer l’Évangile aux nations. C’est alors qu’ils devaient être prudents comme les serpents, simples comme les colombes, car ils étaient comme des brebis au milieu des loups. «Prudents comme les serpents», cela veut dire qu’il faut tenir compte de l’opposition qui existe dans un milieu ennemi, en ne faisant rien qui ne soit nécessaire au bien de la cause que l’on sert. D’un autre côté, il faut être simple comme les colombes, agir sans calcul, dès que l’on a discerné qu’il faut agir. «J’ai cru, c’est pourquoi j’ai parlé», sans s’inquiéter des conséquences, lorsqu’il faut parler.
Comme envoyés du roi rejeté, les disciples seraient livrés aux sanhédrins, fouettés dans les synagogues, menés devant les gouverneurs et les rois, à cause du Seigneur et en témoignage aux Juifs et aux nations. Aucune de ces tribulations ne leur arriva pendant que le Seigneur était encore avec eux, tandis que, immédiatement après sa mort, nous lisons dans le livre des Actes des apôtres qu’ils les rencontrèrent toutes. Tout cela aura lieu de nouveau après l’enlèvement de l’Église et avant l’arrivée du Fils de l’homme, pour ceux qui annonceront l’établissement du royaume par Christ ; mais ce temps sera court ; c’est pourquoi le Seigneur, quand il en parle, dit : «Vous n’aurez point achevé de parcourir les villes d’Israël, que le Fils de l’homme ne soit venu» (v. 23), lors de cette apparition qui sera aussi soudaine que celle de l’éclair (chap. 24:27).
Jésus donne à ses disciples toutes les instructions et les encouragements nécessaires durant la période de leur ministère au milieu des Juifs, qui s’écoule donc dès le moment de leur mission, jusqu’au temps où le Seigneur reviendra pour établir son royaume en gloire.
Ces encouragements et ces instructions s’appliquent aussi aux serviteurs et aux témoins du Seigneur actuellement, car l’opposition avec laquelle les croyants de tous temps ont affaire, porte toujours le même caractère ; étant opposé à Dieu, le cœur naturel hait la lumière et la vérité, sous quelque forme qu’on les présente, et surtout si l’on se déclare pour Christ dans le monde qui l’a rejeté.
Les disciples ne devaient pas être en souci lorsqu’ils auraient à répondre à ceux auxquels ils seraient livrés. Si le Seigneur les laissait ici-bas, il leur enverrait le Saint Esprit qui est un esprit «de puissance, et d’amour, et de conseil» (2 Tim. 1:7), et leur fournirait les paroles qu’ils auraient à dire. Il dit, en Luc 21:15 : «Car moi je vous donnerai une bouche et une sagesse, à laquelle tous vos adversaires ne pourront répondre ou résister» (voir aussi Marc 13:11).
La haine pour le Seigneur est capable d’étouffer tous les sentiments naturels ; un frère peut livrer son frère à la mort, un père son enfant, des enfants leurs parents (v. 21). L’histoire de l’Église n’a fourni que de trop nombreux exemples de cette triste vérité, et, chose humiliante à constater, de tels faits ne se présentent guère que lorsqu’il s’agit des intérêts de Christ. Il y a bien eu des sujets de divisions et de guerre en dehors de la cause de la vérité, mais aucun de ces motifs n’a poussé l’homme dans un état de haine tel qu’il ne tienne pas compte des affections les plus intimes, ainsi qu’on l’a vu dans toutes les persécutions endurées par les fidèles, tant de la part des Juifs, que de la part de Rome, païenne ou chrétienne. Quelle triste preuve le cœur humain a su donner de son inimitié contre Dieu, surtout lorsqu’il a eu affaire à la grâce ! Combien cela fait ressortir la grandeur infinie de l’amour de Dieu qui a donné son Fils unique, afin de pouvoir pardonner de tels péchés et amener par la foi de tels pécheurs en relation avec lui comme de bien-aimés enfants !
Les disciples devaient se souvenir que tout ce qui leur serait fait avait été fait à leur Maître. «Le disciple n’est pas au-dessus du maître, ni l’esclave au-dessus de son seigneur» (v. 24, 25). C’est encourageant de penser que le Seigneur a passé le premier par les épreuves et les souffrances, lui qu’on a même osé appeler Béelzébul. Rien d’étonnant alors à ce que l’on traite les serviteurs comme l’on a traité le Maître. Mais ils ne doivent pas craindre les hommes, tout méchants qu’ils soient, car Dieu amènera un jour tout à la lumière. Qu’ils parlent hardiment ! Leur témoignage peut les conduire à la mort, mais qu’ils ne craignent pas ceux qui tuent le corps et ne peuvent tuer l’âme ! C’est Dieu qu’il faut craindre, lui qui peut détruire l’âme et le corps (v. 26-28).
Le Seigneur montre d’une manière touchante que Dieu s’occupe de tous les plus petits détails relatifs aux siens, et que rien n’arrive sans sa volonté. Les passereaux ont peu de valeur pour les hommes, puisqu’on en vend deux pour un sou ; cependant pas un ne tombe en terre sans la permission de notre Père. Pour montrer la grandeur de l’intérêt que Dieu porte aux siens et combien il entre dans tout ce qui nous concerne, le Seigneur dit : «Pour vous, les cheveux même de votre tête sont tous comptés. Ne craignez donc pas : vous valez mieux que beaucoup de passereaux» (v. 29-31). Ces paroles, qui ont encouragé les disciples de tous les temps, sont aussi pour nous maintenant une source de paix et de repos. Quoique nous ne passions pas par les persécutions violentes des temps écoulés, nous avons constamment besoin de nous souvenir que notre Dieu et Père prend soin de tous nos intérêts avec un amour plus grand que celui d’une mère, afin que, rejetant sur lui tous nos sujets d’inquiétude, nous puissions le servir sans distraction. Quelle mère compterait les cheveux de ses enfants ? David avait déjà connu les tendres soins et la bonté infinie de Dieu lorsqu’il disait : «Quand mon père et ma mère m’auraient abandonné, l’Éternel me recueillera» (Psaume 27:10).
Nous confiant ainsi en l’amour de Dieu, ne craignons pas les conséquences de la fidélité quand nous confessons le nom du Seigneur, quoiqu’il puisse nous en coûter, car un jour vient où cette fidélité trouvera sa récompense dans le ciel. Là, dans la présence de son Père, le Seigneur mentionnera, par leurs noms, ceux qui auront été fidèles, tandis qu’il reniera ceux qui auront eu honte de lui sur cette terre (v. 32, 33), ces «timides» dont il est parlé en Apocalypse 21:8, qui auront leur part avec tous les grossiers pécheurs dans l’étang brûlant de feu et de soufre.
Quoique les disciples aient annoncé le royaume des cieux et que le roi ait été présent dans la personne de Jésus, ils ne devaient pas croire que le Seigneur soit venu mettre la paix sur la terre. Il le fera un jour ; pour cela il ôtera tous les méchants par les jugements. Mais il était là en grâce et n’exécutait point de jugement. C’est pourquoi, à cause de la méchanceté des hommes, l’effet de sa venue n’était pas la paix, au contraire, comme on l’a déjà vu au v. 21. Aujourd’hui, Dieu supporte le méchant qui s’élève contre celui qui a reçu le Seigneur, et le croyant doit le supporter, mais sans redouter les souffrances qui découlent de sa fidélité. Le Seigneur montre (v. 36 à 39) qu’il ne faut pas renier la vérité pour éviter la guerre qui peut avoir lieu dans la famille même. Si, pour ne pas avoir à souffrir l’opprobre, quelqu’un aime mieux plaire aux siens qu’au Seigneur, il n’est pas digne de lui. Il faut prendre sa croix et le suivre, c’est-à-dire appliquer la mort à tout ce que la chair peut aimer, si ce qu’elle aime tient une place qui appartient à Christ et empêche par conséquent de lui obéir. Non seulement il faut renoncer à tout ce qu’il y a de plus intime dans sa propre famille, mais à sa propre vie ; car si l’on aime son existence ici-bas plus que le Seigneur, on la perdra ; et si, pour l’amour de Jésus on la perd, c’est-à-dire en ne cherchant pas sa propre satisfaction, on la trouvera, et cela pour l’éternité (v. 40 à 42).
Le salut de tout homme dépend de la réception de la parole de Dieu annoncée par ses serviteurs. Celui qui reçoit l’un d’eux comme lui apportant cette Parole, reçoit le Seigneur lui-même, et celui qui le reçoit, reçoit Dieu qui l’a envoyé. Il en est de même pour celui qui reçoit un prophète ; parce qu’il est un prophète envoyé de Dieu, il a, aux yeux de Dieu, la valeur d’un prophète. De même pour un juste. Celui qui aura donné à un petit, à un croyant, un verre d’eau froide, parce qu’il est un disciple de Christ, ne perdra pas sa récompense. La valeur de nos actes dépend des motifs qui les font accomplir. La personne de Jésus a un tel prix pour Dieu que tout ce qui est fait pour lui, dans ce monde qui l’a rejeté, a un prix inestimable, qui sera manifesté par la récompense que Dieu accordera à ceux qui auront fait quelque chose pour son Fils bien-aimé.
Le salut dépend absolument de l’accueil fait à Christ et à sa Parole, puisque, par des œuvres, personne ne peut l’obtenir. Quand le Fils de l’homme viendra et s’assiéra sur le trône de sa gloire, avec les nations rassemblées autour de lui, ce qui permettra à ceux qui sont à sa droite d’entrer dans le royaume, ce sera le fait d’avoir reçu les envoyés du Seigneur, ceux qu’il appelle «ces petits», et de leur avoir fait du bien ; car en les recevant, ils l’auront reçu lui-même (Matthieu 25:31-46). C’est de ces envoyés qu’il est question dans ce chapitre 10. L’opposition du monde à Christ est telle que le Seigneur dit, en Marc 9:40 : «Celui qui n’est pas contre nous est pour nous».
N’oublions pas, chers lecteurs, que si le salut dépend simplement de l’acceptation de Christ par la foi, il a fallu que ce précieux Sauveur souffre sur la croix tout ce que nous avions mérité. Pour ceux qui l’ont reçu, combien cette seule pensée doit les engager à le suivre et à être ses fidèles témoins ; et pour ceux qui ne l’ont pas encore reçu, peut-il y avoir quelque chose de plus grand que cet amour pour attirer leurs cœurs, afin qu’ils ne négligent pas plus longtemps un si grand salut ? Car comment échapper au jugement, si l’on ne croit pas en celui qui a porté ce jugement à la place du coupable ?
Après avoir envoyé ses disciples dans la moisson, le Seigneur lui-même partit pour enseigner et prêcher dans les villes. Quel fait merveilleux pour la foi que de contempler une telle personne, le Fils de Dieu ! On pouvait le rencontrer dans les chemins, partout, accomplissant au milieu des hommes les œuvres de grâce de la part de Dieu, son Père. Quelle humilité, quel dévouement, quel amour ! Il a quitté la gloire pour venir ici-bas ; étant Dieu, il s’est anéanti, prenant la forme d’esclave, et comme homme obéissant, il s’est abaissé lui-même jusqu’à la mort de la croix, afin de sauver des pécheurs tels que vous et moi.
Cet abaissement, nécessité par le misérable état de l’homme, n’avait aucun rapport avec les pensées juives au sujet d’un Messie glorieux. Déjà son précurseur, Jean le Baptiseur, avait été jeté en prison ; c’était une dure épreuve pour lui, car il connaissait la grandeur du Messie. Il avait dit de lui : «Il faut que lui croisse, et que moi je diminue» (Jean 3:30), et il se déclarait indigne de délier la courroie de sa sandale (Jean 1:27). En endurant la méchanceté d’Hérode, le roi impie et usurpateur du trône, Jean entend parler des œuvres de Christ, sans être secouru par celui auquel appartenait, en réalité, le trône de David.
Dans un moment de défaillance, bien compréhensible pour nos faibles cœurs, mais non pour la foi, Jean envoie ses disciples dire à Jésus : «Es-tu celui qui vient, ou devons-nous en attendre un autre ?» Jésus leur répond : «Allez, et rapportez à Jean les choses que vous entendez et que vous voyez : les aveugles recouvrent la vue et les boiteux marchent ; les lépreux sont rendus nets et les sourds entendent, et les morts sont ressuscités, et l’Évangile est annoncé aux pauvres. Et bienheureux est quiconque n’aura pas été scandalisé en moi». Par cette réponse, le Seigneur s’adresse à la conscience de Jean, et lui fait comprendre qu’il est bien le Messie annoncé et dépeint par Ésaïe ; mais il était méconnu et allait être rejeté, comme le précurseur l’était déjà. Du reste, le royaume était annoncé, mais pas encore établi. En parlant des temps où le Messie serait sur la terre, Ésaïe avait annoncé l’accomplissement des choses dont les disciples de Jean furent témoins et qu’ils rapportèrent à leur maître : «Alors les yeux des aveugles s’ouvriront, et les oreilles des sourds seront ouvertes. Alors le boiteux sautera comme le cerf, et la langue du muet chantera de joie» (Ésaïe 35:5, 6, lire aussi 29:18, 19). Cela devait suffire à la foi de Jean. C’était la grâce, unie à la puissance, s’exerçant au milieu de toutes les conséquences du péché, mais non point encore la puissance qui ôtera les méchants de dessus la terre. On peut remarquer que, malgré son scepticisme momentané, Jean se confiait en Jésus pour la réponse à sa demande : «Es-tu celui qui vient ou devons-nous en attendre un autre ?» Assuré que Jésus était bien le Messie, ce dut être pénible pour son cœur d’entendre cette parole : «Bienheureux est quiconque n’aura pas été scandalisé en moi».
Puissions-nous tous ne pas perdre confiance dans le Seigneur, lors même que nos circonstances ne semblent pas en accord avec son amour.
Lorsque les disciples de Jean s’en furent allés, Jésus s’adressa aussi à la conscience de la foule et rendit témoignage à son bien-aimé serviteur (v. 7 à 19). Malgré tout, Jésus voulait que les foules sachent qui était Jean, afin de leur faire comprendre, en même temps, le caractère solennel du temps dans lequel elles se trouvaient, car la bénédiction dépendait, pour elles, de l’acceptation ou du rejet de Christ et de son précurseur. Hélas ! comme on le voit dans la suite, leur choix était fait, et le peuple allait demeurer sous les conséquences de son incrédulité.
Malgré l’apparence sous laquelle on avait pu voir Jean au désert, Jésus dit qu’il était bien un prophète et même plus qu’un prophète ; il était celui dont il est écrit : «Voici, ... j’envoie mon messager devant ta face, lequel préparera ton chemin devant toi» (Malachie 3:1). Aucun prophète, dit le Seigneur, n’a été plus grand que Jean. Car de tous les prophètes qui ont annoncé la venue de Christ, il est le seul qui ait eu le grand privilège de le voir. Jean avait connu la joie de ce privilège, lorsqu’il disait : «L’ami de l’époux, qui assiste et l’entend, est tout réjoui à cause de la voix de l’époux ; cette joie donc, qui est la mienne, est accomplie» (Jean 3:29). Mais Jésus ajoute que le plus petit dans le royaume des cieux est plus grand que Jean, c’est-à-dire que, lorsque le royaume sera établi, ceux qui en feront partie auront un privilège plus grand que ceux qui l’ont annoncé. Cela est tout particulièrement vrai pour ceux qui croient aujourd’hui. En effet, lorsque le royaume sera établi en gloire, nous régnerons avec Christ, puisque nous avons souffert avec lui pendant le temps de son rejet, car nous reconnaissons ses droits comme roi, tandis que le monde les méconnaît et le méprise.
Jésus dit que «depuis les jours de Jean... jusqu’à maintenant, le royaume des cieux est pris par violence, et les violents le ravissent» (v. 12). Jusqu’à Jean, sous le régime de la loi et des prophètes, Israël tout entier était le peuple de Dieu ; mais vu son état d’impiété, Jean avait annoncé l’établissement du royaume et prêché la repentance nécessaire pour y entrer. Les Juifs orgueilleux disaient : «Nous avons Abraham pour père», mais ne voulaient rien d’un royaume introduit de la sorte, et conduisirent le peuple à rejeter le roi. Aussi ceux d’entre eux qui acceptaient la parole de Jean et de Jésus devaient faire violence à tout ce qui les entourait, selon la parole du Seigneur dans le sermon sur la montagne : Luttez pour entrer par la porte étroite.
Il en va de même aujourd’hui, car nous sommes au milieu d’un monde qui a rejeté Christ. Résistons-lui donc pour entrer dans le chemin étroit qui mène à la vie !
Les Juifs sont avertis que Jean était bien Élie qui doit venir avant l’établissement du royaume et des jugements qui le précéderont (v. 14), pour préparer le chemin du Christ dans les cœurs. C’est ce qu’a fait Jean le Baptiseur, comme le Seigneur le dit en citant le passage de Malachie, au v. 10 (voir aussi Luc 1:17). Tous ceux qui n’ont pas profité de son ministère ont eu leur part avec le peuple incrédule. Dans les temps futurs, avant la venue de Christ en gloire, de nouveau un Élie sera envoyé, selon cette parole : «Voici, je vous envoie Élie, le prophète, avant que vienne le grand et terrible jour de l’Éternel» (Malachie 4:5), et de même tous ceux qui ne le recevront pas, seront frappés par les jugements.
Aussi le Seigneur prononce ces paroles qui sont solennelles aujourd’hui comme alors : «Qui a des oreilles pour entendre, qu’il entende» (v. 15). Car «la foi est de ce qu’on entend, et ce qu’on entend par la parole de Dieu» (Romains 10:17).
Le peuple était sans excuse : Dieu avait employé, mais en vain, tous les moyens nécessaires, afin que tous puissent jouir des bénédictions promises par la présence du Messie. Tels des enfants, assis sur la place du marché et qui ne sont jamais d’accord avec les propositions de leurs camarades. Quand Jean le Baptiseur parut, austère comme un prophète, séparé des pécheurs qu’il invitait à la repentance, ils dirent : «Il a un démon». Le Fils de l’homme vient en grâce chercher les pécheurs où ils se trouvent, ne craignant pas de se placer en contact avec les hommes les plus souillés, parce qu’il venait chercher et sauver ce qui était perdu, et ils dirent alors : «Voici un mangeur et un buveur, un ami des publicains et des pécheurs» (v. 18, 19).
Au milieu de cet état de choses, le Seigneur appelle ceux qui ont cru les enfants de la sagesse, parce qu’ils écoutent la voix de la sagesse, la voix de Dieu qui avertit les simples à accepter la Parole (Lire Proverbes 8 et 9:1-6). La sagesse les a trouvés et elle a été justifiée par eux, cette sagesse de Dieu qui est folie pour les sages et les intelligents de ce monde. Aussi, quels résultats glorieux et éternels pour ceux qui la trouvent (Proverbes 8:35), quel contraste avec ceux qui la rejettent ! (v. 36).
Ne voulez-vous pas tous être des enfants de la sagesse, chers lecteurs ?
Combien le Seigneur devait souffrir en voyant l’aveuglement et l’incrédulité de ceux qui le rejetaient, bien que les témoins et les objets de sa grâce merveilleuse. Aussi, dans le sentiment douloureux des conséquences qui en résulteraient pour les villes les plus favorisées, il leur adresse des reproches et prophétise le malheur qui sera leur part au jour du jugement.
Les cités orgueilleuses et païennes de Tyr et de Sidon se seraient repenties, si elles avaient joui des privilèges dont avaient bénéficié ces villes de la Galilée, et Sodome subsisterait encore. C’est pourquoi, au jour du jugement, elles subiront un châtiment moins sévère que celles au milieu desquelles le Seigneur opéra le plus grand nombre de ses miracles. Car les peines éternelles seront proportionnées non seulement aux péchés commis, mais aussi aux privilèges possédés ; car tout doit avoir lieu selon la justice parfaite de Dieu. Combien cette solennelle vérité est propre à faire réfléchir tous ceux qui ont entendu la Parole sans l’avoir encore reçue dans leur cœur par la foi ! Car si la responsabilité des villes de la Palestine sera grande au jour du jugement, que ne sera pas celle des pays christianisés, et tout particulièrement celle de tous ceux qui, dès leur jeune âge, ont reçu les enseignements de l’Évangile sans se les être appropriés ? De tous les malheureux qui passeront l’éternité dans les ténèbres de dehors, aucun n’endurera plus de tourments que celui qui se souviendra de tous les appels entendus de la part de ses proches, de ses amis, ou des serviteurs du Seigneur et de tant d’autres manières, et qui n’y aura pas répondu.
Quel supplice que de devoir éternellement s’accuser d’être loin de Dieu par sa propre faute, parce que l’on aura méprisé son amour dans le temps de sa longue patience, parce que l’on aura préféré aux choses d’en haut les vanités mensongères du présent siècle.
«En ce temps-là, Jésus répondit et dit : Je te loue, ô Père, Seigneur du ciel et de la terre, parce que tu as caché ces choses aux sages et aux intelligents, et que tu les as révélées aux petits enfants. Oui, Père, car c’est ce que tu as trouvé bon devant toi». Ce «temps-là» était celui où Jésus constatait avec douleur son rejet ; combien il aurait voulu que son peuple le reçoive, lui qui put leur dire : «Que de fois j’ai voulu rassembler tes enfants comme une poule rassemble ses poussins sous ses ailes, et vous ne l’avez pas voulu !» (Matthieu 23:37). Rien n’est plus douloureux au cœur qu’un amour incompris, méconnu, rejeté. Mais le Seigneur, dans une soumission parfaite, s’en remet à son Père comme au Seigneur du ciel et de la terre, et porte ses pensées sur les conséquences bénies qui résulteront, pour d’autres, du fait de son rejet par son pauvre peuple qui s’est laissé aveuglément conduire par ses chefs, les sages et les intelligents. Ceux qui en profiteront seront les petits enfants, les croyants, où qu’ils se trouvent. Tous peuvent y avoir part, s’ils prennent cette place de petits enfants, s’ils croient en toute simplicité. S’il fallait devenir sage et intelligent selon l’homme, beaucoup ne pourraient être sauvés. Un petit enfant qui croit ce que Dieu dit, qui reçoit Jésus pour son Sauveur, reçoit aussi la révélation des pensées de Dieu, auxquelles les raisonneurs de ce siècle ne comprennent rien : elles leur sont cachées ; pour qu’elles leur soient révélées, il faut qu’ils reçoivent Jésus comme Sauveur avec la simplicité de la foi enfantine.
La gloire de la personne de Jésus apparaît ici au milieu de son rejet et dans son abaissement (v. 27). Quoique l’homme toujours soumis et obéissant, Jésus a toujours conscience de sa gloire ; c’est ce qui fait ressortir la beauté de son humiliation. «Toutes choses m’ont été livrées par mon Père», dit-il. Si tout à l’heure, dans son humble dépendance, il appelle son Père «Seigneur du ciel et de la terre», il sait que le Père lui a remis toutes choses entre les mains. «Dieu... lui a donné un nom au-dessus de tout nom, afin qu’au nom de Jésus se ploie tout genou des êtres célestes, et terrestres, et infernaux, et que toute langue confesse que Jésus Christ est Seigneur, à la gloire de Dieu le Père» (Philippiens 2:9-11). La gloire de sa personne est si grande, si insondable dans l’union de sa parfaite humanité et de son absolue divinité, que personne ne le connaît si ce n’est le Père. Personne ne pouvait, en se trouvant en présence du Fils de Dieu sur la terre, connaître la gloire de sa personne. Mais s’il ne pouvait être ainsi connu que du Père, jusqu’alors personne non plus ne connaissait le Père. Ni la loi, ni les prophètes ne l’avaient révélé. Qui donc pouvait le révéler, sinon celui que personne ne connaissait, qui était ici-bas : «le Fils unique, qui est dans le sein du Père» et qui marchait toutefois au milieu des hommes comme l’un d’eux ? C’est précisément pour révéler Dieu sous son caractère de Père à de pauvres pécheurs qui n’auraient pu voir Dieu sans mourir, que le Seigneur est venu dans son inscrutable humanité apporter la révélation de Dieu en grâce, le Père, de sorte qu’il peut dire : «Personne ne connaît le Père, si ce n’est le Fils, et celui à qui le Fils voudra le révéler». Puisque son peuple le méconnaît et le rejette comme Messie, il continuera son oeuvre de grâce en révélant la plénitude de l’amour de Dieu le Père à qui il voudra. L’amour est souverain.
On peut poser la question : À qui le Fils voudra-t-il révéler le Père ? Jésus répond lui-même en disant : «Venez à moi, vous tous qui vous fatiguez et qui êtes chargés, et moi, je vous donnerai du repos» (v. 28). Ce cher Sauveur voyait, non seulement au milieu de son peuple coupable, mais dans le monde entier, des âmes fatiguées et chargées. Il sait que le pécheur se fatigue inutilement en cherchant à se délivrer lui-même. Que de choses ne fait-on pas, lorsque le fardeau du péché pèse sur la conscience, pour en être délivré ? Mais tout est vain. L’état ne fait qu’empirer. Personne ne peut donner le repos à une âme ainsi tourmentée, si ce n’est le Fils de Dieu.
Une femme catholique allait mourir, le poids de ses péchés accablait son cœur ; on fit venir le prêtre ; il lui administra les sacrements de l’Église qui n’apportèrent aucun soulagement à sa conscience, malgré l’assurance que donnait le prêtre quant à la valeur des sacrements. L’angoisse demeurait d’autant plus terrible que la fin approchait. Enfin, à bout de ressources, le prêtre dit à la pauvre femme : «Regardez à Jésus mort sur la croix», sans comprendre qu’il dirigeait ses regards vers la seule source de paix et de repos. La paix vint remplir le cœur de la mourante, mais le prêtre ne se rendit pas compte pourquoi. Ce n’est que plus tard, lorsqu’il éprouva pour lui-même la valeur de la croix, qu’il sut ce qui s’était passé dans le cœur de cette pauvre femme.
Ces paroles ineffables retentissent encore dans ce monde aujourd’hui : «Venez à moi, vous tous qui vous fatiguez et qui êtes chargés, et moi, je vous donnerai du repos». Nous savons que, si le Sauveur peut décharger le pécheur du poids de ses péchés, c’est parce qu’il en a pris le fardeau sur lui-même, à la croix, sous le jugement de Dieu qui les a consumés et ôtés pour toujours de devant lui et de dessus le coupable qui croit à la valeur de ce sacrifice. C’est après avoir accompli cette œuvre parfaite que ce bien-aimé Sauveur est monté dans la gloire, et de là il invite encore aujourd’hui, par sa Parole, quiconque est fatigué et chargé à venir à lui pour jouir du repos.
Le Seigneur parle encore d’un autre repos que l’on trouve en prenant son joug sur soi. Après avoir reçu le pardon de ses péchés, le croyant doit traverser ce monde où il rencontre bien des choses pénibles, des épreuves de tous genres ; la volonté en ressent des contrariétés, l’âme est agitée, parce que l’on ne peut rien changer aux circonstances. Le Seigneur nous enseigne comment il est possible d’aller en avant au milieu des épreuves les plus grandes, en jouissant de ce repos-là. Il peut l’enseigner, lui qui fut débonnaire et humble de cœur, parce qu’il a passé le premier dans un chemin de souffrances dans l’obéissance. En entrant dans ce monde, il dit : «Voici, je viens, ... pour faire, ô Dieu, ta volonté». Dans son chemin il a toujours tout accepté de la main de son Père, jusqu’à la terrible coupe en Gethsémané. Nous l’entendons dire : «Oui, Père, car c’est ce que tu as trouvé bon devant toi». Ce qu’il veut nous apprendre, chers lecteurs, c’est à pouvoir parler comme lui, dans toutes les circonstances qui contrarient le plus notre volonté et qui accablent le plus notre cœur. Il veut nous apprendre à les traverser avec lui et à dire : «Oui, Père, car c’est ce que tu as trouvé bon devant toi». Il dit : «Prenez mon joug sur vous, et apprenez de moi, car je suis débonnaire et humble de cœur ; et vous trouverez le repos de vos âmes. Car mon joug est aisé et mon fardeau est léger» (v. 29, 30). Son joug, c’est la soumission à la volonté de son Père. Pour le cœur renouvelé, ce joug est aisé, ce fardeau est léger ; c’est le sien ; il le porte avec nous, et ainsi nous jouissons de sa communion au travers des épreuves ; là nous apprenons à le connaître mieux que dans la prospérité matérielle, et nous pouvons jouir sans cesse de ce repos en communion avec lui, quelque pénibles que soient nos circonstances.
Quel parfait Sauveur nous possédons en Christ ! Puissions-nous tous apprendre à le connaître toujours mieux, si nous sommes allés à lui pour être délivrés du fardeau de nos péchés, et apprendre de lui tous les jours ce qui est le chemin de la soumission à la volonté du Père, pour trouver le repos de l’âme au milieu des circonstances du désert, en attendant d’entrer bientôt dans le repos de Dieu au terme du chemin.
Dans le chapitre précédent, Jésus constate pleinement son rejet et le ressent douloureusement dans son cœur. Ici, ce rejet s’accentue et les conséquences pour le peuple juif sont présentées, savoir le rejet du peuple et son jugement.
Un jour de sabbat, Jésus traversait des champs de blé, et ses disciples, ayant faim, se mirent à manger des grains. La loi de Moïse permettait de faire cela en passant dans le champ de son prochain, pourvu que l’on se borne à arracher les épis, sans les couper avec la faucille (Deutéronome 23:25). Mais c’était le sabbat et les pharisiens firent observer au Seigneur que les disciples commettaient un acte interdit ce jour-là. Jésus rappelle que David, lorsqu’il fuyait de devant Saül (1 Samuel 21), mangea des pains de proposition que les sacrificateurs seuls avaient le droit de manger. David, comme Jésus, était le roi rejeté ; à quoi donc servait l’observation des ordonnances, si l’on méconnaissait le roi ? Le Seigneur cite un autre fait : c’est que les sacrificateurs, qui officiaient dans le temple le jour du sabbat, n’étaient pas tenus pour coupables, parce qu’ils se trouvaient dans la maison de Dieu sur la terre. Jésus ajoute : «Mais je vous dis qu’il y a ici quelque chose de plus grand que le temple». C’était Dieu lui-même au milieu de son peuple, non dans le temple, mais dans la personne de son Fils, ce Fils que nul ne connaît si ce n’est le Père. «Et si vous aviez connu, dit-il, ce que c’est que : «Je veux miséricorde et non pas sacrifice», vous n’auriez pas condamné ceux qui ne sont pas coupables». Si les pharisiens avaient compris que Dieu visitait son peuple en pure miséricorde, ils auraient agi selon cet esprit et n’auraient pas condamné les disciples, qui, vu l’état des choses, n’étaient pas coupables.
Puis Jésus ajoute : «Car le Fils de l’homme est Seigneur du sabbat». Jésus étant rejeté comme Messie, tout le système légal était mis de côté et le Seigneur prend le titre de Fils de l’homme dont les droits s’élèvent au-dessus de tout, de sorte qu’il pouvait disposer du sabbat au lieu de lui être soumis. Mais les pharisiens voulaient garder le sabbat ainsi que tous les privilèges extérieurs qui appartenaient au peuple juif, tout en rejetant le Messie, Dieu lui-même qui leur avait donné la loi.
Le sabbat rappelait l’alliance de Dieu avec son peuple (Exode 31:16, 17 ; Ézéchiel 20:12). Dieu montrait par là à Israël son intention de le faire participer à son repos. Mais, avec le principe légal, on ne peut trouver de repos d’aucune sorte, parce que la loi a démontré l’incapacité de l’homme à faire le bien et sa perte irrémédiable. Or Israël avait non seulement violé la loi dès le commencement, mais il rejetait son Sauveur et son Roi, et dès lors il perdait droit à la bénédiction sur le pied de la loi ; inutile donc de conserver les ordonnances légales, puisque, sous elles, les hommes périssaient. Dieu désirait agir en grâce envers Israël, comme envers tous, car il ne peut se reposer en voyant l’homme demeurer sous les conséquences du péché. Le Seigneur ne voulait pas laisser croire à ce pauvre peuple qu’il pouvait continuer à observer le sabbat, tout en le rejetant Lui-même, lui son Sauveur. Il était là pour travailler en grâce. «Mon Père travaille jusqu’à maintenant, et moi je travaille», dit-il dans une circonstance semblable (Jean 5:17). C’est pourquoi, au chapitre précédent, il invite à venir à lui pour avoir le repos que jamais la loi n’a pu donner.
Le fait suivant démontre que le système légal, sous lequel les Juifs voulaient absolument demeurer, ne pouvait convenir au misérable état dans lequel l’homme était tombé.
Il y avait, dans la synagogue, un homme à la main sèche, et les Juifs, pour pouvoir accuser Jésus, lui demandèrent s’il était permis de guérir le jour du sabbat. Mais il leur dit : «Quel sera l’homme d’entre vous, qui aura une brebis, et qui, si elle vient à tomber dans une fosse un jour de sabbat, ne la prendra et ne la relèvera pas ? Combien donc un homme vaut-il mieux qu’une brebis ! ... Alors il dit à l’homme : Étends ta main. Et il l’étendit, et elle fut rendue saine comme l’autre». Or, puisque les Juifs ne tenaient pas compte du sabbat pour sauver une brebis, combien plus Dieu travaillerait-il en grâce tous les jours pour délivrer les hommes tombés sous les conséquences terribles du péché !
La guérison de cet homme, et plus encore les paroles de vérité que les pharisiens venaient d’entendre, les exaspérèrent au point qu’ils tinrent conseil pour faire mourir Jésus. Mais Jésus, le sachant, se retira de là, suivi de grandes foules, et il guérit tous les malades. La haine implacable des Juifs à l’égard du Seigneur ne l’empêchait pas de répondre aux nombreux besoins de la foule qui l’entourait malgré l’animosité de ses chefs. L’amour du Seigneur ne cherchait qu’à se satisfaire en faisant du bien, en délivrant ceux que le diable avait asservis à sa puissance (Actes 10:38). Il accomplissait la volonté de son Père, et ne voulait pas attirer sur lui l’attention curieuse des hommes, ni leurs louanges. C’est pourquoi il leur défendit expressément de publier son nom, afin que soit accomplie cette parole d’Ésaïe 42:1-4 : «Voici mon serviteur que je soutiens, mon élu en qui mon âme trouve son plaisir. Je mettrai mon Esprit sur lui ; il fera valoir le jugement à l’égard des nations. Il ne criera pas, et il n’élèvera pas sa voix, et il ne la fera pas entendre dans la rue. Il ne brisera pas le roseau froissé, et n’éteindra pas le lin qui brûle à peine. Il fera valoir le jugement en faveur de la vérité. Il ne se lassera pas, et il ne se hâtera pas, jusqu’à ce qu’il ait établi le juste jugement sur la terre ; et les îles s’attendront à sa loi». Quel contraste entre l’appréciation de Dieu et celle des hommes au sujet de son Fils ! Il est dit de lui qu’avant la fondation du monde, il était le nourrisson de Dieu, ses délices de tous les jours, toujours en joie devant lui (Proverbes 8:30). Quand Dieu eut besoin d’un serviteur pour accomplir sa grande œuvre sur la terre, c’est ce Bien-aimé qui fut élu pour cela. On comprend donc la satisfaction que le cœur de Dieu éprouva en le voyant ici-bas. Aussi il a pu dire en d’autres circonstances : «Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai trouvé mon plaisir» (Matthieu 3:17 ; 17:5). Mais, hélas ! rien ne fait mieux ressortir l’abîme moral qui se trouve entre Dieu et l’homme que l’appréciation de l’un et de l’autre quant à la personne du Seigneur, ainsi que le montrera la suite de notre chapitre. Qu’est-ce que Dieu peut attendre d’un être qui hait si parfaitement l’objet de ses délices éternelles ? Comment un tel homme peut-il être agréable à Dieu ? C’est pourquoi Paul dit : «Ceux qui sont dans la chair ne peuvent plaire à Dieu» (Romains 8:8). Mais du Seigneur Jésus, Dieu peut dire : «Je mettrai mon Esprit sur lui, et il annoncera le jugement aux nations». Nul ne pouvait recevoir l’Esprit de Dieu, si ce n’était Jésus à cause de sa propre perfection. Il fut scellé de l’Esprit dès son entrée publique dans ce monde, tandis que le croyant ne peut recevoir le Saint Esprit qu’une fois purifié de ses péchés par la foi au sang de Christ, ainsi que nous l’avons vu au chapitre 3. «Il ne contestera pas, et ne criera pas, et personne n’entendra sa voix dans les rues». Ces paroles indiquent bien le caractère de grâce de cet Homme doux et humble de cœur, agissant dans la puissance de l’Esprit pour accomplir son œuvre d’amour, sans attirer l’attention, s’effaçant toujours dans une parfaite abnégation de lui-même, contrairement aux hommes qui font beaucoup de bruit pour peu de chose. On l’a dit : «Le bien ne fait pas de bruit et le bruit ne fait pas de bien». Venu pour accomplir la volonté de son Père, c’est pour lui que le Seigneur agissait toujours. Il ne cherchait que son approbation, jamais celle des hommes, ni même celle des disciples.
Chers lecteurs, prenons pour modèle ce serviteur parfait ; soyons pénétrés des principes qui le faisaient agir, afin que notre vie, notre service se réalisent en vue de plaire à Dieu seul ; car si nous lui sommes agréables en ce que nous faisons, nous accomplirons toujours le bien, et nous serons sûrement agréables et utiles à d’autres. Le jour viendra où le travail de chacun sera manifesté selon l’appréciation du Maître, et où chacun recevra sa louange.
Un autre trait de la grâce, de la bonté qui caractérisait Jésus est indiqué par ces paroles : «Il ne brisera pas le roseau froissé, et il n’éteindra pas le lumignon qui fume, jusqu’à ce qu’il ait produit en victoire le jugement ; et les nations espéreront en son nom». Le roseau froissé représente l’état de faiblesse du peuple Juif, écrasé sous la domination romaine, quoique tiré de l’idolâtrie pour être la lumière de Dieu au milieu des nations. Cependant le Seigneur tient compte du peu qu’il trouve, jusqu’au moment où le jugement introduira son règne, et alors les nations espéreront en son nom, lors même qu’il semble souvent que cela auraut été juste d’en finir avec un tel peuple.
Ce Sauveur débonnaire et plein de grâce agit de même envers chacun de nous.
Un homme démoniaque aveugle et muet fut amené au Seigneur, et il le guérit. Les foules, voyant un miracle si merveilleux, disaient avec étonnement : «Celui-ci serait-il le Fils de David ?» En entendant cela, les pharisiens, qui redoutaient les effets de la puissance de Dieu, ne pouvant renier le miracle, l’attribuèrent au chef des démons. Leur haine pour Jésus les aveuglait à tel point qu’ils ne se rendaient pas compte de l’absurdité de leur accusation ; car, comme le Seigneur le leur dit : «Tout royaume divisé contre lui-même sera réduit en désert... Si Satan chasse Satan, il est divisé contre lui-même ; comment donc son royaume subsistera-t-il ?» C’est par la puissance du Saint Esprit que le Seigneur chassait les démons ; pour s’en servir, contre Satan, il avait dû lier l’homme fort, lors de la tentation au désert ; et, en vertu de cette victoire, il pouvait piller ses biens, c’est-à-dire délivrer ceux que Satan avait asservis à sa puissance. Le déploiement de cette puissance sur les démons prouvait que le royaume était parvenu jusqu’à ces misérables Juifs. C’est par l’exercice de cette puissance que s’établira plus tard le royaume, lors de l’apparition du Fils de l’homme.
Cette accusation de chasser les démons par Béelzébul constituait un péché d’une gravité exceptionnelle, car ce n’était rien moins qu’attribuer à Satan la puissance par laquelle le Seigneur agissait. Aussi le Seigneur dit que «tout péché et tout blasphème sera pardonné aux hommes... Et quiconque aura parlé contre le Fils de l’homme, il lui sera pardonné ; mais quiconque aura parlé contre l’Esprit Saint, il ne lui sera pardonné ni dans ce siècle, ni dans celui qui est à venir». Le Seigneur dit aussi en parlant de ses bourreaux : «Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu’ils font». Quelle grâce insondable ces paroles révèlent ! Mais traiter la puissance du Saint Esprit de puissance du diable, cela ne serait pardonné à ceux qui s’en rendraient coupables, ni dans ce siècle-ci — le siècle de la loi, le siècle où les Juifs étaient alors — ni dans le siècle à venir — le siècle où le Seigneur établirait son royaume en vertu de cette même autorité. Car comment des hommes qui attribueraient à Satan la puissance par laquelle le royaume serait établi, pourraient-ils avoir la vie pour y entrer ? Le temps actuel est celui de la grâce, qui se trouve entre les deux siècles mentionnés. Il y a des personnes que l’Ennemi trouble de nos jours en leur faisant croire qu’elles ont commis le péché ou blasphémé contre le Saint Esprit, et que par conséquent elles ne peuvent être sauvées. Pour le commettre il faut se trouver dans le temps où cette puissance s’exerce. Aujourd’hui, «quiconque croit a la vie éternelle».
Dans les versets 33 à 37, le Seigneur montre à ces hommes que leurs paroles manifestaient ce qu’ils étaient : des méchants, du cœur desquels il ne pouvait sortir de bonnes choses ; car de l’abondance du cœur la bouche parle, et l’arbre est connu par son fruit. Comme c’est par la bouche que se manifeste l’état du cœur, il faudra rendre compte à Dieu, au jour du jugement, de toutes les paroles oiseuses qu’on aura dites. Car, «par tes paroles tu seras justifié, et par tes paroles tu seras condamné». De même aussi il est dit : «Du cœur on croit à justice, et de la bouche on fait confession à salut» (Romains 10:10), car comment savoir si quelqu’un est sauvé s’il ne le confesse pas ?
Le Seigneur dit au v. 35 : «L’homme bon, du bon trésor, produit de bonnes choses, et l’homme mauvais, du mauvais trésor, produit de mauvaises choses». Comment peut-il venir quelque chose de bon de l’homme ? Car il est dit que «nul n’est bon, sinon un seul, Dieu» (Luc 18:19). Pour qu’il puisse sortir quelque chose de bon de l’homme, il faut que Dieu y ait premièrement placé ce qui est bon. Il le fait par la nouvelle naissance, cette régénération dont parle Jacques 1:18 : «Il nous a engendrés par la parole de la vérité». Mais ce n’est pas tout que d’être né de nouveau ; il faut ensuite écouter la Parole, s’en nourrir, la lire ; c’est l’exhortation que donne Jacques dans le verset suivant : «Que tout homme soit prompt à écouter, lent à parler, lent à la colère». Que nos pensées soient formées par la parole de Dieu, afin que nous puissions, de ce bon trésor, produire de bonnes choses ! Souvenons-nous qu’il ne peut rien venir de bon de notre cœur, sinon ce que Dieu y met par sa Parole. C’est pourquoi nous trouvons constamment, dans les discours de la Sagesse, ces exhortations : «Écoute» ; «Écoutez» ; «N’oublie pas mes enseignements» ; «Sois attentif à mes paroles» ; etc., etc (Proverbes 1 à 9). L’auteur de ce livre, lorsqu’il était encore jeune et que Dieu lui disait : «Demande ce que tu veux que je te donne», au lieu de souhaiter des richesses, répondit : Donne-moi «un cœur qui écoute» (1 Rois 3:1-9). Que ce soit là votre prière, afin que Dieu puisse aussi vous dire : «Voici, j’ai fait selon ta parole» (v. 12). Car «bienheureux l’homme qui m’écoute, veillant à mes portes tous les jours, gardant les poteaux de mes entrées ! Car celui qui m’a trouvée a trouvé la vie, et acquiert faveur de la part de l’Éternel ; mais celui qui pèche contre moi fait tort à son âme ; tous ceux qui me haïssent aiment la mort» (Proverbes 8:34-36).
Il est peu de portions de l’Évangile qui montrent, comme le fait ce chapitre, la méchanceté et l’aveuglement de ces hommes religieux qui entouraient le Seigneur. Après avoir vu les guérisons merveilleuses qu’il venait d’accomplir et entendu les foules, frappées par ces signes évidents de la présence du Messie au milieu d’elles, s’écrier : «Celui-ci serait-il le Fils de David ?» les scribes et les pharisiens osent venir à Jésus avec cette requête : «Maître, nous désirons voir un signe de ta part» (v. 38-42). Le Seigneur leur répond selon la connaissance qu’il avait de leurs intentions : «Une génération méchante et adultère recherche un signe ; et il ne lui sera pas donné de signe, si ce n’est le signe de Jonas le prophète. Car, comme Jonas fut dans le ventre du cétacé trois jours et trois nuits, ainsi le Fils de l’homme sera trois jours et trois nuits dans le sein de la terre». Ce signe, c’est la mort et la résurrection de Jésus. Bien qu’il ait accompli toutes les œuvres par lesquelles ils pouvaient reconnaître en lui le Messie promis, ils ne voulaient rien de lui. Ainsi le seul signe à leur présenter, puisque tout autre était inutile, était celui de Jonas, sa mort, résultat de leur haine contre lui. Mais sa résurrection est aussi comprise dans ce signe, puisque Jésus ne sera que trois jours et trois nuits dans la terre (*).
(*) On a souvent objecté à ce passage que le Seigneur n’avait pas été trois jours et trois nuits dans le sépulcre, puisqu’il avait été enseveli le vendredi soir et qu’il était ressuscité le dimanche matin. Cette apparente inexactitude provient de la manière de compter des Juifs, qui considéraient comme entière une journée dont une partie seulement entrait dans l’espace de temps embrassé. Ainsi le seigneur fut enseveli le vendredi soir, ce qui fait le premier jour. Il passa le sabbat en entier dans le sépulcre et ressuscita le matin du premier jour, dimanche (troisième jour).
Ce signe impliquait en même temps leur condamnation ; ils se montraient bien inférieurs aux païens de Ninive, qui s’étaient repentis à la prédication de Jonas, et ils avaient au milieu d’eux quelqu’un de plus grand que Jonas. Aussi, au jour du jugement, ce mépris de Jésus, le divin prédicateur, aggravera fort leur condamnation, et la reine de Sheba se lèvera en témoignage contre eux, car la sagesse de Salomon l’avait attirée des bouts de la terre, tandis que cette génération a eu au milieu d’elle, non pas Salomon, mais la Sagesse même, cette Sagesse qui parle au chapitre 8 des Proverbes, et elle n’en a rien voulu.
Dans les versets 43 à 45, Jésus donne un tableau de l’état terrible de cette génération aux derniers jours, comme conséquence de son incrédulité. «Or quand l’esprit immonde est sorti d’un homme, il va par des lieux secs, cherchant du repos, et il n’en trouve point. Alors il dit : Je retournerai dans ma maison d’où je suis sorti. Et y étant venu, il la trouve vide, balayée et ornée. Alors il va, et prend avec lui sept autres esprits plus méchants que lui-même ; et étant entrés, ils habitent là ; et la dernière condition de cet homme-là est pire que la première. Ainsi en sera-t-il aussi de cette génération méchante».
Le Seigneur prend pour figure de l’état d’Israël aux derniers jours, ce qui pouvait arriver, paraît-il, à un homme dont un démon était sorti. Dieu seul sait tout ce qui se passe dans ce domaine invisible, où se meuvent les mauvais esprits. Ce démon, une fois sorti de l’homme, représente l’idolâtrie à laquelle s’était livré le peuple d’Israël autrefois et qui avait causé sa transportation à Babylone ; car l’idolâtrie n’est autre chose que l’adoration des démons (Voir 1 Corinthiens 10:19, 20). Revenu de la captivité, le peuple ne retomba pas dans l’idolâtrie. Le temple fut rebâti, le culte lévitique rétabli ; extérieurement tout paraissait en ordre. C’est au milieu de cet état de choses que Jésus vint, pour être reçu dans sa maison. «Il vint chez soi ; et les siens ne l’ont pas reçu». Si le démon de l’idolâtrie avait été chassé, c’était pour que le peuple reçoive son roi ; mais comme il s’y refusait, la maison restait vide, non seulement vide et balayée de l’idolâtrie, et ornée de formes du culte du vrai Dieu, mais vide aussi de Celui qui venait apporter à son peuple bien-aimé les bénédictions promises ; on l’avait rejeté en disant : «Nous ne voulons pas que celui-ci règne sur nous» (Luc 19:14). Alors ce démon de l’idolâtrie s’étant trouvé à son aise en Israël, il revient, trouve la maison vide et bien préparée à le recevoir, prend avec lui sept autres démons plus méchants que lui-même, entre et habite là.
Rentré dans son pays, ce qui aura lieu prochainement, le peuple juif se trouvera dans le même état d’incrédulité quant à Christ qu’au temps où Jésus était sur la terre. Le temple sera rebâti, le service lévitique rétabli ; tout marchera, pendant un temps, avec les formes du culte juif. Mais bientôt, qui viendra occuper ce temple ? Le Seigneur ? Rejeté autrefois et l’étant toujours, il est caché dans les cieux. Nous trouvons la réponse à notre question en 2 Thessaloniciens 2:4. C’est l’Antichrist, l’homme de péché, celui dont le Seigneur parle en disant aux Juifs : «Moi, je suis venu au nom de mon Père, et vous ne me recevez pas ; si un autre vient en son propre nom, celui-là vous le recevrez» (Jean 5:43). Telle est cette idolâtrie de la fin, sept fois pire que celle qui amena la transportation d’Israël à Babylone ; elle aura pour conséquence le jugement radical, exercé par le moyen du terrible Assyrien, alors que le résidu croyant recevra le Christ pour sa délivrance, et constituera le nouvel Israël qui jouira du règne millénaire du vrai Fils de David.
