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Allusions à l’Ancien Testament dans 1 Pierre

 

Hardt Michael

Truth and Testimony, 2019-2 p56

 

1        [Épitre de Pierre : correspondances entre l’Ancien et le Nouveau Testament]

2        [Quelques notions principales]

2.1      Étrangers — 1:1

2.2      Élus — 1:2

2.3      L’aspersion du sang — 1:2

2.4      L’héritage — 1:4

2.5      Le sang de l’Agneau — 1:18-20

2.6      La sacrificature et la nation — 2:4-10

 

 

1        [Épitre de Pierre : correspondances entre l’Ancien et le Nouveau Testament]

Dans sa première épître, Pierre utilise abondamment les Écritures de l’Ancien Testament d’au moins trois façons :

●         par des citations de l’Ancien Testament ;

●         par des allusions à des passages de l’Ancien Testament ;

●         par l’utilisation de notions empruntées à l’Ancien Testament (sans référence spécifique à des passages particuliers).

 

Dans de nombreux cas, les citations ne sont pas explicitement présentées comme telles (par exemple «comme dit Ésaïe»), mais simplement en admettant que les lecteurs reconnaîtraient immédiatement tel passage de l’Écriture. Cela ne posait pas de problème, car les destinataires de cette lettre étaient d’origine juive : ils faisaient partie de la «dispersion» (1 Pierre 1:1) ou «diaspora» — un terme connu pour désigner les Juifs dispersés parmi les nations (voir Jean 7:35, qui est la première référence à ce terme dans le Nouveau Testament). Cela correspondait tout à fait à la mission de Pierre en tant qu’apôtre de la circoncision ou des Juifs (Gal. 2:7, 8).

Le tableau ci-dessous fournit une liste de passages de l’épître, les passages correspondants de l’Ancien Testament, cités soit directement soit par allusion, ainsi que les phrases ou expressions clés correspondantes. Sur les 22 exemples présentés, la plupart sont des citations directes, et le reste des allusions. Par comparaison, Paul, dans sa première épître aux Thessaloniciens (issus pour la plupart d’un milieu païen), n’utilise pratiquement aucune allusion (*) ou citation de l’Ancien Testament.

 

(*) 1 Thes 5:8 peut être considéré comme une allusion à Ésaïe 59 :17, mais la connaissance de l’Ancien Testament n’est pas nécessaire pour saisir ce que Paul veut dire.

 

1 Pierre

Référence de l’AT

Phrase ou expression clé

1

1:16

Lév. 11:44 (cf. 20:7)

Soyez saints, car Moi Je suis saint

2

1:17

Deut. 1:17 ; 16:19

Sans acception (ou sans considération) de personnes

3

1:24,25

És. 40:6-8

Toute chair est comme de l’herbe

4

2:3

Ps. 34:8-9

Avoir goûté que le Seigneur est bon

5

2:4

Ps. 118:22

Une pierre, rejetée par les hommes

6

2:6

És. 28:16

Une maitresse pierre de coin en Sion

7

2:7

Ps. 118:22, 23

Pierre rejetée par ceux qui bâtissaient

8

2:9

Ex. 19:5,6 (cf Deut. 10:15)

Une race élue, une sacrificature royale, une nation sainte, un peuple acquis

9

2:9

És. 43:21

Pour que vous annonciez les vertus (les excellences)

10

2:10

Os. 2:23

Qui autrefois n’étiez pas un peuple (Lo-ammi), mais qui maintenant êtes le peuple de Dieu ; qui n’aviez pas obtenu miséricorde (Lo-rukhamah), mais qui maintenant avez trouvé miséricorde

11

2:17

Prov. 24:21

Craignez Dieu, honorez le roi

12

2:22

És. 53:9

Pas de fraude dans Sa bouche

13

2:24

És. 53:5

Par les meurtrissures duquel vous avez été guéri

14

2:24

És. 53:12

Qui a porté nos péchés

15

3:6

Gen. 18:12

L’appelant seigneur (Abraham)