Comme Jésus s’adressait aux foules, on vint lui dire que sa mère et ses frères cherchaient à lui parler. Mais il répondit : «Qui est ma mère, et qui sont mes frères ? Et étendant sa main vers ses disciples, il dit : Voici ma mère et mes frères ; car quiconque fera la volonté de mon Père qui est dans les cieux, celui-là est mon frère, et ma sœur, et ma mère». L’état d’Israël, représenté par la mère et les frères de Jésus, ne lui permettait plus aucune relation avec le Seigneur. Jésus prononce donc la rupture de ses relations avec ce peuple ; mais il reconnaît de nouvelles relations avec ceux qui recevront sa parole et feront la volonté de son Père. Nous savons que sa mère était du nombre de ceux-là et que, plus tard, ses frères entrèrent aussi dans ces mêmes relations avec lui, bien que, pendant un temps, ils n’aient pas cru en lui. Désormais tout est fini avec Israël selon la chair, comme peuple de Dieu ; par son incrédulité, il s’est exclu lui-même des bénédictions qui lui avaient été apportées avec tant de grâce et d’amour. Mais Dieu a ses ressources à lui et agira par sa parole pour se former un peuple céleste, comme nous le verrons au chapitre suivant.
Au commencement de ce chapitre, nous voyons Jésus sortant de la maison et s’asseyant au bord de la mer. C’est à dessein que l’Esprit de Dieu nous rapporte ce fait ; la maison représente Israël, maison vide maintenant parce que Christ a été rejeté. Il prend place dans une barque, sur la mer, et de là il prêche aux foules rassemblées autour de lui. La mer, dans la Parole, est souvent prise comme symbole des nations dans un état de confusion ; c’est en général celui où se trouvaient les peuples de la terre en dehors d’Israël. C’est là maintenant que Dieu opèrera. Ces faits nous indiquent le changement qui résulte du rejet de Christ, pour les Juifs et pour les nations.
Jusque-là Jésus était venu chercher du fruit en Israël, qu’il compare à une vigne (chap. 21:33 à 42 ; voir aussi, Psaume 80:8-16, et Ésaïe 5:1-7) ; mais, comme nous l’avons souvent dit, sans la vie de Dieu, il est impossible que l’homme produise du fruit pour Dieu, malgré tous les soins que Dieu lui a prodigués, ainsi qu’il le fit avec Israël. Pour obtenir du fruit, Dieu change de manière d’agir : au lieu de réclamer de notre mauvais cœur naturel le bien qu’il ne peut produire, il sème premièrement sa Parole qui produit, si elle est reçue par la foi, une nouvelle nature grâce à laquelle Dieu peut obtenir ce qu’il a réclamé en vain de l’homme dans la chair. Tel le changement présenté par la parabole du semeur (v. 1-12).
Comme nous le verrons, le champ où la Parole est semée n’est pas Israël seulement ; c’est bien par là que le Seigneur et les apôtres commencèrent, mais c’est le monde entier, et le terrain sur lequel la parole est semée, c’est le cœur de l’homme. Ce terrain présente des différences que le Seigneur désigne dans la parabole.
Chez nous, les terrains destinés à recevoir la semence sont séparés de ceux qui ne se cultivent pas ; on ne sème donc que sur la bonne terre. En Orient, au contraire, dans certaines contrées, la terre ne recouvre pas entièrement les endroits rocailleux ; ici on trouve des buissons, là, c’est un chemin qui traverse le champ et qui subsiste malgré les labours. La charrue évite ces difficultés ; mais le semeur jette partout sa semence, dont une partie tombe dans ces places impropres à produire une récolte. C’est pourquoi le Seigneur trouve là une image très propre à faire ressortir les divers états du cœur de l’homme mis en présence de la Parole.
«Un semeur sortit pour semer. Et comme il semait, quelques grains tombèrent le long du chemin, et les oiseaux vinrent et les dévorèrent. Et d’autres tombèrent sur les endroits rocailleux, où ils n’avaient pas beaucoup de terre ; et aussitôt ils levèrent, parce qu’ils n’avaient pas une terre profonde ; et, le soleil s’étant levé, ils furent brûlés, et parce qu’ils n’avaient pas de racine, ils séchèrent. Et d’autres tombèrent entre les épines, et les épines montèrent et les étouffèrent. Et d’autres tombèrent sur une bonne terre et produisirent du fruit, l’un cent, l’autre soixante, l’autre trente. Qui a des oreilles pour entendre, qu’il entende». Ce dernier avertissement s’adresse encore aujourd’hui à chacun de nos lecteurs, car : «La foi est de ce qu’on entend, et ce qu’on entend par la parole de Dieu» (Rom. 10:17). Comme la terre ne peut produire par elle-même que de mauvaises herbes, si l’on n’y jette pas de la bonne semence, le cœur naturel non plus, ne pourra porter du fruit pour Dieu que s’il reçoit, par la foi, cette Parole ; elle engendrera chez le croyant une nouvelle vie par laquelle seule sera obtenu le fruit que Dieu réclame. Sans cela, on produira seulement ce fruit mauvais qui amènera en jugement devant le grand trône blanc pour entendre une condamnation éternelle.
Les disciples demandaient au Seigneur pourquoi il parlait aux foules en paraboles (v. 10-17). Sa réponse montre que maintenant il fait une différence entre la masse du peuple et ceux qui écoutent sa Parole et la reçoivent, ainsi que nous l’avons vu aux v. 46-50 du chapitre précédent. Aux disciples, il expliquait les enseignements contenus dans les paraboles ; aux autres, cela était caché ; ceux qui reçoivent Christ ont seuls l’intelligence des pensées de Dieu, aujourd’hui comme alors. Le royaume des cieux ne pouvait s’établir en gloire comme les prophètes l’avaient annoncé, puisque le roi était rejeté ; il s’établissait d’une manière mystérieuse, et ici, par ses enseignements, le Seigneur fait comprendre aux disciples quelle forme ce royaume prendra jusqu’à son établissement en gloire. C’est pourquoi il dit : «À vous il est donné de connaître les mystères du royaume des cieux ; mais à eux, il n’est pas donné. Car à quiconque a, il sera donné, et il sera dans l’abondance ; mais à quiconque n’a pas, cela même qu’il a sera ôté». Ceux qui recevaient Jésus entreraient dans la plénitude des bénédictions qu’il apportait, tandis que le peuple, qui se vantait de ses privilèges de peuple de Dieu sur la terre, tout en rejetant Jésus, perdrait les privilèges qu’il avait possédés jusque-là. Ainsi, par sa propre faute, il s’est privé de tout droit à la bénédiction, jusqu’à ce qu’il soit reçu en grâce en vertu de la mort de Christ.
C’est précisément ce qui va arriver à la chrétienté. On célèbre aujourd’hui les avantages du christianisme sur le paganisme et le judaïsme ; les protestants se vantent des lumières qu’ils possèdent à la suite de la Réformation, tandis que le catholicisme prétend toujours être la vraie Église. Mais que fait-on de Christ et de sa Parole ? Qui sont ceux que le Seigneur peut reconnaître comme membres de son corps au milieu de toute cette profession chrétienne ? Ceux qui l’ont reçu comme Sauveur et Seigneur et qui mettent ses paroles en pratique. À ceux-là, il sera donné davantage ; et le temps approche où ce qui reste encore de ce que l’Évangile a apporté au monde sera ôté de la chrétienté et remplacé par les ténèbres de l’apostasie qui précédera les jugements. Ésaïe avait annoncé (chap. 6:9, 10) ce qui arrivait au peuple : «En entendant vous entendrez et vous ne comprendrez point, et en voyant vous verrez et vous n’apercevrez point ; car le cœur de ce peuple s’est épaissi, et ils ont ouï dur de leurs oreilles, et ils ont fermé leurs yeux, de peur qu’ils ne voient des yeux, et qu’ils n’entendent des oreilles, et qu’ils ne comprennent du cœur, et qu’ils ne se convertissent, et que je ne les guérisse».
Peut-être plus d’un de mes lecteurs objectera-t-il : rien d’étonnant à ce que les Juifs ne comprennent pas, si Dieu leur parle de manière à ce qu’ils ne puissent ni voir, ni entendre, ni être convertis. Mais le jugement qui atteignait le peuple sous cette forme avait été prononcé par Ésaïe environ huit siècles auparavant, cent cinquante ans avant la transportation de Juda ; et une trentaine d’années avant la fin du royaume d’Israël. Pendant tout ce temps le peuple ne tint aucun compte de la patience de Dieu, et lorsque le Messie promis lui fut présenté, il le rejeta. Donc, s’ils ne voient ni n’entendent, c’est parce qu’ils ont fermé eux-mêmes leurs yeux et leurs oreilles et ont refusé de les ouvrir ; Dieu, qui ne peut supporter le mal à toujours, laisse leurs yeux et leurs oreilles fermés, comme jugement. C’est ce qui arrivera dans la chrétienté à ceux qui n’auront pas cru au Seigneur Jésus pour être sauvés. Après l’enlèvement de l’Église, Dieu leur enverra une énergie d’erreur pour qu’ils croient au mensonge, afin que tous ceux-là soient jugés qui n’ont pas cru la vérité, mais qui ont pris plaisir à l’injustice» (2 Thess. 2:11, 12).
Chers lecteurs, si vous ne l’avez pas fait, ouvrez, sans tarder, les yeux et les oreilles de votre cœur à cette merveilleuse grâce qui vous apporte le salut, avant que vienne le jour où Dieu, après avoir attendu assez longtemps, vous les laissera fermés par la puissance de Satan pour vous réveiller lorsqu’il sera trop tard. Aujourd’hui, le Seigneur peut dire à ceux qui l’ont reçu, comme il disait à ses disciples : «Mais bienheureux sont vos yeux, car ils voient, et vos oreilles, car elles entendent». Ils voyaient alors Celui que plusieurs prophètes et plusieurs justes avaient désiré voir ; ils entendaient ce qu’ils avaient désiré entendre. En effet, quel privilège d’avoir vu et entendu la personne adorable de Jésus, le Fils de Dieu, venu pour apporter le pardon, la vie, la paix, et ouvrir le chemin de la gloire ! Aujourd’hui encore, il offre toutes les bénédictions qui découlent de sa mort à la croix. Demain, ce peut être trop tard !
Dans les v. 18-23, Jésus explique aux disciples les raisons pour lesquelles il n’y a pas eu de fruit porté dans les trois premiers cas mentionnés dans la parabole du semeur.
La semence jetée le long du chemin symbolise le cœur qui ne comprend pas la Parole. Il ne comprend pas. Pourquoi ? Manque-t-il d’intelligence ? Est-il sourd ? Non, mais son cœur est comme le chemin, dur, parce que tout le monde y passe. Tel le cœur de ceux qui sont occupés de tout, sans aucun besoin pour les choses de Dieu. Indifférents ou incrédules, la Parole ne leur dit rien ; s’ils l’entendent, ils ne la comprennent pas ; leur cœur n’y est pas ; ils sont distraits par des jeux, des lectures, des promenades, aussi bien que par leurs études, le travail, les affaires, sans parler des choses mauvaises en elles-mêmes. La semence reste à la surface, et l’Ennemi a bientôt fait de la ravir.
La semence jetée sur les endroits rocailleux représente celui qui, au contraire, reçoit la Parole avec joie ; il est disposé à écouter, elle est agréable à ses sens ; c’est quelqu’un qui dira en sortant d’une prédication : «Cet orateur a bien parlé ; c’était très beau ; je reviendrai l’entendre». Il y trouve une certaine satisfaction, surtout si le prédicateur sait toucher les sentiments. On prend de bonnes résolutions ; on décide de fréquenter des personnes chrétiennes, de suivre même les réunions, et ceux qui sont témoins de cela mettent vite ces personnes au nombre des convertis. Mais attendez ; l’épreuve va venir. Le monde ne voit pas sans déplaisir les effets de la Parole dans une âme, tout superficiels qu’ils peuvent être, de sorte que ceux qui manifestent les changements survenus sont vite exposés aux moqueries et même à la persécution, comme à d’autres tribulations. Alors voyant les conséquences pénibles qui résultent du fait d’avoir reçu la Parole, ils se retirent et tout est fini ; comme le blé dans les rocailles qui a levé aussitôt, lorsque le soleil le frappe, il sèche vite, car il n’a pas de racine. La conscience n’a pas été exercée. Le cœur doit être labouré par la parole de Dieu pour qu’il se produise des résultats durables. La Parole ne produit jamais un effet agréable aux sens pour commencer, parce qu’elle montre au pécheur l’état de son cœur, tout le mal qui s’y trouve. Cette constatation produit le trouble, la terreur, même le désespoir, quand naît la conviction que l’on est perdu et que l’on n’a autre chose à attendre que le jugement. Voilà le labourage qui défonce le sol dur, qui élimine les cailloux. Au moment voulu de Dieu, la Parole, qui présente Christ subissant à la place du coupable le jugement qu’il avait mérité, est reçue par la foi, apportant le pardon, la paix et la joie. Sachant de quoi il est délivré, le croyant peut endurer les épreuves de tous genres ; il est enraciné dans la vérité, il est converti ; il porte du fruit que le soleil fait mûrir, au lieu de dessécher la plante sans racines.
Vient ensuite la classe de ceux qui sont semés dans les épines. Ceux-là entendent la Parole, qui produit aussi des effets extérieurs, comme une tige de blé dans un buisson ; elle peut atteindre une certaine hauteur, porter même un épi, mais sans fruit. Les soucis sont une sorte d’épines qui étouffent la Parole de la vie ; c’est tout ce par quoi le présent siècle peut rendre un homme soucieux, et combien il y a de causes de soucis ! Car à une âme qui n’a pas été amenée par la Parole à mettre sa confiance en Dieu, qui ne le connaît pas comme ce Père qui sait de quoi nous avons besoin, tout cause des soucis ; elle est toujours inquiète ; elle admet bien qu’il faut s’occuper de la Parole, mais cette parole, aussitôt étouffée, ne peut produire du fruit. Puis il y a une autre sorte d’épines qui étouffent la Parole, justement ce en quoi l’homme met sa confiance : les richesses ; on les désire, on ne se lasse pas de travailler à les obtenir ; pendant ce temps, que peut faire la Parole ? Puis les richesses que donnent-elles ? La déception ; on est victime de leur tromperie, elles ne produisent ni satisfaction durable, ni paix ; elles vous laissent, ou bien il faut les laisser, avec un christianisme sans fruits, sans valeur, ni pour l’âme, ni pour Dieu.
La quatrième classe comprend la graine semée sur la bonne terre. Voici un homme qui comprend la Parole. Son cœur a été préparé comme nous l’avons vu en parlant de ceux qui ont été semés dans les endroits rocailleux. La conscience a été labourée par la vérité, et lorsque les manifestations extérieures de la vie ont lieu, c’est du véritable fruit qui est produit. Il découle de la vie divine à la gloire de Dieu. Le fruit est la manifestation de la vie de Dieu dans le croyant, sous quelque forme que ce soit. Seul ce fruit-là est agréable à Dieu et demeure pour l’éternité. Puissions-nous tous en porter, non seulement trente, ni soixante, mais cent ! Ainsi que dit Paul aux Philippiens : «Étant remplis du fruit de la justice, qui est par Jésus Christ à la gloire et à la louange de Dieu» (Chap. 1:11).
Après avoir exposé aux disciples la parabole du semeur qui montre comment le Seigneur opère pour obtenir du fruit, Jésus présente encore six autres paraboles pour exposer les résultats de ses semailles dans ce monde, jusqu’au moment où il établira son royaume en gloire. C’est le temps où l’Église est sur la terre et où le royaume existe en l’absence du roi. Ces six paraboles se divisent en deux parties de trois chacune : 1° la forme extérieure que prend le royaume par l’introduction du mal ; 2° ce qui est de Dieu dans cet état de choses, ce qu’il y a pour le cœur de Christ. Ce sont des paraboles du royaume des cieux, qui résulte de la prédication de la Parole, tandis que le royaume d’Israël n’était composé que des descendants d’Abraham.
«Le royaume des cieux a été fait semblable à un homme qui semait de bonne semence dans son champ. Mais pendant que les hommes dormaient, son ennemi vint et sema de l’ivraie parmi le froment, et s’en alla. Et lorsque la tige monta et produisit du fruit, alors l’ivraie aussi parut».
Cette parabole présente le mélange de croyants et de non-croyants qui se trouvent dans le royaume ou la chrétienté, depuis le temps des apôtres. Au lieu d’être vigilants pour que la Parole soit présentée et maintenue dans sa pureté, comme le Seigneur et les apôtres l’avaient enseignée, les hommes ont laissé s’introduire, avec des fausses doctrines, des personnes sans vie, que l’ivraie représente, elles forment aujourd’hui la majorité dans la chrétienté.
Ce mélange devenu visible, les esclaves auraient voulu y remédier en arrachant l’ivraie, mais le Seigneur dit : «Non, de peur qu’en cueillant l’ivraie, vous ne déraciniez le froment avec elle. Laissez-les croître tous deux ensemble jusqu’à la moisson». Puisque les hommes n’ont pas su empêcher l’Ennemi de semer l’ivraie, ils pouvaient encore moins l’extirper eux-mêmes, car leur incapacité les exposait à arracher aussi le froment.
Il fut un temps bien triste où l’Église romaine, plongée dans de profondes ténèbres, s’était attribué la fonction d’expurger de son sein tous ceux qu’elle appelait hérétiques, et qui, précisément, étaient le froment ; elle emprisonnait, torturait, mettait à mort quiconque résistait à ses erreurs. Elle a démontré par là qu’il n’appartient pas à l’homme d’ôter le mal de la terre, puisqu’il peut prendre le bien pour le mal.
On entend souvent citer cette parabole par des personnes qui ne voudraient pas que les vrais chrétiens se séparent, dans leur marche, de ceux qui n’ont pas la vie de Dieu, en se basant sur ces paroles du Seigneur : «Laissez-les croître tous deux ensemble jusqu’à la moisson». Mais il s’agit ici d’ôter de la terre, d’arracher, d’exercer le jugement sur ceux qui n’ont pas la vie, comme le faisait Rome, quand elle exterminait les hérétiques, tandis que, en obéissant à la Parole qui ordonne aux croyants de se séparer du mal (voir 2 Timothée 2:21, 22 ; Éphésiens 5:7 et suivants ; 2 Corinthiens 6:14-18, et beaucoup d’autres passages), on n’ôte personne de la terre. Nous sommes dans le temps de la grâce et non dans celui du jugement ; mais nous avons à discerner et à garder ce qui convient au Seigneur.
Au temps de la moisson se fera le triage, non par des hommes, mais par les anges. La moisson, dans la Parole, est la figure du jugement qui sépare les méchants des justes (*). C’est ce que le Seigneur dit aux disciples : «Au temps de la moisson, je dirai aux moissonneurs : Cueillez premièrement l’ivraie, et liez-la en bottes pour la brûler, mais assemblez le froment dans mon grenier». Ce temps est près d’arriver. On se rend compte aisément que l’ivraie se lie en bottes, au moyen d’associations de tous genres, entre lesquelles celui qui attend le Seigneur doit suivre son chemin sous la dépendance de Dieu et dans l’obéissance à sa Parole. L’ivraie ne se lie pas en bottes le jour même du jugement, mais préalablement, en vue du jugement. Le Seigneur dit : «Liez-la en bottes pour la brûler, mais assemblez le froment dans mon grenier». Le grenier est le ciel, où tous les croyants seront enlevés, et ensuite seulement l’ivraie sera brûlée.
(*) La vendange représente le jugement qui emporte tout ce qu’il trouve.
«Il leur proposa une autre parabole, disant : Le royaume des cieux est semblable à un grain de moutarde qu’un homme prit et sema dans son champ : lequel est, il est vrai, plus petit que toutes les semences ; mais quand il a pris sa croissance, il est plus grand que les herbes et devient un arbre, de sorte que les oiseaux du ciel viennent et demeurent dans ses branches».
Nous avons dans cette parabole un autre caractère du royaume en l’absence du roi. Il est représenté au début par une chose petite, un grain de moutarde, mais ne tarde pas à se développer et à devenir un grand arbre. Au lieu de demeurer dans le sentiment de sa petitesse et sous la dépendance de Dieu, comme l’Église l’était au commencement, la chrétienté est devenue une puissance sur la terre, ce que représente un grand arbre dans les Écritures (voir Ézéchiel 17:23, 24, 31:3-9 ; Daniel 4:10-12). Au lieu de chercher la protection en Dieu, c’est elle qui devint protectrice, abrita des oiseaux, c’est-à-dire des hommes qui trouvaient en elle ce que leurs cœurs avides désiraient. Dans la Parole, les oiseaux sont le plus souvent pris en mauvaise part ; leur rapacité les caractérise. L’histoire de l’Église prouve qu’il en a été ainsi au temps de sa toute-puissance, quand elle avait à ses pieds le pouvoir civil, qu’elle couronnait ou destituait les monarques, et nourrissait de ses biens ceux qui se logeaient dans ses branches, le clergé tout particulièrement. C’est ainsi que la chrétienté s’éloignait et s’éloigne encore de ce qui la caractérisait dans son origine.
«Le royaume des cieux est semblable à du levain qu’une femme prit et qu’elle cacha parmi trois mesures de farine, jusqu’à ce que tout fût levé». C’est une autre forme de mal qui caractérise le royaume. Le levain est le symbole de la fausse doctrine introduite dans le royaume dès le début et qui pénétra la masse tout entière, corrompant l’enseignement divin, de manière à faire du christianisme une religion qui permette aux hommes de vivre sans être inquiétés par la vérité qui les juge toujours.
Tels sont donc les trois aspects extérieurs qui caractérisent le royaume des cieux en l’absence du roi : 1° un mélange de bon et de mauvais ; 2° une puissance terrestre ; 3° la fausse doctrine qui a tout pénétré de ses principes corrupteurs. Jésus prononça ces paroles devant la foule, selon les paroles du Psaume 78:2 : «J’ouvrirai ma bouche en paraboles, j’annoncerai les énigmes des jours d’autrefois». Puis il congédia ses auditeurs et entra dans la maison, pour expliquer à ses disciples la parabole de l’ivraie. Là, il leur aussi exposa les trois dernières, dans lesquelles il montre ce qu’il y a pour son cœur au milieu des diverses formes de mal que revêt le royaume.
«Celui qui sème la bonne semence, c’est le Fils de l’homme ; et le champ, c’est le monde ; et la bonne semence, ce sont les fils du royaume ; et l’ivraie, ce sont les fils du méchant ; et l’ennemi qui l’a semée, c’est le diable ; et la moisson, c’est la consommation du siècle ; et les moissonneurs sont des anges». Cette explication ne demande guère d’autres éclaircissements. On voit en contraste l’œuvre du Fils de l’homme et celle du diable, ainsi que les résultats : les enfants du royaume et les enfants du méchant, qui forment le mélange dans le champ. La consommation du siècle est toujours la fin du siècle de la loi, qui précède, non l’établissement de l’Église sur la terre, mais celui du royaume en gloire. C’est dans ce temps-là que les anges sont actifs pour lier l’ivraie en bottes et que les croyants sont ravis auprès du Seigneur. Alors commenceront les jugements.
Jusque-là l’explication de la parabole ne dépasse pas ce que le Seigneur a dit en la prononçant. Mais, dans les versets 40 à 43, Jésus donne des développements nouveaux qui concernent le temps des jugements. «Comme donc l’ivraie est cueillie et brûlée au feu, il en sera de même à la consommation du siècle. Le Fils de l’homme enverra ses anges, et ils cueilleront de son royaume tous les scandales et ceux qui commettent l’iniquité, et ils les jetteront dans la fournaise de feu : là seront les pleurs et les grincements de dents. Alors les justes resplendiront comme le soleil dans le royaume de leur Père. Qui a des oreilles pour entendre, qu’il entende». On voit ici que Celui qui a été le semeur, après un long temps de patience, enverra ses anges pour extirper de son royaume tous ceux qui ont été un sujet de scandale et qui ont marché selon leur propre volonté, au lieu de reconnaître l’autorité du roi, quoique rejeté et caché dans le ciel, ils sont jetés dans la fournaise de feu. Puis les justes sont vus, non sur la terre dans le royaume établi en gloire, mais dans le royaume de leur Père, la partie céleste du royaume, jouissant, avec le Père, de la même relation que le Fils. Là ils resplendissent comme le soleil, objets de cette grâce qui nous a rendus capables, déjà maintenant, par la foi, de «participer au lot des saints dans la lumière ; qui nous a délivrés du pouvoir des ténèbres, et nous a transportés dans le royaume du Fils de son amour» (Colossiens 1:12, 13). Alors les saints réaliseront en gloire ce qu’ils possèdent déjà aujourd’hui.
«Encore, le royaume des cieux est semblable à un trésor caché dans un champ, qu’un homme, après l’avoir trouvé, a caché ; et de la joie qu’il en a, il s’en va, et vend tout ce qu’il a, et achète ce champ-là».
Après les diverses économies (ou périodes, ou dispensations) qui se sont succédées sur cette terre, dans lesquelles le Seigneur n’a rien trouvé pour lui, il découvre dans ce monde un trésor, quelque chose qu’il apprécie, non que ce soit ce monde qui le fournisse, mais il en voit la valeur selon les conseils de Dieu. Il quitte la gloire, il abandonne ses droits comme Messie, il vit dans la pauvreté, renonce à tout, et donne sa vie pour acheter le champ, afin de posséder le trésor qu’il renferme. Le champ, c’est le monde, dans lequel le Seigneur a trouvé ses rachetés. En vertu de son obéissance et de l’œuvre de la croix, le Seigneur possède le monde, il a acheté le champ, et un jour il fera valoir ses droits ; mais ce qui est l’objet de son cœur, ce qui le remplit de joie, ce en vue de quoi il descend dans l’humiliation, c’est le trésor qu’il a trouvé, il veut l’obtenir, quoi qu’il lui en coûte. Quel amour !
«Encore, le royaume des cieux est semblable à un marchand qui cherche de belles perles ; et ayant trouvé une perle de très grand prix, il s’en alla, et vendit tout ce qu’il avait, et l’acheta».
Ici, il n’est question que de l’achat de la perle d’un grand prix pour le cœur du Seigneur, son Église qu’il voit dans toute sa beauté, telle qu’il se la présentera un jour. Comme pour acquérir le champ, il vend tout ce qu’il a, il s’anéantit, se dépouille de toute sa gloire pour donner le prix nécessaire afin de l’obtenir. «Il a aimé l’assemblée et s’est livré lui-même pour elle», afin de la posséder éternellement. Quel prix elle a pour son cœur, ainsi que tous ceux qui seront au bénéfice de son dévouement jusqu’à la mort, la mort de la croix ! Au travers de la triste histoire du royaume, présentée dans les trois premières paraboles, le Seigneur y voit ce trésor, cette perle, toujours l’objet de sa joie et de son amour.
On entend dire quelquefois, que cette perle c’est Christ que le pécheur veut obtenir à tout prix ; mais, quoique Christ soit désiré par l’âme travaillée au sujet de ses péchés, et qu’il lui devienne précieux lorsqu’elle est rachetée, la parabole ne saurait s’appliquer à elle. Personne ne peut acheter le champ, pas plus que la perle ; tout est offert gratuitement au pécheur, tandis que Christ ne possède pas gratuitement ses rachetés. Il a vendu tout ce qu’il avait ; il est descendu dans la mort pour les en délivrer.
«Encore, le royaume des cieux est semblable à une seine jetée dans la mer et rassemblant des poissons de toute sorte ; et quand elle fut pleine, ils la tirèrent sur le rivage, et s’asseyant, ils mirent ensemble les bons dans des vaisseaux, et jetèrent dehors les mauvais».
Cette seine, ou filet, représente l’Évangile proclamé dans le monde, la mer des peuples. Le christianisme, résultat de cette prédication, a été embrassé comme religion par les masses qui portent le nom de chrétiens, qui sont les poissons renfermés dans le filet, masses composées de ceux qui ont la vie et de ceux qui ne l’ont pas. Dans les trois dernières paraboles, il n’est question que de ce qui est bon. Ici, les pêcheurs, ayant constaté les résultats de la pêche, s’occupent des bons poissons seulement. Dans la parabole de l’ivraie, il fallait laisser croître le tout jusqu’à la moisson, quoique les esclaves voulussent s’occuper des mauvaises plantes pour les détruire, mais ce n’était ni le moment ni leur affaire. Ici, les serviteurs de Dieu n’ont à s’occuper que des bons pour les mettre dans des vaisseaux, les rassembler à part du monde, autour de Christ. C’est le travail actuel des ouvriers du Seigneur. Ils laissent dehors les mauvais, ne s’en occupent pas, si ce n’est pour leur annoncer le salut, ce qui n’est pas en vue ici.
Puis le Seigneur explique ce qui se fera ensuite, à la consommation du siècle. Il y aura aussi un triage, confié, non aux serviteurs de Dieu, mais aux anges, qui sont les exécuteurs de la volonté de Dieu dans son gouvernement. «Il en sera de même», dit Jésus, «à la consommation du siècle : les anges sortiront, et sépareront les méchants du milieu des justes, et les jetteront dans la fournaise de feu : là seront les pleurs et les grincements de dents» (v. 49, 50).
Les anges, au temps des jugements, s’occupent seulement des mauvais, afin de les ôter de la terre, en vue de l’établissement du royaume en gloire, comme nous l’avons vu à la fin de la parabole de l’ivraie.
Puisque tous les poissons rassemblés dans la seine n’étaient pas bons, comment un pêcheur juif pouvait-il reconnaître les bons d’avec les mauvais ? Par la parole de Dieu qui enseignait quels étaient les animaux purs et impurs. Si le Juif était dans l’embarras pour décider de l’espèce d’un poisson, il n’avait qu’à consulter le rouleau de la loi au livre du Lévitique, et il trouvait (chap. 11:9, 10) que les bons poissons avaient des nageoires et des écailles ; tous ceux qui ne présentaient pas ces signes caractéristiques étaient impurs, si bons qu’ils puissent paraître au jugement du pêcheur.
De même aujourd’hui, si un serviteur de Dieu veut reconnaître, parmi ceux qui portent le nom de chrétiens, lesquels doivent être mis à part, comme ayant la vie divine, il n’en est pas remis à son propre jugement ; il a recours à la Parole qui indique les caractères des vrais croyants, figurés par ceux des bons poissons. Le croyant doit avoir ce qui correspond aux nageoires, savoir la capacité de remonter le courant entraînant de ce monde, grâce à l’énergie que donne la vie de Dieu pour ne pas se laisser détourner du chemin du Seigneur. Les écailles représentent la capacité de résister à l’influence du monde au milieu duquel nous devons vivre, tout en n’en étant pas. Il est dit que «ce qui est né de Dieu est victorieux du monde» (1 Jean 5:4). Ainsi tous ceux qui portent dans leur marche ces preuves de la vie de Dieu doivent être mis à part de ce qui n’a que la profession chrétienne sans la vie.
Est-ce que tous nos lecteurs portent les caractères du bon poisson ? Si oui, vous savez où est votre place. Si non, devenez par la foi une nouvelle créature, avant le moment terrible où Dieu fera son œuvre étrange, son travail inaccoutumé (És. 28:21), en jetant les méchants dans la fournaise de feu, là où il y a des pleurs et des grincements de dents.
Les disciples disent avoir compris toutes ces choses, et le Seigneur ajoute : «C’est pour cela que tout scribe qui a été fait disciple du royaume des cieux est semblable à un maître de maison qui produit de son trésor des choses nouvelles et des choses vieilles» (v. 51, 52). Les «choses vieilles» sont le royaume tel qu’il était annoncé dans l’Ancien Testament, le royaume en gloire, et les «choses nouvelles» le royaume dans la forme qu’il a prise après le rejet du roi, sujet des paraboles de ce chapitre. Nous voyons par ces paroles du Seigneur la grande grâce accordée à ceux qui sont faits disciples dans ce nouvel état de choses en recevant le Seigneur ; ils ont l’intelligence des pensées de Dieu à l’égard du présent et de l’avenir. C’est ce qui est particulièrement vrai pour l’Église.
Lorsque Jésus eut prononcé ces paraboles, il vint dans son pays, probablement Nazareth. Et «il les enseignait dans leur synagogue, en sorte qu’ils étaient étonnés». Quel amour ! quelle patience ! Malgré tout ce que Jésus sait des pensées de son peuple à son égard et des résultats de sa venue, il les enseigne toujours. Ils sont étonnés, car ils ne voient en lui que le fils du charpentier ; sa mère, ses frères, ses sœurs, étaient au milieu d’eux ; c’était pour eux la preuve qu’il ne différait pas d’un autre homme. «D’où donc viennent à celui-ci toutes ces choses ?» demandent-ils. Combien il est vrai qu’ils ont fermé leurs yeux pour ne pas le voir et leurs oreilles pour ne pas entendre ! Le Seigneur pouvait bien dire : «Si je n’étais pas venu, et que je ne leur aie pas parlé, ils n’auraient pas eu de péché... Si je n’avais pas fait parmi eux les œuvres qu’aucun autre n’a faites, ils n’auraient pas eu de péché ; mais maintenant ils ont, et vu, et haï et moi et mon Père» (Jean 15:22-24).
Au lieu de voir en lui Emmanuel, Dieu avec nous, comme il est présenté dans cet évangile, ils sont scandalisés en lui. Jésus accepte cela disant : «Un prophète n’est pas sans honneur, si ce n’est dans son pays et dans sa maison». Leur incrédulité l’empêcha de faire là beaucoup de miracles. Quelle responsabilité pour ce pauvre peuple ! La puissance de Dieu et sa grâce sont toujours à la disposition de tous, moyennant la foi, aujourd’hui comme alors. Qui pourra se plaindre s’il n’en a pas profité ?
Au chapitre 11:2-6, nous avons vu Jean le Baptiseur en prison. Ici, nous apprenons la cause de son emprisonnement (v. 1-12). Hérode, le prince qui gouvernait en Galilée, tout en éprouvant un certain respect pour Jean, l’avait fait emprisonner ; Jean lui avait dit, en effet, qu’il ne devait pas avoir pour femme Hérodias, sa belle-sœur. À cause de cela, celle-ci le haïssait et aurait aimé qu’Hérode le fasse mourir ; mais le roi craignait le peuple qui tenait Jean pour un prophète, et lui-même reconnaissait qu’il était un homme juste et saint (Marc 6:20). Toutefois, la haine d’Hérodias allait bientôt triompher de ces considérations. Hérode célébrait l’anniversaire de sa naissance. Pendant qu’il était à table, entouré de ses convives, la fille d’Hérodias entra et dansa devant tous. Elle plut au roi qui lui promit, avec serment, de lui donner tout ce qu’elle demanderait. Cette jeune fille alla prendre conseil de sa mère pour présenter sa requête au roi. Possédée par le désir de se débarrasser entièrement de l’homme qui avait osé blâmer son inconduite, la malheureuse femme incita sa fille à demander la tête de Jean. Elle entra donc dans la salle du festin et dit au roi «Donne-moi ici... dans un plat, la tête de Jean le Baptiseur». Hérode en fut affligé, mais, ne voulant pas manquer de parole, il fit violence à sa conscience, et donna l’ordre de satisfaire à cette demande sanguinaire. Ainsi un crime abominable vint s’ajouter à une vie de corruption. Un serviteur d’Hérode alla décapiter Jean dans la prison, et on apporta sur un plat la tête du précurseur du Messie à la jeune fille qui la remit à sa mère.
Quelle triste illustration des paroles que nous lisons en Jean 3:19, 20 : «Les hommes ont mieux aimé les ténèbres que la lumière, car leurs œuvres étaient mauvaises ; car quiconque fait des choses mauvaises hait la lumière, et ne vient pas à la lumière, de peur que ses œuvres ne soient reprises». La lumière de Dieu, par le moyen de Jean, avait lui sur la conscience d’Hérode et d’Hérodias. Le rang de ces personnages dans la société paraissait les placer au-dessus de toute critique et leur permettre de donner libre cours à leurs passions infâmes. Mais au-dessus d’eux, Celui qu’ils oubliaient avait envoyé Jean le ;Baptiseur, dont la vie sainte et juste l’autorisait à accomplir sa mission en dénonçant le mal partout où il se trouvait ; il invitait à la repentance (Luc 3:7-15) et préparait ainsi le chemin du Seigneur, qui apportait la grâce à tous les pécheurs qui recevaient son témoignage. Cette lumière n’a fait que manifester la haine d’Hérodias. Elle voulut l’éteindre pour mieux satisfaire les goûts corrompus de sa propre nature, à la faveur des ténèbres morales qu’elle avait choisies. Hérode, dont la conscience avait été atteinte dans une certaine mesure, n’avait aucune force ; il aimait le péché, et l’on «est esclave de celui par qui on est vaincu» (2 Pierre 2:19). Chef de sa maison, souverain au milieu de ses courtisans, il se laissa lier par une parole légère, parce qu’il était lui-même lié par le péché ; il ajouta ainsi la violence à la corruption, ces deux grands caractères du mal à son apogée, au milieu des hommes (voir Genèse 6:11).
Remarquons qu’il ne suffit pas d’écouter la Parole, de reconnaître combien elle est juste et vraie ; il faut la recevoir en reconnaissant son autorité divine et la laisser opérer dans la conscience, afin d’abandonner le mal qu’elle dévoile. Car si nous nous plaçons du côté de Dieu pour résister au mal qui est dans notre propre cœur, il donne la force nécessaire pour en être délivré. Rien de plus dangereux que d’écouter la Parole sans la mettre en pratique ; c’est ainsi que le cœur s’endurcit et se soumet à la puissance de l’Ennemi. Hérodias, plus criminelle qu’Hérode, n’aurait pas écouté Jean comme lui ; cependant l’état de l’un et de l’autre, quant au résultat éternel, est exactement le même. Hélas ! Combien de personnes auront même pris plaisir à entendre la parole de Dieu, auront admis combien elle était juste et sainte, et se trouveront malgré cela avec les moqueurs et les incrédules dans les ténèbres de dehors, là où sont les pleurs et les grincements de dents, parce qu’elles n’auront pas cru : «La parole qu’ils entendirent ne leur servit de rien, n’étant pas mêlée avec de la foi dans ceux qui l’entendirent» (Hébreux 4:2).
Hérode entend parler de la renommée de Jésus ; aussitôt, la conscience accablée par la mort d’un juste, il dit à ses serviteurs : «C’est Jean le Baptiseur ; il est ressuscité des morts, et c’est pourquoi les miracles s’opèrent par lui» (v. 1, 2).
Hérode croyait-il à la résurrection ? On ne peut le dire, car on voit les Hérodiens assimilés, quant à leurs doctrines, aux Sadducéens qui niaient la résurrection (voir chap. 16:6 et Marc 8:15). Mais la conscience ne permet à l’homme de contredire la vérité que lorsqu’il croit que Dieu est loin de lui ou qu’il n’existe pas ; mais dès que se produit un fait extraordinaire, il perd son assurance, il se trouble, sa conscience l’accuse et le fait trembler. Que sera-ce lorsque, dépouillé de tous ses vains raisonnements, comme de tout ce par quoi il aura cru se soustraire à la lumière de Dieu ici-bas, l’homme se trouvera nu, c’est-à-dire tel que Dieu le voit dans son état naturel, chargé de ses péchés, devant la lumière éclatante du grand trône blanc, où il ne sera plus question de grâce ni de pardon ?
Ayant enlevé de la prison le corps de leur maître, les disciples de Jean l’ensevelirent et vinrent rapporter à Jésus ce qui s’était passé. «Jésus, l’ayant entendu, se retira de là dans une nacelle en un lieu désert, à l’écart». Quel effet pénible la mort de Jean dut produire sur le cœur du Seigneur ! La croix projetait déjà son ombre sur ce chemin de douleur, car si la haine de l’homme s’était montrée telle envers le précurseur du Christ, elle se montrerait plus implacable encore contre celui qui était la lumière du monde, jusqu’ à ce qu’il fût cloué sur la croix.
Jésus se retire à l’écart en un lieu désert, image de ce monde pour le cœur de Christ, comme pour le croyant ; il n’y trouve que le péché et une haine mortelle contre la lumière et l’amour. Qui pourrait décrire la souffrance continuelle produite par la connaissance de l’état de l’homme dans le cœur de Jésus qui sentait toutes choses selon ses perfections divines et humaines ? C’est pour venir nous délivrer qu’il a bien voulu quitter la gloire, afin de subir, de la main des hommes, les douleurs, la mort.
Apprenant le départ du Seigneur, les foules le suivirent à pied. Quand il les vit, ému de compassion envers elles, il guérit leurs infirmes. L’amour infatigable de Jésus ne peut trouver de repos, pendant que l’homme traîne après lui les maux que le péché a introduits dans ce monde. Mais le Seigneur est seul pour satisfaire aux besoins de la foule, et seul il pouvait le faire, car en lui se trouvaient toutes ressources, alors comme aujourd’hui.
Les disciples lui conseillent de renvoyer les foules, afin qu’elles pourvoient elles-mêmes à leurs besoins. Ils font valoir d’excellentes raisons pour cela : l’heure tardive, la solitude des lieux. La nuit, le désert, l’heure passée, c’est ce qui caractérise l’état d’Israël et de ce monde qui a rejeté Christ. La lumière était rejetée ; le soir du jour où elle avait lui était arrivé, sans que l’homme en ait profité ; l’heure était passée ! Le désert, c’est ce que le monde peut fournir en fait de ressources pour sortir l’homme de sa misère, lui donner la vie et alimenter cette vie. Mais, grâces à Dieu, le Christ rejeté, encore là, toujours le même, veut non seulement rassasier ces foules, mais apprendre aux disciples à profiter de sa puissance, car le soir était venu ; il allait les quitter et les laisser seuls dans le désert de ce monde, où ils auraient encore à répondre à beaucoup de besoins, dans l’accomplissement de leur ministère. Jésus leur dit : «Il n’est pas nécessaire qu’elles s’en aillent ; vous, donnez-leur à manger. Mais ils lui disent : Nous n’avons ici que cinq pains et deux poissons. Et il dit : Apportez-les moi ici». Les disciples n’avaient de nourriture que pour eux-mêmes, mais le Seigneur veut qu’ils se servent de ce qu’ils possèdent et le donnent eux-mêmes aux foules, après le lui avoir apporté. Le fait important dans l’accomplissement de ce service, c’est d’apporter au Seigneur ce qu’ils ont. Jésus prend de leurs mains les cinq pains et les deux poissons et, regardant vers le ciel, il bénit. C’est la bénédiction du Seigneur qui rend efficace ce que nous possédons pour le faire servir aux besoins d’autrui.
Puis Jésus rompit les pains et les fit distribuer par les disciples aux cinq mille hommes, outre les femmes et les enfants, qui se trouvaient là. Il y eut même douze paniers pleins de restes. Nous voyons que, selon la pensée de Dieu, l’ordre et l’économie sont inséparables de l’abondance. Avoir des biens à profusion n’est pas une raison pour en laisser perdre ou agir avec prodigalité ; il faut soigner ce qui ne nous est pas nécessaire, afin de pouvoir faire du bien à d’autres. Tandis que l’avare économise pour satisfaire son égoïsme, l’amour, qui est l’opposé de l’égoïsme, rend soigneux pour pouvoir faire du bien.
Par cette multiplication des pains, le Seigneur veut montrer à son peuple qu’il est celui dont David avait parlé au Psaume 132:15, disant : «Je bénirai abondamment ses vivres, je rassasierai de pain ses pauvres», paroles qui auront leur plein accomplissement lors du règne glorieux du Messie. Ce règne ne pouvant s’accomplir alors, par suite du rejet de Christ, le Seigneur veut apprendre à ses disciples qu’ils posséderaient en lui toutes les ressources nécessaires à leur service en l’absence de leur Maître, ressources toujours à la portée de la foi pour tous les temps, pour tous les besoins et pour chaque croyant.
Si le Seigneur nous confie un service quelconque, nous sentons immédiatement notre insuffisance pour l’accomplir, mais il nous dit, comme aux disciples : «Apportez-les-moi», et ce peu que nous possédons, il le bénit, de sorte qu’il peut sortir de nos mains multiplié et supérieur à tous les besoins. C’est une grâce merveilleuse que d’en faire l’expérience encore maintenant. Si par exemple un croyant, quoique jeune encore, se sent appelé à parler du Seigneur à un de ses camarades, malade ou même en bonne santé, il dira peut-être : «Je suis ignorant des choses de Dieu ; je n’ai pas l’habitude d’en parler ; cela me gêne». Cependant il connaît quelque chose de la grâce merveilleuse de Jésus. Il n’a qu’à aller au Seigneur, placer devant lui, par la prière, le peu qu’il a, et, le recevant du Seigneur, et non de sa pauvre connaissance, il pourra aller le donner ; il fera la même expérience que les disciples lors de la multiplication des pains.
Le même principe s’applique à tout ce que nous avons à faire. Il faut se servir de ce que l’on a et ne pas attendre d’avoir davantage pour faire le bien qui est placé devant soi. Il faut compter sur le Seigneur qui veut bénir les ressources limitées comme les plus abondantes. L’apôtre Paul dit : On «est agréable selon ce qu’on a» (2 Corinthiens 8:12). «Tel disperse, et augmente encore ; et tel retient plus qu’il ne faut, mais n’en a que disette. L’âme qui bénit sera engraissée, et celui qui arrose sera lui-même arrosé» (Proverbes 11:24, 25).
Après cela le Seigneur contraignit les disciples de monter dans une barque et de le précéder de l’autre côté du lac de Génézareth, pendant qu’il renvoyait les foules (v. 22, 23). Comme toujours dans les Écritures, le récit que rapporte l’écrivain inspiré contient un enseignement figuré qui dépasse de beaucoup les faits historiques, tout intéressants qu’ils soient. C’est ce que nous pouvons remarquer tout particulièrement dans ce chapitre. Nous avons déjà vu que c’était le soir du jour où le Seigneur se trouvait au milieu de son peuple. En conséquence de son rejet, Jésus renvoie les foules, figure du peuple, après avoir accompli les signes qui devaient faire reconnaître en lui le Messie promis. En même temps, il contraint ceux qui l’avaient reçu — les disciples — à le précéder, c’est-à-dire à se mettre en chemin sans lui, pour traverser ce monde, jusqu’à la rive bienheureuse où ils jouiront des glorieuses bénédictions que le Seigneur leur apportera, lorsqu’il les aura rejoints. Quant à lui, il monte sur une montagne où il est seul pour prier, figure de la position que Christ a prise : il est monté au ciel pour s’occuper de ceux qui, en attendant son retour, traversent la nuit orageuse de ce monde. Toujours vivant pour intercéder en faveur des siens, connaissant les dangers d’un chemin qu’il a parcouru, il peut secourir au moment opportun ceux qui y passent après lui. Tel est le service de la sacrificature de Christ, présenté dans l’épître aux Hébreux.
Dans les versets 24-33, nous avons un autre tableau de la situation des disciples en l’absence de Jésus. Le vent contraire, soulevant les vagues qui menacent de les engloutir, est une figure de l’opposition violente que suscite l’ennemi, surtout par la persécution contre les croyants. Elle atteignit les disciples après le départ de leur Maître. Le futur résidu d’Israël la rencontrera aussi, lorsqu’il traversera la terrible tribulation de la fin ; elle ne cessera qu’au moment où Jésus, venant en gloire, calmera, par sa puissance, la tempête suscitée par Satan. En attendant, nous pouvons nous appliquer les précieux enseignements contenus dans ce récit, car nous traversons aussi la nuit morale dans laquelle se trouve le monde où la puissance de Satan se fait sentir, où il y a pour tous des moments d’épreuves qui peuvent bien être comparées à une tempête. Nous savons ainsi qu’au-dessus de tout se trouve le Seigneur dans la gloire. Toujours occupé de ceux qui sont dans les difficultés quelconques, il fait entendre sa voix au moment opportun, rassurant les siens, les encourageant par sa Parole, nous disant aussi : «C’est moi, n’ayez point de peur». Il connaissait l’angoisse des disciples, lorsque, à la quatrième veille de la nuit, il alla vers eux, marchant sur les eaux. Jésus sait aussi quelles sont les afflictions par lesquelles nous passons. «Car, en ce qu’il a souffert lui-même, étant tenté, il est à même de secourir ceux qui sont tentés» (Hébreux 2:18). Mais il nous arrive souvent de méconnaître son intervention et d’être alarmés, au lieu de voir sa bonne main dans l’épreuve, comme les disciples qui prirent Jésus pour un fantôme lorsqu’il s’approchait d’eux. Puissions-nous tous être assez occupés de lui pour le discerner en toute circonstance !
Quand Pierre entendit la voix de Jésus, il lui dit : «Seigneur, si c’est toi, commande-moi d’aller à toi sur les eaux». Jésus lui répondit : «Viens». Alors Pierre descendit de la nacelle et marcha sur les eaux pour aller à Jésus. Combien grande est la puissance de la parole du Seigneur ! Pierre n’avait jamais marché sur les eaux, et aucun homme ne saurait le faire ; mais Pierre voit que le Seigneur le peut, et il le connaît assez pour savoir que, s’il lui commande d’aller à lui, il le soutiendra. Souvenons-nous que le Seigneur donne toujours la capacité d’exécuter ce qu’il nous commande ; nous pouvons compter sur lui pour nous fournir ce qui est nécessaire pour lui obéir, tout insurmontables que paraissent les difficultés. Mais il faut avoir une pleine foi en sa Parole et ne pas regarder aux circonstances, car, dans le chemin de l’obéissance, les difficultés subsistent. Les disciples avaient obéi au Seigneur en s’embarquant pour l’autre rive ; la tempête fut permise, afin qu’ils puissent apprendre à mieux connaître leur Seigneur.
Après avoir marché un moment, Pierre enfonça, car ses regards étaient dirigés sur l’orage, au lieu d’être fixés sur celui qui lui avait dit : «Viens». Voyant la violence du vent, il eut peur. Mais quelle grâce dans la personne de Jésus ! À l’appel de Pierre qui s’écrie : «Seigneur, sauve-moi», il étendit la main et le prit, lui disant : «Homme de petite foi, pourquoi as-tu douté ?» Le Seigneur a la puissance de nous faire marcher sans broncher, si nous regardons à lui par la foi, et si nous enfonçons, faute d’avoir tenu nos regards fixés sur lui, sa main puissante est prête à nous secourir quand nous crions à lui dans la détresse. Il est précieux d’en faire l’expérience ; mais le Seigneur est bien plus glorifié lorsque nous comptons sur lui sans faillir et que nous réalisons quelque peu la puissance par laquelle il a marché lui-même dans ce chemin d’obéissance. Il ne se préoccupait que d’accomplir la volonté de son Père.
Dès que le Seigneur eut délivré Pierre, ils rejoignirent les disciples restés dans la nacelle et le vent tomba. «Et ceux qui étaient dans la nacelle vinrent et lui rendirent hommage, disant : Véritablement tu es le Fils de Dieu !»
Dans cette circonstance, Pierre représente l’Église qui, à l’appel du Seigneur, s’est acheminée au-devant de lui, par la foi ! Hélas ! comme Pierre, elle a enfoncé à cause de son incrédulité, parce qu’elle a perdu de vue son Seigneur ; mais il la prendra à lui par sa puissante grâce. Puis le Seigneur rejoindra le résidu d’Israël, que représentent les disciples. Le vent de la puissance de Satan, qui aura soufflé contre eux d’une manière effroyable, tombera, et le résidu Juif reconnaîtra Jésus, comme étant véritablement le Fils de Dieu, titre sous lequel les Juifs refusèrent de le reconnaître lorsqu’il était au milieu d’eux en grâce ; ils demandèrent à Pilate sa mort, parce que, disaient-ils, il s’est fait Fils de Dieu (Jean 19:7).
Quelle preuve de l’inspiration divine nous avons dans ce simple récit ! En quelques mots, dans une courte narration, l’Esprit de Dieu nous donne un résumé de toute l’histoire des Juifs et de l’Église depuis l’ascension du Seigneur jusqu’à son retour en gloire, et de ce qu’il est pour les siens pendant ce temps.
Les versets 34-36 complètent ce merveilleux tableau, en nous montrant le Seigneur reconnu par les hommes de la contrée de Génézareth ; ils l’avaient prié de se retirer de leur territoire quand il y vint, lors de la guérison du démoniaque (Matthieu 8:34). C’est ce qui aura lieu lors de la venue de Christ pour la délivrance du résidu pieux. Tous ceux qui le recevront seront au bénéfice de sa puissante bonté pour être guéris et jouir des temps de paix et de repos qu’il établira par sa présence.
N’oublions pas que la part de ceux qui auront cru au Seigneur et l’auront suivi pendant son rejet, sera infiniment plus belle que la part de ceux qui ne croiront que lorsqu’ils le verront. C’est ce que le Seigneur dit à Thomas : «Bienheureux ceux qui n’ont point vu et qui ont cru» (Jean 20:29).
Puissions-nous tous lui dire de cœur, aujourd’hui : «Viens, Seigneur Jésus !»
De nouveau les scribes et les pharisiens cherchent à trouver en défaut les disciples de Jésus et, par conséquent, le Seigneur lui-même (voir chap. 12). Ils lui demandent pourquoi ses disciples transgressent la tradition des anciens en mangeant du pain avec des mains non lavées.
Les traditions sont des récits ou des ordonnances, transmis oralement ou par écrit, d’une génération à l’autre, auxquels leur ancienneté a acquis une certaine autorité, humaine et non divine, quoiqu’on puisse leur accorder, bien à tort, le même crédit qu’aux Écritures. C’est ce qui avait lieu au milieu des Juifs ; c’est ce qui a lieu aussi dans l’Église romaine. Hélas ! aujourd’hui, dans le protestantisme, on ne craint pas d’appeler «tradition» la parole de Dieu, qu’on rabaisse à ce niveau-là. N’admettez jamais cette expression pour désigner les Écritures, en tout ou en partie, car la Bible est la parole de Dieu dans son entier.
Le Seigneur montre aux pharisiens que non seulement ils plaçaient la tradition au niveau des Écritures, mais qu’ils transgressaient celles-ci par leurs traditions. La loi disait : «Honore ton père et ta mère» ; et : «Que celui qui médira de père ou de mère, meure de mort» (Matthieu 15:4). Mais les pharisiens disaient, se basant sur la tradition : «Quiconque dira à son père ou à sa mère : Tout ce dont tu pourrais tirer profit de ma part est un don, — et il n’honorera point son père ou sa mère». Ils enseignaient donc au peuple que, si l’on faisait des dons pour le temple, on était dispensé de faire autre chose pour ses parents ; ils annulaient de cette manière le commandement de Dieu. Tout cela est de l’hypocrisie ; c’est vouloir paraître pieux, religieux, tout en négligeant ce qui est dû à Dieu et à ses proches. Aussi Jésus rappelle aux pharisiens cette prophétie d’Ésaïe à leur égard : «Ce peuple m’honore des lèvres, mais leur cœur est fort éloigné de moi ; mais ils m’honorent en vain, enseignant comme doctrines des commandements d’hommes» (Matthieu 15 :9). Puis il leur montre la véritable souillure, celle qui vient du cœur et qui sort de la bouche, mais non le fait de manger du pain avec des mains non lavées.
Dans ce qui précède, le Seigneur nous donne d’importants renseignements. Le seul moyen d’honorer Dieu, c’est de reconnaître l’autorité de sa Parole et d’y conformer notre vie dans une obéissance implicite. Dans l’innocence, Adam n’était astreint qu’à un seul commandement ; il avait, non à faire quelque chose, mais à s’abstenir. Sa désobéissance a tout gâté et a perdu l’homme. Ensuite, Dieu donna sa loi à Israël, qui, ne se connaissant pas, la reçut en disant : «Tout ce que l’Éternel a dit, nous le ferons, et nous écouterons» (Exode 24:3-7). Mais le peuple, par sa désobéissance, déshonora Dieu plus encore que les Gentils ; car le cœur naturel ne se soumet pas à la loi de Dieu, il ne le peut pas. Néanmoins, l’homme, dans son orgueil, a toujours la prétention de rendre à Dieu ce qui lui est dû. Dans ce but, il ravale la mesure divine, diminue ses exigences, les accommode à ce qu’il aime, conserve certaines formes de la vérité, de manière à pouvoir accomplir ce qu’il appelle sa religion, et avec ce manteau d’apparente piété, qui calme plus ou moins sa conscience, il peut donner libre cours à sa volonté propre. Extérieurement il paraît servir Dieu ; mais comme Ésaïe l’a dit : «Ce peuple m’honore des lèvres, mais leur cœur est fort éloigné de moi... enseignant comme doctrines des commandements d’hommes».
Tel est le caractère de toute religion charnelle, de quelque nom qu’on la désigne. Elle remplace les exigences de Dieu par des formes qui satisfont la chair en la laissant libre de faire sa volonté, avec la prétention de servir Dieu. Aussi on comprend que le Seigneur appelle hypocrites les chefs d’un tel système, car c’est là l’hypocrisie par excellence.
De cela découle aussi la négligence à l’égard de ses parents, devoir le plus sacré après ce que nous devons à Dieu. Si l’on ne craint pas de frustrer Dieu de ses droits, on ne craindra pas non plus de manquer à l’égard de ses parents. Sans la crainte de Dieu, impossible d’accomplir les obligations morales qui nous incombent. Les enfants manqueront vis-à-vis de leurs parents, les serviteurs vis-à-vis de leurs maîtres, les ouvriers vis-à-vis de leurs patrons, les hommes vis-à-vis de l’autorité. C’est ainsi qu’avec une forme chrétienne le monde est arrivé à l’état décrit en 2 Timothée 3:1-5 : «Sache ceci, que dans les derniers jours il surviendra des temps fâcheux ; car les hommes seront égoïstes, avares, vantards, hautains, outrageux, désobéissants à leurs parents, ingrats, sans piété, sans affection naturelle, implacables, calomniateurs, incontinents, cruels, n’aimant pas le bien, traîtres, téméraires, enflés d’orgueil, amis des voluptés plutôt qu’amis de Dieu, ayant la forme de la piété, mais en ayant renié la puissance».
L’origine de tout cela est l’abandon de Dieu et de sa Parole, et, vous le voyez, avec la forme de la piété.
La piété filiale est tout particulièrement recommandée dans la Bible, déjà sous la loi (voir les passages cités par le Seigneur dans les versets qui nous occupent). L’apôtre Paul, dans l’épître aux Éphésiens, exhorte les enfants à l’obéissance, il cite le même passage que le Seigneur et ajoute : «C’est le premier commandement avec promesse, afin que tu prospères et que tu vives longtemps sur la terre» (Éphésiens 6:1-3). C’était une promesse en rapport avec les bénédictions d’Israël, qui étaient matérielles ; mais celles qui appartiennent aux chrétiens, infiniment plus excellentes, sont spirituelles, et la jouissance, au lieu de se confiner à notre courte existence terrestre, en sera éternelle. En Colossiens 3:20, l’apôtre appuie son exhortation en disant que c’est agréable au Seigneur. En 1 Timothée 5:8, il dit encore : «Si quelqu’un n’a pas soin des siens et spécialement de ceux de sa famille, il a renié la foi et il est pire qu’un incrédule». Comment un enfant pourra-t-il aider ses parents, prendre soin d’eux, si, dans sa jeunesse, il ne leur a pas obéi ? L’obéissance prouve, mieux que n’importe quoi, l’affection pour ses parents. Combien on voit dans les familles, même chrétiennes, d’événements douloureux qui proviennent de l’insoumission à l’autorité de Dieu, représentée, pour les enfants, par leurs parents. Désobéir à ses parents, c’est désobéir à Dieu. Ne pas se soumettre à ce que Dieu a dit, c’est vouloir être plus sage que lui, c’est s’élever au-dessus de lui pour faire sa volonté propre, perverse et corrompue. C’est aussi s’exposer aux plus graves châtiments. «L’œil qui se moque d’un père et qui méprise l’obéissance envers la mère, les corbeaux du torrent le crèveront et les petits de l’aigle le dévoreront» (Proverbes 30:17).
Que Dieu garde tous les enfants qui liront ces lignes dans une sainte frayeur de désobéir à Dieu en manquant vis-à-vis de leurs parents par la désobéissance ou par tout autre acte irrespectueux, de peur qu’ils ne soient ainsi conduits dans une voie d’iniquité et de malheur !
Les disciples rapportèrent à Jésus que les pharisiens avaient été froissés de ses paroles. Il ne pouvait en être autrement, car le Seigneur atteignait leur conscience en dénonçant ouvertement le grand mal qui les caractérisait. Ils voulaient paraître purs au-dehors, en observant des traditions qui leur donnaient une apparence de sainteté, et le Seigneur leur disait que ce n’est pas la souillure extérieure qui souille l’homme devant Dieu, mais celle qui vient du cœur, que tout homme porte au-dedans de lui.
Jésus répond aux disciples : «Toute plante que mon Père céleste n’a pas plantée sera déracinée. Laissez-les ; ce sont des aveugles, conducteurs d’aveugles : et si un aveugle conduit un aveugle, ils tomberont tous deux dans une fosse». Il est impossible de voir son propre chemin et de conduire les autres, si ce n’est à la lumière de la parole de Dieu, reçue avec toute son autorité. La prétention d’être guide spirituel tout en mettant de côté les Écritures, même partiellement, n’aboutit qu’à l’égarement et à la perdition pour le conducteur et son troupeau. Ces conducteurs se sont établis eux-mêmes dans leurs fonctions ; ils seront déracinés : Le Seigneur dit : «Laissez-les». Si quelqu’un ne se soumet pas à la parole de Dieu, à quoi bon discuter ? «Laissez-les».
Pierre demande à Jésus d’exposer aux disciples la parabole des v. 10 et 11. Ils ne comprenaient pas encore quels étaient la source et le véritable caractère de la souillure devant Dieu, tellement ils avaient l’habitude de ne considérer que la souillure extérieure, dont on se purifiait par les lavages ordonnés par la loi, mais ce n’étaient là que des types et figures de la réalité, telle qu’elle est aux yeux de Dieu. Ce qui souille c’est le péché, et le péché vient du cœur naturel. Lorsqu’il se manifeste en paroles ou en actes quelconques, l’homme est souillé.
Le v. 19 donne une liste affreuse de tout ce qui peut sortir du cœur. Combien il faut prendre garde à cette source de corruption, afin que ses manifestations ne nous souillent pas ! En tête de liste viennent les mauvaises pensées, ces actes du cœur que personne, si ce n’est Dieu, ne voit, origine de tous les péchés grossiers énumérés ensuite, qui déshonorent Dieu, avilissent et détruisent l’homme. Si Caïn avait jugé la pensée de haine qu’il avait conçue à l’égard de son frère, il ne l’aurait jamais tué. C’est pourquoi la Parole dit : «Quiconque hait son frère est un meurtrier» (1 Jean 3:15). Il est de toute importance de veiller sur son cœur. Salomon ne dit-il pas : «Garde ton cœur plus que tout ce que l’on garde, car de lui sont les issues — ou résultats — de la vie» ? (Proverbes 4:23). Nous avons grand soin de ne rien mettre de souillé dans notre bouche ; ayons un même soin de ne rien laisser sortir par elle des choses impures qui nous souilleraient, puisque Jésus dit que ce n’est pas ce qui entre dans l’homme qui le souille, mais ce qui sort de la bouche. La bouche est l’instrument, le cœur la source ; ne mettons donc pas cet instrument au service du mal.
Jésus se retira ensuite dans le voisinage de Tyr et de Sidon. Là, comme ailleurs, la puissance du diable se faisait sentir ; mais là aussi se trouvait, chez une pauvre Gentile, la foi en la puissance et en la bonté du Seigneur. Une femme cananéenne, voyant Jésus, s’écrie : «Seigneur, Fils de David, aie pitié de moi ; ma fille est cruellement tourmentée d’un démon». Le Seigneur ne réplique rien ; et aux disciples, qui veulent se débarrasser de cette femme en lui disant : «Renvoie-la, car elle crie après nous», il dit : «Je ne suis envoyé qu’aux brebis perdues de la maison d’Israël». Elle rend néanmoins hommage à Jésus en disant : «Seigneur, assiste-moi». Il lui répond : «Il ne convient pas de prendre le pain des enfants et de le jeter aux chiens». Et elle dit : «Oui, Seigneur ; car même les chiens mangent des miettes qui tombent de la table de leurs maîtres».
Si le Seigneur paraît indifférent à l’appel de cette femme, c’est afin qu’elle prenne la place qui convient à tout pécheur devant Dieu, comme n’ayant aucun droit, aucun mérite, pour recevoir ensuite une pleine réponse de la part du Dieu d’amour. Bien qu’elle appartienne à une nation qu’Israël aurait dû détruire lors de son entrée en Canaan, elle s’était adressée à Jésus comme au Fils de David, celui qui, sous ce titre, apportera la bénédiction à Israël, et sous le règne duquel les ennemis du peuple seront détruits. C’est pourquoi Jésus, venu en grâce, ne pouvait lui répondre comme Fils de David, mais, quoique venu à son peuple pour l’accomplissement des promesses, il était le Sauveur du monde, l’expression de l’amour de Dieu pour tout pécheur, dès que la foi fait appel à cet amour. Enoutre, au-dessus des distinctions de races et de dispensations, elle reçoit du Dieu de grâce ce que le Fils de David ne pouvait donner à une Cananéenne : «Jésus, répondant, lui dit : Ô femme, ta foi est grande ; qu’il te soit fait comme tu veux. Et dès cette heure-là sa fille fut guérie». Certainement il y avait plus que des miettes qui tombaient de la table des Juifs ; comme peuple, ils refusaient les mets de la table en entier, et ce refus a été le salut du monde (voir Romains 11:11, 12).
Quelle perfection dans la manière d’agir du Seigneur ! Venu à Israël comme Messie, il maintient son caractère vis-à-vis des étrangers à ce peuple ; mais comme Dieu en grâce visitant sa créature déchue, il ne repousse aucun de ceux qui viennent à lui en prenant la place où le péché a placé l’homme, où tous sont égaux, indignes de tout sauf du jugement. Le fils prodigue dit : «J’ai péché contre le ciel et devant toi ; je ne suis plus digne d’être appelé ton fils». C’est alors que le Père le fait revêtir de la plus belle robe. Mephibosheth, aux pieds de David, s’écrie : «Qu’est ton serviteur, que tu aies regardé un chien mort tel que moi ?» (2 Samuel 9:8). C’est là que David le prend pour le faire asseoir à sa table. Quel amour merveilleux ! C’est parce qu’il y a des pécheurs perdus, sans aucune ressource de leur côté, qu’un Sauveur parfait est venu accomplir l’œuvre en vertu de laquelle Dieu peut faire grâce à tous.
Après avoir quitté la contrée de Tyr et de Sidon, Jésus vient en Galilée où se trouvaient les pauvres, les méprisés des Juifs de Judée, mais au milieu desquels s’était levée une grande lumière (Matthieu 4:15, 16). S’étant assis sur une montagne, «de grandes foules vinrent à lui, ayant avec elles des boiteux, des aveugles, des muets, des estropiés, et beaucoup d’autres ; et elles les jetèrent à ses pieds, et il les guérit», ce qui les amena à glorifier le Dieu d’Israël. Le Seigneur répond aux besoins de son peuple là aussi où se trouve la foi ; il ne laisse pas sans réponse ceux qui ont des besoins, comme il le fit avec les pharisiens de Jérusalem, incrédules et hypocrites.
Accomplissant encore ce qui était dit de l’Éternel au Psaume 132 : «Je rassasierai de pain ses pauvres», Jésus appelle ses disciples et leur dit : «Je suis ému de compassion envers la foule, car voici trois jours déjà qu’ils demeurent auprès de moi, et ils n’ont rien à manger ; et je ne veux pas les renvoyer à jeun, de peur qu’ils ne défaillent en chemin». On voit, ici encore, de quelle manière le cœur du Seigneur prend connaissance de tous les besoins. Il a compté les jours que la foule était avec lui, et lui, qui a jeûné pendant quarante jours, sait combien le jeûne est pénible. Jamais il ne renvoie à vide ceux qui viennent auprès de lui. Il nous est précieux de savoir que Jésus est toujours le même envers chacun, aujourd’hui comme alors ; la gloire qui l’environne ne lui fait oublier aucun de ses bien-aimés.
Oublieux de la scène rapportée au chapitre 14:13-21, les disciples disent à Jésus : «D’où aurions-nous dans le désert assez de pains pour rassasier une si grande foule ?» Le Seigneur ne leur dit pas, comme au chapitre précédent : «Vous, donnez-leur à manger». Il demande : «Combien avez-vous de pains ?» Ils répondent : «Sept, et quelques petits poissons». Après avoir commandé aux foules de s’asseoir sur la terre, il rend grâces, rompt les pains et les donne aux disciples qui les distribuent aux foules. Le repas terminé, ils ramassent sept corbeilles pleines des morceaux qui étaient de reste. Ceux qui avaient mangé étaient quatre mille hommes, sans compter les femmes et les enfants.
Dans la précédente multiplication des pains, il y avait cinq pains, douze corbeilles de reste et cinq mille hommes. Ici, il y a sept pains, sept corbeilles et quatre mille hommes. Le nombre douze, dans les Écritures, est employé plutôt en rapport avec l’administration confiée à l’homme : douze tribus, douze disciples. La première multiplication rappelle la responsabilité de l’homme, ce que le Seigneur confiait aux disciples : «Vous, donnez-leur à manger». Ils avaient pour cela de faibles ressources, mais plus que suffisantes, puisque le Seigneur les leur fournissait. Dans notre chapitre, le Seigneur agit selon sa puissance divine ; c’est le côté de Dieu qui est présenté ; c’est pourquoi il y a sept pains et sept corbeilles, sept dans les ressources et sept dans les restes, le nombre sept signifiant la perfection ; le nombre quatre indique quelque chose de complet.
On voit, par ces détails, combien la parole de Dieu est parfaite dans toutes les expressions qu’elle emploie. S’il y a des choses qui nous sont incompréhensibles, c’est parce que nous sommes trop ignorants en présence des perfections de la révélation divine.
Nous trouvons de nouveau Jésus en présence des deux grandes classes des Juifs : les pharisiens et les sadducéens, que l’on peut désigner, les premiers comme des gens religieux, les seconds comme des libres-penseurs ; mais ils sont aussi incrédules les uns que les autres quant à la personne de Christ. Cependant leur conscience mal à l’aise et leur incrédulité font qu’ils demandent un signe du ciel. Comme le Seigneur l’avait déjà dit aux scribes et aux pharisiens du chapitre 12, il ne leur donne que le signe de Jonas. Combien est grande l’opposition du cœur de l’homme à Dieu ! Lorsque Dieu disait à Achaz de lui demander un signe (Ésaïe 7:10-12), le roi s’y refusa, feignant cette confiance qui ne permet pas à un homme pieux de tenter Dieu ; pourtant nous connaissons l’impiété de ce souverain. Cependant Dieu indique le signe (v. 14) : ce sera la naissance d’Emmanuel, de Celui qui, alors au milieu de son peuple, donnait, dans toute sa vie, les preuves de ce qu’il était, en grâce et en puissance ; mais, chose terrible, ils ne veulent pas voir !
Jésus leur reproche de savoir discerner, par les apparences du ciel, le temps qu’il fera le lendemain, et de ne pas discerner les signes, plus évidents encore, du siècle dans lequel ils vivent. La foi, toujours enseignée de Dieu, pouvait discerner les signes des temps, par la présence du Messie et l’accueil qui lui était fait ; mais une génération méchante et adultère ne recevra pas d’autre signe que celui de Jonas, c’est-à-dire la mort et la résurrection de Jésus ; ainsi prend fin la présentation du Messie à ce peuple qui l’a méconnu et rejeté, ce qui amènera sur lui les jugements de Dieu. Aussi lisons-nous ces paroles solennelles : «Et les laissant, il s’en alla». Jésus avait déjà dit à ses disciples, au v. 14 du chapitre précédent : «Laissez-les».
Condition terrible que celle des hommes que Dieu laisse à leur sort, après avoir fait tout ce qui est possible pour les sauver et les bénir ! Nous sommes dans un temps qui correspond, pour la chrétienté, à celui dans lequel Israël se trouvait quand Jésus était près de quitter ce peuple. Quantité de gens, aussi religieux que les pharisiens, comme les incrédules de toutes nuances, semblables aux sadducéens, seront bientôt laissés par le Seigneur pour être livrés à une énergie d’erreur ; ils n’ont pas reçu l’amour de la vérité pour être sauvés, en dépit des avertissements solennels qui nous sont donnés (2 Thes. 2:11). À la suite du départ de Christ, rejeté par les Juifs, les jugements de Dieu atteignirent ces derniers ; mais dans un avenir prochain, lorsque le Seigneur aura enlevé les croyants de la scène de ce monde, les jugements décrits dans le livre de l’Apocalypse fondront sur ceux qui n’auront pas cru dans le temps de grâce où nous sommes.
Cette venue du Seigneur est bien proche. Ceux qui ont les yeux ouverts par la foi à la parole de Dieu, peuvent discerner les signes des temps, ils attendent incessamment le lever de «l’Étoile du matin» — Christ venant chercher les siens — qui précédera l’apparition du jour «brûlant comme un four» pour ceux qui auront été laissés par le Seigneur.
Si les disciples avaient reçu le Seigneur comme le Messie d’Israël, ils étaient encore loin de connaître sa glorieuse personne et de comprendre ses enseignements, comme nous qui, objets continuels de la patiente bonté du Seigneur, avons beaucoup plus de lumières ; malgré tout, à cause de sa grâce merveilleuse il a bien voulu leur dire : «Vous êtes ceux qui avez persévéré avec moi dans mes tentations» (Luc 22:28).
Arrivés à l’autre rive — après la multiplication des pains du chapitre 15 — ils constatent qu’ils ont oublié de prendre des pains. Affligé de l’hypocrisie et de l’incrédulité des pharisiens et des sadducéens, Jésus sent combien ses faibles disciples ont besoin d’être mis en garde contre ces gens. Il les prévient en leur disant : «Voyez, et soyez en garde contre le levain des pharisiens et des sadducéens». Les pauvres disciples étaient encore matériels au point de penser que le levain ne pouvait avoir de rapport qu’avec le pain. Préoccupés de leur oubli plus que de la nécessité d’être en garde contre l’influence des doctrines pharisaïques et sadducéennes, le Seigneur leur dit : «Pourquoi raisonnez-vous en vous-mêmes, gens de petite foi... ? N’entendez-vous pas encore, et ne vous souvient-il pas des cinq pains des cinq mille hommes, et combien de paniers vous en recueillîtes ? ni des sept pains des quatre mille hommes, et combien de corbeilles vous en recueillîtes ?» Comment pouvaient-ils avoir la moindre inquiétude, après avoir été témoins de tels actes de puissance et de bonté, et quand ils avaient toujours avec eux celui qui en était l’auteur ? Deux choses caractérisaient les disciples : ils n’entendaient pas et ils ne se souvenaient pas. Ils n’avaient pas l’entendement spirituel ouvert aux enseignements du Seigneur qui les mettait en garde contre une chose plus importante que celle de manquer de pain ; et, quant à leurs besoins matériels ils oubliaient que la puissance et la bonté du Seigneur n’étaient pas quelque chose de momentané ; que ce qu’il avait été pour eux dans une circonstance, il le serait toujours. Ils pouvaient se confier en lui pour tous leurs besoins, afin que leurs cœurs soient tout entiers aux intérêts de leur Maître. En ces disciples, qui nous paraissent si stupides, nous avons notre propre image. Au lieu d’être exercés quant à nos intérêts spirituels et à la gloire du Seigneur, nous sommes en souci pour les choses matérielles, au sujet desquelles nous avons fait mille fois l’expérience de la bonté de Dieu et de ses soins, sachant que lui «sait de quoi nous avons besoin». Nous oublions que notre affaire est de chercher premièrement son royaume et sa justice, et que toutes les autres choses seront données par dessus. Les disciples avaient entendu le Seigneur prononcer ces paroles sur la montagne (chap. 6:24-34), et nous, combien de fois ne les avons-nous pas lues ?
Plein de patience et de bonté, le Seigneur leur explique qu’il ne leur parlait pas du levain de pain ; ils comprennent qu’il les met en garde contre la doctrine des pharisiens et des sadducéens. Comme nous l’avons vu (chap. 13), le levain représente une doctrine corruptrice. Les disciples, habitués au langage figuré toujours employé en Orient, auraient dû le comprendre. La doctrine des pharisiens est cette hypocrisie qui caractérise la religion de la chair, surtout chez les conducteurs, comme nous l’avons vu au commencement du chapitre précédent. La doctrine des sadducéens, c’est le raisonnement du cœur naturel qui met de côté la parole de Dieu pour chercher à soustraire la conscience aux effets de cette Parole et être plus libre de suivre ses propres désirs, deux maux contre lesquels nous avons à être mis en garde aujourd’hui. Soyons à cœur ouvert devant Dieu ; abstenons-nous des formes religieuses par lesquelles on cherche à cacher son vrai état à Dieu et à soi-même et, d’un autre côté, recevons la Parole sans raisonnement, en reconnaissant sa divine autorité sur le cœur et la conscience.
Quittant les rives du lac de Génézareth, le Seigneur se dirige vers Césarée de Philippe, tout au nord de la Palestine, et là, il interroge les disciples en ces termes : «Qui disent les hommes que je suis, moi, le fils de l’homme ? Et ils dirent : Les uns disent : Jean le Baptiseur ; les autres : Élie, et d’autres : Jérémie ou l’un des prophètes». Ici, nous n’avons pas les réponses de l’incrédulité et de la haine des Juifs et de leurs chefs ; c’est l’appréciation respectueuse de la foule qui croyait avoir une opinion excellente de la personne de Jésus, puisqu’elle le mettait au rang des prophètes les plus honorés. On avait estimé très haut Jean le Baptiseur ; on avait voulu, pour un temps, se réjouir à sa lumière (Jean 5:35 ; voir aussi Matthieu 21:26). Élie était celui qui doit précéder le Messie, et Jérémie passait auprès des Juifs pour un des prophètes les plus éminents. Même aux yeux des indifférents il était l’un des prophètes. Dans ces opinions diverses, toutes fondées qu’elles puissent paraître, il n’y avait ni foi, ni intelligence spirituelle. Dieu n’avait pas laissé son peuple dans l’incertitude au sujet de son Fils. Au baptême de Jean, le ciel s’était ouvert sur lui et la voix de Dieu le Père s’était fait entendre : «Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai trouvé mon plaisir» (Matthieu 3:17). Non seulement cela, mais toute la vie de Jésus avait prouvé qu’il était Emmanuel, le Christ, le Fils de Dieu.
Aujourd’hui nous trouvons des opinions aussi diverses, et plus diverses encore, sur ce qu’est Jésus, chez ceux qui ne le rejettent pas ouvertement : c’est un homme de bien, un grand réformateur, le fondateur de la religion chrétienne à laquelle on doit la civilisation actuelle ; on accorde qu’il a manifesté les caractères moraux de Dieu dans ce monde, et de belles choses encore. Mais si l’on pose à ces gens-là la question : «Jésus est-il le Fils de Dieu ?» ils répondent évasivement, si ce n’est négativement. Dieu présente à la foi une personne, car il faut aux hommes un Sauveur et non des opinions sur le Sauveur. «C’est ici le témoignage : que Dieu nous a donné la vie éternelle, et cette vie est dans son Fils : Celui qui a le Fils a la vie, celui qui n’a pas le Fils de Dieu n’a pas la vie» (1 Jean 5:11, 12).
Aux disciples Jésus dit : «Et vous, qui dites-vous que je suis ?» Simon Pierre répondit : «Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant». Jésus lui dit : «Tu es bienheureux, Simon Barjonas (*), car la chair et le sang ne t’ont pas révélé cela, mais mon Père qui est dans les cieux». Pierre était enseigné du Père pour confesser, de cette manière et à ce moment-là, Jésus, le Christ, objet de la promesse, que le peuple incrédule ne voulait pas recevoir ; il était le Fils du Dieu vivant, de celui qui possède la vie, vie que ni le péché ni ses conséquences ne peuvent atteindre, qui doit être celle des hommes, s’ils veulent être sauvés, parce que tous, dans leur état naturel, sont dans la mort. Quelle grâce merveilleuse que la manifestation ici-bas du Fils du Dieu vivant, afin que de pauvres pécheurs, comme Pierre et chacun de nous, puissent obtenir une telle vie, participer «de la nature divine» (2 Pierre 1:4). Aussi le Seigneur dit à Pierre : «Et moi aussi, je te dis que tu es»Pierre — ou une pierre — ; et sur ce roc je bâtirai mon assemblée, et les portes du hadès ne prévaudront pas contre elle». C’est comme si Jésus disait à Pierre : «Tu confesses ce que je suis, et moi aussi je dis ce que tu es par grâce, par la foi en moi, tu es une pierre, de même nature que moi». Pierre écrivait plus tard : «Duquel vous approchant — du Seigneur — comme d’une pierre vivante, rejetée par les hommes, mais choisie et précieuse auprès de Dieu, vous-mêmes aussi, comme des pierres vivantes, êtes édifiés une maison spirituelle, etc» (1 Pierre 2:4, 5). Cette maison spirituelle, composée de pierres vivantes, est ce que le Seigneur appelle ici son Assemblée qu’il bâtit lui-même, qu’il fonde sur ce qu’il est, Lui, le roc éternel de vie. Et ce Fils du Dieu vivant, sans pourtant jamais perdre son caractère, allait descendre dans la mort où toute la puissance de Satan est venue se briser contre lui. Il a «annulé la mort», Il a rendu «impuissant celui qui avait le pouvoir de la mort, c’est-à-dire le diable», (Hébreux 2:14). Ressuscité, vainqueur de tout ce qui était contre l’homme en Adam, il a été «déterminé Fils de Dieu, en puissance, selon l’Esprit de sainteté, par la résurrection des morts» (Romains 1:4). En vertu de cette œuvre, sur ce roc qui est Christ lui-même, il bâtit son Assemblée (ou Église), composée de tous ceux qui, par la foi, participent à sa vie.
(*) C’est-à-dire fils de Jonas. Le mot hébreu bar, qui se rencontre dans un certain nombre de noms propres de la Parole, signifie fils.
Les Juifs rejetaient le Christ, preuve que Dieu ne pouvait rien édifier sur l’homme selon la chair ; le Fils du Dieu vivant se présente donc comme le fondement sur lequel il bâtira ce qui remplacera Israël et ce qui demeurera éternellement, savoir son Assemblée. Contre elle les portes du hadès, figure de la puissance de Satan, n’auront aucune puissance. En effet, la mort, salaire du péché, a été subie par Christ, et Satan demeure sans force contre ce qui est bâti sur ce roc éternel de vie.
Dans la réponse de Jésus à Pierre, nous voyons : 1° ce que chaque croyant devient, par la foi au Fils de Dieu, une pierre vivante ; 2° l’Assemblée, bâtie par Christ, composée de l’ensemble de ces pierres vivantes, dont l’édification a commencé à la Pentecôte et se continuera jusqu’au moment où la dernière pierre sera ajoutée, c’est-à-dire la dernière personne convertie. Dans cette construction, tout répond aux pensées du divin Bâtisseur, parce que tout est le fruit de son travail. Une fois le dernier des élus manifesté, l’Assemblée, composée de tous les croyants ressuscités et transmués, sera ravie au-devant du Seigneur avec tous ceux qui sont morts dans la foi depuis le commencement. Puis cette Église réapparaît dans la gloire décrite en Apocalypse 21:9-27, telle qu’elle sera dans le règne de Christ. Lorsque, après ce règne, les cieux et la terre actuels auront passé, remplacés par un nouveau ciel et une nouvelle terre (Apocalypse 21:1-8), nous y voyons descendre la sainte cité, la nouvelle Jérusalem, l’habitation de Dieu qui est avec les hommes pour l’éternité, cette Assemblée que Christ aura bâtie lui-même.
La plupart de nos lecteurs savent que l’Église est en ruine, à cause de tout le mal qui s’y est introduit dans le cours des siècles ; ils peuvent se demander comment cette Église, que Christ bâtit, s’est corrompue, d’après les vérités dont nous venons de parler en rapport avec le verset 18 de notre chapitre.
Il n’est que trop vrai que nous sommes aujourd’hui au sein de l’Église ruinée, à cause de l’infidélité de ceux qui en ont fait et en font partie ; mais ce qui est ruiné n’est pas ce que Christ bâtit. La Parole nous enseigne que l’Assemblée sur la terre est envisagée à un autre point de vue encore, celui de la responsabilité de l’homme, considéré, lui aussi, comme bâtisseur, mais qui a toujours failli en ce que Dieu lui a confié. Ainsi la ruine est la conséquence même de notre infidélité. En 1 Corinthiens 3, Paul et Apollos sont considérés comme des collaborateurs de Dieu. Paul était l’ouvrier spécial qui, sur le fondement de cette maison de Dieu, Jésus Christ, a édifié de bons matériaux, et les apôtres aussi. Mais après eux, de leur temps déjà, des ouvriers moins vigilants introduisirent dans l’Assemblée des personnes qui, n’ayant pas la vie de Dieu, n’étaient pas des pierres vivantes, mais qui, baptisées du baptême chrétien, faisaient partie de la maison de Dieu sur la terre. Plus tard, on introduisit des foules sans leur demander de conversion, simplement parce qu’elles acceptaient le christianisme dans ses formes extérieures, et ainsi l’Église prit de l’extension dans ce monde et se corrompit (voir les paraboles de Matthieu 13:44-50). L’Église, sous ce caractère-là, comprend aujourd’hui tous ceux qui n’ont qu’une profession extérieure de christianisme et ceux qui ont véritablement la foi, qui sont des pierres vivantes, et auxquels la parole de Dieu donne des enseignements particuliers pour qu’ils se séparent du mal dans l’Église. Elle est comparée à une grande maison dans laquelle se trouvent des vases à honneur et des vases à déshonneur. Quand le Seigneur viendra, il enlèvera ceux qui ont la vie et laissera pour les jugements ceux qui n’ont eu que la profession chrétienne.
Outre l’assemblée, il y avait un autre résultat de la venue de Christ et de sa mort, en rapport avec la terre : c’est le royaume des cieux. Car si Christ possède une assemblée, il possède aussi la royauté sur son peuple terrestre et sur tout l’univers. En attendant sa domination glorieuse et universelle, le royaume s’établit sous une forme particulière. Il est appelé «royaume des cieux», parce que le siège du pouvoir est, et sera, dans le ciel, en contraste avec les royaumes terrestres dont l’autorité réside sur la terre. On entrait dans le royaume en reconnaissant l’autorité du Seigneur, que l’on reconnaissait aussi comme Sauveur. En attendant que Christ vienne établir son règne en puissance, la forme et l’étendue du royaume des cieux sont celles de l’Église responsable dont nous venons de parler. Mais les vrais croyants trouvés au milieu de cet état de choses, au lieu de former le peuple sur lequel Christ régnera à sa venue, seront au contraire, enlevés pour être avec le Seigneur et revenir pour régner avec lui, comme Épouse du roi.
En son absence, le Seigneur confie à Pierre les clefs de ce royaume, disant : «Je te donnerai les clefs du royaume des cieux ; et tout ce que tu lieras sur la terre sera lié dans les cieux ; et tout ce que tu délieras sur la terre sera délié dans les cieux» (v. 19). Pierre devait donc ouvrir la porte à tous ceux qui reconnaîtraient l’autorité du Seigneur, Juifs ou Gentils. Il fallait la permission du roi, représentée par Pierre, pour avoir accès dans ce royaume et en faire partie, car on n’y entrait pas par naissance, comme les Juifs, le peuple terrestre de Dieu. Il fallait aussi la foi au Seigneur qui était dans le ciel parce qu’il avait été rejeté.
La première moitié du livre des Actes montre comment Pierre s’est acquitté du service que le Seigneur lui a confié ici. C’est toujours lui qui prend la parole. Il démontre aux Juifs (2:36) que celui qu’ils ont crucifié, Dieu l’a fait Seigneur et Christ. Trois mille personnes environ reçoivent ces paroles et entrent dans le royaume ; au chapitre 5, le nombre se monte à environ cinq mille. Au chapitre 8, les gens de Samarie entrent, et, au chapitre 10, les Gentils sont reçus : Corneille et ceux qui sont avec lui. Dans tous les cas, c’est Pierre qui agit, en vertu de l’autorité que le Seigneur lui a donnée pour ouvrir les portes du royaume des cieux et pour l’administrer. Paul a été chargé de révéler tout ce qui concerne l’Église.
Le catholicisme a confondu ce que le Seigneur dit à Pierre au v. 18, avec ce qu’il dit au v. 19. Elle a fait de Pierre le représentant de Christ comme bâtisseur de l’Église et lui donne comme successeurs les papes, tandis que le Seigneur n’enjoint nullement à Pierre de bâtir l’Église, et ne lui annonce aucun héritier dans sa fonction. Le v. 18 se rapporte à l’Église, c’est Christ qui la bâtit lui-même, et si Pierre y a une part, c’est comme une pierre vivante. Le v. 19 se rapporte au royaume des cieux, Pierre en reçoit les clefs pour y introduire tous ceux qui croiraient ce que lui et les autres apôtres annonceraient concernant le Christ, sa mort, sa résurrection et sa glorification, car il a reçu toute autorité dans le ciel et sur la terre (Matthieu 28:18), Dieu l’ayant exalté prince et Sauveur (Actes 5:31).
Après les déclarations faites à Pierre, Jésus s’adresse aux disciples, leur enjoignant de ne dire à personne qu’il était le Christ. C’était inutile de le présenter plus longtemps aux Juifs comme un Messie vivant sur la terre, sans avoir passé par la mort. Seuls ceux qui croient sont introduits dans les bénédictions nouvelles.
«Dès lors Jésus commença à montrer à ses disciples qu’il fallait qu’il allât à Jérusalem, et qu’il souffrît beaucoup de la part des anciens et des principaux sacrificateurs et des scribes, et qu’il fût mis à mort, et qu’il fût ressuscité le troisième jour». La haine des principaux du peuple à l’égard de Jésus irait jusque-là, et du côté de Dieu, cette mort était nécessaire pour l’accomplissement de toutes les glorieuses vérités annoncées à Pierre dans les v. 18 et 19. Mais sa foi et son intelligence n’étaient pas à la hauteur de ces révélations ; son cœur s’arrêtait à la vérité que Jésus était le Christ, le Messie, et au royaume glorieux qu’il devait établir. Ne pensant qu’à ce côté de la vérité concernant la personne de Jésus, lorsque Pierre entend parler de sa mort, il le prend à part et lui dit : «Seigneur, Dieu t’en préserve, cela ne t’arrivera point !» Pauvre Pierre ! sa grande affection pour le Seigneur et le désir de jouir au plus tôt du royaume en gloire, lui font repousser la pensée de sa mort. Mais ses pensées étaient, en cela, en opposition à celles de Dieu. Jésus se retournant lui dit : «Va arrière de moi, Satan, tu m’es en scandale ; car tes pensées ne sont pas aux choses de Dieu, mais à celles des hommes». Sans la mort du Seigneur, Pierre aurait été exclu de toutes les bénédictions qui se trouvaient dans les pensées de Dieu. L’homme ne songe qu’à la jouissance de la chair pour laquelle la mort n’est pas nécessaire, au contraire. Quelle distance entre les pensées de Pierre et celles de Jésus ! Lui vient dans ce monde en disant : «Je viens... pour faire, ô Dieu, ta volonté», dans laquelle la mort était comprise, base sur laquelle Dieu pouvait accomplir tous ses conseils, tandis que Pierre dit : «Dieu t’en préserve !» Pour être justes, nos pensées doivent suivre celles de Dieu ; autrement nous prenons en considération celles de notre cœur qui peuvent être sincères, paraître bonnes, mais s’opposent aux choses de Dieu, puisqu’elles se rapportent à ce qui convient à l’homme.
Jésus montre ensuite à ses disciples que la mort serait non seulement sa part, mais aussi celle de tous ceux qui voudraient participer à la gloire avec lui. Car, pour cela, il faut le suivre ici-bas dans le chemin de son rejet, qui est pratiquement celui de la mort : «Si quelqu’un veut venir après moi», dit-il, «qu’il se renonce soi-même, et qu’il prenne sa croix, et me suive : car quiconque voudra sauver sa vie la perdra ; et quiconque perdra sa vie pour l’amour de moi, la trouvera». Deux choses doivent caractériser ceux qui suivent Christ dans ce monde : Se renoncer soi-même, et, prendre sa croix. Et elles ne se réalisent pas si l’on n’a pas la vie de Christ et Christ pour objet de son cœur, et l’espérance de la gloire avec lui. «Se renoncer soi-même», c’est cesser de vivre en vue de soi ; l’homme qui ne possède pas Christ pour sa vie, ne peut vivre que pour lui-même ; tout ce qu’il fait se rapporte à lui, directement ou indirectement, même ses bonnes œuvres en faveur d’autrui. Pour ne prendre que des exemples les plus saillants, citons les concerts, les représentations théâtrales de bienfaisance ; est-ce dans le renoncement à soi-même que ces œuvres s’accomplissent ? Elles découlent d’une vie qui a le moi pour objet et non pas Christ. Pierre se disait précisément que si le Christ mourait, lui serait privé de la gloire à laquelle sa chair tenait tant ; car il voulait la gloire sans la souffrance. Un seul pouvait être dans la gloire sans souffrir, Jésus, mais il y serait demeuré seul. Dans son amour infini, il a voulu mourir pour nous, afin que nous ayons une part avec lui.
«Prendre sa croix», c’est réaliser la mort tant que l’on est ici-bas. Quand un condamné à la crucifixion allait au supplice, on lui faisait porter sa croix et, en le voyant, on pouvait dire : «Voici un homme qui en a fini avec la vie». Et lui ne pensait plus à jouir des choses d’ici-bas ; il en avait fini. Combien il est à désirer que ceux qui observent notre conduite puissent dire que nous en avons fini avec le monde, que nous ne vivons plus pour nous-mêmes ! Nous manifesterions ainsi que nous sommes du ciel, les disciples de celui qui a souffert et qui est mort pour nous.
Dieu veuille que mes lecteurs, qui connaissent Jésus comme leur Sauveur, s’exercent, sous l’action de cette divine Parole, à réaliser ses enseignements, à renoncer à une vie qui a pour centre soi-même et pour objet le monde ! Ceux qui font ainsi jouiront déjà ici-bas des choses éternelles, tandis que ceux qui veulent épargner leur vie en lui accordant ses convoitises, la perdront pour l’éternité. Jésus ajoute : «Car que profitera-t-il à un homme s’il gagne le monde entier, et qu’il fasse la perte de son âme ; ou que donnera un homme en échange de son âme ?» Paroles solennelles qui se passent de commentaire. C’est un problème que Dieu place devant chaque personne qui cherche encore les avantages de ce monde et dont il attend la réponse. Dieu veuille en pénétrer tout à nouveau le cœur de tout lecteur qui désirerait le monde ou les choses qui sont dans le monde, ne penserait qu’à la satisfaction de la vie présente et négligerait ce qui se rapporte à son âme pour l’éternité ; car chacun a commencé l’éternité en entrant dans ce monde ; le temps présent en est une bien courte phase qui passe comme une ombre, mais dans laquelle se décide de quel côté chacun se trouvera définitivement après la vie présente.
Mais nous n’aurons pas toujours à suivre un Christ humilié et rejeté. Fils de l’homme il reviendra dans la gloire de son Père — la gloire du Fils de Dieu — et avec ses anges dans la gloire de son royaume, et alors, il rendra à chacun selon sa conduite pendant son absence. Ceux qui l’auront suivi, dans le renoncement à eux-mêmes et au monde, seront introduits dans sa gloire pour l’éternité, et reviendront avec lui pour régner. Ceux qui auront préféré le monde et ses convoitises auront leur part éternelle loin du bonheur et de sa gloire, comme aussi chacun de ceux qui auront suivi le Seigneur trouveront, dans ce jour-là, les conséquences de leur fidélité (v. 27).
Afin de fortifier la foi de ses disciples qui venaient d’entendre que le Christ, en qui ils avaient cru, allait mourir, et que leur part dans la vie présente serait le renoncement et la mort, Jésus ajoute : «Il y en a quelques-uns de ceux qui sont ici présents, qui ne goûteront point la mort jusqu’à ce qu’ils aient vu le Fils de l’homme venant dans son royaume» (v. 28).
Ces versets nous montrent comment devaient se réaliser les paroles que Jésus a prononcées au v. 28 du chapitre précédent. Il conduit Pierre, Jacques et Jean sur une haute montagne, et là, transfiguré devant eux, son visage devint resplendissant comme le soleil, et ses vêtements blancs comme la lumière. Moïse et Élie leur apparurent aussi «en gloire», comme nous l’apprend l’évangile selon Luc. Cette scène, dans Matthieu, présente la personne de Jésus, le Fils de l’homme, venant dans son royaume en gloire, afin de fortifier la foi des disciples lorsqu’ils auraient à rendre témoignage de lui après sa mort. Ils avaient cru qu’il était le Messie, le Christ ; et ils attendaient l’établissement de son règne glorieux. Au lieu de cela, Jésus leur défend de dire qu’il est le Christ et leur parle de ses souffrances et de sa mort. Une révélation pareille, anéantissant, semble-t-il, tout ce qu’ils avaient espéré, pouvait bien ébranler leur confiance. C’est pourquoi Jésus veut les rassurer par la vue de sa gloire, afin de fortifier la foi qu’ils possédaient déjà en lui comme Messie. Pierre se fonde sur cette manifestation glorieuse de Jésus pour encourager les croyants Juifs, auxquels il adresse ses épîtres, à attendre sans défaillance le royaume en gloire, lorsqu’il leur dit : «Ce n’est pas en suivant des fables ingénieusement imaginées, que nous vous avons fait connaître la puissance et la venue de notre Seigneur Jésus Christ, mais comme ayant été témoins oculaires de sa majesté» (2 Pierre 1:16).
La présence de Moïse et d’Élie parlant avec Jésus a une haute signification : Moïse avait donné la loi, Élie était le grand prophète, suscité pour ramener à la loi le peuple voué au culte de Baal (1 Rois 18). Ces deux hommes représentaient donc la loi et les prophètes, dont le ministère resta inutile au milieu du peuple, à cause de son incapacité d’obéir et de sa volonté opposée à Dieu. Puis le Messie était là pour établir son règne ; mais le peuple le rejetait, de sorte qu’au lieu de jouir des bénédictions promises, les Juifs allaient au-devant du jugement ; il n’y avait plus d’espoir pour eux sur le pied de leur responsabilité. Mais, lorsque tout est perdu du côté de l’homme, les ressources divines apparaissent, toutes concentrées sur la personne de Jésus qui, au lieu de monter au ciel avec Moïse et Élie après leur entretien, ira à la croix accomplir l’œuvre de la rédemption.
Quand les disciples virent ces deux éminents personnages avec Jésus, Pierre dit : «Seigneur, il est bon que nous soyons ici ; si tu le veux, faisons ici trois tentes : une pour toi, et une pour Moïse, et une pour Élie. Comme il parlait encore, voici, une nuée lumineuse les couvrit ; et voici une voix de la nuée, disant : Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai trouvé mon plaisir ; écoutez-le». Pierre pensait honorer Jésus en le mettant au premier rang de ces illustres serviteurs de Dieu. Il ne connaissait pas encore la gloire de sa personne, ni l’importance qu’il y avait à l’écouter. Aussi Dieu, le Père, jaloux de la gloire de son Fils, fait entendre sa voix aussi bien lorsqu’on veut le mettre au rang des plus grands hommes de Dieu, que lorsque lui-même prend place au milieu des pécheurs et se fait baptiser par Jean (Matthieu 3:17). C’est lui qu’il faut écouter maintenant, puisque Moïse et Élie ne l’ont pas été et que leur ministère n’a pas eu de résultat pour le peuple. La ressource de Dieu est donc dans son Fils bien-aimé. Cette voix, chers lecteurs, s’adresse à vous encore maintenant, comme à tout croyant et à tous ceux qui ne sont pas encore sauvés. «Écoutez-le», dit Dieu, le Père : Ecoutez celui qui dit : «Venez à moi, vous tous qui vous fatiguez et qui êtes chargés, et moi, je vous donnerai du repos» (Matthieu 11:28). «Je ne mettrai point dehors celui qui vient à moi» (Jean 6:37). «Écoutez, et votre âme vivra» (Ésaïe 55:3). «Il n’y a point d’autre nom sous le ciel, qui soit donné parmi les hommes, par lequel il nous faille être sauvés» (Actes 4:12).