16

3:10-12

Ps. 34:12-16

Car celui qui veut aimer la vie et voir d’heureux jours, qu’il garde sa langue de mal

17

3:14, 15

És. 8:12, 13

Ne craignez pas leurs craintes… mais sanctifiez le Seigneur… dans vos cœurs

18

3:20

Gen. 6:3, 12, 13

Les jours de Noé, tandis que l’arche se construisait

19

4:8

Prov. 10:12

L’amour couvre une multitude de péchés

20

4:18

Prov. 11:31

Le juste… l’impie

21

5:5

Prov. 3:34

Dieu résiste aux orgueilleux

22

5:7

Ps. 55:23

Rejetant sur Lui tout votre souci

 

Il serait très intéressant d’examiner chacune de ces citations, leur contexte respectif dans l’Ancien Testament et les différences entre le texte de l’Ancien Testament et leur citation dans le Nouveau Testament, mais nous nous contenterons ici de commenter brièvement quelques notions principales que Pierre emprunte à l’Ancien Testament.

 

2        [Quelques notions principales]

2.1        Étrangers — 1:1

Dans le premier verset, les destinataires de l’épître sont appelés des gens qui «séjournent» parmi les nations, autrement dit «des étrangers». Ils étaient étrangers de deux manières :

●         d’une part, ils étaient dispersés — principalement par la persécution — de la terre d’Israël vers le centre et le nord de ce qui est aujourd’hui la Turquie ;

●         d’autre part, devenus chrétiens, ils étaient loin du ciel, leur véritable domicile.

 

Au cours de l’épitre, deux termes différents sont utilisés en rapport avec leur statut d’étrangers :

●         Parepidemos : ce terme s’applique à un visiteur qui passe peu de temps dans le lieu en question (1:1 ; 2:11), autrement dit quelqu’un qui fait juste un séjour. La seule autre utilisation de ce mot dans le Nouveau Testament est en Hébreux 11:13 : «Tous ceux-là sont morts dans la foi, sans avoir reçu les promesses, mais les ayant vues de loin et saluées, et ayant confessé qu’ils étaient étrangers et forains (des gens qui séjournent) sur la terre». Les destinataires de l’épitre de Pierre avaient donc ceci en commun avec leurs ancêtres : ils étaient des étrangers, des gens qui séjournent.

●         Paroikos (2,11) : un étranger résident ; le substantif correspondant paroikia se rapporte à un mode de vie (1:17). La seule autre occurrence de ce mot dans le Nouveau Testament se trouve en Actes 13:17, où il se rapporte au séjour des Israélites en Égypte.

 

Il est touchant de considérer ce qu’impliquent ces deux termes :

●         l’un nous rappelle que, en tant que chrétiens, nous ne sommes ici-bas que pour peu de temps. Pourquoi alors agissons-nous souvent comme si la terre devait être notre demeure pour des siècles ?

●         l’autre nous dit que le monde dans lequel nous sommes n’est pas notre vrai « chez soi ». Nous y avons des devoirs et des responsabilités, mais nous n’y sommes pas chez nous.

 

Les destinataires de cette épître souffraient, et étaient certainement très attentifs à ce fait d’être juste « en séjour », des « étrangers », et les exemples de l’Ancien Testament devaient les rassurer. En effet, les patriarches avaient vécu comme des gens « en séjour », et ils attendaient patiemment ; Israël est resté en Égypte, où ils n’avaient pas leur place, mais Dieu les a finalement délivrés.

 

2.2        Élus — 1:2

En tant qu’Israélites, ils étaient familiarisés avec la notion d’élection ; ils étaient habitués à être le peuple élu de Dieu (Deut. 7:6). Et ils devaient avoir compris que l’élection n’était pas basée sur quelque mérite, mais sur la souveraineté divine : «Ce n’est pas parce que vous étiez plus nombreux que tous les peuples que l’Éternel s’est attaché à vous et vous a choisis, car vous êtes le plus petit de tous les peuples ; mais c’est parce que l’Éternel vous a aimés...» (Deut. 7:7, 8). Maintenant, en tant que chrétiens, ils avaient été choisis dans un sens bien plus élevé :

●         avant la fondation du monde

●         pour la possession de toute bénédiction spirituelle (Éph. 1:3, 4)

●         pour un héritage céleste (voir ci-dessous).