Entendant la voix de Dieu et voyant la nuée les couvrir, les disciples tombèrent le visage contre terre, saisis d’effroi. Cette nuée était le signe de la demeure de Dieu au milieu de son peuple. Lorsque le tabernacle fut achevé au désert, «la nuée couvrit la tente d’assignation, et la gloire de l’Éternel remplit le tabernacle ; et Moïse ne pouvait entrer dans la tente d’assignation», à cause de cette gloire dans laquelle nul n’avait jamais été admis (Exode 40:34, 35). Plus tard, lors de la consécration du temple de Salomon, la gloire de l’Éternel le remplit et les sacrificateurs ne purent y entrer non plus (2 Chroniques 7:1-3). Cette gloire quitta le temple lorsque Israël partit en captivité (Ézéchiel 10). Les disciples pouvaient donc être effrayés en se voyant couverts de cette nuée que Pierre appelle «La gloire magnifique» (2 Pierre 1:17). Mais ils avaient avec eux celui qui avait quitté la gloire afin d’y faire entrer de pauvres pécheurs, tels que Moïse et Élie, vous et moi, et tout croyant. Lui seul pouvait leur dire : «Levez-vous, et n’ayez point de peur». Si Pierre avait eu, à ce moment-là, l’intelligence de ce qui se passait, comme il l’eut plus tard, il aurait compris sa folie, lorsque Jésus leur parlait de sa mort, et qu’il lui répondait : «Seigneur, Dieu t’en préserve, cela ne t’arrivera point», car, si Jésus n’était pas mort pour expier les péchés, jamais homme n’aurait pu être introduit dans la gloire de la présence de Dieu. Quel amour que celui de Jésus ? Combien le cœur peut être touché, en présence d’une scène semblable, où nous voyons de pauvres pécheurs tels que nous, introduits dans la même gloire que Jésus, parce qu’il allait subir la mort pour satisfaire la justice de Dieu à l’égard du péché !
Lorsque les disciples levèrent les yeux, ils ne virent que «Jésus seul» ; Moïse et Élie avaient disparu ; car, dans l’économie de la grâce que le Seigneur introduit alors, la loi et les prophètes font place à Jésus qui seul peut placer l’homme dans la bénédiction promise.
Ainsi, dans la scène de la transfiguration, nous voyons, pour ce qui regarde les promesses faites aux pères, que, par la foi, le croyant a la certitude que le Christ, le Fils de l’homme, établira son royaume en gloire ; les saints célestes y participeront, ressuscités et transmués, représentés par Moïse que Dieu a enseveli, et par Élie qui monta au ciel sans passer par la mort, et aussi les croyants qui seront alors sur la terre, représentés par les trois disciples. En attendant le royaume, les disciples possèdent, par la foi, une part céleste avec Christ, objet du cœur de Dieu, objet de leur cœur, celui qui reste avec eux, qu’ils doivent écouter, puisque la loi et les prophètes n’ont rien amené à la perfection.
Comme ils descendaient de la montagne, Jésus enjoignit à ses disciples de ne dire à personne ce qu’ils avaient vu, jusqu’à ce qu’il soit ressuscité d’entre les morts, pour la même raison qu’il leur avait défendu, au chapitre précédent, de dire qu’il était le Christ.
La scène inoubliable à laquelle ils venaient d’assister, plaçant devant eux la certitude de l’établissement du royaume en gloire, soulève une question concernant le prophète qui devait venir avant l’établissement du royaume et qui est appelé Élie (Malachie 4:5) : «Pourquoi... les scribes disent-ils qu’il faut qu’Élie vienne premièrement ?» Si le royaume allait s’établir, pourquoi Élie n’était-il pas venu ? Le Seigneur répond qu’en effet, Élie vient premièrement et rétablira toutes choses, ainsi qu’avait dit Malachie dans le passage cité plus haut : «Voici, je vous envoie Élie, le prophète, avant que vienne le grand et terrible jour de l’Éternel. Et il fera retourner le cœur des pères vers les fils, et le cœur des fils vers leurs pères, de peur que je ne vienne et ne frappe le pays de malédiction». Les scribes avaient raison : un prophète sera suscité du milieu du résidu, une fois les Juifs rentrés en Palestine, et il agira dans l’esprit et la puissance d’Élie pour ramener le peuple à Dieu avant l’établissement du règne de Christ. Le Seigneur ajoute : «Mais je vous dis qu’Élie est déjà venu, et ils ne l’ont pas reconnu ; mais ils lui ont fait tout ce qu’ils ont voulu, ainsi aussi le Fils de l’homme va souffrir de leur part. Alors les disciples comprirent qu’il leur parlait de Jean le Baptiseur». En effet, lorsque les Juifs demandèrent à Jean qui il était, il leur répondit : «Moi, je suis la Voix de celui qui crie dans le désert : Faites droit le chemin du Seigneur, comme dit Ésaïe le prophète» (Jean 1:23, voir Matthieu 3:3). Il accomplissait la prophétie d’Ésaïe 40:3, en préparant le chemin du Seigneur dans les cœurs, par la parole de sa prédication. Il était aussi celui dont Malachie avait parlé (3:1), cité par Zacharie, père de Jean, en Luc 1:76 : «Et toi, petit enfant, tu seras appelé prophète du Très-Haut : car tu iras devant la face du Seigneur pour préparer ses voies». Le Seigneur confirme l’application de ce passage à Jean le Baptiseur, en Matthieu 11:10, et Luc 7:27 : «C’est ici celui dont il est écrit : Voici, j’envoie mon messager devant ta face, lequel préparera ton chemin devant toi». De sorte qu’il était vrai qu’un prophète viendrait encore avant l’avènement de Christ en gloire et qu’Élie, dans la personne de Jean le Baptiseur, était venu avant l’apparition de Christ en grâce.
Comme on avait traité le précurseur, méconnu et mis à mort, ainsi aussi on traiterait son Seigneur. Combien la parole de Dieu est précise et sûre ! Ce qui demeure encore à accomplir se réalisera avec la même exactitude que ce qui a déjà eu lieu. Celui qui croit cette Parole et s’appuie sur elle pour toutes choses, possède seul, au milieu de la confusion des pensées des hommes, la vérité à l’égard du passé, du présent et de l’avenir. En dehors d’elle, il n’y a aucune certitude et, par conséquent, ni paix, ni bonheur.
Pendant la scène merveilleuse de la transfiguration, il s’en passait une bien différente entre la foule et les disciples. Ceux-ci, aux prises avec la puissance de Satan, ne pouvaient chasser un démon qui tourmentait cruellement un jeune garçon. Voyant arriver Jésus, le père se jeta à genoux devant lui, en disant : «Seigneur, aie pitié de mon fils, car il est lunatique et souffre cruellement, car souvent il tombe dans le feu, et souvent dans l’eau ; et je l’ai apporté à tes disciples, et ils n’ont pu le guérir. Et Jésus, répondant, dit : Ô génération incrédule et perverse, jusques à quand serai-je avec vous ; jusques à quand vous supporterai-je ? Amenez-le-moi ici. Et Jésus le tança ; et le démon sortit de lui ; et le jeune garçon fut guéri dès cette heure-là». Les disciples demandèrent à Jésus pourquoi ils n’avaient pu chasser ce démon. Il leur répondit que c’était à cause de leur incrédulité et à la suite de cela, leur enseigna deux choses importantes. Pour profiter de la puissance du Seigneur qu’il avait mise à leur disposition, il fallait la foi. Jésus leur avait donné le pouvoir de chasser les démons (10:8) ; mais ce pouvoir ne pouvait s’exercer sans la foi réelle en la personne du Seigneur, seule source de cette puissance. S’ils en avaient seulement comme un grain de moutarde — exemple d’une chose très petite — ils pourraient déplacer une montagne, c’est-à-dire vaincre la difficulté la plus insurmontable.
Quelle chose merveilleuse que de voir le Seigneur communiquer aux hommes, si nuls à tous égards, le pouvoir de tout surmonter par la foi en lui. Cette puissance demeure à notre disposition pour accomplir ce que le Seigneur demande de nous aujourd’hui. Il ne nous appelle pas à guérir des malades et à chasser des démons, — cependant, s’il nous le demandait, nous le pourrions par la foi en lui — mais à le suivre ici-bas, à marcher dans la séparation du mal et dans l’accomplissement du bien. Nous rencontrons des difficultés insurmontables pour notre faible nature ; mais avec la foi, nous pouvons dire comme l’apôtre Paul : «Je puis toutes choses en celui qui me fortifie», en celui qui lui avait dit, «Ma puissance s’accomplit dans l’infirmité» (Philippiens 4:13 et 2 Corinthiens 12:9). Il est bon de s’exercer, dès la jeunesse, à profiter de la puissance du Seigneur en le faisant entrer dans tout ce qui nous concerne, elle reste toujours à la disposition de la foi, pour soutenir la fidélité et la piété au milieu de ce monde où tout s’oppose à Christ et à ceux qui veulent lui être fidèles.
La seconde chose que Jésus enseigne à ses disciples, et à nous aujourd’hui, c’est que, non seulement la foi seule peut profiter de la puissance du Seigneur, mais qu’il faut un état d’âme qui permette de pouvoir compter sur le Seigneur. Il dit : «Cette sorte ne sort que par la prière et par le jeûne». Nous ne possédons pas en nous-mêmes la puissance dont nous avons besoin pour la marche et le service, comme une provision à laquelle nous pouvons puiser. Elle est dans le Seigneur ; elle exige, comme nous l’avons vu, la foi qui ne se réalise pas sans un état d’âme caractérisé par la prière, la dépendance du Seigneur et le jeûne, figure du renoncement à tout ce qui satisfait et excite la chair, et détourne le cœur vers les choses d’ici-bas. Si le cœur en est rempli, comment peut-il se confier dans le Seigneur ? Elles lui ôtent toute spiritualité et toute capacité pour discerner la volonté du Seigneur, et si alors nous voulons recourir à ses promesses dans nos difficultés nous ne le pouvons pas. C’est pourquoi il est dit : «La piété est utile à toutes choses, ayant la promesse de la vie présente et de la vie qui est à venir» (1 Timothée 4:8). C’est donc dans la séparation du mal et du monde pour le Seigneur que nous pourrons compter sur lui et faire l’expérience de sa puissance.
Dans les v. 22 et 23, Jésus rappelle aux disciples qu’il va être livré entre les mains des hommes, qu’ils le feront mourir, mais que, le troisième jour, il ressuscitera. Ils en furent fort attristés. Le Seigneur ne voulait pas que les circonstances qui passaient devant leurs yeux détournent leurs pensées du fait fondamental de toutes leurs bénédictions présentes et futures. Car à quoi aurait servi la scène de la transfiguration qui les assurait de leur part dans la gloire à venir, à quoi servait la puissance de Christ dont ils pouvaient disposer, si Jésus ne passait pas par la mort et la résurrection, fondement de tout ce que Dieu voulait accomplir en faveur des pécheurs que nous sommes par nature ? Demeurés tous dans notre misère, la gloire nous aurait été fermée pour l’éternité.
La pensée de la mort de Jésus attristait les disciples ; il ne pouvait en être autrement ; mais la joie qui devait en découler est incomparable et éternelle. Les disciples la connurent déjà ici-bas (Jean 16:20-22). Pierre l’appelle «une joie ineffable et glorieuse» (1 Pierre 1:8). Tout croyant peut en jouir, en attendant le beau moment où le Seigneur lui-même jouira du travail de son âme (Ésaïe 53:11), alors que tous ses rachetés seront autour de lui, glorifiés.
Jésus et les disciples arrivent à Capernaüm, au moment où l’on percevait un impôt prélevé pour le temple, probablement celui prescrit par Moïse en Exode 30:11-16, ou celui établi par Néhémie pour le service de la maison de Dieu (Néhémie 10:32, 33). Les receveurs de cet impôt (*) demandèrent à Pierre «Votre maître ne paie-t-il pas les didrachmes ?» Pierre répondit : «Oui». Il avait raison, en ce sens que le Seigneur Jésus devenu homme, s’est soumis, comme tel, né sous la loi, à tout ce qui était établi sur le peuple. Mais si Pierre avait pensé à la gloire de sa personne comme Fils de Dieu et Fils de l’homme, dont il avait été témoin sur la sainte montagne, il n’aurait pas été si prompt à répondre. Lorsqu’il rentra dans la maison, Jésus, qui possédait la toute-science divine, sachant ce que Pierre venait de répondre aux receveurs, lui dit : «Que t’en semble, Simon ? Les rois de la terre, de qui reçoivent-ils des tributs ou des impôts, de leurs fils ou des étrangers ? Pierre lui dit : Des étrangers. Jésus lui dit : Les fils en sont donc exempts. Mais, afin que nous ne les scandalisions pas, va-t’en à la mer, jette un hameçon, et prends le premier poisson qui montera ; et quand tu lui auras ouvert la bouche, tu y trouveras un statère, prends-le, et donne-le-leur pour moi et pour toi».
(*) Il était de deux drachmes (un didrachme ou un demi-statère).
On remplirait des volumes à parler de la gloire, de la grâce de Jésus, et des enseignements pratiques que contiennent ces paroles merveilleuses. Jésus fait comprendre à Simon que Lui, le fils du roi du temple, n’est pas soumis aux impôts, et pas davantage à l’impôt du temple, puisqu’il est le Seigneur du temple. Mais sa grâce vient unir à cette gloire, comme fils, un pauvre pêcheur de la Galilée, ainsi que chaque croyant, et le Seigneur, réalisant l’humilité dans l’humanité qu’il avait prise en grâce, embrasse Pierre avec lui dans sa réponse, lui disant : «Mais, afin que nous ne les scandalisions pas, va, etc.». Ces quelques paroles nous donnent un aperçu de l’infinie grandeur de notre précieux Sauveur et de sa grâce merveilleuse. Sa gloire divine y est présentée, comme son abaissement ; d’une part sa gloire de Créateur, qui a le pouvoir de disposer de tout dans la créature, sa toute-science par laquelle il savait qu’il y avait un statère dans la bouche d’un poisson, sa puissance qui faisait arriver le poisson à l’hameçon jeté par Pierre, et d’autre part sa soumission, comme homme, aux lois sous lesquelles le peuple se trouvait. Il illustrait, par son exemple, ce qu’il a fait écrire par ses serviteurs en Romains 13:5-7 et 1 Pierre 2:13-17, afin de n’être pas en scandale aux hommes ; car si le croyant doit vivre dans la conscience de la haute position où la grâce l’a placé, il n’a aucun droit à faire valoir dans ce monde, pendant que Christ ne fait pas valoir les siens.
Il y a de quoi remplir nos cœurs d’admiration et de reconnaissance en voyant, si faiblement que ce soit, la personne de celui qui a quitté la gloire, pour venir mourir à la place des coupables, afin de nous placer dans la position de fils devant Dieu, avec lui, semblables à lui. Nous comprenons qu’il faudra une capacité et des corps parfaits et glorieux, pour voir et comprendre les gloires infinies de la personne du Seigneur Jésus Christ, et rien de moins que l’éternité pour en jouir et lui rendre, en adoration et en louanges, ce qui lui revient pour tout le déploiement de sa grâce et de son amour envers nous qui, par ses souffrances et par sa mort, avons été rendus propres pour la gloire éternelle.
Déjà nous pouvons chanter :
L’âme reste confondue
Devant cet amour béni,
Plus vaste que l’étendue,
Profond comme l’infini ;
Aussi notre cœur désire
Le moment de ton retour,
Pour voir, pour sonder, pour dire
Les grandeurs de ton amour.
Au commencement de ce chapitre, nous trouvons les disciples préoccupés de la grandeur de ceux qui seront dans le royaume des cieux ; ils ne doutent nullement qu’ils en feront partie, d’autant plus que le Seigneur venait de montrer à Pierre dans quelle haute position il le plaçait avec lui.
Les disciples, comme tous les Juifs, n’avaient à l’égard du royaume que des pensées de gloire et de grandeur charnelles, malgré l’abaissement dans lequel le roi, le Messie, était venu. Aussi le Seigneur leur enseigne ce qui doit caractériser ceux qui lui appartiendront, avant son établissement en gloire.
En réponse à la question des disciples : «Qui donc est le plus grand dans le royaume des cieux ?» Jésus appelle auprès de lui un petit enfant, le place au milieu d’eux et dit : «En vérité, je vous dis : si vous ne vous convertissez et ne devenez comme les petits enfants, vous n’entrerez point dans le royaume des cieux». Aux yeux des disciples, la qualité de Juif, de descendant d’Abraham, paraissait suffisante pour un sujet du royaume ; elle ne l’était pas aux yeux de Dieu. Tout Juif était pécheur et, quoique le peuple ait possédé des promesses, il fallait non seulement descendre d’Abraham, mais, avant tout, naître de nouveau, se convertir ; c’est-à-dire subir un changement complet, produit par la réception d’une nouvelle nature, grâce à la foi au Seigneur Jésus mort sur la croix. Le caractère de ceux qui sont convertis et qui, par conséquent, font partie du royaume des cieux, est celui d’un petit enfant : il faut devenir comme «les petits enfants».
Combien les pensées de Dieu sont opposées à celles des hommes ! Pour entrer dans la société et être quelque chose ici-bas, il faut en avoir fini avec le caractère des petits enfants. Tous les enfants souhaitent le moment où l’on ne les traitera plus comme des enfants, et surtout comme de «petits enfants», estimant que les adultes jouissent de nombreux d’avantages dont ils sont privés. Ces pensées-là sont en rapport avec les choses de la terre, avec la gloire du monde qui n’est que vanité. Quant aux choses de Dieu, pour le royaume, pour l’éternité de gloire, il en est tout autrement ; car Dieu ne peut tolérer l’élévation et la grandeur de l’homme pécheur, au milieu d’un monde ruiné. «Je hais l’orgueil et la hauteur», dit la sagesse (Proverbes 8:13 ; Ésaïe 2:11-17). Ainsi pour entrer dans le royaume des cieux, et jouir des bénédictions présentes et éternelles, il faut la conversion, car Dieu ne peut recevoir un homme dans son état naturel. Il faut devenir comme les petits enfants, c’est-à-dire renoncer à toute prétention, croire ce que Dieu dit, avoir plus de confiance en ce qu’il dit que dans son propre jugement. Au lieu de chercher à devenir grand selon le monde, il faut au contraire devenir humble. N’est-ce pas ce que le Seigneur a fait ? Lui qui était de toute éternité dans la gloire, lui qui a créé toutes choses, qui est et était Dieu, il s’est anéanti en devenant un homme, prenant la forme d’esclave, et il a été obéissant jusqu’à la mort, la mort de la croix (Philippiens 2:5-11), tout cela pour nous introduire dans son royaume, dans le ciel même. Le caractère de ceux qui sont au Seigneur doit donc être celui de leur Sauveur et Seigneur, pendant le temps de son rejet, où le monde méconnaît ceux qui croient en lui. La gloire viendra ensuite. Après avoir montré aux disciples à quelles conditions et sous quel caractère ils pouvaient entrer dans le royaume, Jésus répond proprement à leur question : «Qui... est le plus grand dans le royaume ?» en disant : «Quiconque... s’abaissera comme ce petit enfant, celui-là est le plus grand dans le royaume des cieux». Pour entrer, il faut se convertir et devenir comme les petits enfants. Une fois introduit, pour y être grand, il faut encore s’abaisser comme un petit enfant. Dans un monde caractérisé par l’orgueil de l’homme et ses prétentions, l’humilité, l’abaissement, constituent le chemin de la gloire selon Dieu. C’est ce que nous voyons pour le Seigneur, dans les versets de Philippiens 2 cités plus haut. Christ s’est abaissé lui-même, au plus bas, jusque dans la mort : «C’est pourquoi... Dieu l’a haut élevé et lui a donné un nom au-dessus de tout nom». Tous ceux qui veulent être élevés dans la gloire future doivent suivre Christ, le parfait modèle, ici-bas, dans l’abaissement, l’humilité, la douceur, acceptant de n’être rien et d’être tenus pour tels, ne voulant pas autre chose que la position qu’il a eue dans ce monde. Ces caractères des siens, le Seigneur se plaît à les trouver dans le petit enfant ; ils ont beaucoup de prix pour son cœur, ainsi que tous ceux qui les portent. Ils ont beau n’avoir pas de valeur pour les hommes ; si l’on reçoit un seul de ces petits au nom du Seigneur, on le reçoit lui-même. Quelle gloire d’avoir, ici-bas, l’occasion de recevoir le Seigneur ! Les résultats en seront glorieux et éternels, au jour où tout ce que Dieu apprécie sera manifesté (voyez Matthieu 10:40-42 ; 25:31-40).
Les enfants qui croient au Seigneur ont une telle valeur pour son cœur, qu’il prononce le jugement le plus sévère sur quiconque leur est une occasion de chute ou de scandale : «Il serait avantageux pour lui qu’on lui ait pendu au cou une meule d’âne (*) et qu’il ait été noyé dans les profondeurs de la mer». Depuis que Jésus a prononcé ces paroles, jamais autant qu’aujourd’hui, on n’a autant cherché à scandaliser les petits qui croient au Seigneur, et en général tous les croyants, en essayant de prouver, par d’habiles raisonnements humains, que la Bible n’est pas la parole de Dieu ou qu’elle ne l’est pas entièrement ; que Jésus n’était pas le Fils de Dieu ou qu’il n’a pas existé ; qu’il ne faut croire que ce que l’on comprend, etc. On cherche à user de l’influence que peuvent avoir sur les croyants, petits et grands, la science et la raison humaines pour les détourner de la foi. Scandaliser, dans le Nouveau Testament, n’a pas le sens de choquer qu’il a pris en français, mais signifie faire faire un faux pas, donc faire tomber, en détournant de Dieu, en donnant à croire que ce que Dieu dit est faux, par d’autres moyens encore. Gardons-nous tous de prêter l’oreille à de tels raisonnements ! Il ne s’agit pas de comprendre premièrement, mais de croire ce que Dieu dit : cela suffit ; en le croyant, nous possédons le pardon de nos péchés, la paix avec Dieu, la jouissance de son amour, et, pour l’éternité, une place dans la gloire, lorsque toute la grandeur de ce monde sera anéantie. Quant à ceux qui n’auront pas cru Dieu, qui auront causé la chute d’un petit qui a mis sa confiance dans le Seigneur, qui auront préféré leurs connaissances et leurs croyances à la parole de Dieu, qui auront donné gloire à l’homme plutôt qu’à Dieu, les méchants en un mot, ils seront éternellement en dehors de la vie, du bonheur et de la gloire que la parole de Dieu donne et promet à ceux qui croient. Ils auront pour leur part les tourments éternels : «la fumée de leur tourment monte aux siècles des siècles» (Apocalypse 14:11).
(*) En Orient, on moud le blé entre deux meules de pierre qui tournent horizontalement l’une sur l’autre ; celle de dessous est fixe, et celle de dessus est mobile. Les plus petites sont mises en mouvement par les servantes (Matthieu 24:41), les plus grandes par un âne.
Le Seigneur met aussi en garde contre les choses qui peuvent être une occasion de chute, contre tout ce qui fait pécher et prive de la vie éternelle. La main peut occasionner le péché en accomplissant des choses mauvaises ; le pied peut conduire dans des lieux où l’on est détourné de la vérité et où l’on peut commettre le mal ; l’œil est l’organe par lequel les convoitises de tous genres sont introduites et entretenues dans le cœur. Si ces membres, ou l’un ou l’autre, induisent au péché, si on ne sait comment cesser de les employer pour faire le mal — ce qui peut priver du salut — mieux vaut les couper, c’est-à-dire renoncer absolument à tout ce qu’ils nous procurent. «Jette-les loin de toi», dit le Seigneur — au figuré — à une grande distance, afin de ne pas les avoir sous la main lorsque le cœur les désire, et de ne pas s’exposer au péché qui privera de la vie éternelle, car «les gages du péché, c’est la mort» (Rom. 6:23), et, après la mort, le jugement. C’est tout jeune qu’il faut pratiquer ces opérations-là, en ne cultivant pas des penchants naturels qui peuvent dégénérer en passions ; on risque d’en devenir les esclaves et d’être entraîné par ces affreux tyrans dans le feu éternel.
Que le Seigneur donne à chacun d’examiner contre quoi il a à lutter, la jeunesse tout particulièrement, qui est responsable d’écouter les enseignements de parents pieux et de tous ceux qui s’intéressent à elle, selon Dieu.
Les petits enfants ont un tel prix pour le Seigneur qu’il dit : «Prenez garde de ne pas mépriser un de ces petits». Il faut avoir pour eux les pensées du Père à leur égard et non celles des hommes, qui font plus de cas d’un grand du monde que d’un petit enfant. Ici, il ne s’agit pas de ceux qui croient seulement, mais de tous les petits enfants, quels qu’ils soient. Comment estimer le prix qu’un petit enfant a pour Dieu ? Le verset 11 le dit : «Car le Fils de l’homme est venu pour sauver ce qui était perdu». Un objet a toujours une valeur égale au prix payé pour l’acquérir. Le prix donné pour le salut d’un seul petit enfant n’est rien de moins que le Fils de l’homme, venu ici-bas pour les sauver. Ce cher Sauveur donne à l’égard d’un petit enfant, dont l’existence n’a duré peut-être que quelques instants, le même exemple de dévouement que dans celui que montre la parabole du bon Berger (Luc 15). Le berger abandonne tout le troupeau pour venir sauver un de ces petits ; il a de la joie de l’avoir sauvé. «Car... ce n’est pas la volonté de votre Père qui est dans les cieux, qu’un seul de ces petits périsse». En général lorsqu’on apprend la mort d’un petit enfant, on se sent moins ému que s’il s’agit de celle d’un grand homme, surtout si cet enfant appartient à une famille pauvre ; on ne lui prépare pas de pompeuses funérailles. Et pourtant, ce grand homme peut être un incrédule, mort dans ses péchés, parce qu’il a méprisé la grâce ; il n’y a eu pour lui aucune joie dans le ciel, tandis que ce petit enfant est un éternel sujet de bonheur pour celui qui vint ici-bas pour le sauver. Nos pensées doivent être à cet égard, comme en tout, celles du Seigneur. Ne méprisons pas le petit enfant, car nous savons que tous ceux qui meurent en bas âge sont auprès du Seigneur. Il s’est donné pour eux, accomplissant la volonté de son Père qui ne veut pas qu’un seul de ces petits périsse. Au ciel, ils sont dans sa présence. «Leurs anges», dit le Seigneur, «voient continuellement la face de mon Père qui est dans les cieux». On a dit à ce propos : «Si les petits enfants ne savent pas s’ouvrir leur chemin dans ce monde, ils sont néanmoins l’objet de la faveur spéciale du Père, comme ceux qui, dans les cours terrestres, avaient le privilège particulier de voir la face du roi».
D’après les enseignements du Seigneur dans tout ce qui précède, la petitesse, l’humilité doivent caractériser ceux qui appartiennent au royaume, ainsi que la grâce manifestée dans la personne de Jésus.
Les caractères de grâce et d’humilité doivent aussi régler notre conduite vis-à-vis de celui qui peut avoir fait tort à son frère. Au lieu de nous justifier et de divulguer le mal qu’il peut avoir fait, nous devons avoir en vue son bien, garder la chose entre nous et lui et aller, dans l’amour, chercher à le gagner, en ayant surtout à cœur de lui montrer combien il s’est fait tort à lui-même en péchant, plutôt que de lui faire comprendre combien il nous a fait tort, ce que l’on peut exagérer facilement. Si cette démarche fraternelle n’aboutit pas, il faut, sans ébruiter la chose, retourner vers lui avec une ou deux personnes, afin que tout se passe en présence de témoins et que les faits ne soient pas dénaturés. S’il ne veut pas écouter les témoins, il faut le dire à l’Assemblée, et s’il ne veut pas écouter l’Assemblée, c’est inutile d’aller plus loin ; le frère qui a péché peut être considéré comme un homme des nations, avec lequel on n’a rien à faire. Mais si l’on agit dans le premier cas selon l’enseignement donné, il est bien rare que l’on ait besoin du second moyen et encore moins du troisième.
Souvenons-nous tous de l’esprit qu’il faut apporter envers ceux qui ont manqué à notre égard. Soyons pénétrés du caractère de grâce de notre Père ; cherchons en premier lieu le bien du coupable ; n’ayons aucun désir de lui faire subir un châtiment et n’agissons pas en vue de nous faire rendre justice ; c’est Dieu qui justifie. De cette manière, la grâce touchera le cœur et le bien en résultera pour les deux parties. Il est bon de pratiquer cela dès le jeune âge, car, si l’on s’habitue à pardonner, on le fait plus facilement dans toute sa carrière. «Élève le jeune garçon selon la règle de sa voie ; même lorsqu’il vieillira, il ne s’en détournera point (Proverbes 22:6).
Le Seigneur enseigne que, si le frère en faute ne veut pas écouter l’Assemblée, il n’y a plus de démarches à faire. On peut se demander pourquoi on ne peut pas recourir à d’autres moyens qui seraient plus efficaces.` C’est parce qu’il n’en existe pas, si les choses se sont passées dans l’ordre enseigné de Dieu.
L’Assemblée se compose des croyants réunis au nom du Seigneur, car il dit : «Là où deux ou trois sont assemblés en mon nom (ou à mon nom), je suis là au milieu d’eux». Jusqu’à la mort du Seigneur, l’Assemblée était le peuple d’Israël, qui avait pour centre, dans son état normal, le temple de Jérusalem dont l’Éternel avait fait sa demeure. Depuis que le peuple a rejeté l’Éternel, dans la personne de Christ et que, comme peuple, il a été rejeté lui-même, c’est Jésus qui est le centre de rassemblement de tous ceux qui l’ont reçu. Ainsi l’Assemblée chrétienne, groupée autour de Jésus, a remplacé l’Assemblée d’Israël qui avait pour centre le temple de l’Éternel. C’est pourquoi le Seigneur, en parlant de l’ordre de choses introduit par son rejet, mentionne l’Assemblée chrétienne comme le lieu où il se trouve lui-même, cette Assemblée ne serait-elle composée que de deux ou trois personnes. Il n’y a donc rien de plus grand sur la terre, parce que Sa présence est là et non ailleurs, et si l’on n’écoute pas cette Assemblée, où se trouve le Seigneur, on ne peut aller ailleurs pour avoir sa présence. Puisque Lui, qui est dans le ciel, se trouve au milieu des deux ou trois rassemblés en son nom, il dit : «En vérité, je vous dis : Tout ce que vous lierez sur la terre sera lié dans le ciel, et tout ce que vous délierez sur la terre sera délié dans le ciel». L’autorité du Seigneur se trouve là, c’est la seule autorité ecclésiastique que Dieu reconnaisse sur la terre et que le croyant ait à reconnaître. Pour que la présence du Seigneur caractérise une Assemblée de croyants, il faut naturellement qu’elle lui soit soumise à tous égards.
Là encore, dans ce rassemblement des deux ou trois, d’accord, selon la pensée de Jésus, pour prier, nous recevons l’assurance que : «Quelle que soit la chose qu’ils demanderont, elle sera faite pour eux par mon Père qui est dans les cieux».
Quel privilège béni que de pouvoir être autour du Seigneur sur cette terre, en attendant d’être autour de lui dans la gloire ! Rien n’est plus grand aux yeux de Dieu ici-bas. Pour les hommes, c’est peu de chose que ce rassemblement de quelques croyants autour du Seigneur, sans organisation humaine, sans ressource apparente. Mais pour le Seigneur, rien n’a autant de valeur. Il le montre en faisant réaliser sa présence et en pourvoyant à tout.
Qu’aucun de ceux qui ont eu peut-être le privilège d’être conduits dès leur tendre enfance dans ce rassemblement, ne songe un instant à le quitter, car il déshonorerait le Seigneur en s’exposant aux tristes conséquences de ce mépris. L’apôtre dit : «Mais pour nous, nous ne sommes pas de ceux qui se retirent pour la perdition, mais de ceux qui croient pour la conservation de l’âme» (Hébreux 10:39). Et déjà dans les Psaumes, il est dit : «C’est là que l’Éternel a commandé la bénédiction, la vie pour l’éternité» (Psaume 133:3).
Répondant à la question de Pierre qui demande : «Seigneur, combien de fois mon frère péchera-t-il contre moi, et lui pardonnerai-je ? Sera-ce jusqu’à sept fois ?» le Seigneur montre qu’il faut toujours pardonner en disant : Je ne te dis pas sept fois, mais soixante-dix fois sept fois. Sept est le nombre parfait qui, décuplé et multiplié par lui-même, donne le nombre de fois que nous devons pardonner, c’est-à-dire autant de fois que le cas se présente. Jésus illustre ensuite son enseignement par une parabole et montre que nous devons agir les uns envers les autres, comme Dieu agit envers nous, parce que tous, nous sommes des objets de grâce.
Le roi est ici Dieu qui premièrement veut compter avec ses esclaves, selon sa justice ; mais l’un d’eux, figure de nous tous, lui devait dix mille talents, somme fabuleuse, surtout s’il s’agit d’un homme qui ne possédait rien, ces dix mille talents représentant la valeur d’environ 500 tonnes d’or ou d’argent. Voilà à quoi nous pouvons comparer la grandeur de la dette de nos péchés, nous, pauvres débiteurs insolvables. La justice du roi exigeait le paiement de la somme, mais, touché de compassion envers son esclave, il lui remit la dette. Après avoir agi de la sorte, le roi s’attendait à ce que cet esclave se comporte de même envers ses propres débiteurs. Mais à peine eut-il obtenu cette faveur, qu’il rencontra un de ses compagnons qui lui devait cent deniers — somme dérisoire comparée à celle qui venait de lui être acquittée, car le denier vaut moins d’un franc — et il l’étranglait en lui disant : «Paie, si tu dois quelque chose». Insensible à ses supplications, il le jeta en prison jusqu’à ce qu’il ait tout payé. Illustration fidèle de notre manière d’agir envers ceux qui nous ont fait tort. Oubliant l’énormité de la dette de péché qui nous a été acquittée, nous ne pouvons pardonner les torts relativement insignifiants que nous ont faits nos frères, et si même nous disons que nous avons pardonné, nous l’oublions avec peine, tandis que Dieu dit : «Je ne me souviendrai plus jamais de leurs péchés ni de leurs iniquités» (Hébreux 10:17). Dans nos rapports avec nos frères, nous devons toujours nous rappeler comment Dieu a agi envers nous et sentir notre absolue culpabilité devant lui.
Dans son royaume, Dieu agit aussi selon son gouvernement, d’après la manière dont nous aurons traité nos frères, car toutes choses portent leurs conséquences. Les autres serviteurs, voyant ce que fit cet homme, indignés, le rapportèrent au roi qui livra ce méchant esclave aux bourreaux, jusqu’à ce qu’il ait tout payé. Le Seigneur ajoute : «Ainsi aussi mon Père céleste vous fera, si vous ne pardonnez pas de tout votre cœur, chacun à son frère».
Cette parabole peut s’appliquer à Israël comme peuple ; il avait une dette énorme envers Dieu, consommée par le rejet de son Fils. En vertu de l’intercession de Christ sur la croix : «Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu’ils font», Dieu avait, pour ainsi dire, remis la dette à son peuple, c’est-à-dire que ses jugements ne l’avaient pas frappé tout de suite après la croix ; l’Évangile, présenté aux Juifs, les invitait à se repentir. Mais tout en profitant de la miséricorde de Dieu, ils s’opposèrent à ce que cette grâce dont ils étaient eux-mêmes les objets soit annoncée aux Gentils, représentés par celui qui devait cent deniers. Paul dit d’eux : «Nous empêchant de parler aux nations afin qu’elles soient sauvées, pour combler toujours la mesure de leurs péchés ; mais la colère est venue sur eux au dernier terme» (1 Thessaloniciens 2:16). C’est ce qui arriva selon le juste gouvernement de Dieu : le peuple fut livré aux bourreaux, emmené par les Romains, chassé parmi les Gentils, jusqu’à ce que, selon Ésaïe, il ait reçu le double pour tous ses péchés (Ésaïe 40:2).
Jésus continue son œuvre d’amour en guérissant les foules qui le suivaient de Galilée en Judée. Au lieu d’être touchés par les œuvres qu’il accomplissait, les pharisiens viennent à lui pour chercher, par des questions, à le mettre en opposition avec les enseignements de Moïse, donnés pour le régime de la loi. Ils demandent si un homme a le droit de renvoyer sa femme, chose autorisée par la loi de Moïse, à cause de la dureté de cœur des Juifs. Le Seigneur leur dit qu’au commencement il n’en était pas ainsi. Dieu a créé l’homme et la femme pour qu’ils soient unis à toujours sur la terre. L’homme ne doit jamais déroger à l’ordre divinement établi ; l’homme ne doit pas être séparé de sa femme, cela d’autant moins sous le régime de la grâce où la dureté du cœur ne saurait trouver de place dans nos rapports ; au contraire, nous avons à nous aimer tous, à nous supporter, à nous pardonner les uns aux autres, surtout entre mari et femme, et dans la même famille.
Nous voyons, par l’enseignement du Seigneur, que, pour connaître la vérité sur une question, il faut toujours revenir aux origines, considérer ce que Dieu a fait et comment il l’a fait. L’homme altère tout, modifie tout ; il veut tout arranger selon ses goûts et ses convenances, et dénature ce que Dieu a établi. Il oublie la responsabilité qui lui incombe de se conformer à la pensée de Dieu à tous égards, car c’est d’après cette mesure que le jugement sera prononcé à la fin. De là l’importance qu’il y a de rechercher en toute circonstance la pensée de Dieu ; nous la trouvons toujours dans sa Parole.
La débonnaireté et la grâce que manifestait le Sauveur et ses pensées à l’égard des petits enfants engageaient leurs parents à les lui apporter, afin qu’il leur impose les mains et qu’il prie. C’était là une chose agréable à son cœur, il aimait trouver ces petits êtres qui venaient à lui sans crainte, en pleine confiance, attirés par la grâce que l’homme orgueilleux, l’homme fait, endurci par le péché, repoussait avec mépris.
Ce qui étonne, c’est d’entendre les reproches de ses disciples, malgré tout ce qu’ils avaient vu précédemment (chap. 18). Le cœur naturel, étranger aux pensées de grâce qui doivent caractériser les disciples de Jésus dans le royaume des cieux, croit que ce que l’homme estime doit convenir à Dieu. Le Seigneur profite de cette circonstance pour rappeler encore une fois que c’est à de tels qu’est le royaume des cieux. Sans ce caractère-là, inutile d’avoir une prétention quelconque à y entrer et à le posséder. Or puisque le royaume des cieux appartient à ceux qui ressemblent aux petits enfants, il faut bien se garder d’empêcher ceux-ci d’aller à Jésus. Dans leur simplicité enfantine, comme leur nature pécheresse ne s’est pas encore développée au contact du monde et des enseignements des hommes, ils vont tout naturellement à Jésus. Aussi doit-on veiller à ne rien faire, soit en paroles soit en actions, qui puisse détourner un enfant de la simplicité de la foi au Seigneur Jésus.
Quelle triste preuve nous avons de l’état du cœur de l’homme, dans le fait que le développement de l’intelligence humaine contribue à l’éloigner de Dieu, à s’opposer à lui, tandis que, dans l’état d’innocence, c’était par l’intelligence qui le distinguait de la bête qu’il pouvait avoir des rapports avec Dieu et être heureux dans sa présence ! Le péché a fait éclore la conscience, cette faculté de connaître le bien et le mal. Alors l’homme a fui ce Dieu, la source de tout bien pour lui ; et dans cet éloignement de lui, sans désir d’un rapprochement, le péché que le cœur aime se pratique librement et entretient la peur de Dieu. Chez le petit enfant, plus ou moins inconscient du péché, toutefois sans être innocent, il n’y a pas cette frayeur et cette haine à l’égard de celui que nous avons offensé ; il est dans l’état le plus proche de celui où Dieu avait placé l’homme. C’est pourquoi il ne fuit pas et, s’il ne va pas à Jésus, c’est parce qu’on l’en empêche de diverses manières. Puissent tous ceux qui ont une responsabilité quelconque vis-à-vis des enfants y penser sérieusement !
Le Seigneur continue à faire ressortir que les pensées des hommes, quant au bien et quant à la grandeur, sont opposées à celles de Dieu, même celles qui pouvaient provenir de l’enseignement légal qui s’appliquait à l’homme naturel.
Un homme bien disposé s’approche de Jésus, lui disant : «Maître, quel bien ferai-je pour avoir la vie éternelle ?» Il vient avec la pensée qu’il y a quelque chose de bon en lui qui le rendra capable de mériter la vie éternelle par le bien qu’il pourrait accomplir. C’est pourquoi le Seigneur répond premièrement : «Pourquoi m’interroges-tu touchant ce qui est bon ? Un seul est bon». Nous savons que ce seul est Dieu.
La loi promettait la vie ici-bas à celui qui l’aurait observée ; le Seigneur cite cette partie des commandements qu’un homme pouvait encore accomplir. Le jeune homme lui répond : «J’ai gardé toutes ces choses ; que me manque-t-il encore ?» Il voulait avoir non seulement les bénédictions que la loi offrait sur la terre, mais encore la vie éternelle. Or, bien qu’il n’ait pas tué, ni commis adultère, ni volé, ni dit de faux témoignages, rien de cela ne pouvait lui donner des bénédictions éternelles. Un seul moyen existait : Jésus était venu dans ce monde pour en ouvrir le chemin. Il fallait le suivre avec un cœur détaché des choses terrestres. C’est pourquoi le Seigneur lui répond : «Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu as, et donne aux pauvres ; et tu auras un trésor dans le ciel ; et viens, suis-moi. Et le jeune homme, ayant entendu cette parole, s’en alla tout triste, car il avait de grands biens». Combien de personnes lui ressemblent ! Elles savent qu’il leur manque quelque chose pour être heureuses en pensant à l’avenir ; mais elles veulent garder la jouissance des biens de ce monde, ne rien abandonner, surtout ne pas suivre Christ. Sa personne n’a aucun attrait pour leur cœur, les jouissances de ce monde en ont infiniment plus et elles sacrifient l’avenir au présent ; aussi leur part est-elle misérable et elles ont leurs biens actuels avec la tristesse de ne pouvoir mêler le ciel avec la terre et elles n’ont aucune certitude pour l’avenir. Si elles persistent dans cette voie jusqu’à la fin, elles auront en partage un éternel malheur. En utilisant les biens de cette vie pour d’autres, à cause du Seigneur, on ne les perd pas ; au contraire, ils se transforment en bénédictions célestes et éternelles, comme le Seigneur l’enseigne ailleurs aussi ; puis, en suivant Jésus, on arrive où son chemin a abouti, dans la gloire éternelle, car lui est «le chemin, la vérité et la vie».
Voyant l’effet de ses paroles sur ce jeune homme, Jésus dit à ses disciples : «En vérité, je vous dis qu’un riche entrera difficilement dans le royaume des cieux ; et je vous le dis encore : Il est plus facile qu’un chameau entre par un trou d’aiguille, qu’un riche n’entre dans le royaume de Dieu». Ici encore, les disciples n’entrent pas dans la pensée de Jésus. Ils s’étonnent et disent : «Qui donc peut être sauvé ?» Sous le gouvernement de Dieu, les richesses terrestres appartenaient à ceux qui faisaient le bien ; Dieu les bénissait de cette manière ; mais ils ne comprenaient pas que ces biens terrestres n’avaient rien à faire avec la vie éternelle, puisqu’on ne pouvait en jouir qu’ici-bas. Ils pensaient que les riches, apparemment les objets de la faveur de Dieu, entreraient plus facilement dans le royaume des cieux, cela toujours parce qu’ils considéraient les choses au point de vue des mérites de l’homme et non à celui de la grâce. Ces biens, au contraire, retenant le cœur et l’attachant à la terre, constituaient un grand obstacle lorsqu’il s’agissait de tout abandonner pour un trésor qui, bien que réel, céleste et éternel, était, pour le moment, invisible, et pour suivre un Christ méprisé qui n’avait pas un lieu où reposer sa tête, dans un monde où l’homme perdu possède de «grands biens». Les pauvres, ayant moins de jouissances ici-bas, moins à laisser, moins considérés par les hommes, acceptent plus facilement la grâce, venue à eux dans la personne de Jésus. Le Seigneur répond aux disciples de Jean le Baptiseur : «L’Évangile est annoncé aux pauvres» (chap. 11:5).
À la question des disciples : «Qui donc peut être sauvé ?» Jésus répond : «Pour les hommes, cela est impossible ; mais pour Dieu, toutes choses sont possibles». Que des hommes trouvent moins d’obstacles sur leur chemin que d’autres pour venir à Jésus, il est également impossible, aux uns comme aux autres, d’être sauvés. Mais, grâce à Dieu, Lui peut tout, et il a fait tout le nécessaire pour que de pauvres coupables, perdus et ruinés, incapables de quoi que ce soit, puissent trouver un salut parfait qu’il offre gratuitement à quiconque l’accepte par la foi au Seigneur Jésus.
Pierre ayant entendu ce que le Seigneur avait dit au jeune homme riche, comprend que le renoncement aux avantages présents pour suivre le Seigneur aura une récompense. Il pense aussitôt aux disciples qui avaient tout quitté pour suivre Jésus, et lui dit : «Voici, nous avons tout quitté et nous t’avons suivi ; que nous adviendra-t-il donc ?» Cette question nous montre que les disciples avaient répondu à l’appel du Seigneur et s’étaient attachés à sa personne sans songer à une récompense. Le Seigneur, qui le reconnaît et l’apprécie, leur répond : «En vérité, je vous dis que vous qui m’avez suivi, — dans la régénération, quand le Fils de l’homme se sera assis sur le trône de sa gloire, vous aussi, vous serez assis sur douze trônes, jugeant les douze tribus d’Israël». La «régénération» désigne ici le millénium ; car, pour le règne de Christ, tout sera régénéré, renouvelé. Au lieu de pouvoir accomplir cette régénération lors de sa venue, le Messie avait été rejeté. Néanmoins il régnera en son temps, et les disciples, qui l’avaient suivi dans sa rejection, qui avaient tout quitté pour partager son humiliation, auraient, dans le règne, une position glorieuse en rapport avec le renoncement qu’ils avaient accepté en suivant Jésus ici-bas. S’ils ont enduré avec Christ le mépris, s’ils ont partagé le caractère de celui qui n’insistait pas sur ses droits, lorsqu’il les fera valoir, ils partageront avec lui l’exercice de la justice, jugeant tout particulièrement les tribus d’Israël au milieu desquelles ils auront été non comme des juges, mais comme des agneaux au milieu des loups.
Les douze ne recevront pas seuls une récompense en rapport avec ce qui aura été fait ici-bas. Jésus ajoute : «Et quiconque aura quitté maisons, ou frères, ou sœurs, ou père, ou mère, ou femme, ou enfants, ou champs, pour l’amour de mon nom, en recevra cent fois autant, et héritera de la vie éternelle». On voit qu’il ne s’agit pas de tout quitter en vue d’une récompense, mais bien pour l’amour du Seigneur. Il faut avoir vu, en sa personne, la grâce, l’amour qui attirent le cœur ; comment ne le suivrait-on pas, lorsqu’on le voit quitter lui-même la gloire du ciel pour venir dans ce monde souillé, sous la forme d’un homme, afin de mourir pour des pécheurs sur cette croix infâme où il a souffert pour nos péchés, le juste pour les injustes ? Y a-t-il besoin d’une autre considération pour suivre le Seigneur et pour renoncer à tout ce qui pourrait nous empêcher de le servir fidèlement, serait-ce bien père, mère, femme ou enfant ? Lui-même, son nom glorieux, expression d’une telle grâce, suffit pour attirer à lui. Mais, dans sa bonté infinie, après nous avoir fourni de tels motifs pour le suivre et le servir, il veut récompenser ce que nous aurons fait pour l’amour de son nom. La récompense sert donc d’encouragement et jamais de motif d’action. Comme pour les disciples, la récompense se rapportera aux circonstances dans lesquelles nous aurons suivi le Seigneur. Aucun de nous ne pourra siéger sur un trône pour juger les douze tribus d’Israël, parce que ce n’est pas au milieu d’Israël que nous nous trouvons pour suivre le Seigneur et lui rendre témoignage. Chaque temps a son caractère propre, et le Seigneur seul est juge de ce qu’il accordera à chacun. Incapables de juger selon Dieu, nous n’avons pas à apprécier cela aujourd’hui. C’est pourquoi le Seigneur ajoute : «Mais plusieurs qui sont les premiers seront les derniers, et des derniers seront les premiers». Plusieurs qui, aux yeux des autres, paraissent les premiers aujourd’hui, seront les derniers au jour où Dieu montrera ce qu’il aura apprécié dans leur conduite. Et de ceux qui paraissent les derniers, qui, par leur caractère d’humilité, auront su s’effacer, occuperont une place que le Seigneur donne à ceux qu’il estime les premiers. «À toi, Seigneur, est la bonté ; car toi tu rends à chacun selon son œuvre» (Psaume 62:12).
Afin que l’on ne perde pas de vue que tout est grâce dans la dispensation actuelle, même s’il s’agit des récompenses, et que l’on ne pense pas que telle tâche accomplie aura telle rétribution, le Seigneur donne la parabole du maître de maison qui engage des ouvriers pour travailler à sa vigne. Avec ceux qui sont engagés à la première heure, il convient du prix : un denier par jour. Il sort encore à la troisième, à la sixième, à la neuvième heure, même à la onzième, et, trouvant des ouvriers qui ne faisaient rien, les envoie à sa vigne, en leur disant : «Vous recevrez ce qui sera juste». Ils y vont, sans convenir de prix, s’en remettant à la justice et à la bonté du maître. Le soir venu, celui-ci commence par payer ceux qui ont été les derniers au travail et donne un denier à ceux de la onzième heure. Voyant cela, les premiers s’attendent à recevoir plus ; mais le maître ne leur donne pas davantage. Alors ils murmurent et disent : «Ces derniers n’ont travaillé qu’une heure, et tu les as faits égaux à nous qui avons porté le faix du jour et la chaleur. Et lui, répondant, dit à l’un d’entre eux : Mon ami, je ne te fais pas tort : n’es-tu pas tombé d’accord avec moi pour un denier ? Prends ce qui est à toi et va-t’en. Mais je veux donner à ce dernier autant qu’à toi. Ne m’est-il pas permis de faire ce que je veux de ce qui est mien ? Ton œil est-il méchant, parce que moi, je suis bon ?» La faute des premiers venait de ce qu’ils avaient pris pour base d’estimation le salaire des derniers, et non la bonté du maître. Puis celui-ci seul sait apprécier la valeur du travail fait, car il y en a qui, venus à la onzième heure, peuvent avoir rendu de plus grands services que ceux qui ont peiné la journée entière. Mais par-dessus tout, le maître est absolument libre d’agir selon sa grâce souveraine et de faire ce qui lui plaît de ses biens. Ainsi «les derniers seront les premiers, et les premiers les derniers». Tout est toujours grâce de la part du Seigneur.
Ainsi, pour ne pas risquer d’être déçu, il ne faut pas calculer avec Dieu. Soyons heureux de ce qu’il a bien voulu nous appeler à travailler dans sa vigne, satisfaits d’être les objets de sa pure et merveilleuse grâce, nous qui ne méritons que le jugement éternel. Travaillons à tout ce que le Seigneur place devant nous, en ayant pour mobile cette grâce merveilleuse ; laissons-lui l’appréciation de notre travail sans attendre sur une récompense, tout en sachant que la même grâce tiendra compte de ce qui aura été fait pour lui, et cela, selon sa justice.
Si Jésus pouvait parler à de pauvres pécheurs de gloire et de récompense dans l’éternité, c’est parce qu’il était sur le chemin qui le conduisait à la croix, où il allait porter toute la peine de leurs péchés, en subissant le jugement qu’ils avaient mérité. Il montait à Jérusalem avec ses disciples, voyage qu’il accomplissait pour la dernière fois depuis la Galilée. Il éprouvait le besoin de leur dire ce qui lui arriverait. C’est la troisième fois que nous entendons Jésus les entretenir de sa mort et de sa résurrection (voir chap. 16:21, 17:22, 23). Mais les disciples, plus préoccupés de la gloire du royaume que du chemin qui y conduisait, n’entraient pas dans cette pensée de la mort de leur Maître, mort qui était toujours devant lui et dont dépendait tout leur avenir. Quelle souffrance pour le Seigneur, dans ce monde, que de se voir incompris des disciples, méconnu et méprisé par son peuple !
La mère de Jean et de Jacques s’approche pour lui demander qu’il ordonne que ses deux fils soient l’un à sa droite et l’autre à sa gauche dans son royaume. Une bonne place dans le royaume les préoccupait davantage que les souffrances et la mort du Seigneur, et ils pensaient encore moins que, sans cette mort, ils n’auraient point de place dans le royaume. Jésus leur dit : «Vous ne savez ce que vous demandez. Pouvez-vous boire la coupe que moi, je vais boire ? Ils lui disent : Nous le pouvons. Et il leur dit : Vous boirez bien ma coupe ; mais de s’asseoir à ma droite et à ma gauche, n’est pas à moi pour le donner, sinon à ceux pour lesquels cela est préparé par mon Père».
Le Seigneur avait dit précédemment aux disciples que, parce qu’ils avaient tout quitté et l’avaient suivi, ils siégeraient sur douze trônes. Ils n’avaient retenu que cette promesse, sans comprendre l’abaissement et le renoncement de Jésus, la position de dépendance qu’il avait prise au milieu d’eux ; il allait à la mort pour qu’ils aient une part avec lui dans la gloire, au lieu de la condamnation éternelle qu’ils méritaient. Dans cette position de dépendance, il leur dit que ce n’est pas à lui de donner les places dans son royaume ; c’est l’affaire de son Père. Il avait auparavant à boire la coupe de souffrance et de mort, et les disciples devaient la partager avec lui en suivant un chemin de souffrance. Ils avaient peine à apprendre cette leçon, et nous aussi, car nous aimerions avoir la gloire sans les souffrances, chose impossible à cause du péché. Mais, «si nous souffrons, nous régnerons aussi avec Lui» (2 Timothée 2:12). L’apôtre Paul, qui avait vu Christ dans la gloire et qui savait qu’il y serait avec lui et comme lui, dit qu’il veut «le connaître, lui, et la puissance de sa résurrection, et la communion de ses souffrances, étant rendu conforme à sa mort, si en quelque manière que ce soit je puis parvenir à la résurrection d’entre les morts» (Philippiens 3:10, 11). Les autres disciples s’indignèrent à l’égard de Jacques et de Jean, sans comprendre mieux qu’eux, sans doute, la position qu’ils avaient à prendre ici-bas. Alors Jésus leur montra la différence qui existe entre la grandeur humaine et la grandeur selon Dieu. «Vous savez que les chefs des nations dominent sur elles, et que les grands usent d’autorité sur elles. Il n’en sera pas ainsi parmi vous ; mais quiconque voudra devenir grand parmi vous sera votre serviteur ; et quiconque voudra être le premier parmi vous, qu’il soit votre esclave ; de même que le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir et pour donner sa vie en rançon pour plusieurs». Le chemin de la grandeur est donc l’abaissement pour servir ; or comme nul ne s’est abaissé autant que Christ, nul ne sera haut élevé comme lui, auquel son Dieu, en le plaçant au-dessus de tout, «a donné un nom au-dessus de tout nom, afin qu’au nom de Jésus se ploie tout genou des êtres célestes, et terrestres, et infernaux» (Philippiens 2:9, 10). Ceux donc qui aspirent à une place tout près de lui dans la gloire, doivent le suivre de près ici-bas dans cette vie de renoncement, d’humiliation, de dévouement, de service et de souffrance.
Que Dieu nous enseigne à prendre le chemin de la vraie grandeur, non de la grandeur éphémère de ce monde-ci, mais de la grandeur divine et éternelle. Soyons les imitateurs de celui qui s’est abaissé jusqu’à la mort de la croix pour nous sauver, en le suivant dans l’humilité et l’obéissance, bien peu de temps peut-être, avant d’être introduits dans la gloire éternelle, avec lui et semblables à lui !
Toujours en chemin pour Jérusalem, Jésus sort de Jéricho, suivi d’une grande foule. Deux aveugles, assis au bord du chemin, quand ils apprirent que Jésus passait, s’écrièrent : «Aie pitié de nous, Seigneur, Fils de David !» La foule cherche à les faire taire. On voit l’esprit qui l’animait ; ce n’était pas la grâce de la personne de Jésus qui attirait après lui, mais des motifs charnels, une vaine gloire. Conscients de leurs besoins, et conscients de la grâce et de la puissance qui se trouvaient en Jésus, les aveugles crièrent plus fort : «Aie pitié de nous, Seigneur, Fils de David. Et Jésus, s’arrêtant, les appela et dit : Que voulez-vous que je vous fasse ? Ils lui disent : Seigneur, que nos yeux soient ouverts. Et Jésus, ému de compassion, toucha leurs yeux ; et aussitôt leurs yeux recouvrèrent la vue ; et ils le suivirent». On remarquera que ces aveugles en appellent au fils de David. Ils représentent ceux qui, en Israël, avaient la foi au Messie, bien que ce fût la dernière heure de sa présentation au peuple ; ils ont les yeux ouverts, le reçoivent et le suivent tel qu’il est, et se trouvent ainsi sur le chemin de la gloire, au lieu d’être enveloppés dans les jugements qui tombèrent sur le peuple pour avoir rejeté le Fils de David.
Mais ce récit nous présente d’autres enseignements. À côté de vrais besoins qui font crier à Jésus, on voit l’indifférence de la foule à l’égard de ces besoins, et son effort pour empêcher qu’il y soit répondu. N’en est-il pas de même aujourd’hui, au milieu de la foule qui fait profession de suivre Christ, qui se réclame du nom de chrétien. Si l’on entend la voix de quelqu’un qui cherche le Seigneur, dans la conscience de sa misère et de son état de perdition, on cherche à l’étouffer. Mais celui qui sent le poids de ses péchés et le malheur éternel qui l’attend, ne se laissera pas détourner par les efforts du monde ; il criera d’autant plus fort à celui qui peut le délivrer ; ce cri touchera le cœur du Sauveur, toujours ému de compassion envers le pécheur, et il lui donnera le pardon et la paix. Dès lors, il suivra Jésus, parce qu’il connaît son amour, où que passe son chemin ; par amour pour lui, il le suivra jusqu’au bout de la course, pour jouir ensuite avec lui du repos et de la gloire éternels.
Si, parmi nos lecteurs, il se trouvait encore quelqu’un qui ne posséde pas le salut éternel, qu’il crie au Seigneur. Qu’il ne s’inquiète pas de ce que peut penser de sa conversion le monde qui l’entoure et qu’il a peut-être écouté jusqu’ici ; il ne peut qu’empêcher d’aller à Jésus, et, s’il réussit à en détourner, il ne répondra pour personne au jour du jugement. Comme Satan, son prince, il vous laissera subir seul votre terrible sort, sans pouvoir vous distraire. Ayez seulement conscience de votre perdition et de votre culpabilité. Si vous avez déjà crié, si le monde a pu vous retenir, criez encore et vous rencontrerez le Seigneur dont le cœur est encore ému de compassion ; il ne désire que répondre à votre cri de détresse pour vous placer à sa suite en sécurité, sur le chemin de la gloire éternelle. Mais hâtez-vous ! Le temps passe rapidement. Comme le Seigneur passait pour la dernière fois dans le chemin qui allait à Jérusalem et allait être caché pour toujours à ce peuple désobéissant, peut-être est-ce la dernière fois que la grâce vous est présentée. Profitez-en !
Le temps s’en va, l’heure s’écoule :
Qui sait où nous serons demain !
Jésus est ici dans la foule ;
Ah ! saisissez sa main !
Jésus approchait de Jérusalem ; il se trouvait avec ses disciples à Bethphagé, près de la montagne des Oliviers, en face d’un autre village qui n’est pas nommé. Il y envoya deux de ses disciples en disant : «Allez au village qui est vis-vis de vous, et aussitôt vous trouverez une ânesse attachée, et un ânon avec elle ; détachez-les et amenez-les-moi. Et si quelqu’un vous dit quelque chose, vous direz : Le Seigneur en a besoin ; et aussitôt il les enverra». Quoique rejeté et se rendant à Jérusalem, non pour y recevoir la royauté, mais pour y mourir, Jésus était cependant le roi, le fils de David, présenté comme tel à son peuple, afin que ce peuple soit sans excuse quant à sa culpabilité de l’avoir rejeté. En Zacharie 9:9, nous lisons : «Dites à la fille de Sion : Voici, ton roi vient à toi, débonnaire et monté sur une ânesse et sur un ânon, le petit d’une ânesse». Malgré la débonnaireté et l’humilité qui caractérisaient Jésus, il agissait avec l’autorité qui lui appartenait comme Seigneur ; sur son ordre, les disciples amenèrent l’ânesse et l’ânon, sans que personne fasse d’opposition. Ils mirent leurs vêtements dessus en guise de selle, et Jésus s’y assit. Une foule immense aussi étendait ses vêtements sur le chemin ; d’autres coupaient des rameaux des arbres pour en tapisser la voie royale qui conduisait le fils de David dans la cité du grand roi, selon les coutumes orientales. Afin qu’un témoignage public soit rendu à Jésus comme roi, les foules qui le précédaient, comme celles qui le suivaient, se trouvant momentanément sous l’action de la puissance divine, criaient : «Hosanna au fils de David ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! Hosanna dans les lieux très hauts !» Elles acclamaient ainsi le Messie par le cri que fera entendre de nouveau le résidu d’Israël dans un temps à venir, cri par lequel il exprimera l’ardent désir de la délivrance, alors qu’il souffrira sous la puissance diabolique du faux roi, et avec le sentiment douloureux d’avoir rejeté le Messie lorsqu’il lui fut présenté, ainsi que nous le lisons au Psaume 118:25, 26. «Hosanna» veut dire : «Sauve, je te prie». Au chapitre 23:38, 39 de notre Évangile, Jésus dit aux Juifs : «Voici, votre maison vous est laissée déserte, car je vous dis : Vous ne me verrez plus désormais, jusqu’à ce que vous disiez : Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur !» Les Juifs ne revirent plus le Seigneur, sauf à la croix, et ne le reverront pas jusqu’au moment où il apparaîtra en gloire pour la délivrance du résidu préparé à le recevoir en passant par la grande tribulation.
«Comme il entrait dans Jérusalem, toute la ville fut émue, disant : Qui est celui-ci ? Et les foules disaient : Celui-ci est Jésus, le prophète, qui est de Nazareth de Galilée». À Jérusalem, personne ne s’attendait à une telle manifestation, car le moment approchait où l’on prendrait des mesures pour faire mourir Jésus. L’émotion que causait l’arrivée du Messie rappelle celle qu’occasionnèrent plus de trente ans auparavant, dans la même ville, les mages d’Orient, quand ils demandèrent où était le roi des Juifs qui venait de naître. Hérode en fut troublé et tout Jérusalem avec lui (Chap. 2:3). Combien cela dénote l’état misérable de ce peuple, troublé par ce qui devait être pour lui un sujet de joie ! Il n’en sera pas autrement pour le monde lorsque Jésus reviendra. Il apparaîtra «à salut à ceux qui l’attendent». Mais ce sera un sujet de trouble et d’angoisse pour ceux qui n’auront rien voulu de lui, un jour «brûlant comme un four» (Malachie 4:1, 2). Pendant un moment ils pourront dire : «Paix et sûreté» ; puis une subite destruction viendra sur eux et ils n’échapperont point (1 Thes. 5:3). On peut remarquer que, lorsque Jésus entre dans Jérusalem, les foules, en répondant à la question : «Qui est celui-ci ?» ne disent pas : «C’est le fils de David» ; elles le confessent comme «le prophète, qui est de Nazareth de Galilée», ce qui était vrai, mais elles ne l’acclamaient pas comme tel tout à l’heure. Il semble qu’en présence des Juifs de Jérusalem, tout particulièrement opposés à Christ, elles n’osent plus le confesser comme le fils de David ; c’était moins compromettant de l’appeler : «Jésus, le prophète, qui est de Nazareth de Galilée». Pour confesser vraiment Jésus rejeté, il faut la foi ; inutile de se trouver sous une impression passagère, si juste soit-elle. Nous verrons plus loin qui sont ceux qui osent rendre témoignage à Jésus en présence de ses ennemis.
Que Dieu nous garde tous d’avoir honte de confesser le Seigneur Jésus ! Il faut toujours penser que celui qui est aujourd’hui méprisé est celui devant lequel tout genou devra se ployer.
Le Seigneur use de son autorité pour purifier le temple de tout ce qui était étranger à sa destination, car il était écrit : «Ma maison sera appelée une maison de prière» (Ésaïe 56:7). C’est tout particulièrement ce qu’elle sera lorsque le Seigneur l’aura purifiée à sa seconde venue et qu’il établira la bénédiction dont parle ce chapitre d’Ésaïe. Au lieu d’une maison de prière, les Juifs en avaient fait une caverne de voleurs ; l’Éternel en avait déjà adressé le reproche à leurs pères en Jérémie 7:11 : «Cette maison qui est appelée de mon nom, est-elle une caverne de voleurs à vos yeux ?» Mais ici, Jésus dit positivement : «Vous en avez fait une caverne de voleurs». C’était, en effet, un vrai lieu de commerce où se tenaient des changeurs de monnaie et où l’on vendait du bétail et des colombes à ceux qui venaient de loin pour sacrifier à l’Éternel. On peut comprendre comment, avec les dispositions commerciales des enfants de Jacob et le manque de conscience qui accompagne souvent l’amour de l’argent, on avait fait de ce lieu sacré une caverne de voleurs. Hélas ! n’est-ce pas ce que le Seigneur dit, en d’autres termes, de ce qui aujourd’hui porte le nom de «maison de Dieu» sur la terre, et qui sera aussi l’objet de ses terribles jugements ? (Apocalypse 18:11-19). Au lieu de se conduire d’une manière digne de la maison de Dieu, l’homme y a introduit le monde et tous ses caractères de mal.
Si le Seigneur agit contre le mal dans la maison de son Père avec l’autorité qui lui appartient comme roi, son cœur est toujours le même envers ceux qui, sentant leur état, ont besoin de lui. Des aveugles et des boiteux viennent à lui dans le temple et il les guérit. La foi sait profiter de la puissance en grâce, dans le moment même où ceux qui l’ont rejetée ont affaire avec cette puissance en jugement. C’est ce qui aura lieu aussi lorsque Christ viendra comme roi : le résidu croyant sera reçu en grâce, tandis que les incrédules seront l’objet du jugement. En même temps les petits enfants crient dans le temple ce qu’ils avaient entendu crier au-dehors, car eux ne doutaient aucunement que Jésus ne soit le fils de David. «Les principaux sacrificateurs et les scribes, voyant les merveilles qu’il faisait, et les enfants criant dans le temple et disant : Hosanna au fils de David ! en furent indignés, et lui dirent : Entends-tu ce que ceux-ci disent ? Mais Jésus leur dit : Sans doute ; n’avez-vous jamais lu : Par la bouche des petits enfants et de ceux qui tettent, tu as établi ta louange ?» Tels étaient l’endurcissement et la haine de ces hommes que les merveilles que Jésus faisait et le témoignage qui lui était rendu les indignaient ; aussi est-il dit : «Et les ayant laissés, il sortit de la ville et s’en alla à Béthanie». Il n’y a plus rien à faire avec eux. Ils sont laissés à leur terrible sort.
Dans les aveugles, les boiteux et les petits enfants, nous trouvons les caractères de ceux qui veulent profiter de la grâce et de la puissance de Jésus. Les aveugles et les boiteux représentent deux traits de l’état naturel de l’homme, sans capacité pour voir ni pour marcher selon Dieu ; mais ceux qui se reconnaissent tels viennent à Jésus et sont guéris. Comme nous le savons, les petits enfants représentent ceux qui ont la foi simple, nécessaire pour recevoir ce que Dieu dit dans sa Parole, afin que quiconque croit ait la vie éternelle. Remarquons combien la vérité s’impose d’elle-même au cœur des simples, des enfants. Ces petits enfants avaient entendu crier que Jésus était le fils de David ; ils ne demandaient pas d’explications qu’auraient pu leur donner ceux qui l’exprimaient avec enthousiasme, lorsque toute la foule le criait. Ce qu’ils entendaient était ce que la parole de Dieu avait dit ; cela suffisait à leur foi simple qui est la vraie foi. Il est important de retenir que la foi croit Dieu sans explications, lorsqu’elle entend sa Parole. «La foi est de ce qu’on entend, et ce qu’on entend par la parole de Dieu» (Romains 10:17).
Jésus passa la nuit à Béthanie ; comme il retournait à Jérusalem le lendemain matin, il eut faim. «Voyant un figuier sur le chemin, il s’en approcha ; et il n’y trouva rien que des feuilles ; et il lui dit : Que jamais aucun fruit ne naisse plus de toi ! Et à l’instant le figuier sécha». Ce figuier représente soit le peuple d’Israël, soit l’homme dans son état naturel ; Dieu en attendait du fruit, et il avait fait le nécessaire pour cela (Luc 13:6-9). Mais malgré la belle apparence du feuillage, symbole de la profession, il n’y avait aucun fruit. Le Seigneur condamne un état pareil ; Dieu n’attendra plus de fruit de cet arbre ; l’homme en Adam est jugé, le figuier a séché. Dieu opérera lui-même pour obtenir du fruit.
Les disciples s’étonnent de voir le figuier sécher en un instant. Ils pouvaient penser que c’était un acte de puissance dont le Seigneur seul était capable. Mais Jésus leur dit : «En vérité, je vous dis : Si vous avez de la foi et que vous ne doutiez pas, non seulement vous ferez ce qui a été fait au figuier, mais si même vous disiez à cette montagne : Ôte-toi et jette-toi dans la mer, cela se ferait. Et quoi que vous demandiez en priant, si vous croyez, vous le recevrez». Une montagne représente une grande puissance et, par conséquent, une grande difficulté à vaincre ; mais la foi dispose de la puissance de Dieu, et ainsi peut tout ce qui est selon sa volonté. La liaison entre cette exhortation et le jugement porté par Jésus sur le figuier se trouve dans le fait que les disciples, après le départ de Jésus, auraient affaire avec Israël jugé et condamné et rencontreraient de grandes difficultés, beaucoup d’opposition de sa part, mais la foi en triompherait. Israël, comme peuple incrédule, a été en réalité comme une montagne jetée dans la mer des nations, lors de la destruction de Jérusalem. Mais l’exhortation du Seigneur s’applique à toutes les difficultés que nous pouvons rencontrer et dans lesquelles, par la foi, nous pouvons user de la puissance divine. «Quoi que vous demandiez en priant, si vous croyez, vous le recevrez». Il va sans dire que Dieu n’exauce que les prières conformes à sa volonté.
De nouveau, les sacrificateurs et les anciens du peuple demandent à Jésus en vertu de quel droit il venait chasser du temple les vendeurs et les acheteurs, et renverser les tables des changeurs. Ils ne pouvaient supporter l’autorité de Jésus, car ils avaient la prétention de la posséder eux seuls et d’être les conducteurs du peuple. Le Seigneur, dans sa parfaite sagesse, répond en leur posant une question à laquelle ils ne peuvent répliquer sans se compromettre : «Je vous demanderai,» dit-il, «moi aussi, une chose ; et si vous me la dites, je vous dirai, moi aussi, par quelle autorité je fais ces choses. Le baptême de Jean, d’où était-il ? du ciel, ou des hommes ? Et ils raisonnaient en eux-mêmes, disant : Si nous disons : Du ciel, il nous dira : Pourquoi donc ne l’avez-vous pas cru ? Et si nous disons : Des hommes, nous craignons la foule, car tous tiennent Jean pour un prophète. Et, répondant, ils dirent à Jésus : Nous ne savons».
Dieu avait envoyé Jean comme précurseur du Messie qui venait d’entrer triomphalement dans Jérusalem. S’ils confessaient que son ministère venait de Dieu — ce qu’ils savaient très bien — non seulement ils devaient le recevoir, lui, mais aussi le Christ qu’il leur avait annoncé, et enseigner eux-mêmes au peuple à recevoir son Messie.
Ces hommes prétentieux préfèrent passer pour ignorants plutôt que d’énoncer une vérité qui les condamnait devant Dieu, ou une chose erronée qui les aurait exposés à la colère de la foule. Aussi le Seigneur leur répond : «Moi non plus, je ne vous dis pas par quelle autorité je fais ces choses». À quoi cela aurait-il servi ? Ils avaient décidé de ne pas croire en lui.
Si le Seigneur ne répond pas à leur question, il leur montre leur misérable état au moyen d’une parabole. Il leur dit : «Un homme avait deux enfants ; et venant au premier, il dit : Mon enfant, va aujourd’hui travailler dans ma vigne. Et lui, répondant, dit : Je ne veux pas ; mais après, ayant du remords, il y alla. Et venant au second, il dit la même chose ; et lui, répondant, dit : Moi j’y vais, seigneur ; et il n’y alla pas. Lequel des deux fit la volonté du père ? Ils lui disent : Le premier. Jésus leur dit : En vérité, je vous dis que les publicains et les prostituées vous devancent dans le royaume de Dieu. Car Jean est venu à vous dans la voie de la justice, et vous ne l’avez pas cru ; mais les publicains et les prostituées l’ont cru ; et vous, l’ayant vu, vous n’en avez pas eu de remords ensuite pour le croire».
On saisit facilement le sens de cette parabole grâce à l’explication que Jésus en donne. Le premier enfant représente, en Israël, la classe de ceux qui ont grossièrement péché, les publicains et les gens de mauvaise vie qui ne se souciaient pas de la loi. Mais à la voix de Jean le Baptiseur, qui les appelait à la repentance, ils eurent du remords. Ils n’accomplirent pas la loi de Moïse, il est vrai, mais ils crurent Jean ; ils devinrent ces enfants de la sagesse dont Jésus a parlé au v. 19 du chap. 11. Les bons Juifs, les chefs du peuple, menaient extérieurement une conduite honorable, ils pouvaient, comme le pharisien (Luc 18), rendre grâce de ce qu’ils n’étaient pas comme le reste des hommes, ni comme le publicain qui se frappait la poitrine, voyant la vraie manière d’obéir à Dieu, c’est-à-dire de croire ; mais ils ne voulurent pas imiter les pécheurs repentants, de sorte que, tout en prétendant travailler à la vigne de Dieu, ils n’en firent rien ; c’est pourquoi ils étaient mis de côté et se trouvaient à la veille du jugement.
La grâce brille partout où elle se manifeste. Lorsque l’homme eut fait tout ce qu’il fallait pour périr éternellement loin de Dieu, Dieu ne vint pas lui présenter quelque chose à faire. Les Juifs, quels qu’ils aient été, devaient croire ce que Jean le Baptiseur leur disait de la part de Dieu ; ceux qui crurent Jean, crurent le Seigneur. Aujourd’hui, de même, si l’on croit la Parole qui apporte à la conscience la lumière de Dieu quant au péché, on croit aussi au Seigneur Jésus, venu pour se charger, sur la croix, de tous les péchés qui accablaient la conscience ; on est sauvé. La grâce apporte le salut et ne demande rien, sinon de l’accepter.
Dans la parabole des cultivateurs de la vigne, Jésus donne un exposé de l’histoire d’Israël, responsable de porter du fruit pour Dieu ; il se trouvait dans une position privilégiée pour cela. Dieu est comparé à un maître de maison qui planta une vigne, l’environna d’une clôture, y creusa un pressoir, et y bâtit une tour. Dans l’Ancien Testament déjà, Israël est assimilé à une vigne (Psaume 80:8-17 ; Ésaïe 5:1-7). La vigne plantée, soignée chaque année, doit rapporter du fruit ; c’est bien l’image de la nature humaine dont Dieu, en Israël, s’est occupé en vain. Le Maître avait tout fait pour la protection de cette vigne, afin que les cultivateurs puissent lui remettre les fruits qui lui étaient dus. «Et lorsque la saison des fruits approcha, il envoya ses esclaves aux cultivateurs pour recevoir ses fruits. Et les cultivateurs, ayant pris ses esclaves, battirent l’un, tuèrent l’autre, et en lapidèrent un autre. Il envoya encore d’autres esclaves en plus grand nombre que les premiers, et ils leur firent de même». Ces esclaves sont les prophètes que Dieu envoya aux Juifs lorsqu’ils se détournaient de l’Éternel pour servir les idoles, afin de les rappeler à l’observation de la loi qu’ils abandonnaient si facilement. Au lieu de les écouter, ils les maltraitèrent et les tuèrent. Longtemps après, Dieu envoya son Fils disant : «Ils auront du respect pour mon Fils. Mais les cultivateurs, voyant le fils, dirent entre eux : Celui-ci est l’héritier ; venez, tuons-le, et possédons son héritage. Et l’ayant pris, ils le jetèrent hors de la vigne et le tuèrent». Si le cœur du peuple, et tout particulièrement celui des chefs, avait pu être touché, ce la aurait été par la venue du Fils de Dieu ; mais elle a démontré leur état irrémédiablement mauvais, et, par ce fait, l’état de l’homme dans la chair. Non seulement ils refusaient de rendre à Dieu ce qui lui était dû, mais ils souhaitaient d’être maîtres de l’héritage. L’homme ne veut rien avoir à faire avec Dieu ; l’ayant chassé de ce monde, il croit en être le maître. C’est ce qui a lieu aujourd’hui dans la chrétienté : on ne veut pas plus de Christ qu’au temps de sa présentation à Israël.
Jésus leur dit : «Quand donc le maître de la vigne viendra, que fera-t-il à ces cultivateurs-là ? Ils lui disent : Il fera périr misérablement ces méchants, et louera sa vigne à d’autres cultivateurs, qui lui remettront les fruits en leur saison». Ils prononcent eux-mêmes leur propre jugement ; ce qu’ils disent leur est arrivé, car, en réalité, ces malheureux Juifs ont péri misérablement lors de la destruction de Jérusalem par les Romains. La vigne a été louée à d’autres, c’est-à-dire que Dieu a agi d’une tout autre manière avec les hommes pour obtenir du fruit. Comme nous l’avons vu dans la parabole du semeur (chap. 13), au lieu de réclamer du fruit de l’homme naturel, Dieu a opéré dans le cœur, par sa Parole, pour produire une vie nouvelle qui le rende capable de servir le Seigneur.
Par leurs propres Écritures, le Seigneur montre aux Juifs ce qui leur arriverait s’ils le rejetaient : «La pierre que ceux qui bâtissaient ont rejetée, celle-là est devenue la maîtresse pierre du coin ; celle-ci est de par le Seigneur, et est merveilleuse devant nos yeux» (Psaume 118:22, 23). Et il ajoute : «C’est pourquoi je vous dis que le royaume de Dieu vous sera ôté, et sera donné à une nation qui en rapportera les fruits. Et celui qui tombera sur cette pierre sera brisé ; mais celui sur qui elle tombera, elle le broiera».
Les bâtisseurs étaient tout particulièrement les chefs, ceux qui avaient une responsabilité au milieu du peuple. Si la bénédiction ne les avait pas atteints à cause de leur désobéissance, Dieu avait par devers lui celui qui est la pierre du coin, sur laquelle tout reposait pour l’accomplissement des promesses. Les chefs, qui avaient assumé la responsabilité de bâtisseurs, auraient dû agir selon la pensée de Dieu à l’égard de cette pierre, élue, précieuse, choisie par Dieu ; mais comme des hommes inexpérimentés, incapables de reconnaître la valeur d’une pierre qualifiée pour occuper l’angle d’une construction, ils l’ont rejetée. On voit comment les pensées de l’homme sont opposées à celles de Dieu ; rien ne l’a démontré autant que la venue de son Fils ici-bas.
Cette pierre n’ayant pas été utilisée par les bâtisseurs, ils sont tombés sur elle et ont été brisés, c’est-à-dire que la chute et la destruction du peuple ont eu pour cause le rejet de Christ. Après le temps de la grâce, qui a commencé après la mort de Jésus, le Seigneur sera de nouveau présenté aux Juifs ; ceux qui ne le recevront pas alors subiront des jugements plus terribles encore que ceux qui eurent lieu par le fait des Romains, ainsi que nous l’enseigne le chapitre 24. Ce ne seront pas les Juifs qui tomberont sur la pierre, mais la pierre — Christ venant du ciel — tombera sur eux et les broiera, par les jugements qui s’exécuteront alors. Le Seigneur fait, sans doute, allusion à la petite pierre dont parle Daniel (2:34). Détachée de la montagne, elle détruit les empires des nations, et ceux des Juifs qui se seront associés à eux.
Les principaux sacrificateurs et les pharisiens, ayant entendu ces paroles, connurent qu’il parlait d’eux. Au lieu de chercher, en recevant Jésus, à éviter le malheur auquel ils s’étaient préparés, ils tâchent de se saisir de lui, mais n’osent pas à cause des foules, qui le tenaient pour un prophète.
Dans cette parabole Jésus ne donne pas une figure de l’état d’Israël dans le passé, comme il l’a fait avec les cultivateurs de la vigne. C’est une parabole du royaume des cieux, royaume tel qu’il s’établirait à la suite du rejet du roi. Il commence bien par la présentation de Christ aux Juifs, montre les conséquences de leur refus et continue par l’appel des Gentils à jouir de ce qu’Israël avait refusé. «Le royaume des cieux a été fait semblable à un roi qui fit des noces pour son fils».
Quel contraste entre les pensées de Dieu et celles des hommes ! Le roi — Dieu — veut faire des noces pour son Fils, et les hommes veulent le faire mourir. Mais à cette pensée du roi se rattache la grâce merveilleuse qui veut faire participer le pécheur aux noces dont seul le fils était digne. C’est donc des pensées de Dieu envers son Fils que découle le bonheur éternel des invités, car si Dieu avait agi envers nous selon ce que nous méritions, nous ne devions connaître que les ténèbres de dehors, loin de la scène de bonheur qui a le Fils pour centre. Le roi envoya ses esclaves pour convier les invités aux noces, mais ils ne voulurent pas venir. Cette première invitation eut lieu pour les Juifs pendant que Jésus était sur la terre ; appelés à jouir des bénédictions que leur apportait le Fils de Dieu, ils refusèrent. Après la mort de Jésus, Dieu envoya encore d’autres esclaves, les apôtres, aux conviés, toujours les Juifs, disant : «Voici, j’ai apprêté mon dîner ; mes taureaux et mes bêtes grasses sont tués et tout est prêt : venez aux noces». En effet, par le sacrifice de Christ à la croix, tout était prêt, afin que ces coupables pussent jouir de la grâce qui leur était offerte. Au lieu de cela, sans se repentir d’avoir mis à mort leur Messie, se croyant maîtres de l’héritage, ils ne tinrent aucun compte de cette seconde invitation et «s’en allèrent, l’un à son champ, et un autre à son trafic ; et les autres, s’étant saisis de ses esclaves, les outragèrent et les tuèrent». C’est ce que le livre des Actes nous présente. Dès lors, c’en était fait d’Israël qui avait refusé Christ lorsqu’il se trouvait ici-bas et qui le refusait encore après sa mort. «Le roi... en fut irrité ; et ayant envoyé ses troupes, il fit périr ces meurtriers-là et brûla leur ville». C’est ce qui arriva lorsque l’armée romaine détruisit Jérusalem. Alors le message de grâce fut adressé aux nations. Le roi dit à ses esclaves : «Les noces sont prêtes, mais les conviés n’en étaient pas dignes ; allez donc dans les carrefours des chemins, et autant de gens que vous trouverez, conviez-les aux noces. Et ces esclaves-là, étant sortis, s’en allèrent par les chemins, et assemblèrent tous ceux qu’ils trouvèrent, tant mauvais que bons ; et la salle des noces fut remplie de gens qui étaient à table». Les apôtres et les disciples de Jésus sortirent des limites d’Israël et annoncèrent l’Évangile aux nations. Ce travail de la grâce s’est accompli jusqu’à nos jours. Tous ont été invités à prendre place à la table de la grâce pour y jouir des bénédictions célestes et éternelles qui sont en Christ. Mais la parabole dépasse, dans son enseignement, le temps où nous sommes, pour montrer ce qui arrivera, à la fin de la dispensation actuelle, à ceux qui auront pris place à la table du Roi, sans s’être conformés à ses pensées. Le moment va venir où il prendra connaissance des résultats du message qu’il envoie à tous. «Et le roi, étant entré pour voir ceux qui étaient à table, aperçut là un homme qui n’était pas vêtu d’une robe de noces. Et il lui dit : Ami, comment es-tu entré ici, sans avoir une robe de noces ? Et il eut la bouche fermée. Alors le roi dit aux serviteurs : Liez-le pieds et mains, emportez-le, et jetez-le dans les ténèbres de dehors : là seront les pleurs et les grincements de dents. Car il y a beaucoup d’appelés, mais peu d’élus».
Le temps actuel est celui dans lequel les invités se mettent à table ; mais une chose est nécessaire pour pouvoir y rester et jouir du festin éternel auquel Dieu a convié tous les hommes. On ne peut figurer là, dans la présence de Dieu, que revêtu d’un vêtement qui convienne à sa sainteté, à la gloire de sa nature. Comment comprendre, nous, misérables pécheurs, souillés, ce qui lui est dû ? Si nous l’avons compris, comment nous procurer un vêtement digne de Dieu, propre à manifester sa propre gloire, la gloire de son Fils, en vue duquel les noces sont faites ? En Orient, autrefois, celui qui invitait à une noce fournissait lui-même la robe dont il voulait voir ses convives revêtus. Ce costume se rapportait naturellement à ses goûts, à sa richesse ; lui seul pouvait le procurer tel qu’il lui convenait, car tout, dans cette fête, devait servir à manifester la gloire et la grandeur de celui qui invitait ; tout devait être digne de lui. Si donc, comme le roi de la parabole, un homme très riche voulait inviter des mendiants et des pauvres, il devait nécessairement fournir tout lui-même, non seulement le festin, mais aussi la robe. Cet exemple illustre bien la pensée de Dieu et sa manière d’agir envers de pauvres pécheurs indignes et sans ressources. Si l’Évangile nous appelle à prendre part aux noces du Fils du Roi, il faut nous laisser revêtir de Christ, qui est la robe de noce, la justice divine que Dieu s’est acquise pour le pécheur, par le sacrifice de Christ à la croix. Ce sacrifice a ôté de dessus le coupable et de devant Dieu, par le jugement, tout ce qu’est le pécheur, tous les péchés qu’il a commis ; il les a remplacés par ce qu’est Christ, maintenant ressuscité et glorifié, dans la présence de Dieu. Celui qui croit cela est revêtu de Christ et pourra jouir éternellement du festin que Dieu a préparé pour le pécheur.
De tous ceux qui auront accepté le christianisme comme profession religieuse, qui se seront assis à la table du roi ici-bas, ceux-là seuls qui se seront laissés revêtir de Christ en le recevant comme Sauveur pourront supporter les regards du Roi, dont les yeux sont trop purs pour voir le mal, et passer l’éternité dans la gloire de sa présence. Que fera celui qui ne se soucie pas de ce qui convient à la présence de Dieu, toujours satisfait de lui-même, prêt à se trouver meilleur que les autres ? Que fera-t-il lorsque les regards du Dieu trois fois saint se dirigeront sur sa personne et manifesteront toute la souillure de ce qui était pur à ses propres yeux ? Il aura la bouche fermée ; incapable de se défendre, lié pieds et mains, il sera jeté dans les ténèbres de dehors, là où sont les pleurs et les grincements de dents.
Que l’on se juge bon ou mauvais, ce qui est nécessaire pour tous, c’est d’être revêtu de Christ, de le posséder comme sa justice, pour être, comme Paul le dit : «Trouvé en lui, n’ayant pas ma justice qui est de la loi, mais celle qui est par la foi en Christ, la justice qui est de Dieu, moyennant la foi» (Philippiens 3:9). Tous nos lecteurs sont-ils en Christ ? «Il n’y a donc maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont dans le Christ Jésus» (Romains 8:1).
Les diverses classes des Juifs se présentent devant Jésus pour chercher à l’embarrasser par des questions. Mais elles doivent se retirer toutes, jugées par lui.
Les pharisiens lui envoient leurs disciples avec les hérodiens, deux classes de personnes absolument opposées l’une à l’autre. Les pharisiens conservaient tout ce qui appartenait au peuple juif : religion, traditions, coutumes, tandis que les hérodiens défendaient la puissance romaine, joug insupportable aux pharisiens surtout. Ils viennent à Jésus avec flatteries et disent : «Maître, nous savons que tu es vrai et que tu enseignes la voie de Dieu en vérité, et que tu ne t’embarrasses de personne, car tu ne regardes pas à l’apparence des hommes. Dis-nous donc, que t’en semble : est-il permis de payer le tribut à César, ou non ?»
Une réponse affirmative du Seigneur le mettrait, pensaient-ils, en contradiction avec lui-même, puisqu’il était le roi des Juifs. Une réponse négative les autoriserait à l’accuser de méconnaître la puissance romaine. «Jésus, connaissant leur méchanceté, dit : Pourquoi me tentez-vous, hypocrites ? Montrez-moi la monnaie du tribut. Et ils lui apportèrent un denier. Et il leur dit : De qui est cette image et cette inscription ? Ils lui disent : De César. Alors il leur dit : Rendez donc les choses de César à César, et les choses de Dieu à Dieu. Et l’ayant entendu, ils furent étonnés ; et le laissant, ils s’en allèrent».
Le Seigneur reconnaît l’autorité de César sur les Juifs, car c’est Dieu qui les avait placés sous le pouvoir des Gentils, précisément parce qu’ils n’avaient pas rendu à Dieu ce qui lui appartenait. Ils devaient donc se soumettre à la domination romaine. En même temps ils avaient à reconnaître les droits de Dieu sur eux ; mais ils ne faisaient ni l’un ni l’autre. Ils se retirèrent donc confus de devant la sagesse de celui qui, comme ils le disaient par flatterie, ne s’embarrassait de personne. Ils en avaient fait l’expérience.
Viennent à leur tour les sadducéens qui représentent le parti rationaliste des Juifs (voir Actes 23:8) et pensent embarrasser Jésus par une question touchant la résurrection qu’ils niaient. Ils supposent le cas d’une femme qui épousa successivement sept frères ; car, selon la loi de Moïse, si un homme mourait sans enfant, le frère de cet homme devait épouser la veuve. Ils demandent à Jésus auquel de ces sept hommes cette femme appartiendrait à la résurrection. Jésus leur répond : «Vous errez, ne connaissant pas les Écritures, ni la puissance de Dieu ; car, dans la résurrection, on ne se marie ni on n’est donné en mariage, mais on est comme des anges de Dieu dans le ciel. Et quant à la résurrection des morts, n’avez-vous pas lu ce qui vous est dit par Dieu, disant : «Moi, je suis le Dieu d’Abraham, et le Dieu d’Isaac, et le Dieu de Jacob» (Exode 3:6) ? Dieu n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants». Puisqu’ils refusaient de croire, les sadducéens étaient dans l’erreur et ne connaissaient pas la puissance de Dieu. L’incrédulité, toujours bornée, limite la sphère du pouvoir de Dieu à celle de l’homme. Seule la foi peut rendre intelligent dans les pensées de Dieu, telles que sa Parole les expose. Après la résurrection, les relations naturelles auront pris fin. Dieu les a formées pour la terre ; elles cessent avec la mort. Déjà ici-bas, s’il s’agit de la nouvelle création, «toutes choses sont faites nouvelles» (2 Corinthiens 5:17), et il n’y a ni homme, ni femme (voir Galates 3:28). Les ressuscités seront non des anges, mais comme eux, quant à la nature de l’être ; ils auront des corps, ce que les anges n’ont pas, puisqu’ils sont «des esprits» (Hébreux 1:14), et ne se marient pas. Voilà quant à l’état de ceux qui seront ressuscités.
Le Seigneur fournit ensuite la preuve de la résurrection. Il la tire du fait que Dieu, lorsqu’il parlait à Moïse depuis le buisson de feu (Exode 3:6), s’appelle : «le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac, et le Dieu de Jacob». À ce moment-là, deux cents ans environ s’étaient écoulés depuis la mort du dernier de ces patriarches et pourtant Dieu s’appelle leur Dieu. Or, comme Dieu n’est pas le Dieu des morts, le fait qu’il s’appelle leur Dieu longtemps après leur décès, prouve qu’ils vivent ; Dieu ne dit pas qu’il était le Dieu d’Abraham, etc., mais qu’il l’est. Outre cela, tous ces patriarches n’avaient pas reçu les choses promises (Hébreux 11:13-16). Il faut donc qu’ils ressuscitent pour qu’ils puissent en jouir ; car, si la mort a séparé l’âme du corps, ce n’est pas pour toujours. Tous les hommes se retrouveront comme Dieu les a créés, corps et âme réunis : ceux qui auront cru, pour jouir de la félicité éternelle, et ceux qui n’auront pas cru, pour porter éternellement la peine de leurs péchés.
Quand les foules eurent entendu la réponse de Jésus, elles s’étonnèrent de sa doctrine. Si elles avaient cru qui il était, elles n’auraient pas été étonnées, car de quoi le Fils de Dieu n’est-il pas capable ?
De nos jours, les sadducéens du christianisme sont nombreux et cherchent à égarer par leur prétendue sagesse. Il y a un seul moyen de ne pas se laisser détourner par leurs raisonnements, c’est de croire les Écritures, croire Dieu plutôt que sa pauvre créature déchue, égarée dans les ténèbres qu’elle préfère à la lumière divine. Un jour viendra, le jour du Seigneur, où tous les habiles raisonneurs de ce siècle auront la bouche fermée ; ils verront leurs erreurs, mais trop tard pour se repentir.
Dieu veuille que tous nos lecteurs, et la jeunesse particulièrement, ferment leurs oreilles à la voix trompeuse du raisonnement humain et matérialiste, pour écouter Dieu pendant qu’il en est temps ! «Inclinez votre oreille et venez à moi ; écoutez, et votre âme vivra» (Ésaïe 55:3). «Mon fils, cesse d’écouter l’instruction qui fait errer loin des paroles de la connaissance» (Proverbes 19:27).
Les pharisiens, secte opposée aux sadducéens, viennent encore à Jésus avec une question touchant la loi, toujours pour l’éprouver : «Maître», demande l’un d’eux, «quel est le grand commandement dans la loi ? Et il lui dit : «Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, et de toute ton âme, et de toute ta pensée. C’est là le grand et premier commandement. Et le second lui est semblable : Tu aimeras ton prochain comme toi-même». Les pharisiens, paraît-il, cherchaient à déterminer l’importance relative des divers commandements, afin d’attribuer plus de mérites à ceux qui auraient accompli les plus grands. Jésus leur montre que ce qui donne aux commandements leur valeur, c’est le motif qui fait agir, l’amour pour Dieu et pour son prochain. Si cet amour existe, la loi s’accomplira. «De ces deux commandements dépendent la loi tout entière et les prophètes». Les prophètes ont toujours cherché, par amour pour Dieu et leur prochain, à ramener le peuple à l’observation de la loi.
Par la participation à la nature divine, le chrétien est rendu capable d’aimer Dieu et son prochain, d’accomplir ainsi la pensée de Dieu dans la loi, et même de la dépasser. En imitant Christ, qui a laissé sa vie pour des ennemis, nous devons laisser nos vies pour nos frères (1 Jean 3:16). «L’amour ne fait point de mal au prochain ; l’amour donc est la somme de la loi» (Romains 13:10).
Après avoir vu passer devant lui tous ces interrogateurs, le Seigneur pose aux pharisiens une question relative à sa personne. Il leur demande d’abord : «Que vous semble-t-il du Christ ? — de qui est-il fils ? Ils lui disent : De David». Puisqu’il en est ainsi, voici une autre question embarrassante pour eux : «Comment donc David, en Esprit, l’appelle-t-il seigneur, disant : «Le Seigneur a dit à mon seigneur : Assieds-toi à ma droite, jusqu’à ce que je mette tes ennemis sous tes pieds ?» Si donc David l’appelle seigneur, comment est-il son fils ?» Si le fils de David n’avait pas dû être rejeté par son peuple, l’Esprit de Dieu n’aurait pas mis ces paroles dans la bouche du roi-prophète au Psaume 110. Par son rejet, le Seigneur allait prendre une position nouvelle, recevoir la domination sur toutes choses et attendre, dans la gloire, que Dieu mette ses ennemis sous ses pieds. La question des pharisiens démontrait aussi la culpabilité de ceux qui étaient considérés comme ses ennemis et elle les jugeait. «Et personne ne pouvait lui répondre un mot ; et personne, depuis ce jour-là, n’osa plus l’interroger».
Les pharisiens ne veulent pas de cette sagesse qui les confond ; ils aiment mieux rester dans leur ignorance et leur haine contre Jésus qui les poussera à se débarrasser de lui, à se priver eux-mêmes de tout espoir de salut. Que de personnes, de nos jours, se trouvent dans le même cas ! L’intelligence naturelle peut constater plus ou moins la sagesse et la vérité des Écritures et de la personne de Jésus ; mais on n’aime pas la vérité, car elle place le cœur et la conscience en présence de la lumière qui en montre le véritable état ; on préfère ne pas approfondir ces réalités, au lieu de demeurer en présence de la vérité qui conduit au Sauveur. Comme Félix en Actes 24:25, beaucoup ont dit : «Pour le présent va-t’en ; quand je trouverai un moment convenable, je te ferai appeler». La chair refuse de se présenter devant le Seigneur ; si donc l’on attend qu’elle y consente, on trouvera la porte fermée. Le moment convenable est «aujourd’hui». Laisser passer ce moment, c’est endurcir son cœur et s’exposer à la perdition éternelle.
Le triste état des chefs du peuple ayant été démontré, Jésus éprouve le besoin de mettre en garde les foules et les disciples contre leur manière d’agir, pour qu’ils distinguent la marche des scribes et des pharisiens d’avec la Parole qu’ils enseignaient. Leur respect extérieur pour la Parole divine faisait prendre en considération leur marche ; c’est bien ce qui devrait toujours avoir lieu. Mais il y avait contradiction absolue entre leur conduite et la loi qu’ils plaçaient devant le peuple. Celle-ci demeurait cependant la même dans sa perfection divine, et, si ceux qui la présentaient ne s’y conformaient pas, ceux qui les écoutaient devaient faire ce qu’ils disaient et ne pas imiter leurs actes. Quel contraste entre la conduite de ces hommes et celle de l’apôtre Paul qui pouvait dire : «Ce que vous avez et appris, et reçu, et entendu, et vu en moi, — faites ces choses» (Philippiens 4:9).