 

Dieu les avait connus à l’avance (il ne s’agit pas d’une préconnaissance d’actions, mais de personnes) et les avait choisis dans Son amour souverain.

 

2.3        L’aspersion du sang — 1:2

Au v. 2, Pierre qualifie les destinataires de la lettre d’«élus selon la préconnaissance de Dieu le Père, en sainteté de l’Esprit, pour l’obéissance et l’aspersion du sang de Jésus-Christ». Ils avaient été choisis par Dieu, le Père, et une œuvre divine avait été accomplie en eux par le fait de la nouvelle naissance, effectuée par le Saint-Esprit (« en sainteté » ou « par la sanctification de l’Esprit»), afin que leur vie soit marquée par l’obéissance.

Mais pourquoi est-il dit : «et l’aspersion du sang de Jésus-Christ» ? — Les lecteurs d’origine juive comprenaient l’allusion à la première alliance, lorsque Moïse aspergea de sang l’autel, le livre de l’alliance, le tabernacle, les ustensiles et même le peuple (Ex. 24:6-8, Héb. 9:19, 21). Le message était clair : obéissez à la loi, sinon vous êtes coupable et la peine de mort s’appliquera. Il s’agissait de l’obéissance légale. Ce qui est ajouté ici, heureusement et merveilleusement, c’est que l’aspersion est celle du sang «de Jésus-Christ». Cela change tout. Nous avons été sanctifiés (c’est notre position) en vue de :

●         pratiquer, non pas une obéissance légale, mais l’obéissance de Christ, c’est-à-dire l’obéissance de cœur ;

●         connaître l’efficacité du sang de Christ.

 

2.4        L’héritage — 1:4

Aux v. 3 et 4, nous trouvons une doxologie : «Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ, qui, selon Sa grande miséricorde, nous a régénérés pour une espérance vivante par la résurrection de Jésus Christ d’entre les morts, pour un héritage incorruptible, sans tache et sans flétrissure, conservé dans les cieux pour vous». Tout Israélite savait ce que c’était d’avoir un héritage. Sur le plan national, leur héritage était le pays de Canaan (Nombres 26:53). Ils avaient reçu cet héritage (Josué 11:23), mais, hélas, par la suite, l’héritage a été corrompu (n’étant plus que l’ombre de ce qu’il aurait dû être : voir Josué 1:4), souillé (par l’idolâtrie : Jérémie 2:7 ; Ézéchiel 36:17, 18) et perdu (d’abord au moment de la captivité, puis en 70 ap. J.-C., peu après la rédaction de cette épitre). Leur héritage chrétien était tout le contraire : incorruptible, sans tache et inflétrissable». (*)

 

(*) Notre héritage n’est pas toujours vu de la même manière. En Éphésiens il a à faire avec Christ partageant Son royaume universel avec nous (1:14, 18, 22), tandis que Pierre le considère comme « conservé dans les cieux ».

 

2.5        Le sang de l’Agneau — 1:18-20

Un peu plus loin, Pierre exhorte ses frères à marcher dans la crainte (non pas dans l’anxiété, mais dans la crainte de déshonorer le Seigneur), sachant qu’ils avaient été rachetés par le «sang précieux de Christ, comme d’un agneau sans défaut et sans tache». L’immensité du prix payé réclamait la totalité de leurs vies et de leurs affections. En tant que Juifs, ils savaient bien comment leurs ancêtres avaient été rachetés de l’Égypte. Un agneau devait être immolé et le sang devait être appliqué sur les montants et les linteaux de leurs portes s’ils voulaient être à l’abri du juste jugement (Exode 12). Il en résultait un droit sur ceux qui avaient été rachetés, en particulier les premiers-nés, qui devaient être sanctifiés (Exode 13). Mais l’agneau de la Pâque en Égypte n’était qu’une faible préfiguration de l’Agneau préconnu dès avant la fondation du monde (1 Pierre 1:20).