Jésus dit : «Les scribes et les pharisiens se sont assis dans la chaire de Moïse (c’est-à-dire qu’ils enseignent comme lui). Toutes les choses donc qu’ils vous diront, faites-les et observez-les ; mais ne faites pas selon leurs œuvres, car ils disent et ne font pas ; mais ils lient des fardeaux pesants et difficiles à porter (c’est-à-dire se montrent très exigeants pour l’accomplissement de la loi) et les mettent sur les épaules des hommes, mais eux, ils ne veulent pas les remuer de leur doigt». Ceux qui prêchent sans mettre en pratique ce qu’ils disent sont exigeants envers les autres, parce qu’ils ne connaissent pas la difficulté qu’il y a à faire céder sa volonté propre devant celle de Dieu, surtout au temps où la loi était donnée à l’homme dans la chair dont la volonté ne se soumet pas à celle de Dieu. Ces gens-là faisaient devant les hommes des œuvres qui leur donnaient l’apparence de la piété ; mais il n’y avait dans leur cœur que l’orgueil et la recherche de leur propre satisfaction. Ils élargissaient leurs phylactères (*), voulant, en cela, pratiquer l’enseignement de Deutéronome 6:8 ; 11:18, mais sans que le cœur soit touché par ces paroles. Partout ils cherchaient les premières places, les salutations en public ; ils aimaient à être appelés : «Rabbi», titre honorifique qui signifie maître, dans le sens d’un grade obtenu, tandis que Jésus dit : «Mais vous, ne soyez pas appelés : Rabbi ; car un seul est votre conducteur, le Christ ; et vous, vous êtes tous frères. Et n’appelez personne sur la terre votre père ; car un seul est votre Père, celui qui est dans les cieux. Ne soyez pas non plus appelés conducteurs ; car un seul est votre conducteur, le Christ». Toutes ces exhortations mettent en garde contre l’esprit clérical ; le caractère dominant du clergé est de se placer entre Dieu et les âmes et de rechercher l’honneur qui revient à Dieu seul. Cela conduit à l’hypocrisie ; car, pour s’attirer la faveur des hommes, il faut chercher à paraître ce que l’on n’est pas. Que Dieu nous garde d’un tel esprit !
(*) Bandes de parchemin sur lesquelles étaient écrits des passages de la loi et que l’on portait sur le bras gauche et sur le front.
Jésus termine cette partie de son discours en indiquant le vrai caractère du serviteur : «Mais le plus grand de vous sera votre serviteur. Et quiconque s’élèvera sera abaissé ; et quiconque s’abaissera sera élevé». Nous le savons, l’expression parfaite du vrai Serviteur a été manifestée en Christ, le véritable Conducteur. Il s’est abaissé pour servir, comme nous l’avons vu au chapitre 20:28. C’est pourquoi Dieu l’a haut élevé. Quel contraste avec ce qu’il signale chez les scribes et les pharisiens aux v. 6 à 8 ! Puissions-nous tous, petits et grands, être pénétrés de l’esprit de Christ dans son service, ne cherchant jamais à paraître, mais toujours à servir, en nous effaçant naturellement et en attendant que Dieu montre son appréciation de notre marche et de notre service !
Le Seigneur s’adresse maintenant aux scribes et aux pharisiens hypocrites en prononçant sept fois «malheur» sur leurs différentes manières d’agir et en dénonçant les divers traits de leur iniquité.
Le premier «malheur» (v. 13) est attiré sur eux par le fait qu’ils fermaient le royaume des cieux devant les hommes ; non seulement ils n’y entraient pas eux-mêmes, mais ils ne permettaient pas aux autres d’y entrer. Tout le long du ministère de Jésus, ils s’étaient opposés à lui, parce qu’ils voulaient garder leur position au milieu du peuple dans l’ancien système juif, où leur orgueil naturel trouvait sa satisfaction, tandis que, pour entrer dans le royaume, il fallait reconnaître l’autorité de Christ et devenir comme les petits enfants.
Au lieu de cela, ils cherchaient à gagner des prosélytes, c’est-à-dire, à faire adopter, en tout ou en partie, la religion juive à des étrangers ; mais loin d’être un moyen de salut pour eux, cela ne faisait qu’augmenter leur culpabilité. À cause de cela, un second «malheur» est prononcé sur eux.
Dans les v. 16-22, Jésus leur reproche d’avoir établi certaine manière de jurer qui avait plus de valeur dans un cas que dans un autre. Ils faisaient méconnaître ce qui avait une valeur réelle aux yeux de Dieu et, par conséquent, détournaient de lui pour fixer la pensée sur la matière, ce qui a lieu pour toute religion de forme. Ils attiraient par là sur eux un troisième «malheur». La quatrième fois que Jésus prononce un «malheur», c’est en dénonçant l’hypocrisie avec laquelle les pharisiens observaient strictement certains détails de la loi ; ils payaient la dîme de la menthe, de l’aneth et du cumin, chose sans grande importance, mais qui les faisait passer aux yeux des hommes pour de fidèles observateurs de la loi. En revanche, ils négligeaient ce qui était le plus important : «le jugement et la miséricorde et la fidélité». Pour les pratiquer, il faut un état d’âme exercé par la Parole, qui permette de discerner ce qui est juste envers Dieu et d’être miséricordieux envers ses semblables, tandis qu’on peut s’acquitter de ces actes purement matériels sans avoir à faire avec Dieu et sans qu’il en coûte rien. Non que l’on doive faire abstraction des détails de la loi. Jésus dit : «Il fallait faire ces choses-ci, et ne pas laisser celles-là».
Ces guides aveugles coulaient ainsi le moucheron et avalaient le chameau ; scrupuleux pour de petites choses en présence de leurs frères, ils étaient sans conscience envers Dieu pour l’accomplissement de sa volonté. Nous avons à prendre garde de leur ressembler, car notre nature nous porte facilement à agir selon leurs principes.
Les deux «malheurs» que Jésus prononce ensuite contre eux sont en rapport avec l’hypocrisie qui les faisait paraître justes aux hommes. Ils étaient comme des coupes et des plats nettoyés au-dehors, mais pleins, au-dedans, de rapine et d’intempérance. La rapine, c’est l’action de s’approprier ce qui ne vous appartient pas en abusant de la position que l’on occupe, et l’intempérance est le manque de sobriété à tous égards. Ils auraient dû nettoyer leur cœur de ces choses, afin que la pureté qui paraissait au-dehors, vienne du dedans et soit vraie. Le Seigneur les compare aussi à des sépulcres blanchis. En Orient, on blanchit souvent les sépulcres, pour leur donner une belle apparence ; mais cela ne change rien à l’intérieur, qui est rempli d’ossements et d’impuretés. De même, ces hypocrites, malgré leur extérieur de pureté, n’en avaient pas moins leur cœur rempli de tout ce qu’il y a de plus souillé aux yeux de Dieu, ce dont la mort est l’image. Souvenons-nous tous que Dieu veut de la réalité dans le cœur et que personne ne peut le tromper par l’apparence. À quoi sert de paraître devant les hommes ce que l’on n’est pas devant Dieu ? C’est devant Dieu qu’il faudra être manifesté un jour (lire 2 Corinthiens 5:10).
Le dernier «malheur» prononcé sur les scribes et les pharisiens l’est parce qu’ils bâtissaient des tombeaux aux prophètes que leurs pères avaient tués, sans être dans un meilleur état qu’eux quoiqu’ils aient dit : «Si nous avions été dans les jours de nos pères, nous n’aurions pas pris part avec eux au sang des prophètes». On peut considérer comme une action très pieuse le fait de bâtir des monuments aux prophètes, qui avaient été mis à mort dans le temps où Israël était idolâtre, mais ces prophètes, en rappelant le peuple à la loi, annonçaient la venue de Christ (voir Actes 7:52), et maintenant que Christ était au milieu d’eux, ils ne l’écoutaient pas plus que leurs pères n’avaient prêté l’oreille aux prophètes ; ils portaient les mêmes caractères que leurs pères et comblaient leur mesure. Aussi le Seigneur allait les mettre à l’épreuve, pour qu’ils manifestassent s’ils valaient mieux que leurs ancêtres : «C’est pourquoi», leur dit-il, «voici, moi, je vous envoie des prophètes, et des sages, et des scribes ; et vous en tuerez et vous en crucifierez, et vous en fouetterez dans vos synagogues, et vous les persécuterez de ville en ville, en sorte que vienne sur vous tout le sang juste versé sur la terre, depuis le sang d’Abel le juste, jusqu’au sang de Zacharie, fils de Barachie, que vous avez tué entre le temple et l’autel. En vérité, je vous dis : toutes ces choses viendront sur cette génération». La patience dont Dieu avait usé envers son peuple, — et par ce fait, envers l’homme, — est bien grande, depuis les jours où le premier juste avait été mis à mort. Au travers des diverses dispensations, Dieu avait tout essayé avant d’exécuter le jugement. Mais de quelque manière que Dieu ait agi, l’homme, au lieu de se repentir, a manifesté envers lui une opposition, parvenue à son apogée lorsqu’il a mis à mort son Fils, venu en grâce. Comme dit le Seigneur en Jean 15:22-24 : «Ils n’ont pas de prétexte pour leur péché... maintenant ils ont, et vu, et haï et moi et mon Père». Il allait encore leur envoyer des prophètes, des sages et des scribes (Jésus désigne ainsi les apôtres qui viendraient après son départ) et ils allaient les traiter comme leurs pères avaient traité les prophètes. Ils feraient preuve d’un état pire encore, parce qu’ils jouissaient de privilèges plus grands et n’avaient retiré aucun enseignement des voies de Dieu envers le peuple. Ainsi la responsabilité, accumulée sur les hommes durant tout le temps de la patience de Dieu, serait frappée par les jugements qui fondraient sur eux. C’est pourquoi Jésus dit : «En vérité, je vous dis : toutes ces choses viendront sur cette génération». La même solennelle vérité, pour les mêmes raisons, est proclamée à l’égard de Babylone, l’Église responsable, en Apocalypse 18:24.
En annonçant le jugement sur Israël, Jésus est ému de compassion envers Jérusalem, centre de ce système de méchanceté qui allait subir les jugements de Dieu. Son amour avait travaillé depuis des siècles, mais toujours en vain, pour ramener ce peuple rebelle. Jésus, qui est l’Éternel de l’Ancien Testament, avait déjà dit, lors de la transportation du peuple à Babylone, qu’il avait envoyé «vers eux par ses messagers, se levant de bonne heure et envoyant, car il avait compassion de son peuple et de sa demeure» (2 Chroniques 36:15). Ici, à cette heure solennelle, il s’écrie : «Jérusalem, Jérusalem, la ville qui tue les prophètes et qui lapide ceux qui lui sont envoyés, que de fois j’ai voulu rassembler tes enfants comme une poule rassemble ses poussins sous ses ailes, et vous ne l’avez pas voulu ! Voici, votre maison vous est laissée déserte, car je vous dis : Vous ne me verrez plus désormais, jusqu’à ce que vous disiez : Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur !»
Quelles paroles solennelles sorties de la bouche de Celui qui était venu en amour à ce peuple bien-aimé ! Mais la dureté de l’homme avait constamment refoulé cet amour au-dedans du cœur de Jésus et l’empêchait de le manifester plus longtemps à son peuple selon la chair. Ce même amour allait conduire Jésus à la croix et là, par son sacrifice, rendre possibles, sur le pied de la grâce, les bénédictions que les Juifs refusaient.
Lorsque Jésus apparaîtra en gloire, le résidu souffrant l’appellera et dira : «Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur !», «Hosanna au fils de David !» selon le Psaume 118:26. C’est pourquoi Jésus dit : «Vous ne me verrez plus... jusqu’à ce que vous disiez : Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur !»
Jésus sortit et s’en alla du temple, accomplissant ce qu’il avait dit aux Juifs au v. 38 du chapitre précédent : «Voici, votre maison vous est laissée déserte». Il le quitta pour n’y plus rentrer. Moment solennel pour le peuple, s’il avait pu le comprendre ! Si les disciples ne saisissaient pas réellement la chose, tout au moins avaient-ils l’impression que ce magnifique temple était mis de côté, car en chemin ils en firent considérer à Jésus les bâtiments qui offraient un aspect imposant à qui sortait de Jérusalem. Ils étaient, comme tout Juif, attachés à cette maison, avec un orgueil bien légitime, puisqu’elle avait été construite pour servir de demeure à l’unique et vrai Dieu. Mais puisqu’il était rejeté dans la personne de son Fils, le temple n’avait plus sa raison d’être. Le Seigneur leur répond : «Ne voyez-vous pas toutes ces choses ? En vérité, je vous dis : Il ne sera point laissé ici pierre sur pierre qui ne soit jetée à bas».
Comme le Seigneur était assis sur la montagne des Oliviers, située en face de Jérusalem, de l’autre côté du Cédron, d’où l’on voit toute la ville, les disciples vinrent à lui en particulier et lui dirent : «Dis-nous quand ces choses auront lieu, et quel sera le signe de ta venue et de la consommation du siècle». Ils désiraient donc savoir quand Jérusalem et le temple seraient détruits, et comment on pourrait connaître le moment de la venue de Christ et de la fin du siècle qui précédait le règne millénaire. La réponse du Seigneur est donnée en parties distinctes avec des enseignements divers et des exhortations utiles aux fidèles qui auraient à traverser les temps qui devaient s’écouler jusqu’à sa venue. Ces enseignements comprennent encore tout le chapitre 25.
Dans l’évangile selon Matthieu, Jésus ne répond pas directement à la première question relative à la destruction du temple ; cette réponse entre mieux dans le cadre du récit de Luc ; aussi la trouvons-nous littéralement au chapitre 21 de son évangile (v. 20-24), où est prédite la destruction de Jérusalem par Titus, passée sous silence par Matthieu qui a surtout en vue les jours de la fin et l’établissement du règne de Christ qui remplacerait l’état de choses d’alors.
On peut diviser en trois parties la réponse du Seigneur à la question : «Quel sera le signe de ta venue et de la consommation du siècle ?» 1° versets 4-14 ; 2° versets 15-28 ; 3° versets 29-31.
Le Seigneur donne les instructions nécessaires aux disciples pendant les temps pénibles qui s’écouleraient entre son départ et son retour en gloire. Or — nous l’avons déjà vu — dans les parties prophétiques des Écritures, le temps actuel, celui de la grâce, pendant lequel l’Église est rassemblée, ne compte pas ; c’est un intervalle passé sous silence. Le Seigneur s’adresse à ceux qui l’entouraient comme s’ils devaient eux-mêmes traverser tout ce temps et se retrouver présents à son retour. En faisant abstraction du temps actuel, on peut penser, en effet, qu’il ne s’écoulera guère plus de la durée d’une vie humaine entre le départ de Jésus et son retour. Mais Jésus parle du caractère et des circonstances du témoignage pendant ce temps-là, les mêmes à son retour qu’à son départ, comme il parle du caractère de la génération qui l’a rejeté et qui demeure aussi le même : «Cette génération ne passera point que toutes ces choses ne soient arrivées» (v. 34). Le Juif incrédule persiste dans son opposition à Christ durant tout le temps de son absence ; cela explique pourquoi le Seigneur dit toujours vous en s’adressant aux disciples tout le long de ses instructions, lors même qu’il savait que tous ceux qui l’entouraient délogeraient (mourraient) avant son retour. Et même, lorsqu’ils délogèrent (moururent), ils ne faisaient plus partie du résidu d’Israël qu’ils représentaient aux jours du Seigneur, mais de l’Église qui a remplacé Israël pour un temps. Ils ressusciteront pour accompagner le Seigneur lorsqu’il viendra en gloire afin de délivrer le résidu souffrant qui leur aura succédé aux derniers jours.
Le temps qui s’écoule entre le rejet de Christ et son retour se caractérise par des épreuves de tout genre, pour les disciples du Messie rejeté. Il se présentera des faux christs en vue de les détourner de l’attente du vrai Christ, attente pénible pendant laquelle ils auront beaucoup à souffrir. On entendra parler de guerres et de bruits de guerres. Il y en a eu après le départ du Seigneur, mais il y en aura beaucoup plus avant son retour. Il va de soi que, dans ces chapitres, il s’agit de la venue du Seigneur pour régner et non de celle que nous attendons maintenant pour transmuer les vivants et ressusciter ceux qui sont endormis en lui, événement qui aura lieu avant que recommencent les événements dont ce chapitre nous occupe. Il se produira alors, entre les nations qui sont à l’Orient, à l’Occident, au Nord et au Midi de la Palestine, des guerres incessantes dont la plupart auront ce pays pour cause directe ou indirecte. Des famines, des pestes, des tremblements de terre séviront en divers lieux. Peut-être, dira-t-on, ces phénomènes se manifestent en tout temps ; c’est vrai, mais ici ce seront des préludes des jugements de la fin, et ils revêtiront un caractère de gravité dont les hommes auront l’impression plutôt que l’intelligence, mais que les croyants, avertis par la Parole du Seigneur, sauront discerner. Au reste, nous approchons de ce moment. Les événements de ce genre, qui se répètent si souvent de nos jours, produisent en général une certaine crainte, car les hommes sentent bien que l’on marche vers une crise. Laquelle ? S’ils se laissaient enseigner par la Parole, ils le sauraient et chercheraient le moyen de se mettre à l’abri. Cette crainte pourrait être salutaire, elle l’est pour quelques-uns, mais l’Ennemi cherche à calmer les esprits inquiets, en les rassurant après chaque catastrophe ou cataclysme, en disant que des faits tout pareils, et même bien plus considérables et plus terrifiants, ont eu lieu dans les siècles passés, qu’il n’y a rien d’extraordinaire dans ce qui arrive, qu’il ne faut rien y voir que de tout naturel, et ainsi de suite. Les âmes impressionnées se calment, deviennent indifférentes, s’endurcissent et s’en vont aveuglément au-devant de leur perte, «car Dieu parle une fois, et deux fois, — et l’on n’y prend pas garde» (Job 33:14).
Nul doute qu’aux temps dont parle le Seigneur, des explications tout aussi plausibles, et plus encore, pour la raison humaine, seront données pour expliquer les faits scientifiquement ou historiquement, mais les disciples, enseignés par le Seigneur, comprendront de quoi il s’agit, et, sans se laisser détourner, ils sauront que ce n’est qu’un commencement de douleurs. Ces choses extérieures ne seront pas ce qu’il y aura de pire pour eux. Ils seront livrés pour être affligés ; on en fera mourir ; ils seront haïs de tous à cause du nom du Seigneur. Ces peines ont été la part des disciples aussitôt après le départ du Seigneur. C’est pourquoi il leur donne ces enseignements, afin qu’ils puissent leur servir à eux, comme à ceux de la fin.
Ils passeront aussi par une épreuve d’un genre plus pénible encore, celle qui proviendra du milieu même des disciples. Quelques-uns qui se seront joints à eux pour un temps deviendront infidèles, des occasions de chute ; ils se livreront l’un l’autre, se haïront. De faux prophètes s’élèveront ; ils séduiront les âmes par leur habileté à imiter les déclarations de Dieu. Le mal sera tellement envahissant qu’on verra même du relâchement parmi les vrais disciples : «L’amour de plusieurs sera refroidi». Il faudra une énergie extraordinaire pour tenir ferme ; mais celui qui persévérera jusqu’à la fin sera sauvé, c’est-à-dire qu’il sera trouvé debout, fidèle, lorsque le Seigneur apparaîtra en gloire pour mettre un terme à toutes ces souffrances.
Alors viendra le tour de ceux qui auront fait souffrir les fidèles ; le jugement les atteindra, comme on le voit dans un grand nombre de Psaumes, où le châtiment des méchants est présenté en rapport avec la délivrance des justes.
Malgré toute l’opposition de Satan, «cet évangile du royaume sera prêché dans la terre habitée tout entière, en témoignage à toutes les nations ; et alors viendra la fin». Toutes les nations qui n’auront pas eu le privilège d’entendre parler de l’évangile de la grâce, pourront profiter de l’évangile du royaume, cet évangile qui annonce l’arrivée de Jésus comme roi, venant du ciel.
Cette première partie de la réponse du Seigneur a pour but d’encourager les disciples, en leur décrivant les difficultés avec lesquelles ils auraient affaire, pour rendre témoignage jusqu’à la fin.
Avant la fin de cette terrible période, il y a un temps de détresse effroyable qui comprend les trois ans et demi qui la terminent (voir Apoc. 12:14 ; 13:5 ; etc.).
Le Seigneur, dans sa sollicitude pour ses bien-aimés, leur donne ici des enseignements spéciaux pour ces jours-là. Il leur montre comment ils en connaîtront le commencement et leur dit ce qu’ils auront à faire. «Quand donc vous verrez l’abomination de la désolation, dont il a été parlé par Daniel le prophète, établie dans le lieu saint (que celui qui lit comprenne), alors que ceux qui sont en Judée s’enfuient dans les montagnes ; que celui qui est sur le toit ne descende pas pour emporter ses effets hors de sa maison ; et que celui qui est aux champs ne retourne pas en arrière pour emporter son vêtement, etc.».
«L’abomination» désigne l’idole qui aura été placée dans le temple, imposée comme objet de culte par le faux roi des Juifs, l’Antichrist, et acceptée comme Dieu par les Juifs incrédules et apostats. Cette idolâtrie sans pareille amènera sur la nation les jugements de Dieu par le moyen du roi du Nord ou l’Assyrien (*), qui répandra la «désolation» dans tout le pays. Mais le Seigneur ne s’occupe pas ici de cet événement ; il ne fait que mentionner le fait en rapport avec l’établissement de cette idole dans le temple à Jérusalem, qui amène le jugement de Dieu. Ce que le Seigneur avait en vue, c’était d’avertir les disciples qu’à partir de ce moment il faudra fuir de Judée, puisque le règne de l’Antichrist et du chef de l’Empire romain deviendra intolérable pour les fidèles. Sans la marque de la bête on ne pourra ni vendre ni acheter, et ceux qui ne se prosterneront pas devant son image seront mis à mort (Apocalypse 13:13-18). Jésus dit : «Si ces jours-là n’avaient été abrégés, nulle chair n’aurait été sauvée ; mais, à cause des élus, ces jours-là seront abrégés», c’est-à-dire qu’ils ne dureront que trois ans et demi, ce qui est déjà bien long.
(*) Voir Ésaïe 8:7, 8 ; 10:5, 6 ; Daniel 9:27 ; 11:41, etc.
La rage persécutrice de l’Antichrist empirera d’une manière si soudaine au moment de l’établissement de l’idole dans le temple, que ceux qui seront sur les toits devront fuir, sans descendre dans la maison (*). Celui qui sera aux champs et aura enlevé son vêtement pour travailler n’aura pas même le temps de courir le chercher. Le Seigneur pense à tout ce qui pourrait être un obstacle à la fuite. Il dit de prier qu’elle «n’ait pas lieu en hiver», afin que les fuyards ne soient pas arrêtés par les intempéries de la saison, «ni un jour de sabbat», car ces Juifs pieux ne voudraient pas dépasser le chemin permis par la loi ce jour-là, et trouveraient ainsi la mort. Ce fait eut lieu sous Antiochus Épiphane ; afin de saccager la ville de Jérusalem et de massacrer le plus d’habitants possible, son général attendit d’attaquer la ville le jour du sabbat et fit ainsi un grand carnage.
(*) En Orient, les toits des maisons sont plats. On y arrive par des escaliers extérieurs.
Les disciples attendront avec une ardeur bien compréhensible l’arrivée du Christ pour mettre fin à tous leurs maux ; cette attente les exposera à écouter des séducteurs qui leur diront : Il «est ici», ou : «Il est là», car il s’élèvera de faux christs et de faux prophètes qui accompliront des signes et des prodiges (Apocalypse 13:14). Mais ils ne devront pas les écouter. La venue du Fils de l’homme sera si soudaine que l’on n’aura pas le temps de se prévenir mutuellement. Au reste, les apostats ne pourraient avertir les fidèles, car, comme le corps mort d’Israël, ils seront l’objet du jugement à l’arrivée du Fils de l’homme, qui fondra sur eux comme l’aigle fond sur un cadavre gisant à terre. C’est ce que veut dire le v. 28 : «Où que soit le corps mort, là s’assembleront les aigles».
Ces enseignements du Seigneur seront certainement appréciés par les disciples de ce temps-là, c’est à eux qu’il pensait en les donnant, car il savait que ceux qui étaient présents avec lui ne seraient pas sur la terre lors des persécutions. La parole de Dieu est complète, elle contient tout ce qui est utile pour le présent et pour l’avenir. Tous, dans tous les temps, ont la responsabilité d’en prendre connaissance et d’agir en conséquence.
La troisième partie de la réponse du Seigneur répond à la question : «Quel sera le signe de ta venue ?» Il leur dit qu’après la tribulation des jours terribles dont il vient de parler, «le soleil sera obscurci, et la lune ne donnera pas sa lumière, et les étoiles tomberont du ciel, et les puissances des cieux seront ébranlées». Dans le langage symbolique des Écritures, le soleil représente l’autorité suprême confiée à l’homme, la lune et les étoiles, des autorités subalternes. Dieu avait confié le pouvoir aux nations, dans la personne de Nébucadnetsar et de ses successeurs, depuis qu’Israël avait perdu le privilège d’en être le centre sur la terre. Mais, au lieu de dépendre de Dieu pour agir selon lui dans l’exercice de ce pouvoir et d’en faire une lumière pour diriger les peuples, ceux qui étaient revêtus de cette dignité se sont détournés de Dieu ; ils ont agi selon leurs propres pensées et se sont placés entre les mains de Satan, le dominateur des ténèbres, de sorte qu’à la fin leur gouvernement est absolument ténébreux.
Puisque l’homme n’a pas su gouverner selon Dieu, le royaume et la domination universelle passeront entre les mains du Fils de l’homme, comme nous le voyons en Daniel 7:26, 27. C’est pourquoi, au moment où il va paraître, toutes les puissances terrestres sont présentées comme ayant perdu leur caractère ; au lieu de répandre la lumière, elles sont plongées dans les ténèbres, révoltées contre Dieu ; elles font la guerre aux saints. Elles sont comme un soleil obscurci, une lune sans lumière, et les étoiles n’occupent plus la place qui leur avait été donnée pour briller dans la nuit. Terrible état moral de ceux auxquels Dieu avait confié le pouvoir !
Mais tout à coup, lorsqu’aucun de ceux qui font partie d’un monde sans Dieu ne s’y attend, apparaît «le signe du Fils de l’homme» qui est le Fils de l’homme lui-même, venant sur les nuées du ciel avec puissance et une grande gloire. Quelle délivrance pour les justes pourchassés, et si horriblement persécutés ! Mais quel moment terrible pour ceux qui auront reçu l’Antichrist, pour la génération qui s’était écriée : «Nous n’avons point d’autre roi que César», et avait dit : «Nous ne voulons pas que celui-ci règne sur nous». «Toutes les tribus de la terre se lamenteront». Ils verront alors «celui qu’ils ont percé» (Apoc. 1:7). Ils voient sur les nuées celui qu’ils ont méprisé ; mais venant avec puissance et une grande gloire, non plus débonnaire et humble de cœur pour apporter le salut aux pécheurs ! Il vient en gloire, Roi des rois et Seigneur des seigneurs, pour exécuter la colère divine sur ceux qui l’ont rejeté ; ils ont eu le temps de se repentir, mais ne l’ont pas voulu et ont comblé la mesure de leur péché en acceptant l’Antichrist et en persécutant ceux qui attendaient Jésus comme Roi. Combien c’est chose grave, en tout temps, de mépriser Christ, le Fils de Dieu, le Sauveur du monde ! Il arrive un moment où il n’y a aucune possibilité de repentance ; le jugement est alors la part de tous.
À son arrivée, le Seigneur ne trouvera en Palestine que le résidu souffrant de l’ancien royaume de Juda subissant cette terrible épreuve à cause de la responsabilité qu’il porte du rejet de Christ ; mais tout Israël doit être ramené pour jouir du règne glorieux du Fils de l’homme, savoir les dix tribus dispersées dans le monde et confondues avec les nations depuis le temps de leur transportation en Assyrie. Le Fils de l’homme «enverra ses anges avec un grand son de trompette ; et ils rassembleront ses élus des quatre vents, depuis l’un des bouts du ciel jusqu’à l’autre bout». La trompette représente le moyen par lequel Dieu fait entendre sa voix pour rassembler son peuple (voir Nombres 10:1-8). La fête des trompettes (Lévitique 23:23-25 et Nombres 29:1-6) était justement un type de ce que Dieu accomplira à la venue du Fils de l’homme en vue de rassembler son peuple pour jouir de la bénédiction millénaire.
Jésus a donc montré dans sa réponse les caractères du temps dans lequel les disciples Juifs auront à rendre témoignage, entre son départ et son retour. Il a donné des enseignements spéciaux pour les trois ans et demi de la fin, pendant lesquels l’idole serait établie dans le temple à la place de Dieu, temps sans pareil dans l’histoire. Si les disciples n’avaient pas eu ces instructions, en voulant rester fidèles en Judée, ils auraient pu être tous mis à mort, parce qu’ils ne voulaient pas enfreindre la loi un jour de sabbat, pour prendre les précautions recommandées par le Seigneur. Puis il montre quel sera le signe de sa venue, qui est lui-même venant en gloire, et comment non seulement ceux qui seraient présents à cette venue jouiront de son règne, mais comment tout Israël dispersé sur la face de la terre sera rassemblé par sa voix puissante.
Après tous les enseignements que Jésus vient de donner aux disciples sur sa venue et les événements qui la précéderont, il leur présente, du verset 32 de notre chapitre au v. 30 du chapitre suivant ce qui doit caractériser les fidèles et leur service dans l’intervalle qui s’écoule entre son départ de ce monde et son retour, choses qui, par conséquent, nous concernent tous aujourd’hui. Ces exhortations peuvent se diviser comme suit :
(v. 32-44) : exhortation à la vigilance pour attendre le retour du Seigneur.
(v. 45-51) : responsabilité de celui qui a reçu un service du Seigneur au milieu des siens, ce qui a lieu dans l’Église tout particulièrement.
(chap. 25:1-13) : la parabole des dix vierges : il faut veiller pour manifester la lumière dans la nuit de ce monde jusqu’au retour de Christ.
(v. 14-30) : dans la parabole des talents, l’usage à faire des biens que le Seigneur a confiés à ses serviteurs.
(v. 31-35) — Lorsque les disciples verront s’accomplir les circonstances décrites jusqu’au verset 31, ils sauront que la délivrance est proche, de même que lorsqu’on voit, au printemps, pousser le figuier, on sait que l’été va arriver. En effet, le règne de Christ peut bien être comparé à l’été pour le peuple juif, comme pour toute la création, après le long et affreux hiver caractérisé par la méchanceté de l’homme et la maturité des conséquences du péché sous toutes leurs formes. Aussi avec quels désirs et quelle vigilance les fidèles ne devront-ils pas attendre le lever du «Soleil de Justice» (Malachie 4:2), qui introduira le «matin sans nuages» dont parle David dans ses dernières paroles ! (2 Samuel 23:4). La génération incrédule des Juifs ne passera pas, ne changera pas dans son caractère d’inimitié et d’opposition à Christ, jusqu’au moment où ces choses s’accompliront, mais il y a une autre chose qui ne passera pas : les paroles prononcées par Jésus. On peut le mépriser, le méconnaître, le rejeter même après son départ, ce que l’on fait encore aujourd’hui plus que jamais autour de nous ; mais aucune des paroles que Jésus a adressées à ses disciples, comme aucune de celles des autres Écritures, ne passeront, tandis que le ciel et la terre passeront, malgré leur apparente stabilité.
Quelle sécurité cela donne de posséder cette Parole et de la croire ! Non seulement nous avons trouvé en elle le pardon et la paix ; mais, par elle, nous savons à quoi nous en sommes au milieu de la nuit morale dans laquelle gît le monde ; la parole prophétique est comme une «lampe qui brille dans un lieu obscur, jusqu’à ce que le jour ait commencé à luire» (2 Pierre 1:19). Elle nous éclaire pour le temps actuel ; elle nous renseigne exactement sur l’avenir. Tout ce qu’elle dit à l’égard de ce monde s’accomplira à la lettre, de même que toutes les bénédictions qu’elle présente à la foi et la réalité de ce qu’elle annonce, pour le bonheur des uns comme pour le malheur des autres, dépassera infiniment ce que notre conception humaine, si limitée, est capable de saisir.
Nous ne pouvons trop recommander à nos lecteurs de demeurer fermement attachés à la parole de Dieu et absolument assurés de sa divine inspiration. Elle est la seule manière dont Dieu fait connaître la vérité à l’égard de toutes choses, ses pensées de grâce à l’intention de tous les hommes, et les jugements qu’ils s’attireront s’ils méprisent le salut qu’elle leur offre. Aujourd’hui Satan a mis tout en œuvre pour infirmer ou nier cette parole divine et la remplacer par les explications de la raison humaine, de l’homme dont la vie est une vapeur qui paraît pour un peu de temps et disparaît (Jacques 4:14), dont le prophète dit «Finissez-en avec l’homme, dont le souffle est dans ses narines, car quel cas doit-on faire de lui ?» (Ésaïe 2:22). Car cet homme orgueilleux, qui se sert de la haute intelligence dont Dieu l’a doué pour mettre de côté la Parole de son Créateur, doit cependant descendre dans la poussière dont son corps a été tiré, lorsque Dieu dit : «Retournez, fils des hommes» (Psaume 90:3). Nul n’a pu résister à cet ordre terrifiant, malgré les angoisses qu’il suscite ; ni la forte santé, ni les fortunes mises à la disposition des facultés de médecine, n’ont pu soustraire l’homme à l’obligation d’obéir à cette injonction redoutable, et : Après la mort suit le jugement. Tel est le sort de celui qui raisonne avec Dieu, qui décide que sa Parole n’a aucune valeur en présence des progrès actuels de la science. Celle-ci veut tout juger à sa propre lumière, mais cette lumière n’est que ténèbres quant à la révélation de Dieu. Mieux vaudrait ignorer tout ce que les diverses sciences présentent d’intéressant à l’intelligence humaine, que de s’en servir pour juger Dieu et sa Parole et perdre son âme pour l’éternité.
Si le retour glorieux de Christ est un fait certain dont plusieurs événements indiquent l’approche, le jour et l’heure en sont inconnus à tous, sauf à Dieu le Père. C’est à dessein que Dieu nous laisse dans l’ignorance à cet égard, afin que ceux qui attendent cet événement glorieux demeurent constamment dans la vigilance. Si on ne veille pas, on s’endort. S’endormir spirituellement, c’est faire comme le monde que le jour surprendra comme un voleur, et c’est priver le Seigneur du témoignage qui lui est dû.
Dans l’intervalle qui nous occupe, c’est-à-dire dans le temps actuel, les hommes, tout en ayant la vérité entre les mains, ne se préoccupent point du fait que Christ a été rejeté, lorsqu’il vint en grâce, et qu’il doit revenir en jugement ; aussi le Seigneur les compare aux contemporains du déluge, qui, par la prédication de Noé durant la construction de l’arche, avaient aussi eu connaissance des jugements qui allaient fondre sur eux. Au lieu de se repentir, ils n’avaient d’autre préoccupation que de manger, boire, se marier et donner en mariage. Malgré les avertissements de Noé, ils ne connurent «rien, jusqu’à ce que le déluge vint et les emporta tous». Remarquez ces paroles. Le seul moyen de connaître ce que l’on ne voit pas, c’est de croire ; c’est d’avoir la foi. Or ce n’est que par la foi que l’on est sauvé. Tous ceux qui auront attendu de voir pour croire, durant le jour de la grâce seront perdus. On a beau expliquer la parole de Dieu clairement ; ils ne connaissent rien, tant qu’ils ne croient pas. Mais le jour arrivera où ils verront ; alors ils connaîtront. Qu’est-ce que les hommes du temps de Noé connurent ce jour-là ? Le déluge qui les emporta tous. Il en sera de même au jour du Fils de l’homme, car si la génération juive n’a pas changé depuis que Jésus était sur la terre, le cœur de l’homme n’a pas changé depuis la chute.
Il est à remarquer que Jésus ne rappelle pas les péchés grossiers qui caractérisaient le monde antédiluvien, pour montrer l’indifférence des hommes à l’égard des jugements à venir, il ne parle que de faits absolument naturels et légitimes : manger, boire, se marier et donner en mariage, choses qui peuvent s’accomplir sans culpabilité ; mais qui étaient l’unique préoccupation des hommes, malgré les avertissements de Dieu par Noé. C’était dire à Dieu : «Nous ne tenons aucun compte de ce que tu nous dis, nous voulons, au contraire, continuer à bien vivre et à perpétuer notre race». Quelle indifférence à l’égard des avertissements de Dieu pour jouir à son aise de ce monde et vivre comme si tout allait bien ! N’en est-il pas de même aujourd’hui ? Le monde est de nouveau à la veille des jugements, jugements annoncés, non pas cent vingt ans à l’avance comme aux jours de Noé, mais prononcés depuis dix-neuf cents ans. On mange, on boit mieux que jamais ; on s’égaie, on s’amuse, on s’organise comme si tout devait durer ; on bâtit des édifices somptueux, d’une solidité qui permet, assure-t-on, de résister aux tremblements de terre, et, si l’on parle de la venue du Seigneur, la voix des moqueurs s’élève de toutes parts, disant : «Où est la promesse de sa venue ? car, depuis que les pères se sont endormis, toutes choses demeurent au même état dès le commencement de la création» (2 Pierre 3:4-7). Comme aux jours de Noé, «ils ignorent volontairement». Hélas ! le jour s’approche où ils connaîtront tout. Ils verront de loin la grâce méprisée, et les jugements dont ils se seront moqués les atteindront pour l’éternité.
Jusqu’au moment où le Fils de l’homme viendra, le train de ce monde continuera comme aujourd’hui. L’enlèvement des saints, les préliminaires des jugements qui suivront, n’auront pas changé les pensées des hommes ; au contraire, ils se croiront entrés dans un état de stabilité assurée, fruit de leur propre puissance et de celle de Satan ; ils diront : «paix et sûreté», lorsqu’une ruine subite tombera sur eux et ils n’échapperont point.
Les Juifs, réintroduits en Palestine, jouiront, pour un moment, des heureux effets de leur retour, puisqu’ils ne seront plus disséminés parmi les nations. Les hommes, les femmes vaqueront à leurs occupations respectives, aux champs, au moulin. Mais voici que de deux hommes qui pourront être occupés au même travail, l’un, ayant cru que le Roi qui avait été rejeté autrefois allait revenir, l’attendra, et l’autre, ne croyant rien de cela, suivra le grand nombre des apostats, ce qui sera plus commode. Soudain, comme un éclair, apparaît le Fils de l’homme, et le pauvre malheureux, indifférent et incrédule, est emporté pour subir «le châtiment d’une destruction éternelle de devant la présence du Seigneur et de devant la gloire de sa force» (2 Thessaloniciens 1:7-10). L’autre est laissé pour jouir du règne glorieux que le Fils de l’homme établira en ôtant tout d’abord les méchants de son royaume.
Contrairement à ce qui aura lieu à l’enlèvement de l’Église, celui qui est pris, est pris par le jugement, et celui qui est laissé est laissé pour le règne. Si le Seigneur venait aujourd’hui, de deux hommes au même travail, celui qui serait pris irait au ciel avec le Seigneur, et celui qui serait laissé le serait pour subir les jugements que le Seigneur exécutera lorsqu’il reviendra avec tous ceux qui auront été à sa rencontre en l’air, ceux qu’Il a alors ressuscités et transmués (1 Tim. 4:16, 17).
De tous ces enseignements du Seigneur résulte cette conséquence qu’il faut être prêt et veiller continuellement, puisque le serviteur ne sait pas quand son Seigneur vient. C’est l’attitude qui doit caractériser le croyant, aujourd’hui comme alors, et qui implique le dévouement, l’affection et l’obéissance dus à celui que l’on attend. Il faut s’acquitter de ce devoir avec l’intérêt que porte un maître de maison à veiller dans la nuit à ce que les voleurs ne pénètrent pas chez lui (v. 43). Il faut veiller comme le serviteur qui attend son maître, et comme le maître lui-même, avec l’intention bien arrêtée de ne pas se voir ravir ce que l’on possède, tout en ignorant l’arrivée d’un voleur, ce qui exige une vigilance constante. Sous quelque caractère que l’on considère celui qui attend, on doit être prêt.
Tous nos lecteurs sont-ils prêts ? Pour être prêt comme serviteur, il faut être prêt comme pécheur. Pour cela, il faut être lavé de ses péchés, ce qui a lieu par la foi au sacrifice de Christ sur la croix. Tout a été fait pour cela ; il n’y a qu’à l’accepter, et alors on peut veiller avec l’ardent désir de voir arriver celui qui mourut sur la croix, afin de nous rendre propres pour entrer avec lui dans la maison du Père.
Dans ces versets, le Seigneur montre un caractère spécial du service à accomplir dans l’attente de son retour : celui au milieu des «domestiques de sa maison», auxquels l’esclave doit donner la nourriture au temps convenable. C’est le ministère de la Parole au milieu des chrétiens, Parole qui est la nourriture spirituelle des gens de la maison du Maître. Il incombe à qui a reçu ce service de s’en acquitter avec fidélité, en pensant toujours au moment où son Seigneur viendra. Il est dit : «Bienheureux est cet esclave-là que son maître, lorsqu’il viendra, trouvera faisant ainsi. En vérité, je vous dis qu’il l’établira sur tous ses biens». Si l’on veut être trouvé fidèle lorsque le Seigneur viendra, il faut l’être chaque jour. Les conséquences de la fidélité sont infinies ; celui qui aura agi fidèlement dans son service à l’égard des domestiques de la maison du Seigneur, sera établi sur tous ses biens au jour du règne glorieux du Seigneur.
Si l’esclave perd de vue le retour de son maître et qu’il dise en son cœur : «Mon maître tarde à venir», il agira en opposition absolue à la pensée du Seigneur. Au lieu de donner la nourriture à ses compagnons de service, il les battra ; il usera de sa position au milieu d’eux pour les faire souffrir, et lui-même s’alliera avec ceux qui jouissent immodérément de ce monde et avec les ivrognes. Il trouvera sa satisfaction dans leur société, en ne pensant plus du tout au retour de son Maître. «Le maître de cet esclave-là viendra en un jour qu’il n’attend pas, et à une heure qu’il ne sait pas, et il le coupera en deux et lui donnera sa part avec les hypocrites : là seront les pleurs et les grincements de dents». Solennel avertissement pour tous ceux que le Seigneur a doués pour prendre soin des siens pendant son absence ! Pour être gardés dans l’accomplissement fidèle de son service, attendons constamment le retour du Seigneur, afin qu’il nous trouve tels qu’il le désire lorsqu’il viendra. Pour l’attendre, il faut l’aimer, être occupé de lui, jouir de sa grâce et de toutes les richesses de sa personne.
Le serviteur coupé en deux et jeté dans le malheur éternel, traité comme un hypocrite, parce qu’il a voulu paraître ce qu’il n’était pas, représente ceux qui ont pris eux-mêmes cette place dans la maison de Dieu, sans avoir la vie de Dieu ; leur cœur n’est pas attaché à celui qu’ils font profession de servir. Ils n’ont d’amour ni pour lui, ni pour les siens. Ils ne sont là que pour jouir des avantages charnels qu’ils retirent de la position qu’ils occupent en exerçant une tyrannie devenue abominable, comme on l’a vu surtout dans l’Église romaine. Leur châtiment est terrible. Bien que le Seigneur ne leur ait pas confié de charge, il les jugera d’après la position qu’ils auront prise eux-mêmes.
Chacun doit veiller pour lutter contre les principes qui peuvent faire agir de cette façon, si le cœur n’est pas attiré par la pensée continuelle du retour du Maître.
Voici une parabole du royaume des cieux, de cet état de choses qui existe pendant le temps où le roi est rejeté, mais où un témoignage lui est rendu par ceux qui l’ont reçu et le connaissent. Le Seigneur présente ici une des formes de ce royaume (*). Il le compare à dix vierges sorties à la rencontre de l’époux. Cette rencontre, dans les noces, telles qu’elles se célèbrent encore en Orient, a lieu la nuit, moment de l’arrivée de l’époux. Il faut donc lui donner de la lumière pour lui permettre d’entrer dans la salle des noces. C’est à ce service que sont appelées les vierges. Seul il leur accorde le privilège d’entrer avec l’époux aux noces.
(*) Nous en avons vu plusieurs autres formes au chapitre 13.
Ces dix vierges, ayant pris leurs lampes, «sortirent à la rencontre de l’époux». Elles représentent tous ceux qui ont reçu l’Évangile depuis que le Seigneur l’a fait proclamer en tous lieux, et qui, dès lors, ont fait profession de christianisme. L’Évangile ayant été prêché aux Juifs et aux Gentils, tous ceux qui l’acceptèrent sortirent du judaïsme et du paganisme qu’ils avaient pratiqués comme religion ; ils sortirent pour attendre le Seigneur. Le christianisme vital, tel qu’il se réalisait aux premiers temps de l’Église, se caractérisait par l’attente vivante du retour de Christ. On racontait comment les Thessaloniciens s’étaient «tournés des idoles vers Dieu, pour servir le Dieu vivant et vrai, et pour attendre des cieux son Fils» (1 Thessaloniciens 1:9). Mais de bonne heure il entra dans ce témoignage public des personnes professant le christianisme comme religion, mais sans la vie, sans la puissance de l’Esprit qui fait briller la vie de Dieu, comme l’huile qui fait brûler la lampe. Elles sont représentées par les cinq vierges folles. En effet, quelle folie que de s’engager à éclairer, peut-être toute une nuit — car on ne savait à quelle heure l’époux venait — sans prendre avec soi l’huile nécessaire pour alimenter sa lampe (*). Les vierges prudentes avaient pris de l’huile dans leurs vases, car elles se rendaient bien compte de leur service. Elles représentent donc ceux qui, dans la chrétienté, ont la vie de Dieu, dont l’Esprit fait briller les caractères dans la nuit morale où le monde se trouve jusqu’au retour de Christ.
(*) Les lampes antiques se composaient d’un récipient fermé, muni d’une poignée. Le couvercle était percé de deux trous, l’un qui contenait la mèche, l’autre servant à verser l’huile à l’intérieur. Si l’on utilisait ces lampes en plein air ou dans de grandes pièces, on les portait au bout d’une longue tige de bois.
Hélas ! «comme l’époux tardait, elles s’assoupirent toutes et s’endormirent». Les croyants, aussi bien que les non-croyants, ont perdu de vue la pensée du retour de Christ. L’influence endormante de la nuit a produit ses effets sur les uns comme sur les autres, car il faut une énergie constante pour ne pas s’endormir, parce que ce n’est pas naturel d’être éveillé pendant la nuit. Il faut pour cela qu’un objet captive le cœur. Or si cet objet n’est pas Christ, le chrétien s’endort vite ; il suit le courant de ce monde, ce qui est naturel à la chair.
«Mais au milieu de la nuit il se fit un cri : Voici l’époux ; sortez à sa rencontre». De nouveau il faut sortir, non plus du judaïsme et du paganisme comme au commencement, mais de l’état de sommeil dans lequel la chrétienté tout entière était tombée, faute de vigilance. Un réveil se produit ; c’est ce qui eut lieu dans la première moitié du siècle passé, lorsqu’on retrouva dans la Parole la vérité concernant la venue du Seigneur ; toutes les vierges pour ainsi dire se levèrent et apprêtèrent leurs lampes, mais les lampes de celles qui n’avaient pas d’huile avec elles s’éteignirent bientôt, car à quoi bon ranimer une mèche sans huile pour l’alimenter ? On a beau vouloir réformer une religion sans vie ; elle ne produit pas de lumière pour le Seigneur, l’huile manque. Les fruits d’une nature religieuse ne sont pas les produits du Saint Esprit et ne peuvent se soutenir. «Les folles dirent aux prudentes : Donnez-nous de votre huile, car nos lampes s’éteignent». Les vierges prudentes ne pouvaient qu’envoyer leurs compagnes à la source, «vers ceux qui en vendent». Le croyant possède la vie et le Saint Esprit pour lui-même ; mais il ne peut les communiquer à d’autres. «Or, comme elles s’en allaient pour en acheter, l’époux vint ; et celles qui étaient prêtes entrèrent avec lui aux noces». Elles avaient accompli le service pour lequel elles avaient été appelées ; leur place était avec l’époux dans la salle des noces. «Et la porte fut fermée». Quelle chose terrible que la porte fermée, cette porte que personne ne peut ouvrir, et qui sépare ceux qui sont dans l’allégresse et la lumière de ceux qui sont dans les ténèbres et les pleurs ! Cela rappelle cette porte que Dieu lui-même ferma sur un monde impie qui allait être englouti par les eaux (Genèse 7:16). Les autres vierges, viennent, disant : «Seigneur, Seigneur, ouvre-nous ! Mais lui, répondant, dit : En vérité, je vous dis : je ne vous connais pas». Réponse terrifiante ! L’Époux avait besoin de ces vierges pour lui donner de la lumière au moment de son arrivée ; elles ne se trouvaient pas là ; aussi ne savait-il que faire d’elles dans la salle des noces. «Veillez donc, car vous ne savez ni le jour ni l’heure».
Cher lecteur, qui pourriez n’être pas prêt, ne jouez pas avec le temps. Nous connaissons celui qui est derrière nous, mais non pas celui qui est devant. Ce temps de la grâce est limité ; nous touchons à son terme. Le cri : «Voici l’époux» s’est fait entendre il y a plus de cent ans déjà, lorsque la vérité relative au retour de Christ fut retrouvée et proclamée dans toute la chrétienté. Ce cri ne précède que d’un instant l’arrivée de l’Époux. On alléguera que ce retour n’est pas imminent. Mais, au contraire, il s’est rapproché de nous d’une centaine d’années. Du reste n’oublions pas «qu’un jour est devant le Seigneur comme mille ans, et mille ans comme un jour» (2 Pierre 3:8). Il ne nous appartient pas de discuter sur le temps avec Dieu, car le temps appartient à lui seul. Le Seigneur appelle insensé celui qui décidait du temps pendant lequel il pourrait faire bonne chère et se réjouir (Luc 12:19). On frémit à la pensée que tant de personnes, et même des enfants de chrétiens, pourront se trouver dans le cortège des vierges folles, puisqu’elles n’auront ni la vie, ni le Saint Esprit, et ne manifesteront aucune lumière pour le prochain retour de Christ. C’est pour cela que nous répétons qu’il faut posséder ces choses aujourd’hui pour être sûr de les avoir plus tard. Si vous croyez qu’il y a encore du temps jusque-là, puisqu’il s’en est déjà tant écoulé, rejetez cette pensée qui en a entraîné un si grand nombre dans l’abîme. Puisque ce jour peut être aujourd’hui, c’est aujourd’hui qu’il faut accepter le salut, car demain vous pourriez bien crier, avec vos compagnons d’infortune, derrière la porte fermée : «Seigneur, Seigneur, ouvre-nous», et recevoir pour toute réponse cette parole solennelle : «je ne vous connais pas». Le Seigneur pourrait vous dire aussi : «Je vous ai appelé tant et tant de fois ; je vous ai fait dire que le temps était court, que j’allais venir ; vous avez laissé écouler ce temps précieux, préférant jouir du monde et des choses qui sont dans le monde, maintenant il est trop tard, trop tard». Même si quelqu’un connaissait le jour de sa mort, ou le jour de la venue du Seigneur, nul n’oserait garantir qu’il en profiterait pour se convertir. Vous connaissez peut-être l’histoire d’un jeune homme averti dans un songe que, dans un an et un jour, il descendrait en enfer. Un avertissement pareil aurait dû le décider pour Christ et produisit en lui, sur le moment, une profonde impression. Mais le monde reprit le dessus et, un an et un jour après son rêve, il disparaissait dans l’abîme, chargé de tous ses péchés :
«Hâte-toi, le temps passe
Et ne reviendra plus.
Aujourd’hui, jour de grâce,
Viens à Jésus».
«Veillez donc ; car vous ne savez ni le jour ni l’heure». C’est ainsi que le Seigneur lui-même termine cette solennelle parabole des dix vierges. Dieu veuille qu’elle ne soit présentée en vain à aucun de nos lecteurs !
«Car c’est comme un homme qui, s’en allant hors du pays, appela ses propres esclaves et leur remit ses biens». Cet homme, c’est Christ venu dans ce monde, chez les siens ; il ne fut pas reçu, et dut s’en aller pour un temps. Nous savons où il se trouve maintenant. «Ses biens» sont ceux qui dépendent de sa venue ici-bas et de son œuvre à la croix. Il les confie à chacun selon sa sagesse pour qu’on les fasse valoir pendant son absence et qu’il en retire le profit à son retour. Nous avons donc ici un autre côté de la conduite et de la responsabilité de ceux qui attendent le Seigneur. Au chapitre 24, nous voyons le service de l’esclave qui a pour tâche de nourrir ceux qui habitent la maison avec lui. La parabole des vierges parle de la lumière de la vie divine qui doit briller en vue du retour de Christ. Ici ce sont les biens que la grâce nous a apportés et qu’il faut mettre en valeur dans ce monde pour le compte du Seigneur.
À l’un il donne cinq talents, à un autre deux, et à un troisième un. À son retour, longtemps après, comme les esclaves avaient eu le temps de trafiquer, le maître régla compte avec eux. Les deux premiers avaient doublé les sommes qui leur avaient été confiées. Aussi le maître dit à chacun d’eux : «Bien, bon et fidèle esclave ; tu as été fidèle en peu de chose, je t’établirai sur beaucoup : entre dans la joie de ton maître». Avec Dieu, les récompenses dépassent infiniment les services rendus. Dieu agit toujours en grâce, quoiqu’il récompense le travail fait pour lui. «Je t’établirai sur beaucoup», c’est une participation bien précieuse à la domination du Seigneur, ainsi qu’à sa joie. Ces esclaves avaient joui de son amour, de sa communion dans le temps du labeur ; la connaissance de sa personne leur avait fourni l’énergie nécessaire pour le servir fidèlement, en sorte que leur part heureuse n’est pas seulement d’être établis sur beaucoup, mais d’entrer dans la joie de celui qui jouira aussi, d’une manière infinie, du fruit du travail de son âme.
Quelle différence lorsque le maître en vient à celui qui n’avait reçu qu’un talent ! Il n’en avait rien fait, il l’avait caché dans la terre ; il s’était montré paresseux parce qu’il ne connaissait pas le caractère de son maître, quoiqu’il dise : «Je te connaissais, que tu es un homme dur, moissonnant où tu n’as pas semé et recueillant où tu n’as pas répandu ; et, craignant, je m’en suis allé et j’ai caché ton talent dans la terre ; voici, tu as ce qui est à toi». On ne saurait trouver une appréciation plus opposée à la vérité quant au caractère du Seigneur, ce maître qui a vécu dans la pauvreté afin de nous enrichir (2 Corinthiens 8:9), celui duquel «nous tous nous avons reçu, et grâce sur grâce» (Jean 1:16), le Fils de l’homme qui «n’est pas venu pour être servi, mais pour servir et pour donner sa vie en rançon pour plusieurs» (Matthieu 20:28), le Fils du Père, «débonnaire et humble de cœur» (Matthieu 11:29). S’il avait vraiment cru avoir affaire avec un maître tel qu’il prétendait le connaître, il aurait dû travailler énergiquement pour le satisfaire. Seule la connaissance de la grâce dont le Seigneur Jésus a été l’expression ici-bas, peut donner l’énergie de travailler avec zèle et intelligence au service du maître. Malgré tous ces biens que le Seigneur a laissés dans ce monde pour son service, personne ne peut les employer pour lui, s’il ne possède une connaissance vitale de lui-même. Sans cela le talent est caché dans la terre. Si l’on connaît Christ, son amour remplit le cœur ; il donne le zèle et l’intelligence nécessaires pour travailler pour lui ; si cet amour manque, rien ne peut se réaliser, et l’on se fait de Dieu une fausse idée, car on ne peut connaître Dieu que par Christ ; lui seul l’a révélé dans son amour infini. Sans cette connaissance, on ne peut avoir, vis-à-vis de Dieu, que la méfiance introduite par Satan dans le cœur de l’homme à la chute, lorsqu’il lui fit croire que Dieu ne lui avait pas donné tout le bonheur possible, puisqu’il le privait du fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal. L’homme crut Satan et il eut dès lors une fausse idée de Dieu ; puis sa conscience lui reprochant ses fautes, au lieu de l’amener à s’humilier devant Dieu, le fit accuser Dieu d’être la cause de son malheur. Dans son amour infini, Dieu a voulu montrer à l’homme qu’il était au contraire la seule cause possible de son bonheur. Il est venu ici-bas dans la personne de son Fils unique apporter le pardon et la paix. Mais pour le connaître ainsi, il faut accepter Christ ; car, si Christ est rejeté, Dieu l’est aussi, et l’homme reste dans son état de péché pour l’éternité.
Le maître dit de l’esclave paresseux : «Ôtez-lui donc le talent, et donnez-le à celui qui a les dix talents ; car à chacun qui a il sera donné, et il sera dans l’abondance ; mais à celui qui n’a pas, cela même qu’il a lui sera ôté. Et jetez l’esclave inutile dans les ténèbres de dehors : là seront les pleurs et les grincements de dents». C’est comme «inutile» que l’esclave paresseux est condamné. Il n’y a de vraie utilité dans ce monde que dans ce qui est fait pour Christ. De toute l’activité humaine, si belle et si productive qu’elle puisse être ou paraître ici-bas, rien ne subsistera dans l’éternité que ce qui aura été fait pour Christ et dans la connaissance vitale de sa personne ; car on ne peut avoir Christ pour objet que si on a Christ pour la vie.
Le fait que le talent a été ôté à cet homme et donné à celui qui en avait déjà dix, place devant nous ce principe que celui qui est fidèle reçoit toujours davantage. Plus on grandit en connaissance et en obéissance à Dieu, plus on reçoit de bénédiction, et cette bénédiction est une part éternelle dans la présence du Seigneur. Tous les bienfaits du christianisme dont le monde religieux s’est paré et se vante, en contraste avec les nations encore plongées dans l’idolâtrie, lui seront ôtés un jour, lorsque ceux qui auront connu et servi le Seigneur entreront dans sa joie et recevront une abondante et éternelle bénédiction.
Puissions-nous tous, jeunes et vieux, connaître toujours mieux Christ, afin d’acquérir, par cette connaissance, la capacité d’accomplir pour lui un service dont les résultats seront éternels. Choisissons, comme Marie, la bonne part qui ne peut être ôtée, ni ici-bas, ni dans l’éternité ! (Luc 10:42).
Lorsque le Fils de l’homme sera venu pour délivrer le résidu juif des terribles persécutions mentionnées au chap. 24, il s’assiéra sur son trône pour juger les nations auxquelles l’Évangile du royaume a été proclamé (voir 24:14). Cet Évangile invitera les hommes à craindre Dieu et à lui donner gloire (Apocalypse 14:6, 7), en leur annonçant que le roi qu’il faut reconnaître est le Seigneur qui viendra du ciel, et non les souverains impies et puissants qui s’élèveront alors sur la terre grâce à la puissance de Satan.
«Or, quand le Fils de l’homme viendra dans sa gloire, et tous les anges avec lui, alors il s’assiéra sur le trône de sa gloire, et toutes les nations seront assemblées devant lui». C’est de ce fait probablement que parle Joël 3:2 et 12. Outre les nations assemblées devant lui, une autre classe de personnes se présente aussi, ceux que le Seigneur appelle les petits «qui sont mes frères» (v. 40 et 45), à savoir les messagers qui ont annoncé l’Évangile du royaume aux nations qui n’auront pas entendu l’Évangile de la grâce dans le temps actuel.
Le Fils de l’homme est comparé à un berger qui sépare les brebis d’avec les chèvres. Il met les brebis à sa droite et les chèvres à sa gauche. Il connaît ses brebis ; elles ont pris ce caractère parce qu’elles ont écouté et reçu les messagers que le roi leur a envoyés. Elles se distinguent des chèvres en ce qu’elles ont accueilli ceux qui, au travers de beaucoup de privations, de douleurs et de persécutions, leur ont apporté l’Évangile du royaume, service que le Seigneur considère comme rendu à lui-même ; il le dit aux douze, lorsqu’il les envoie annoncer ce même Évangile (10:40, 42). «Celui qui vous reçoit, me reçoit ; et celui qui me reçoit, reçoit celui qui m’a envoyé... Et quiconque aura donné à boire seulement une coupe d’eau froide à l’un de ces petits, en qualité de disciple, en vérité, je vous dis, il ne perdra point sa récompense». Le Seigneur tient compte de tout ce qui est fait à un des siens, en bien ou en mal, comme si c’était fait à lui-même. C’est pourquoi il dit à Saul, lorsqu’il l’arrêta sur le chemin de Damas : «Pourquoi me persécutes-tu ?» Saul ne savait pas qu’il persécutait le Seigneur dans la gloire, en persécutant ceux qui croyaient en lui. Il en va toujours de même aujourd’hui à cause de l’union qui existe entre Christ et les croyants, puisque chaque croyant est membre du corps de Christ. Nous devons donc porter à chacun d’eux la bienveillance, le respect, la considération, l’amour qui sont dus au Seigneur ; car nous aussi, nous aurons à paraître devant lui, mais pas en même temps que les nations. Voir 2 Corinthiens 5:9, 10 : «C’est pourquoi aussi, que nous soyons présents ou que nous soyons absents, nous nous appliquons avec ardeur à lui être agréables ; car il faut que nous soyons tous manifestés devant le tribunal du Christ, afin que chacun reçoive les choses accomplies dans le corps, selon ce qu’il aura fait, soit bien, soit mal».
À ceux qui sont à sa droite, le roi dira : «Venez, les bénis de mon Père, héritez du royaume qui vous est préparé dès la fondation du monde», bénédiction précieuse, faveur qui accorde la jouissance du royaume du Fils de l’homme ; ils y trouveront un bonheur parfait sur cette terre, où règneront la justice et la paix après tant de souffrances. Mais ces privilèges font ressortir la supériorité de ceux que possèdent déjà, par la foi, les croyants d’aujourd’hui ; ils font partie de l’Église, qui participera à ce beau règne comme épouse du Roi, et non comme sujette de ce royaume. Les croyants actuels non seulement sont bénis du Père, mais sont enfants de Dieu. Le Seigneur Jésus les a identifiés avec lui dans la position qu’il occupe actuellement comme homme ressuscité et glorifié, ainsi qu’il l’annonce aux disciples le jour de sa résurrection en Jean 20:17. Actuellement nos bénédictions sont spirituelles et célestes en Christ, préparées avant la fondation du monde (Éphésiens 1:3, 4), tandis que le royaume qui sera la part du peuple béni sur la terre est préparé dès la fondation du monde, et il prendra fin après l’accomplissement des mille ans (Apocalypse 20:6, 7). Cependant tous les croyants qui participeront au règne de Christ sur la terre se trouveront aussi sur la nouvelle terre que nous attendons tous, et cela pour l’éternité, lorsque la terre et les cieux actuels auront passé (2 Pierre 3:13, Apocalypse 21:1).
Le Roi rappelle à ceux qui sont à sa droite ce qu’ils ont fait pour lui : «Car j’ai eu faim, et vous m’avez donné à manger ; j’ai eu soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais étranger, et vous m’avez recueilli ; j’étais nu, et vous m’avez vêtu ; j’étais infirme, et vous m’avez visité ; j’étais en prison, et vous êtes venus auprès de moi». Tout ceci fait comprendre par quelles circonstances pénibles ces envoyés du Seigneur auront à passer pour porter l’Évangile aux nations, dans un temps de ténèbres où tous seront ligués pour s’opposer au règne de Christ. Mais, du haut de sa demeure glorieuse, le Seigneur veillera sur eux et appréciera tout ce qui se fera pour chacun de ceux qu’il appelle «ses frères» ; dans son jour les conséquences de la conduite de chacun seront manifestées : les justes entrent dans la bénédiction qui leur avait été annoncée.
Aucun des justes ne croit avoir rendu de tels services au Roi. Ils ne l’avaient pas fait en vue d’une récompense ; ils n’avaient pas pensé à la portée de leurs actes envers les frères du Roi. Mais le Seigneur, dans sa bonté, tient compte de tout ce qui est fait pour lui, accompli souvent sans éclat devant le monde, dans l’obscurité, service méprisé par les hommes, mais apprécié par Dieu qui discerne les motifs qui font agir et sont le fruit de l’amour pour lui, sans que celui qui agit s’en rende compte. Au jour où tout sera manifesté, il montrera ce qui a eu du prix pour son cœur. Nos services qui en auront eu le plus pour Christ seront, sans doute, ceux dont la valeur nous aura le moins préoccupés, mais qui auront été le fruit naturel de l’attachement à Christ, réalisé dans toute notre vie, dans les plus petits détails, comme aussi par les soins prodigués aux enfants de Dieu dans les circonstances difficiles que tous ont à traverser ici-bas, en un mot : tout ce qui aura été fait pour son nom.
À ceux qui sont à sa gauche, le Roi dira : «Allez-vous-en loin de moi, maudits, dans le feu éternel qui est préparé pour le diable et ses anges ; car j’ai eu faim, et vous ne m’avez pas donné à manger ; j’ai eu soif, et vous ne m’avez pas donné à boire ; j’étais étranger, et vous ne m’avez pas recueilli ; nu, et vous ne m’avez pas vêtu ; infirme et en prison, et vous ne m’avez pas visité». Eux non plus ne savent pas quand ils ont eu l’occasion de faire toutes ces choses au Roi. Cette occasion, ils l’ont perdue pour toujours ; en méprisant les envoyés du Roi, ils l’ont méprisé lui-même.
Aujourd’hui, comme alors, il n’y a rien d’attrayant pour le cœur naturel dans la présentation de l’Évangile. Le monde et ses avantages présents font mettre de côté la bonne nouvelle du salut et ceux qui l’annoncent. Mais le jour du Seigneur s’approche où tout sera manifesté dans la lumière, et alors, nombreux seront ceux qui voudraient avoir agi autrement, car, dans ce jour-là, que donneront les plaisirs et les avantages mondains ? Quelle sera la valeur des raisonnements de l’esprit humain qui auront paru plus sages que la parole de Dieu ? Il sera trop tard pour revenir en arrière ; le temps sera passé ; on aura beau n’être plus incrédule, constater que toute sa sagesse était folie : le repentir est inutile au jour du jugement. Pour tous, comme pour ceux qui seront à la gauche du roi, il sera dit : «Allez-vous-en loin de moi, maudits, dans le feu éternel qui est préparé pour le diable et ses anges». Toute protestation sera inutile ; il fallait profiter, en son temps, de l’occasion fournie par la prédication de l’Évangile. Que ce soit l’évangile de la grâce, comme aujourd’hui, ou l’évangile du royaume, comme alors, il faut le recevoir lorsqu’il est présenté. «Aujourd’hui, si vous entendez sa voix, n’endurcissez pas vos cœurs» (Hébreux 3:7). Cette scène de jugement se termine par ces mots : «Et ceux-ci s’en iront dans les tourments éternels, et les justes, dans la vie éternelle» Déclaration solennelle pour les condamnés, et réponse simple et claire à ceux qui nient les peines éternelles, tout en admettant qu’il y a un bonheur éternel pour ceux qui croient ; car si l’expression «éternelle» s’applique à la vie, elle s’applique nécessairement aussi aux peines. Nier l’une, c’est nier l’autre.
Remarquez aussi, cher lecteur, combien la bonté de Dieu est grande et merveilleuse. Dieu a préparé pour l’homme un royaume de gloire et de félicité sur cette terre, malgré la connaissance qu’il avait de son état de péché et de révolte contre lui, comme il a préparé une éternité de bonheur pour tout croyant, tandis qu’il n’a réservé aucun lieu de malheur pour l’homme. Le feu éternel a été destiné au diable et à ses anges. Ceux qui écoutent la voix du Seigneur tandis qu’il offre le salut, vont avec lui dans la gloire éternelle ; mais ceux qui écoutent la voix de Satan iront avec lui dans les tourments éternels. Qui pourra accuser Dieu d’être la cause de son malheur, comme, hélas ! nous l’entendons souvent dire à des hommes insensés ? Tous, nous avons mérité le malheur éternel par nos péchés. Mais Dieu a préparé un lieu de bonheur dans la gloire de sa présence, et il fait connaître à tous les hommes qu’ils peuvent y avoir accès par la foi. De son côté, le diable, meurtrier et père du mensonge, trompe les âmes en les détournant de Dieu et de sa Parole, en vue de les plonger dans le malheur éternel, de sorte que chacun sera dans l’éternité avec celui qu’il aura écouté. Où serez-vous, lecteur ?
En terminant ce sujet, remarquons que cette séance de jugement n’est nullement celle du jugement dernier, comme on l’enseigne assez fréquemment. Celui-ci est décrit dans le chapitre 20 de l’Apocalypse, v. 11-15. Il a lieu lorsque le ciel et la terre se sont enfuis ; c’est le jugement des morts. Celui que nous voyons dans notre chapitre est un jugement des vivants (*). Devant le grand trône blanc ne comparaissent que ceux qui sont morts dans leur état de péché ; ils ont été ressuscités pour paraître devant Dieu et être jugés selon leurs œuvres. Aucun de ceux dont les noms sont écrits dans le livre de vie ne paraît là, car tous ceux qui sont morts en Christ ont été ressuscités avant le règne de mille ans, tandis que la séance de jugement, où les nations sont assemblées devant le Fils de l’homme, a lieu avant le règne, et seulement pour les nations qui seront alors sur la terre, dans le but d’ôter de la terre ceux qui n’ont aucun droit à jouir du règne de Christ, puisqu’ils ont refusé de recevoir le message qui leur en offrait l’entrée.
(*) Il y a aussi un Jugement guerrier qui fait partie du jugement des vivants (Apocalypse 19:11-21).
«Et il arriva, lorsque Jésus eut achevé tous ces discours, qu’il dit à ses disciples : Vous savez que la Pâque est dans deux jours, et le Fils de l’homme est livré pour être crucifié».
Les discours publics du Seigneur sont terminés ; il avait «annoncé la justice dans la grande congrégation» — la congrégation d’Israël — il n’avait point retenu ses lèvres (Psaume 40:9, 10). Il avait accompli son travail d’une manière parfaite et, s’il n’avait pas dit, comme le serviteur hébreu qui lui servait de type (Exode 21:5) : «J’aime mon maître, ma femme et mes enfants, je ne veux pas sortir libre», il aurait pu monter au ciel sans passer par la mort ; car le péché, dont la mort est le salaire, ne s’était pas trouvé en lui. Il pouvait se présenter devant Dieu tel qu’il était, dans une perfection absolue. Mais Jésus voulait glorifier Dieu dans sa mort, afin de sauver son épouse et les croyants de tous les âges, aller jusqu’au bout dans l’accomplissement de la volonté du Père, qui désirait sauver le pécheur au moyen des souffrances expiatoires de son Fils unique. Un avec Dieu dans ses conseils et dans son amour, il s’offre maintenant comme victime pour que ces conseils de grâce puissent avoir leur accomplissement. Il va se livrer, pour être crucifié, entre les mains d’hommes sans cœur et sans conscience, comme un agneau que l’on mène à la boucherie sans qu’il ouvre la bouche (Ésaïe 53:7).
Jésus annonce à ses disciples, avec un calme digne de lui, ce qui va avoir lieu, car, victime volontaire, il avait la divine connaissance de toutes choses.
Les sacrificateurs et les anciens du peuple, réunis chez Caïphe, le souverain sacrificateur, tinrent conseil pour se saisir de Jésus par ruse, pour le faire mourir, non pas pourtant pendant la fête, car ils craignaient les foules que la fête de Pâques attirait à Jérusalem. Celles-ci témoins de la bonté et de la puissance de Jésus en leur faveur durant son ministère, même si elles ne croyaient pas en lui comme au Christ, le tenaient au moins pour un prophète (Chapitre 21:46). Ces malheureux chefs voulaient accomplir leur horrible forfait sans être incommodés par l’opposition de ceux qui avaient profité de tous les bienfaits de leur victime. Mais, indépendamment de leur volonté, il était dans les pensées de Dieu que l’antitype (*) de l’agneau pascal soit sacrifié à la fête même de la Pâque, fête qui dès lors, n’avait plus sa raison d’être. Comme nous le verrons plus loin, leur prudence ne leur servit à rien ; les événements se précipitèrent, Jésus fut livré, et hélas ! personne ne fit d’opposition en sa faveur.
(*) Antitype : ce que représentait le type. L’Agneau de la Pâque était le type de Christ, et Christ en est l’antitype.
Jésus était à Béthanie où, depuis plusieurs jours, il se rendait de Jérusalem pour la nuit (Jean 12:1 ; Matthieu 21:17, Marc 11:11, 12, 19, 20 et 27). Son cœur trouvait là un paisible refuge où il jouissait de l’affection de Lazare et de ses sœurs ; on voit qu’il y rencontrait aussi un Simon appelé «le lépreux», qu’il avait, sans doute, nettoyé de sa lèpre. Combien cette affection lui était chère, dans ce moment où la haine des hommes contre lui gagnait tous les cœurs et où l’on complotait, pour le faire mourir, dans la ville même qui aurait dû l’acclamer comme roi ! Ce cher Sauveur, sachant tout ce qui se passait, sentait douloureusement la haine à son égard ; aussi jouissait-il d’autant plus vivement de l’affection qu’on lui témoignait ; son cœur humain avait besoin de sympathie et l’appréciait selon les perfections de sa nature.
Dans la maison de Simon où se trouvait Jésus — nous savons par le récit de Jean qu’on lui avait fait un souper où Marthe servait ; Lazare était un des convives (Jean 12:2) — une femme, Marie, sœur de Marthe, apporta un vase d’albâtre plein d’un parfum de grand prix, et le répandit sur la tête de Jésus pendant qu’il était à table. Quel contraste offre cette scène avec celle qui se passait à Jérusalem, chez Caïphe, où l’on prenait les mesures nécessaires pour mettre à mort Celui à qui, chez Simon, on témoignait tant d’affection et le plus grand honneur ! On aime à penser à ce que le Seigneur éprouvait dans cette circonstance, où il trouvait la sympathie et l’affection de quelques personnes, influencées par la grâce qu’il avait déployée lui-même envers elles. Parmi les cœurs qui savaient un peu jouir de sa personne, celui de Marie brûlait pour lui d’un amour sans pareil dans ce moment-là, amour qui la conduisit à accomplir un acte dont la portée dépassait son intelligence, mais que le Seigneur seul savait comprendre et apprécier. Les disciples mêmes, étrangers aux motifs qui la faisaient agir, ne comprenaient pas ce qui la conduisait à répandre sur leur Maître ce parfum de grand prix. Indignés, ils disent : «À quoi bon cette perte ? Car ce parfum aurait pu être vendu pour une forte somme et être donné aux pauvres». Pauvres disciples ! à quelle distance ils se trouvaient de la communion qui existait entre Jésus et Marie et qui formait les pensées de cette pieuse femme ! Pour eux, cet honneur rendu au Seigneur est une perte, un sacrifice inutile ; à leurs yeux les pauvres avaient plus de valeur que Jésus. Combien il est vrai que l’amour pour Christ est le vrai chemin de l’intelligence spirituelle ! Quelle blessure cette appréciation charnelle n’a-t-elle pas dû produire dans le cœur de Jésus, ainsi que dans celui de Marie ? Aussi Jésus leur dit : «Pourquoi donnez-vous du déplaisir à cette femme ? car elle a fait une bonne œuvre envers moi ; car vous avez toujours les pauvres avec vous, mais moi, vous ne m’avez pas toujours ; car cette femme, en répandant ce parfum sur mon corps, l’a fait pour ma sépulture». La haine des Juifs pour Jésus, qui augmentait à chaque heure, pesait sur le cœur de Marie, et faisait en proportion brûler son amour pour lui. Le mépris qui atteignait le Seigneur, et qui allait arriver à son comble, l’engageait d’autant plus à lui manifester l’honneur qu’elle lui portait ; aussi, comme Matthieu l’indique, c’est sur sa tête que le parfum a été répandu. Marie sait que celui qu’on va mettre à mort est son roi. Les Juifs le couronneront d’épines, mais elle oint de parfum cette tête royale, et, si la royauté de Christ ne peut s’établir sans passer par la mort, Christ accepte ce parfum pour sa sépulture. Marie seule put faire quelque chose pour l’embaumement du Seigneur ; car, lorsque les autres femmes vinrent au sépulcre avec les aromates qu’elles avaient préparés en vue de ce service, Jésus était déjà ressuscité (Luc 24:1).
L’acte de Marie était unique dans la merveilleuse histoire de Jésus ici-bas, vu le moment où elle l’accomplit et l’amour dont il provenait ; le Seigneur le considère comme si important qu’il dit : «En vérité, je vous dis : En quelque lieu que cet évangile soit prêché dans le monde entier, on parlera aussi de ce que cette femme a fait, en mémoire d’elle». Ce fait se lie tellement à la mort de Christ, mort qui sert de base à l’Évangile prêché au monde entier, que partout, en l’annonçant, on parlerait de l’acte de Marie. «Ceux qui m’honorent, je les honorerai», avait dit l’Éternel (1 Samuel 2:30).
Aujourd’hui encore, nous avons l’occasion de témoigner au Seigneur que nous l’aimons ; car nous vivons dans un monde où grandissent chaque jour la haine et le mépris pour lui. Puissions-nous tous, petits et grands, ne pas craindre d’affirmer notre attachement à la glorieuse personne de celui qui s’est livré à la mort pour nous sauver, en lui rendant témoignage et en faisant connaître à tous le prix qu’il a pour nous ! Pour le faire, nos cœurs doivent être remplis de son amour ; pour qu’ils le soient, soyons occupés de lui ; apprenons à ses pieds, là où Marie a fait une connaissance si intime de lui-même, où son amour s’est développé d’une manière qui l’a rendue capable d’honorer Jésus dans une occasion unique, qui eut un si grand prix pour son cœur, alors que les disciples ne pouvaient comprendre ce que cette femme faisait.
Judas assistait à cette scène touchante chez Simon ; mais son cœur, endurci par l’amour de l’argent, malgré sa prétendue pitié pour les pauvres, l’avait rendu absolument étranger à ce qui se passait. Si Jésus avait tant de prix pour Marie, Judas ne voyait en lui qu’un moyen de se procurer de l’argent, chose terrible à constater, qui nous montre où l’on peut arriver en tolérant chez soi de mauvais penchants, au lieu de les juger afin d’en être délivré. Si l’on nourrit des convoitises mauvaises, le mal se fortifie dans le cœur, quoique, pendant un temps, on puisse les maîtriser ; mais le moment arrive où, dominé par le péché, on devient «esclave de celui par qui on est vaincu» (2 Pierre 2:19), et apte à être le jouet de Satan qui prend alors entière possession de celui qu’il a fasciné par les charmes de la convoitise. C’est ce qui eut lieu pour Judas : «Et Satan entra dans Judas, surnommé Iscariote» (Luc 22:3). Après lui avoir mis au cœur de faire la chose (Jean 13:2), il entra en lui afin qu’il l’accomplisse. C’est ainsi que Satan procède avec tous les criminels ; sans crainte de Dieu, sans l’éducation chrétienne et morale dont nos jeunes lecteurs jouissent, ces malheureux ne cherchent pas à réprimer leurs dispositions naturelles au mal et Satan, le meurtrier, les conduit à ces crimes si souvent répétés. Le dernier assassin qui termina sa vie sur l’échafaud dans notre pays trouvait son plaisir, dans son enfance, à faire souffrir les animaux ; il ne lutta pas contre cet endurcissement à la vue de la souffrance et fut conduit au crime. Il importe de résister aux mauvaises dispositions de nos cœurs naturels, dès qu’elles se manifestent, afin de ne pas devenir le jouet de Satan lorsqu’il trouvera l’occasion favorable pour faire tomber et pour perdre, si possible, celui qui l’aura écouté. Une fois arrivé là, le diable a terminé son œuvre. Ni lui, ni ceux dont il aura pu se servir pour accomplir ses desseins n’auront la moindre compassion de leur victime, quand ils verront son désespoir, ainsi que nous le constaterons pour Judas (chap. 27:3-6).
Sous l’empire de Satan, Judas quitte Jésus et les disciples et va auprès des sacrificateurs s’enquérir du prix qui lui sera payé, s’il leur livre Jésus. Sur-le-champ, ils lui comptèrent trente pièces d’argent, le prix d’un esclave (Exode 21:32). Pour les chefs, Jésus ne valait pas plus : c’est là «ce prix magnifique auquel j’ai été estimé par eux», est-il dit en Zacharie 11:12, 13. «Dès lors, il cherchait une bonne occasion pour le livrer». Son aveuglement est complet jusqu’au moment où, son forfait consommé, ses yeux furent ouverts sur son crime, mais trop tard, éternellement trop tard !
Le moment de célébrer la Pâque étant arrivé, les disciples demandèrent à Jésus où il voulait qu’ils préparent ce qu’il fallait pour la manger. Il leur dit : «Allez à la ville auprès d’un tel, et dites-lui : Le Maître dit : Mon temps est proche ; je ferai la pâque chez toi avec mes disciples. Et les disciples firent comme Jésus leur avait ordonné, et ils apprêtèrent la pâque». Celui qui va se présenter comme le véritable Agneau de pâque, l’Agneau de Dieu, dispose de sa toute science divine et de son autorité de Maître pour faire trouver à ses disciples le lieu où il prendra, avec eux, son dernier repas. Pénétré du moment qui s’approche, il fait dire au maître du logis : «Mon temps est proche». Que de pensées se pressaient dans ce cœur humain capable de tout sonder divinement : la mort, la trahison, le reniement de Pierre, la haine d’un peuple aimé qu’il aurait voulu rassembler et bénir, et tant d’autres choses pénibles ; mais quel amour dans ce cœur parfait ! Amour divin qui a tout surmonté dans ce chemin de douleur afin de glorifier Dieu en rendant possible le salut des pécheurs. «Le soir étant venu, il se mit à table avec les douze. Et comme ils mangeaient, il dit : En vérité, je vous dis que l’un d’entre vous me livrera». Jésus savait que c’était Judas ; mais il voulait sonder le cœur et la conscience de chacun des disciples, et leur faire sentir ce qu’il y avait de pénible pour lui à la pensée que l’un d’eux le trahirait. Un de ceux avec lesquels il avait accompli son ministère d’amour et de puissance, et auquel le même amour avait été manifesté, «un d’entre vous», ces paroles devaient transpercer leur cœur. «Étant fort attristés, ils commencèrent, chacun d’eux, à lui dire : Seigneur, est-ce moi ?» Les disciples, sauf Judas, étaient si éloignés de penser à une chose pareille qu’ils s’en remettaient à la connaissance du Seigneur pour savoir lequel c’était. Jésus répondit : «Celui qui aura trempé la main avec moi dans le plat, celui-là me livrera. Le Fils de l’homme s’en va, selon qu’il est écrit de lui ; mais malheur à cet homme par qui le Fils de l’homme est livré ! Il eût été bon pour cet homme-là qu’il ne fût pas né». D’un côté, les conseils de Dieu devaient avoir leur accomplissement ; mais de l’autre, les instruments de la méchanceté du cœur de l’homme contre Dieu sont responsables de leurs actes et en porteront les conséquences. Pour Judas, et, hélas ! pour tant d’autres, mieux aurait valu qu’ils ne soient jamais nés. Judas dit aussi : «Est-ce moi, Rabbi ? Il lui dit : Tu l’as dit». Ni cette affirmation, ni le fait de manger le morceau trempé dans le plat, qu’on donnait à un convive comme gage d’affection, n’ébranla le traître ; Satan était en lui. Dans l’évangile de Jean, nous apprenons qu’après cela Judas sortit et alla chercher ceux qui devaient se saisir de Jésus.
Pendant qu’ils étaient à table, Jésus, préoccupé des siens, institua le mémorial de sa mort. La dernière pâque était accomplie. Instituée en souvenir de la délivrance du jugement des premiers-nés en Égypte, elle était le type du sacrifice de l’Agneau de Dieu, «Agneau sans défaut et sans tache, préconnu dès avant la fondation du monde, mais manifesté à la fin des temps pour vous» (1 Pierre 1:19, 20). La pâque n’avait plus sa raison d’être. Au lieu d’un acte parlant d’un sacrifice à accomplir dans un temps futur, Jésus laisse aux siens un souvenir de lui-même, mort pour accomplir leur délivrance du jugement éternel. «Et comme ils mangeaient, Jésus ayant pris le pain et ayant béni, le rompit et le donna aux disciples, et dit : Prenez, mangez, ceci est mon corps. Et, ayant pris la coupe et ayant rendu grâces, il la leur donna, disant : Buvez-en tous». Le corps, représenté par le pain rompu, et le sang, représenté par le vin, figurent la mort, car le sang séparé du corps, c’est la mort. Les croyants se souviennent donc d’un Christ mort jusqu’à ce qu’il revienne.
Que de souvenirs le pain et le vin évoquent chez ceux qui ont le privilège d’y participer ! Leur cœur se reporte à ce moment suprême où leur Seigneur et Sauveur passait par la mort ignominieuse de la croix, souffrant de la main des hommes, et subissant de la part de Dieu le jugement qui aurait pesé sur eux durant l’éternité. En présence des signes parlant de Jésus mort, tout son amour, manifesté dans cet acte, revient à la pensée. Ce mémorial rappelle aussi le fait que le Seigneur n’a trouvé ici-bas que le mépris, les souffrances et la mort de la part de ses créatures. Lui, le Fils de Dieu, le Roi des rois, le Seigneur des seigneurs, le Juge des vivants et des morts. C’est donc en reconnaissant toutes ses gloires et tous ses droits, au milieu d’un monde qui le rejette toujours, que ses rachetés se souviennent de lui en attendant qu’il revienne pour les prendre auprès de lui, et avec la pensée que bientôt il reparaîtra en gloire avec eux tous, pour établir son règne et recevoir l’honneur qui lui est dû par son peuple et toutes ses créatures.
En présentant la coupe, le Seigneur ajoute : «Car ceci est mon sang, le sang de la nouvelle alliance, qui est versé pour plusieurs en rémission de péchés». Dieu avait fait avec Israël en Sinaï une alliance par laquelle le peuple s’engageait à faire tout ce que l’Éternel lui avait commandé (Exode 19:5-8), et que confirmait le sang des taureaux (Exode 24:8 et Hébreux 9:20). Mais le peuple, par sa désobéissance, manqua à sa parole : «Ils ont transgressé mon alliance et ont été rebelles à ma loi» (Osée 8:1), et toutes les bénédictions découlant de leur fidélité ont disparu. En outre, lorsque le Messie leur est présenté, ils le mettent à mort. C’est pourquoi le peuple d’Israël — et par conséquent, tout homme — sur le pied de sa responsabilité, n’a plus droit à rien de la part de Dieu, si ce n’est en jugement. Mais selon la grâce infinie de Dieu, Christ ayant satisfait la justice divine, a établi, par sa mort, la base sur laquelle Dieu peut sauver le pécheur et donner à Israël les bénédictions impossibles à obtenir sous l’ancienne alliance. «Voici, des jours viennent, dit le Seigneur, et je conclurai, pour la maison d’Israël et pour la maison de Juda, une nouvelle alliance, non selon l’alliance que j’ai faite avec leurs pères, au jour où je les pris par la main pour les tirer du pays d’Égypte ; car ils n’ont pas persévéré dans mon alliance, et moi je les ai délaissés, dit le Seigneur. Car c’est ici l’alliance que j’établirai pour la maison d’Israël après ces jours-là, dit le Seigneur : En mettant mes lois dans leur entendement, je les écrirai aussi sur leurs cœurs, et je leur serai pour Dieu, et ils me seront pour peuple... et je ne me souviendrai plus jamais de leurs péchés ni de leurs iniquités» (Hébreux 8:8-13 et Jérémie 31:31-34). Si Dieu peut dire de telles choses à l’égard de son peuple terrestre, c’est en vertu de la mort de son Fils, dont le sang a pleinement satisfait la justice. C’est pourquoi, en présentant la coupe aux disciples, le Seigneur dit : «Ceci est mon sang, le sang de la nouvelle alliance». Ainsi les disciples avaient dans la coupe la garantie de l’accomplissement des bénédictions d’Israël, en attendant leur réalisation. Mais ce sang n’avait pas été versé seulement pour Israël. Le Seigneur dit en effet : «qui est versé pour plusieurs en rémission de péchés», c’est-à-dire pour tous ceux qui, en tous lieux, se placeront par la foi, au bénéfice de ce sang. L’alliance est faite avec Israël, et non avec les chrétiens, mais c’est le même sang qui donne aux uns et aux autres la rémission des péchés. Lorsque quelqu’un participe à la cène, il le fait parce que ses péchés sont pardonnés, en se souvenant du Seigneur mort à sa place ; c’est pourquoi celui qui ne possède pas le pardon de ses péchés ne doit pas prendre la cène, comme aussi ceux qui sont sauvés ne doivent pas se priver de ce privilège, qui, en même temps, répond au désir exprimé par le Seigneur, la nuit qu’il fut livré.
Jésus ajoute encore : «Mais je vous dis que désormais je ne boirai plus de ce fruit de la vigne, jusqu’à ce jour où je le boirai nouveau avec vous dans le royaume de mon Père». Le fruit de la vigne, le vin, qui est le symbole de la joie de Dieu et des siens, n’a pu se boire avec Israël selon la chair ; il n’a procuré aucune joie au cœur de Dieu, mais cette joie sera accomplie dans le millénium. Le Seigneur, en parlant du «fruit de la vigne», fait allusion à la coupe qui se prenait avec la pâque et qui symbolisait la joie (voir Luc 22:17, 18), ce qui n’est pas le cas pour la coupe de la cène, figure du sang du Seigneur. Le Seigneur dit : «Je n’en boirai plus, jusqu’à ce jour où je le boirai nouveau avec vous dans le royaume de mon Père». Jésus réalisera cette joie avec ses disciples, au ciel, dans le royaume de son Père, d’une manière nouvelle, et non sur cette terre comme les disciples pouvaient s’y attendre, ce qui sera le cas pour ceux qui jouiront du règne de Christ ici-bas.
«Ayant chanté une hymne, ils sortirent et s’en allèrent à la montagne des Oliviers».
Pour se rendre au mont des Oliviers il fallait sortir de la ville, descendre jusqu’au torrent du Cédron et remonter la colline en face de Jérusalem. Au lieu de se laisser accabler par le poids de tout ce qui l’attendait, Jésus met à profit le temps pendant lequel il marche vers Gethsémané, pour avertir les disciples de ce qui se passerait.
La prophétie de Zacharie allait s’accomplir : «Je frapperai le berger, et les brebis... seront dispersées» (Zacharie 13:7). Lui, le bon berger, avait pris soin de ses brebis, il les avait appelées par leur nom, en allant devant elles ; mais afin qu’elles aient la vie, il devait mourir pour elles, être frappé à leur place. Lorsque ces pauvres brebis, faibles, ignorantes et craintives, verraient le berger frappé, elles se disperseraient, comme un troupeau effrayé abandonne son conducteur. Mais lui, le bon Berger qui met sa vie pour ses brebis, pense à elles et leur donne un centre de ralliement à retrouver une fois la mort traversée et vaincue, lorsqu’il serait ressuscité. Il irait devant eux en Galilée, comme nous le verrons au chapitre 28.
Quoique très attaché au Seigneur, Pierre s’appuyait sur l’amour qu’il avait pour lui, au lieu de se défier de lui-même, afin de regarder à Dieu pour réaliser ce que son amour lui suggérait. Il répond donc à Jésus : «Si tous étaient scandalisés en toi, moi, je ne serai jamais scandalisé en toi». Pauvre Pierre, il ne savait pas que son moi, sur lequel il comptait pour manifester à Jésus son grand attachement, allait l’engager dans le chemin de la défaite. Jésus lui dit : «En vérité, je te dis, que cette nuit-ci, avant que le coq ait chanté, tu me renieras trois fois. Pierre lui dit : Quand même il me faudrait mourir avec toi, je ne te renierai point. Et tous les disciples dirent la même chose». Pierre, tout particulièrement, avait à apprendre, comme chacun de nous, que si nous avons le désir d’être fidèles et dévoués au Seigneur, nous ne pouvons compter sur nos propres forces. La force ne se trouve pas dans les désirs de la nouvelle nature. Il faut, dans le sentiment de notre faiblesse, la chercher en celui qui produit le vouloir et le faire selon son bon plaisir (Philippiens 2:13). Si nous ne nous défions pas de nous-mêmes, Dieu peut permettre, comme pour Pierre, que nous tombions, afin d’apprendre, par expérience, ce que sa Parole nous dit quant à nos propres capacités. Si Pierre avait écouté les avertissements du Seigneur, effrayé de ce dont il était capable, il aurait cherché le secours en Dieu. Au lieu de cela, il affirme qu’il ira jusqu’à la mort, et tombe à la première attaque. Dieu veuille que cette leçon, si humiliante et douloureuse pour Pierre, nous soit utile aussi !
Arrivé à Gethsémané avec ses disciples, Jésus leur dit : «Asseyez-vous ici, jusqu’à ce que, m’en étant allé, j’aie prié là». Jésus éprouve le besoin de se retirer pour épancher son cœur devant son Père à cette heure solennelle ; cependant il prend avec lui les trois disciples favorisés qui avaient assisté à la scène de la transfiguration : Pierre, Jean et Jacques, pour chercher auprès d’eux quelque sympathie. Mais, rempli de tristesse et d’angoisse, il leur dit : «Mon âme est saisie de tristesse jusqu’à la mort ; demeurez ici et veillez avec moi». Ce cher Sauveur, dans sa parfaite humanité, était accablé par la pensée de la mort qui s’avançait dans toute son horreur et projetait, sur son âme pure et sainte, son ombre terrifiante. Mais si douloureuse était l’étreinte des ombres d’une mort telle que celle qui l’attendait qu’il laissa ses trois compagnons et s’en alla plus avant pour présenter à son Père la prière à laquelle nul ne pouvait se joindre, car qui pouvait comprendre les affres d’un tel moment ? Il tomba sur sa face en disant : «Mon Père, s’il est possible, que cette coupe passe loin de moi ; toutefois, non pas comme moi je veux, mais comme toi tu veux». Il s’agissait, dans ce moment suprême, d’accepter la coupe de la colère divine que nous avions méritée, la mort, jugement de Dieu. Satan faisait peser sur l’âme de notre adorable Sauveur toutes les conséquences terrifiantes de son obéissance jusqu’à la mort ; son âme pure et sainte ne pouvait que souhaiter que l’heure terrible de la mort passe loin de lui, et d’un autre côté ses perfections ne pouvaient que lui faire accepter d’aller jusqu’au bout dans l’accomplissement de la volonté de son Père. Après avoir prié, Jésus revient vers ses disciples et les trouve endormis. Dans sa divine bonté, il dit à Pierre : «Ainsi, vous n’avez pas pu veiller une heure avec moi ?» parole qui aurait dû toucher son cœur et le rendre vigilant. Puis il ajoute : «Veillez et priez, afin que vous n’entriez pas en tentation ; l’esprit est prompt, mais la chair est faible». Il ne leur demande pas de veiller avec lui, mais de veiller pour leur propre compte, afin que, conscients de leur faiblesse, ils ne s’exposent pas à une épreuve qu’ils ne pourront supporter. Le Seigneur soutenait à lui seul la lutte dans laquelle Satan ne ménageait rien pour le faire reculer devant l’œuvre par laquelle lui, la «Semence de la femme», devait lui briser la tête. Jésus s’éloigne de nouveau et dit à son Père pour la seconde fois : «Mon Père, s’il n’est pas possible que ceci passe loin de moi, sans que je le boive, que ta volonté soit faite». Puis il revient vers les disciples et les trouve rendormis. Cette fois, il ne leur dit rien ; il n’attend plus rien d’eux. Ainsi s’accomplit ce qui est dit au Psaume 69:20 : «J’ai attendu que quelqu’un eût compassion de moi, mais il n’y a eu personne,... et des consolateurs, mais je n’en ai pas trouvé».
«Et les laissant, il s’en alla de nouveau, et pria une troisième fois, disant les mêmes paroles». C’est dans ces moments où Jésus était accablé par cette tristesse mortelle, que se passait ce qui est dit en Hébreux 5:7 : «Qui, durant les jours de sa chair, ayant offert, avec de grands cris et avec larmes, des prières et des supplications à celui qui pouvait le sauver de la mort». Qui saura les angoisses et les douleurs de ce cher Sauveur, mis, par Satan, en présence des horreurs de la mort pour le détourner de l’œuvre qu’il avait entreprise, sans qu’il puisse ni désirer la mort ni se soustraire à la volonté de son Père ? Là, comme lors de la tentation, au début de son ministère, l’obéissance lui a fait trouver la victoire. Jésus prend la coupe, non de la main de Satan, mais comme il le dit en Jean 18:11, de la main de son Père. Aussi, dans un calme parfait, il revient vers ses disciples et leur dit : «Dormez dorénavant et reposez-vous ; voici, l’heure s’est approchée, et le fils de l’homme est livré entre les mains des pécheurs. Levez-vous, allons ; voici, celui qui me livre s’est approché». Ils auront du repos. Quelles paroles de grâce, qui nous concernent aussi ! Désormais les coupables pourraient jouir du repos, parce que le juste, l’innocent allait endurer la mort qu’ils avaient méritée !
Nous voyons donc, dans cette scène de Gethsémané, tout ce que Jésus a souffert en présence de la mort que Satan lui présentait avec toutes ses terreurs, comme jugement de Dieu. Grâces soient rendues à Dieu et gloire au Seigneur Jésus ! Il a obéi ; son amour a été plus fort que la mort, amour que beaucoup d’eaux ne peuvent éteindre (Cantique 8:7), pas même celles de l’angoisse de la mort, car, si c’était arrivé, dans ce moment où notre salut était, pour ainsi dire, en jeu, nous aurions tous été perdus.
Maintenant cette mort restait à traverser dans sa terrible réalité pour un être aussi saint et parfait que le Fils de Dieu, le Fils de l’homme. Il marche à cette heure ; celui qui le livrait était proche.
Quel contraste entre la scène où la gloire de Jésus brille au milieu des nuages de l’ombre de la mort, où ses perfections triomphent dans l’obéissance, et celle que ces versets nous présentent, où nous voyons Judas, l’homme sous le pouvoir de Satan, accomplissant le plus infâme des forfaits pour trente pièces d’argent ! Comme Jésus parlait encore à ses disciples qu’il avait dû lui-même réveiller, Judas arrive, «et avec lui une grande foule avec des épées et des bâtons, de la part des principaux sacrificateurs et des anciens du peuple». Précautions bien inutiles que ces armes, pour prendre celui qui s’offrait lui-même à Dieu, comme «un agneau conduit à la boucherie». Mais aucun d’eux ne le connaissait comme tel, car, s’ils l’eussent connu, «ils n’eussent pas crucifié le Seigneur de gloire» (1 Corinthiens 2:8). Accomplissant son œuvre de traître, Judas s’approche de Jésus et lui dit : «Je te salue, Rabbi», et lui donne avec empressement le baiser de trahison qui devait le désigner à cette bande inique. Avec toute sa dignité, Jésus lui dit : «Ami, pourquoi es-tu venu ?» nouvelle parole propre à sonder Judas. Alors ceux qui le suivaient se saisirent de Jésus. Un de ses disciples, nous savons que c’est Pierre (Jean 18:10), tira son épée, en frappa l’esclave du souverain sacrificateur et lui emporta l’oreille. Pierre voulait montrer qu’il pouvait défendre son Maître avant d’aller à la mort, comme il l’avait dit ; tandis que le Seigneur n’a pas ouvert la bouche (Ésaïe 53:7), car s’il l’avait ouverte pour sa défense, il aurait anéanti ses ennemis. Au contraire, il dit à Pierre : «Remets ton épée en son lieu ; car tous ceux qui auront pris l’épée périront par l’épée. Penses-tu que je ne puisse pas maintenant prier mon Père, et il me fournira plus de douze légions d’anges ? Comment donc seraient accomplies les écritures, qui disent qu’il faut qu’il en arrive ainsi ?»
Les perfections de Jésus brillent avec beauté, au milieu du sombre tableau du cœur de l’homme, en tous ceux qui l’entourent : Judas entièrement dans les mains de Satan ; la foule aveuglée, qui s’est laissé armer contre son bienfaiteur ; les disciples absolument étrangers à tout ce qui concerne Jésus, et lui est là au milieu d’eux pour accomplir ce que disaient les Écritures, dans tout le calme et la dignité de sa personne. Il répond avec douceur et fermeté à Judas comme à Pierre, et à cette foule, au milieu de laquelle il a vécu en répandant bienfaits sur bienfaits, il cherche à faire sentir son égarement en disant : «Êtes-vous sortis comme après un brigand, avec des épées et des bâtons, pour me prendre ? J’étais tous les jours assis parmi vous, enseignant dans le temple ; et vous ne vous êtes pas saisis de moi. Mais tout ceci est arrivé, afin que les écritures des prophètes soient accomplies». Jésus montre aux uns et aux autres qu’en dehors de toute la méchanceté et de l’ignorance qui les caractérisent, il est là pour accomplir les Écritures, se soumettant à tout, mais en souffrant profondément de tout ce qui caractérise l’attitude de chacune de ces classes de personnes à son égard.