 

2.6        La sacrificature et la nation — 2:4-10

Dans cette section, Pierre utilise un ensemble d’expressions tirées de l’Ancien Testament. En tant qu’(anciens) juifs, les lecteurs devaient facilement saisir ces notions :

1) En tant que «sainte sacrificature» (2:5), ils se trouvaient dans une position privilégiée — en Israël, le droit de s’approcher de Dieu dans le sanctuaire était restreint à une seule famille, celle d’Aaron.

2) Ils devaient offrir, non pas des sacrifices matériels, mais des «sacrifices spirituels», dont l’acceptation par Dieu était garantie «par Jésus-Christ».

3) Non seulement ils avaient accès à la demeure de Dieu, mais en tant que «pierres vivantes», ils en faisaient partie (2:5).

4) Ils avaient appris à connaître le Christ comme la « maitresse pierre du coin » (ou «pierre d’angle» ; 2:6). Ayant mis leur confiance en Lui, ils n’avaient pas à avoir honte. En un sens, ils avaient anticipé la situation du Résidu futur qui se réfugiera auprès de Christ et Le connaîtra comme une précieuse maitresse pierre de coin (pierre d’angle) en Sion, le point de ralliement pour ceux qui croiront au temps de détresse où l’Assyrien («le fléau qui inonde») envahira le pays et où tout espoir semblera perdu (Ésaïe 28:15-17).

5) Ils connaissaient encore Christ comme la pierre rejetée par ceux qui bâtissaient (2:7), mais qui recevrait la place prééminente (Ps. 118:22 ; Matt. 21:42).

6) Cette même personne sera une « pierre d’achoppement, un rocher de chute» (2:8) pour ceux qui ne croient pas en Lui (Ésaïe 8:14).

7) Ils étaient aussi une «sacrificature royale» (2:9), ce que les fils d’Aaron n’avaient jamais été. Seul Melchisédech avait été un sacrificateur royal, préfigurant le vrai Melchisédech qui sera «sacrificateur sur son trône» (Zach. 6:12, 13). En tant que sacrificateurs royaux, ils devaient montrer les qualités de Christ.

8) En tant que Juifs, ils avaient été «Lo-ammi», c'est-à-dire «pas mon peuple» (1 Pierre 2:10). Cette sentence pesait sur Israël depuis plus de 600 ans déjà — et, jusqu’à aujourd’hui, elle n’a pas été révoquée. Les Juifs ressentaient avec acuité ce que c’était d’avoir perdu leur position unique en tant que peuple de Dieu. Ceux d’entre eux qui avaient mis désormais leur confiance en Christ, n’avaient pas pris la place d’Israël. Par exemple, ils n’avaient pas de privilèges ni de patrie terrestres, mais ils demeuraient comme étrangers (2:11). Ils formaient plutôt un peuple nouveau (avec des bénédictions célestes) et avaient effectivement «trouvé miséricorde» (2:10) — alors qu’Israël, au niveau national, attend toujours de recevoir miséricorde dans un jour futur (Osée 2:23).

 

On pourrait ajouter un certain nombre d’autres citations, allusions ou notions de l’Ancien Testament (tels que la garde d’un troupeau, 1 Pierre 5:1-4), qui rappellent de nombreuses passages de l’Ancien Testament tels qu’Ézéchiel 34, Psaume 23:1, Zacharie 11:4 et 13,7. Nous espérons que ceux qui ont été mentionnés ci-dessus aideront le lecteur à approfondir ce fil directeur. Une bonne compréhension des notions de l’Ancien Testament aidera grandement à tirer pleinement profit de cette épître intéressante.