Voyant Jésus pris, tous les disciples le laissèrent et s’enfuirent. Le Fils de l’homme était livré entre les mains des pécheurs.
Pendant que Judas conduisait sa troupe pour se saisir de Jésus, les scribes et les anciens, assemblés chez Caïphe, le souverain sacrificateur, attendaient l’issue de cette triste expédition. La foule arrive, et ceux qui s’étaient saisis de Jésus l’amènent à Caïphe, qui présidait le sinistre conseil. Derrière ce cortège, Pierre suivait de loin ; il voulait tenir sa parole, suivre Jésus jusqu’à la mort, tandis qu’il aurait dû s’écarter et prier afin de ne pas entrer en tentation. Au contraire, il entra dans la cour du souverain sacrificateur, d’où il pouvait voir ce qui se passait devant Caïphe. «Étant entré, il s’assit avec les huissiers pour voir la fin».
Tout le sanhédrin (conseil et tribunal suprême du peuple juif) avait le dessein bien arrêté de faire mourir Jésus. Il s’agissait seulement de trouver pour cela un motif pour couvrir leur haine. Ne sachant lequel invoquer, ils introduisirent quelques faux témoins contre lui, mais ne trouvèrent rien qui puisse le faire condamner. À la fin, deux d’entre eux déclarèrent : «Celui-ci a dit : Je puis détruire le temple de Dieu, et en trois jours le bâtir». Jean 2:19-22 démontre la fausseté de cette assertion. Le souverain sacrificateur se leva et dit à Jésus : «Ne réponds-tu rien ? De quoi ceux-ci témoignent-ils contre toi ? Mais Jésus garda le silence». Jésus ouvrira la bouche lorsqu’il s’agira de rendre témoignage à la vérité de sa personne ; mais il ne se défend pas contre un faux témoignage. Alors Caïphe, irrité de ce silence, lui dit : «Je t’adjure, par le Dieu vivant, que tu nous dises si toi, tu es le Christ, le Fils de Dieu. Jésus lui dit : Tu l’as dit. De plus, je vous dis : dorénavant vous verrez le Fils de l’homme assis à la droite de la puissance, et venant sur les nuées du ciel». En effet, Jésus était le Christ, le Fils de Dieu, mais si, comme tel, il était rejeté, un jour viendra où son peuple le verra comme Fils de l’homme venant sur les nuées du ciel avec puissance et une grande gloire (Chap. 24:30 et Apocalypse 1:7). À l’ouïe de ce beau témoignage, Caïphe déchira ses vêtements, et s’adressant au conseil, dit : «Il a blasphémé ; qu’avons-nous encore besoin de témoins ? Voici, vous avez ouï maintenant son blasphème : que vous en semble ?» La réponse désirée ne se fait pas attendre : «Il mérite la mort». La sentence, décidée depuis longtemps par les Juifs, était prononcée ; dès lors, plus d’égards envers ce condamné, et ces hommes, les dignitaires de la nation, donnent libre cours à leur haine et à leur mépris. Avec une vulgaire bassesse, ils lui crachent au visage, lui donnent des soufflets, d’autres le frappent et disent : «Prophétise-nous, Christ ; qui est celui qui t’a frappé ?» Jésus demeure calme et silencieux au milieu de cette scène, jugeant de tout, sentant tout et sachant tout. Il réalisait ce que l’apôtre Pierre, témoin de ces outrages, a dit de lui : «Lui qui n’a pas commis de péché, et dans la bouche duquel il n’a pas été trouvé de fraude ; qui, lorsqu’on l’outrageait, ne rendait pas d’outrage, quand il souffrait, ne menaçait pas, mais se remettait à celui qui juge justement» (1 Pierre 2:22, 23). Dans ces versets, Pierre présente Jésus comme modèle, Puissions-nous tous l’imiter !
Pendant que Jésus était devant Caïphe, une autre scène avait lieu dans la cour où Pierre se trouvait. Une servante survint et lui dit : «Et toi, tu étais avec Jésus le Galiléen». Et il nia devant tous, disant : Je ne sais ce que tu dis. Une autre servante vint et, s’adressant à ceux qui étaient présents, leur dit en désignant Pierre : «Celui-ci aussi était avec Jésus le Nazaréen. Et il le nia de nouveau avec serment : Je ne connais pas cet homme ! Et un peu après, ceux qui se trouvaient là s’approchèrent et dirent à Pierre : Certainement, toi, tu es aussi de ces gens-là ; car aussi ton langage te fait reconnaître. Alors il se mit à faire des imprécations et à jurer : Je ne connais pas cet homme ! Et aussitôt le coq chanta. Et Pierre se souvint de la parole de Jésus, qui lui avait dit : Avant que le coq chante, tu me renieras trois fois. Et étant sorti dehors, il pleura amèrement».
Pauvre Pierre ! Il aimait sincèrement Jésus ; mais trop confiant en lui-même, il n’avait pas pris garde aux avertissements du Seigneur (v. 31, 34, 40, 41). N’ayant pas serré ces paroles dans son cœur, il se laissa surprendre par la scène qui s’était déroulée devant ses yeux : témoin de la haine dont son Maître était l’objet et qui se donnait alors libre cours, il ne voit que le danger de s’identifier avec celui que tous haïssent. Sa chair, qu’il n’avait pas discernée dans ses bonnes résolutions, redoute les crachats et les soufflets, et là, sans ressources spirituelles, il n’est plus en état de faire autre chose que de s’épargner en reniant son cher Maître.
Le chant du coq, le souvenir des paroles de Jésus (en Luc 22:61, son regard), viennent subitement dissiper l’obscur et froid brouillard qui l’avait enveloppé. La lumière se fait dans son cœur ; il comprend avec amertume ce qu’il vient de faire ; il sort brisé et pleure amèrement sur sa terrible faute.
Lecteurs, qui de nous n’a pas connu quelque chose de cette amertume ? Dans bien des occasions, n’avons-nous pas préféré n’être pas connus comme disciples de Christ ? Sans proférer un reniement avec imprécation, nous avons, plus d’une fois, évité de laisser voir que nous sommes chrétiens, disciples de celui qui a souffert de la part des hommes les crachats, les soufflets et tant d’outrages, et de la part de Dieu sa terrible colère à cause de nos péchés. Lorsque nous préférons la faveur du monde, qui ne veut rien de notre Sauveur, à l’opprobre qui se rattache à son nom, nous le renions. Alors quelle tristesse remplit le cœur à la pensée de son amour qui demeure toujours le même et dont nous tenons si peu compte ! Un jour tout sera manifesté et nous verrons les conséquences éternelles de notre conduite ici-bas. «Car quiconque aura honte de moi et de mes paroles, le Fils de l’homme aura honte de lui quand il viendra dans sa gloire et dans celle du Père et des saints anges» (Luc 9:26). Pensons au Seigneur et non à nous-mêmes, à son amour pour nous et à la gloire dans laquelle il apparaîtra avec tous ses saints, afin d’être gardés fidèles et éviter l’amertume de l’avoir déshonoré. Sachons, comme Moïse, estimer «l’opprobre du Christ un plus grand trésor que les richesses de l’Égypte ; car il regardait à la rémunération» (Héb. 11:26).
La mort de Jésus se décida dans le conciliabule tenu chez Caïphe après son arrestation ; mais l’assemblée entière des sacrificateurs et des anciens devait ratifier officiellement la sentence. Aussi, dès le matin, ce conseil se réunit pour prononcer la condamnation de Jésus. La Parole ne dit pas ce que l’on avait fait de lui depuis sa comparution de la veille devant Caïphe. Après l’avoir lié, ils le livrèrent à Pilate, le gouverneur romain, qui seul pouvait ordonner sa mort et l’envoyer au supplice.
Lorsque Judas vit son Maître condamné, ses yeux s’ouvrirent sur l’horreur de son action et, dans les tourments d’un remords inutile, il reporta les trente pièces d’argent à ceux qui les lui avaient comptées, leur confessant son iniquité : «J’ai péché», leur dit-il, «en livrant le sang innocent». Cette confession trouva des cœurs aussi endurcis que le sien. Les sacrificateurs et les anciens ne se souciaient pas davantage des remords de Judas que de l’innocence de Jésus. Ils lui répondirent : «Que nous importe ! tu y aviseras». Leur dessein s’accomplissait ; ils ne s’occupaient pas d’autre chose. Judas pensait probablement que Jésus échapperait à ceux qui viendraient le prendre, comme il l’avait fait plusieurs fois, tandis que lui jouirait de son argent (voir Luc 4:29,30 ; Jean 8:59 et 10:39). C’est pourquoi, voyant Jésus condamné, le désespoir s’empara de lui et, après avoir jeté l’argent dans le temple, il alla se pendre. Il avait vécu dans l’aveuglement, tout en étant avec le Seigneur ; sa cupidité avait donné à Satan une prise facile sur son âme. Ayant vendu son Maître, il ne trouve de compassion ni chez les hommes, ni en Satan, et privé de toute ressource, il ne lui restait qu’à se précipiter dans l’abîme, en attendant le jour où il comparaîtra devant celui qu’il vendit pour trente pièces d’argent.
Les sacrificateurs, gens scrupuleux, mais sans conscience, ne veulent pas que cet argent aille au trésor sacré, parce que c’était le prix du sang. Ils décident d’acheter un champ, «le champ du potier», pour la sépulture des étrangers. Hélas ! la séparation d’avec les étrangers n’avait plus sa raison d’être ; ils s’étaient élevés contre le Dieu qui les avait appelés d’entre toutes les familles de la terre, ils s’étaient associés aux Gentils pour rejeter leur Messie ; Dieu allait les rejeter comme peuple et les disperser parmi les nations. La provenance de cet argent fit appeler ce champ «Champ de Sang». Les malheureux Juifs accomplissaient de la sorte une prophétie qu’ils auraient dû connaître : «Et ils ont pris les trente pièces d’argent, le prix de celui qui a été évalué, lequel ceux d’entre les fils d’Israël ont évalué ; et ils les ont données pour le champ du potier, comme le Seigneur m’avait ordonné» (Matt. 27:9, 10, voir Zacharie 11:12, 13).
Jésus est amené lié devant le gouverneur romain, Pilate, qui lui demande : «Es-tu, toi, le roi des Juifs ? Et Jésus lui dit : Tu le dis». On comprend que les Juifs l’aient accusé auprès de Pilate de prétendre à la royauté ; c’était un bon moyen de gagner le gouverneur et d’obtenir de lui une condamnation, car Pilate devait maintenir l’autorité impériale contre toute usurpation. Mais Jésus ne nia pas son droit au trône. Il fit ce que l’apôtre Paul appelle sa «belle confession devant Ponce Pilate» (1 Timothée 6:13). Comme cet aveu ne le faisait pas condamner par Pilate, les sacrificateurs et les anciens l’accusèrent encore, mais il ne répondit rien. Alors Pilate lui dit : «N’entends-tu pas de combien de choses ils portent témoignage contre toi ?» Au grand étonnement du gouverneur, Jésus ne lui répondit pas un seul mot. À quoi aurait servi qu’il se défende à ce moment-là ? Sa vie tout entière avait prouvé ce qu’il était de la part de Dieu au milieu du peuple, et rien n’avait convaincu les Juifs. La méchanceté de l’homme devait se manifester à son comble par la mort de Jésus, là où l’amour de Dieu aussi serait révélé.
Pour plaire aux Juifs, Pilate avait coutume, à la Pâque, de relâcher un prisonnier à leur choix. Embarrassé pour prononcer un jugement sur Jésus, qu’il ne reconnaissait pas comme coupable, il leur proposa de le laisser aller, ou bien un prisonnier fameux nommé Barabbas. Pendant que Pilate siégeait au tribunal, sa femme lui fit dire : «N’aie rien à faire avec ce juste ; car j’ai beaucoup souffert aujourd’hui à son sujet dans un songe». Dieu voulut qu’un témoignage à la justice de son Fils fût rendu à ce moment-là par une païenne, en présence de ceux qui sont appelés «les siens» et qui ne l’ont pas reçu (Jean 1:11). Ce témoignage augmenta le malaise de Pilate, mais les principaux sacrificateurs et les anciens persuadèrent aux foules de demander Barabbas et de faire périr Jésus. «Le gouverneur... leur dit : Lequel des deux voulez-vous que je vous relâche ? Et ils dirent : Barabbas. Pilate leur dit : Que ferai-je donc de Jésus, qui est appelé Christ ? Ils disent tous : Qu’il soit crucifié ! Et le gouverneur dit : Mais quel mal a-t-il fait ? Et ils s’écriaient encore plus fort, disant : Qu’il soit crucifié ! Et Pilate, voyant qu’il ne gagnait rien, mais que plutôt il s’élevait un tumulte, prit de l’eau et se lava les mains devant la foule, disant : Je suis innocent du sang de ce juste ; vous, vous y aviserez. Et tout le peuple, répondant, dit : Que son sang soit sur nous et sur nos enfants ! Alors il leur relâcha Barabbas ; et ayant fait fouetter Jésus, il le livra pour être crucifié».
Cette scène nous présente un tableau affreux du cœur naturel de l’homme. Nous y voyons les chefs du peuple, hommes religieux et scrupuleux, mais sans conscience, mus par une haine aveugle et terrible contre le Dieu qu’ils prétendaient servir, persuader la foule de demander de Pilate la libération, contre son gré, d’un brigand plutôt que de Jésus, des soins duquel ces foules mêmes avaient profité durant son ministère d’amour. Pilate, représentant de l’autorité que Dieu avait confiée aux Gentils, quoique convaincu de l’innocence de Jésus, sans force devant les Juifs, cède à leurs instances, plus soucieux de maintenir sa réputation au milieu d’un peuple qui le haïssait à cause du joug de Rome, que d’exercer la justice.
On peut remarquer que Matthieu fait ressortir, dans son récit, la responsabilité des Juifs dans le rejet de leur Messie. C’est sur eux, tout particulièrement, que pèse la culpabilité de la mort de Christ ; ils en endossent volontairement les conséquences quand ils disent : «Que son sang soit sur nous et sur nos enfants !» Aussi faut-il s’étonner de tout ce que ce peuple a souffert et soufffrira encore, jusqu’à ce qu’il se tourne vers «Celui qu’ils ont percé ?» Toutes les atrocités qu’ont endurées les Juifs depuis la prise de Jérusalem jusqu’à nos jours encore, dans certains pays, sont comme l’écho qui répond au cri poussé devant Pilate. Toutefois les Gentils ont leur part de responsabilité dans la mort de Jésus. Le gouverneur romain, qui ne connaissait, ni ne craignait ce Dieu dont il tenait son pouvoir, n’use de son autorité que pour fouetter et crucifier celui qu’il sait innocent, au lieu de maintenir la justice devant le peuple qui aurait dû se soumettre à lui. Il croit dégager sa responsabilité en se lavant les mains et rejeter la faute entière sur les Juifs, mais devant Dieu, chacun est responsable de ses propres actes. Comme la faute de Judas ne disculpait pas les chefs, celle des Juifs ne disculpera pas Pilate au jour du jugement. Chacun sera jugé d’après ses œuvres et sa propre responsabilité.
Vouloir rejeter sa faute sur autrui est un acte qui date de la chute. C’est ce que firent nos premiers parents. Adam rejette sa faute sur sa femme et sur Dieu lui-même, en disant : «La femme que tu m’as donnée pour être avec moi, — elle, m’a donné de l’arbre, etc.», et la femme dit : «le serpent m’a séduite» (Genèse 3:12, 13).
On ne peut se justifier du mal que l’on a commis ; pour obtenir le pardon et la purification, il faut confesser sa faute et s’en humilier. C’est Dieu seul qui justifie ; le coupable ne le peut pas.
Au milieu de cette scène, où tous les hommes ont l’occasion de manifester ce qu’ils sont quant à Dieu, comme la loi même n’avait pu le faire, Jésus, l’homme divin, l’homme parfait, se tient là, seul au milieu des pécheurs. Victime volontaire, il accepte tout ce que les hommes lui infligent sur le chemin qui le conduit à la croix où il va glorifier Dieu ; et ainsi, par sa mort, de tels hommes, et vous et moi, nous pouvons être sauvés par la foi.
Quel amour et quelle reconnaissance ne devons-nous pas à celui qui s’est laissé conduire à la croix, pour nous, comme un agneau à la boucherie !
Lorsque Pilate eut rendu son inique verdict, les soldats assemblèrent contre Jésus toute la cohorte (*). Après avoir comparu successivement devant les chefs des Juifs et devant le gouverneur romain, le Seigneur est livré entre les mains des soldats, gens grossiers et brutaux qui trouvaient, dans sa personne, une occasion de se moquer des Juifs, en le maltraitant et en le faisant souffrir avant de le crucifier. Ils le dépouillèrent de ses vêtements et le revêtirent d’un manteau d’écarlate ; ils tressèrent une couronne d’épines qu’ils mirent sur sa tête et placèrent dans sa main droite un roseau, en guise de sceptre. Vêtu, par dérision, comme un roi, notre précieux Sauveur subit toutes les moqueries, les insultes et les outrages de ces hommes barbares qui fléchissaient les genoux devant lui et lui disaient : «Salut, roi des Juifs ! Et ayant craché contre lui, ils prirent le roseau et lui en frappaient la tête». Sous ces coups, les épines devaient s’enfoncer douloureusement dans le front divin de l’homme parfait dont le cœur n’était pas moins meurtri que le front. C’est ainsi que, d’une manière humiliante et douloureuse, Jésus endurait la contradiction de la part des pécheurs contre lui-même (Hébreux 12:3). Un jour, ces soldats païens, ainsi que tous les hommes, ploieront les genoux devant le même Seigneur lorsqu’il sera manifesté en gloire. Mais dans ce moment le Roi des rois et le Seigneur des seigneurs était l’Agneau sans défense, la victime allant à la croix pour accomplir l’œuvre de la rédemption en faveur d’impies tels que ceux qui nous représentaient. À cette heure solennelle, la haine des hommes contre Dieu et son amour pour eux allaient se rencontrer à la croix.
(*) La cohorte était une unité de troupe romaine, composée de 400 à 600 soldats.
Dieu veuille que beaucoup encore ploient les genoux devant Jésus, comme Sauveur et Seigneur, dans leur reconnaissance envers lui pour l’amour qu’il a montré envers eux en accomplissant l’œuvre de leur salut ! Et puissent-ils ne pas avoir à les ployer comme pécheurs devant leur Juge !
Les soldats, après s’être moqués de Jésus, lui ôtèrent le manteau d’écarlate, le revêtirent de ses propres vêtements et l’emmenèrent en Golgotha pour le crucifier. C’était en général le condamné qui portait sa croix jusqu’au lieu du supplice. En Jean 19:17, il est dit que Jésus «sortit portant sa croix». Ici, nous lisons : «Comme ils sortaient, ils trouvèrent un homme de Cyrène, nommé Simon, qu’ils contraignirent de porter sa croix». Il n’y a pas de contradiction entre ces récits : Simon passait au moment où Jésus sortait chargé de sa croix et on le contraignit de la porter. Pourquoi ? La Parole ne le dit pas.
Arrivés au lieu du supplice, les soldats donnèrent à Jésus du vinaigre mêlé de fiel, boisson qui avait pour effet d’insensibiliser quelque peu le condamné pendant la crucifixion ; mais, après l’avoir goûté, Jésus refusa d’en boire. Il voulait supporter d’une manière consciente tout ce qui lui était imposé ; il trouvait ailleurs, en son Père, le secours dont il avait besoin pour endurer ses souffrances jusqu’à la fin. Dépouillé de ses vêtements, Jésus est crucifié entre deux malfaiteurs. Les soldats partagent entre eux ses vêtements et accomplissent, à leur insu, ce qui était dit au Psaume 22:18 : «Ils partagent entre eux mes vêtements». Leur œuvre achevée, ils s’assirent pour veiller sur lui. Sur la croix, on plaça au-dessus de sa tête une inscription indiquant le sujet de sa condamnation qui n’était autre que sa belle confession devant Ponce Pilate, et que Pilate lui-même écrivit : «Celui-ci est... le roi des Juifs». Malgré les Juifs, le témoignage de ce que Jésus était pour la nation devait être rendu publiquement jusqu’au bout.
Les passants l’injuriaient, hochaient la tête, tournaient en dérision les paroles de Jésus touchant le temple. Les principaux sacrificateurs, les scribes et les anciens se moquaient de lui et disaient : «Il a sauvé les autres, il ne peut se sauver lui-même ; s’il est le roi d’Israël, qu’il descende maintenant de la croix, et nous croirons en lui. Il s’est confié en Dieu ; qu’il le délivre maintenant, s’il tient à lui ; car il a dit : Je suis Fils de Dieu». Tout ce qu’il y avait de plus sensible pour son cœur était foulé et broyé dans ce moment où l’épreuve terrible ne faisait que manifester ses perfections. Il n’ouvrait pas la bouche. C’est là que, selon le Psaume 22, il était entouré par ces lions déchirants et rugissants, ces taureaux de Basan, cette assemblée de méchants. Les brigands mêmes qui étaient crucifiés avec lui l’insultaient.
On comprend que de terribles jugements ont été, et seront encore, la conséquence de toute la méchanceté manifestée par ses bourreaux, et tout particulièrement par les Juifs, contre la personne adorable du Seigneur Jésus, car toutes les souffrances qu’il a endurées de la part des hommes amèneront les jugements annoncés dans les Psaumes et les prophètes, et non le salut des pécheurs.
Du côté du Seigneur, combien tout est de nature à attirer nos cœurs à sa personne adorable, quand nous le voyons exposé à la méchanceté du cœur naturel, sans qu’il ouvre la bouche, sans défense, endurant «une telle contradiction des pécheurs contre lui-même», lorsqu’il pouvait anéantir ses ennemis par une parole. Son amour pour son Dieu, qu’il voulait glorifier dans sa mort comme dans sa vie ; son amour pour le pécheur qu’il voulait sauver, lui faisaient tout accepter. Puissions-nous ne pas considérer cette scène de Golgotha sans qu’elle remplisse nos cœurs d’amour et de reconnaissance envers Jésus qui s’est laissé placer sous la condamnation que nous avions méritée ! Pour celui qui ne possède pas encore le salut, cette scène n’est-elle pas propre à l’attirer au Sauveur ?
Une autre scène commence avec ces versets, scène impossible à décrire, dont nous avons toute l’explication possible dans le cri de Jésus : «Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ?» Nous avons assisté aux angoisses de Gethsémané, où Jésus avait à affronter la puissance de Satan qui se servait des terreurs de la mort pour le faire reculer si possible en présence d’une telle mort. Puis nous avons un peu vu les supplices moraux et physiques que les hommes ont infligés à Jésus avec une haine raffinée autant que brutale ; mais tout cela n’était que le chemin par lequel Jésus, la victime volontaire, allait s’offrir à Dieu et endurer de sa part le jugement dû au coupable. Car aucune des souffrances qui ont précédé cette heure terrible, la sixième heure, n’a expié un seul péché, et si Jésus était descendu de la croix, comme ces méchants le lui disaient (et il aurait pu le faire), aucun pécheur n’eût pu être sauvé. Toutes ces souffrances-là, comme nous l’avons dit, ont pour résultat les jugements de Dieu sur les hommes, et non leur salut.
«Mais, depuis la sixième heure (notre midi), il y eut des ténèbres sur tout le pays, jusqu’à la neuvième heure (trois heures)». Ces ténèbres vinrent interrompre les hommes dans la manifestation de leur haine contre Jésus, et isolèrent complètement la sainte Victime de la scène au milieu de laquelle elle avait souffert jusqu’ici, afin que, dans ces trois heures terribles, elle fût élevée entre le ciel et la terre, dans de profondes ténèbres, et abandonnée de Dieu sous le jugement éternel qui était notre part, cela pour que l’expiation des péchés fût accomplie.
Là, Jésus souffrait de la part du Dieu juste et saint le châtiment que méritaient tous ceux qui sont et seront sauvés par la foi, afin que Dieu puisse donner la vie éternelle à quiconque croit. Là, sur cette croix maudite, rien ne lui a été épargné. Si les hommes rendront compte au jour du jugement de toutes les paroles oiseuses qu’ils auront dites (Matthieu 12:36), le Seigneur a souffert de la part de Dieu pour chacune de ces paroles afin que, par la foi, tous ceux qui les ont prononcées puissent recevoir le pardon. C’est ce jugement complet qui, dans les sacrifices pour le péché, était représenté par le feu qui consumait entièrement la victime (Lévitique 16:27). C’est pourquoi nous ne pouvons décrire les souffrances que Jésus a endurées de la part de Dieu contre le péché ; pauvres misérables pécheurs, nous les avons attirées sur le Fils de Dieu, qui a bien voulu les endurer pour nous les épargner. Si nous avions dû boire la plus petite partie de la coupe de la colère de Dieu contre le moindre de nos nombreux péchés, cela aurait été pour nous une éternité de souffrances, sans que jamais ce péché soit expié. Dans la mesure où les croyants comprennent l’œuvre de la croix et l’amour que Jésus a montré en accomplissant une telle œuvre pour des coupables, ils peuvent bien dire au Seigneur :
Tu souffris, ô Jésus, Sauveur, Agneau, Victime !
Ton regard infini sonda l’immense abîme,
Et ton cœur infini, sous ce poids d’un moment,
Porta l’éternité de notre châtiment.
… en attendant que, semblables à Christ, dans la gloire, nous comprenions pleinement l’œuvre de la croix. Devant le tribunal de Christ, nous verrons la somme immense de nos péchés et comprendrons la sainteté, la justice, et toutes les gloires de Dieu que Jésus a maintenues quand il était chargé de nos péchés. Ainsi Dieu peut introduire de tels êtres dans sa présence comme de bien-aimés enfants, dans un état de perfection qui lui convient, et là nous pouvons jouir de tout son amour. Nous verrons aussi alors la gloire que Jésus a quittée pour devenir homme et victime pour le péché, et, connaissant comme nous avons été connus, nous serons capables d’adorer et de louer dans la perfection l’Agneau qui fut immolé pour nous racheter et nous introduire dans une telle gloire.
Ce culte rendu à Dieu le Père et au Seigneur Jésus par les rachetés commence ici-bas dans une grande faiblesse et beaucoup d’imperfections, mais l’objet et le sujet de ce culte où nous adorons le Père et le Fils sont les mêmes que dans la gloire et c’est par le même Esprit que sur la terre et dans les cieux il est et sera éternellement offert.
Lorsque Jésus eut fait entendre ce cri : «Éli, Éli, lama sabachthani ? c’est-à-dire : Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ?» ceux qui l’entouraient ne comprenant sans doute pas ce langage dirent : «Il appelle Élie» ; l’un d’eux courut et lui offrit au bout d’un roseau, une éponge remplie de vinaigre, accomplissant ce qui avait été dit de lui : «Dans ma soif, ils m’ont abreuvé de vinaigre» (Psaume 69:21). D’autres disaient : «Laisse, voyons si Élie vient pour le sauver». Divin Sauveur ! il n’avait pas besoin d’Élie pour le sauver ; il accomplissait l’œuvre en vertu de laquelle Élie avait pu monter au ciel sans passer par la mort, en y passant lui-même. Personne ne savait ce qui arrivait sur cette croix ; pour que le pécheur le sache, il fallait que Jésus descende dans la mort, qu’il ressuscite, qu’il soit glorifié et qu’il envoie le Saint Esprit. Grâces à Dieu, tout croyant maintenant le sait et peut chanter :
Pour toi, Jésus, la souffrance,
Les pleurs, la mort, l’abandon !
Et pour nous la délivrance,
Le salut et le pardon.
«Et Jésus, ayant encore crié d’une forte voix, rendit l’esprit». Tout ce que Jésus avait à faire étant accompli, il n’était pas nécessaire qu’il reste plus longtemps sur la croix, tandis que les autres crucifiés devaient attendre qu’à force de souffrir, une mort lente et naturelle viennet mettre fin à une longue agonie, ils restaient parfois trois ou quatre jours sur la croix avant d’expirer. Jésus, venu pour donner sa vie, avait «le pouvoir de la laisser, et... le pouvoir de la reprendre», il avait reçu ce commandement de son Père (Jean 10:18). S’il se laissait prendre volontairement par les hommes, il laissait aussi sa vie lui-même par obéissance ; personne ne pouvait la lui ôter. Lui-même rendit l’esprit lorsque tout fut accompli (ce qu’aucun homme ne pourrait faire), en pleine possession de toute sa force et après avoir crié d’une forte voix.
Lorsque ce cri, cri de victoire et non d’agonie, retentit, «le voile du temple se déchira en deux, depuis le haut jusqu’en bas ; et la terre trembla, et les rochers se fendirent, et les sépulcres s’ouvrirent». Le premier acte qui suivit la mort de Christ fut que le voile du temple se déchira. Dieu montrait ainsi que le pécheur lavé de ses péchés avait le droit d’entrer dans sa bienheureuse présence, dont le voile le séparait. Dieu pouvait librement satisfaire le désir éternel de son cœur qui voulait des hommes sauvés et parfaits devant lui. Le chemin des lieux saints manifesté, les adorateurs, rendus parfaits à perpétuité, pouvaient entrer librement dans la présence du Dieu trois fois saint (Héb. 9:8 ; 10:19).
Le second acte qui suivit la mort de Jésus fut la manifestation de la puissance victorieuse de la mort : la terre trembla, les rochers se fendirent et les sépulcres s’ouvrirent. Ainsi l’homme sortait de la puissance de la mort et ressuscitait, capable d’entrer devant Dieu. Vérités merveilleuses que nous indiquent ces faits ! Mais rien ne pouvait se réaliser pour l’homme avant que Christ ne soit ressuscité d’entre les morts. C’est pourquoi il est dit que «beaucoup de corps des saints endormis ressuscitèrent, et étant sortis des sépulcres après sa résurrection, ils entrèrent dans la sainte ville, et apparurent à plusieurs». Ils ne pouvaient sortir auparavant.
«Le centurion et ceux qui avec lui veillaient sur Jésus, ayant vu le tremblement de terre et ce qui venait d’arriver, eurent une fort grande peur, disant : Certainement celui-ci était Fils de Dieu». La mort d’un tel homme, en pleine possession de sa force et les événements qui la suivirent, étaient propres à arracher ce témoignage à un païen, mais ils laissaient les chefs des Juifs indifférents et incrédules.
Un certain nombre de femmes qui avaient suivi Jésus depuis la Galilée en le servant, regardaient de loin et furent témoins de ce qui arriva. Parmi elles se trouvaient Marie de Magdala et Marie, la mère de Jacques et de Joses, ainsi que la mère des fils de Zébédée.
En Ésaïe 53:9, il est dit : «On lui donna son sépulcre avec les méchants ; mais il a été avec le riche dans sa mort». Aussi, pour l’accomplissement de cette prophétie, un homme riche, Joseph d’Arimathée, disciple de Jésus, demanda à Pilate le corps du Seigneur. Pilate ayant donné l’ordre que le corps lui soit livré, il l’enveloppa d’un linceul net, et le mit dans son sépulcre neuf taillé dans le roc ; puis il roula une grande pierre contre la porte et s’en alla. Les femmes qui avaient suivi Jésus de la Galilée, restaient assises vis-à-vis du sépulcre. Leur attachement au Seigneur est bien touchant ; il leur faisait vaincre toute crainte, pour voir jusqu’au bout ce qui en adviendrait de leur Seigneur, les disciples demeuraient à distance ; l’amour pour Jésus fait faire des choses qui le réjouissent. Mais que de pensées devaient s’élever dans leurs cœurs ! Elles avaient suivi et servi leur Seigneur, avaient été témoins et objets de sa puissance et de sa grâce ; l’une d’elle fut délivrée de sept démons (Marc 16:9). Elles assistaient à la fin douloureuse d’une vie d’activité merveilleuse. Celui qui l’avait accomplie, auquel elles avaient cru comme au Messie, qui devait amener la bénédiction sur la nation, était là inanimé, couché dans un sépulcre ; tout semblait terminé pour elles. En effet, c’était, pour Dieu, la fin de l’homme perdu et pécheur, la fin du temps pendant lequel il avait réclamé, mais en vain, à un tel homme l’accomplissement de la loi, la fin du peuple juif selon la chair. Mais ces femmes n’en savaient rien. Cependant, trois jours après, elles entrèrent, par la résurrection du Seigneur, dans un commencement nouveau et éternel ; elles furent témoins de la résurrection du vainqueur de la mort le matin du premier jour de la semaine, premier jour du christianisme. Comme le Seigneur l’avait dit aux disciples, leur tristesse fut changée en joie (Jean 16:20).
Jésus fut crucifié le jour de la Pâque, quoique les Juifs l’aient désiré autrement ; il s’appelait la Préparation parce qu’on se préparait à fêter le sabbat qui avait lieu le lendemain. Cette année-là, la Pâque tombait sur un vendredi ; c’est donc le sabbat qui est appelé (v. 62) le lendemain, qui est après la Préparation, et que le Seigneur passa tout entier dans le sépulcre. Les principaux sacrificateurs et les pharisiens s’assemblèrent auprès de Pilate ce jour-là et lui dirent : «Seigneur, il nous souvient que ce séducteur, pendant qu’il était encore en vie, disait : Après trois jours, je ressuscite. Ordonne donc que le sépulcre soit gardé avec soin jusqu’au troisième jour ; de peur que ses disciples ne viennent et ne le dérobent, et ne disent au peuple : Il est ressuscité des morts ; et ce dernier égarement sera pire que le premier. Et Pilate leur dit : Vous avez une garde, allez, rendez-le sûr comme vous l’entendez». Comme tous les incrédules, les chefs des Juifs redoutent de voir se confirmer ce qu’ils prétendent ne pas croire. Aussi ils veulent prévenir tout ce qui pourrait faire croire à la résurrection de Jésus. Mais leurs précautions n’ont servi qu’à leur donner la preuve de cette résurrection, comme nous le verrons au chapitre suivant, car les gardiens qu’ils placèrent au sépulcre s’enfuirent effrayés à la vue de l’ange qui roula la pierre, pour que les femmes pussent constater la résurrection de Jésus.
L’ennemi avait intérêt à empêcher la divulgation de la résurrection, ce fait d’une importance capitale, fondement de l’Évangile. Si Jésus n’était pas ressuscité, sa mort, qui était la fin de l’homme en Adam, le jugement de Dieu, aurait clôturé la triste histoire du pécheur et tout serait fini par là. Mais cela ne se pouvait pas. Celui qui était entré dans la mort était le Fils du Dieu vivant, le Prince de la vie ; elle ne pouvait le retenir. Il avait dit : «À cause de ceci le Père m’aime, c’est que moi je laisse ma vie, afin que je la reprenne» (Jean 10:17). Il l’a reprise et, en la reprenant, il a introduit dans la vie tous ceux pour lesquels il est mort. Il a ainsi remporté la victoire sur la mort et toutes les promesses de Dieu pourront s’accomplir. C’est pourquoi les apôtres rendaient témoignage, avec une grande puissance, de la résurrection de Jésus, d’entre les morts (Actes 4:33. Voir aussi Actes 1:22 ; 2:24, 31, 3:15, 4:2 et 10 ; 5:30, etc).. L’apôtre Paul dit : «Si Christ n’a pas été ressuscité, votre foi est vaine, vous êtes encore dans vos péchés» (1 Cor. 15:17). On comprend que l’ennemi, qui n’avait pu détourner Jésus du chemin de l’obéissance, ait fait tous ses efforts pour empêcher le témoignage rendu à sa résurrection. Il fait toujours une œuvre trompeuse, ainsi que ceux qui l’écoutent, mais Dieu accomplit son œuvre de grâce pour la délivrance des pécheurs.
Les femmes qui avaient été témoins de l’ensevelissement de Jésus se tinrent en repos le jour du sabbat, selon la loi ; mais, préoccupées de la personne de leur Seigneur et des soins qu’elles voulaient apporter à son précieux corps, Marie de Magdala et l’autre Marie, la mère de Jacques et de Joses (Marc 15:40, 47 et 16:1), se rendirent au sépulcre, le jour du sabbat, au crépuscule du premier jour de la semaine (*). Cette visite leur fit constater qu’il n’y avait rien de changé depuis la veille, et elles attendirent le matin pour embaumer le corps de Jésus.
(*) Les Juifs comptaient le jour d’un coucher de soleil à l’autre, donc du soir au lendemain soir (voir Lévitique 23:32).
Les versets 2 à 4 nous disent ce qui se passa pendant la nuit. «Il se fit un grand tremblement de terre ; car un ange du Seigneur, descendant du ciel, vint et roula la pierre, et s’assit sur elle. Et son aspect était comme un éclair, et son vêtement blanc comme la neige. Et de la frayeur qu’ils en eurent, les gardiens tremblèrent et devinrent comme morts». Matthieu seul raconte l’ouverture du sépulcre par l’ange ; dans les autres évangiles, lorsque les femmes arrivent, elles trouvent le tombeau ouvert et vide. Mais Matthieu est seul à parler des précautions prises par les Juifs, afin que l’on ne puisse pas dire que Jésus était ressuscité. Dieu a permis que les Juifs fassent garder le sépulcre pour leur donner, par leurs propres gardes, le témoignage irrécusable de la résurrection de son Fils et leur montrer ainsi leur folie. Cependant (v. 11 à 15) les chefs poursuivaient leur pensée, car, après le rapport des gardes, qui rendait évidente la résurrection de Jésus, ils s’assemblèrent et donnèrent une bonne somme d’argent aux soldats, afin qu’ils dissent que ses disciples étaient venus de nuit et avaient dérobé le corps du Seigneur pendant qu’ils dormaient. Aujourd’hui encore les Juifs donnent créance à ce récit.
Nous voyons en cela que l’incrédulité résulte de la volonté perverse de l’homme. On est incrédule parce qu’on ne veut pas croire ; beaucoup disent qu’ils ne le peuvent pas, mais le fait est qu’ils ne veulent pas ; le cœur naturel n’aime pas à croire les choses telles que Dieu les dit, quoique l’incrédule ne veuille pas se l’avouer ; car si l’homme coupable envers Dieu croit ce que Dieu dit, il est trouvé en défaut et condamné. Voulant, dans son orgueil, éviter ce reproche, il demeure dans son incrédulité, tandis que, s’il accepte ce que Dieu dit de lui, il est sur le chemin du salut.
En effet, dans le jour de la grâce, la même Parole, qui présente l’état de l’homme pécheur et perdu, présente aussi le moyen de salut. Le Seigneur avait dû dire aux Juifs : «Vous ne voulez pas venir à moi pour avoir la vie» (Jean 5:40). Devant le sanhédrin, lorsque les chefs lui demandent s’il est le Christ, Jésus répond : «Si je vous le disais, vous ne le croiriez point» (Luc 22:67). Ainsi ils demeurèrent dans leur incrédulité et par conséquent sous le jugement (voir Jean 3:18 et 8:24) ; telle sera la part de quiconque ne croira pas.
Arrivées au sépulcre, les femmes trouvèrent l’ange qui avait roulé la pierre. Elles aussi eurent peur en le voyant (Luc 24:5), mais l’ange leur dit : «Pour vous, n’ayez point de peur ; car je sais que vous cherchez Jésus le crucifié». Ceux qui aiment le Seigneur et le recherchent ici-bas n’ont rien à craindre ; aujourd’hui comme alors, le monde peut être contre eux, mais ils sont du côté de Dieu au sujet de son Fils, et les anges sont des esprits administrateurs qui servent en leur faveur (Héb. 1:14). Quelle paix cela donne au cœur d’avoir pour objet le Seigneur Jésus, surtout comme nous pouvons le connaître aujourd’hui, comme ces saintes femmes le connurent bientôt, un Christ ressuscité qui a vaincu la mort et a délivré ainsi «tous ceux qui, par la crainte de la mort, étaient, pendant toute leur vie, assujettis à la servitude», puisqu’il a rendu «impuissant celui qui avait le pouvoir de la mort, c’est-à-dire le diable» (voir Hébreux 2:14-16). Pour l’incrédule, pour celui qui veut avoir sa part avec le monde qui a rejeté Christ, il n’y a que crainte. «Il n’y a pas de paix, dit l’Éternel, pour les méchants» (Ésaïe 48:22).
L’ange confirme aux femmes, en ces termes, ce que Jésus avait dit touchant sa résurrection. «Il n’est pas ici ; car il est ressuscité, comme il l’avait dit». Elles étaient ignorantes ; leur foi en lui comme Messie vivant sur la terre avait rendu obscures les vérités concernant son rejet, vérités qui devaient les introduire dans des bénédictions plus grandes que celles que le Messie aurait apportées, s’il avait été reçu ici-bas. Mais leur attachement à sa personne leur ouvrait l’intelligence à son égard et les introduisait dans les bénédictions qui découlaient de sa mort. «Qui cherche trouve», avait dit Jésus. Si l’on cherche le Seigneur, il se révèle à l’âme d’une manière qui dépasse toujours ce qu’elle est capable de désirer de lui. Rappelons-nous que le vrai chemin de l’intelligence spirituelle est l’amour pour Christ. De celui qui aime le Seigneur et qui montre cet amour par l’obéissance, il dit : «Et moi je l’aimerai, et je me manifesterai à lui» (Jean 14:21). C’est ce qui eut lieu pour ces femmes. L’ange ajoute : «Venez, voyez le lieu où le Seigneur gisait ; et allez promptement, et dites à ses disciples qu’il est ressuscité des morts. Et voici, il s’en va devant vous en Galilée : là vous le verrez ; voici, je vous l’ai dit». Heureuse nouvelle ! Au lieu d’embaumer le corps de Jésus, elles allaient le voir vivant. Puis, comme il arrive toujours lorsque le cœur reçoit des vérités qui le réjouissent, on ne peut les garder pour soi et l’on devient un moyen de porter la joie et la bénédiction à d’autres. «Et sortant promptement du sépulcre avec crainte et une grande joie, elles coururent l’annoncer à ses disciples». Chemin faisant, elles virent Jésus venir lui-même au-devant d’elles en disant : «Je vous salue. Et elles, s’approchant de lui, saisirent ses pieds et lui rendirent hommage». Il y a toujours à gagner d’obéir à la Parole en ayant le Seigneur comme objet de son cœur. Comme il l’a dit, il se révèle lui-même. Quelle joie pour ces femmes de retrouver vivant celui qu’elles étaient venues chercher parmi les morts ! Quelle joie pour tous les croyants, lorsque nous le verrons dans sa beauté ! Puissions-nous tous désirer toujours plus ardemment ce glorieux et prochain moment, afin de jouir de lui mieux que nous ne le faisons ici-bas ! Pour que ce désir soit plus vivant, nous devons le rechercher actuellement dans une plus grande mesure, car, pour souhaiter de voir une personne, il faut la connaître au préalable.
Jésus renouvelle aux femmes le message dont l’ange les avait chargées, en ajoutant ce qui caractérise le récit dans l’évangile selon Jean (chap. 20:17), un titre précieux pour les siens. L’ange avait dit : «Dites à ses disciples», et Jésus leur dit : «Allez annoncer à mes frères qu’ils aillent en Galilée, et là ils me verront». En vertu de la mort de Christ, qui a mis fin à tout ce qui caractérisait l’homme en Adam, pécheur et perdu, le croyant est placé dans une position nouvelle, celle de Christ ressuscité, il est un avec lui, comme il est dit en Hébreux 2:11 : «Il n’a pas honte de les appeler frères», car ceux qu’il a sanctifiés sont dans la même relation que lui avec son Dieu et son Père, qu’il appelle, dans l’évangile selon Jean, «votre Dieu et votre Père».
Dans le message de l’ange aux femmes, comme dans celui du Seigneur, nous trouvons la réponse à un besoin réel, celui de voir le Seigneur, besoin que l’Esprit de Dieu reconnaît chez tout croyant ; c’est pourquoi il est dit les deux fois : «Là vous le verrez». Pour répondre à ce besoin des disciples, témoins de l’ascension du Seigneur, deux anges sont envoyés afin de leur dire : «Ce Jésus, qui a été élevé d’avec vous dans le ciel, viendra de la même manière» (Actes 1:11). Beaucoup de passages annoncent cette venue, non pour dire seulement que nous quitterons les misères de cette terre, mais afin que nous soyons avec le Seigneur. L’apôtre Paul termine la révélation de la venue de Christ pour enlever les siens en disant : «Et ainsi nous serons toujours avec le Seigneur» (1 Thessaloniciens 4:17). Mais, chers lecteurs qui aimez le Seigneur, en attendant le glorieux moment où nous le verrons tel qu’il est et lui serons rendus semblables, nous avons le privilège de le voir par la foi, présent au milieu des saints réunis en son nom sur cette terre. C’est ce dont jouirent les disciples auxquels les femmes transmirent le message du Seigneur. «Et les onze disciples s’en allèrent en Galilée, sur la montagne où Jésus leur avait ordonné de se rendre. Et l’ayant vu, ils lui rendirent hommage». Il leur «avait ordonné», est-il dit ; la parole du Seigneur fait autorité pour le croyant. Sa pensée, une fois connue, devient un ordre et chacune de ses paroles un commandement. Les disciples obéirent et virent le Seigneur alors sur la terre ; mais nous avons ce même privilège dans ce temps où le Seigneur est absent corporellement. Il nous invite lui-même en disant : «Là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis là au milieu d’eux» (Matthieu 18:20). C’est un grand privilège de pouvoir répondre au désir exprimé par celui qui est mort non seulement pour nous soustraire au jugement de Dieu, mais aussi pour rassembler en un les enfants de Dieu dispersés. Rien n’a plus de force que l’autorité de l’amour qui nous invite à nous rencontrer avec Jésus sur cette terre, en attendant de le faire dans le ciel. Comment pourrions-nous désirer son retour pour être avec lui, et négliger le rassemblement des croyants autour de sa personne ici-bas ? Tous ceux qui répondent au désir exprimé par le Seigneur en se rencontrant là où il a dit qu’il serait, remportent une joie et une bénédiction pour leur âme infiniment plus grandes que ceux qui se réunissent simplement pour entendre un exposé de la Parole ou un discours par tel ou tel frère ou prédicateur de leur choix ; car se réunir dans ce but, c’est préférer le serviteur au Maître. Sans doute, le Maître peut se servir d’un frère pour faire éprouver de la bénédiction, mais cette bénédiction se réalisera surtout par ceux qui seront venus chercher premièrement la présence du Seigneur par obéissance à sa Parole et pour répondre au désir de son cœur.
Dans le message adressé aux disciples, on trouve un principe important à retenir quant au lieu où l’on voit le Seigneur ; pour les disciples, c’était en Galilée. Pourquoi n’était-ce pas au temple à Jérusalem, l’endroit où l’Éternel avait mis son nom et d’où la bénédiction devait se répandre et se répandra sur toute la terre ? La présence de l’Éternel n’était plus dans ce qu’il avait appelé autrefois sa maison ; il avait été rejeté dans la personne de Jésus. Un nouvel ordre de choses est introduit, ordre de choses célestes quoique se passant ici-bas et dont Christ rejeté et méprisé est le centre. Ceux qui suivent Christ en obéissant à sa parole le cherchent là où il leur ordonne de se rendre. C’est tout ce qu’il leur faut. Ils participent au mépris jeté sur son nom par le monde qui veut sa religion à lui, sans se conformer aux commandements du Seigneur. Les Juifs de Judée dédaignaient la Galilée, mais, selon cet évangile, le Seigneur s’y retira, lorsqu’il eut appris que Jean le Baptiseur avait été jeté en prison, et c’est là que s’accomplit la plus grande partie de son ministère.
Souvenons-nous que le mépris du monde accompagnera toujours la fidélité au Seigneur, mais l’opprobre de Christ est plus glorieux que tout ce que l’homme peut estimer.
Le récit de la résurrection correspond au caractère de tout l’évangile selon Matthieu, dans lequel Jésus est présenté comme Messie. Après avoir vécu surtout parmi les pauvres Galiléens, il se retrouve, après sa mort, au milieu de ceux qui l’ont reçu. Là, il leur donne des ordres, non pour Israël, mais pour toutes les nations, afin de les faire disciples en les introduisant par le baptême chrétien sur le terrain où son autorité est reconnue, pour qu’ils se conforment aux enseignements qu’il avait donnés aux siens. Le baptême se fait au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit, pleine révélation de Dieu en grâce, en contraste avec l’Éternel, le Dieu d’Israël. Selon cette révélation, la bénédiction s’étend au-delà des limites d’Israël. Jésus leur dit qu’il sera avec eux — Emmanuel, Dieu avec nous (voir chap. 1:23) — jusqu’à la consommation du siècle, c’est-à-dire jusqu’au moment où il établira son royaume en gloire.
L’ascension du Seigneur n’est pas mentionnée dans cet évangile, parce que l’Esprit de Dieu présente Jésus prenant place au milieu de ses disciples sur la terre, comme résidu de son peuple qu’il envoie dans le monde entier. Il leur promet sa présence avec eux jusqu’à la fin, puisqu’il a reçu toute autorité dans les cieux et sur la terre.
On voit, dans ces dernières paroles du Seigneur, que sa fidélité demeure envers les siens. Au commencement de l’Évangile, il s’était présenté à son peuple comme Emmanuel, «Dieu avec nous», mais le peuple l’ayant rejeté, il est encore Emmanuel pour ceux qui l’ont reçu, jusqu’au moment où le peuple le reconnaîtra. Aussi tous ceux qui ont cru en lui peuvent compter aujourd’hui sur cette promesse jusqu’à la fin.
Puissent tous les croyants éprouver le besoin de réaliser cette précieuse promesse et en faire l’encourageante expérience, à la gloire de Celui qui les a tant aimés !